Le Contrat de Société
Le Contrat de Société
Le Contrat de Société
3ème année
Décembre 2008
Florence G’Sell-Macrez
Maître de conférences – Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Sommaire
Introduction......................................................................................... 3
Chapitre 1 – Les conditions spécifiques au contrat de société.............. 4
Section 1 – Les apports ...................................................................................4
§1. L'exigence d'apports ...............................................................................4
§2. Typologie des apports .............................................................................5
A. L'apport en numéraire ....................................................................................................5
B. L'apport en nature .........................................................................................................6
C. L'apport en industrie ......................................................................................................7
Section 2 – L'intention de participer au résultat. ..............................................8
§1. La vocation aux bénéfices et aux économies ....................................................................9
§2. La contribution aux pertes.............................................................................................9
Section 3 – L'affectio societatis .................................................................... 15
Chapitre 2 – Les conditions générales du contrat de société .............. 17
Section 1 – Les accords préalables à la conclusion du contrat de société .............. 17
§1. Le projet de société .............................................................................. 17
§2. La promesse de société ......................................................................... 17
§3. La pratique de la société d'étude ............................................................ 19
Section 2 – Les conditions résultant du droit commun des contrats ..................... 19
§1. Consentement des associés ................................................................... 19
§2. Capacité des associés ........................................................................... 20
§3. Objet .................................................................................................. 21
§4. Cause licite.......................................................................................... 21
Chapitre 3 - Les nullités de sociétés ................................................... 23
Section 1 - Les causes de nullité ..................................................................... 23
§1. La nullité fondée sur les règles spéciales du contrat de société ................... 24
§2. La nullité fondée sur le droit commun des contrats ................................... 27
Section 2 - L'action en nullité ......................................................................... 28
§1. Les règles de prescription ...................................................................... 29
§2. La régularisation de la société ................................................................ 30
Section 3 - Les effets de la nullité ................................................................... 30
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Introduction
Il reste que ces textes sont des textes spéciaux et qu'une manifestation de
volonté, fût-elle unilatérale, est toujours nécessaire pour aboutir à la création
d'une société. D'ailleurs, à défaut de texte autorisant la constitution d'une société
unipersonnelle, la rencontre des volontés de plusieurs personnes est
indispensable pour former une société. Certes, nous avons vu que le juge peut
être amené à qualifier une situation de société créée de fait alors que les parties
n'ont pas manifesté expressément la volonté de contracter. Mais dans cette
hypothèse l'accord des parties est indiscutable : le juge ne fait que le constater.
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L'apport est un élément essentiel de la société. L'art. 1832 du Code civil en fait
une des conditions de formation de la société. Selon la formule retenue par la
doctrine : « pas d'apport, pas de société ». En effet, en l'absence d'apport, la
société est nulle.
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montant du capital social. Si la société subit des pertes qui font baisser son actif
excessivement par rapport au montant du capital social, elle doit soit
reconstituer son actif, soit modifier ses statuts pour abaisser le montant de son
capital social.
Le capital social permet également de déterminer la répartition du pouvoir au
sein de la société, puisque le capital est divisé en parts ou en actions, qui
confèrent des droits à leur détenteur. Or les droits des associés dans le capital
sont proportionnels à leurs apports, aux termes de l'art. 1843-2 du Code civil.
En général, les biens apportés à la société font réellement l'objet d'une cession
en pleine propriété. L'apport en numéraire entraîne le versement d'une somme
d'argent acquise à la société. De même, l'apport d'un bien en nature implique
que la société devient propriétaire du bien apporté, sans obligation de restitution.
Il arrive toutefois que l'apport se fasse en jouissance, auquel cas la société doit
restituer le bien à l'issue du contrat : seule la valeur de la mise à disposition du
bien est prise en considération dans le capital social.
Il existe trois types d'apport, en fonction de la nature des droits apportés. Cette
typologie résulte de l'art. 1843-3 al. 1er du Code civil. L'apport peut être en
numéraire (A), en nature (B) ou en industrie (C).
A. L'apport en numéraire
L'apport peut avant tout être en numéraire, c'est-à-dire porter sur une somme
d'argent. Ce type d'apport est simple à réaliser, et ne pose aucun problème
d'évaluation.
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reprendre les sommes versées qu'à la dissolution de la société, que cette reprise
doit tenir compte des pertes, et que pendant la vie de la société, la rémunération
des sommes doit prendre la forme d'un dividende, donc varier en fonction du
bénéfice réalisé par la société. En revanche, si la qualification de prêt est
retenue, cela implique que la reprise des sommes pourra se faire avant la
dissolution de la société, sans imputation des pertes, et que la rémunération des
sommes est indépendante du bénéfice réalisé par la société, puisqu'il s'agira
alors de l'intérêt rémunérant un prêt.
La Cour de cassation a tranché en faveur de la qualification de prêt par un arrêt
de la Chambre commerciale en date du 24 juin 1997, dit arrêt Gamm qui a
insisté sur le droit de remboursement permanent de l'associé ayant consenti une
telle avance (Cass. com. 24 juin 1997, Bull. Joly 1997, p. 871 §314 note B.
Saintourens ; Dr. sociétés, 1997, n°138, obs. Th. Bonneau ; JCP G 1997, II,
22966, note P. Mousseron).
B. L'apport en nature
L'apport peut également porter, notamment dans les petites sociétés, sur un
bien autre que du numéraire : un brevet, un véhicule, des actions d'une autre
société, etc. On parle dans cette hypothèse d'apport en nature.
Types d'apports en nature. Parmi les apports en nature, il faut distinguer les
apports en propriété et les apports en jouissance, conformément à l'art. 1843-3
du Code civil.
