Droit C

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 68

Sciences Économiques et Gestion

Semestre : S 3

Introduction à l’étude de droit

Professeurs : Mohammed ZEHIRI


Ouafae MAKOUDI
Abdelhalim LARBI
Kaoutar BALBOUL
Meryem LAKHDAR

Année : 2020 – 2021

1
Table des matières
Introduction ............................................................................................................................................. 4
PARTIE I. LE DROIT OBJECTIF ......................................................................................................... 7
Chapitre 1. La règle de droit .................................................................................................................... 9
Section 1. Les caractères de la règle de droit ...................................................................................... 9
1.1. Le caractère obligatoire de la règle juridique ...................................................................... 9
1.2. Le caractère général et abstrait de la règle juridique ......................................................... 11
1.3. Le caractère coercitif de la règle juridique : la sanction étatique ...................................... 12
Section 2. La règle de droit et les autres règles de conduite sociale.................................................. 14
2.1. La règle de droit et les règles de morale ................................................................................. 14
2.2. La règle de droit et les commandements religieux ................................................................. 16
2.3. La règle de droit et les règles de bienséance ou de convenance ............................................. 18
Chapitre 2. La classification des branches de droit ............................................................................... 19
Section 1. Classification relative au contenu de la règle de droit ...................................................... 19
1.1. Les règles de fond.............................................................................................................. 19
1.2. Les règles de forme ........................................................................................................... 19
Section 2. Classification relative à la force obligatoire de la règle de droit ...................................... 19
2.1. Les règles impératives ............................................................................................................ 20
2.2. Les règles supplétives ............................................................................................................. 20
2.3. Les divergences entre les règles impératives et les règles supplétives ................................... 20
Section 3. Critère relatif à la nature des relations juridiques (droit public et droit privé) ................. 22
3.1. La distinction entre droit public et droit privé ........................................................................ 23
3.2. Les matières relevant du droit privé ....................................................................................... 24
3.3. Les matières relevant du droit public ..................................................................................... 27
3.4. Les matières mixtes ................................................................................................................ 28
Chapitre 3 : Les sources de la règle de droit. ........................................................................................ 30
Section 1 : Les sources directes écrites : les textes ........................................................................... 30
1.1. La hiérarchie des normes ................................................................................................... 30
1.2. Les différents textes du droit marocain ............................................................................. 31
1.3. L’application des textes ..................................................................................................... 36
1.4. Le cas spécifique du droit musulman ................................................................................ 39
Section 2. Les sources non écrites : La jurisprudence et la doctrine ................................................. 48
2.1. La jurisprudence ................................................................................................................ 48
2.2. La doctrine ......................................................................................................................... 49

2
PARTIE II : LES DROITS SUBJECTIFS ............................................................................................ 50
Chapitre 1. Les titulaires des droits subjectifs ....................................................................................... 50
Section 1. Les personnes physiques .................................................................................................. 50
1.1. La personnalité juridique des personnes physiques ........................................................... 51
1.2. L’identification des personnes physiques .......................................................................... 52
Section 2: Les personnes morales...................................................................................................... 54
2.1. La notion de personne morale ................................................................................................ 54
2.2. Le statut juridique des personnes morales ......................................................................... 56
Chapitre 2. Les Sources du Droit Subjectif ........................................................................................... 58
Section 1 : Les actes juridiques ......................................................................................................... 59
Section 2. Les faits juridiques ........................................................................................................... 60
Chapitre 3. L’objet des droits subjectifs ................................................................................................ 61
Section 1. La distinction des droits patrimoniaux et des droits extra patrimoniaux .......................... 61
Section 2. Les biens corporels et les biens incorporels ..................................................................... 64
Section 3. Classification des choses .................................................................................................. 64
Section 4. La distinction des meubles et des immeubles ................................................................... 65

3
Introduction
L’homme est, par sa nature, social. En principe, il n’est jamais isolé mais il est
fait pour vivre en société. Il est porté à organiser sa vie avec les autres hommes.
Donc, il appartenait à une communauté humaine ou à un état. Autrement dit,
l’homme fait partie d’une société qui nécessite des relations entre ses membres
et des principes qui déterminent et protègent ses relations.

Naturellement, dans le cadre d’une société, plusieurs actes et rapports humains


et sociaux naissent. Par conséquent, des problèmes et des litiges surgissent.
Ainsi, l’individu ne doit pas bénéficier d’une liberté totale ou absolue parce
qu’elle peut porter atteinte aux libertés des autres. Donc, il fallait élaborer des
règles et des normes qui limitent ces libertés totales et qui organisent les
relations humaines en société. Ce sont ces règles qui constituent ce qu’on
appelle le droit. Ceci dit, le droit est nécessaire pour une société. C’est la raison
pour laquelle toute société ancienne ou contemporaine a établi un système
juridique qui régit la société et surgit les rapports humains et sociaux.

Qu'est-ce que le droit? Quelles sont les branches, les classifications et les
sources de droit ? Pourquoi doit-on s'instruire en droit et développer nos
connaissances et nos habilités juridiques? …etc. Ce sont normalement les
questions qui doivent vous préoccuper à ce début de ce cours.

Après avoir obtenu vos baccalauréats, vous avez choisi d’entreprendre des
études en économie et gestion et vous avez des cours de droit dans votre
cheminement académique en licence fondamentale. De même, vous venez
d’approcher la discipline de l’économie et gestion mais aussi d’étudier des
modules de droit, pourquoi? Quelle est l’utilité de ces modules dans votre
parcours universitaire en économie et en gestion?

L’étude du droit par des économistes et des gestionnaires comme vous est sans
nul doute une richesse de l’analyse économique. Le droit intervient dans le
domaine économique pour rétablir un minimum d’ordre, d’honnêteté et de
sécurité et ce, par la réglementation de la vie économique. Donc, le droit joue un
rôle essentiel dans la planification et la gestion de l’économie nationale.
L’organisation de cette économie nationale se réalise à l’aide d’instruments
juridiques tels que les lois, décrets, ordonnances. Par exemple, les règles
juridiques apparaissent dans l’activité des entreprises. En vertu des dispositions
juridiques, nous précisons le cadre juridique concernant la création des
entreprises.

4
Il parait clair que vous avez tous quelques idées vagues de ce qu’est le droit. La
majorité des humains pensent, sans doute, que le droit est particulièrement lié à
la contrainte et à la sanction. Ils croient que la signification de droit est limitée à
ce qui ordonne et ce qui interdit. Or, le sens du droit est beaucoup plus large que
cela. Il constitue un vaste champ de connaissance et de pratique juridique.
Partout, il y a du droit. Le droit régit la vie en société. Il surgit dans tous les
rapports humains et sociaux (rapports entre les époux, rapports entre les parents
et les enfants, rapports économiques, rapports des individus avec l’État, rapports
des États entre eux, etc.).

Autrement dit, la discipline du droit n’est pas liée seulement aux litiges et aux
poursuites. Le droit est omniprésent dans notre vie quotidienne. Cette présence
nécessite la connaissance de ses origines et de sa raison d’être. C’est ainsi que ce
cours d’Introduction à l’étude de droit consiste à donner une vue d’ensemble de
la règle juridique et des notions de base de droit. Il s’agit principalement d’un
éclairage dans le système juridique marocain actuel.

Bien que ce cours d’Introduction à l’étude du droit soit essentiellement destiné


aux étudiants de 1ère année de licence en droit et aussi à vous en tant
qu’étudiants d’économie et de gestion, il est important de souligner que la
connaissance des sources du droit vous permet de comprendre la réelle
implication du droit dans notre société qui devient de plus en plus judiciarisée.
C’est la raison pour laquelle le cours d’Introduction à l’étude du droit constitue
la connaissance de base pour tout juriste mais aussi pour tout économiste ou
gestionnaire.

Ainsi, nous soulignons que le droit est un phénomène évolutif. La


règlementation de la société change et évolue parce que la société et les hommes
qui la composent, évoluent. C’est pourquoi, le droit est considéré comme un
phénomène vivant qui s’adapte aux nouvelles circonstances susceptibles d’être
surgies dans la société.

De plus, le droit, en tant que science juridique, a aussi son langage, son
vocabulaire ou sa terminologie. Certainement, il emprunte du langage habituel
son vocabulaire mais le sens en est parfois différent, plus large ou plus restreint.
Les mots ont aussi parfois deux sens. Prenant par exemple le mot "droit". Dans
un premier sens, il y a le droit qui vise l'ensemble des règles juridiques, ce qu'on
appelle "le droit objectif" et qui peut être traduit par le mot « Qânûn » en arabe,
« Law » en anglais. Dans un second sens, on entend par droit l'ensemble des
prérogatives, avantages et privilèges reconnues aux personnes dans leurs
rapports avec autrui sous la protection de l’état, on parle alors du "droit
subjectif" qui équivaut au terme arabe Haq et au terme anglais Right. Parmi les

5
droits subjectifs, nous citons, à titre d’exemple, le droit à la vie, le droit de vote,
le droit de propriété, etc.

Le droit recouvre, donc, deux ensembles distincts qui diffèrent fortement, même
qu'ils se situent en relation. Donc, le présent cours d'Introduction à l’étude du
droit suppose d'étudier d'une part le droit objectif et, d'autre part, le droit
subjectif.

Nous allons traiter, tout au long de ce semestre, les aspects essentiels et les
notions fondamentales relativement à l’étude du droit marocain. Rappelons qu’il
s’agit seulement d’une introduction à l’étude de droit. C’est pourquoi, nous
visons fournir un portrait de la discipline du droit marocain. Le contenu de ce
cours est divisé en deux parties portant respectivement sur le droit objectif (la
règle de droit, les grandes branches de droit positif, les sources du droit), les
droits subjectifs (Les personnes : les titulaires ou les sujets de droit, la
classification des droits subjectifs [les droits patrimoniaux ‫ الحقوق المالية‬ainsi
que les droits extra-patrimoniaux ‫ ] الحقوق غير المالية‬et aussi les sources des droits
subjectifs). Ce sont ces deux parties qui feront principalement l’objet des
séances dispensées tout au long de ce semestre.

6
PARTIE I. LE DROIT OBJECTIF
Après avoir dégagé les définitions de la notion de droit et expliqué le rôle et la
fonction de droit dans la société, il s’agit maintenant de commencer la première
partie de ce cours qui porte sur le droit objectif en examinant la règle de droit,
les grandes branches de droit positif et les sources du droit.

La notion de « droit objectif », en tant qu’objet d’étude et de connaissance, ou


encore en tant que discipline universitaire, désigne l’ensemble des règles qui
régissent et qui concernent la vie dans une société humaine. Il s’agit d’un
« corps de règles (ou normes) générales, impersonnelles et obligatoires destinées
à gouverner la vie sociale »1. C’est « l’ensemble des règles imposées par
l’autorité publique, pour régir l’organisation même de la société et la situation
qui est faite, dans cette société, aux individus »2. Il « représente l’ensemble des
règles de droit qui gouvernent les rapports des hommes vivants en société »3.

L’analyse de ces définitions de droit objectif permet de constater que l’ensemble


des règles qui constituent le droit positif ayant vocation à régir et à gouverner la
vie en société. Il règlemente les rapports humains et sociaux (rapports entre les
époux, rapports entre les parents et les enfants, rapports économiques, rapports
des individus avec l’État, rapports des États entre eux, etc.). Ce sont des rapports
qui mettent en relation les individus entre eux ainsi que l’état (l’autorité
publique) et les particuliers. D’où la différenciation classique entre le droit
public et le droit privé.

Ainsi, il est essentiel de noter que ces règles qui déterminent ces relations
humaines et sociales sont indispensables pour protéger les libertés individuelles
et pour éviter la généralisation de la « loi de la jungle », du plus fort ou du plus
influent, etc. L’ensemble de ces règles juridiques « apparaissent avant tout
comme des règles de conduite qui sont absolument nécessaires : sans elles, la vie
en société serait inconvenable »4.

De plus, il ressort de ces définitions que les règles qui forment le droit objectif
sont générales et impersonnelles. C’est-à-dire, elles ne s’adressent pas à une
personne en particulier. Elles s’appliquent, sans distinction, à toute personne et
de la même manière sur un espace donné. Un tel caractère ainsi que d’autres
seront étudiés de manière détaillée en traitant la règle de droit.

1
Layachi Messaoudi et Abdallah Ounnir, Introduction à l’étude du droit et au droit marocain, Fès, Sofapress,
1998, p. 14.
2
Mohammed Jalal Essaid, Introduction à l’étude du droit, Rabat, collection connaissances, 2000, p. 35.
3
Abdelaziz Squalli, Introduction à l’étude du droit marocain, 4e édition, 1995, p. 25.
4
Mohammed Jalal Essaid, op. cit, p. 35.

7
Vu l’importance de droit objectif et les difficultés qui soulève, nous allons lui
consacrer tout une partie afin que cette essentielle notion soit bien comprise.
Nous abordons, en premier lieu, la règle de droit à travers sa définition, ses
caractéristiques, ses buts, ses fondements et sa distinction des autres règles de
conduite sociale. En second lieu, nous exposons les sources du droit. Cette
section vise à déterminer et analyser les sources de la règle de droit marocain en
traitant celles qui sont officielles ou écrite et celles qui sont non officielles ou
facultatives.

8
Chapitre 1. La règle de droit
D’une manière générale, la règle de droit est un mode d’organisation sociale.
Elle est destinée à gouverner la vie en société. Elle est considérée comme une
règle de conduite sociale, à côté d’autres comme la morale, la religion.
Autrement dit, les rapports sociaux ne sont pas déterminés uniquement par les
règles juridiques mais ils sont aussi régis par d’autres commandements et
principalement ceux qui dépendent de la religion et de la morale. À titre
d’exemple, les crimes comme l’homicide ou le vol sont condamnés par le droit,
la morale ou la religion.

Pour distinguer ces règles, nous soulignons que la règle de droit est
habituellement une règle de conduite sociale dont le respect est assuré par
l’autorité publique. La règle religieuse constitue un commandement prescrit par
la religion, alors que la règle morale est une norme qui établit une opposition
entre le bien et le mal.

C’est ainsi que ce constat nous conduit à préciser dans une première section les
caractères de la règle de droit. Dans une seconde section, nous essayons de
comparer la règle de droit par rapport aux autres règles de conduite. Enfin, la
troisième section sera consacrée à la classification de la règle de droit.

Section 1. Les caractères de la règle de droit

Tel que précisé plus haut, la règle de droit est habituellement une règle de
conduite sociale dont la sanction est assurée par l’autorité publique. C’est une
règle juridique qui réunit un certain nombre de caractères permettant de la
distinguer des autres règles de conduite qui relèvent de la conscience des
individus à savoir, les règles morales ou religieuses.

1.1. Le caractère obligatoire de la règle juridique

La règle de droit n’est pas considérée comme un conseil ou une


recommandation. Elle prescrit un commandement qui doit être respecté. C’est
une règle qui se définit par son caractère obligatoire. Un caractère qui « va lui
permettre d’être respectée par tous les individus au sein de la société et au
besoin par le recours aux sanctions étatiques instaurées »5. Donc, la règle de
droit est une règle de conduite imposée dans les rapports humains et sociaux
pour ordonner la société. Elle contient un ordre d’agir d’une certaine façon.
C’est-à-dire, elle prescrit de faire quelque chose ou elle interdit d’en accomplir.
À cet égard, elle implique une action (porter secours et assistance à quelqu’un
5
Abdelaziz Squalli, op. cit, p. 11.

9
dans le besoin) ou une abstention (interdiction de voler, de tuer, etc.). C’est une
règle juridique qui émane essentiellement de l’état. Autrement dit, la règle de
droit est une règle élaborée par l’autorité publique qui l’impose à tous les
membres de la société et assure son respect et son application. À ce propos,
Abdelaziz Squalli affirme que « l’existence de la contrainte étatique (sanction)
est une garantie du respect de la règle de droit, puisque seul l’état détient le
monopole de cette contrainte. C’est l’état qui organise la société et par
conséquent qui édites les règles de droit »6.

Cependant, ce caractère obligatoire de la règle de droit n’est pas uniforme.


C’est-à-dire, il ne se présente pas toujours sous la même force obligatoire parce
qu’il existe des règles qui s’imposent de manière plus impérative que d’autres.
C’est la raison pour laquelle il faut distinguer entre la règle de droit impérative
et la règle supplétive ou interprétative.

1.1.1. La règle impérative ou d’ordre public

C’est une règle qui présente une force obligatoire plus élevée puisqu’elle
s’impose de manière absolue à tous et, ni les individus ni les juridictions ne
peuvent écarter son application. Par exemple, le fait de porter atteinte à la vie
d’autrui est une infraction incriminée par le code pénal. C’est une règle
impérative auquel chacun doit se soumettre et personne ne peut échapper à son
application. Donc, celui qui ne respecte pas cette règle tombe dans l’illégalité et
des poursuites seront engagées à son égard afin de lui appliquer la sanction
prévue. C’est ainsi que les règles impératives sont considérées comme des règles
d’ordre public parce qu’elles traduisent les principes fondamentaux de notre
société et elles sont nécessaires au maintien de l’ordre public.

1.1.2. La règle supplétive ou interprétative

Au contraire de la règle impérative, les individus peuvent écarter une règle


supplétive parce que les règles supplétives ou facultatives ou interprétatives
indiquent ce qui est souhaitable que les individus fassent7. Ce sont des règles qui
ne s’appliquent que si les personnes les choisissent pour règlementer leurs
relations. Autrement dit, les règles supplétives ne s’appliquent que dans la
mesure où les personnes n’ont pas exprimé une volonté contraire. Elles sont
caractérisées par le fait que leur application peut être écartée par une
manifestation de volonté des personnes. Nous citons, à titre d’exemple, le
contrat de mariage dans lequel l’épouse peut prévoir une clause de monogamie.

6
Abdelaziz Squalli, op. cit, p. 11-12.
7
Abdelaziz Squalli, op. cit, p. 12.

10
Aussi, dans un contrat de vente, les parties peuvent préciser le moment de
paiement et de livraison. Dans ce cas, le législateur ne fait qu'interpréter la
volonté probable des futurs contractants. Il suppose que ces personnes ont voulu
telle ou telle chose, à moins qu'elles n’aient manifestées une volonté en sens
contraire8.

