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(PDF) Le cadre international des droits de l’enfant
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Le cadre international des droits de l’enfant

2016, Les Cahiers Dynamiques

Distribution électronique Cairn.info pour ERES. © ERES. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1. Art. 5 cDe, notion de facultés en développement ou « Evolving Capacities », cf. Gerrison Lansdowm, Innocenti Firenze, 2004.

LE CADRE INTERNATIONAL DES DROITS DE L’ENFANT Jean Zermatten 2016/3 N° 69 | pages 16 à 25 ISSN 1276-3780 ISBN 9782749254074 Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-dynamiques-2016-3-page-16.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Jean Zermatten, « Le cadre international des droits de l’enfant », Les Cahiers Dynamiques 2016/3 (N° 69), p. 16-25. DOI 10.3917/lcd.069.0016 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ERES. © ERES. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES ERES | « Les Cahiers Dynamiques » conventions et normes internationales et nationales spécifiques. Et pourtant aujourd’hui, en France, les droits de l’enfant ne sont pas toujours complètement pris en compte. De nombreux abus sont même relevés et tout se passe parfois comme si l’enfant, sous « main de justice », perdait certains droits élémentaires. Des petits droits pour de petites personnes ? Ce numéro est consacré au respect des droits, de l’intérêt supérieur de l’enfant, et pose également la question de la parole du jeune, des voies de recours qu’il peut utiliser, de la formation dispensée aux professionnels de la du travail social. 16 PJJ et plus largement Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES Un cadre légal très clair, des organisations dédiées, des LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 17 Des droits pour les jeunes Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES d o s s i e r Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 r e p è r e s J E A N Z E R M AT T E N Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES Le cadre international des droits de l’enfant L’appellation « droits de l’enfant » a fait son apparition il y a un peu plus de vingt-cinq ans, avec l’adoption par la communauté internationale de la désormais fameuse Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant (CDE) et sa ratification spontanée par de très nombreux États (dont la France en 1990 déjà), à tel point que nous sommes actuellement au stade de la ratification quasi-universelle de ce traité puisque 195 États sur 196 possibles, sont parties prenantes à ce traité. Une première et un record dans l’histoire des instruments internationaux des droits de l’homme ! Mais qu’en est-il dans la réalité et les pratiques des professionnels ? Jean Zermatten, président du Comité des droits de l’enfant de l’ONU, de 2011 à 2013, redonne ici quelques éléments fondamentaux. La CDE est devenue un outil de travail commun à tous les professionnels à travers le monde, qui travaillent avec les enfants, qu’ils appartiennent aux domaines de l’éducation, de la santé, de la protection, de la justice, de la migration… Pourtant, plus je rencontre de représentants d’États, de grandes organisations onusiennes ou d’organisations non gouvernementales (grandes ou petites) ; plus j’échange avec des personnes qui sont au contact régulier des enfants et plus je m’aperçois que la perception de ce que sont, dans la réalité et dans les pratiques quotidiennes, les droits de l’enfant diffère souvent grandement de la volonté du législateur international de 1989. En effet, s’il y a des États et des professionnels qui ont fait le pas de considérer l’enfant comme une personne à part entière, un des plus Président du tribunal des mineurs du Valais, Suisse (1980-2005), directeur de l’Institut international des droits de l’enfant, Sion, Suisse (1995-2014), président du Comité des droits de l’enfant de l’ONU (2011-2013). jean.zermatten@childsrights.ch 18 Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES 3 De la réification à la personnification La Convention des droits de l’enfant n’est pas un texte neutre, qui contiendrait une liste de droits économiques, sociaux et culturels et de libertés civiles accordés aux enfants ; elle va bien au-delà. La Convention crée une nouvelle culture et impose une approche différente de tous les textes précédents : l’enfant, considéré