• L'apport en propriété transfère à la société la propriété du bien, ce qui lui
permet donc d'en disposer en cours de vie sociale. Il se rapproche du
contrat de vente quant à la garantie due par l'apporteur. L'article 1843-3
dispose en effet que « l'apporteur est garant envers la société comme un
vendeur envers son acheteur », ce qui recouvre la garantie d'éviction et la
garantie des vices cachés.
• L'apport en jouissance, moins pratiqué, transfère quant à lui la seule
jouissance du bien à la société. Il est donc plus proche du bail que de la
vente. L'article 1843-3 C. civ. dispose ainsi que l'apporteur en jouissance
est « garant envers la société comme un bailleur envers son preneur ». La
société ne peut disposer du bien, en le vendant par exemple, puisqu'elle
n'en a pas reçu la propriété, sauf si ce sont des choses de genre, nous dit
l'art. 1843-2. En ce cas, l'opération d'apport a pour effet de transférer la
propriété des biens à la société, à charge pour celle-ci de rendre des
choses équivalentes à l'apporteur lors de la dissolution. Dans la pratique,
les apports en jouissance sont rares.
•
Evaluation de l'apport en nature. Le problème que pose l'apport en nature est
celui de son évaluation.
L'apporteur est en effet naturellement tenté de surévaluer son apport. Cela est
dangereux, car ce comportement fausse les rapports entre associés, ainsi que
l'image de la société auprès des tiers.
Imaginons une société créée avec deux associés, qui apportent 100.000 euros
chacun dans la société. Si un troisième associé apporte un brevet dont la valeur
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réelle est de 100.000 euros également, le capital social sera de 300.000 euros.
S'il est divisé en parts de 1.000 euros, chacun des associés aura droit à 100
parts sociales. Cela veut dire que ce troisième associé n'aura pas la majorité aux
assemblées de la société.
Mais s'il surévalue son apport, et fait accepter à ses coassociés son brevet
comme ayant une valeur de 300.000 euros, la situation change.
D'une part, la société a désormais un capital social de 500.000 euros. Cette
situation ne correspond pas à la réalité, et elle est de ce fait dangereuse pour les
tiers, car ils croient que la société est détentrice de biens pour une valeur qui ne
correspond pas à ce qu'ils obtiendront en réalité s'ils font saisir et vendre les
biens de la société. L'image qu'ont les tiers de la société est donc faussée.
D'autre part, les rapports entre associés se trouvent modifiés. En effet, en tant
qu'associé, ce n'est plus 100 parts de 1.000 euros qui lui seront attribuées, mais
300, ce qui lui donnera la majorité lors des assemblées.
Il est donc important, pour que ni les tiers ni les associés ne soient trompés, que
l'on fasse évaluer correctement le bien apporté.
La loi impose de ce fait dans certaines sociétés une procédure d'évaluation des
apports par un expert, dit commissaire aux apports. Cette procédure n'est
cependant imposée que dans les sociétés à responsabilité limitée, car dans les
sociétés à responsabilité illimitée, la protection des tiers est assurée par la
possibilité de poursuivre les associés sur leurs biens propres.
L'évaluation des apports en nature se fait par l'intervention d'un commissaire aux
apports, qui est choisi sur la liste des commissaires aux comptes ou des experts
auprès des tribunaux.
Par exemple, l'art. L. 223-9 du Code de commerce réglemente l'intervention du
commissaire aux apports dans les SARL. Dans le cadre de cette procédure, les
associés ne sont pas tenus de respecter l'évaluation proposée par le commissaire
aux comptes. En ce cas, ils sont tenus de garantir la valeur des apports. Cela
signifie que si un créancier saisit le bien et ne peut le faire vendre pour une
valeur équivalente à celle qui avait été retenue lors de la réalisation de l'apport,
les associés de la SARL sont solidairement tenus de verser au créancier une
somme équivalant à la différence entre la valeur annoncée et la valeur réelle du
bien.
Par ailleurs, il existe un délit de majoration frauduleuse d'apport en nature, qui
prévoit des sanctions pénales punissant la surévaluation des apports.
C. L'apport en industrie
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En fait, l'apport en industrie confère à l'apporteur ce que l'on appelle des parts
d'industrie, qui sont des parts sociales particulières obéissant à des règles
spécifiques. D'abord, la part de bénéfices réservée à l'apporteur en industrie est
égale à celle de l'associé ayant le moins apporté (art. 1844-1 C. civ.). Ensuite,
les droits de l'apporteur en industrie sont incessibles. Enfin, l'associé ayant
procédé à un apport en industrie doit rendre compte à la société de tous les
gains réalisés dans le cadre de l'activité faisant l'objet de l'apport (art. 1843-3,
al. 6 C. civ.). En effet, l'apporteur n'a pas à assurer l'exclusivité de son activité à
la société, mais il doit lui verser, par application de l'art. 1843-3 du Code civil,
tous les gains qu'il a réalisés par l'activité faisant l'objet de son apport.
Cela étant précisé, les parts d'industrie confèrent tout de même le droit de vote
et le droit aux bénéfices.
Ce type d'apport n'est pas admis dans toutes les sociétés. Il est ainsi interdit
dans les sociétés anonymes, et n'est autorisé dans les SARL que dans les
conditions prévues par les statuts (art. L. 223-7, modifié par la loi sur les
nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001). En revanche, l'apport en
industrie se conçoit très bien dans les sociétés de personnes, en particulier les
sociétés civiles professionnelles du secteur libéral.
Nous verrons donc successivement les deux aspects évoqués : la vocation aux
bénéfices et aux économies (§1) et la contribution aux pertes (§2).
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En général, les statuts prévoient que la répartition des bénéfices et des pertes se
fera proportionnellement aux apports. Cette solution prévaut en cas de silence
des statuts (article 1844-1 C. civ.).
Il est toutefois toujours possible de prévoir une répartition différente, et non
proportionnelle aux apports.