1.2. Le caractère général et abstrait de la règle juridique

La règle de droit est une règle générale et abstraite. C’est-à-dire, elle est
impersonnelle. Elle ne s’adresse pas à une telle ou telle personne en particulier
et ne traite pas spécifiquement son cas. Elle s’adresse à tous les individus qui
remplissent ses formalités et ses conditions. À titre d’exemple, l’article 209 du
code de la famille fixe l’âge de la majorité légale à dix-huit années grégoriennes
révolues. Cette disposition constitue une règle générale et abstraite parce qu’elle
s’adresse à toute personne (homme ou femme) en la considérant, à l’âge de 18
ans, apte juridiquement à exercer ses droits et ses obligations à moins qu’un
motif quelconque établi ne lui limite ou ne lui fasse perdre cette capacité (voir
l’article 210 du code de la famille). Donc, la généralité et l’abstraction de la
règle de droit signifient que celle-ci est impersonnelle. Elle « ne s’adresse pas à
une personne déterminée individuellement, mais à toutes les personnes qui
remplissent les conditions d’application de cette règle. En d’autres termes, cela
signifie que la loi est la même pour tous »9. Nous citons, par exemple, l’article
77 du code des droits et obligations marocain qui édicte que tout fait quelconque
de l'homme qui, sans l'autorité de la loi, cause sciemment et volontairement à
autrui un dommage matériel ou moral, oblige son auteur à réparer ledit
dommage, lorsqu'il est établi que ce fait en est la cause directe. Cette disposition
constitue une règle générale et abstraite qui ne concerne pas un dommage
déterminé spécifiquement, mais tout dommage qui peut être causé par un fait
quelconque de l’homme.

Il est essentiel de noter que la généralité et l’abstraction de la règle juridique ne


visent pas un groupe ou une catégorie des gens bien déterminé. Elle s’applique à
toutes les personnes, en principe. C’est exceptionnellement qu’elle vise des
catégories abstraites comme les commerçants, les juges, les fonctionnaires, les
médecins, les réfugiés, etc.

Enfin, nous soulignons que la généralité et l’abstraction de la règle de droit


assure l’égalité de tous et conduit la société vers l’instauration d’un ordre
durable et d’une stabilité permanente qui doit régir le présent et l’avenir.

8
Mohammed Jalal Essaid, op. cit, p. 47.
9
Abdelaziz Squalli, op. cit, p. 16-17.

11
1.3. Le caractère coercitif de la règle juridique : la sanction étatique

La règle de droit est aussi caractérisée par un autre élément essentiel à savoir la
contrainte étatique. Tel que précisé plus haut, la règle de droit est, en principe,
une règle obligatoire qui doit être respectée par tous les individus au sein de la
société. Pour garantir ce caractère obligatoire, le recours aux sanctions étatiques
s’impose. Seule la puissance publique qui est habilitée à faire respecter la règle
de droit. Autrement dit, c’est l’autorité publique qui a le monopole de la
contrainte étatique et ce, par l’instauration d’une série de sanctions qui
garantissent le respect des règles de droit.

En parcourant l’ensemble des textes législatifs qui encadre notre système


juridique marocain, nous constatons que les sanctions sont nombreuses et
peuvent être divisées, principalement, en deux catégories : les sanctions civiles
et les sanctions pénales.

Les sanctions civiles se répartissent en deux grandes catégories à savoir la


répartition ou la contrainte. Premièrement, les sanctions réparatrices visent la
réparation d’un dommage causé par une action ou un comportement fautif. Cette
réparation prévoit la nullité de l’acte vicié (qui constitue une violation d’une
règle de droit) ou les dommages-intérêts (Il s’agit de l’attribution d’une somme
d’argent égale à la valeur du dommage). Deuxièmement, les sanctions civiles
peuvent produire une contrainte ou une exécution. Il s’agit de faire exécuter une
obligation, un contrat, un engagement, etc. La sanction prend la forme d’une
exécution forcée comme, par exemple, l’expulsion d’un local, la saisie des biens
de celui qui ne veut pas payer.

En ce qui concerne les sanctions pénales, le code pénal


prévoit trois catégories d’infractions pénales qui reposent sur la gravité de la
sanction. On distingue alors : les crimes, les délits et les contraventions.
Comme le précise l’article 111 du code pénal :
« Les infractions sont qualifiées crime, délit correctionnel, délit de police ou
contravention :
L'infraction que la loi punit d'une des peines prévues à l'article 16 est un crime;
L'infraction que la loi punit d'une peine d'emprisonnement dont elle fixe le
maximum à plus de deux ans est un délit correctionnel;
L'infraction que la loi punit d'une peine d'emprisonnement dont elle fixe le
maximum à deux ans ou moins de deux ans, ou d'une amende de plus de 200
dirhams est un délit de police;
L'infraction que la loi punit d'une des peines prévues à l'article 18 est une
contravention ».

12
Les crimes : Ils sont considérés comme les infractions les plus grave. C’est une
catégorie d’infraction qui couvre les actes portant une atteinte grave à l’ordre
social qu’on ne peut réparer que par une peine de mort ou une longue reclusion
tel que mentionnée dans l’article 16 du code pénal qui dispose que : « Les peines
criminelles principales sont :
1° La mort;
2° La réclusion perpétuelle;
3° La réclusion à temps pour une durée de cinq à trente ans;
4° La résidence forcée;
5° La dégradation civique.»

Les délits : Ils sont considères comme des infractions moins graves par rapport
aux crimes. Ce sont des infractions qui causent des atteintes dont leur gravité
n’est pas exceptionnelle, mais suffisante pour que la peine d’emprisonnement
soit encore tenue. Les sanctions encourues sont hybrides c’est-à-dire les peines
dont le minimum se rattachent à une peine de police et le maximum à une peine
correctionnelle. Ces sanctions sont mentionnées dans l’article 111 du code
pénal :
« L'infraction que la loi punit d'une peine d'emprisonnement dont elle fixe le
maximum à plus de deux ans est un délit correctionnel;
L'infraction que la loi punit d'une peine d'emprisonnement dont elle fixe le
maximum à deux ans ou moins de deux ans, ou d'une amende de plus de 200
dirhams est un délit de police ».

Les contraventions : Il s’agit d’une catégorie qui regroupe les infractions les
moins graves. Elles sont punies selon l’article 18 du code pénal qui stipule :
« Les peines contraventionnelles principales sont :
1 - La détention de moins d'un mois ;
2 - L'amende de 30 dirhams à 1.200 dirhams».

En résumé, nous pouvons conclure que, selon la majorité des auteurs, la règle de
droit est une règle juridique à la fois générale, obligatoire et réprimée par la
puissance étatique. C’est principalement ce dernier caractère qui la distingue de
toutes les autres règles de conduite sociale (religieuse, morale ou de bienséance).

13
Section 2. La règle de droit et les autres règles de conduite sociale

Tel que précisé plus haut, la règle de droit est intimement liée à la société
puisqu’elle est destinée à gouverner la vie en société. Elle est considérée comme
une règle de conduite sociale, à côté d’autres comme la morale et la religion. En
fait, afin de mieux cerner le sens de cette règle de droit, il parait essentiel de la
distinguer des autres règles de conduite sociale puisque ces dernières contribuent
aussi comme la règle de droit dans la règlementation de la société.

2.1. La règle de droit et les règles de morale

Traditionnellement, la morale est un ensemble de principes et des règles de


conduite sociale relatives au bien et au mal. Ce sont des valeurs suprêmes
qu’une société veut atteindre et qui s’imposent à la conscience individuelle et
collective comme la sincérité, la justice, l’assistance et le soutien des
nécessiteux, etc. Puisque la règle de droit et celle de la morale constituent des
règles de conduite sociale, quelles sont les différences entre les deux? Pour
répondre à cette question, il fallait préciser leurs points communs et leurs points
de divergences.

2.1.1. Les points communs entre la règle de droit et les règles de morale

Premièrement, les règles de droit et celle de morale sont des règles de conduite
sociale qui organisent les comportements des individus dans la société. Elles ont
en communs des buts semblables comme la justice, la paix publique, la stabilité
sociale, etc.

Deuxièmement, les règles de droit et celles de morale déterminent les droits des
individus ainsi que leurs obligations vis-à-vis eux même ou à l’égard de la
société.

Troisièmement, les règles de droit et celles de morale ont aussi en commun des
caractères semblables. Elles sont considérées comme des règles générales et
abstraites. Elles s’adressent, en principe, à toutes les personnes de la société.

Enfin, les règles de droit et celles de morale sont des règles obligatoires.
Cependant, la contrainte en droit est matérielle alors qu’elle est liée à la
conscience et à l’indignation de la société pour la règle morale.

2.1.2. Les points de divergences entre la règle de droit et les règles de morale

Même s’il existe des points communs entre la règle de droit et les règles de
morale, leurs divergences sont diverses en réalité. Ces divergences peuvent être
14
liées aux éléments suivants : la contrainte, la finalité, l’intention et la
formulation.

Du point de vue contrainte : Il est essentiel de souligner que la contrainte


représente l’élément le plus important que les juristes ont pris en considération
pour distinguer la règle de droit et les règles de morale. À cet égard, la
contrainte en droit est matérielle comme la réclusion, l’emprisonnement,
l’amende, etc. Ce sont des sanctions élaborées par l’autorité publique qui assure
leur respect et leur application. Cependant, les règles de morale ne sont pas
sanctionnées par les pouvoirs publics. C’est-à-dire, la sanction de la morale
apparait dans les remords de la conscience chez le fautif et dans l’indignation de
la société.

Du point de vue finalité : Comme nous l’avons mentionné plus haut, la règle de
droit est conçue pour atteindre un but social, réaliste et opportun. Elle vise
principalement la protection de l’ordre public au sein de la société. C’est une
finalité axiale qui a pour objet la réalisation de la stabilité sociale. Par ailleurs,
les règles de morale sont des valeurs suprêmes qu’une société veut atteindre et
qui s’imposent à la conscience individuelle et collective. Ce sont des règles
idéales et individuelles qui visent conduire l’homme vers la perfection. C’est
pourquoi, contrairement aux règles de droit qui considèrent l’homme normal
comme modèle, les règles de morale visent l’homme parfait comme modèle.

Du point de vue intention : Concernant la règle de droit, pour qu’une infraction


soit commise, il faut que le comportement se matérialise par un fait extérieur. Il
s’agit d’un acte objectivement constatable. Il ne suffit pas d’avoir eu une
intention coupable, il faut qu’un comportement matériel ait été commis. La règle
de droit ne sanctionne pas les intentions coupables tant qu’elles ne se sont pas
matérialisées par un certain comportement. Donc, les règles de droit ne
s’intéressent qu’aux comportements externes de la personne. Cependant, les
règles de morale s’adressent aux intentions profondes de l’homme. Elles sont
liées à la conscience et à l’indignation de la société.

Du point de vue formulation : Comme vous le savez bien, les règles de droit
est un ensemble de dispositions que le législateur indique dans le cadre d’un
texte précis et clair. Par exemple, la règle pénale doit être écrite clairement et
sans ambigüité afin que le citoyen soit informé efficacement sur les infractions
et les peines. Elle doit définir clairement et précisément les éléments constitutifs
de l’infraction et de sa sanction. Par contre, les règles de morale se symbolisent
par les faits sanctionnées dans les consciences des individus et leurs sentiments.

15
2.2. La règle de droit et les commandements religieux

La religion concerne l’ensemble des prescriptions divines déduites du Coran et


de la Sunna. Les ‘oulamâ musulmans reconnaissent unanimement que le
législateur suprême est Dieu. C’est lui qui est la source des prescriptions,
qu’elles soient énoncées explicitement dans les textes révélés à ses prophètes, et
notamment à Mohammad ou que les juristes musulmans les ont extrait ou les ont
déduit par analogie. Ainsi, les commandements religieux englobent trois
catégories de prescriptions : Celles qui relèvent de la relation de l’homme avec
Dieu, celles qui régissent la relation de l’homme avec soi-même et les
prescriptions qui organisent les rapports humains entre eux. De là, il parait
essentiel de clarifier la distinction entre la règle de droit et les règles religieuses
en définissant leurs points communs et ceux de divergences.

2.2.1. Les points communs entre la règle de droit et les règles de religion

En réalité, les règles de droit et celles de religion constituent, tous les deux, des
règles de conduite sociale qui organisent les rapports humains et sociaux dans
une société. C’est pour cela, elles ont en communs des buts et des normes
semblables.

Du point de vue buts : Les règles de droit et de religion ont en commun des
buts semblables comme la justice, la paix publique, la stabilité sociale, etc. Elles
visent, tous les deux, l’organisation de la vie en société soit au niveau civil
(contrat, obligations, vente, etc.) ou au niveau pénal (interdiction de tuer ou de
voler, etc.). Cependant, la réglementation de ces rapports sociaux par les règles
de droit est différente aux règles de religion. Par exemple, les règles de droit et
de religion interdisent l’ivresse sauf que la religion l’interdit catégoriquement
alors que le droit ne sanctionne que la personne trouvée en état d’ivresse
publique et manifeste10.

Du point de vue normatif : Plusieurs commandements religieux ont été adoptés


par le droit et ils sont devenus des règles de droit comme, par exemple, les
dispositions du mariage, du divorce, de la succession, etc. Toutes ces règles sont
inspirées du droit musulman. Ainsi, il existe des règles de religion qui ont été
adoptées, d’une manière indirecte ou non officielle, par le droit. Par exemple,
pour tout ce qui n’a pas été expressément énoncé dans le Code de la famille, il y
a lieu de se référer aux prescriptions du Rite Malékite et/ou aux conclusions de
l’effort jurisprudentiel (Ijtihâd), aux fins de donner leur expression concrète aux

10
Voir l’article 4 du Décret royal n° 724-66 du 11 chaabane 1387 (14 novembre 1967) portant loi, relatif à la
répression de l’ivresse publique (B.O. n° 2873 du 22 novembre 1967, p. 1346).

16
valeurs de justice, d'égalité et de coexistence harmonieuse dans la vie commune,
que prône l’Islam11.

2.2.2. Les points de divergences entre la règle de droit et les règles de religion

Après avoir présenté des points communs entre la règle de droit et les règles de
religion, nous allons aborder leurs divergences qui reposent sur la source, la
contrainte, la finalité et le champ d’application.

Du point de vue source : tel que précisé plus haut, le Coran constitue la source
principale de la règle religieuse. Il représente pour les musulmans la parole
divine transmise par l’archange Gabriel au messager de Dieu, Mohammad,
exprimée en langue arabe et contenant la vérité. Ceci explique que la source des
prescriptions ou des règles divines soit Dieu, exalté soit-Il. Autrement dit, le
législateur suprême est Dieu. C’est Lui qui est la source des prescriptions,
qu’elles soient énoncées explicitement dans les textes révélés à ses prophètes, et
notamment à Mohammad ou que les juristes musulmans les ont extrait ou les ont
déduit par analogie. Cependant, la règle de droit a été élaborée par le pouvoir
législatif. Elle est produite par l’être humain qui est susceptible de tomber dans
l’erreur par oubli, par faute, par désires ou par d’autres circonstances qui
peuvent l’écarter de la justice et de la légalité. C’est pour cela que la règle de
droit reste imparfaite et change selon l’évolution sociale, politique et
économique de la société.

Du point de vue finalité : Les règles de religion visent deux buts : spirituel et
matériel. Elles constituent, pour l’homme, un équilibre entre ces deux finalités.
C’est pourquoi, elles s’intéressent à son comportement interne et externe. C’est
dire que les règles de religion concernent les actions et les intentions des
individus. Cependant, la règle de droit s’intéresse aux comportements qui se
matérialisent par des actes objectivement constatables à part quelques
exceptions qui se résument dans des circonstances aggravantes ou atténuantes
liées à une infraction (préméditation, Guet-Apens).

Du point de vue de la contrainte : la contrainte constitue un facteur essentiel


qui distingue la règle de droit des règles de religion. À cet égard, les deux
catégories de règles s’accordent sur la contrainte ici-bas, mais la sanction dans
l’au-delà est réservée juste à la règle de religion. Autrement dit, la sanction en
droit est mondaine et matérielle, alors que la sanction de la religion est
résurrectionnelle.

11
Voir l’article 400 du code de la famille.

17
Du point de vue champ d’application : la règle de religion s’intéresse
principalement aux intentions des individus. La religion appelle à l’amour et
écarte les mauvais sentiments. Par ailleurs, la règle de droit s’intéresse en
premier lieu au respect de l’ordre public et à la stabilité de la société. Donc, la
règle de religion est plus générale que celle de droit. La première régit tous ce
qui est en relation avec la religion et la vie, alors que la règle de droit gouverne
la vie en société en organisant les rapports humains et sociaux.

2.3. La règle de droit et les règles de bienséance ou de convenance

Les règles de convenance sont des principes et des règles de conduite que les
gens prennent l’habitude de suivre dans leurs rapports quotidiens. Ce sont des
règles qui jouent un rôle important dans les relations sociales. Il s’agit, par
exemple, du salut, des félicitations, des condoléances, des visites, etc. Ce sont
des règles similaires avec celles de droit au niveau du critère de généralité et
d’abstraction. Cependant, les règles de convenance se distinguent de celles de
droit sur les plans suivants : source, finalité et sanction.

Du point de vue source : la source de la règle de droit est la législation élaborée


par le pouvoir législatif à savoir, le Parlement. Par contre, les règles de
convenance relèvent de la société elle-même. Ainsi, contrairement aux règles de
convenance qui restent des principes que les gens prennent l’habitude de suivre,
la règle de droit exige la clarté et la précision. C’est-à-dire, la règle de droit doit
être formulée clairement et sans ambigüité.

Du point de vue finalité : La règle de droit vise principalement la protection de


l’ordre public au sein de la société. C’est une finalité axiale qui a pour objet la
réalisation de la stabilité sociale. Par ailleurs, les règles de convenance visent à
convenir la conduite des individus dans la société. Contrairement aux règles de
droit qui répriment la violation du droit, le manquement ou la désobéissance des
règles de convenance ne porte pas atteinte à l’ordre public et à la stabilité
sociale.

Du point de vue contrainte : la contrainte représente l’élément le plus


important qui distingue la règle de droit des règles de convenance. À cet égard,
la contrainte en droit est matérielle, extérieure et sanctionnée par l’autorité
publique. Par contre, la contrainte des règles de convenance est considérée
comme sanction morale. Elles ne sont pas sanctionnées par les pouvoirs publics.
Autrement dit, la sanction de la règle de convenance se résume dans
l’indignation des gens et la médiocrité des relations sociales.

18
Chapitre 2. La classification des branches de droit
L’étude des branches de droit constitue une identification ou, de préférence, une
exploration de cette discipline juridique. C’est-à-dire, le droit est un gros arbre
composé de plusieurs branches. Chaque branche joue un rôle essentiel dans le
système juridique qui, par lequel, elle conserve son identité, sa spécificité et sa
tangibilité. C’est ainsi que le droit répond à une classification fondée sur le
contenu, la force obligatoire ainsi que la nature des relations juridiques.

