Trace Operator

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Master Mathématiques

Analyse spectrale Chapitre 2.

Opérateurs bornés

1 Opérateurs linéaires bornés


Soient E et F deux espaces de Banach. On appelle un opérateur borné de E dans F toute application
linéaire continue de E dans F . Pour T ∈ L(E, F ), on note

Ran(T ) = {T x, x ∈ E} et Ker(T ) = {x ∈ E, T x = 0} .

L’opérateur identité de E dans E sera noté par 1l.

Définition 1.1 Une forme sesquilinéaire f sur un C-espace vectoriel E est une application de
E × E à valeurs dans C vérifiant pour tout y ∈ E :
(a) x 7→ f (x, y) est anti-linéaire,
(b) x 7→ f (y, x) est linéaire,
Si E est un espace normé on dit que f est une forme sesquilinéaire bornée si de plus il existe c > 0
tel que
|f (x, y)| ≤ c||x|| ||y|| .

Théorème 1.2 Pour tout forme sesquilinéaire bornée f sur un espace de Hilbert H, il existe un
unique opérateur A ∈ L(H) vérifiant

f (x, y) = (x, Ay), ∀x, y ∈ H .

Preuve. L’application x 7→ f (x, y) est une forme linéaire continue sur H, donc par le Théorème de
Riesz il existe un unique Ay ∈ H tel que f (x, y) = (x, Ay ) pour tout x, y ∈ H. On vérifie facilement
que l’application y 7→ Ay est linéaire que l’on note par A. Comme

|(x, Ay)| |f (x, y)|


||Ay|| = sup = sup ≤ c||y|| ,
x6=0 ||x|| x6=0 ||x||

A ∈ L(H) et vérifie la propriété énoncée. L’unicité est une conséquence de l’équivalence ((x, Ay) =
0, ∀x, y ∈ H) ⇔ A = 0. 

On définit, en plus de la topologie uniforme sur L(E, F ), deux autres topologies appelées topolo-
gie de la convergence forte et de la convergence faible en spécifiant la notion de convergence des
suites généralisées sur L(E, F ) (voir chap.1, Appendice B).

Définition 1.3 On dit que la suite généralisée (Ti )i∈I converge fortement (respectivement faible-
s w
ment) vers T dans L(E, F ), noté par Ti −→ T (respectivement Ti −→ T ) si limi∈I Ti x = T x pour
tout x ∈ E (respectivement si limi∈I `(Ti x) → `(T x) pour tout x ∈ E et ` ∈ F ∗ ).

Il ne faut pas confondre la topologie de convergence faible d’opérateurs (Définition 1.3) et la


convergence faible d’une suite de l’espace de Banach L(E, F ) (chap.1, Définition 2.11).

Théorème 1.4 Soit X un espace de Banach réflexif. Si (Tn )n est une suite dans L(X) telle que
w
pour tout x ∈ X et ` ∈ X ∗ la suite (`(Tn x))n convergent, alors Tn −→ T pour un T ∈ L(X).

19
Preuve. Montrons que pour tout x ∈ X on a supn ||Tn x|| < ∞. Puisque pour tout x ∈ X et ` ∈ X ∗
la suite (`(Tn x))n converge alors supn |`(Tn x)| < ∞. D’où, par le Théorème 2.5 et Banach-Steinhaus
on a pour tout x ∈ X
sup ||Tn x|| < ∞ .
n

En appliquant de nouveau le Théorème de Banach-Steinhauss on en déduit que supn ||Tn || < ∞.


On définit alors une application bilinéaire B : X × X ∗ → C par B(x, `) = limn `(Tn x) ainsi qu’un
opérateur T donné par

T :X → X
^.)
x 7→ B(x,

^.) est l’unique élément de X tel que `(B(x,


où B(x, ^.)) = B(x, `) (l’existence d’un tel élément est
garantie par la réflexivité de X). Comme on a

|B(x, `)| ≤ sup ||Tn || ||x||X ||`||X ∗


n

w
on en déduit que T est linéaire continue. On a alors Tn → T . 

1.1 Adjoint
Définition 1.5 Soient X, Y deux espaces de Banach et T un opérateur borné de X dans Y .
L’adjoint de T , noté T 0 , est l’opérateur borné de Y ∗ dans X ∗ vérifiant

(T 0 `)(x) = `(T (x)) .