dans l’histoire comme un objet de notre protection, est devenu, en novembre 1989, un sujet de droits et a été reconnu comme une personne à part entière. Ce faisant, la communauté internationale a admis que l’enfant-personne possède des droits qui lui sont attachés du fait de sa naissance et que ces droits ne peuvent pas lui être enlevés. Il peut ne pas les faire valoir, mais ne peut pas y renoncer. Ce sont des droits strictement personnels. Dès lors, les États parties à la CDE ont l’obligation de respecter ce statut, de le promouvoir et de le faire appliquer, puisque la Convention a un effet contraignant et n’est pas une belle Déclaration, une série de d o s s i e r Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES grands dangers qui menace la mise en œuvre effective des droits de l’enfant est l’assistantialisme. Je veux dire par là la bonne veille conception de regarder l’enfant comme un objet de protection et/ou comme un destinataire de soins et de services que l’État, Un des plus grands dans sa magnanimité, lui octroie et non comme une personne qui détient des droits, ce qu’exige dangers qui menace la CDE. On reste donc dans la position paternala mise en œuvre liste du bonus paterfamilias, (associé récemment effective des droits à la mère) qui agit pour le bien de l’enfant ; de l’enfant est ou de l’État providence qui intervient uniquement lorsque les parents (la-les famille-s) sont l’assistantialisme. dépassés. C’est l’attitude qui a prévalu pendant si longtemps, depuis le moment où l’on a pensé utile de protéger les enfants et de les éduquer de manière systématique (XIXe siècle) et qu’il est si difficile de faire évoluer. Même vingt-sept ans plus tard, on se heurte toujours à cette idée que l’enfant est notre propriété, notre bien – certes précieux – et que, par conséquent, il suffit de vouloir son bien pour savoir comment agir et l’élever… J’exagère à peine et l’examen des rapports de très nombreux États sur la question de la mise en œuvre et des mesures d’application prises manifeste des progrès extraordinaires réalisés dans des domaines techniques, spécifiques, ou de protection, mais fait ressortir de manière récurrente l’obstacle principal : celui de considérer l’enfant comme détenteur de droits et comme acteur de sa vie et de la vie de la Cité. Je pense donc utile de redire quelques notions fondamentales. Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 19 Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES Recommandations, ou un ensemble de Lignes directrices. En ratifiant la Convention, les États se sont obligés vis-à-vis du groupe enfants ; et les enfants qui le constituent individuellement ou collectivement disposent ainsi d’une créance envers l’État sous la juridiction duquel ils vivent. Cela vaut pour les nationaux, comme pour les non-nationaux, y compris les enfants qui sont clandestinement sur le territoire d’un État (en cette période de flux migratoires incessants et non maîtrisés, cette précision est d’importance). Donc, en introduisant cette dimension nouvelle de l’enfant-personne, on change complètement de paradigme. L’enfant n’est plus notre chose, même très (trop ?) chérie : il devient la personne la plus précieuse. Et si l’enfant est une personne, il n’est plus possible de le considérer comme un meuble, une marchandise, un bien… Conséquence évidente, on ne peut plus l’abuser, le prostituer, le vendre, l’échanger ! Par rapport à toutes les formes d’exploitation qui ont régné dans l’histoire (travail, conflit, prostitution, pornographie, vente, adoption, violence, abus sexuels…) on comprend immédiatement la portée de cette affirmation de l’enfant-personne. Mais, autre conséquence, l’État partie doit tout faire pour mettre en œuvre le traité, donc pour mettre en avant ce statut d’enfant-personne, détenteur de droits subjectifs strictement personnels. De la dignité Le concept de l’enfant-personne fonde également l’évidence de l’enfant digne. La CDE n’invente rien en parlant de dignité, mais ne fait que se référer au droit fondamental de l’homme, L’enfant est une tel qu’il est énoncé à l’article 1 de la Déclaration personne digne ! universelle des droits de l’homme, affirmant que tout être humain est né libre et égal en droit et Cela implique en dignité. Il s’agit d’un droit non exprimé explipour tous citement dans la Convention, mais contenu de les professionnels manière