Section 1. Classification relative au contenu de la règle de droit

La classification de la règle de droit peut être repartie, sur le plan de son


contenu, en règles de fond d’une part, et règles de forme d’autre part.

1.1. Les règles de fond

Les règles fondamentales ou de fond sont les règles qui déterminent les droits et
les obligations des individus dans leurs rapports juridiques. À titre d’exemple,
les règles de fond relatives au droit pénal qui précisent les catégories des
infractions, leurs éléments constitutifs et leurs sanctions. Ainsi, nous citons
l’exemple des règles de fond relatives au droit civil qui identifient les droits et
les obligations du vendeur et de l’acheteur dans un contrat de vente. Un autre
exemple des règles de fond relatives au droit constitutionnel peut être invoqué. Il
s’agit des règles qui concernent l’organisation des pouvoirs.

1.2. Les règles de forme

Il s’agit de l’ensemble des règles procédurales qui représente la voie judiciaire à


suivre pour réaliser les droits décrétés par la loi. Les règles de forme ou de
procédure visent l'application concrète des règles de droit pour la résolution
d'une affaire à caractère civile ou pénale. Nous citons, par exemple, l’exercice
de l’action civile en justice, les procédures pénales relatives aux recherches et
aux constatations des infractions, etc.

Section 2. Classification relative à la force obligatoire de la règle


de droit

Tel que précisé plus haut, le caractère obligatoire de la règle de droit n’est pas
uniforme. C’est-à-dire, il ne se présente pas toujours sous la même force
obligatoire parce ce qu’il existe des règles qui s’imposent de manière plus
impérative que d’autres. C’est la raison pour laquelle les règles de droit peuvent
être divisées, selon leur force obligatoire, en règles impératives et supplétives.

19
2.1. Les règles impératives

Ce sont les règles qui présentent une force obligatoire plus élevée puisqu’elles
s’imposent de manière absolue à tous et ni les individus ni les juridictions ne
peuvent écarter leur application. Par exemple, le fait de porter atteinte à la vie
d’autrui est une infraction incriminée par le code pénal. Ce sont des règles
impératives auxquelles chacun doit se soumettre et personne ne peut échapper à
leur application. Donc, celui qui ne respecte pas cette règle tombe dans
l’illégalité et des poursuites seront engagées à son égard afin de lui appliquer la
sanction prévue. C’est ainsi que les règles impératives sont considérées comme
des règles d’ordre public parce qu’elles traduisent les principes fondamentaux de
notre société et elles sont nécessaires au maintien de l’ordre public.

2.2. Les règles supplétives

Au contraire de la règle impérative, les individus peuvent écarter une règle


supplétive parce que les règles supplétives ou facultatives ou interprétatives
indiquent ce qui est souhaitable que les individus fassent12. Ce sont des règles
qui ne s’appliquent que si les personnes les choisissent pour règlementer leurs
relations. Autrement dit, les règles supplétives ne s’appliquent que dans la
mesure où les personnes n’ont pas exprimées de volonté contraire. Elles sont
caractérisées par le fait que leur application peut être écartée par une
manifestation de volonté des personnes. Nous citons, à titre d’exemple, le
contrat de mariage dans lequel l’épouse peut prévoir une clause de monogamie.
Aussi, dans un contrat de vente, les parties peuvent préciser le moment de
paiement et de livraison. Dans ce cas, le législateur ne fait qu'interpréter la
volonté probable des futurs contractants, il suppose que ces personnes ont voulu
telle ou telle chose, à moins qu'elles n'aient manifesté une volonté en sens
contraire13.

2.3. Les divergences entre les règles impératives et les règles supplétives

En parcourant la littérature, nous constatons que la doctrine se réfère à l’élément


formel ou verbal et celui de l’ordre public pour distinguer les règles impératives
et les règles supplétives.

L’élément formel ou verbal : Il s’agit de la signification terminologique ou de


la formulation de la règle de droit qui, par laquelle, nous serons en mesure de
savoir si la règle de droit est impérative ou supplétive. À cet égard, la règle de
droit est considérée impérative lorsqu’elle est formulée dans un texte clair et
explicite qui sert à donner, par exemple, un ordre ou une interdiction ou
12
Abdelaziz Squalli, op. cit, p. 12.
13
Mohammed Jalal Essaid, op. cit, p. 47.

20
lorsqu’elle est exprimée avec une sanction pénale14. Cependant, la règle est
considérée supplétive lorsque sa formulation comprend des termes qui précisent
la possibilité de se mettre d’accord pour exprimer une volonté contraire. À ce
propos, le législateur n’utilise pas des termes qui visent des ordres, des
interdictions, etc., mais plutôt des termes qui vont dans le sens de la possibilité
de s’accorder sur une volonté contraire à la règle de droit comme par exemple
« sauf convention contraire » ou « sauf si le contrat en dispose autrement »15,
etc.

L’élément d’ordre public et de bonnes mœurs: Dans le cas où la formulation


d’un texte de loi ne nous aide pas à distinguer les règles impératives des règles
supplétives, il faut revenir au contenu du texte pour saisir cette distinction. Si le
contenu de la règle de droit concerne les fondements que sur lesquels reposent la
société et principalement les principes liés à l’ordre public ou aux bonnes
mœurs16, la règle est considérée impérative. Par contre, dans le cas ou le contenu
de la règle de droit ne porte pas atteinte à ces fondements et concerne
l’organisation des intérêts personnels des individus, la règle est considérée
comme supplétive.

Dans le cadre de la relation des branches traditionnelles de droit (droit privé et


droit public) avec l’ordre public, nous soulignons que la majorité des règles de
droit public sont d’ordre public. Par exemple, les règles de droit constitutionnel
sont d’ordre public et personnes ne peut les écarter ou exprimer une volonté
contraire à ces règles. Ainsi, les règles de droit pénal sont d’ordre public parce
que chaque infraction commise constitue une atteinte à la société et à l’ordre
public.

Par ailleurs, la relation des règles du droit privé avec l’ordre public est restreinte.
C’est une relation qui se diffère d’une discipline de droit privé à l’autre et ce,
selon leur importance. Par exemple, les règles qui régissent les relations

14
Parmi les exemples des règles impératives, nous citons les articles suivants :
Article 59 : Est nulle l'obligation qui a pour objet une chose ou un fait impossible, physiquement ou en vertu de
la loi.
Article 870 : Entre musulmans, la stipulation d'intérêts est nulle et rend nul le contrat, soit qu'elle soit expresse,
soit qu'elle prenne la forme d'un présent ou autre avantage fait au prêteur ou à toute autre personne interposée.
15
Parmi les exemples des règles supplétives, nous nous référons aux articles suivants :
Article 502 : La délivrance doit se faire au lieu où la chose vendue se trouvait au moment du contrat, s'il n'en a
été autrement convenu.
Article 622 : Les dépens et loyaux coûts du contrat se partagent de droit entre les copermutants, sauf les
stipulations des parties.
16
En parcourant la littérature, nous constatons que la définition de l’ordre public est complexe. C’est pourquoi
nous essayons de déduire que l’ordre public est fondé sur l’intérêt général politique, social, économique ou
culturel. Ainsi, les bonnes mœurs font partie des fondements d’ordre public. Elles représentent les règles morales
qu’une société impose et veut atteindre afin d’assurer sa continuité. C’est pour cela, il est interdit de les écarter
par des accords individuels.

21
familiales comme l’aptitude, le mariage, l’état civil, etc., sont considérées
d’ordre public. Donc, elles sont qualifiées des règles impératives. Cependant, la
notion d’ordre public reste limitée en droit civil parce que cette discipline
règlemente les relations et les intérêts individuels. C’est le principe de la liberté
contractuelle qui constitue la base de ces relations. C’est pourquoi ce sont les
règles supplétives qui dominent afin d’encourager les affaires et les relations
personnelles. Cependant, il est à noter qu’il existe des règles impératives en droit
civil. Ce sont des règles qui conditionnent et limitent cette liberté contractuelle
surtout si elles visent l’organisation et la stabilité dans la société. Nous citons, à
titre d’exemple, les règles liés à la publicité des actions foncières, la
prescription, droit de propriété, etc.

Ainsi, les règles qui régissent l’organisation judiciaire sont d’ordre public. Ce
sont des règles impératives parce qu’elles s’imposent de manière absolue à tous
et ni les individus ni les juridictions ne peuvent écarter leur application. Par
exemple, les individus ne peuvent pas porter leur litige à un tribunal
incompétent juridiquement. Aussi, le plaignant ne peut pas déposer les preuves
devant la juridiction sans respecter la procédure judiciaire édictée par la loi, etc.

De plus, la majorité des règles de droit de travail sont considérées d’ordre


public. Le législateur intervient par règles impératives pour protéger le salarié en
tant que partie faible dans la relation de travail. Nous citons, par exemple, les
règles qui définissent le salaire minimum, la répartition en cas des accidents de
travail, etc. ce sont des règles qui ne peuvent pas écarter leur application.

C’est la même chose pour le droit international privé. La majorité de ces règles
sont impératives car elles sont d’ordre public comme la nationalité, le droit
applicable, etc. Ce sont des règles liées à la souveraineté et à l’intérêt général.

Section 3. Critère relatif à la nature des relations juridiques (droit


public et droit privé)

La classification des règles de droit peut être repartie selon la nature des
relations juridiques en règles de droit privé et de droit public. La distinction
entre ces deux branches de droit remonte au droit romain. En principe, le droit
privé régit toutes les relations entre les personnes privées, qu’elles soient
physiques ou morales. Le droit public régit les rapports juridiques concernant
l’état et ses agents. Il s’applique aussi aux relations entre les personnes
publiques entres-elles, et entre les personnes privées et les personnes publiques.

Chacune de ces deux branches comprend un droit interne et un droit


international. On recense d’une part le droit privé interne et le droit international
privé et d’autre part, le droit public interne et le droit public international.
22
L’essentiel de l’analyse sera axée sur la distinction entre le droit privé et le droit
public.

3.1. La distinction entre droit public et droit privé

D’après les conceptions classiques, le droit interne se divise en deux branches, le


droit public et le droit privé. Le droit public comprend l’ensemble des règles qui
dans un État donné, ont pour objet l’organisation même de cet État et des
collectivités publiques (régions, provinces, préfectures et communes) et qui
gouvernent leurs rapports avec les particuliers. Par conséquent, le droit public
englobe tous les rapports de droits qui mettent en rapport l’État et l’un de ses
démembrements ou de ses divisions.

Le droit privé est l’ensemble des règles qui gouvernent les rapports des
particuliers entre eux ou avec les collectivités privées telles que les sociétés ou
les associations. C’est le droit civil et le DOC (Dahir portant Code des
Obligations et des Contrats) qui constitue l’essentiel de ces règles. Le droit privé
ne s’intéresse qu’aux rapports des personnes privées entre elles. C’est le cas des
questions relatives à ce que l’on appelle le statut personnel, familial et
successoral comme la réglementation des mariages, la liquidation des
successions. Il en va de même des questions qui relèvent du droit des contrats et
des obligations : la vente, le contrat de bail ou contrat de location. Toutes ces
situations engendrent des rapports de droit qui mettent en cause les particuliers
entre eux.

Au vu de ces définitions, quels sont dès lors les critères distinctifs qui président
à la différentiation de ces deux branches du droit? Notons trois séries de
différences d’ordre technique entre le droit public et privé :

Premièrement : certains auteurs se réfèrent à la relation de la règle de droit avec


l’intérêt pour distinguer le droit public du droit privé. Lorsque l’intérêt est
général, la règle de droit rentre dans le cadre de droit public. Cependant, si
l’intérêt est particulier ou privé, la règle de droit rentre dans le cadre de droit
privé. Autrement dit, le droit public est un droit que l’intérêt général domine,
alors que c’est l’intérêt privé qui domine en droit privé. Ce critère de distinction
est insuffisant puisque toutes les règles de droit visent l’intérêt général même si
elles régissent les rapports entre individus. C’est le cas, par exemple, des règles
de droit liées au mariage, divorce, capacité, etc., qui réalisent l’intérêt général et
l’intérêt privé en même temps.

Deuxièmement : D’autres auteurs mettent l’accent sur la nature de la règle de


droit pour distinguer le droit public du droit privé. Les règles de droit public sont
dans l’ensemble impératives alors que celles de droit privé sont supplétives. Ce

23
critère a été critiqué et reste défectueux parce que les règles de droit public ne
sont pas tous impératives et le droit privé englobe des règles supplétives mais
aussi impératives.

Troisièmement : il s’agit d’une différence d’ordre technique. Le droit privé est


régi par un principe en vertu duquel nul ne peut se faire justice à soi-même. Un
particulier n’est pas autorisé à se faire justice lui-même sans le concours des
autorités compétentes

Or en matière de droit public, l’administration a un droit contre un particulier tel


le paiement d’un impôt, elle est habilitée à se faire justice elle-même. Elle a le
pouvoir d’assurer l’exécution physique de ses décisions par la loi ou par la
jurisprudence administrative.

Quatrièmement : une autre différence d’ordre technique réside dans l’exécution


des décisions de justice. En droit privé, l’exécution des jugements pourrait être
assurée par des mesures de contraintes comme la saisie ou la vente forcée des
biens. Par contre, en droit public, il est inimaginable de saisir un bien
appartenant à l’État.

Après avoir défini le droit privé et le droit public et développer les critères de
distinction entre ces deux branches de droit, nous étudions, dans cette séance, les
matières relevant des droit privé et public.

3.2. Les matières relevant du droit privé

Comme nous l’avons mentionné lors de la séance précédente, le droit privé est
l’ensemble des règles juridiques qui organisent les rapports entre personnes
privées. Il a pour objet de gouverner les rapports entre les particuliers (mariage,
héritage, contrats). Le droit privé recouvre donc l’ensemble des règles qui
régissent les rapports entre les personnes physiques ou morales privées (sociétés,
associations). Le droit privé se subdivise en plusieurs disciplines ou branches :

a- Le droit civil :

C’est la matière incontournable et fondamentale du droit privé. Il s’agit de


l’ensemble des règles de droit qui régissent les rapports entre particuliers
(personnes physiques ou morales) et leurs obligations réciproques. Le droit civil
régit tous les rapports juridiques entre particuliers au sein de la société. Il
réglemente, par exemple, les éléments qui permettent d’individualiser les
personnes (nom, état civil et le domicile). Il réglemente aussi toutes les
questions inhérentes au code du statut personnel (mariage, filiation, répudiation).
De plus, le droit civil réglemente les droits subjectifs tels que le droit de

24
propriété, les droits de créance, etc. Enfin, le droit civil concerne bien
évidemment l’un des domaines les plus vastes du droit civil : le droit des
obligations et des contrats.

b- Le droit commercial :

Le droit commercial réglemente la profession commerciale ainsi que les actes et


effets de commerce. On définit habituellement le droit commercial comme « la
partie du droit privé relative aux opérations juridiques faites par les
commerçants, soit entre eux soit avec leurs clients. Ces opérations se rapportent
à l’exercice du commerce. Autrement dit :
- le droit commercial regroupe un ensemble des règles juridiques
applicables aux transactions commerciales.
- Il offre le cadre juridique qui réglemente les rapports entre les
professionnels du commerce. Le droit commercial s’applique en ce sens a
une catégorie de personnes à savoir les commerçants.
- Le droit commercial intervient pour assurer un minimum d’ordre, de
sécurité et d’honnêteté entre les professionnels du commerce. Ceci montre
que le droit commercial peut se révéler d’une importance dans le monde
des affaires surtout que l’assouplissement des procédures et des difficultés
formelles qui empêchaient la rapidité du commerce se fondent
particulièrement sur la confiance et l’honnêteté que peut assurer le droit
commercial.

c- Le droit social :

C’est l’ensemble des règles régissant les relations individuelles et collectives du


travail. Il englobe, à la fois, deux disciplines :

1. Le droit de travail : qui renferme les règles juridiques applicables aux


relations individuelles (contrat de travail, salaire, licenciement, etc.) et
collectives (syndicats, representation du personnel, grève, etc.), les
realtions qui naissent entre les patrons (les employeurs privés) et ceux qui
travaillent sous leur autorité (les salariés) et ce, dans l’entreprise.
2. Le droit de la securité sociale : qui vise la protection des individus contre
les événements qui entrainent une perte ou une diminution de leurs
revenus suite à une maladie, invalidité, maternité, etc.

d-Le droit international privé :

C’est la branche du droit privé qui gouverne les relations privées internationales,
c'est-à-dire à chaque fois que dans une relation privée, elle existe un lien

25
d’extranéité. On lui rattache l’étude des questions suivantes : la nationalité, la
condition des étrangers, les conflits des lois et les conflits des juridictions.

E- Droit des affaires

Tel que souligné précédemment, le droit est considéré comme un phénomène


vivant qui s’adapte aux nouvelles circonstances susceptibles d’être surgit dans la
société. Une de ces circonstances qui s’est amplifiée au cours du XX ième siècle
consiste à la marche du droit vers la spécialisation et ce, avec l’apparition de
plusieurs disciplines de droit telles que le droit des affaires, le droit de la
concurrence, le droit de l’environnement, etc.

Dans cette perspective, les subdivisions des branches du droit privé ne cessent
de se développer. C’est ainsi que d’autres disciplines relèvent du droit privé,
principalement le droit des affaires. Une branche de droit qui vous intéresse en
tant que économistes et gestionnaires. Lorsqu’on parle des affaires, on se réfère,
généralement, à certaine catégorie d’activités qui peuvent être industrielle et
commerciale. Ce sont des activités liées à « la production, à la transformation, à
l’importation, à la circulation ou à la conservation des produits. Le droit des
affaires intervient pour réglementer ce genre d’activité. C’est pourquoi, certains
auteurs qualifient le droit des affaires en tant que droit de la vie économique »17.

Le droit des affaires regroupe un ensemble des règles juridiques qui relèvent du
droit privé. Ils occupent une place importante parmi les différentes branches du
droit privé. Dans un sens large, le droit des affaires est un ensemble de règles
juridiques qui régissent l’entreprise commerciale et son environnement. Vu la
diversité des acteurs et des rapports qui entourent l’entreprise commerciale, le
droit des affaires peut être considéré comme un droit composite parce qu’il fait
recours à d’autres disciplines juridiques. Dans cette perspective, le droit des
affaires s’appuie sur les dispositions de droit civil, de droit commercial et de
droit des sociétés.

