Papers by Alexandra de Heering
Portraits choisis, portraits subis, Nov 22, 2022
PRÉSENTATION DES INVITÉS ALEXIS CORDESSE (né à Paris en 1971) est photographe. D'abord photorepor... more PRÉSENTATION DES INVITÉS ALEXIS CORDESSE (né à Paris en 1971) est photographe. D'abord photoreporter, il se met à partir du milieu des années 1990 en quête d'une nouvelle éthique du témoignage. Ses travaux ont été présentés à la Dokumenta XI à Kassel (2002), à l'International Center of Photography (ICP) à New York (2003), à Paris lors du Mois de la photo (2010 et 2017), au musée Nicéphore-Niépce de Chalon-sur-Saône (2021) dans le cadre d'une exposition rétrospective. Ils sont également présents dans de nombreuses collections publiques et privées, dont le Fonds national d'art contemporain, le Fonds régional d'art contemporain (FRAC) Auvergne, le musée Nicéphore-Niépce, etc.
"What is an archive in India and Europe?",, Mar 1, 2019
Histoire & Mesure, 2019
Apres son introduction precoce en Inde (des 1840), la photographie est devenue un phenomene socia... more Apres son introduction precoce en Inde (des 1840), la photographie est devenue un phenomene social de grande ampleur qui a progressivement investi les espaces tant prives que publics. Sur la base d’un corpus inedit de photographies de studios, premiere manifestation d’une culture photographique locale, cet article plonge le lecteur dans l’univers encore meconnu de la pratique photographique du sud de l’Inde et s’interroge sur les manieres d’utiliser ces sources visuelles longtemps negligees en depit de leur force documentaire. Les auteurs developpent une proposition methodologique pour l’analyse iconographique qui promeut l’usage combine de l’outil statistique et de methodes qualitatives. Ils presentent ensuite ce que l’usage de cet outil apporte pour l’histoire de et par la photographie en Inde.
Photographica
Un numéro, une image Attribué à Nicholas and Company, Ahmed [a pony], 1874. Tirage sur papier alb... more Un numéro, une image Attribué à Nicholas and Company, Ahmed [a pony], 1874. Tirage sur papier albuminé, environ 22 x 26 cm, collé sur la planche 54 de l'Album of Indian views, 28,1 x 41 cm. Londres, British Library, India Office Photograph Collections, Photo 218(54). By permission of the British Library. Voici le « portrait » d'Ahmed pris en 1874, dans le contexte de l'Inde coloniale. Ahmed est un poney. Doté d'un pelage blanc, il pose au pied d'une grande bâtisse et sur son chanfrein rectiligne, comme pour le retenir, repose une main : celle d'un homme-un palefrenier ? un serviteur ? Vêtu de blanc également, ce dernier apparaît nu-pieds. Son visage disparaît littéralement derrière la tête du cheval. À cet homme a probablement été donnée l'instruction de s'assurer que l'animal, peu au fait des longs temps de pose encore nécessaires, ne bouge pas. À l'arrière-plan, deux serviteurs en uniformes caractéristiques de leur fonction, apparaissent dans l'encadrement d'une fenêtre. Ils observent la scène de loin. Espéraient-ils aussi figurer sur le cliché ou leur présence à l'image est-elle le simple fruit de leur curiosité ? On ne le saura jamais. Peut-être destiné à être encadré, ce tirage assez grossièrement collé sur la page laisse apparaître une image de forme ovale aux contours diffus, qui place le cheval en son centre comme point focal. S'en dégage une impression d'évanescence. Ce portrait est issu d'un album produit par le studio Nicholas and Company, fondé en 1857 à Madras 1 , qui s'intitule Album of Indian Views. Aux côtés des lieux emblématiques de Madras, de scènes de rue et de paysages du sud de l'Inde, y figurent aussi des vues d'Égypte, de France ou d'Écosse. Cet album photographique, dont on ignore l'identité du propriétaire, est conservé aux archives de la British Library à Londres qui abrite l'un des plus importants fonds photographiques