L’enfant pris comme un archétype est une constante humaine qu’on représente de différentes façons... more L’enfant pris comme un archétype est une constante humaine qu’on représente de différentes façons à travers le temps et les cultures. Richard Millet, en se référant à l’enfant caché en lui, à ce « mythe de l’intériorité », tente de reconstruire son être intérieur à travers des mythographies rassemblées et coordonnées, afin d’éclaircir cette vérité ténébreuse des premières années de vie et de celles qui suivent la perte de l’enfance. L’objet de notre travail est de clarifier les voies de cette quête de l’enfance en recourant, tout d’abord, à la symbolique des lieux et du temps, la Corrèze et le Liban étant les lieux privilégiés de l’enfance de l’auteur et de ses personnages, vacillant tous entre le passé ou le premier âge et le présent de l’adulte. Ensuite, le mythe de l’enfance est interprété à travers l’imaginaire et les figures mythiques récurrentes : l’image de l’enfant dans la Bible et la tradition chrétienne, celle de la famille et celle du gouffre infernal et ténébreux dans le...
Héros-narrateurs l'un de L'École de la guerre, l'autre de La Main de Dieu, deux enfan... more Héros-narrateurs l'un de L'École de la guerre, l'autre de La Main de Dieu, deux enfants de confessions ennemies vivent, en 1975 dans des secteurs opposés de Beyrouth : Alexandre Najjar, chrétien, habite à l'est et Lila, musulmane, à l'ouest. Ils devraient traverser la même ligne de démarcation, et ainsi affronter leur confession et leurs frontières géographiques. Selon une approche mythocritique, l'article étudie la variation de trois mythes : le mythe identitaire, le mythe de la traversée et le mythe du retour.
Type de publication: Revue Directeurs d'ouvrage: Denooz (Laurence), Abi-Rached (Nehmetallah) Résu... more Type de publication: Revue Directeurs d'ouvrage: Denooz (Laurence), Abi-Rached (Nehmetallah) Résumé: La revue LiCArC (Littérature et culture arabes contemporaines) est destinée aux chercheurs et aux amateurs de la littérature arabe moderne et contemporaine (prose, poésie et traduction).
Cette vision pessimiste de l'auteur de Ma Vie parmi les ombres sur la fin de la première enfance ... more Cette vision pessimiste de l'auteur de Ma Vie parmi les ombres sur la fin de la première enfance liée intimement au mythe origenel du christianisme, « l'expulsion du paradis », ainsi qu'à « la chute dans le temps 1 » représentée par la mort lente, continue et infinie de l'être, modèle une grande partie de son oeuvre. Le mythe de l'enfance dans l'oeuvre de Richard Millet est un projet représentatif du « paysage intérieur » de l'être : les images et les figures qui hantent l'écriture de Millet se prêtent à une interprétation mythologique, celle de la reconstruction de l'être intérieur à travers des mythographies rassemblées et coordonnées afin de former un ensemble qui fait sens dans l'histoire du XXIe siècle. Le mythe, sur un plan général, « est d'abord une histoire et se présente sous la forme d'un récit 2 ». Appliqué à l'enfance, le mythe se réduit à une image archétypale. L'auteur se sert, volontairement ou non, de cette image primitive de l'enfance (recourant à la tradition chrétienne ou à des représentations littéraires de l'enfance) pour construire ses écrits narratifs. En suivant les fils mythologiques et psychologiques abrités derrière les variations d'images dans l'oeuvre de Millet, et censés clarifier les voies de la quête de l'enfance, nous proposons, dans notre étude, un cheminement à travers quatre grands axes qui seront interprétés dans plusieurs oeuvres de l'auteur. Les oeuvres qui serviront de corpus pour notre travail seront principalement : Ma vie parmi les ombres, La Gloire des Pythre, Le Cavalier siomois, Lauve le pur, La Voix d'alto, Le Renard dans le nom ainsi que d'autres oeuvres dont le sous-thème peut également évoquer l'enfance comme Le Goût des femmes laides, Dévorations, La Confession négative, Le Sommeil sur les cendres, Tarnac et La Fiancée libanaise. Dans la première partie « Deux espaces et deux temps », nous entamons notre étude en situant l'enfance dans son cadre spatio-temporel. L'enfance de l'auteur ainsi que celle d'un bon nombre de ses narrateurs et personnages se déroule en Corrèze, à Siom, alias Viam, village natal de Millet, qui constitue la