Donc, le droit des affaires marocain englobe le Code des obligations et des
contrats18, le Code de commerce marocain19, la loi relative aux sociétés
commerciales20 et la loi sur les sociétés anonymes21. Ceci explique clairement la

17
Hassania Cherkaoui, Droit des affaires: l’entreprise commerciale, Casablaanca, 2003, p. 13.
18
Dahir du 9 Ramadan 1331 (12 septembre 1913) formant Code des obligations et des contrats, Bulletin officiel
du Maroc, 12 septembre 1913, no 46, p. 78-172.
19
Dahir no 1-96-83 du 15 Rabii I 1417 (1er aout 1996) portant promulgation de la loi no 15-95 formant Code de
commerce, Bulletin officiel du Maroc, 3 octobre 1996, no 4418, p. 569-634.
20
Dahir n° 1-11-39 du 29 Joumada II 1432 (2 juin 2011) portant promulgation de la loi n° 24-10 modifiant et
complétant la loi n° 5-96 sur la société en nom collectif, la société en commandite simple, la société en
commandite par actions, la société à responsabilité limitée et la société en participation, Bulletin officiel du
Maroc, 30 juin 2011, n° 5956 bis, p. 1775-1776.

26
largeur du domaine du droit des affaires qui englobe le droit commercial, le droit
des sociétés, le droit des entreprises en difficulté, le droit bancaire, le droit de la
concurrence, le droit de la consommation, etc. Cette largeur du droit des affaires
se justifie par l’ampleur de l’économie moderne qui dépasse un commerçant
ordinaire et isolé vers des groupements commerciaux qui s’illustrent dans les
grandes sociétés commerciales dont leur rôle et leur impact sont prépondérant
dans l’économie marocaine actuelle.

3.3. Les matières relevant du droit public

Tel que précisé lors de la séance précédente, le droit public est l’ensemble des
règles qui régissent les rapports juridiques dans lesquels interviennent l’état ou
des collectivités publiques (régions, provinces, préfectures et communes) ou
l’un de ses démembrements ou de ses divisions. Autrement dit, le droit public
est constitué par l’ensemble des règles régissant les rapports de droit dont
lesquels interviennent des personnes morales de droit public (État, collectivités
publiques). Donc, le droit public a pour objet l’organisation même de cet État et
des collectivités publiques et gouvernent leurs rapports avec les particuliers. Le
droit public se subdivise aussi en plusieurs disciplines ou branches :

a- Le droit constitutionnel :

C’est une branche du droit public interne qui consiste à régir le fonctionnement
des institutions (assemblées élu et gouvernement) ainsi que le fonctionnement de
la justice. Elle a pour objet l’organisation de l’État et le fonctionnement des
institutions politiques. Autrement dit, il détermine les règles relatives à la forme
de l’État, à la constitution des gouvernements et des pouvoirs publics. Il fixe les
compétences des organes de l’État que sont le pouvoir législatif, exécutif et
judiciaire.

b- Le droit administratif :

C’est la branche du droit public qui englobe l’ensemble des règles définissant le
droit et les obligations du gouvernement et de l’appareil administratif.
Autrement dit, le droit administratif réglemente l’organisation des collectivités
publiques et des services publics (enseignement, énergie ou transport), ainsi que
leurs rapports avec les particuliers.

21
Dahir n° 1-96-124 du 14 Rabii II 1417 (30 août 1996) portant promulgation de la loi n° 17-95 relative aux
sociétés anonymes, modifié et complété par le Dahir n°1-08-18 du 17 Joumada I (23 mai 2008) portant
promulgation de la loi n°20-05, Bulletin officiel du Maroc, n° 5640, 19 juin 2008, p. 384.

27
c- Le droit de finance publique :

La loi de finance est définie par la loi organique. Il comporte diverses


dispositions relatives à la politique économique, financière et social de l’État.
Les finances publiques sont envisagées aussi sous l’angle du droit budgétaire ou
de la législation financière. Autrement dit, le droit de finance publique
comprend les règles relatives aux finances publiques, c’est-à-dire aux ressources
et aux dépenses de l’État, des collectivités publiques et des services publics : le
budget, impôts, taxes.

d- Le droit international public :

Le droit international public est l’ensemble des règles juridiques qui régissent
les rapports entre États d’une part et entre les États et les organisations
internationales d’autre part, aussi bien en temps de paix qu’en période de guerre
ou de neutralité.

3.4. Les matières mixtes

Les matières mixtes en droit, dites les droit mixtes, visent toute discipline de
droit qui accomplit une combinaison de règles du droit public et du droit privé.
Elles relèvent des droits mixtes parce qu’elles réalisent une combinaison
relevant, pour les unes du droit public, et pour les autres du droit privé. Il s’agit
essentiellement :

a- Droit pénal criminel :

Le droit pénal, appelé aussi le droit criminel est un droit mixte. Il faut distinguer:
– Le droit pénal général qui comprend les règles générales s’appliquant à toutes
les infractions et leurs sanctions ainsi qu’aux conditions de la responsabilité
pénale.
– Le droit pénal spécial qui traite des règles qui régissent chacune des
infractions en particuliers.
– Procédure pénale qui concerne l’organisation, déroulement et jugement du
procès pénal.

Le droit pénal est classiquement rattaché au droit privé et enseigné dans les
facultés par des professeurs de droit privé. En effet, le droit pénal est une
matière de droit public si l’on prend en compte l’objet même du droit pénal
puisque destiné à déterminer les agissements contraires à l’ordre social à établir
et à organiser la répression de ces infractions.

28
En revanche, il est une matière de droit privé si l’on considère la technique
utilisée par le droit pénal. C’est que de nombreuses règles de droit pénal
constituent la garantie et la sanction des droits reconnus aux particuliers et que
l’on appelle les droits subjectifs.

L’un des buts essentiels de la loi pénale consiste précisément à protéger les
biens et l’intégrité des personnes (en réprimant le délit de vol, le droit pénal
défend le droit de propriété). Le droit pénal se préoccupe tout autant de la
sauvegarde des droits et libertés de l’individu poursuivi, présumé innocent tant
qu’un jugement définitif n’aura pas constaté sa culpabilité. Il s’agit de garantir
les droits de la défense, en permettant à l’accusé de se défendre librement, de
faire appel à un avocat. De plus, ce sont les mêmes juridictions (Tribunal de
première instance et Cour d’appel) qui rendent à la fois la justice pénale et
civile. Le droit pénal a donc une nature mixte.

b- Le droit processuel ou droit judiciaire privé :

Procéder en justice c’est accomplir les formalités nécessaires (action) pour


porter devant la juridiction compétente à cet effet, la connaissance d’une affaire
(litige) et obtenir d’elle une décision (jugement). La procédure civile peut être
définie comme un corps de règles gouvernant la justice civile et régissant la
marche du procès qui permet aux parties d’obtenir la reconnaissance et la
sanction de leurs droits.

Le caractère mixte de cette discipline s’explique par le fait que les dispositions
concernant l’organisation et le fonctionnement des tribunaux relèvent du droit
public, alors que les dispositions qui organisent l’action en justice se rattachent
au droit privé.

Pour conclure ce chapitre qui traite de la règle de droit, il est essentiel de


rappeler que la règle de droit est une règle de conduite sociale. Elle est générale,
abstraite impersonnelle, obligatoire et aussi coercitive. Ce sont des caractères
qui la distingue d’autres règles de conduite sociale, principalement, les règles de
religion, celles de la morale et celles de convenance. À propos de cette
distinction, il peut y avoir des caractères communes entre la règles de droit et les
autres règles de conduites sociales telles que la généralité, l’abstraction, etc.,
comme il peut y avoir des caractères qui constituent les points de divergences
telles que la force obligatoire, la contrainte publique, etc.

Aussi, il est essentiel de rappeler que la règle de droit répond à une classification
qui peut être fondée sur le contenu, la force obligatoire ainsi que la nature des
relations juridiques. En se basant sur le contenu, la règle de droit peut être soit
une règle de forme soit une règle de fond. Cependant, si on se réfère au critère

29
de la force obligatoire de la règle de droit, nous constatons qu’il existe des règles
impératives et d’autres supplétives. Par ailleurs, la classification classique de la
règle de droit en droit privé et droit public est fondée sur la nature des relations
juridiques. D’où les disciplines ou les matières de droit privé et celles de droit
public.

Pour bien cerner les règles de droit objectif, il faut remonter aussi aux sources
du droit. Ces sources consistent l’ensemble des mécanismes par lesquels se
produisent les règles de droit. Toute règle de droit s’établit à partir d’une source
matérielle et objective qui forme son objet. L’étude de ces sources fera l’objet
des séances prochaines.

Chapitre 3 : Les sources de la règle de droit.

Parler des sources du droit revient à s’interroger sur comment on crée le droit.
En général, les sources de droit sont nombreuses car on y intègre tout ce qui peut
entrainer la création d’une nouvelle règle de droit ou seulement donner un sens
nouveau à une règle de droit déjà existante. Les textes constituent certainement
la source la plus importante, mais il ne faut surtout pas oublier la coutume, le
rôle de la jurisprudence et l’apport du droit international.

Section 1 : Les sources directes écrites : les textes

Ce sont les règles écrites émanant des autorités politiques et administratives et


qui régissent une société donnée. Ces textes de nos jours n’ont pas la même
valeur. Il y a une hiérarchie des normes.

1.1. La hiérarchie des normes

La théorie selon laquelle les normes de droit dans un pays sont ordonnées les
unes par rapport aux autres revient à l’école de Vienne essentiellement à Hans
Kelsen et Adolf Merkel. Selon les juristes de cette école les normes juridiques
sont hiérarchisées les unes par rapport aux autres. Cette hiérarchie est clairement
établie de sorte qu’elle peut être représentée sous forme de pyramide. Au
sommet se trouvent les normes supérieures, les normes inférieures apparaissent
au fur et à mesure que l’on descend vers la base. Ce système hiérarchique repose
sur un principe fondamental c’est que toute norme juridique est nécessairement
basée sur une autre norme juridique qui lui est hiérarchiquement supérieure.
Donc la norme qui se trouve au sommet de la pyramide constitue la base des
30
normes qui se trouvent à l’étage inférieur et celle-ci constituent à leur tour la
base des normes qui se trouvent au-dessous et ainsi de suite. Cet agencement
repose sur l’idée que chaque norme inférieure doit en principe être conforme à
toutes les normes supérieures.

Ainsi au sommet de la pyramide ou la hiérarchie se trouvent les normes de rang


constitutionnel c'est-à-dire les normes formellement constitutionnelles c'est-à-
dire édictées par le pouvoir constituant originaire ou dérivé. En dessous se
trouvent les normes formellement législatives : il s’agit de l’ensemble des règles
élaborées par le pouvoir législatif c'est-à-dire les lois et les autres normes qui ont
valeur de loi. En dessous des normes législatives on trouve les règles
réglementaires que ce soit les normes émanant du pouvoir national ou local.
Lorsque le pouvoir exécutif édicte une norme il doit toujours indiquer sur quelle
norme supérieure législative ou constitutionnelle il se fonde pour la produire.
Enfin à la base de la pyramide se trouvent les arrêts et jugements prononcés par
les tribunaux de l’ordre judiciaire.

1.2. Les différents textes du droit marocain

1.2.1. La constitution

Les constitutions telles que nous les connaissons aujourd’hui sont apparues à la
fin du 18ème siècle aux USA, en Pologne, en France et au fur et à mesure que
les États se dotaient de constitutions s’est imposée l’idée comme quoi un État
devrait avoir un texte fondamental dans lequel sont précisées les règles, les
procédures et les principes qui régissent les relations entre les pouvoirs et entre
ceux-ci et les citoyens.

1- Les définitions de la constitution : la notion de constitution peut être prise


dans deux acceptions :

a- Au sens matériel la constitution comprend toutes les règles qui concernent


les institutions politiques de l’Etat. Ces règles peuvent être de nature et
d’origines différentes ; par exemple ces règles peuvent être la constitution elle-
même c'est-à-dire un texte écrit et voté en termes solennels, ces règles peuvent
être des lois organiques c'est-à-dire des lois votées par le parlement selon une
procédure particulière et qui visent à compléter la constitution, ces règles
peuvent être des lois ordinaires ou encore des règlements, ce qui est pris en
considération c’est le contenu. Prise dans ce sens la constitution remplit une
double fonction : elle précise les règles relatives à l’aménagement du pouvoir

31
c'est-à-dire les relations entre les pouvoirs d’une part et les relations entre les
gouvernants et les gouvernés d’autre part.

b- Au sens formel : la constitution c’est le texte fondamental qui se distingue


des autres textes par son importance, son régime et sa force juridique. La
constitution est un texte supérieur aux autres textes qui doivent s’y conformer.
Cette suprématie de la constitution par rapport aux autres règles écrites se
manifeste à divers moments notamment au moment de l’élaboration et de la
révision.

2- L’élaboration de la constitution : elle se révèle indispensable dans deux


cas principaux : soit lorsque nait un Etat nouveau soit lorsqu’un régime politique
s’effondre. Lorsqu’il faut établir une nouvelle constitution se pose le problème
de savoir quel est l’organe qui accomplirait cette tâche. Généralement on
distingue entre les procédés démocratiques et les procédés non démocratiques.
Les procédés démocratiques sont les procédés qui connaissent la participation du
peuple car en démocratie c’est lui qui a le pouvoir constituant. Il peut s’agir
d’une assemblée constituante, d’un référendum ou de la consultation populaire.
Les procédés non démocratiques sont les procédés qui excluent le peuple
comme le procédé de la charte octroyée.

3- La révision de la constitution : la révision des constitutions ne pose pas les


mêmes problèmes que leur élaboration. D’une part, il ne s’agit pas de la création
d’un statut constitutionnel, d’autre part parce que la révision ne pose pas le
problème de l’organe compétent, enfin parce que les constitutions prévoient les
mécanismes de révision. On parle de pouvoir constituant dérivé. L’ouverture de
la procédure de révision peut être confiée soit au gouvernement, soit au
parlement, soit au corps électoral. Il existe trois systèmes de révision soit par le
parlement, soit par une assemblée élue à cet effet soit par l’intervention du
peuple par voie référendaire.

Le Maroc a connu quatre constitutions : 1962-1970-1972-2011. La constitution


actuelle comporte un préambule et 180 articles. Le préambule composé de
quatre aliénas est partie intégrantede la constitution. Il rappelle les principes
auxquels le Maroc réitère son attachement tel que le respect des droits de
l’Homme, la paix et la sécurité internationale, les principes de sa politique
étrangère. Le corps de la constitution est réparti en 14 titres qui sont : titre 1
dispositions générales ; titre 2 : libertés et droits fondamentaux ; titre 3 : de la
royauté ; titre IV : du pouvoir législatif ; titre V : du pouvoir exécutif ; titre VI :
des rapports entre les pouvoirs ; titre VII : du pouvoir judiciaire ; titre VIII : de
la cour constitutionnelle ; titre IX : des régions et autres collectivités territoriales
; titre X : de la cour des comptes ; titre XI : du conseil économique et social et

32
environnemental ; titre XII : de la bonne gouvernance ; titre XIII : de la révision
de la constitution ; titre XIV : dispositions transitoires et finales.

Concernant la révision de la constitution, l’initiative selon l’article 172


appartient au Roi, au chef du gouvernement, à la chambre des représentants et à
la chambre des conseillers.

Le Roi, toujours selon le même article peut soumettre directement au


referendum le projet de révision dont il prend l’initiative. Pour ce qui est de la
proposition de révision émanant d’un ou plusieurs membres de l’une des deux
chambres du parlement, elle ne peut être adoptée que par un vote à la majorité
des 2/3 des membres la composant (art 173). La proposition est soumise à
l’autre chambre qui l’adopte à la majorité de 2/3 des membres la composant. La
proposition de révision émanant du chef de gouvernement est soumise au
conseil des ministres après délibération en conseil de gouvernement. Les projets
et propositions de révision sont soumis par dahir au referendum (art174). La
révision devient définitive qu’après avoir été adoptée par voie du referendum.
De même le Roi peut après consultation du président de la cour constitutionnelle
soumettre par dahir au parlement un projet de révision de certaines dispositions
de la constitution. Le parlement convoqué par le Roi l’approuve à la majorité de
2/3.

Selon l’article 175 aucune révision ne peut porter sur les dispositions relatives à
la religion musulmane, sur la forme monarchique de l’Etat, sur le choix
démocratique de la nation, ou les acquis en matière de libertés et droits
fondamentaux.

1.2.2. La loi proprement dite

La loi se définit différemment selon qu’on se place au plan de la forme ou celui


du fond. Au plan formel la loin est un acte voté par le parlement. Au plan
matériel la loi est une règle de droit écrite, générale, formulée par un organe
étatique dans l’exercice du pouvoir législatif ou réglementaire à l’exclusion du
pouvoir judiciaire car ce pouvoir étant subordonné à la loi ne peut créer des
règles générales.

1- Les différentes sortes de lois : selon la constitution les lois peuvent être soit
organiques soit ordinaires.

a- Les lois organiques sont des lois adoptées par le parlement (donc ce sont des
lois au sens formel du terme) mais elles présentent deux particularités :

33
- elles sont adoptées sur un renvoi d’une disposition constitutionnelle. De ce fait
les lois organiques complètent et précisent la constitution ;
- leur adoption suit une procédure particulière prévue à l’article 85 de la
constitution et qui consiste en : discussion 10 jours après le dépôt du projet ou
de la proposition de la loi organique, approbation obligatoire de la cour
constitutionnelle avant promulgation.

Les lois organiques sont supérieures aux lois ordinaires qui doivent leur être
conformes. Donc les lois organiques sont des lois formelles mais issues de la
constitution et sont légèrement supérieures aux lois ordinaires.

b- Les lois ordinaires : sont des lois adoptées par le parlement dans les domaines
qui lui sont expressément dévolus par l’article 71 de la constitution. Les lois
ordinaires ne complètent pas une disposition constitutionnelle et leur procédé
d’élaboration est normal.