Théorème 1.6 Soient X et Y deux Banach. L’application de L(X, Y ) dans L(Y ∗ , X ∗ ) qui à T
associe son adjoint T 0 est isométrique (i.e: ||T || = ||T 0 || pour tout T ∈ L(X, Y )).

Preuve. On a
! !
||T || = sup ||T x|| = sup sup |`(T x)| = sup sup |`(T x)| = sup ||T 0 `|| = ||T 0 || .
||x||≤1 ||x||≤1 ||`||≤1 ||`||≤1 ||x||≤1 ||`||≤1


On a les relations d’orthogonalité suivantes.

Proposition 1.7 Soient E, F deux Banach et T ∈ L(E, F ). Alors on a


(i) Ker(T ) = Ran(T 0 )⊥ ,
(ii) Ker(T 0 ) = Ran(T )⊥ ,
(iii) Ker(T )⊥ ⊇ Ran(T 0 ),
(iv) Ker(T 0 )⊥ = Ran(T ).

Preuve. (i) x ∈ Ker(T ) ⇔ `(T x) = 0, ∀` ∈ F ∗ ⇔ T 0 (`)(x) = 0, ∀` ∈ F ∗ ⇔ x ∈ Ran(T 0 )⊥ .


(ii) ` ∈ Ker(T 0 ) ⇔ (T 0 `)(x) = 0, ∀x ∈ E ⇔ `(T x) = 0, ∀x ∈ E ⇔ ` ∈ Ran(T )⊥ .
(iii) et (iv) resultent de la Proposition [chap.1, 2.9]. En effet, on a Ker(T )⊥ = (Ran(T 0 )⊥ )⊥ ⊇
Ran(T 0 ) et que Ker(T 0 )⊥ = (Ran(T )⊥ )⊥ = Ran(T ). 

Adjoint dans un Hilbert:

Définition 1.8 Soit H un Hilbert et T ∈ L(H). L’adjoint de T est l’opérateur linéaire borné, noté
T ∗ , vérifiant
(x, T y) = (T ∗ x, y), ∀x, y ∈ H.

20
Soit T ∈ L(H), on peut définir T 0 selon la Définition 1.5 et T ∗ selon la Définition 1.8. On a alors
la relation suivante

T ∗ = C −1 T 0 C , (1)

où C : H → H∗ est l’isomorphisme anti-linéaire qui à x ∈ H associe la forme linéaire (x, .) ∈ H∗ .

Proposition 1.9 On a les propriétés suivante:


(a) T 7→ T ∗ est un isomorphisme d’espace de Banach.
(b) (T S)∗ =pS ∗ T ∗ , (T ∗ )∗ = T , pour tout T, S ∈ L(H).
(c) ||T || = ||T ∗ T ||.
(d) Si T ∈ L(H) est bijective alors (T −1 )∗ = (T ∗ )−1 ∈ L(H).
s w w
(e) Si Tn −→ T ou Tn −→ T alors Tn∗ −→ T ∗ .

Preuve. (a) est une conséquence de (1) plus le fait que C est un isomorphisme. (b) découle
directement de la définition.
(c) En utilisant (a), on a ||T ∗ T || ≤ ||T ∗ || ||T || = ||T ||2 . En plus, comme on a aussi

||T x||2 = (x, T ∗ T x) ≤ ||T ∗ T || ||x|| ,

on en déduit que ||T ||2 ≤ ||T ∗ T ||.


(d) Par le Théorème 2.6 de Banach-Schauder on voit que T −1 ∈ L(H). D’où, en utilisant (b) on
en déduit que 1l∗ = (T T −1 )∗ = (T −1 T )∗ = (T −1 )∗ T ∗ = T ∗ (T −1 )∗ = 1l. (e) Découle directement de
la définition. 
s s
Exercice. Montrer que Tn −→ T n’implique pas que Tn∗ −→ T ∗ .

Proposition 1.10 Pour tout T ∈ L(H), on a les relations

Ker(T )⊥ = Ran(T ∗ ) et Ker(T ∗ ) = Ran(T )⊥ .

Preuve. On a y ∈ Ran(T ∗ )⊥ ⇔ ((y, T ∗ x) = 0, ∀x ∈ H) ⇔ ((T y, x) = 0, ∀x ∈ H) ⇔ T y = 0 . La


deuxième relation suit de la première en remarquant que T ∗∗ = T . 