toile de fond de sa « trilogie » corrézienne : La Gloire des Pythre, L'Amour des trois soeurs Piale et Lauve le pur, à laquelle il faudra ajouter Le Cavalier siomois, La Voix d'alto, Le Renard dans le nom, Le Goût des femmes laides, Dévorations, L'Art du bref, Le Sommeil sur les cendres et Tarnac. Siom forme aussi l'arrière-plan dominant du grand roman qui servira de base pour notre étude Ma Vie parmi les ombres. Il est le carrefour des souvenirs d'enfance de Pascal, aussi narrateur de La Confession négative et de La Fiancée libanaise : dans l'un, En conséquence, comme appui à notre analyse de l'espace et du temps dans les romans et récits de l'auteur, nous nous référerons principalement, dans la première partie de notre travail, à l'étude de Jean-Yves Laurichesse, L'invention du pays, sur l'espace « natal » (La Corrèze), l'espace « lointain » (le Liban) et l'espace « inventé » (Siom) de Richard Millet, ainsi qu'à La Poétique de l'espace et La Poétique de la rêverie de Gaston Bachelard. Le Roman des origenes et origenes du roman de Marthe Robert et quelques articles de l'Introduction aux méthodologies de l'imaginaire (dir. Joël Thomas) nous aideront à clarifier le rapport de l'enfant avec sa famille, lié directement à l'espace où ils se trouvent. Temps et récits de Paul Ricoeur et les OEuvres de Walter Benjamin seront un appui théorique pour l'étude du « temps réel » et du « temps imaginaire » chez l'enfant milletien. En outre, l'aspect mythique dominant dans la deuxième partie de notre étude, nous ramène particulièrement aux références concernant la tradition chrétienne et les récits bibliques comme l'Évangile, la Bible et Le Cantique des Cantiques d'une part, et des études sur les Allers et retours de l'enfant prodigue : l'enfant retourné de Marc Bochet, Les figures de l'errance de Dominique Berthet et Le Cordonnier de Jérusalem de Gaël Milin, d'autre part. Nous nous appuierons, de surcroît, sur des études de l'imaginaire et des mythes comme Littérature et Mythe de Marie-Catherine Huet-Brichard, Le Mythe et l'Homme de Roger Caillois, Le Sacré et le Profane et Les Aspects du mythe de Mircéa Éliade, Les Structures anthropologiques de l'imaginaire de Gilbert Durand, l'Introduction à l'essence de la mythologie de Karl Jung et Charles Kérényi, les Écrits de Lacan et les analyses de Bachelard sur L'Eau et les Rêves et La Terre et les Rêveries du repos, ainsi qu'à l'étude de Asma Chamly-Halwani sur « Lauve le pur ou l'horreur fétide de la nuit et de l'impur ». Des références sur la mort et la perte de l'enfance nous serviront d'appui dans la troisième partie, comme Les Vivants et les Morts (dir. Arlette Bouloumié), L'Ère du récit d'enfance (dir. Alain Schaffner), Le Récit d'enfance et ses modèles (dir. Anne Chevalier et Carole Dornier), les analyses de Benjamin, de Barthes, de Jung et de Levinas… Finalement, dans la dernière partie, nous aurons recours aux études de Claude-Gilbert Dubois sur « Les modes de classification des mythes », de Jacqueline de Romilly sur La Tragédie grecque, d'Éliade (op. cit.), de Marie-Catherine Huet-Brichard (op. cit.) et de Walter Benjamin (op. cit.) pour illustrer « la création du mythe », et de Vincent Colonna sur L'Autofiction et autres mythomanies littéraires, de Philippe Gasparini sur Chapitre premier : La Corrèze et le Liban, double enracinement La mythologie biblique a joint dans le chant du Cantique des Cantiques de l'Ancien testament, les deux terres qui forment l'espace écrit de Richard Millet, Sion et le Liban : Sortez et voyez, filles de Sion, le roi Salomon avec la couronne dont sa mère l'a couronné le jour de ses épousailles, le jour de la joie de son coeur. […] À moi, à moi, ma fiancée ! Viens à moi du Liban ; regarde-moi du haut de l'Amana, du sommet du Sanir et de l'Hermon, du fond de la caverne des lions, du haut des montagnes qu'habitent les léopards 1. La géographie vécue par l'auteur du Cavalier siomois et d'Un balcon à Beyrouth témoigne d'un enracinement singulier dans ces deux terres : la Corrèze de la naissance, en particulier Viam baptisé Siom et le Liban de la deuxième enfance. Dans l'une comme dans l'autre, Millet et presque tous ses narrateurs et personnages naissent, grandissent, souffrent, relatent des souvenirs, renouent des liens avec l'enfance, vieillissent et meurent. Les deux espaces apparaissent