2- La procédure d’élaboration des lois : nous avons déjà examiné la procédure


d’élaboration des lois organiques ; pour ce qui est des lois ordinaires, l’initiative
des lois appartient concurremment au chef du gouvernement et aux membres du
parlement (art 78). Le chef du gouvernement dépose un projet de loi, les
membres du parlement déposent des propositions de lois (art78). Les projets de
lois sont déposés en priorité sur le bureau de la chambre des représentants, mais
les projets de lois relatifs aux collectivités territoriales, au développement
régional et aux affaires sociales sont déposés en priorité auprès de la chambre
des conseillers. Les projets et propositions sont soumis ensuite aux commissions
(art 80). Les commissions sont composées de députés appartenant aux différents
groupes parlementaires, leur mission consiste à examiner les textes qui leur sont
soumis, leur apporter des modifications et les soumettre au vote en séance
plénière. Selon l’article 84 tout projet ou proposition de la loi es examiné
successivement par les deux chambres du parlement pour parvenir à l’adoption
d’un texte identique. Lorsque le projet de loi est déposé devant la chambre des
représentants ou lorsque la proposition est initiée par elle le débat commence
dans la chambre des représentants ; la même chose pour la chambre des
conseillers. Une chambre saisie d’un texte voté par l’autre chambre l’examine
tel qu’il lui a été transmis. La chambre des représentants adopte le texte en
dernier ressort. Une fois adopté le texte est transmis au gouvernement.

3- La promulgation de la loi : est faite par le Roi dans les 30 jours qui suivent sa
transmission au gouvernement après adoption par le parlement (art 50). La
promulgation est faite par dahir, la date de la promulgation est la date de la loi.
Selon l’article 132 de la constitution les lois ordinaires avant leur promulgation
peuvent être déférées à la cour constitutionnelle par le Roi, le chef du
gouvernement, le président de la chambre des représentants, le président de la

34
chambre des conseillers, ou par le 1/5 des membres de la chambre des
représentants ou 40 membres de la chambre des conseillers. La cour
constitutionnelle statue dans un délai d’un mois sauf urgence, ce délai est alors
ramené à 8 jours sur demande du gouvernement. La saisine de la cour
constitutionnelle suspend le délai de promulgation. La promulgation rend la loi
exécutoire mais elle ne devient applicable qu’à la suite de sa publication. La
promulgation est donc l’acte par lequel le chef de l’Etat atteste de l’existence de
la loi et donne l’ordre aux autorités publiques d’observer et de faire observer
cette loi.

1.2.3. Le règlement

Le pouvoir d’édicter des règlements appartient généralement aux autorités


exécutives. Le terme règlement comprend des actes différents émanant
d’autorités différentes. Ainsi lorsque l’acte émane du chef du gouvernement on
l’appelle décret ; pour les ministres, le gouverneur, le maire on utilise le terme
arrêté, pour les organes collégiaux tel que un conseil municipal on parle de
délibération avec une précision c’est qu’en droit le terme délibération désigne
une décision exécutoire et ce contrairement au langage courant selon lequel la
délibération serait une phase de discussion et de réflexion préalable à toute prise
de décision.

1- Les règlements ou décrets autonomes : le domaine du règlement


autonome comprend toutes les matières qui ne sont pas réservées à la loi et ce de
par l’article 72 de la constitution qui stipule que : « les matières autres que celles
qui sont du domaine de la loi appartiennent au domaine réglementaire. » Dans
ces matières le gouvernement est tenu de respecter seulement la constitution et
les lois organiques. Donc il n’y a pas hiérarchie entre le décret et la loi mais
plutôt égalité : chacun intervenant dans son domaine propre, d’où les
appellations règlements autonomes ou décrets législatifs qui expriment
clairement l’indépendance du décret par rapport à la loi.

2- Les règlements ou décrets d’application : ce sont des actes du pouvoir


réglementaire tendant à l’application d’une loi intervenant dans un domaine visé
par l’article 71. En effet la loi formelle crée une situation juridique nouvelle
mais c’est le pouvoir réglementaire par l’intermédiaire des décrets d’application
qui est investie de la mission d’assurer la pleine application de la loi c'est-à-dire
de tirer toutes les conséquences de la situation juridique créée par la loi et
d’apporter dans un délai raisonnable les modifications nécessaires à la
réglementation.

35
3- Les arrêtés des ministres : peuvent être des sources de droit mais les
circulaires, les instructions ministérielles ne sont pas des sources de droit.
Pour les règlements on ne parle pas de promulgation. L’authentification des
règlements se fait par la pratique du contreseing. Ainsi l’article 90 de la
constitution précise que les actes règlementaires du chef du gouvernement sont
contresignés par les ministres chargés de leur exécution.
A remarquer que les domaines de la loi et du règlement sont distincts, mais le
gouvernement peut prendre par décrets des mesures qui sont du domaine de la
loi. Deux cas de figure se présentent : soit le parlement par une loi d’habilitation
autorise le gouvernement pendant un délai déterminé et pour un objectif
déterminé à intervenir dans le domaine de la loi (art 70 de la constitution), soit
en cas d’urgence et dans l’intervalle des sessions, le gouvernement peut après
consultation des commissions concernées prendre des décrets lois qui doivent
être soumis à la ratification du parlement durant la session ordinaire suivante.
(art 81 de la constitution.

1.3. L’application des textes

Deux problématiques seront examinées celle de la durée et celle de


l’interférence avec d’autres lois que ce soit dans le temps ou l’espace.

1.3.1. La durée de l’application

Il s’agit de savoir quand une loi entre en vigueur et quand elle cesse ses effets.
1- L’entrée en vigueur de la loi : l’entrée en vigueur veut dire que la loi est
opposable aux citoyens. ( à remarquer que la loi après la promulgation devient
exécutoire c'est-à-dire obligatoire et applicable pour les agents de
l’administration). Généralement l’entrée en vigueur de la loi est tributaire de la
publication du texte de loi au Bulletin officiel et ce selon le principe « Nul n’est
censé ignorer la loi ». Ce principe ne signifie pas que tout le monde doit
connaitre la loi mais il signifie que personne ne peut invoquer son ignorance de
la loi pour écarter son application. Mais le législateur n’est pas tenu de ces
délais. Plusieurs situations peuvent se présenter. Ainsi le législateur peut lui-
même fixer la date de la mise en application de la loi. De même il peut préciser
que l’entrée en vigueur de la loi sera retardée jusqu’à l’adoption des décrets
d’application.

2- L’abrogation des lois : Les lois ont vocation à s’appliquer d’une manière
permanente. Elles demeurent en vigueur tant qu’elles n’ont pas été abrogées.
Mais il arrive que des lois soient prises pour une durée déterminée comme les
lois fiscales. L’abrogation n’est pas une annulation qui veut dire la disparition

36
totalement du système juridique pour le passé, le présent et le futur.
L’abrogation concerne seulement l’avenir.

a- L’autorité compétente pour abroger : le principe hiérarchique auquel sont


soumis les textes juridiques se retrouve en matière d’abrogation. En
conséquence, un texte de droit ne peut être abrogé que par un texte de même
niveau ou qui lui est supérieur. Ainsi une loi ordinaire ne peut être abrogée que
par une loi ordinaire ou un texte qui lui est supérieur, mais un décret ne peut
abroger une loi sauf si elle intervient dans le domaine du règlement. Lorsqu’une
loi est abrogée les règlements d’application de cette loi deviennent caducs car
sans objet. De même un règlement autonome ne peut être abrogé que par un
règlement autonome et non par une loi ordinaire. Et en matière de règlement un
décret peut abroger un arrêté et non le contraire.

b- Les formes de l’abrogation : il existe 3 formes : l’abrogation expresse,


tacite ou par désuétude :
• L’abrogation expresse : c’est lorsque la nouvelle loi précise formellement
et clairement que l’ancienne loi est abrogée ou énumère expressément les
dispositions de la loi ancienne qui sont abrogées. • L’abrogation tacite : elle
résulte d’une loi nouvelle dont les dispositions sont inconciliables avec la loi
ancienne.
• L’abrogation par désuétude : c’est lorsque la loi cesse d’être appliquée en
pratique. Ce qui veut dire que les situations juridiques qu’elle vise se présentent
mais les citoyens ne la suivent pas et les autorités renoncent à l’appliquer. On dit
que la loi est abrogée par une pratique ancienne ce qui pose le problème de la
relation entre la loi et la coutume.

1.3.2. L’application de la loi dans le temps

Il s’agit du problème des conflits des lois dans le temps. Le problème de


l’application des textes dans le temps se pose lorsqu’une loi ancienne et une loi
nouvelle régissent la même situation juridique c'est-à-dire qu’il y a une
interférence entre les domaines d’application de la loi ancienne et la loi nouvelle
: c’est un problème de droit transitoire. Pour résoudre ce problème, les lois
généralement prévoient des dispositions transitoires ; sinon deux principes sont
appliqués : le principe de la non rétroactivité des lois et le principe de l’effet
immédiat.

1- Le principe de la non rétroactivité des lois :

a- La portée du principe : dire que la loi n’est pas rétroactive veut dire
qu’elle ne peut s’appliquer à des faits qui ont été accomplis avant son adoption.

37
Ainsi par exemple une loi qui incrimine le harcèlement sexuel ne peut
s’appliquer à un tel comportement avant son entrée en vigueur parce qu’il n’était
pas une infraction. Le principe se justifie par le fait que la prévisibilité de la loi
est une condition de la sécurité juridique. En effet, les particuliers ne peuvent
avoir confiance dans la loi si les relations juridiques établies sous l’empire d’une
loi peuvent être remis en cause d’un jour au lendemain par l’intervention d’une
loi nouvelle. La non rétroactivité porte ensuite sur les situations juridiques nées
sous l’empire d’une loi et qui ont déjà épuisé tous leurs effets. Tel est le cas d’un
couple marié en 1987 et divorcé en 1997, il ne peut réclamer qu’on lui applique
les règles du divorce prévues par le nouveau code de la famille.

En troisième lieu le principe de non rétroactivité porte sur les effets passés des
situations juridiques en cours c'est-à-dire une situation qui n’a pas épuisé tous
ses effets.

b- Les exceptions au principe : trois exceptions sont prévues qui sont : • Les
lois interprétatives : ce sont des lois qui ont pour objet d’interpréter les
dispositions d’une loi considérées non précises ; • Les lois de procédures : le but
étant de préserver l’unité de la procédure sur le territoire national ; • Les lois
pénales plus douces.

c- La nature du principe : au Maroc, le principe est constitutionnel puisque la


constitution dans l’article 6 prévoit que « la loi ne peut avoir d’effet rétroactif. »
en conséquence il s’impose au législateur.

2- Le principe de l’effet immédiat de la loi : connu aussi sous le nom de la


théorie Roubier. L’idée de Roubier est que la loi régit des situations juridiques,
en conséquence la loi nouvelle s’applique aux situations juridiques qui naîtront
après son entrée en vigueur. De même, la loi nouvelle s’applique aux effets à
venir des situations juridiques en cours. En effet l’intervention de la loi nouvelle
crée une ligne de partage entre le passé et le futur et la loi nouvelle s’applique au
futur. Ce principe appelle deux remarques. La première c’est que le principe
apparait autoritaire mais il se justifie par la nécessité d’assurer l’unité de droit.
La deuxième c’est que le principe de l’effet immédiat s’adapte aux situations
légales mais non aux situations contractuelles car les cocontractants souhaitent
préserver les lois sous l’empire desquelles leurs contrats ont été élaborés. C’est
pourquoi les situations contractuelles sont une exception au principe de l’effet
immédiat, sauf pour les contrats à exécution successive par exemple un contrat
d’assurance.

38
1.3.3. L’application des textes dans l’espace

Il s’agit du problème des conflits des lois dans l’espace. Il revient ici de
déterminer l’espace dans lequel s’appliquent les lois marocaines. A l’évidence
les lois marocaines s’appliquent au Maroc ; en réalité les choses sont plus
complexes car le développement des relations internationales et la mobilité des
personnes et des biens ont eu pour conséquence l’accroissement des situations
qui ont un caractère international, on dit qui ont un élément d’extranéité et qui
peuvent être régies par des lois d’origine différentes. C’est ce que nous
appelons le conflit des lois dans l’espace. Le juge pour résoudre ce conflit
applique ce que nous appelons les règles de conflit qui ont un caractère national
en ce sens que chaque pays détermine ses règles de conflits.

Les règles de conflits peuvent être soit des règles qui retiennent la territorialité
de la loi, soit des règles qui retiennent la personnalité de la loi, soit des règles
qui appliquent la loi d’autonomie.

Ainsi, généralement on admet que le droit public et le droit pénal sont soumis au
principe de la territorialité vu la souveraineté des Etats. Donc au Maroc on
applique le droit pénal marocain, le droit constitutionnel marocain ou encore le
droit fiscal marocain.

Les biens meubles et immeubles sont eux aussi soumis au principe de la


territorialité en ce sens qu’on applique les lois du pays où ils sont situés. En
matière de responsabilité civile on applique aussi le principe de territorialité.
Ainsi en cas de dommage on applique la loi du lieu où le dommage a eu lieu (en
cas d’accident le lieu de l’accident). Par contre le principe de la personnalité de
la loi est appliqué pour tout ce qui est statut personnel.

Pour ce qui est des contrats on distingue entre les règles de forme et le contenu
du contrat. Pour les règles de forme on respecte le principe de territorialité et on
observe les règles du lieu du contrat. Par contre pour les conditions de fond on
observe la loi d’autonomie car on considère que les parties sont libres de
soumettre leur contrat et leurs effets à la loi de leur choix.

1.4. Le cas spécifique du droit musulman

Le droit marocain accorde une place importante droit musulman en tant que
source traditionnelle de la règle de Droit. Nous procèderons d’abord à l’examen
des fondements du droit musulman, avant de préciser la place qu’il occupe en
tant que source fondamentale du droit marocain.

39
1.4.1 Les fondements du droit musulman

Les sources du droit musulman sont nombreuses. Les plus importantes qui ne
font pas l’objet de divergences doctrinales sont de deux ordres : les sources
originelles (le Coran et la Sunna) et les sources dérivées (l’Idjmaa et le quiyas).

1.4.1.1. Les sources originelles

1- Le Coran

Le Coran est la parole de Dieu révélée au prophète (Muhammad ‫)ملسو هيلع هللا ىلص‬, dont le
texte écrit nous a été rapporté par des témoignages multiples22.
En tant que source suprême du droit musulman, le Coran constitue un
ensemble indissociable de principes de foi et de règles de vie politico-sociale.
Les dispositions coraniques peuvent être distinguées selon leur degré de
généralité, leur sens et leur caractère obligatoire.

a- Le degré de généralité des dispositions coraniques

En ce qui concerne leur degré de généralité, les dispositions légales divines sont
de deux types : les Ahkams et les principes généraux.
- Les Ahkams sont des règles qui interviennent pour résoudre un problème
particulier.
- Les principes généraux sont des règles qui peuvent être adaptées à toutes
les époques et servir comme source de législation.

b- Le sens des dispositions coraniques

Selon leur sens, les dispositions du Coran sont de deux sortes : certaines et
présomptives.
- Les règles certaines sont celles dont le sens est clair et ne peut donner
lieu qu’a une seule interprétation.
A titre d’exemple : « Dieu vous commande, dans le partage de vos bien, de
donner au fils male la portion de deux filles » (verset 11de Sourate annisae‫)النساء‬.
Cette catégorie de règles ne peut faire l’objet d’aucun ijtihad de la part des
jurisconsultes.
- Les lois présomptives : à l’opposé des règles certaines, ce type de lois
peut être interprété par les jurisconsultes.

22
Cf. A. Harsi « Introduction au droit public musulman » ; 2ème édition info-print ; Fès 2007 ; p.100.
40
c- le caractère obligatoire des dispositions coraniques

Pour ce qui est de leur portée, les règles coraniques certaines sont de cinq
types (correspondant à cinq qualifications différentes des actes humains) :
obligatoires, recommandées, prohibées, conseillées ou tolérées.

2- La Sunna

La Sunna signifie la conduite du Prophète constituée par ses paroles (hadiths),


ses pratiques (la manière de prier ou de faire le pèlerinage) et ses approbations
tacites ou expresses.

Seconde source originelle après le Coran, la Sounna lorsqu’elle a le caractère de


certitude constitue un cadre de législation qui doit être observé par les sources
dérivées.

1.4.1.2. Les sources dérivées : l’Idjmaa et le Qiyas

Alors que l’Idjamaa résulte du travail collectif des Ulémas, le Qiyas est issu
d’initiatives individuelles.
1- L’Idjmaa
L’Idjmaa signifie l’accord unanime des Ulémas d’une même époque sur l’une
des questions de la religion ou plus généralement sur une question déterminée23.
Cette source est reconnue par le Coran qui stipule : « si vous-même ne savez
pas, interrogez ceux qui savent » (Verset 7 de Sourate al anbiaa‫)األنبياء‬.
2- Le Qiyas :
Le Qiyas ou raisonnement par analogie est une méthode selon laquelle une règle
posée par un texte (verset coranique, hadith, solution d’Idjmaa) se trouve
appliquée à des cas non compris dans ses termes mais commandés par la même
raison.

1.4.2. Le droit musulman comme source du droit marocain

Dans un pays comme le Maroc, où la religion n’est pas séparée de l’État, les
principes traditionnels du droit musulman sont-ils des sources du droit
actuellement en vigueur au Maroc ?

Il est incontestable que les principes du droit musulman font partie intégrante
du droit marocain, c’est une source fondamentale de notre droit.

23
Cf. A. Harsi « Introduction au droit public musulman », op.cit. p. 102.
41
L’attachement du Maroc à l’Islam est affirmé, par la Constitution du 1 er juillet
2011. Celle-ci, comme d’ailleurs les précédentes, après avoir précisé, dans son
préambule, que le Royaume du Maroc, est un État musulman, énonce, dans son
article 3, que « l’islam est religion de l’État qui garantit à tous le libre exercice
des cultes ».

Certes, depuis l’indépendance du Maroc, le législateur s’est employé à adapter


la loi islamique aux besoins nouveaux résultant de la vie moderne. Cependant,
cela ne signifie aucunement, l’abandon du droit musulman, notamment dans les
domaines du code de la famille, du statut personnel et successoral 24 au profit du
droit moderne d’inspiration européenne.

Les règles adoptées dans ses différentes disciplines sont intimement liées aux
préceptes religieux, qui représentent l'identité collective de la société
musulmane.

Il serait difficile de les remplacer par des règles positives sans porter atteinte à
l'ordre religieux et social. C’est dans ce contexte que s’inscrivent, les hautes
directives et conseils éclairés, émis par SM le Roi pour la bonne préparation du
Code de la Famille25.

En dehors de ces matières, le droit musulman semble accuser une certaine


régression au profit de la législation moderne. Cette tendance, s’est accentuée
avec l’adoption la loi du 26 janvier 1965 relative à l'unification des juridictions,
notamment dans les matières suivantes : les obligations et les contrats, le droit
commercial, l'immatriculation des immeubles, la procédure civile, la condition
des étrangers...26.