Définition 1.11 Soit T un opérateur borné sur un espace de Hilbert H. On dit que :
(i) T est une projection (respectivement projection orthogonale ) si T 2 = T (respectivement T 2 = T
et T = T ∗ ).
(ii) T est normal (respectivement auto-adjoint) si T T ∗ = T ∗ T (respectivement T ∗ = T ).
(iii) T est isométrique (respectivement unitaire) si T ∗ T = 1l (respectivement T ∗ T = T T ∗ = 1l).

Exercice. Montrer qu’un opérateur T ∈ L(H) est normal si et seulement si ||T x|| = ||T ∗ x|| pour
tout x ∈ H.

Théorème 1.12 (Lax-Milgram) Soit H un espace de Hilbert et a(·, ·) une forme sesquilinéaire
bornée sur H, tel que
a(u, u) ≥ ckuk2 (coercivité).
Alors, pour tout f ∈ H∗ il existe une unique solution x ∈ H à l’équation

a(x, y) = f (y), ∀y ∈ H. (2)

La solution x vérifie en plus kxk ≤ 1c kf k.

Preuve. D’après le Théorème 1.2, il existe A ∈ L(H) tel que a(x, y) = (Ax, y) pour tout x, y ∈ H.
D’autre part le Théorème [chap.1, 3.12] de Riesz indique qu’il existe z ∈ H tel que f (y) = (z, y)
pour tout y ∈ H. Il s’agit donc de montrer que pour tout z ∈ H l’équation Ax = z possède une
unique solution. Ceci est équivalent à montrer que A est bijective.

21
D’abord Ker(A) = {0}, puisque Ax = 0 et (Ax, x) ≥ c||x||2 implique que x = 0. Montrons que
Ran(A) est dense dans H. En effet, si u ∈ H tel que u ⊥ Ran(A) alors 0 = (Au, u) ≥ c||u||2 et
donc u = 0. D’où, Ran(A)⊥ = {0} et donc Ran(A) = (Ran(A)⊥ )⊥ = H.
Montrons enfin, que Ran(A) est un fermé de H. Pour cela soit (xn )n une suite dans H telle que
limn Axn = y. On a alors

c||xn − xm ||2 ≤ (A(xn − xm ), xn − xm ) ≤ ||Axn − Axm || ||xn − xm || .

Par conséquent (xn )n est une suite de Cauchy qui converge vers un x ∈ H. Donc on a y = T x ∈
Ran(A). Comme Ran(A) est à la fois dense et fermé, alors Ran(A) = H. 

Théorème 1.13 (Hellinger-Toeplitz) Toute application linéaire T définie d’un espace de Hilbert
H dans lui-même vérifiant
(T x, y) = (x, T y) ∀x, y ∈ H,
est continue.

Preuve. Il suffit de montrer que le graphe de T , noté Γ(T ), est un fermé. Soit (xn , T xn ) une suite
de Γ(T ) convergente vers (x, y). Pour tout z ∈ H, on a

(z, y) = lim(z, T xn ) = lim(T z, xn ) = (T z, x) = (z, T x) .


n n

Il en résulte que y = T x ce qui entraı̂ne que Γ(T ) est fermé. 

Exercice. Trouver une forme linéaire définie sur un Hilbert qui ne soit pas continue.

2 Opérateur positif
Définition 2.1 On dit qu’un opérateur A sur un Hilbert H est positif s’il vérifie (x, Ax) ≥ 0 pour
tout x ∈ H. On écrit A ≥ B si A − B est positif.

En utilisant l’identité de polarisation on voit qu’un opérateur positif est nécessairement auto-
adjoint.

Lemme 2.2 la série entière en 0 de 1 − z est absolument convergente sur le disque |z| ≤ 1.

Théorème 2.3 Tout opérateur positif A admet un unique opérateur positif B tel que A = B 2 . De
plus, B commute
√ avec tout opérateur qui commute avec A. On appelle B la racine carré de A et
on note par A.

Preuve. Unicité: Soit B1 , B2 ≥ 0 tel que B12 = B22 = A alors pour i = 1, 2

Bi A = Bi3 = ABi .

