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Utilisation des fumures organique

et minerale sur cultures


maraîchères en Cote d’Ivoire

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Utilisation des fumures organique et


minerale sur cultures maraîchères en
Cote d’Ivoire

Fondio LASSINA, Institut des Savanes (IDESSA), Bouaké, Côte d’Ivoire


Christophe KOUAME, Institut des Savanes (IDESSA), Bouaké, Côte d’Ivoire
Placide N’GUESSAN, Institut des Savanes (IDESSA), Bouaké, Côte d’Ivoire
Amalaman ADOU, Institut des Savanes (IDESSA), Bouaké, Côte d’Ivoire

RESUME
La mise à la disposition des maraîchers ivoiriens des techniques culturales adaptées aux
conditions locales est l’un des objectifs de la filière de l’IDESSA chargée des cultures
maraîchères. Afin de mieux apprécier les techniques actuelles de fertilisation de ces
cultures, une enquête a été effectuée par cette filière, en mai 1993, dans le domaine
maraîcher ivoirien.
Il en ressort, que l’engrais NPK (10-18-18), le fumier (constitué de déchets
d’animaux: volaille et bovin) et l’urée sont les principales fumures utilisées dans la
fertilisation des cultures maraîchères. Sur le plan national, on a noté que 67 % des
paysans emploieraient l’engrais NPK, 69 % l’urée et 44 % le fumier. Par contre,
16 % resteraient en marge de l’utilisation de la fertilisation. Par rapport aux méthodes
d’application des engrais, on a noté que 65 % des paysans du Nord préféreraient
employer l’engrais NPK comme fumure de fond, le fumier après la levée et l’urée au
stade de la floraison. On a aussi noté une utilisation plus généralisée des fumures, par les
paysans des zones de savanes que par ceux des zones de forêts. Les légumes recensés, au
cours de l’enquête, ont été classés en deux catégories: les légumes locaux et les légumes
de type européen. Selon ces catégories, les méthodes de fertilisation différaient d’une
région à l’autre. De la zone côtière (Abidjan et sa région) à la zone de savane (Korhogo
et Ferkessédougou), en passant par celle des forêts, les légumes locaux feraient de moins
en moins l’objet de fertilisation. Les fumures seraient alors prioritai­rement destinées aux
légumes de type européen.
Pour expliquer ces disparités régionales, nous avons évoqué, par rapport à
l’utilisation généralisée de la fertilisation dans le Nord, l’accès facile à l’engrais par
les paysans de cette région, grâce à la Compagnie Ivoirienne du Développement des
Textiles (CIDT).
La domination des légumes de type européen, dans les cultures maraîchères en zones
de savanes, par rapport aux légumes locaux, serait liée à l’action de l’ancienne Société de
Développement pour la Production des Fruits et Légumes (SODEFEL) qui a introduit
de nouvelles variétés de plantes légumières en Côte d’Ivoire, et particulièrement, dans
le Nord.

INTRODUCTION
Consciente de la nécessité d’une maîtrise des techniques de fertilisation pour la
production des cultures maraîchères, une équipe de l’IDESSA a effectué en mai 1993
une enquête auprès des producteurs. Il s’agissait d’apprécier le degré d’utilisation des
engrais dans le domaine maraîcher de Côte d’Ivoire, à travers la détermination des
principaux fertilisants, leur mode d’emploi et les plantes qui font prioritairement l’objet
de fertilisation.

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METHODOLOGIE DE L’ENQUETE
Sites de l’enquête
Cinq régions du pays ont été concernées par cette enquête (carte ci-dessous):
• la zone côtière: Abidjan, Bingerville, Agboville, Jacqueville, Dabou et Tiassalé
• la zone forestière de Divo: Divo et Hiré;
• le Centre-Ouest (zone de forêt): Daloa et Gagnoa;
• le Centre (zone de transition entre la savane et la forêt): Bouaké et Tiébissou;
• la zone de savane: Korhogo, Sinématiali, Ferkessédougou

Les paysans enquêtés étaient composés de 86  % d’hommes et 14  % de femmes


répartis en 83 % de professionnels et 17 % d’occa­sionnels. Au total 100 personnes ont
été interviewées.

Figure - Carte de localisation des sites de l’enquête

Enquête
L’équipe d’enquêteurs était composée de chercheurs et de techniciens supérieurs
de recherche. Le questionnaire, de type préétabli, était constitué par des fiches
individuelles. L’enquêteur remplissait celles-ci au fil des réponses de l’enquête.