1.4.3. Le cas spécifique du dahir et des textes internationaux.

A -Le dahir : le dahir est le nom donné au Maroc aux textes juridiques
émanant du Roi. En effet selon l’article 41 de la constitution « le Roi exerce par

24
C’est particulièrement en matière successorale (dévolution successorale) que la prédominance du
droit musulman sur le droit positif est plus explicite. A titre d’exemple : la part héréditaire de la
jeune fille vaut la moitié de la part réservé à son frère. De même les droits successoraux de la mère,
à la suite du décès de l’un de ses enfants, sont souvent inférieurs à ceux du père.
25
En effet, tel qu’énoncé au préambule du code de la famille du 3 février 2003, Le Souverain a d’un
côtéexhorté les membres de la Commissionchargé d’élaborer le projet de ce code à s'en tenir
scrupuleusement aux prescriptions légales et de garder constamment à l'esprit les véritables
desseins et finalités de l'Islam généreux et tolérant ». Sa Majesté a d’autre part insisté sur la
nécessité de « se prévaloir de l'effort jurisprudentiel de l'Ijtihad, en tenant compte de l'esprit de
l'époque, des impératifs de l'évolution et des engagements souscrits par le Royaume en matière de
droits de l'Homme tels qu'ils sont reconnus universellement ».
26
M. J. Essaid, « introduction à l'étude du droit », op. cit., p. 101.
42
dahirs les prérogatives religieuses inhérentes à l’institution d’Imarat Al
Mouminine. » De même selon l’article 42 « Le Roi exerce ces missions par
dahirs en vertu des pouvoirs qui lui sont expressément dévolus par la présente
constitution. » En effet selon la constitution le Roi remplit un double rôle : il est
Amir El Mouminine et il est chef de l’Etat. En tant qu’AmirElMouminine le Roi
agit, par dahir, de manière exclusive dans le domaine religieux. En tant que chef
d’Etat le Roi a des missions qu’il remplit par dahir. Le dahir donc est la forme
que prennent les actes royaux.Une question se pose est de se voir si les actes du
Roi peuvent être attaqués en justice c'est-à-dire peut on annuler un dahir ? Dans
deux arrêts : l’arrêt Ronda de 1960 et l’arrêt société agricole Abdelaziz la
chambre administrative de la cour suprême a jugé que les actes pris par le Roi en
matière administrative échappent au recours en annulation pou excès de pouvoir.
Donc les dahirs du Roi ne peuvent être remis en cause.

B - Les traités internationaux : la question de savoir si le traité international


est une source de droit s’inscrit dans une problématique plus large qui est celle
des rapports entre droit interne et droit international.

Deux écoles de pensée se dégagent concernant cette question : l’école dualiste et


l’école moniste. Selon l’école dualiste l’ordre juridique interne et l’ordre
juridique international sont deux ordres différents de par la nature de la norme et
des destinataires de la norme. En effet la norme interne s’adresse aux
particuliers alors que la norme internationale s’adresse aux États. En
conséquence les ordres interne et international sont distincts et étanches ; le droit
international n’est pas une source de droit puisque les particuliers (personne
physique ou morale) ne peuvent se prévaloir devant un juge d’une norme de
droit international même si elle est ratifiée par son État.

Ils ne peuvent le faire que si leur État adopte une norme d’incorporation qui rend
applicable en tant que disposition de droit interne le contenu des règles
internationales.

La théorie moniste envisage d’une manière différente la relation entre la norme


interne et la norme internationale puisqu’elle considère que les deux normes
sont intégrées dans un ordre juridique unique, qu’elles ont les mêmes
destinataires et s’appliquent à des situations juridiques identiques. En
conséquence, le droit international est une source de droit dont peuvent se
prévaloir les particuliers à condition toutefois qu’il ait un effet direct.

Concernant le Maroc la constitution de 2011 précise dans le préambule que le


Maroc s’engage à « accorder aux conventions internationales dûment ratifiées
par lui, dans le cadre des dispositions de la constitution et des lois du Royaume,

43
dans le respect de son identité nationale immuable, et dès la publication de ces
conventions, la primauté sur le droit interne du pays, et harmoniser en
conséquence les dispositions pertinentes de sa législation nationale. » Parler de
primauté veut dire que le Maroc procède à une hiérarchisation entre le droit
interne et le droit international qui sont donc intégrés dans un ordre juridique
unique. Le Maroc en conséquence adhère à l’école moniste et le droit
international est une source de droit au Maroc. Est-ce que cela veut dire que les
particuliers peuvent se prévaloir de la norme internationale devant le juge et
quelle attitude va avoir celui-ci en cas de contradiction entre la norme
internationale et la norme interne ? La réponse à cette question appelle deux
remarques. La première c’est que la primauté n’est pas l’effet direct ; la
deuxième c’est que la constitution dans l’article 110 précise que « les magistrats
de siège ne sont astreints qu’à la seule application de la loi. Les décisions de
justice sont rendues sur le seul fondement de l’application impartiale de la loi.

1.4.4. Les sources directes non écrites : la coutume

La coutume est l'une des sources les plus importantes de la règle de droit. Cette
importance découle de la spécificité de la coutume : procédant directement et
spontanément des détails de la vie sociale, c'est-à-dire de l'opinion collective.
En effet, les règles coutumières sont issues des pratiques et des comportements
quotidiens des particuliers qui ont convenu de leur validité de et de leur
caractère obligatoire.

I- définition de la coutume

La coutume est une règle de conduite « qui découle d'une pratique ancienne,
d'un usage qui s'est prolongé dans le temps et qui devient à certaines conditions
une règle de droit27».

Il faut cependant préciser que tout usage, tout comportement habituel dans la vie
sociale ne peut être considéré comme une coutume. Il en est ainsi, de la pratique
du pourboire, ou encore de l’usage confraternel qui veut qu’un médecin qui
apporte des soins à son collègue médecin, ou aux membres de sa famille,
n’exige pas d’honoraires28.

Comme, il faut souligner que l’usage et la coutume ne sont pas complètement


synonymes, même s’ils se confondent parfois. Le mot « coutume » a une
connotation plus directement juridique, dans la mesure où elle désigne une règle
de droit « d’origine non étatique » (dont les effets juridiques sont spontanément
27
Cf. X. Labbée, « introduction générale au droit, pour une approche éthique », op. cit., p.189
28
Cf. J-L. AUBERT « Introduction au droit … » ; op. cit. p.107.
44
reconnus par les sujets de droit, sans l’intervention d’un texte obligatoire). Alors
que le terme usage convient mieux à l’évocation, plus large, d’une pratique qui
ne devient obligatoire qu’une fois prévu expressément par une règle de droit.
C’est le cas de l’art. 754 du DOC qui dispose dans son alinéa 2 que « le délai
requis dans la rupture du contrat de travail est fixé selon les usages ».

Pour qu’il y ait coutume, il faut que deux éléments soient réunis : un élément
matériel et un élément psychologique.

A- L’élément matériel : Cet élément, suppose l’existence d’un comportement


suivi d’une manière habituelle. L’usage doit être assez ancien et relever d’une
mise en œuvre répétée.
B- L’élément psychologique : En fonction de cet élément, l’usage répété doit
être percu comme un comportement obligatoire par l’opinion commune. C’est
l’opinio juris seu necessitatis. C’est-à-dire que ceux qui se conforment à l’usage
doivent avoir la conviction qu’il s’agit d’une règle contraignante.

II- Les caractères de l’usage coutumier

L’usage coutumier présente les principales caractéristiques de la règle de


droit : il est général et impersonnel, bénéficie d’une certaine notoriété et
considéré par les sujets de droit comme ayant un caractère obligatoire.

A- le caractère général et impersonnel de la règle coutumière

Au même titre que la règle de droit, l'usage coutumier vise non pas tant les
personnes en elles-mêmes mais les situations dans lesquelles elles se trouvent,
c'est-à-dire toute personne se trouvant dans des situations précises soumises à la
règle en question.

La généralité et l’abstraction de l’usage coutumier n’excluent pas, comme pour


la règle de droit, qu'il puisse viser un nombre restreint de personnes se trouvant
dans des situations déterminées. De fait, le champ d’application de l’usage
coutumier se trouve assez souvent limité par une localisation géographique
précise : usages locaux et régionaux - ou par une profession déterminée (les
usages professionnels revêtent une importance particulière en droit commercial
et en droit du travail).

45
B- la notoriété de la règle coutumière29

L'usage ou le comportement habituel est une composante de la coutume. Cet


usage doit avoir été pratiqué aussi longtemps qu'il puisse être connu et accepté
par les sujets de droit qui lui sont assujettis. Or, contrairement à la loi, la
coutume n'est pas écrite. Et c'est là un problème qui complique sa validité. La
preuve de la coutume dépendra en effet de la facilité d'en établir la réalité et la
consistance. Ainsi plus un usage est général, plus il sera facile de l’appliquer
par le juge qui en a personnellement connaissance. Dans, le cas, contraire où il
s’agit d’un usage local ou relatif à une activité déterminée, la preuve de la
coutume incombe a celui qui entend en bénéficier. Ce dernier peut faire usage de
tous moyen propres à entraîner la conviction du juge : témoin, experts, ou
encore parères.

C- le caractère obligatoire de la coutume

Le caractère obligatoire de l’usage coutumier découle en partie de l'élément


psychologique qui le définit, l'opinio juris seu necessitatis. Cette obligation, doit
être constatée par les juges du fond, qui disposent ainsi de la faculté d'apprécier
souverainement l'existence de la coutume 30(c’est-à-dire lui attribuer la force
juridique d'une règle de droit ou la lui refuser). Il faut toutefois, souligner que ce
caractère obligatoire n’est pas absolu, comme le dévoile l’examen des diverses
fonctions de la coutume.

III- Les rapports entre la loi et la coutume

Il convient de déterminer, en présence d’une loi et d’une coutume laquelle doit


l’emporter sur l’autre.
Certes l’usage coutumier, comme nous l’avons précisé, acquiert les mêmes
caractéristiques que la règle de droit. Cependant, cela ne signifie pas
automatiquement que la coutume est applicable au même titre que la loi.

Il est classique de distinguer, à ce sujet, trois situations différentes : tout d’abord,


celle où la loi renvoie expressément à la coutume ; celle, ensuite, où une
coutume vise à combler une lacune de la loi ; celle, enfin, où la coutume est
contraire à la loi.

29
L’art. 476 du DOC précise que celui qui invoque l’usage doit en justifier l’existence. Cet usage doit
être général dominant et ne doit pas être contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs ».
30
Cf. J. L. Aubert, « introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil » ; op. cit. , p.109.
46
A- La loi renvoie directement à la coutume

Le recours à cette pratique, notamment en droit civil permet de trouver des


solutions aux problèmes posés (cette pratique est relativement fréquente en
droit civil, notamment pour ce qui concerne le régime de la propriété foncière, et
en matière contractuelle).

Ce renvoi peut être soit express soit tacite. À titre d’exemple l’art. 642 du DOC
stipule que : « Le locateur est tenu de payer les impôts et charges afférentes à la
chose louée, sauf stipulation ou usage contraire ». C’est le cas également de
l’article 2 du code de commerce qui énonce que : « il est statué en matière
commerciale conformément aux lois, coutumes et usages du commerce, ou au
droit civil dans la mesure où il ne contredit pas les principes fondamentaux du
droit commercial ».

On constate dans ces divers exemples, une véritable délégation de pouvoirs que
le législateur consent à la coutume. Par conséquent, il est normal que celle-ci
puisse avoir la même force obligatoire que la loi.

B- La coutume obligatoire en l’absence de la loi.

Le caractère obligatoire de l’usage coutumier n’est pas aussi simple à admettre,


lorsque la loi n’y fait aucune référence. Il s’avère, cependant, nécessaire de le
reconnaître, à chaque fois que la coutume a pour fonction de combler une lacune
de la loi .

Un exemple souvent cité dans le passé, était l’usage pour la femme mariée de
prendre le nom de son mari.

C- La coutume contraire à la loi

« La force obligatoire de la coutume se pose évidemment d’une manière très


différente » dans l’hypothèse d’une opposition entre l’usage est la loi.
Deux situations sont à envisager. Soit la loi à laquelle s’oppose une coutume est
supplétive de volonté des parties Dans cette hypothèse, la coutume l’emporte à
condition de prouver que les parties ont entendu déroger à la loi pour se
conformer à la coutume. Soit la loi à laquelle s’oppose la coutume est
impérative. Dans ce cas l’art. 475 du DOC stipule expressément « que la
coutume et l’usage ne sauraient prévaloir contre la loi, lorsqu’elle est formelle ».
Il est donc, incontestable, que la coutume doit être écartée, en présence d’une
règle impérative.

47
Pourtant, en dépit de leur rareté, il existe des cas ou la coutume va à l’encontre
de la loi. A titre d’exemple l’ignorance de la loi, lorsqu’elle est collective, peut
être prise en considération et finalement l’emporter sur la loi. C’est ce qui ce
traduit par l’adage Error communis facit jus : l’erreur commune crée le droit.
Au demeurant, « la coutume peut être considérée comme une source du droit
marocain actuel dans les limites que nous venons de tracer ».

Section 2. Les sources non écrites : La jurisprudence et la doctrine

2.1. La jurisprudence

Produit de l’activité judiciaire, la jurisprudence désigne l’ensemble des décisions


rendues par les juridictions nationales (Tribunaux et Cours d’appel). Elle
représente la mise en œuvre du droit par les juges, qui procèdent à cet effet par
voie d’analyse ou d’interprétation.
-Est-ce que la jurisprudence constitue une source directe du droit ?

Dans les pays du Common law la jurisprudence constitue une véritable source
du droit, lorsque toutes ou une majorité des décisions qui se sont succédées
interprètent de la même manière les règles du droit. Il y a jurisprudence quand il
y a similitude des solutions sur un problème juridique donné. Le juge anglais est
obligé de suivre la solution dégagée par un autre juge, notamment lorsqu’il
appartient à une juridiction supérieure.

A l’opposé de cette conception, le droit marocain ne reconnaît pas la


jurisprudence comme source directe du droit. Deux raisons président à cette
approche :

-D’une part, le juge est lié par la loi, il a vocation non pas de créer la règle de
droit, mais d’appliquer, et éventuellement d’interpréter une règle conçue et
élaborée par le législateur.

-D’autre part, contrairement aux juges anglo-saxons, un juge marocain n'est pas
lié par les décisions qu'ont pu rendre ses collègues, il n'y a pas de précédents
judiciaires.

Dans ce cadre, Carbonnier disait :"La résistance à la loi est illégitime, celle à la
jurisprudence ne l'est pas!".
Les jugements ne sont, donc, pas des règles de droit. La jurisprudence qui en
résulte ne constitue pas une source directe de droit, et encore moins une force
obligatoire.

48
Cependant, face à une lacune de la loi, le juge est conduit à créer le droit.
L’article 290 du code pénal dispose que : tout magistrat ou tout fonctionnaire
public investi d'attributions juridictionnelles ne peut refuser de rendre la justice
même en cas de silence ou d'obscurité de la loi.

La Jurisprudence devient alors source indirecte de droit, dans tous les cas où un
juge est confronté à une carence de la loi. Ce dernier va se contenter de donner
une solution d'équité c'est à dire une solution qui n'est pas assimilable à une
règle de droit, mais qui n'est applicable que dans le cas considéré.

Quelle que soit sa place dans la constitution du droit, la jurisprudence est


constituée de jugements qui ne pourraient être rendus sans l’existence d’une
institution judiciaire, constituées de juridictions qui différent d’un pays à l’autre.

2.2. La doctrine

La doctrine représente l’ensemble des opinions émises (écrits, commentaires,


théories…) sur le droit positif par les juristes (professeurs de droit, avocats,
notaires, juges etc.) La doctrine n'est pas une source directe du droit, mais elle
est importante pour analyser et comprendre la norme juridique. Ses critiques
peuvent également inspirer le législateur et la jurisprudence.
Le travail doctrinal peut se présenter sous différentes formes.
Il peut être exprimé oralement dans le cadre de l'enseignement du droit, mais on
le trouve aussi exposé dans les traités généraux et dans les ouvrages
monographiques. Elle se manifeste également dans les articles et dans les notes
signées par les professeurs de droit, les jugements et les arrêts qui sont publiés
dans les revues juridiques.

En ce qui concerne le rôle de la doctrine en droit positif moderne, nous


constatons que les opinions émises par les professionnels du droit n’ont en
principe aucune force obligatoire ni pour le législateur, ni pour le juge. (Selon le
Doyen Cornu: "Nul n'est censé connaître la doctrine"). Mais dans la pratique
nous remarquons qu'elles exercent sur eux une influence certaine.
Ainsi la doctrine peut inspirer le travail d'interprétation du juge lorsqu'il se
trouve, à l’occasion d’un procès devant des textes de lois généraux ou obscurs.

49
PARTIE II : LES DROITS SUBJECTIFS
Les droits subjectifs sont des prérogatives reconnues aux sujets de droit par le
droit objectif - c’est-à-dire par les règles de droit-, et sanctionnées par lui.

Le droit subjectif a ainsi comme titulaire un sujet de droit auquel il confère une
certaine liberté, une faculté, un pouvoir, en un mot, un droit. Cependant, cette
prérogative est placée sous l’égide du droit objectif qui la consacre et la protège,
mais peut aussi la limiter (chapitre I).

Chapitre 1. Les titulaires des droits subjectifs

Le droit subjectif est toute prérogative dont une personne est titulaire en vertu du
droit objectif. Par conséquent, les personnes sont des sujets de droits. Elles
sont titulaires de droits subjectifs.

Selon le vocabulaire juridique Capitant, est une personne celui (ou celle) « qui
jouit de la personnalité juridique ». Par ailleurs, la personnalité juridique se
définit comme l’aptitude à participer au commerce juridique (= à la vie
économique et sociale). De façon plus précise, elle se définit comme l’aptitude à
être titulaire de droits subjectifs (exemple: devenir propriétaire, intenter une
action en justice) et débiteur d’obligations (exemple: exécuter un contrat signé,
payer des impôts, indemniser une victime).
L’aptitude à être sujet de droits est d’abord conférée aux hommes ou personnes
physiques (section 1), mais elle est aussi attribuée à des groupements considérés
comme des sujets de droits distincts des membres qui les composent, notamment
les personnes morales (section 2).

Section 1. Les personnes physiques

Parmi l’ensemble des créatures vivantes, seuls les hommes sont sujets de droit.
Tout être humain est sujet de droit par principe. De ce fait, la personnalité
juridique est reconnue à tout être humain, quel que soit son âge et ses capacités
physiques ou intellectuelles.

