Robert Nivelle

général français, du début du XXe siècle

Robert Nivelle, né le à Tulle et mort le à Paris 16e, est un général de division français, grand-croix de la Légion d'honneur et médaillé militaire.

Robert Georges Nivelle
Le Général Nivelle en 1917.
Biographie
Naissance

Rue de la Barrière (d) (Tulle)Voir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Sépulture
Caveau des gouverneurs (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom dans la langue maternelle
Robert Georges NivelleVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Allégeance
Formation
Activité
MilitaireVoir et modifier les données sur Wikidata
Période d'activité
Autres informations
Arme
Conflit
Grade
Distinction
Archives conservées par
signature de Robert Georges Nivelle
Signature dans son dossier de Légion d’honneur.

Il est généralissime et commandant en chef des armées françaises sur le front de l'Ouest pendant la Première Guerre mondiale de décembre 1916 à mai 1917. Il est alors relevé de ses fonctions, et remplacé par le général Pétain, en raison des controverses encore vives aujourd'hui autour de ses options stratégiques, particulièrement meurtrières notamment au Chemin des Dames. Dès sa mort, il est cité comme la victime de ceux qui « ont cherché des boucs émissaires au lieu d’avouer leurs fautes[2] ».

Biographie

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Origines et formation

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La famille Nivelle est d'origine poitevine et protestante, de Pamproux dans les Deux-Sèvres. Le père de famille, Marie Jacques Auguste Nivelle est militaire ; son épouse Theodora Luisia Sparrow vient du Kent[3].

Né à Tulle, où est stationné le capitaine Nivelle, il ne va y revenir qu'en 1920[4]. Artilleur de formation, reçu à Saint-Cyr et à l’École polytechnique, en 1874, il opte pour cette dernière avec la promotion 1876 et en sort diplômé, le . Sous-lieutenant élève à l’École d’application de cavalerie, en 1878, il est lieutenant au 1er régiment d’artillerie en 1880 ; capitaine, en 1887, il est affecté au 19e régiment d'artillerie à Nîmes, au grade de lieutenant[5].

Chef d’escadron, en 1901 ; lieutenant-colonel, en 1908 ; il sert en Indochine en tant qu'officier d'artillerie, participe au corps expéditionnaire envoyé en Chine, avec le général Voyron qui l’avait réclamé dans son état-major, pour réprimer la révolte des Boxers. Breveté d’Etat-major, il sert à l’état-major de l’armée, en 1900, puis en Afrique, en Algérie[5].

Première Guerre mondiale

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Colonel commandant le 5e régiment d'artillerie, depuis le 25 décembre 1911, lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale, promu général de brigade en même temps que Pétain, en octobre 1914, au début de la Première Guerre mondiale, il s’illustre d'abord dans la bataille de Dornach (), en détruisant à l’ennemi 24 pièces d’artillerie, ce qui lui vaut sa première citation, puis lors de la bataille de l’Ourcq (5-10 septembre 1914), où ses canons mettent en déroute le 4e corps de la 1re armée du général von Kluck, qui menaçait fortement le 70e corps. Quinze jours plus tard, il réussit un autre coup sur l’Aisne. Général de brigade, en octobre 1914, il se distingue sur l’Aisne, notamment en janvier 1915, devant Soissons[5].

En 1915, commandant la 61e division d’infanterie, il a mis au point un projet d’offensive pour enlever le saillant face à la ferme de Quennevières, près de Moulin-sous-Touvent, sur le front tenu par la 6e armée du général Dubois. L'opération de diversion est lancée le 6 juin 1915 afin de soulager le front de l’Artois. Le , après onze jours de combats acharnés, la bataille de Quennevières a entraîné des pertes françaises s’élevant à 134 officiers et 7 700 hommes, tandis que 4 000 Allemands ont été mis hors de combat pour des gains de terrains limités, mais la ligne allemande a été crevée. En , il commande le 30e corps d’armée. Après de nombreux succès en Picardie, il amène ce corps devant Verdun.