implicite en elle et auquel le Préambule de les considérer de la CDE fait référence. La dignité est le socle comme sur lequel reposent tous les droits ; elle est une des personnes valeur que l’on reconnaît intégralement à l’enfant devenu titulaire de droits. certes petites L’enfant est une personne et une personne mais détentrices digne ! Dès lors toute atteinte à sa dignité de droits. constitue une violation grave de son statut de personne. Par conséquent aussi, cela implique pour tous les professionnels de ne pas considérer les enfants avec lesquels ils travaillent (plutôt que ceux pour lesquels ils travaillent), 20 Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 L’enfant marche sur deux pieds L’enfant nouveau, devenu grâce à la Convention détenteur de droits qu’il peut selon son âge et son degré de maturité exercer de manière plus ou moins autonome, marche sur deux pieds… a) Le premier pied, c’est celui de l’enfant qui participe ; qui n’est plus un simple spectateur de décisions prises par les adultes, mais qui est devenu acteur et qui tient son rôle dans le théâtre de son existence. Cela s’exprime par le fameux article 12 CDE qui donne le droit à l’enfant non seulement d’exprimer son avis, ses vœux et souhaits, son opinion, mais aussi de voir cette parole être prise en compte de manière sérieuse (et non seulement comme une formalité procédurale) pour toute décision qui d’une manière directe ou indirecte peut avoir une influence sur son existence. Innovation spectaculaire de la CDE, qui introduit le concept que l’enfant, au fur et à mesure de son développement1, est amené à participer à la vie de sa famille, de son école, de son centre de formation et de la Cité, en général. Il n’est plus seulement un membre passif dont on s’occupe, il devient un acteur de son présent et de son futur, puisqu’il a reçu le droit d’influencer son avenir, dès lors que l’on doit le consulter sur toute action – on non action – qui a un impact sur lui. b) Le deuxième pied, c’est l’autre article « vedette » de la Convention, l’article 3, par. 1 qui consacre ce que l’on nomme habituellement « l’intérêt supérieur de l’enfant », mais qui est en fait le droit de chaque enfant de voir son intérêt être évalué et être apprécié comme une considération primordiale, dès lors qu’une décision doit être prise à son égard. En effet, chaque fois qu’une décision est envisagée pour tel enfant, ou tel groupe d’enfants, le « décideur », public ou privé, doit estimer les 1. Art. 5 CDE, notion de facultés en développement ou « Evolving Capacities », cf. Gerrison Lansdowm, Innocenti Firenze, 2004. d o s s i e r Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES comme leur cas, leur cause, leur enfant, leur “client”, mais bien comme des personnes, certes petites et pas encore adultes, mais déjà détentrices de droits (et non de petits droits). Cela nécessite une nouvelle prise de conscience et certainement une nouvelle approche des pratiques professionnelles. Non pas pour diminuer la protection proportionnelle à leur vulnérabilité, ni pour amoindrir le niveau des prestations qui leur sont dues, mais pour mettre en avant les “droits subjectifs des enfants à…” et pour favoriser le but ultime de la Convention qui est d’assurer le développement harmonieux de chaque enfant, tel que décrit dans l’art. 6 de la CDE (développement global ou holistique : physique, psychique, social, économique, moral et spirituel). Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 21 Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES impacts négatifs ou positifs de la décision à prendre à l’égard de cet enfant et choisir une solution qui préservera son intérêt d’enfant, être en développement, dépendant, vulnérable, mais néanmoins personne à part entière, détentrice du droit à être placé au centre de toute décision. Y compris lorsque l’on légifère, puisque les organes législatifs (tous nos parlements aux Les organes niveaux national, régional, départemental, législatifs doivent prendre en compte municipal, etc.) doivent prendre en compte l’intérêt de l’enfant dès qu’ils édictent des lois ! l’intérêt de l’enfant Avec la reconnaissance d’un droit subjectif dès qu’ils édictent reconnu à chaque enfant, celui de voir le décides lois ! deur le mettre au centre de toutes décisions, la CDE oblige le professionnel qui va prendre une décision à : – établir la situation exacte de