fréquemment dans le même texte ; si l'action se déroule en Corrèze, le personnage éprouve simultanément une nostalgie du Liban et vice versa : Je suis heureux de replonger dans la nuit de Beyrouth qui sent l'oranger, le levain et le laurier-rose, et même dans les puanteurs de Bab Edriss, comme en Corrèze, dans la moiteur hivernale des étables. (BB, 115) Ce rapport est tissé par l'auteur entre deux espaces qui seraient liés vaguement par la mythologie ou par l'histoire lointaine, en l'occurrence le mandat français au Liban dans les années 1920-1943 ou même encore plus loin, depuis le XVIe siècle où « François 1 er a signé une alliance avec l'Empire Ottoman qui faisait de la France la protectrice des chrétiens d'Orient 2 », selon l'historien Gérard Khoury. Ce rapport aux origenes s'inscrit dans les mystères de l'enfance qui envahit les livres de Millet : le Liban et la France, deux espaces géographiques dont la zone d'intersection est l'enfance. Deux espaces et un temps, dirait-on, mais comme chez Proust, la « recherche du temps perdu » de l'enfance morte dont on ne cesse de ressasser les souvenirs, ne peut avoir lieu que dans des lieux à jamais perdus. Ainsi, les deux espaces qui feront l'objet d'étude de la Le besoin presque vital de ne pas sombrer dans l'oubli, voire dans la mort, pousse l'auteur à revenir sur les premières années de sa vie, cette époque privilégiée de son existence, et si ce n'est de les vivre au village natal, du moins de les inventer, de les vivre autrement dans l'expérience de l'écriture. Il évoque Viam qui le « ramène à [lui]-même dans l'évidence de la perte » (50) et Pascal Bugeaud, celui qui est né un dimanche de Rameaux, grandit en Corrèze avec ses tantes et sa grand-mère maternelle alors que Richard Millet n'y a vécu que sa naissance. Celui-ci évoque, à l'occasion, les rites corréziens qui participent de la mythologie chrétienne, ceux qu'on pratique à la naissance d'un enfant-en l'occurrence sa propre naissanceévénement qui a coïncidé avec le début de la Semaine sainte dans Ma vie parmi les ombres : déjà le jour de Rameaux est un « bon signe » pour les tantes de Pascal Bugeaud, Marie et Jeanne, personnages « qui ont vraiment existé 1. » Le dimanche avant Pâques commémore l'entrée triomphale de Jésus dans Jérusalem sur un âne, accueilli par la foule des gens portant des rameaux de palmiers ; les rameaux verdoyants qu'il est difficile de trouver au début du printemps dans les régions froides « sont devenus du buis 2 » selon Yves Papin dans Les Expressions bibliques et mythologiques. Marie et Jeanne, raconte la grand-mère Louise à Pascal Bugeaud, « aussi dévotes que superstitieuses […] étaient allées faire bénir du buis par l'abbé Guerle » et ont « recueilli tous les oeufs pendant la Semaine sainte […] pour en faire une gigantesque omelette […] servie à l'occasion de ton baptême […] chacun mangeant de ces oeufs censés porter bonheur, surtout à toi qui avais reçu, à cause du jour où tu es né, le prénom de Pascal » (VPO, 239). Richard Millet recourt souvent dans ses textes et ses épigraphes aux rites chrétiens, aux mythologies grecques et aux références bibliques. L'oeuf est un symbole universel (dans les mythologies celtes, grecques, égyptiennes…)
L’enfant pris comme un archétype est une constante humaine qu’on représente de différentes façons... more L’enfant pris comme un archétype est une constante humaine qu’on représente de différentes façons à travers le temps et les cultures. Richard Millet, en se référant à l’enfant caché en lui, à ce « mythe de l’intériorité », tente de reconstruire son être intérieur à travers des mythographies rassemblées et coordonnées, afin d’éclaircir cette vérité ténébreuse des premières années de vie et de celles qui suivent la perte de l’enfance. L’objet de notre travail est de clarifier les voies de cette quête de l’enfance en recourant, tout d’abord, à la symbolique des lieux et du temps, la Corrèze et le Liban étant les lieux privilégiés de l’enfance de l’auteur et de ses personnages, vacillant tous entre le passé ou le premier âge et le présent de l’adulte. Ensuite, le mythe de l’enfance est interprété à travers l’imaginaire et les figures mythiques récurrentes : l’image de l’enfant dans la Bible et la tradition chrétienne, celle de la famille et celle du gouffre infernal et ténébreux dans le...