Le 19 avril 1916, Joffre qui trouve Pétain trop défensif à Verdun, décide de le nommer au commandement de la IIe armée jusqu'au 15 décembre et sa charge au commandement à Verdun se termine le 19 décembre, soit jusqu'au lendemain de la fin de la bataille. Quant à Pétain, il est promu au commandement du Groupe d'armées du Centre, Nivelle prend son commandement le . Il échoue à reprendre aux Allemands le fort de Douaumont aux côtés du général Mangin, opération durant laquelle la critique lui attribuera peu de considérations pour la vie humaine[b]. Le fort sera quand même repris. Cette opinion est néanmoins aujourd'hui combattue par les travaux de Denis Rolland qui défend la thèse que cette réputation de boucher est le résultat de la construction du mythe du « sauveur de Verdun » où, pour élever Pétain, il était politiquement avantageux de dévaloriser les autres généraux[7]. Nivelle perd, en juin, le fort de Vaux, qui sera repris en novembre 1916. Il soutient les propositions d'attaque de son subalterne, le général Mangin. Ensemble, ils reprennent les forts de Douaumont et de Vaux, et mèneront cette offensive jusqu'à la victoire, le 18 décembre 1916. À partir du , les Allemands sont obligés de retirer des troupes pour faire face à la bataille de la Somme. Nivelle stoppe leur dernière offensive près du fort de Souville.

Le 13 septembre 1916, tandis que la ville de Verdun reçoit la Légion d'Honneur, la Croix de Guerre et plusieurs décorations étrangères, le général Nivelle reçoit la plaque de grand officier de la Légion d'honneur. Jusqu'à décembre Nivelle conduit des offensives pour regagner le terrain perdu. En octobre, il lance la grande offensive menée par le général Mangin, le fort de Douaumont est repris et, en novembre, le fort de Vaux.

Joffre note dans ses mémoires:

« Si l'histoire me reconnaît le droit de juger les généraux qui opérèrent sous mes ordres, je tiens à affirmer que le vrai sauveur de Verdun fut Nivelle, heureusement secondé par Mangin[8]. »

Général en chef

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À la suite de ces victoires, le 25 décembre 1916, et parce que ses promesses d'une victoire rapide séduisaient la commission de l'Armée à la Chambre, il est choisi pour remplacer comme commandant en chef des armées le général Joffre, élevé à la dignité de maréchal de France, qui depuis la bataille de la Marne n'a obtenu aucun résultat décisif et est jugé trop statique.

Il décide de mettre fin à la guerre d'usure menée autour de Verdun et de revenir à « l'attaque brusquée » : il compte emporter la décision par des attaques frontales massives à l'abri d’un rideau de feu. De mère britannique, il parle couramment l'anglais. Lloyd George, à son poste depuis deux mois, accepte, sans le soutien de son gouvernement ou de son roi, de placer des troupes britanniques sous son commandement.

Nivelle ne bénéficie néanmoins pas de la liberté d'action de son prédécesseur. Autant Joffre montait ses offensives comme il l'entendait, autant Nivelle doit rendre des comptes et se voit imposer de nombreuses modifications. Il ne trouve une adhésion totale ni parmi les politiques ni parmi les militaires[9].

Fin , la date de l'attaque conjointe avec les troupes britanniques sur le front entre Vimy et Reims est fixée pour avril. Le front a la forme d'un angle droit : entre Vimy et Soissons, le front est d'orientation nord-sud et ouest-est entre Soissons et Reims. Tandis que les Anglais attaqueront sur la ligne entre Vimy et Soissons, les Français le feront entre Soissons et Reims afin d'affronter les Allemands selon deux directions différentes. Sûrement pour prévenir une telle offensive, dont l'ampleur ne permet pas de garder le secret absolu, les Allemands se replient du 15 au sur la ligne Hindenburg. Leur front est réduit de 70 kilomètres, permettant d'économiser de nombreuses divisions. L'angle droit de la ligne de front est gommé : la ligne de défense s'étend désormais dans une direction nord-ouest/sud-est de Vimy à Reims en passant par le Chemin des Dames. Les Alliés mettent une semaine à se rendre compte de l'ampleur de ce retrait. Le plan initial de l'offensive est désormais caduc. Nivelle et ses généraux adaptent leur projet à cette situation nouvelle et dissocient l'attaque anglaise sur Vimy de l'attaque française qui se centrera sur le Chemin des Dames.