Toute personne physique possède une personnalité juridique. Cette personnalité


juridique est d’une grande utilité car elle permet de déterminer l’existence de
cette personne, de l’identifier, de lui conférer des droits et des devoirs et de
mettre en jeu sa responsabilité.

50
Dans un premier temps on examinera comment cette personnalité est reconnue
avant de dégager les éléments qui permettent d’identifier les personnes à savoir,
l’état, le nom, le domicile et la nationalité.

1.1. La personnalité juridique des personnes physiques

1.1.1. La durée de la personnalité

La personnalité juridique, conçue comme l’aptitude à jouir de droits, recouvre


en principe la durée de la vie humaine: apparaissant à la naissance, elle dure
toute la vie et s’efface à la mort.

⚫ Le commencement de la vie: la naissance

Tout individu acquiert la personnalité juridique à la naissance. Par dérogation, le


législateur marocain fait remonter le point de départ de la personnalité à la date
de la conception à condition que l’enfant soit né vivant (l’enfant mort-né n’a pas
d’existence juridique). Le but est de lui permettre d’acquérir ses droits (exemple:
pour hériter d’une personne décédée avant sa naissance).

⚫ La fin de la vie : le décès

Le décès qui doit être constaté par un médecin, entraine la perte de la


personnalité juridique. On peut définir le décès come étant le moment à partir
duquel les fonctions vitales cessent de se manifester.

Cependant, le droit prend également en compte deux autres événements qui


peuvent entrainer la perte de la personnalité juridique, notamment l’absence et la
disparition de l’individu. La difficulté de ces derniers tient au fait que le décès
ne peut être constaté:

L’absence correspond à l’état d’une personne dont on ignore si elle est en vie,
alors qu’aucun événement particulier ne fait présumer le décès. C’est le cas où
une personne ne réapparait plus à son domicile, sans donner aucune nouvelle.
On ne peut plus prouver son existence mais on ne peut pas prouver non plus sa
mort. Dans ce cas, il appartient au tribunal de fixer la période au terme de

51
laquelle il rendra le jugement déclaratif du décès et ce, après enquête et
investigation, par tous les moyens possibles, des autorités compétentes pour la
recherche des personnes disparues (article 227 alinéa 2 du code de la famille).

La disparition constitue l’état d’une personne qui a disparu « dans des


circonstances exceptionnelles rendant sa mort probable ». Le décès peut être
alors judiciairement déclaré «à l’expiration d’un délai d’une année courant à
compter du jour où l’on a perdu tout espoir de savoir si elle est vivante ou
décédée». C’est une procédure qui trouvera application à l’occasion de
catastrophes: naufrages, accident d’avion…

1.1.2. L’étendue de la personnalité:

En principe, l’individu peut jouir de tous ses droits et les exercer librement. Il
est pleinement capable. La capacité est l’aptitude d’une personne à être
titulaire de droits (capacité de jouissance) et à les exercer (capacité
d’exercice).

Certes, le principe est celui de la pleine capacité mais il y fait exception lorsque
la loi édicte des incapacités qui entrainent une limitation soit à la jouissance, soit
à l’exercice des droits. Ainsi, l’étendue de la personnalité se voit limitée par
une incapacité.

L’incapacité de jouissance correspond à une privation de droit. Ces incapacités


sont rares et limitées à certains droits déterminés (exemple: déchéance de
l’autorité parentale)
L’incapacité d’exercice peut correspondre à une sanction (interdictions légales
frappant les individus qui ont subi certaines condamnations), mais elle est
principalement une mesure de protection d’individus qui pour des raisons
diverses (minorité, état mental ou physique), sont incompétents pour gérer leurs
biens. Ainsi, un mineur peut être propriétaire d’un immeuble (capacité de
jouissance) mais il ne peut lui-même en disposer (incapacité d’exercice). Pour
protéger leur patrimoine, le législateur fait relever les incapables (mineurs et
majeurs protégés) d’un système de représentation.

1.2. L’identification des personnes physiques

Différents éléments permettent d’identifier les personnes au sein de la société.


Cette identification se fait principalement par le nom de famille, le prénom, le
domicile de la personne et, plus généralement tous les éléments qui sont

52
retranscrits dans les actes d’état civil et qui constituent le statut personnel de
l’individu, ce que l’on appelle son état.

1.2.1. Les principaux éléments d’identification des personnes physiques

Une personne physique s’insère tout abord dans la société internationale par sa
nationalité. Cette dernière rattache politiquement et juridiquement la personne à
un pays. Elle lui confère des droits (ex: droit de vote, droit d’éligibilité, etc.) et
des devoirs (respecter les principes fondamentaux du Royaume, payer des
impôts etc.).

Une personne physique est identifiée par le nom de famille servant à désigner
cette personne dans sa vie sociale et juridique, dans l’exercice de ses droits et
l’accomplissement de ses devoirs. L’attribution du nom de famille découle
essentiellement des règles relatives à la filiation et au mariage.

Le prénom constitue un complément obligatoire du nom, pour individualiser les


titulaires d’un même nom de famille. Le prénom est choisi librement par les
parents à condition que le choix parental respecte les conditions prévues par
l’article 21 de la loi n° 37-99 relative à l’état civil.

Une personne physique est identifiée par son domicile. Il correspond au lieu où
la personne est présumée présente pour l’exercice de ses droits et devoirs, ce qui
le distingue de la résidence (le lieu où la personne se trouve effectivement à un
moment déterminé) et de l’habitation (lieu de séjour occasionnel). Il permet de
situer une personne dans l’espace, de la rattacher juridiquement à un lieu fixe
déterminé. Il détermine le lieu d’accomplissement de certains actes et la
compétence territoriale des juridictions.

1.2.2. L’état civil des personnes physiques

L'état civil est le régime consistant à consigner et à authentifier les faits civils
fondamentaux relatifs aux personnes. Il contient ainsi l’ensemble des éléments
qui identifient un individu ainsi que tous les éléments qui marquent sa vie tels
que la naissance, le décès, le mariage et le divorce. Tous ces éléments
concourent à individualiser chaque personne dans la société. Ils déterminent sa
condition civile.

Par extension, l’état civil désigne le service public chargé d’établir et de


conserver les actes constatant les événements les plus marquants de la vie des
personnes physiques (acte de naissance, de mariage, de décès etc.). Ce service

53
est assuré au Maroc par le bureau d’état civil crée dans chaque commune du
Royaume. Les actes de l’état civil sont des instruments d’indentification civile.
Ce sont des éléments de publicité et des moyens de preuve.

Section 2: Les personnes morales

Le droit a permis la création de sujets de droit purement juridiques, qui


existent indépendamment des personnes physiques qui les composent: ce sont
les personnes morales.

Au même titre que les personnes physiques, les personnes morales jouissent de
la personnalité juridique et disposent de droits et d’obligations.
Le parallélisme avec la personne physique est évident mais leur différence de
nature entraine des différences de régime. Aussi convient-il de préciser la notion
de personne morale avant d’examiner son régime juridique.

2.1. La notion de personne morale

La personnalité morale consiste à attribuer à des groupements de personnes ou


de biens la personnalité juridique. Elle leur permet de posséder des biens et de
les administrer, d’accomplir tous les actes de la vie juridique, indépendamment
de l’action de leurs membres.

Déterminer la notion de personne morale nécessite d’en examiner la nature


juridique et d’étudier les nombreuses catégories créées ou reconnues par notre
droit positif.
2.1.1. La nature juridique des personnes morales

On s’est aperçu depuis fort longtemps que, pour réaliser des opérations de
grande envergure, il était nécessaire de constituer des groupements de personnes
mettant en commun leur activité et leurs ressources.

La multiplication de ces groupements dans toutes les activités politiques,


économiques, sociales et culturelles et leur bon fonctionnement implique de leur
accorder une personnalité morale, calquée sur celle des personnes physiques.

Cependant, la reconnaissance de la personnalité morale fut longue à se dessiner.


A cet effet, deux théories se sont opposées pour justifier l’existence des
personnes morales:
⚫ La théorie de la fiction postule que seuls les individus peuvent avoir la
qualité de sujets de droits. La personnalité morale ne peut alors être
54
accordée que par le législateur et dans les limites qu’il fixe. Une personne
morale n’est qu’une fiction juridique, une création de la loi.
⚫ la théorie de la réalité reconnait, à l’inverse, qu’un groupement pouvant
avoir un intérêt propre, différent des intérêts de ses membres, doit avoir de
plein droit la personnalité juridique.
Cette théorie qui a fini par s’imposer, en doctrine et en droit positif,
conduit d’une part à admettre la personnalité juridique au profit de tout
groupement constitué selon la loi pour défendre des intérêts collectifs et d’autre
part à doter les personnes morales de larges pouvoirs.

Cette reconnaissance de la personnalité morale implique de nombreux


avantages. D’abord, la personnalité morale réunit les participants dans une
structure organisée dont la complexité varie selon la forme de l’organisme.
Ensuite, la personne morale est indépendante par rapport à ses membres. Elle a
son propre patrimoine et a des organes susceptibles de la représenter à l’égard
des tiers, ce qui évite de faire participer tous les associés à la conclusion des
actes.

2.1.2. Les catégories de personnes morales

On distingue traditionnellement les personnes morales de droit public et les


personnes morales de droit privé.

Les personnes morales de droit public répondent à un intérêt public et relèvent


exclusivement du droit public. On désigne par là l’ensemble des personnes
morales qui constituent l’Etat et les pouvoirs publics. Il s’agit donc de l’Etat lui-
même, des collectivités locales (régions, départements, communes) et des
établissements publics qui assurent le fonctionnement des services publics tels
les hôpitaux, les universités, etc.

Les personnes morales de droit privé réunissent deux catégories: les


groupements de biens (fondations) et les groupements de personnes à but
lucratif (sociétés) ou non (associations) ou intermédiaire (groupement d’intérêt
économique):
Les groupements de biens: il s’agit d’une masse de biens affectée à un
but déterminé (œuvre d’intérêt général) et qui peut acquérir la personnalité sous
la forme juridique de fondations qui peuvent selon le but poursuivi être
religieuses ou laïques.
La fondation religieuse « Habous » permet à une personne, en vue d’être
agréable à dieu, de se dépouiller d’un ou plusieurs de ses biens en les affectant à
une œuvre, à un but pieux, charitable ou social, soit d’une manière absolue

55
(Habous public), soit en réservant la jouissance à une ou plusieurs personnes
déterminées (Habous de famille).
La fondation laïque est aussi une masse de biens dotée de la personnalité
morale en raison de son affectation à un but désintéressé comme la création des
hôpitaux, des universités, des prix littéraires et universitaires etc. la qualité de la
personne morale permettra à la fondation de réaliser sa mission et sa finalité.
Les groupements de personnes: de très nombreux groupements sont
constitués de personnes privées et poursuivent des fins d’intérêt privé. Il s’agit
notamment:
Des sociétés commerciales: les sociétés sont des groupements à but
lucratif. Elles résultent d’un contrat par lequel plusieurs personnes conviennent
de mettre quelque chose en commun, en vue de partager le bénéfice ou de
profiter de l’économie qui pourra en résulter.
Il existe diverses formes possibles pour une société commerciale.
Certaines sont des sociétés de personnes, ainsi dénommées parce que la
considération de la personne des associés y est essentielle à divers niveaux (les
associés sont personnellement et solidairement responsables du passif social; le
décès d’un seul associé entraine en principe la dissolution de la société et les
parts ne sont pas librement cessibles). Tel est le cas de la société en nom
collectif et la société en commandite simple.
Bien différentes sont les sociétés de capitaux ou par actions dont la société
anonyme est le meilleur exemple. Elle se distingue des sociétés de personnes
par le fait que les associés ne sont pas tenus personnellement responsables des
dettes de la société mais seulement à concurrence de leurs apports représentés
par des actions; ces actions sont librement cessibles.
Des associations: une association est un groupement composé de
sociétaires poursuivant des buts charitables ou culturels ou politiques, etc., sans
aucune idée de recherche et de partage des bénéfices.
Des groupements d’intérêt économique : ce groupement doté de la
personnalité morale a pour objectif de réunir des personnes physiques ou
morales afin de développer leur activité. Servant de cadre à des actions
communes d’industriels, ils permettent à ceux-ci de réaliser des économies dans
le développement de leur production. Ces avantages, confortés par un statut
fiscal privilégié, fait que la formule des GIE connait un certain succès.

2.2. Le statut juridique des personnes morales

Les personnes morales ont un statut juridique distinct de celui des personnes
physiques. Contrairement à ces dernières, l’apparition et la disparition des
personnes morales n’obéissent pas à des phénomènes naturels. Elles nécessitent
l’accomplissement d’actes volontaires et de formalités.

56
La personne morale acquérant une personnalité indépendante des personnes qui
l’on créé, est doté d’attributs qui lui sont propres.

2.2.1. L’existence de la personne morale

La naissance de la personnalité morale: La constitution d’une personne


morale exige un certain nombre de formalités et un certain temps. Elle nécessite
une manifestation de volonté (contrat de société ou dépôt de statuts d’une
association), généralement une intervention de l’Etat (agrément, autorisation
administrative…) et des mesures de publicité (immatriculation des sociétés au
registre du commerce qui leur confère la personnalité juridique).
La disparition d’une personne morale: les personnes morales, n’étant pas
soumises à des lois biologiques, ont vocation à durer indéfiniment. Cette
perpétuité de principe n’empêche pas qu’il existe de nombreuses causes de
disparition notamment, la volonté des associés eux-mêmes; une décision
judiciaire; la volonté du gouvernement (par le retrait d’une autorisation); voir
du législateur (lorsque l’ordre public est menacé), ou l’arrivé de son terme s’il a
été fixé.

2.2.2. La personnalité et la capacité des personnes morales

La personnalité juridique des personnes morales: le groupement, personne


morale, dispose d’une personnalité juridique distincte des membres qui le
composent: elle est un sujet de droit. Un groupement « personne morale » est
titulaire, en lui-même de droits et d’obligations.

Il s’ensuit que la personne morale est titulaire d’un patrimoine propre (le
patrimoine se compose d’un actif, ensemble des biens et des droits et d’un
passif entendu comme un ensemble d’obligations, notamment des dettes et des
créances).

Ainsi, les actifs sont distincts: les membres n’ayant aucun droit réel sur les biens
du groupement. Les associés possèdent en revanche un droit d’une nature
particulière sur le patrimoine social considéré dans son ensemble. Ce droit porte
le nom d’action dans les sociétés de capitaux et de parts dans les sociétés de
personnes. De même, les passifs, les dettes sont généralement distincts: le
créancier d’un membre de la personne morale, n’est pas le créancier de celle-ci.

La capacité juridique de la personne morale: Deux principes régissent la


capacité des personnes morales: le principe de la spécialité et le principe de la
représentation.

57
En vertu du principe de spécialité, la capacité de jouissance des personnes
morales est limitée à l’activité pour laquelle elles ont été créées. Les personnes
morales ne peuvent donc accomplir que des actes juridiques correspondant à
leur objet.

En vertu du principe de représentation, une personne morale ne peut exercer ses


droits que par l’intermédiaire de ses représentants, personnes physiques
désignées par les membres pour agir.

2.2.3. L’identification des personnes morales:

La personne morale est identifiée dans la vie juridique par son nom (raison ou
dénomination sociale d’une société, titre d’une association). Le choix du nom
par les fondateurs est libre, changeable et cessible et constitue un élément du
fonds de commerce des sociétés commerciales. En revanche, il est également
protégé contre les usurpations (action en concurrence déloyale en cas de risque
de confusion).
Les personnes morales ont un domicile propre appelé siège social,
rattaché, comme celui des personnes physiques, au lieu de leur principal
établissement qui ne doit pas être fictif et correspondre au siège réel de la vie
juridique du groupement, c’est-à-dire au lieu où se trouvent ses organes de
direction. La détermination du siège social a des intérêts pratiques considérables
spécialement en matière de procédure (la compétence territoriale pour connaitre
d’un litige appartient en règle générale au tribunal du domicile du défendeur).
Toute personne morale a une nationalité. Elle dépend en règle générale du siège
social. Une personne morale dont le siège social est au Maroc est donc en
principe marocaine et soumise à ce titre à la loi marocaine.

Chapitre 2. Les Sources du Droit Subjectif


Les sources des droits subjectifs sont les actes juridiques et les faits juridiques.
Les critères de distinction entre ces deux sources résident dans le rôle joué ou
non par la volonté de la personne dans la naissance des droits subjectifs.

De ce fait, l’acte juridique est une manifestation de volonté dont l’objet est de
créer des effets juridiques. C’est la volonté de la personne qui est à l’origine des
droits subjectifs qui vont naitre des actes juridiques ; à ce titre, les contrats sont
une manifestation de volonté de deux personnes en vue de produire des effets
juridiques. Par ailleurs, le fait juridique peut être soit une action d’une personne
qui va engendrer des conséquences juridiques qui sont déterminées par la loi tel

58
que les conséquences qui résultent d’un accident de voiture ; il en résulte une
responsabilité civile Soit une situation de fait comme la naissance.

Section 1 : Les actes juridiques

Les actes juridiques sont des manifestations de volonté émises en vue de créer
des droits et des obligations et ce dans les conditions fixés par le droit objectif.
C’est un acte accompli volontairement en vue de de produire des effets
juridiques comme la conclusion d’un contrat de location, de vente…il existe
plusieurs catégories d’actes juridiques.

§-1: Actes juridiques et Conventions :

A/ Classification des Actes Juridiques :


On peut distinguer plusieurs types d’actes juridiques en fonction de leur objet :
Actes déclaratifs : constatent d’une situation existante ou constatent un
droit, tel que le droit d’affiliation entre un homme et un enfant.
Actes constitutifs : dont l’objet de créer des droits et obligations comme
les contrats de vente.
Actes abdicatifs : dont l’objet est la renonciation à un droit ou une
situation juridique préexistante, comme la renonciation à la succession.
Actes translatifs : dont l’objet est de porter des droits accordés à une
personne à une autre tel que la donation.

……..en fonction de l’auteur :


Les actes unilatéraux : sont des actes juridiques qui repose sur la volonté
d’une seule personne, c’est l’acte par lequel une personne va créer des effets
juridiques par sa seule volonté.
Les actes conventionnels : ce sont des actes juridiques reposant sur un
accord de volonté entre plusieurs personnes étant destiné à produire des effets de
droit à l’égard de ces personnes. Exp : le testament permet de concéder et
répartir des biens. Lorsque l’acte conventionnel résulte de l’accord de volonté de
deux personnes, il est qualifié d’acte bilatéral comme le contrat de vente ou de
location, lorsqu’elle résulte de la volonté de plusieurs personnes, elle est
qualifiée d’acte multilatéral.