La seule limite à cette possibilité de répartition inégalitaire relève de la
prohibition des clauses dites « léonines ». Il est en effet interdit à un associé de
se « tailler la part du lion ». Aux termes de l'article 1844-1 C. civ. « la stipulation
attribuant à un associé la totalité du profit procuré par la société ou l'exonérant
de la totalité des pertes, celle excluant un associé totalement du profit ou
mettant à sa charge la totalité des pertes sont réputées non écrites ». Ainsi, la
clause par laquelle un associé renoncerait par avance à percevoir des dividendes
serait réputée non écrite, ce qui signifie qu'elle ne produirait aucun effet.
L'article 1832 du Code civil prévoit que « les associés s'engagent à contribuer
aux pertes ». La chose est moins simple qu'à propos des bénéfices. En effet,
alors que les bénéfices peuvent être distribués aux associés au moyen de
dividendes, les pertes ne sont pas automatiquement réparties entre les associés.
Elles sont inscrites au bilan de la société et viennent diminuer les capitaux
propres, mais le patrimoine des associés n'est pas directement atteint.
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Enfin, il faut souligner que l'article 1844-1 C. civ. répute non écrite toute clause
léonine qui aurait pour effet d'exonérer un associé des pertes ou de faire peser
sur l'un d'entre eux la totalité des ces pertes.
Cette règle a posé des difficultés en présence d'opérations impliquant des
promesses de rachat des droits sociaux à des prix fixé à l'avance.
Supposons qu'un associé a fait un apport de 10.000 euros, et reçu des actions en
conséquence. Dans le même temps, cet associé s'est fait promettre par un autre
associé le rachat de ses droits sociaux dans la société. Cette promesse comporte
d'ores et déjà un prix fixe, ou prévoit un prix minimum : par exemple, elle
prévoit que les titres seront rachetés 10.000 euros. Supposons alors que la
société a subi des pertes, l'associé qui a apporté 10.000 euros ne pourra
reprendre qu'une somme d'un montant diminué de sa contribution aux pertes,
par exemple 5.000 euros. Pourtant, cet associé aura, grâce à la promesse,
l'assurance de pouvoir vendre ses titres 10.000 euros alors qu'ils n'en valent plus
que 5.000. Cela signifie donc que la promesse confère au bénéficiaire une porte
de sortie de la société, qu'elle lui assure qu'il n'aura pas à supporter la baisse de
valeur éventuelle de ses titres. Cette promesse déroge donc au principe selon
lequel l'associé contribue aux pertes.
Une telle promesse de rachat des titres à prix fixe ou à prix minimum pourrait
être considérée comme léonine et donc réputée non écrite.
Il faut souligner ici que cette difficulté ne se présente qu'en présence d'une
promesse conclue entre associés. Si une telle promesse de rachat était souscrite
par un tiers, cela ne poserait aucun problème au regard de la prohibition des
clauses léonines. Cela reviendrait, en effet, à faire peser sur le tiers le poids de la
perte. Or il est tout à fait possible à un associé de demander à un tiers de lui
garantir la valeur des apports faits à la société. En revanche, si un associé
promet à un autre de lui racheter ses titres, il prend à sa charge la perte
correspondante, en plus de celle relative à son propre apport. Cela signifie qu'un
associé ne subit aucune perte, tandis qu'un autre associé en subit le double.
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C'est l'importante affaire Bowater (Cass. com. 20 mai 1986, Rev. Sociétés 1986,
p. 587 note Randoux) qui illustre la jurisprudence de la Cour de cassation.
Dans cette affaire, une cession de contrôle d'environ 2/3 des actions d'une
société anonyme avait eu lieu. Au jour même de la cession de contrôle avait été
conclue une promesse synallagmatique de vente portant sur le 1/3 restant des
actions de la société. Cette promesse prévoyait un délai d'option et fixait un prix
plancher ainsi qu'un prix plafond. Il s'agissait, pour le cédant de s'assurer un prix
minimum auquel interviendrait la cession à venir, et, pour le cessionnaire, de se
garantir un prix maximum de manière à limiter le coût de l'opération. Par la
suite, la société Bowater, devenue bénéficiaire de la promesse de vente, invoqua
la nullité de la clause de prix plancher au motif de sa contrariété à l'article 1844-
1 du Code civil prohibant les clauses léonines.
Cet argument était de poids. Il était arrivé, antérieurement à l'affaire Bowater,
que les tribunaux condamnent les promesses d'achat assorties d'un prix
plancher, en estimant qu'elles revenaient à exonérer le cédant de toute
contribution aux pertes intervenues entre la date de la promesse et celle de la
cession.
Il reste que la Cour de cassation a refusé, ici, de faire application de l'article
1844-1 du Code civil quant à la prohibition des clauses léonines. A ses yeux
l'article 1844-1 C. civ. prohibe seulement la clause qui porte atteinte au pacte
social, notamment en affranchissant un associé de toute contribution aux pertes.
Or une telle disposition, dit la Cour, n'est pas applicable à une convention dont
l'obligation n'est autre que d'assurer, moyennant un prix librement convenu, la
transmission de droits sociaux. Autrement dit, la prohibition des clauses léonines
ne s'applique qu'au seul contrat de société.