Le , le gouvernement Briand est remplacé par celui d'Alexandre Ribot qui prend pour ministre de la Guerre Paul Painlevé, hostile à Nivelle[9]. Devant répondre aux critiques de militaires comme de politiques, Nivelle se sent discuté et offre sa démission début avril[2]. Celle-ci est refusée et le pouvoir politique, inquiet d'un possible effondrement du front russe, décide de maintenir la date de l'offensive[9].

On a prétendu que garder un secret n’était pas le fort de Nivelle, et il aurait parlé de son offensive au cours d’un diner[10]. Il parlait également de son projet aux journalistes (sans toutefois en exposer le plan précis). Les Allemands saisirent plusieurs exemplaires de son plan d’attaque à Sapigneul dans la sacoche d'un sergent-major et à Maison-de-Champagne dans une tranchée qu’ils avaient conquise. après). Informé, Nivelle, sûr de lui, ne voulut pas modifier son plan d’opérations. Les Allemands auront donc eu le temps de se préparer à accueillir les Français et leurs alliés[11]. Le front allemand de 60 km, entre l'Ailette et le Nord de Reims, passe de 6 à 12 divisions, il y a en outre 12 divisions de réserve prêtes à être jetées sur le Chemin des Dames. L'offensive qu'il déclenche n’a donc aucun effet de surprise contre une très forte défense le , et la bataille du Chemin des Dames, également nommée « offensive Nivelle », se solde par un échec et est très coûteuse en vies humaines : les Alliés perdent 350 000 hommes (morts ou blessés) pour un gain de terrain minime. Elle n'est cependant pas sans résultats, car les Allemands perdent beaucoup d'hommes et de matériel.

Néanmoins, c'est l'opération de trop[9]. Nivelle paraît alors découragé, brisé, vieilli de dix ans[12]. Painlevé, qui ne cessait de le dénigrer avec le soutien en coulisse de Pétain, le remplace très rapidement par ce dernier, le [2]. Nivelle pâtit surtout du fait que chacun avait fondé ses espoirs sur lui[9] ; bientôt allaient éclater les mutineries de 1917.

Surnommé dès les premiers jours de la bataille du Chemin des Dames « le boucher » du fait de son obstination, cette prétendue obstination est encore une construction a posteriori avec les manœuvres de Painlevé[7]. Il est aujourd'hui démontré que la prise de commandement par le général Pétain a conduit à autant de pertes dans le secteur du chemin des Dames[7]:235. Finalement, l'offensive du Chemin des Dames s'est soldée par moins de pertes que les offensives de Champagne 1915 (179 500), Somme en 1916 (194 000) ou la défense de Verdun en 1915 (348 300)[7]:236 ; elle s'est déroulée dans un temps bien plus court aussi. Une commission d'enquête est instituée. Dirigée par le général de division Joseph Brugère, elle statue sur la responsabilité du général Nivelle : « Pour la préparation comme pour l'exécution de cette offensive, le général Nivelle n'a pas été à la hauteur de la tâche écrasante qu'il avait assumée[13]. »

Fin de carrière

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Nivelle voit sa disgrâce amoindrie, en , lorsqu'il est nommé par Clemenceau commandant en chef des troupes françaises d'Afrique du Nord, à la tête du 19e corps d'armée à Alger[9]. Toutefois, il est l'un des seuls généraux commandants en chef à ne pas avoir participé aux Fêtes de la Victoire, le . Le retour en métropole vient une fois la paix revenue, lorsqu'il est nommé le au Conseil supérieur de la guerre puis inspecteur du gouvernement militaire de Paris et des 14e et 15e corps d’armée coloniale. Le , il est élevé à la dignité de grand-croix de la Légion d'honneur et décoré de la médaille militaire.

En 1921, il est nommé président de la commission interalliée de Berlin. Atteint par la limite d’âge en , il quitte le conseil supérieur de la guerre et il est maintenu en activité sans limite de durée. Mort d'une double congestion pulmonaire en mars 1924 dans le 16e arrondissement de Paris, son corps est inhumé au cimetière de Passy, suivi par un cortège, le . Une cérémonie a lieu au temple protestant de l'Étoile vers 8 h 30, présidée par le pasteur Monod, puis le ministre de la Guerre André Maginot prononce l'éloge funèbre[7]:310,[14]. Enfin il est transféré dans le caveau des gouverneurs aux Invalides le [7]. Sa seconde épouse, née Marie-Joséphine Glamard, est morte en 1950 à 87 ans.