……….. en fonction du motif de l’acte:


Les Actes à titre onéreux : acte qui comporte des avantages réciproques
pour chaque partie ; conclure un acte afin de recevoir une contrepartie en
échange de la prestation. Chaque partie agit dans son intérêt personnel et conçoit
à céder une chose en échange d’une autre (la plupart du temps en contrepartie
d’une somme d’argent).

59
Les Actes à titre gratuit : est par lequel une personne accorde un avantage
à une autre personne sans contrepartie ou échange, comme le contrat de
donation.
..........en fonction des effets de l’acte :
Les contrats commutatifs : les effets qu’il produit sont certains dès sa
conclusion.
Les contrats aléatoires : les avantages et pertes des contrats dépendent
d’un événement indépendant de la volonté des parties tels que les contrats
d’assurance.
………….en fonction du rédacteur de l’acte :
Les actes authentiques : sont obtenu par un officier public qui a droit
d’instrumenter dans le lieu ou l’acte est rédigé et sous réserve de de respecter les
modalités requises par la loi. En Droit Marocain, il existe deux types d’actes
authentiques :
Actes notariés : sont des actes rédigés et signés par les notaires
avec une date certaine tels que les actes de ventes et achats, donations …
Actes adulaires : sont rédigés et signés par des Adouls comme
des actes de mariage, d’indivision ….

Les Actes sous signature privé ou sous seing privé : sont des actes rédigés
et
signés par les parties à l’acte ou par un tiers avec l’intervention d’un officier
public, comme les contrats d’assurance.

Section 2. Les faits juridiques

Les faits juridiques sont des événements ou des agissements de personnes,


voulus ou non et qui va produire des conséquences juridiques sans qu’elles aient
étés voulues par les personnes qui les subiraient. Il est difficile de dresser une
liste exhaustive des faits juridiques, mais on en distingue ceux qui sont
volontaires et involontaires.

§-1: Les faits volontaires :


Les faits volontaires sont des faits de l’homme, et sont définis comme des faits
voulus par la personne mais dont les conséquences juridiques qui en découlent
ne sont pas recherchées mais plutôt imposées par la loi. Comme par exemple :
commettre un acte volontaire de vol, cet acte engendre des effets juridiques
(sanctions) non voulues par la l’auteur de l’infraction.

§-2: les faits involontaires ou naturels :

60
Il s’agit de faits qui se produisent indépendamment de la volonté humaine, et qui
produisent des conséquences juridiques que la personne n’a pas recherchée.
Souvent on y assimile la naissance à laquelle la loi attache des effets de droit. La
force majeure constitue un fait involontaire qui doit être * un évènement
extérieur à la volonté des individus, * imprévisible et * insurmontable. Ainsi, un
fait involontaire constitue une cause d’exonération de responsabilité.

Chapitre 3. L’objet des droits subjectifs


En raison de leur diversité, les droits subjectifs seront classifiés selon l’ordre
suivant :
- les droits patrimoniaux et les droits extra-patrimoniaux;
- les biens corporels et les biens incorporels ;
- les différents types de choses ;
- les meubles et les immeubles.

Section 1. La distinction des droits patrimoniaux et des droits


extra patrimoniaux

A côté de la classification de base des droits subjectifs qui distingue entre les
droits patrimoniaux et les droits extra-patrimoniaux (§1), les droits patrimoniaux
eux-mêmes peuvent être sériés en droits réels, droits personnels ou de créance et
droits intellectuels (§2).

§1 : Les droits patrimoniaux et les droits extra-patrimoniaux

Les critères de distinction entre les deux types de droits tiennent à une
évaluation pécuniaire des droits considérés.
Ainsi, les droits patrimoniaux font partie du patrimoine du sujet de droit.
Constitués de biens évaluables en argent (droit de propriété et droit de créance),
ils ont une valeur d'échange et sont de ce fait cessibles, transmissibles aux
héritiers, saisissables par les créanciers, et prescriptibles (se perdent par le non-
usage).
A l’opposé des droits patrimoniaux, les droits extra –patrimoniaux, sont hors
du patrimoine du sujet auquel ils sont rattachés, comme ils n’ont pas de valeur
pécuniaire.
Trois catégories de droits extra-patrimoniaux peuvent être identifiées :
 Les droits civils et politiques du citoyen : participation aux élections
comme électeur ou candidat, liberté de circuler, liberté d’expression, liberté
d’association…
61
 Les droits de la personnalité, c'est à dire l'ensemble des attributs que
la loi reconnaît à tout être humain, droit à la vie, à l'intégrité corporelle, au nom,
à l'honneur, à la vie privée...
 Les droits dits " de famille " ; entre époux : droit et devoir de
fidélité, d'assistance et de cohabitation ; entre parents et enfants : droit et devoir
de garde, de surveillance et d'éducation…

Ces droits sont incessibles, intransmissibles aux héritiers, insaisissables par les
créanciers, et imprescriptibles.
§2 : Les différents droits patrimoniaux
Les droits patrimoniaux peuvent être regroupés en trois catégories : les droit
réels (A), les droits personnels ou de créance (B) et les droits intellectuels (C)
(également appelées propriétés incorporelles).
A- Les droits réels :
Le droit réel est un droit portant sur une chose. Il confère à son titulaire un
certain nombre de prérogatives directes, immédiates et opposables à tous (sans
l'entremise d'une autre personne). Énumérés de façon limitative par le législateur
ses droits sont répartis entre principaux et accessoires.

1- les droits réels principaux :


Il s’agit du droit de propriété et ses démembrements31. Ces des droits inscrits à
l’article 8 du Dahir du 2 juin 1915 fixant la législation applicable aux immeubles
immatriculés32, à savoir : le droit de propriété, le droit d’usufruit, le droit des
Habous, les droits d’usage et d’habitation, le droit de l’emphytéose, le droit de
superficie, le droit de servitude.
2- Les droits réels accessoires :
Par opposition aux droits réels principaux, les droits réels accessoires sont liés à
l’existence d’une créance dont ils garantissent le recouvrement.
A titre d’exemple, un créancier cherche à se prémunir contre l'insolvabilité de
son débiteur. Il réclame des sûretés qui peuvent être personnelles: caution, mais
aussi réelle: les sûretés réels consistent dans l'affectation d'un bien appartenant
au débiteur au paiement de la dette: bien qui va servir au garanti du paiement de
la dette

31
Le droit de propriété comporte trois prérogatives : le droit d’user de la chose, le droit d’en percevoir
les fruits, le droit d’en disposer. Certains droits réels ne confèrent à leur titulaire qu’une partie de
ces attributs : on les qualifie de démembrements du droit de propriété (ex : droit de servitude et
droit d’usufruit).
32
Article 8 : Sont immeubles par l'objet auxquels ils s'appliquent :
a) Les droits réels immobiliers, savoir : 1° la propriété des biens immeubles ; 2° l'usufruit des mêmes
biens ; 3° les habous ; 4° les droits d'usage et d'habitation ; 5° l'emphytéose ; 6° le droit de superficie
; 7° l'antichrèse ; 8° les servitudes et les services fonciers ; 9° les privilèges et hypothèques ; 10° les
droits coutumiers musulmans tels que gza, istidjar, guelza, zina, houa.
b) Les actions qui tendent à revendiquer un immeuble.
62
« On les appelle ainsi les sûretés réelles, par opposition aux sûretés personnelles,
représentées par une caution ou plusieurs débiteurs solidaires 33». C’est le cas
essentiellement de l’hypothèque et du gage.
 L'hypothèque est une garantie que prend un prêteur sur un bien
immobilier pour lequel il a consenti un crédit. L'hypothèque permet
au créancier de faire saisir le bien afin qu'il soit procédé à une vente
en justice pour être payé sur le prix au cas où son propriétaire ne
paierait pas les sommes qu'il doit rembourser.
Une hypothèque peut être conventionnelle, légale ou judiciaire. Dans tous les
cas, elle confère à son titulaire :
 un droit de préférence : en cas de vente suite à une saisie immobilière, le
créancier sera payé, en priorité, sur le prix de vente ;
 un droit de suite : il pourra faire saisir le bien même s'il a été revendu
depuis à un tiers.
 Le gage est un contrat par lequel une personne remet à son
créancier un objet mobilier ou une valeur pour assurer l'exécution
de ses engagements, par exemple le remboursement d'un prêt
d'argent. Le contrat se forme par la remise de l'objet sur lequel porte
le gage.
B- Les droits personnels ou de créance
Si le droit réel porte sur une chose, le droit personnel ou de créance lie deux
personnes. Il se définit, ainsi, comme le droit subjectif qu'a une personne,
appelée créancier, d'exiger d'une autre personne, le débiteur, une certaine
prestation.
Il peut exiger de cette personne de donner quelque chose, de faire ou de ne pas
faire quelque chose
Exemple : le remboursement d’un prêt, la livraison d’une marchandise, la
réalisation d’un ouvrage ou d’un travail quelconque. Dans certains cas,
l’exécution de l’obligation peut consister en une simple abstention.

C- Les droits intellectuels :


D’apparition récente, les droits de propriété intellectuelle se répartissent en deux
grandes catégories :
 Les droits de propriété industrielle ou commerciale qui regroupent
d'une part les droits sur les signes distinctifs (en particulier les marques), d'autre
part les droits sur les créations (brevets d'invention, dessins et modèles…).
 Les droits de propriété littéraire et artistique (droits d'auteur) qui
sont aujourd'hui appliqués également aux logiciels, aux bases de données et aux
œuvres " numériques " ou " multimédias ".
Ces droits confèrent à leurs titulaires un monopole d’exploitation sur le
produit d’une activité intellectuelle.

33
Cf. M. J. Essaid « Introduction à l’étude du droit », op. cit. p. 452.
63
Ils se distinguent :
- aussi bien des droits réels du fait qu’ils ne portent pas sur des objets
matériels mais sur des choses incorporelles;
- que des droits personnels, puisqu’ils sont opposables à tous et ne s’exercent
pas contre une personne déterminée.

Section 2. Les biens corporels et les biens incorporels

Le droit des biens est la matière qui étudie les relations juridiques dont l'origine
ou l'objet se rapporte aux biens. Il s'intéresse aux relations entre personnes et
biens34.
La classification dans ce cadre des biens en biens corporels et biens incorporels
est très ancienne, elle remonte au droit romain.
- les biens corporels : sont tous les biens objet de droits qui ont une existence
matérielle : un immeuble ou un objet mobilier quelconque.
- les biens incorporels : ce sont des biens qui ont une valeur économique, mais
qui n’ont pas d’existence matérielle : propriété littéraire et artistique, fonds de
commerce.

Section 3. Classification des choses

Vu leur diversité, les choses font l’objet de plusieurs classifications 35. Nous en
retiendrons les plus importantes, à savoir :
- La distinction des choses consomptibles et des choses non
consomptibles ;
- et la distinction des choses fongibles et des choses non fongibles.

§ 1 : choses consomptibles et choses non consomptibles


-Les choses consomptibles :
Elles se consomment dès leur premier usage ; Les choses consomptibles sont
celles qui, par le premier usage, perdent ou ne conservent plus leur nature
propre, leur forme et leur emploi initiaux.

34
Les biens sont un ensemble qui comporte tant des choses matérielles (voiture) que des choses
immatérielles (droit d'auteur) des choses meubles (action de société) que des choses immeubles
(appartement) voir infra section 4.
35
Les choses peuvent être classifiées en : Les choses appropriées et les choses non appropriées; Les
choses fongibles et non fongibles ; Les choses consomptibles et non consomptibles ; Les choses
frugifères et non frugifères.
64
C’est les cas des denrées alimentaires, les combustibles, le Kleenex, l’argent
dans la mesure où il n’a pas fait l’objet d’un placement.
-Les choses non consomptibles :
Les choses non consomptibles sont celles qui, après plusieurs usages, conservent
l’essentiel de leur nature propre, de leur forme et de leur emploi initiaux.
Il s’agit à titre d’exemple : des propriétés immobilières, des meubles, des
véhicules, des objets quelconques et divers
Seules les choses non consomptibles36 peuvent faire l’objet d’un contrat
de louage ou d’un prêt à usage. Dans ce cas le prêteur en reste propriétaire et
l’emprunteur doit lui rendre la même chose (prêt à usage ou commodat).
§2 : Choses fongibles et choses non fongibles :
- les choses fongibles ou choses de genre sont toutes celles qui sont
interchangeables, c’est-à-dire, qui peuvent être mises à la place les unes des
autres. Comme on peut les compter, les mesurer, et les peser.
A titre d’exemple : les billets de banque, les céréales, les œufs…
-Les choses non fongibles ou corps certains, ont toutes une individualité
propre ne permettant pas de les remplacer parfaitement.
Tel par exemple, un terrain sis au n°6 de la rue X de la ville Y, un véhicule
immatriculé X. (La femme à l’ombrelle de Claude Monnet).

L’intérêt de cette distinction tient au régime d’exécution des


obligations. Celui-ci diffère selon que l’on se trouve en présence de choses
fongibles ou de choses certaines.
-lorsqu’il s’agit de choses fongibles, l’article 246 du DOC dispose
que : « le débiteur ne doit que la même quantité, qualité et espèce portées
dans l’obligation, quelle que soit l’augmentation ou la diminution de la
valeur ».
-S’il s’agit d’un corps certain, l’article 245 du DOC, précise que le
débiteur « est libéré par la remise de la chose en l’état où elle se trouve lors
du contrat ».

Section 4. La distinction des meubles et des immeubles

En vertu de l’article 516 du code Napoléon «Tous les biens sont meubles ou
immeubles ».
L’absence d’une telle affirmation ainsi que des définitions des
meubles et des immeubles au niveau du droit marocain, est compensée par un
inventaire des différentes catégories de biens meubles et immeubles.
La distinction des biens meubles et immeubles est fondée, au Maroc
comme en France, sur un critère physique : si la notion d’immeuble désigne

36
Les choses consomptibles peuvent toutefois faire l’objet d’un prêt de consommation.

65
la terre et tout ce qui y est fixé, le terme meuble s’applique normalement à
tous les autres objets.
§1 : Les immeubles
La notion d’immeuble désigne la terre et tout ce qui y est fixé. Elle se rapporte
aux biens insusceptibles de déplacement regroupés par le législateur en trois
catégories (art. 5 du code foncier du 2 juin 1915).
- les immeubles par nature ;
-les immeubles par destination ;
-et les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent.
A- les immeubles par nature
Les biens immobiliers sont répartis selon l’art. 6 du code foncier en
deux catégories :
1- les biens immeubles par nature
Il s’agit aussi bien des fonds de terre et des bâtiments (constructions),
que des machines et ouvrages fixés ou posés sur maçonnerie ou sur piliers
incorporés à un bâtiment ou au sol.
2- les biens réputés immeubles par leur nature
Cette catégorie englobe les récoltes pendantes par les racines et les
fruits des arbres non cueillis, les coupes de bois, taillis et futaies non
abattues.
B- les biens immeubles par destination :
Ce sont des biens meubles corporels affectés au service d’un immeuble
par nature et qui en deviennent les accessoires37. Cette destination peut être
agricole (animaux et matériels), industrielle ou commerciale (outils,
machines, équipements…), ou encore purement civile (accessoires mobiliers
d’une maison : portes, volets, fenêtres, appareils sanitaires…; meubles
attachés à perpétuelle demeure : boiseries, glaces ou autres ornements).
Dans ce sens, l’article 7 du Dahir de 1915 dispose que sont réputés
immeubles par leur destination, les objets que le propriétaire d’un fonds y a
placés pour le service et l’exploitation de ce fonds.
Il en est de même de tous les objets mobiliers que le propriétaire a
attachés au fonds à perpétuelle demeure.
C- Les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent
Cette appellation comprend deux grandes catégories d’immeubles :

37
Trois conditions sont nécessaires pour que le meuble devienne immeuble par destination.
1- la volonté du propriétaire de l’immeuble par nature de créer un lien de rattachement entre le
meuble et
l’immeuble.
2- le meuble doit appartenir au propriétaire de l’immeuble par nature.
3- le meuble doit être destiné à l’immeuble.
66
- d’une part, les droits réels immobiliers, comme la propriété des biens
immeubles, l’usufruit des mêmes biens, les servitudes et les services fonciers
ou les privilèges et les hypothèques38.
- et d’autre part, les actions qui tendent à revendiquer un immeuble,
appelés actions immobilières.
L’importance que le législateur attache aux immeubles ne couvre pas les
biens meubles qui ne sont définis par aucun texte

§ 2 : Les meubles
En l’absence d’une définition légale des biens meubles, on peut dire que
tout bien qui n’est pas immeuble est meuble.
Le législateur marocain, reconnaît, toutefois, l’existence de deux
catégories de biens meubles : les meubles par nature et les meubles par
anticipation.
A ces deux catégories le législateur français ajoute une troisième,
concernant les meubles par détermination de la loi.
A- Les meubles par nature
Il s’agit des objets mobiles ou qui peuvent être déplacés, mais qui ne sont
pas liés à un immeuble, comme les animaux, les récoltes coupées, les véhicules,
etc.
Le critère adopté pour leur détermination est l’absence de fixité.
B- Les meubles par anticipation
Considérée comme une pure fiction juridique, cette catégorie comprend
les biens immobiliers destinés à devenir meuble du fait qu’ils vont être séparés
de l’immeuble auquel ils sont attachés.
A titre d’exemple, les différents matériaux d’un bâtiment qui sera démoli,
les arbres qui feront l’objet d’une coupe, les matériaux à extraire d’une carrière.
C- Les meubles par détermination de la loi
L’article 592 du code civil français réunit dans cette catégorie tous les
droits qui portent sur les meubles. Il s’agit à titre d’exemple créances et des
actions de sociétés ainsi que tous les droits de propriété intellectuelle, le fonds
de commerce et tous les droits réels relatifs aux meubles.

38
Il s’agit comme le précise l’article 8 du code foncier : de la propriété et l’usufruit des biens
immeubles, des habous, des droits d’usage et d’habitation ; de l’emphytéose, du droit de superficie,
de l’antichrèse, des droits coutumiers musulmans, tel que : Gza, istidjar, guelza, zina, houa.
67
68

Vous aimerez peut-être aussi

pFad - Phonifier reborn

Pfad - The Proxy pFad of © 2024 Garber Painting. All rights reserved.

Note: This service is not intended for secure transactions such as banking, social media, email, or purchasing. Use at your own risk. We assume no liability whatsoever for broken pages.


Alternative Proxies:

Alternative Proxy

pFad Proxy

pFad v3 Proxy

pFad v4 Proxy