de l'Inde coloniale. Ces collections, si elles sont évidemment d'une grande richesse, ne sont pas toutefois sans poser problème, notamment en raison de la partialité des objets photographiques qu'elles contiennent et du type de descriptions qui en sont faites-Ahmed [a pony]-, héritage de l'époque coloniale. Les corpus photographiques que l'on y trouve recensent les ressources naturelles, les vestiges archéologiques, les artefacts ou les monuments de l'Inde. En plus des très nombreux portraits de colons, ils recèlent aussi ceux d'Indiens appartenant à l'élite locale ou aux origenes plus modestes. Dans ce dernier cas, il s'agit le plus souvent de portraits essentialisant « des gens de l'Inde » ayant notamment servi à illustrer la très grande entreprise de photographie anthropologique que fut The People of India publiée entre 1868 et 1875. Ailleurs, le « peuple » fait figure de personnage secondaire. Il apparaît à la périphérie de l'image, ou dissimulé par le sujet principal comme ici dans le cas de ce portrait d'équidé. En dépit de ses qualités techniques et de l'attrait qu'il suscite, ce portrait ne peut manquer d'interloquer et de questionner. Derrière le poney, un homme est dépossédé de son visage, c'est-à-dire de la partie du corps humain qui est la plus investie de significations sociales, culturelles voire affectives. Par ce choix de composition, il est symboliquement guillotiné. En choisissant de le faire apparaître sans son visage et sans son regard, et donc sans ce qu'il a de plus spécifique, cet individu se retrouve réduit à son statut de subalterne, par son uniforme comme par sa position. Derrière la fierté d'un propriétaire pour son cheval-courante à l'époque au vu du nombre de portraits équestres qui parsèment les collections-se cache ce qui peut être interprété comme un manque de considération, voire du mépris, à l'égard de celui qui s'en occupe. Aussi, à la faveur d'une image en apparence anodine-on pourrait même dire inoffensive en comparaison avec nombre d'autres, bien plus cruelles, prises à l'époque-, se dévoilent des éléments relevant et révélant les idéologies de ceux qui ont conçu ces images. Car c'est bien au commanditaire, en dialogue avec le photographe, de décider de ce qui doit être montré, mais donc également de ce qui doit/peut rester dans le domaine de l'invisible/du non-représenté. Et ce d'autant plus lorsqu'une image est sélectionnée pour apparaître dans un album. Si cette photographie constitue une trace visuelle « remarquable » des rapports de force prévalant à l'époque coloniale, n'est-il pas temps de repenser les pratiques de conservation et de description des corpus afin de proposer un cadre de catégorisation plus inclusif qui puisse contribuer à la réhabilitation-partielle-des masses de subalternes qui existent dans ces archives mais qui s'y trouvent invariablement invisibilisés ? On pourrait, par exemple, renommer le cliché en témoignant de la présence, aux côtés d'Ahmed, d'un palefrenier et de deux domestiques. Une telle démarche permettrait d'ouvrir la voie à de nouvelles approches de recherche mais aussi de rompre avec les catégories descriptives-souvent violentes-qui persistent dans les collections abondamment étudiées et qui peuvent se révéler être tout à la fois irrespectueuses des personnes concernées et, comme l'a déjà souligné Ariella Azoulay 2 , peu fidèles aux événements historiques dépeints. Alexandra de Heering 1 Fondé en 1857 à Madras par deux frères venus d'Angleterre, John et James Perrat Nicholas, ce studio a été l'un des plus importants établissements de photographie dans la capitale de la Présidence de Madras jusqu'à la fin du xix e siècle. En plus des portraits réalisés à la demande, il proposait à la vente nombre de vues de Madras et de ses environs, mais aussi des photographies de bâtiments ou de personnages illustres.