DEPOUILLEMENT ET ANALYSE DES RESULTATS


Dépouillement
Pour faciliter l’interprétation des résultats, nous avons situé nos analyses à deux
niveaux: national et régional. Tous les sites d’enquête ont été regroupés dans les cinq
régions précisées. Ce regroupement permet de donner une interprétation globale à
chaque ensemble. En plus, cette procédure permet de suivre l’évolution de l’utilisation
de la fumure depuis les zones côtières, en passant par les zones de forêts (Divo, Daloa
et Gagnoa) et la savane du Centre (Bouaké) pour arriver à celles des savanes du Nord
(Korhogo, Sinématiali et Ferkessédougou).

Analyse des résultats


L’analyse des résultats sera articulée autour de deux points:
• les différents types de fumures,
• les plantes, objet de la fertilisation.

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Utilisation des fumures organique et minerale sur cultures maraîchères en Cote d’Ivoire

Différents types de fumure utilisés dans les cultures maraîchères en Côte d’Ivoire.
En fonction des différents types de fumure recensés au cours de l’enquête, nous avons
réparti les paysans en quatre groupes (figure 1).

Figure 1 - Répartition des paysans en fonction des types de


fumure

A l’examen de cette figure, il ressort que l’engrais NPK, le fumier et l’urée sont les
principaux types de fumure rencontrés chez les maraîchers ivoiriens. Selon l’enquête
67  % de ceux-ci utilisent l’engrais NPK, 69  % l’urée et 44  % le fumier. Par contre,
16 % des maraîchers ne font usage d’aucun fertilisant.
En outre, on a remarqué que l’utilisation de ces fumures étaient différentes d’un
paysan à l’autre. Un même paysan pouvait utiliser soit un seul type, soit deux ou soit
les trois et en autant d’applications. Pour rendre compte de cette situation sur le plan
national, la figure 2 représente la répartition des paysans interrogés en fonction du
mode d’emploi des fumures.
Sur le plan national, on note à l’examen de cette figure 2, que les paysans emploient
différemment les trois types de fumure. L’utilisation d’un seul type, en une application
unique est rarement pratiquée par les paysans. Par contre, la majorité des maraîchers
préfère employer deux ou trois types de fumure à deux ou trois stades phénologiques
différents des plantes. On a ainsi obtenu que 28 % des maraîchers interviewés épandent
d’abord l’engrais NPK comme fumure de fond, ensuite l’urée au stade de la floraison
des plantes; 31 % épandent en fumure de fond NPK, après la levée, le fumier, et, au
stade de la floraison, l’urée. L’effet positif de ce fractionnement de la fumure sur le
dévelop­pement des plants de gombo a été démontré par Sutton (1964).

Figure 2 - Répartition des paysans selon l’utilisation


des fumures

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Dans l’ensemble, ces différentes proportions (28 et 31 %) demeurent encore faibles,


sur le plan national. Quant aux 16 % des paysans, qui seraient en marge de l’utilisation
de la fumure, une attention particulière doit leur être accordée.
Cependant, cette analyse globale de la situation, ne rend pas compte des disparités
régionales qui existent dans l’usage des engrais. Chaque région a ses problèmes
spécifiques surtout dans l’acquisition des intrants agricoles. Pour en tenir compte, nous
avons procédé à une analyse par région de culture.

Etude de la fertilisation selon les régions


L’enquête a montré qu’il existe une différence entre les zones de productions
maraîchères vis-à-vis de l’emploi des fumures (figure 3). A l’examen de cette figure,
deux remarques s’imposent.
D’abord, par rapport aux types de fumure, on note une grande utilisation de l’engrais
NPK et de l’urée. Le fumier a un faible niveau d’utilisation. Ensuite, par rapport aux
régions, on note une augmentation du nombre de paysans employant l’engrais NPK
et l’urée, quand on passe des zones côtières à celles des savanes. Le nombre de paysans
utilisant un fertilisant est plus élevé dans le Nord que partout ailleurs.