Un calcul direct donne

0 = (B12 − B22 )(B1 − B2 ) = (B1 − B2 )B1 (B1 − B2 ) + (B1 − B2 )B2 (B1 − B2 ) .


| {z } | {z }
(1)≥0 (2)≥0

On en déduit alors que (1) − (2) = (B1 − B2 )3 = 0. En particulier, on a 0 = ||(B1 − B2 )4 || =


||(B1 − B2 )2 ||2 = ||B1 − B2 ||4 .
Existence: Il suffit de le montrer pour A ≥ 0, ||A|| = 1. Dans ce cas, on a 1l − A ≥ 0 et

||1l − A|| = sup (x, (1l − A)x) ≤ 1.


||x||=1

22

La série B = ∞ k
P
k=0 ck (1l − A) est donc absolument convergente grâce au Lemme 2.2 avec 1−z =
P ∞ k et c < 0 pour tout k ∈ N∗ . On vérifie que
k=0 kc z k


X ∞
X
k
B = 1l + ck (1l − A) ≥ 1l + ck 1l ≥ 0 .
k=1 k=1

Enfin, on a

!
X X
B2 = ck ck0 (1l − A)n
n=0 k+k0 =n
X
Comme ck ck0 = 0 pour tout n ≥ 2, on en conclut que B 2 = A. 
k+k0 =n

Définition 2.4 Pour tout A ∈ L(H) on note |A| = A∗ A.

Exercice. Montrer que si A ≥ 0 et inversible alors A−1 ≥ 0.

Définition 2.5 Un opérateur U ∈ L(H) est appelé isométrie partielle si ||U x|| = ||x|| pour tout
x ∈ Ker(U )⊥ .

Remarquons que l’image d’une isométrie partielle U ∈ L(H) est un fermé de H.

Proposition 2.6 Un opérateur U ∈ L(H) est une isométrie partielle si et seulement si U ∗ U est
une projection orthogonale.

Preuve. Supposons que U est une isométrie partielle. On a alors (U ∗ U )∗ = U ∗ U et (U U ∗ )∗ = U U ∗ .


Il reste donc à prouver que (U ∗ U )2 = U ∗ U et (U U ∗ )2 = U U ∗ .
Comme H = Ker(U )⊥ ⊕ Ker(U ), on a pour tout x ∈ H

U ∗ U x = U ∗ U x1 ∈ Ker(U )⊥ ,

où x1 ∈ Ker(U )⊥ vérifiant x − x1 ∈ Ker(U ). Il résulte de ||U x1 || = ||x1 || que (U ∗ U x1 , x1 ) =


(x1 , x1 ), puis de l’identité de polarisation (5) que U ∗ U x1 = x1 . On a donc (U ∗ U )2 x = U ∗ U x.
Montrons la réciproque. Comme U ∗ U est une projection orthogonale, on a

||U ∗ U x||2 = (U ∗ U x, x) = ||U x||2 .

On en déduit alors que Ker(U ∗ U ) = Ker(U ) et donc U ∗ U est une projection orthogonale sur
Ker(U )⊥ . D’où, pour tout x ∈ Ker(U )⊥

||U x||2 = (U ∗ U x, x) = ||x||2 .

Proposition 2.7 U est une isométrie partielle si et seulement si U ∗ l’est aussi.

Preuve. Il suffit de montrons que si U est une isométrie partielle alors U U ∗ est une projection
orthogonale. En effet, pour tout x ∈ H on a U ∗ x ∈ Ran(U ∗ ) = Ker(U )⊥ . En utilisant la
Proposition 2.6, on a donc
(U U ∗ )2 x = U (U ∗ U )U ∗ x = U U ∗ x .


Théorème 2.8 (Décomposition polaire) Pour tout A ∈ L(H) il existe une isométrie partielle
U tel que A = U |A|. En outre, U est unique si on impose la condition Ker(U ) = Ker(A).

23
Preuve. Remarquons qu’on a
kAxk2 = k |A|x k2 , ∀x ∈ H. (3)
En particulier, on en déduit que Ker(|A|) = Ker(A) et que
|A|x = |A|y ⇒ Ax = Ay.
On définit alors l’application
V : Ran(|A|) → Ran(A)
|A|x 7→ Ax .
V est isométrique grâce à (3). Elle s’étend donc par continuité à une isométrie de Ran(|A|) vers
Ran(A), qu’on note encore par V . En posant U = V P avec P la projection orthogonale sur
Ker(A)⊥ , obtient une isométrie partielle sur H vérifiant la propriété énoncée.
Unicité: Si U1 , U2 sont deux isométries partielles vérifiant U1 |A| = U2 |A| alors U1 = U2 sur
Ran(|A|). De plus comme Ran(|A|)⊥ = Ker(A), la condition Ker(U1 ) = Ker(U2 ) = Ker(A)
implique que U1 = U2 sur H. 