Economic and Political Weekly, 2016
This paper explores the various ways Cakkiliyar people, a Dalit community, relate, through memory... more This paper explores the various ways Cakkiliyar people, a Dalit community, relate, through memory, to their past and their history. Far from constituting a homogeneous group, the more than 60 testimonies collected among Cakkiliyars reveal a diversity of perspectives on the past, strongly influenced by the situation in the present and aspirations for the future. Three distinct ways of thinking and three prototypes emerge from the testimonies; each one is defined by a specific way of positioning oneself in relation to various historical times.
Contemporary South Asia, 2019
Histoires-monde de la photographie
Si les deux extrémités du continuum chronologique de la pratique photographique indienne – la pér... more Si les deux extrémités du continuum chronologique de la pratique photographique indienne – la période 1840-1910 d’une part, la fin du xxe siècle d’autre part – ont fait l’objet de recherches, on ignore encore comment, de manière concrète et détaillée, le médium, initialement aux mains des élites britannique et indienne, est devenu un phénomène de grande ampleur. À partir de l’étude croisée de diverses sources (visuelles, orales, écrites) rassemblées à la faveur d’une enquête de terrain de plusieurs mois, dont la logique méthodologique fait l’objet d’une présentation circonstanciée, cet article apporte un éclairage sur l’histoire de la photographie dans un espace géographique encore peu étudié, le sud de l’Inde. Avec Coimbatore – grand centre industriel – comme point focal, il dresse un panorama chronologique des évolutions géographiques et sociales de la pratique photographique au niveau micro. Construit autour de trois périodes clés, l’article propose ainsi une lecture spatialisée ...
25th Conference on European Association on South Asian Studies (ECSAA), 24-27 July 2018, Paris, France, Jul 24, 2018
This PhD research focuses on untouchables’ (Dalits) perceptions of their past and more specifical... more This PhD research focuses on untouchables’ (Dalits) perceptions of their past and more specifically on the transformations that occurred at the inter-caste level. For that sake, more than 60 testimonies have been collected. The investigations have been centered around three generations of people in two communities of the cakkiliyar caste in Tamil Nadu (South India). Firstly, the following main questions have been addressed : How did these cakkiliyar communities drift from one state to another in the lapse of 40 years? How did the inter-caste relationships evolve? Which were the main triggering factors and their consequences? What was the impact on people’s minds and mentalities? At the micro level and with the help of oral testimonies, this work endeavors to highlight the past of these communities and to ‘un-knit’ the social, political, cultural and economic changes that 'made the difference' at the local level with reference to the dalit/non-dalit relationship. A strong dif...
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Papers by Alexandra de Heering
L’idée force est de croiser des phénomènes de domination (sans limites géographiques ni temporelles) à la technique du portrait photographique (1840-2000). Comment ce type d’image personnelle et, dans certains cas, intime peut-il être marqué (dans ses thèmes ou mises en scène) par des contextes de colonisation, d’occupation, par des rapports de classe, d’âge, de handicap, de race, de genre, par des logiques de classement sécuritaire ou nosographique ou par tout lien de subordination ou de stigmatisation ? À quelles conditions peut-il être interprété comme expression visuelle de domination (même implicite) et/ou « instrument ou miroir d’un pouvoir hégémonique capable de classifier, discipliner, fixer et coder » (Grandin 2004 : 84)?
Over the years, the photographic conventions of commercial photography (in other words what is considered to be a good portrait) have evolved due to technical changes, to the indianisation of the profession of photographer, to its democratisation that has attracted more and more people from different social backgrounds (class and caste) into the studios, and also to the historical context that sometimes has had an impact on how people wanted to be seen. In this presentation, I will present a chronological typology of the different visual modes of representation that can be observed in early Tamil photo portraiture, and present a few hypothesis on their meaning and their raison d’etre, based on the wider historical context. In order to do so, I will concentrate on the study of several dimensions of the portraits: the material culture (clothes, jewellery, props,...); the sitters’ positioning, the backdrops, and see how they change throughout the years. This will produce knowledge on the history of representation and on the use different social groups make of photography that written sources will not provide.
This work is based on an analysis of a set of more than 4000 pictures drawn from a new archive dealing specifically with South Indian commercial photography (STARS Archive).