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 4 juillet 1985)
que, par acte du 20 avril 1973, M. du Vivier, en son nom personnel comme au
nom d'autres actionnaires, a cédé à la société Iéna Industrie, filiale de la Bowater
Corporation Limited (société Bowater) plus des deux tiers des actions de la
société anonyme A.de LuzFils (société Luzentre les mêmes parties des promesses
réciproques d'achat et de vente qui prévoyaient un minimum et un maximum au
prix qui devait être fixé, déterminaient un délai d'option situé en 1977 et
portaient sur un nombre d'actions tel que l'ensemble des actes visait la totalité
du capital de la société Luzaction) ; que M. du Vivier ayant déchargé la société
Iéna Industrie de ses obligations, la société Bowater a, par lettre du 11
novembre 1975, souscrit une promesse d'achat qui, prévoyant un délai d'option
en 1982, précisait que le prix serait déterminé d'un commun accord par
référence “ à la valeur nette d'actif tangible et corporel “ de la société Luzsinon à
dire d'expert, le prix ne pouvant être inférieur à une somme fixée à 5 millions de
francs ; que la société Bowater devint, courant 1976, associée de la société
LuzM. du Vivier, pour avoir paiement du prix minimum prévu, introduisit une
demande à laquelle la société Bowater résista en soutenant que la clause
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prévoyant un tel prix était nulle comme contrevenant à l'article 1844-1 du Code
civil ;
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt d'avoir, pour condamner la société Bowater au
paiement réclamé, écarté cette prétention aux motifs que la promesse en cause
n'était utilement critiquée, ni dans son objet, dès lors qu'elle était intervenue à
des conditions plus favorables que celles prévues par les promesses d'achat
souscrites par la société Iéna Industrie, ni dans son résultat, dès lors que la
société Bowater n'avait fourni aucun élément sur la valeur des actions, en termes
réels, au jour de la promesse, et n'avait pas permis ainsi de déterminer si la
fixation d'un prix minimum avait eu pour effet d'exonérer M. du Vivier et les
actionnaires par lui représentés de la totalité des pertes sociales, alors, selon le
pourvoi, d'une part, que se trouve atteinte de nullité toute convention ayant pour
but d'affranchir un associé des pertes de la société pour les faire supporter à
d'autres associés ; qu'il s'ensuit que la Cour d'appel ne pouvait, au motif que les
conditions de prix et de délai de la seconde promesse du 11 novembre 1975
auraient été plus favorables que celles de la première, s'abstenir de vérifier si la
fixation, au jour de la promesse du 11 novembre 1975, d'un prix minimum
garanti qui devait s'appliquer, au seul gré du bénéficiaire, lors de la réalisation de
la cession des actions, plusieurs années plus tard, quelles que soient les pertes
subies par la société, n'avait pas pour objet de prémunir les actionnaires,
bénéficiaires de la promesse, contre les risques de pertes de la société, reportés
ainsi sur l'associé promettant ; que la Cour d'appel a ainsi entaché sa décision
d'un manque de base légale au regard de l'article 1844-1 du Code civil, alors
que, d'autre part, il n'avait été aucunement contesté que le prix minimum
garanti, qui avait été déterminé au jour de la conclusion de la promesse, ait
correspondu à la valeur réelle des actions au jour de la conclusion de cette
promesse ; qu'en soulevant d'office, et sans provoquer les observations des
parties, un moyen tiré de ce que la société Bowater n'apportait aucun élément
sur cette valeur, bien que si ses observations avaient été provoquées, elle eût
été à même de rapporter ces éléments, la Cour d'appel la violé l'article 16 du
Nouveau Code de procédure civile, alors que, d'autre part, dans ses conclusions
devant la Cour d'appel la société Bowater avait, comme le rappelle elle-même la
Cour d'appel invoqué des éléments démontrant la disproportion existant entre le
prix de l'action résultant du prix minimum garanti fixé au jour de la promesse
(861,30 francs l'action) et la valeur réelle de l'action à l'époque de la cession
(vente consentie à 62,07 francs l'action en 1980) ; qu'il résultait de cette
disproportion que les bénéficiaires de la promesse se trouvaient exonérés des
pertes subies par la société durant la période prévue dans la promesse ; qu'en
s'abstenant de se prononcer sur ces éléments, déterminants pour la solution du
litige, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la Cour d'appel n'avait pas à vérifier si la fixation, au jour de la
promesse, d'un prix minimum, avait pour effet de libérer le cédant de toute
contribution aux pertes sociales dès lors qu'elle constatait que la convention
litigieuse constituait une cession ; qu'en effet est prohibée par l'article 1844-1 du
Code civil la seule clause qui porte atteinte au pacte social dans les termes de
cette disposition légale ; qu'il ne pouvait en être ainsi s'agissant d'une
convention, même entre associés, dont l'objet n'était autre, sauf fraude, que
d'assurer, moyennant un prix librement convenu, la transmission de droits
sociaux, que dès lors, sans méconnaître le principe de la contradiction et sans
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Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré que, par une lettre
postérieure à la promesse d'achat litigieuse et par laquelle M. du Vivier
manifestait son accord aux modalités prévues par cette promesse, ce dernier, en
précisant que, pour la détermination du prix par référence à “ la valeur nette
d'actif tangible et corporel “ ne seraient pas prises en compte les sommes
apportées par la société Bowater à la société Luz n'avait pas entendu renoncer
au prix minimum prévu, alors, selon le pourvoi, que la renonciation peut résulter
de tout acte ou fait impliquant la volonté de renoncer ; que celle-ci se déduit de
l'incompatibilité d'un engagement nouveau avec la convention antérieure ; qu'en
l'espèce, en s'engageant, dans une lettre postérieure à la promesse, à acquérir
les actions à un prix déterminé comme si les augmentations de capital souscrites
par la société Bowater n'avaient pas eu lieu, le bénéficiaire de la promesse
reconnaissait nécessairement que les termes de la promesse et l'équilibre voulu
par celle-ci s'étaient trouvés anéantis par les augmentations de capital souscrites
uniquement par l'exposante ; qu'en se fondant sur l'absence de renonciation
expresse dans la lettre de M. B.du Vivier du 28 septembre 1976 sans vérifier si
l'engagement qu'elle comportait était compatible avec le maintien des termes de
la promesse, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale
au regard de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que c'est par voie d'interprétation nécessaire de la lettre en cause
qui prévoyait qu'elle “ amendait et modifiait en tant que de besoin les
dispositions de votre lettre du 11 novembre 1975 “ que la Cour d'appel a décidé
qu'elle n'emportait pas renonciation au prix minimum prévu par la convention ;
qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
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Il faut souligner que, bien souvent, les promesses de rachat à prix fixe se
rencontrent dans le cadre de conventions de portage qui sont fréquentes. Le
portage est la convention par laquelle une personne (dite porteur) accepte, sur
demande d'une autre personne (dite donneur d'ordre) de se rendre actionnaire
d'une société, par acquisition ou souscription de titres, étant convenu qu'après
un certain délai ces actions seront rétrocédées au donneur d'ordre ou cédées à
une personne désignée pour un prix fixé dès l'origine. Il y a donc une promesse
faite au porteur de lui racheter ses titres à un moment donné.