3 Opérateurs compacts
Soient X et Y deux espaces de Banach.
Définition 3.1 Un opérateur T ∈ L(X, Y ) est dit compact s’il transforme toute partie bornée de
X en une partie relativement compact de Y . Autrement dit, T est compact si et seulement si pour
toute suite (xn )n bornée dans X la suite (T xn )n admet une sous-suite convergente.
Un opérateur compact est nécessairement continue car sinon il existerait une suite (xn )n bornée tel
que ||T xn || → ∞, ce qui contredit la compacité.
Théorème 3.2 Si T ∈ L(X, Y ) est compact alors pour tout suite (xn )n tel que xn * x on a
T xn → T x. La réciproque est vraie si X est réflexif.
Preuve. Soit xn * x alors par le Théorème 1.10 la suite (xn )n est bornée. La suite yn = T xn
converge aussi faiblement vers T x (puisque `(T xn ) = (T 0 `)(xn ) pour tout ` ∈ Y ∗ ). Supposons que
T xn ne converge pas fortement vers T x, il existe alors ε > 0 et une sous suite (yϕ(n) )n tel que
||yϕ(n) − y|| > ε. En utilisant la compacité de T , il existe alors une sous suite de (xϕ(n) )n qu’on
note par (xϕ1 (n) )n tel que T xϕ1 (n) converge vers un ỹ 6= y. Mais d’un autre coté, on a (yϕ1 (n) )n
converge faiblement vers y. D’où une contradiction.
La réciproque, suit de la Remarque 3.22. En effet, soit (xn )n une suite bornée dans X réflexif
alors il existe une sous-suite (xnk )k qui converge faiblement. D’où la sous suite (T xnk )k converge
fortement. 

Exercice. Montrer que si l’opérateur identité sur un Banach X est compact alors X est de dimension
finie.
Théorème 3.3 Soient T, Tn ∈ L(X, Y ) et S ∈ L(Y, Z) avec X, Y et Z des espaces de Banach.
(i) Si (Tn )n converge en norme vers T et si les Tn sont compact alors T l’est aussi.
(ii) T S est compact si un des opérateurs T ou S est compact.
Preuve. (i) Soit (xm )m une suite dans B(0, 1). Pour chaque n il existe une sous-suite (xϕn (m) )m telle
que (Tn xϕn (m) )m est convergente, puisque Tn est compact. Par le procédé d’extraction diagonale
la sous-suite (xϕn (n) )n vérifie que (Tn xϕn (n) )n est convergente. On a alors
kT xϕn (n) − T xϕm (m) k ≤ kT − Tn k + kTm − T k + kTn xϕn (n) − Tm xϕm (m) k −→ 0 .
n,m→∞

(ii) suit directement de la définition. 


Théorème 3.4 (Schauder) T est compact si et seulement si T 0 est compact.
Preuve. En exercice. 

24
4 Spectre des opérateurs compacts
Soit E un espace de Banach. On appelle spectre d’un opérateur T ∈ L(E), le sous-ensemble du
plan complexe défini par

σ(T ) := {λ ∈ C : (λ1l − T ) n’est pas bijective } .

On dit que λ ∈ σ(T ) est une valeur propre de T de multiplicité (géométrique) m ∈ N∗ si λ1l − T
n’est pas injective et dim(Ker(λ1l − T )) = m.
Théorème 4.1 (Alternative de Fredholm) Soit T ∈ L(E) un opérateur compact. On a pour
tout λ ∈ C∗ :
(i) Ker(λ1l − T ) est de dimension finie.
(ii) Ran(λ1l − T ) est fermé.
(iii) Ker(λ1l − T ) = {0} ⇔ Ran(λ1l − T ) = E.
Preuve. (i) Soit Eλ := Ker(λ1l − T ). La boule unité fermé de Eλ est incluse dans T (B̄E (0, 1/λ)),
puisque pour x ∈ B̄Eλ (0, 1) on a x = T ( λx ) avec λx ∈ B̄E (0, 1/λ). Comme T est compact on en
déduit que B̄Eλ (0, 1) est compact. Donc, Eλ est un sous-espace fermé de dimension finie.
(ii) Montrons que Ran(λ1l − T ) est fermé. Soit (xn )n une suite de E telle que λxn − T xn → v.
Comme Eλ := Ker(λ1l − T ) est de dimension finie, on en déduit l’existence d’une suite (zn )n de
Eλ telle que pour tout n ∈ N
d(xn , Eλ ) = d(xn , zn ) .
On a alors l’identité suivante