Figure 3 - Utilisation des différents types de fumure selon


les régions

Le faible niveau de valorisation du fumier est très marqué dans la région du Centre
(Bouaké, Tiébissou) où, seulement 9 % des paysans utilisent ce type de fumure.
Par contre la région Nord du pays a un niveau élevé d’utilisation des fumures. La
répartition des paysans par région, en fonction des différents modes d’emploi des
fumures, est représentée par la figure 4. Cette distorsion entre les zones forestières et
savanicoles pourrait s’expliquer par l’élevage qui se pratique dans la savane.
La figure 4 montre que dans l’ensemble le niveau d’utilisation d’un seul type
de fumure, en une seule application, est faible. Toutefois, dans les régions de Divo
et de Bouaké, on dénombre respectivement 22 et 18 % des maraîchers employant
uniquement l’engrais NPK comme fumure de fond.
La majorité des paysans préfère faire usage de deux ou trois types de fumure
en des périodes différentes. Ainsi, dans la région d’Abidjan, 20  % des maraîchers
épandent d’abord comme engrais de fond NPK et l’urée au stade de la floraison. Ce
même mode d’emploi se retrouve dans les régions de Divo, de Daloa, de Bouaké et de
Korhogo, respectivement chez 33, 23, 59 et 30 % de maraîchers. On remarque ici que
la majorité des paysans de Bouaké utilise cette méthode. A côté de ces paysans, il en
existe d’autres qui emploient l’engrais NPK, comme fumure de fond, le fumier après

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Utilisation des fumures organique et minerale sur cultures maraîchères en Cote d’Ivoire

Figure 4 - Mode d’emploi des fumures selon les régions

la germination et l’urée au stade de la floraison. Les pourcentages de paysans optant


pour cette méthode sont pour les régions d’Abidjan, de Divo, de Daloa, de Bouaké
et de Korhogo respectivement, 28, 22, 31, 0 et 65 %. Cette méthode qui semble la
meilleure serait pratiquée par la majorité des paysans du Nord (Korhogo, Sinématiali
et Ferkessédougou). Cette situation résulterait des recommandations de la SODEFEL
(1968, 1970 et 1975). Cela dénote une relative maîtrise de la fertilisation des paysans de
cette région.
Le pourcentage de maraîchers n’utilisant aucune fertilisation, varie d’une région à
l’autre. Il est de 20 % à Abidjan, 22 % à Divo, 23 % à Daloa, 9 % à Bouaké et 0 % à
Korhogo. On note qu’il serait plus élevé dans les zones de forêts que dans celles des
savanes. Cette disparité entre les régions pourrait s’expliquer par le fait que, depuis
deux à trois décennies, la SODEFEL est installée dans cette région des savanes. Elle a
élaboré des techniques culturales qui sont rentrées dans l’habitude des paysans, qu’ils
soient profes­sionnels ou occasionnels (SODEFEL, 1975). En plus de cette action de
la SODEFEL, on pourrait ajouter la facilité d’accès des paysans à l’engrais NPK par
le biais de la Compagnie Ivoirienne pour le Développement des Textiles (CIDT). En
effet, cette société de dévelop­pement qui encadre la production cotonnière dans le
Nord du pays, accorde des facilités de paiement des engrais aux paysans, et cela depuis
de nombreuses années.
Un autre aspect assez important de cette enquête est de savoir les types de légumes
qui font ou non objet de la fertilisation.

Utilisation de la fertilisation selon les types de légumes


Les plantes recensées au cours de l’enquête peuvent être classées en deux catégories: les
légumes locaux et les légumes de type européen. Dans la première catégorie, on classe
le gombo, le piment, l’aubergine, les tomates locales... Les légumes de type européen
comprennent la laitue, la carotte, le chou, le concombre, le melon, le poivron, la
courgette...
Pour apprécier le degré de fertilisation de ces deux catégories de légumes, selon les
régions, on a déterminé des classes de légumes qui sont traités à l’engrais NPK, au
fumier et à l’urée. On a aussi déterminé la classe de ceux qui ne font l’objet d’aucune
fertilisation.
Dans chaque classe, les pourcentages des légumes locaux et de celui des légumes de
type européen ont été calculés. Les figures 5, 6, 7 et 8 présentent les résultats.