Hommages

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  • Dans sa ville natale de Tulle, la place qui porte son nom à compter de 1916 est rebaptisée en 1944, au nom du résistant Albert Faucher[4].
  • Une plaque rend hommage au général Nivelle aux n° 33-35 rue de la Tour à Paris, là où il est mort.
  • Une rue du Général Nivelle se trouve à Verdun, et une autre à Joué-lès-Tours.

États de services

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En 1916 par Jules Gervais-Courtellemont.
 
Plaque aux no 33-35 rue de la Tour.

Distinctions

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Françaises

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(Nota : la médaille militaire se porte en avant de la LH pour les officiers généraux ayant commandé au front, attention selon La Grande Chancellerie aucun texte officiel n'existe et il s'agit d'une simple habitude)

  Chevalier de la Légion d'honneur le ,
  Officier de la Légion d'honneur le ,
  Commandeur de la Légion d'honneur le ,
  Grand officier de la Légion d'honneur le ,
  Grand-croix de la Légion d'honneur le  ;

Étrangères

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Notes et références

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  1. Plus haut grade, général de corps d'armée et général d'armée étant des rangs et appellations, et maréchal de France une dignité dans l'État.
  2. Malcolm Brown parle du « fougueux et versatile général Robert Nivelle, maitre de la publicité et général débordant d'assurance persuasive[6]. »

Références

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  1. « https://francearchives.fr/fr/file/ad46ac22be9df6a4d1dae40326de46d8a5cbd19d/FRSHD_PUB_00000355.pdf »
  2. a b et c Jean-Bernard, « La Malchance de Nivelle », Le Petit Champenois, Reims, Chaumont, vol. 41, no 12120,‎ , p. 1 (ISSN 2017-9103, lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  3. Denis Rolland, Nivelle. L'inconnu du Chemin des Dames, Paris, Imago, , p. 19-21.
  4. a et b Margaux Rousset, « Robert Nivelle, Tulliste controversé : La mauvaise réputation du Général Nivelle remise en question par Denis Rolland », La Montagne,‎ (ISSN 0767-4007, lire en ligne, consulté le ).
  5. a b et c Jules René Poirier (d)  , La Bataille de Verdun : 21 février-18 décembre 1916, Paris, Étienne Chiron, , 304 p., Illustr. ; cartes ; in-8º (OCLC 4790029, lire en ligne), p. 177.
  6. (en) Malcolm Brown, Verdun 1916, New York, The History Press, , 240 p. (ISBN 978-0-75096-251-3, OCLC 893331459, lire en ligne), p. 88.
  7. a b c d e et f Denis Rolland, Nivelle, l'inconnu du Chemin des Dames, Paris, Imago, , 350 p., illustr. ; 23 cm (ISBN 978-2-84952-166-3, OCLC 779875151).
  8. Mémoires du Maréchal Joffre, Volume 2, 1932
  9. a b c d e et f Henri Ortholan, « 1917. La tragédie du Chemin des Dames », La Nouvelle Revue d'histoire, no 92, septembre-octobre 2017, p. 29-32.
  10. Jean Daujat, La Face interne de l’histoire, Paris, Pierre Téqui, , 950 p., in-8º (ISBN 978-2-74030-424-2, OCLC 1236074526, lire en ligne), p. 605.
  11. Henri Castex, L’Affaire du Chemin des Dames, Paris, Imago, , 192 p., 24 cm (ISBN 978-2-84952-512-8, OCLC 715554399, lire en ligne), p. 13.
  12. Denis Rolland, op. cit., p. 257.
  13. « Robert, Georges Nivelle (1856-1924) : Chemins de Mémoire - Ministère de la Défense », sur www.cheminsdememoire.gouv.fr (consulté le ).
  14. Agence Rol, Obsèques du général Nivelle [corbillard devant le temple de l'Étoile, avenue de la Grande-Armée], (lire en ligne sur Gallica).

Bibliographie

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Liens externes

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