Héros-narrateurs l'un de L'École de la guerre, l'autre de La Main de Dieu, deux enfan... more Héros-narrateurs l'un de L'École de la guerre, l'autre de La Main de Dieu, deux enfants de confessions ennemies vivent, en 1975 dans des secteurs opposés de Beyrouth : Alexandre Najjar, chrétien, habite à l'est et Lila, musulmane, à l'ouest. Ils devraient traverser la même ligne de démarcation, et ainsi affronter leur confession et leurs frontières géographiques. Selon une approche mythocritique, l'article étudie la variation de trois mythes : le mythe identitaire, le mythe de la traversée et le mythe du retour.
Type de publication: Revue Directeurs d'ouvrage: Denooz (Laurence), Abi-Rached (Nehmetallah) Résu... more Type de publication: Revue Directeurs d'ouvrage: Denooz (Laurence), Abi-Rached (Nehmetallah) Résumé: La revue LiCArC (Littérature et culture arabes contemporaines) est destinée aux chercheurs et aux amateurs de la littérature arabe moderne et contemporaine (prose, poésie et traduction).
Cette vision pessimiste de l'auteur de Ma Vie parmi les ombres sur la fin de la première enfance ... more Cette vision pessimiste de l'auteur de Ma Vie parmi les ombres sur la fin de la première enfance liée intimement au mythe origenel du christianisme, « l'expulsion du paradis », ainsi qu'à « la chute dans le temps 1 » représentée par la mort lente, continue et infinie de l'être, modèle une grande partie de son oeuvre. Le mythe de l'enfance dans l'oeuvre de Richard Millet est un projet représentatif du « paysage intérieur » de l'être : les images et les figures qui hantent l'écriture de Millet se prêtent à une interprétation mythologique, celle de la reconstruction de l'être intérieur à travers des mythographies rassemblées et coordonnées afin de former un ensemble qui fait sens dans l'histoire du XXIe siècle. Le mythe, sur un plan général, « est d'abord une histoire et se présente sous la forme d'un récit 2 ». Appliqué à l'enfance, le mythe se réduit à une image archétypale. L'auteur se sert, volontairement ou non, de cette image primitive de l'enfance (recourant à la tradition chrétienne ou à des représentations littéraires de l'enfance) pour construire ses écrits narratifs. En suivant les fils mythologiques et psychologiques abrités derrière les variations d'images dans l'oeuvre de Millet, et censés clarifier les voies de la quête de l'enfance, nous proposons, dans notre étude, un cheminement à travers quatre grands axes qui seront interprétés dans plusieurs oeuvres de l'auteur. Les oeuvres qui serviront de corpus pour notre travail seront principalement : Ma vie parmi les ombres, La Gloire des Pythre, Le Cavalier siomois, Lauve le pur, La Voix d'alto, Le Renard dans le nom ainsi que d'autres oeuvres dont le sous-thème peut également évoquer l'enfance comme Le Goût des femmes laides, Dévorations, La Confession négative, Le Sommeil sur les cendres, Tarnac et La Fiancée libanaise. Dans la première partie « Deux espaces et deux temps », nous entamons notre étude en situant l'enfance dans son cadre spatio-temporel. L'enfance de l'auteur ainsi que celle d'un bon nombre de ses narrateurs et personnages se déroule en Corrèze, à Siom, alias Viam, village natal de Millet, qui constitue la toile de fond de sa « trilogie » corrézienne : La Gloire des Pythre, L'Amour des trois soeurs Piale et Lauve le pur, à laquelle il faudra ajouter Le Cavalier siomois, La Voix d'alto, Le Renard dans le nom, Le Goût des femmes laides, Dévorations, L'Art du bref, Le Sommeil sur les cendres et Tarnac. Siom forme aussi l'arrière-plan dominant du grand roman qui servira de base pour notre