l’enfant dans toutes ses circonstances personnelles, familiales, éducatives, professionnelles, sociales, etc. ; – faire l’inventaire des solutions possibles adaptées à cette situation, pour lui permettre de prendre la meilleure solution pour l’enfant. Cela permet donc de dire que l’art. 3 par. 1 CDE consacre le principe de l’individualisation et joue deux rôles « classiques » : celui de contrôler (garantie pour l’enfant que son droit sera exercé dans les faits et une obligation pour l’État d’assurer ce contrôle) et de trouver la meilleure solution, à savoir celle qui prendra en compte l’enfant dans le contexte donné et ses besoins particuliers, aujourd’hui et dans son développement futur dans la mesure où on peut raisonnablement l’envisager2. Évidemment ces deux pieds doivent être coordonnés pour permettre à l’enfant d’avancer… et ces deux droits doivent se compléter pour favoriser la jouissance des droits subjectifs de la CDE, puisque chaque fois qu’il s’agit d’évaluer si les droits de l’enfant (à l’éducation, à un niveau de vie décent, à la santé, à la protection contre, etc.) sont respectés, on doit se poser la question de la participation de l’enfant et de son intérêt concret et individuel dans la situation donnée. Il n’y a donc pas d’antagonisme entre ces deux articles : l’article 12 vient en appui de l’article 3 par. 1 en l’aidant à remplir ses deux fonctions et l’article 3 par. 1 CDE, en offrant la possibilité à l’enfant d’influencer l’établissement de son intérêt supérieur, grâce au poids accordé à son opinion, donne à l’article 12 toute sa justification et lui évite de n’être qu’un droit rhétorique. 2. H. Fulchiron, « De l’intérêt de l’enfant aux droits de l’enfant », dans Une Convention, plusieurs regards. Les droits de l’enfant entre théorie et pratique, IDE, Sion, 1997, p. 30 sqq. 22 Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES C’est en évaluant comment un pays permet aux enfants sous sa juridiction d’exercer leur droit à la participation et comment il a mis en œuvre l’application de leur droit à être au centre des décisions, que l’on peut dire si l’État X est passé de l’approche protectionnelle et assistantialiste (ou paternaliste) comme décrit plus haut, à une approche participative (l’approche sujet de droits), autrement dit s’il a cherché à transformer ses interventions pour en interventions avec les enfants. Il faut encore rajouter que la Convention a été dotée d’un nouvel instrument qui symbolise cette notion de l’enfant sujet de droits : le nouveau Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications3. Pour les enfants vivant sous la juridiction d’un État qui a ratifié ce Protocole, cet instrument donne le droit de se plaindre de la violation de ses droits devant le Comité de Genève, pour autant que les voies nationales aient été préalablement épuisées. Les Règles de procédure de ce nouveau Protocole mettent en avant l’art. 12 et l’art. 3 par. 1 et contribuent donc à la reconnaissance effective de ce que j’ai nommé plus haut « l’enfant nouveau ». Le Comité des droits de l’enfant, organe de contrôle de la Convention, lors de l’examen des rapports des États parties accorde une attention particulière à l’application des deux droits exprimés par les art. 12 et 3 par. 1 CDE ; cela permet donc de constater si l’État en question considère l’enfant comme une La France lors de personne, ou continue à jouer son rôle de bon son dernier examen Saint-Bernard. de passage à Il est donc intéressant, si l’on parle de la France, Genève devant le de voir que lors de son dernier examen de passage 4 Comité des dix-huit à Genève, devant le Comité des dix-huit experts , elle s’est vu rappeler à l’ordre et a reçu des recomexperts s’est vu mandations sur la mise en œuvre de ces deux rappeler à l’ordre. articles, recommandations qui font d’ailleurs écho à celles reçues antérieurement (notamment en 2009). S’agissant de l’art. 12, le Comité a écrit : « 29. S’il salue les mesures que prend l’État partie pour garantir le respect de l’opinion de l’enfant, le Comité reste préoccupé par le peu de progrès réalisés s’agissant de garantir systématiquement le respect de l’opinion de l’enfant dans tous les domaines de la vie. Il note avec préoccupation que 3. Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications (OPIC), A/RES/66/138 du 19 décembre 2011, entré en vigueur le 14 avril 2014. Ratifié par la France en 2016. 