La convention de portage peut être motivée par un souci de discrétion : une
personne veut acquérir des titres sans le faire savoir. Elle peut également
réaliser une opération de prêt : plutôt que de prêter les sommes nécessaires à
acheter les titres, une banque achète elle-même les actions et les détient ainsi
en garantie. Elle les restitue ensuite au fur et à mesure à l'emprunteur, en
fonction de ses remboursements. En général, le porteur est rémunéré pour le
service rendu au donneur d'ordre.
Considérer que les promesses de rachat à prix fixe constituent des pactes léonins
reviendrait à condamner les conventions de portage. En effet, celui qui accepte
de porter les titres devient associé ou actionnaire, mais en réalité, il n'entend pas
vraiment courir les risques sociaux. Il réalise une forme de prêt, et il entend bien
récupérer l'intégralité des sommes prêtées, indépendamment du résultat de la
société dont il porte les titres.
Dans un tel cas de figure, que penser de la stipulation de prix plancher insérée
dans la promesse d'achat ? La Chambre commerciale de la Cour de cassation
s'est prononcée de manière favorable à la validité de la convention de portage au
regard de l'art. 1844-1, en retenant, par un arrêt du 24 mai 1994 (Bull. Joly
1994, p. 797, note P. le Cannu), que cette convention est valide lorsqu'elle
organise, sauf fraude, la rétrocession des droits sociaux « sans incidence » sur la
participation aux bénéfices et la contribution aux pertes dans les rapports
sociaux.
La question s'est reposée par la suite dans des hypothèses où le porteur des
titres était un investisseur ayant accepté de souscrire à une augmentation de
capital.
Dans un arrêt du 16 novembre 2004 (Bull. Joly. 2005, p. 270; RTD com. 2005,
p. 111, obs. C. Champaud et D. Danet , D. 2004, p. 3144), la Cour de cassation
a dû traiter de l'hypothèse d'une augmentation de capital à laquelle un
investisseur avait accepté de souscrire, à la condition que les autres associés lui
rachètent les titres émis, à l'expiration d'un certain délai, et au prix de
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Outre les trois conditions que nous venons de voir, spécifiques au contrat de
société, celui-ci doit respecter les conditions édictées par le droit commun des
contrats. Ce sont ces conditions que nous allons étudier maintenant, dans leur
application au droit des sociétés.
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
En tant que contrat, l'acte de société donne lieu à des négociations préalables à
sa conclusion (section 1). Il est, en outre, soumis aux conditions générales de
validité des contrats (section 2).
Les parties qui concluent une promesse de société n'entendent pas conclure le
contrat de société immédiatement, mais elles veulent éviter toute rétractation de
leurs partenaires.
Par la promesse, une des parties (promesse unilatérale), ou les deux (promesse
synallagmatique), donnent par avance leur consentement au contrat définitif,
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Une promesse doit en règle générale contenir tous les éléments essentiels du
futur contrat. C'est ce qu'a montré un arrêt rendu par la Chambre commerciale
de la Cour de cassation le 28 avril 1987 (Rev. sociétés, 1988, p. 59, note F.
Benac-Schmidt). Cet arrêt a approuvé les juges du fond d'avoir qualifié de
promesse de société l'acte qui prévoyait l'objet social, l'importance et la nature
des apports de chaque associé, ainsi que la forme de la société future.
D'autres éléments peuvent être, en revanche, vus comme accessoires,
notamment parce que la loi prévoit des dispositions supplétives : ce seront, par
exemple, la répartition des bénéfices et des pertes entre les associés, la durée de
la société...
Selon certains auteurs (tel F. Bénac-Schmidt), la promesse de société doit
également manifester l'affectio societatis des parties. Ce serait même le seul
élément fiable de la promesse, quitte à ce qu'il soit extériorisé par d'autres
éléments. Seule une décision, à ce jour, de la Cour de cassation a corroboré
cette position en relevant l'intention de s'associer comme élément caractéristique
de la promesse (Cass. com. 11 juin 1979, Bull. IV n° 193). Il reste que cet
élément ne saurait être suffisant.
La question se pose de savoir quel doit être le mode de preuve d'une telle
promesse de société. Certains auteurs admettent que la promesse se prouve
invariablement par tous moyens. Mais il convient en réalité de distinguer selon
que la promesse est un acte de commerce ou non et de n'appliquer la liberté de
la preuve qu'aux promesses constituant des actes de commerce et à l'égard des
commerçants (cf art. L. 110-3 C. com.).
Il a été proposé en doctrine d'opérer une distinction suivant que la société qui
fait l'objet de la promesse est civile ou commerciale. Mais si cette distinction est
sans doute valable, il faut ajouter que, dans certains cas, la promesse de société
civile sera tout de même qualifiée de commerciale. Ainsi, si des commerçants
constituent une société civile pour les besoins de leur commerce, la promesse de
société civile se trouvera être un acte de commerce, au moins à l'égard de ces
commerçants. On sait en effet que, aux termes de l'art. L. 110-1 du Code de
commerce, la loi répute actes de commerce les obligations naissant entre
commerçants. C'est la règle de la commercialité par accessoire.