étude Ma Vie parmi les ombres. Il est le carrefour des souvenirs d'enfance de Pascal, aussi narrateur de La Confession négative et de La Fiancée libanaise : dans l'un, En conséquence, comme appui à notre analyse de l'espace et du temps dans les romans et récits de l'auteur, nous nous référerons principalement, dans la première partie de notre travail, à l'étude de Jean-Yves Laurichesse, L'invention du pays, sur l'espace « natal » (La Corrèze), l'espace « lointain » (le Liban) et l'espace « inventé » (Siom) de Richard Millet, ainsi qu'à La Poétique de l'espace et La Poétique de la rêverie de Gaston Bachelard. Le Roman des origenes et origenes du roman de Marthe Robert et quelques articles de l'Introduction aux méthodologies de l'imaginaire (dir. Joël Thomas) nous aideront à clarifier le rapport de l'enfant avec sa famille, lié directement à l'espace où ils se trouvent. Temps et récits de Paul Ricoeur et les OEuvres de Walter Benjamin seront un appui théorique pour l'étude du « temps réel » et du « temps imaginaire » chez l'enfant milletien. En outre, l'aspect mythique dominant dans la deuxième partie de notre étude, nous ramène particulièrement aux références concernant la tradition chrétienne et les récits bibliques comme l'Évangile, la Bible et Le Cantique des Cantiques d'une part, et des études sur les Allers et retours de l'enfant prodigue : l'enfant retourné de Marc Bochet, Les figures de l'errance de Dominique Berthet et Le Cordonnier de Jérusalem de Gaël Milin, d'autre part. Nous nous appuierons, de surcroît, sur des études de l'imaginaire et des mythes comme Littérature et Mythe de Marie-Catherine Huet-Brichard, Le Mythe et l'Homme de Roger Caillois, Le Sacré et le Profane et Les Aspects du mythe de Mircéa Éliade, Les Structures anthropologiques de l'imaginaire de Gilbert Durand, l'Introduction à l'essence de la mythologie de Karl Jung et Charles Kérényi, les Écrits de Lacan et les analyses de Bachelard sur L'Eau et les Rêves et La Terre et les Rêveries du repos, ainsi qu'à l'étude de Asma Chamly-Halwani sur « Lauve le pur ou l'horreur fétide de la nuit et de l'impur ». Des références sur la mort et la perte de l'enfance nous serviront d'appui dans la troisième partie, comme Les Vivants et les Morts (dir. Arlette Bouloumié), L'Ère du récit d'enfance (dir. Alain Schaffner), Le Récit d'enfance et ses modèles (dir. Anne Chevalier et Carole Dornier), les analyses de Benjamin, de Barthes, de Jung et de Levinas… Finalement, dans la dernière partie, nous aurons recours aux études de Claude-Gilbert Dubois sur « Les modes de classification des mythes », de Jacqueline de Romilly sur La Tragédie grecque, d'Éliade (op. cit.), de Marie-Catherine Huet-Brichard (op. cit.) et de Walter Benjamin (op. cit.) pour illustrer « la création du mythe », et de Vincent Colonna sur L'Autofiction et autres mythomanies littéraires, de Philippe Gasparini sur Chapitre premier : La Corrèze et le Liban, double enracinement La mythologie biblique a joint dans le chant du Cantique des Cantiques de l'Ancien testament, les deux terres qui forment l'espace écrit de Richard Millet, Sion et le Liban : Sortez et voyez, filles de Sion, le roi Salomon avec la couronne dont sa mère l'a couronné le jour de ses épousailles, le jour de la joie de son coeur. […] À moi, à moi, ma fiancée ! Viens à moi du Liban ; regarde-moi du haut de l'Amana, du sommet du Sanir et de l'Hermon, du fond de la caverne des lions, du haut des montagnes qu'habitent les léopards 1. La géographie vécue par l'auteur du Cavalier siomois et d'Un balcon à Beyrouth témoigne d'un enracinement singulier dans ces deux terres : la Corrèze de la naissance, en particulier Viam baptisé Siom et le Liban de la deuxième enfance. Dans l'une comme dans l'autre, Millet et presque tous ses narrateurs et personnages naissent, grandissent, souffrent, relatent des souvenirs, renouent des liens avec l'enfance, vieillissent et meurent. Les deux espaces apparaissent fréquemment dans le même texte ; si l'action se déroule en Corrèze, le personnage éprouve simultanément une nostalgie du Liban et vice versa : Je suis heureux de replonger dans la nuit de Beyrouth qui sent l'oranger, le levain et le laurier-rose, et même dans les puanteurs de Bab Edriss, comme en Corrèze, dans la moiteur hivernale des étables. (BB, 115) Ce rapport est tissé par l'auteur entre deux espaces qui seraient liés vaguement par la mythologie ou par l'histoire lointaine, en l'occurrence le mandat français au Liban dans les années 1920-1943 ou même encore plus loin, depuis le XVIe siècle où « François 1 er a signé une alliance avec l'Empire Ottoman qui faisait de la France la protectrice des chrétiens d'Orient 2 », selon l'historien Gérard Khoury. Ce rapport aux origenes s'inscrit dans les mystères de l'enfance qui envahit les livres de Millet : le Liban et la France, deux espaces géographiques dont la zone d'intersection est l'enfance. Deux espaces et un temps, dirait-on, mais comme chez Proust, la « recherche du temps perdu » de l'enfance morte dont on ne cesse de ressasser les souvenirs, ne peut avoir lieu que dans des lieux à jamais perdus. Ainsi, les deux espaces qui feront l'objet d'étude de la Le besoin presque vital de ne pas sombrer dans l'oubli, voire dans la mort, pousse l'auteur à revenir sur les premières années de sa vie, cette époque privilégiée de son existence, et si ce n'est de les vivre au village natal, du moins de les inventer, de les vivre autrement dans l'expérience de l'écriture. Il évoque Viam qui le « ramène à [lui]-même dans l'évidence de la perte » (50) et Pascal Bugeaud, celui qui est né un dimanche de Rameaux, grandit en Corrèze avec ses tantes et sa grand-mère maternelle alors que Richard Millet n'y a vécu que sa naissance. Celui-ci évoque, à l'occasion, les rites corréziens qui participent de la mythologie chrétienne, ceux qu'on pratique à la naissance d'un enfant-en l'occurrence sa propre naissanceévénement qui a coïncidé avec le début de la Semaine sainte dans Ma vie parmi les ombres : déjà le jour de Rameaux est un « bon signe » pour les tantes de Pascal Bugeaud, Marie et Jeanne, personnages « qui ont vraiment existé 1. » Le dimanche avant Pâques commémore l'entrée triomphale de Jésus dans Jérusalem sur un âne, accueilli par la foule des gens portant des rameaux de palmiers ; les rameaux verdoyants qu'il est difficile de trouver au début du printemps dans les régions froides « sont devenus du buis 2 » selon Yves Papin dans Les Expressions bibliques et mythologiques. Marie et Jeanne, raconte la grand-mère Louise à Pascal Bugeaud, « aussi dévotes que superstitieuses […] étaient allées faire bénir du buis par l'abbé Guerle » et ont « recueilli tous les oeufs pendant la Semaine sainte […] pour en faire une gigantesque omelette […] servie à l'occasion de ton baptême […] chacun mangeant de ces oeufs censés porter bonheur, surtout à toi qui avais reçu, à cause du jour où tu es né, le prénom de Pascal » (VPO, 239). Richard Millet recourt souvent dans ses textes et ses épigraphes aux rites chrétiens, aux mythologies grecques et aux références bibliques. L'oeuf est un symbole universel (dans les mythologies celtes, grecques, égyptiennes…)
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