λxn − T xn = λ(xn − zn ) − T (xn − zn ) → v . (4)


n→∞

Montrons que la suite (||xn − zn ||)n est bornée. Sinon il existerait une sous-suite ||xnk − znk || → ∞
quand k → ∞. Alors la suite
xnk − znk
wk :=
||xnk − znk ||
est bornée et comme T est compact, il existe une sous-suite wϕ(k) telle que (T wϕ(k) )k converge. En
utilisant (4), il en résulte que
lim T wϕ(k) − λwϕ(k) = 0 .
k

Ceci implique que (wϕ(k) )k converge vers un certain w ∈ E vérifiant T w = λw et ||w|| = 1 (i.e.:
w ∈ Eλ ). Par ailleurs, on a
 
xnk − znk
d(wϕ(k) , Eλ ) = d , Eλ = 1 .
||xnk − znk ||
D’où une contradiction avec le fait que wϕ(k) → w ∈ Eλ . Donc, la suite (||xn − zn ||)n est bornée
et comme T est compact il existe alors une sous-suite (xψ(n) − zψ(n) )n telle que T (xψ(n) − zψ(n) )
converge. En utilisant (4), on en déduit que (xψ(n) − zψ(n) )n converge vers un u ∈ E vérifiant
λu − T u = v. Ainsi, on a prouvé que Ran(λ1l − T ) est fermé.
(iii) Supposons que Ker(λ1l − T ) = {0} (i.e.: λ n’est pas une valeur propre). Si Ran(λ1l − T ) 6= E
alors En := Ran(λ1l − T )n est une suite strictement décroissante de sous-espace fermé de E puisque
(λ1l − T ) est injective. Donc, par le lemme de Riesz [chap. 1, Lem. 1.5] il existe une suite xn ∈ En
telle que ||xn || = 1 et d(xn , En+1 ) > 1/2 pour tout n ∈ N. Alors pour n > m
 

T xn − T xm = (T xn − λxn ) − (T xm − λxm ) + λxn  − λxm


 
| {z } | {z } |{z}
∈Em+1 ∈Em+1 ∈En ⊂Em+1

Il en résulte alors que pour tout n > m on a ||T xn − T xm || ≥ λd(xm , Em+1 ) > λ/2, ce qui contredit
la compacité de l’opérateur T . Donc Ran(λ1l − T ) = E.

25
Montrons la réciproque. Par la proposition 1.7, on a Ker(λ1l−T ) = Ran(λ1l−T 0 )⊥ avec T 0 ∈ L(E ∗ )
est l’adjoint de T . Comme T 0 est compact par le théorème 3.4 de Schauder et que Ker(λ1l − T 0 ) =
Ran(λ1l − T )⊥ = {0}, on en déduit par le résultat ci-dessus que Ran(λ1l − T ) = E ∗ . D’où, on
obtient Ker(λ1l − T ) = Ran(λ1l − T 0 )⊥ = {0}. 
Théorème 4.2 Soit E un espace de Banach de dimension finie et T ∈ L(E) est un opérateur
compact. Alors 0 ∈ σ(T ) et σ(T ) \ {0} est un sous-ensemble discret de C constitué uniquement de
valeurs propres de multiplicités finies.
Preuve. (i) 0 ∈ σ(T ): Si 0 ∈ / σ(T ) par le théorème [chap. 1, Thm. 2.6] de Banach-Schauder
−1
T ∈ L(E) et donc 1l est compact. Ce qui est impossible avec E de dimension infinie.
(ii) Si λ ∈ σ(T ) \ {0} alors λ est une valeur propre: Sinon Ker(λ1l − T ) = {0} et Ran(λ1l − T ) = E
par le théorème 4.1. D’où, λ1l − T est bijective et donc λ ∈ / σ(T ).
(iii) σ(T ) \ {0} est discret: Supposons qu’il existe une infinité de valeurs propres distinctes (λn )n
ayant une limite λ. On pose En = vect{e1 , · · · , en } avec pour chaque i = 1, · · · , n, ei est un
vecteur propre associé à la valeur propre λi . Comme les (λn )n sont deux à deux distincts les
vecteurs propres e1 , · · · , en sont linéairement indépendants et donc dim(En ) = n, en+1 ∈ / En et
(λn+1 1l − T )En+1 ⊂ En . Par le lemme [chap. 1, Lem.1.5] de Riesz, il existe une suite (xn )n telle
que xn ∈ En+1 , ||xn || = 1 et d(xn , En ) > 1/2. Si n < m
 