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Tous les vices du consentement admis dans le droit des obligations peuvent être
relevés dans le contrat de société, même si l'on n'a jamais trouvé, en
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
On peut également envisager que le contrat de société soit annulé pour cause de
dol, c'est-à-dire de mensonges, de manœuvres ou simplement du fait de la
réticence dolosive d'un associé. Le dol devra, par application de l'art. 1116 C. civ,
émaner d'un coassocié, et avoir été déterminant du consentement de l'associé
trompé – il n'aurait pas contracté, ou pas aux mêmes conditions s'il n'avait pas
été trompé.
On peut cependant penser que le dol sera plus facilement retenu dans le contrat
de société, qui est basé sur l'affectio societatis, et donc sur la confiance, que
dans d'autres contrats où les intérêts des parties ne sont pas aussi convergents
que dans la société.
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Il est cependant à noter que l'incapacité des associés n'est cause de nullité des
SARL et des sociétés par actions que lorsqu'elle concerne tous les associés
fondateurs, par application de l'art. L. 235-1 du Code de commerce.
§3. Objet
Les obligations des parties doivent avoir un objet déterminé. Ainsi l'objet précis
de l'obligation d'apport devra-t-il être déterminé. Il faut cependant distinguer
l'objet de l'obligation des parties (qui est de faire un apport, et de partager le
bénéfice et de supporter les pertes éventuelles), l'objet du contrat de société
(constituer une société d'un type déterminé), et l'objet de la société, qui consiste
en le programme dont la société se dote dans ses statuts, c'est-à-dire les
activités qu'elle envisage de réaliser. C'est ce dernier que l'on appelle objet
social.
Comme l'objet de tout contrat, l'objet social doit être déterminé, possible, licite.
L'objet social doit être déterminé : la société ne saurait avoir un objet universel.
L'objet social doit être possible. S'il ne l'était pas ou s'il le devenait en cours de
vie sociale– par exemple parce que la société s'est donnée pour objet d'exploiter
un bien qui a été détruit, la société doit se trouver dissoute, par application de
l'art. 1844-7, 2° du Code civil.
L'objet social doit être licite, c'est-à-dire que la société ne peut se livrer à des
activités qui seraient contraires à l'ordre public et aux bonnes mœurs. En
général, le juge français va rechercher dans l'activité réelle de la société, au-delà
des termes de statuts, si l'objet est licite ou non. Cependant, un arrêt de la CJCE,
rendu le 13 novembre 1990, l'arrêt Marleasing a jugé que le contrôle de la licéité
de l'objet par le juge national devait être restreint à la lettre des statuts (revue
Sociétés, 1991, p. 532 obs. Chaput).
Enfin, le contrat de société doit avoir une cause licite, c'est-à-dire que les
mobiles des parties ne doivent pas être contraires à l'ordre public et aux bonnes
mœurs.
L'arrêt précité, Marleasing est intervenu sur ce point (revue Sociétés, 1991, p.
532 obs. Chaput). En effet, la première directive européenne du 9 mars 1968
relative aux SARL et sociétés par actions, a limité les causes de nullité de société
dans le souci de protéger les tiers. Son article 11 énonce une liste limitative de
causes de nullité de la société. S'est alors posée la question de savoir si
l'absence ou l'illicéité de la cause du contrat de société, qui n'est pas
expressément visé par l'article 11 de la Directive, pouvait permettre au juge de
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Qu'ils relèvent du droit des sociétés ou du droit commun des contrats, les
éléments du contrat de société sont essentiels à sa validité, donc à son existence
juridique. Cela signifie que l'absence d'un de ces éléments est fatale à la société
: elle est nulle.
Il reste qu'un certain nombre d'actes ont pu être conclus au nom de la société
nulle –contrats de travail, de fourniture, de vente... Autrement dit, la société
peut être nulle juridiquement tout en existant économiquement en tant
qu'entreprise.
Pour pallier les graves inconvénients qu'engendrerait un anéantissement
rétroactif de la société, le législateur a donc réduit autant que possible les cas
d'annulation.
Sont ainsi limités tant les causes de nullité (section 1) que les voies d'action
(section 2) et les effets de la nullité (section 3).
L'article 1844-10 du Code civil, qui vise l'ensemble des sociétés, prévoit que « la
nullité de la société ne peut résulter que de la violation des dispositions des
articles 1832 et 1833 ou de l'une des causes de nullité des contrats en général ».
On se souvient que les articles 1832 et 1833 C.civ. sont relatifs aux conditions du
contrat de société que nous venons d'évoquer en particulier les apports, la
vocation à contribuer aux économies et aux pertes, la licéité de l'objet, la
recherche de l'intérêt commun des associés etc.
Si l'on met de côté cette dernière règle, que nous étudierons ultérieurement, il
faut bien constater que les causes de nullité des sociétés ne sont pas à chercher
dans le Code de commerce. C'est, bien davantage, du côté du Code civil qu'il
convient de se tourner.
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Il faut en outre tenir compte du fait que, pour les SARL et les sociétés par
actions, les causes de nullité sont limitativement énumérées par l'article 11 de la
première directive européenne du 9 mars 1968.
Conformément aux articles 1832 et 1833 du Code civil, la nullité peut résulter de
diverses raisons : absence de pluralité de personnes (sauf cas d'une EURL ou
d'une SASU, société par action simplifiée unipersonnelle), apport inexistant ou
fictif, absence de participation aux résultats ou aux pertes, absence d'affectio
societatis, illicéité de l'objet ou absence d'intérêt commun des associés.