4. CRC/C/FRA/CO/5, du 29 janvier 2016. d o s s i e r L’enfant vraiment sujet de droits ? Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 23 LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 Par rapport à l’art. 3 par. 1, le Comité reste préoccupé : Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES « 25. Le Comité relève avec satisfaction que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant a été érigé en principe constitutionnel et que la Cour de cassation et le Conseil d’État ont adopté une position commune à son sujet. Il note toutefois avec préoccupation que ce droit n’est pas suffisamment intégré en pratique et n’est pas toujours convenablement apprécié ni défini dans toutes les actions et décisions des pouvoirs publics − il faudrait entre autres pour cela que des études préalables soient menées pour évaluer l’effet des projets de loi et des investissements publics. » Les recommandations relatives à ces préoccupations peuvent se lire dans les observations finales5, aux paragraphes 26 (Intérêt supérieur) : « … le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour que ce droit soit convenablement intégré puis interprété et appliqué de manière cohérente dans toutes les procédures et décisions législatives, administratives et judiciaires, ainsi que dans toutes les politiques, dans les programmes et projets concernant les enfants ou ayant sur eux un effet… » Et 30 (droit de l’enfant d’être entendu) : « … le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que tous les enfants, y compris les enfants vulnérables ou marginalisés, jouissent pleinement du droit d’être entendu, en particulier dans le cadre des procédures et des décisions judiciaires ou administratives. Il recommande à l’État partie de mettre en place des systèmes ou des procédures visant à assurer la participation des enfants, à former les travailleurs sociaux et les autorités administratives ou judiciaires et à assurer aux intéressés le soutien d’un professionnel (avocat, administrateur ad hoc ou travailleur social)… » Pour finir… Si l’on voulait conclure hâtivement, l’on pourrait dire sur la base de ces observations finales que le France n’a pas encore fait le pas décisif vers la pleine reconnaissance du statut de l’enfant, acteur de ses droits… Ce n’est évidemment pas le but de cette modeste contribution. D’ailleurs, il faudrait une analyse bien plus fouillée et probablement plusieurs recherches menées dans différents domaines de l’intervention étatique, pour pouvoir répondre de manière nuancée, 5. Ibid. 24 Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES l’audition d’un enfant dans le cadre d’une procédure judiciaire est soumise à une demande écrite et que des juges ont rejeté de telles demandes au motif qu’elles étaient mal formulées. Il note en outre avec préoccupation que des enfants vulnérables ou marginalisés, comme les enfants faisant l’objet d’un placement administratif et les enfants handicapés, ne sont souvent pas consultés sur les questions qui les concernent. » d o s s i e r Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES documentée et objective. Et l’on arriverait certainement à la conclusion que dans certains secteurs, les enfants de l’Hexagone marchent bien sur deux pieds et avancent vite ; alors que dans d’autres pas, ils boitent, ou simplement demeurent immobiles. Verre à moitié vide ; verre à moitié plein. Simplement, il est bon de redire, en conclusion, que la CDE ne liste pas des droits, mais apporte une nouvelle manière de considérer les enfants comme des titulaires de droits, qu’ils peuvent progressivement exercer de manière autonome. Cette évidence déclenche une nouvelle dynamique démocratique, dans un corps social où il y a, depuis le 20 novembre 1989, des hommes, des femmes et des enfants ; ces derniers ne sont ni choses, ni enfants de compagnies, ni jouets pour s’amuser ! Il faut aider les acteurs politiques à changer d’attitude et à respecter les obligations que les États ont contractées envers leurs enfants. Dans le même esprit, tous, adultes, parents, professionnels, doivent aussi changer d’état d’esprit et passer de l’assistantialisme au respect des droits. Document téléchargé depuis www.cairn.info - St.Francis Xavier University - - 132.174.255.250 - 10/09/2018 14h13. © ERES LES CAHIERS DYNAMIQUES � N° 69 25








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