   
x n x m  T
 n x − λ x
n+1 n T x m − λ x
m+1 m

T − T = − + x − x (5)

n m
λn+1 λm+1 λn+1 λm+1
 
 
| {z }
∈Em

≥ d(xm , Em ) > 1/2 .


Il en résulte que si λ 6= 0 alors la suite (xn /λn )n est bornée et (5) contredit le compacité de T . 
Corollaire 4.3 Soit E un espace de Banach de dimension infinie et T ∈ L(E) un opérateur
compact. Alors on a σ(T ) = {0} ou σ(T ) \ {0} est fini ou σ(T ) \ {0} est une suite qui tend vers 0.
Théorème 4.4 Soit H un espace de Hilbert séparable et A ∈ L(H) un opérateur auto-adjoint
compact. Alors il existe une B.O.N de H formée de vecteurs propres de A.
Preuve. On considère le spectre de A comme une suite (λn )n de valeurs propres répétées autant
de fois que leurs multiplicités et tel que limn λn = 0. On note {φn }n la famille O.N de vecteurs
propres vérifiant Aφn = λn φn et M = vect{φn , n ∈ N}. Alors M et M ⊥ sont deux sous-espaces
invariants de A. De plus, A|M ⊥ est un opérateur auto-adjoint compact, donc si λ ∈ σ(A|M ⊥ ) \ {0}
alors λ est une valeur propre de A. On en déduit que σ(A|M ⊥ ) = {0} et par le théorème [chap. 3,
Thm. 2.6] on conclut que A|M ⊥ = 0. D’où, pour x ∈ M ⊥ on a Ax = 0 et donc x ∈ M ∩ M ⊥ = {0}.
Ainsi, on a montrer que {φn }n est total dans H. 
Définition 4.5 Soit H un espace de Hilbert séparable et T ∈ L(H) un opérateur compact. On
appelle une valeur singulière de T toute valeur propre de |T |.
Remarque 4.6 Comme l’opérateur |T | est un opérateur positif alors toutes ses valeurs propres
sont positives. On considère souvent les valeurs singulière d’un opérateurs T ∈ L(H) compact
comme une suite (µn )n positive décroissante convergente vers 0 avec card{n ∈ N : µn = µm } est
égal à la multiplicité de la valeur propre µm de |T | i.e.:
card{n ∈ N : µn = µm } = dim[Ker(|T | − µm 1l)].
Théorème 4.7 Soit H un espace de Hilbert séparable et T ∈ L(H) un opérateur compact. Alors
il existe deux familles O.N {fn }n et {gm }m tel que pour tout x ∈ H:

X
Tx = µn hfn , xi gn
n=0

avec la somme ci-dessus est absolument convergente et les (µn )n sont les valeurs singulières de T .

26
Preuve. Comme T est compact alors T ∗ T est compact et auto-adjoint donc il possède une BON de
vecteurs propres T ∗ T fn = µ2n fn , n ∈ N. En posant gn = T fn /µn pour les µn 6= 0, on obtient
 

!
X X fn 

x= hfn , xifn ⇒ T x = µn hfn , xiT
µn
n=0 µn 6=0

!
X
⇒ Tx = µm hfm , xigm ,
m=0

avec {gm }m∈N une famille O.N. De plus, la somme est absolument convergente puisque

X
|µm |2 |hfm , xi|2 ≤ sup µ2n ||x||2 .
n
m=0


Définition 4.8 Soit H un espace de Hilbert séparable. On définit, pour p ∈ [1, ∞[, les classes de
Schatten par
X ∞
Lp (H) = {T ∈ L(H) compact et tel que µpn < ∞}
n=0

où (µn )n sont les valeurs singulières de T .