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Par ces motifs, casse [...] renvoie devant le Tribunal de grande instance de Dax.
La solution retenue dans l'arrêt Lumale a, par la suite, été confirmée (Com. 22
juin 1999, Rev. sociétés 1999.824, note A. Constantin, D. 2000.234, obs. J.-C.
Hallouin et 389, obs. S. Piedelièvre, D. affaires 1999. 1336, M. B. ; Petites
affiches, 22 juill. 1999, p. 7, P. M. ; Bull. Joly 1999. 978, A. Couret). La Cour a
cependant pris soin de réserver le cas de la fraude qui, parce qu'elle corrompt
tout, pourrait justifier une autre solution.
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
trouver qui se cachait derrière cette société fictive, qui était le véritable maître
de l'affaire. Cela revenait, en fait, à déterminer qui avait poursuivi une activité
personnelle sous couvert d'une personne morale. En l'occurrence, le juge désigna
Mme Franck comme maître de l'affaire.
En général, on estime qu'il faut rétablir la vérité en rétablissant l'unité des
patrimoines : le patrimoine de la société et celui du maître de l'affaire ne font
qu'un. Cela justifie d'étendre la procédure de liquidation judiciaire au maître de
l'affaire. Cette opération se heurtait toutefois au principe de l'arrêt Lumale, selon
lequel la fictivité est une nullité. Or, comme nous le verrons, la nullité, en droit
des sociétés, n'opère pas rétroactivement : elle entraîne simplement la
dissolution et la liquidation de la société. Mme Franck invoquait, en outre, le fait
que la fictivité n'est pas une cause de nullité au regard du droit communautaire,
en invoquant à son profit la jurisprudence Marleasing.
Pour contourner la difficulté, la Chambre commerciale a souligné qu'il ne
s'agissait pas, ici, de prononcer la nullité de la société. La constatation de la
fictivité, dit la Cour, permet simplement d'étendre la procédure à une autre
personne, dans l'intérêt des tiers. Il s'agit donc bien ici d'une application de la
théorie de l'inexistence, malgré son exclusion par la jurisprudence Lumale.
Certains auteurs parlent d'inopposabilité de la société par le défendeur en cas
d'extension d'une procédure collective.
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Z..., Mme Y... et M. Y... ont constitué, le
14 décembre 1988, la société Garaude production investissements (société GPI)
qui est devenue actionnaire de la société Z... ; que la société GPI a été mise en
redressement judiciaire le 4 novembre 1994, converti en liquidation judiciaire le
10 mars 1995, M. X... étant désigné en qualité de liquidateur ; que le liquidateur
a demandé au tribunal de constater la fictivité de la société GPI et d'étendre
notamment à M. Y... la procédure collective ouverte à l'égard de cette société ;
(...)
Attendu que M. Y... reproche encore à l'arrêt d'avoir décidé que la société GPI
était fictive et d'avoir en conséquence " ouvert " la procédure de liquidation
judiciaire de la société GPI à son égard, alors, selon le moyen, que le juge
national qui est saisi d'un litige dans une matière entrant dans le domaine
d'application de la directive n° 68/151/CEE du Conseil du 9 mars 1968 est tenu
d'interpréter son droit national à la lumière du texte et de la finalité de cette
directive en vue d'empêcher la déclaration de nullité d'une société pour une
cause autre que celles énumérées à son article 11 ; qu'il est donc interdit au juge
français de prononcer la nullité d'une société pour défaut d'affectio societatis qui
ne figure pas dans la liste des motifs qui sont limitativement énumérés à l'article
11 de ladite directive ; qu'en décidant que M. Y... ne pouvait pas se prévaloir de
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
la directive n° 38/151 devant elle, la cour d'appel a violé l'article 189, alinéa 3,
du Traité instituant les Communautés européennes ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une demande de nullité
de la société GPI, a seulement constaté la fictivité de celle-ci et décidé, dans
l'intérêt des tiers, d'étendre à M. Y... la procédure collective précédemment
ouverte ; que le moyen n'est pas fondé ;
(...)
Il faut conclure de tout cela que la sanction de la fictivité est en principe la nullité
de la société, sauf en matière de procédure collective où la fictivité justifie
l'extension de la procédure en rendant l'existence de la société inopposable.
On remarquera pour finir que la jurisprudence relative aux sociétés fictives peut
entrer en contradiction avec l'arrêt Marleasing déjà évoqué. On se souvient, en
effet, que les causes de nullité sont limitativement énumérées par l'article 11 de
la première directive de 1968 pour les SARL et les sociétés par actions. Or la
fictivité de la société ne fait pas partie des causes de l'article 11. Le juge français
a été sensible à cet aspect. La Cour d'appel de Paris a ainsi suivi l'optique
restrictive de la jurisprudence communautaire. Dans un arrêt du 21 septembre
2001, Escudié (RJDA 2002 n°641 ; Bull. Joly 2002, p. 626) elle s'est fondée sur
la directive pour juger qu'une société par action ou une SARL ne peut être
déclarée nulle pour fictivité de l'un des apports, puisque ce motif n'est pas repris
dans l'article 11.
Est nulle la société dans laquelle n'auraient pas été respectées les dispositions de
l'article 1108 du Code civil sur le consentement, la capacité, l'objet et la cause.
Deux remarques doivent être faites à cet égard.
D'abord, dans les sociétés en nom collectif et en commandite simple, la nullité
peut être prononcée pour défaut ou vice du consentement, incapacité d'un ou
plusieurs associés, illicéité ou défaut d'objet ; absence de cause ou cause illicite.