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Figure 5 - Répartition des légumes «traités» avec NPK

La figure 5 (plantes faisant l’objet d’un traitement à l’engrais NPK) montre


que le pourcentage des légumes locaux diminue de la zone côtière (Abidjan et sa
région) en passant par la zone forestière (Divo, Daloa et Gagnoa) à celle des savanes
(Ferkessédougou, Sinématiali et Korhogo).
A Abidjan et à Divo, on note que le pourcentage des légumes locaux fertilisés est
plus élevé que celui des légumes de type européen. Par contre, de Daloa à Korhogo en
passant par Bouaké, l’engrais NPK serait prioritairement destiné aux légumes de type
européen.
La figure 6 représentant le pourcentage des plantes «traitées» à la fumure organique,
montre qu’à Divo comme à Bouaké, seuls les légumes de type européen en bénéficient.
A Abidjan et à Korhogo, la proportion des légumes locaux fertilisés de cette façon est
plus faible que celle des légumes de type européen. Dans l’ensemble, on peut dire que
le fumier est surtout utilisé pour la fertilisation des légumes de type européen.

Figure 6 - Répartition des légumes «traités» au fumier

En ce qui concerne l’urée (figure 7), on note une diminution de la proportion


d’utilisation sur les légumes locaux du Sud au Nord. Ici encore, l’urée est utilisée pour
fertiliser prioritairement les légumes de type européen.

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Utilisation des fumures organique et minerale sur cultures maraîchères en Cote d’Ivoire

Figure 7 - Répartition des légumes «traités» à l’urée

Figure 8 - Répartition des légumes sans fumure

Au total, l’examen des figures 5, 6 et 7 fait état, en matière de fertilisation, de


l’impor­tance que les paysans du Sud au Nord du pays, accordent aux légumes de type
européen. Cette situation pourrait s’expliquer par le fait que traditionnel­lement, les
paysans n’apportent aucune fumure aux légumes locaux. Par contre, les légumes de
type européen ont été introduits parfois accompagnés de fiches techniques précisant
les techniques culturales à pratiquer pour améli­orer leur rendement, selon Siemonsma
(1982).
La figure 8 qui représente les pourcentages des plantes ne faisant l’objet d’aucune
fertilisation, montre également qu’au fur et à mesure que l’on quitte le Sud vers le
Nord, la proportion des légumes locaux non fertilisés diminue au profit des légumes
de type européen. Ainsi à Abidjan, le pourcentage des légumes locaux non fertilisés
est plus important que celui des légumes de type européen. Par contre à Korhogo,
on observe le contraire. On pourrait expliquer ce résultat par l’écart entre le nombre
de légumes locaux et de légumes de type européen cultivés dans les régions. En effet,
à Abidjan, 55 % des plantes cultivées seraient des légumes locaux contre 45 % de
légumes de type européen. A Korhogo, on a 31 % de légumes locaux contre 69. Dans
le Nord, ce sont les légumes de type européen qui seraient majoritairement cultivés. A
ce sujet, on pourrait aussi évoquer l’action de la SODEFEL.

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CONCLUSION
Cette enquête sur le secteur maraîcher ivoirien a montré qu’au niveau de la fertilisation,
les fumures utilisées sont principalement l’engrais NPK, le fumier et l’urée. A ce
niveau, on a noté une grande utilisation des engrais minéraux (NPK et urée) par
rapport à la fumure organique. Au niveau régional, les paysans des zones de savanes
semblent avoir une tradition des cultures maraîchères plus poussée que ceux des zones
côtières et forestières. Cela s’observe surtout au niveau de l’utilisation généralisée
des différents engrais dans le Nord et de la nature des légumes. Les paysans du Nord
s’adonneraient plus aux légumes de type européen qu’aux légumes locaux. Le faible
niveau d’utilisation de la fumure organique pourrait être lié à la non-pratique des
techniques de compostage.

Bibliographie
SIEMONSMA J.S., 1982. La culture du gombo (Abelmoschus spp). Légume-fruit tropical,
avec référence spéciale à la Côte d’Ivoire. Thèse, Université Agrono­mique de Wageningen,
Pays-Bas, 297 p.
SODEFEL, 1968. Rapport annuel 1968. Centre horticole de Bouaké, Sodefel, Côte d’Ivoire
SODEFEL, 1970. Rapport annuel 1970. Centre horticole de Bouaké, Sodefel, Côte d’Ivoire
SODEFEL, 1975. La culture de l’aubergine locale et du gombo. Fiche technique, Sodefel,
Ministère de l’Agriculture, Côte d’Ivoire.
SUTTON P., 1964. The response of okra to nitrogen, phophorus and potassium fertilisation.
Proct. Fla. Hort. Soc. (1963) p. 76, 149-153.

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