On montre que chaque Lp (H) est un espaces de Banach muni de la norme


!1/p
X
||T ||p = µpn .
n=0

De plus, les Lp (H) sont des ∗-idéaux bilatères vérifiant Lp (H) ⊂ Lq (H), si p ≤ q.

5 Opérateurs à trace et de Hilbert-Schmidt


Dans cette section on considère H un Hilbert séparable.
Définition 5.1 Un opérateur T ∈ L(H) est dit de Hilbert-Schmidt (ou simplement HS) si
X
||T ei ||2 < ∞ (6)
i∈I

pour toute (ei )i∈I BON de H.


On observe que pour toute (ei )i , (fj )j BON de H, on a
X XX XX X
||T ei ||2 = |hfj , T ei i|2 = |hfj , T ei i|2 = ||T ∗ fj ||2 .
i i j j i j

On en déduit que T est HS si et seulement T ∗ est HS et que la somme dans (6) est indépendante
de la base.
Proposition 5.2 Un opérateur T ∈ L(H) est HS si et seulement si T ∈ L2 (H).
Preuve. Soit (ei )i∈N une BON de vecteurs propres de |T | respectivement associés aux valeurs
singulières (µi )i∈N de T . On a alors
X X X
||T ei ||2 = hei , |T |2 ei i = µ2i .
i∈N i∈N i∈N

27
Proposition 5.3 L2 (H) est un ∗-idéal bilatère de L(H), i.e.:
(i) T ∈ L2 (H), S ∈ L(H) alors T S, ST ∈ L2 (H).
(ii) T ∈ L2 (H) alors T ∗ ∈ L2 (H).

Preuve. En exercice. 

Proposition 5.4 T ∈ L2 (H) si et seulement si |T | ∈ L2 (H).

Preuve. Par la décomposition polaire T = U |T | avec U une isométrie partielle avec U ∗ U projection
orthogonale sur Ker(T )⊥ = ker(|T |)⊥ = Ran(|T |).
⇒: X X X
||T ei ||2 = ||U |T |ei ||2 = |||T |ei ||2 < ∞ .
i∈I i∈I i∈I

⇐: Comme L2 (H) est un idéal on a T = U |T | ∈ L2 (H). 

Définition 5.5 Un opérateur T ∈ L(H) est dit à trace si


X
|hfi , T ei i| < ∞ (7)
i∈I

pour toute (ei )i∈I , (fj )j∈I famille O.N de H.

Proposition 5.6 Un opérateur T ∈ L(H) est à trace si et seulement si T ∈ L1 (H).

Preuve. Supposons que T est à trace, par la décomposition polaire T = U |T | avec U une isométrie
partielle telle que Ker(U ) = Ker(T ). Soit (ei )i une BON de vecteurs propres de |T | respectivement
associés aux valeurs singulières (µi )i∈N de T . On pose fi = U ei pour les i tel que ei ∈ Ker(|T |)⊥ =
Ker(T )⊥ . Alors (fi )i∈I est une famille O.N et on a
X X X X
|hfi , T ei i| = |hU ei , T ei i| = µi |hU ei , U ei i| = µi < ∞ .
i∈I i∈N i∈N i∈N

D’où T ∈ L1 (H).
Supposons que T ∈ L1 (H). Par le théorème 4.7, il existe deux familles O.N (ei ) et (fj ) tel que
T = i µi hfi , .iei où µi sont les valeurs singulières de T . Soient (ẽi ) et (f˜j ) deux familles O.N
P
quelconques de H. Alors on a
X X X X X
|hf˜i , T ẽi i| = |hf˜i , µj hfj , ẽi iej i| = | µj hfj , ẽi ihf˜i , ej i|
i i j i j
XX X X
≤ µj |hfj , ẽi ihf˜i , ej i| = µj |hfj , ẽi ihf˜i , ej i|
i j j i
!1/2 !1/2
X X X
≤ µj |hfj , ẽi i|2 |hf˜i , ej i|2
j i i
X
= µj < ∞ .
j

Exercice.
1) Montrer que L1 (H) est un ∗-idéal bilatère de L(H).
2) Montrer que T ∈ L1 (H) si et seulement si |T | ∈ L1 (H).

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