En revanche, la nullité d'une SARL ou d'une société par actions ne peut résulter
ni d'un vice du consentement, ni d'une incapacité « à moins que celle-ci
n'atteigne tous les associés fondateurs » (article L. 235-1 al. 1 C. com.). Ces
sociétés ne peuvent être annulées que pour non respect des dispositions sur la
cause ou sur l'objet. Et encore faut-il tenir compte de l'impact de la
jurisprudence Marleasing précitée : seules les causes de nullité limitativement
énumérées par l'article 11 de la première directive européenne du 9 mars 1968
peuvent être prises en compte en matière de SARL et de sociétés par actions.
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
mais on estime qu'elle constitue une cause générale de nullité des sociétés. La
nullité est généralement prononcée pour cause illicite ou immorale.
Le cas de la fraude est celui où une société est constituée pour frauder le droit
des créanciers (apports des biens dans une société), voire le droit des
successions, le droit du travail, ou le droit fiscal. Par exemple, dans une espèce
tranchée par la troisième chambre civile le 9 juillet 2003 (Cass. 3è civ. 9 juillet
2003, JCP E 2003, n°1371), un débiteur avait créé avec son fils une société civile
immobilière pour échapper au droit de poursuite de la banque qui lui avait
consenti un prêt.
En principe, la Cour de cassation décide que la fraude n'est une cause de nullité
qu'autant qu'elle est partagée par tous les associés. Mais, dans un arrêt du 7
octobre 1998 (Cass. 1re civ. 7 octobre 1998, D. 1998, p. 563, concl. J. Ste
Rose), rendu en matière de droit des obligations, la première Chambre civile a
toutefois estimé « qu'un contrat peut être annulé pour cause illicite ou immorale,
même lorsque l'une des parties n'a pas eu connaissance du motif déterminant de
la conclusion du contrat ». On peut donc considérer que cette solution vaut en
matière de société.
Enfin, il faut souligner qu'en 1999, par une décision Centros Ltd, la CJCE a admis
le caractère de principe général de l'adage fraus omnia corrumpit (CJCE 9 mars
1999, aff. Centros Ltd, Bull. Joly 1999, p. 705, note J.-Ph. Dom). Autrement dit,
le droit communautaire ne peut écarter un principe aussi général que celui selon
lequel « la fraude corrompt tout ».
Pour conclure, enfin, sur les causes de nullité, on soulignera que le droit des
sociétés contient de nombreuses dispositions légales impératives qui ne sont pas
sanctionnées par la nullité de la société. Les clauses statutaires qui leur sont
contraires sont tout simplement réputées non écrites, comme le prévoit l'article
1844-10 al. 2 du Code civil. Par exemple, les clauses léonines, les clauses
prévoyant une rémunération non prévue par la loi au profit des administrateurs,
les clauses restreignant l'exercice de l'action sociale, sont des clauses réputées
non écrites.
L'action en nullité est régie par les règles traditionnelles applicables aux nullités.
Dans le cas d'une nullité relative, seule la personne protégée par la règle peut
agir en nullité.
Dans le cas d'une nullité absolue, l'action en nullité peut émaner de tout
intéressé qu'il s'agisse d'un dirigeant, d'un associé, voire d'un commissaire aux
comptes....
L'action en nullité est, par ailleurs, enserrée dans des délais de prescription très
stricts (§1). Elle peut, en outre, être éteinte par une régularisation (§2).
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Lorsque la nullité est fondée sur l'illicéité de l'objet ou sur la fraude, aucun délai
de prescription n'est opposable.
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 17 septembre 1996), qu'un bail portant
sur un immeuble à usage commercial a été consenti pour neuf ans, le 28
septembre 1990, par la société civile immobilière de la Croix de Mission (la SCI),
représentée par Mme Godin, à la société anonyme Y... , représentée par l'époux
de Z... Y..., qui était encore actionnaire de cette société jusqu'au 1er octobre
suivant ; que, postérieurement, la société Y... représentée par Mme Chazanne, le
nouveau président de son conseil d'administration, a contesté la validité de ce
bail ; qu'un accord est intervenu, le 8 février 1991, entre les époux Y... et Z...
X..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de porte-fort des autres
actionnaires, sur la date d'effet du bail et sur celle du versement du premier
loyer ; que des négociations ont ensuite été menées entre ces mêmes
personnes, en vain, en vue de la conclusion d'un nouveau bail ; que la société
Y... a occupé les lieux jusqu'au 31 juillet 1992 ; que la SCI l'a assignée pour la
faire condamner à lui payer les loyers, prévus au bail, jusqu'à la fin de la
première période triennale, soit jusqu'au 1er octobre 1993 ;
Attendu que, pour condamner la société Y... à payer à la SCI une certaine
somme à titre de loyers, l'arrêt retient que le bail signé le 28 septembre 1990 n'a
pas fait l'objet d'une action en nullité dans le délai de trois ans prévu par l'article
105 de la loi du 24 juillet 1966 et qu'il ne peut ainsi plus être annulé pour défaut
d'autorisation préalable du conseil d'administration ;
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Cette règle vaut également en présence de clauses que la loi répute non écrite,
pour lesquelles il n'existe pas de prescription : il s'agit là d'une sorte d' «
inexistence juridique » par volonté de la loi.
Par exception au droit commun des nullités, la nullité de la société est prononcée
de manière non rétroactive (article 1844-15 C.civ.). En effet, la société a
fonctionné, elle a passé des actes juridiques, exploité une entreprise : la
rétroactivité aurait des effets gravissimes.
La nullité produit donc les effets d'une dissolution qui ne vaut que pour l'avenir :
les actes passés ne peuvent être remis en cause. On estime que la société a
fonctionné comme une société de fait.
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Droit des sociétés (1) > Titre I – Le contrat de société
Les tiers qui ont contracté de bonne foi avec la société ne peuvent donc se voir
opposer la nullité par les dirigeants (art. 1844-16 C.civ.).
Enfin, ceux qui sont à l'origine de la nullité peuvent voir engagée leur
responsabilité.
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