Feuilletage 1810
Feuilletage 1810
Feuilletage 1810
pharaonique
L’Égypte
pharaonique
Histoire, société, culture
* Tous les termes suivis d’un astérisque sont définis dans le lexique en fin d’ouvrage.
Nous avons dans cet ouvrage cherché à intégrer autant que possible ces
dernières avancées et ces problématiques émergeantes de la recherche en
égyptologie, une discipline dont les approches se sont profondément renouve-
lées ces dernières décennies. Pour autant, le plan que nous avons adopté reste
classique : après avoir présenté en détail les différentes facettes du « milieu
égyptien » dans lequel se développe la culture pharaonique, nous avons pris
le parti de suivre le découpage par grandes périodes qui est traditionnelle-
ment adopté par les égyptologues, des origines de la civilisation égyptienne à
laquelle étaient sorties et vénérées les statues des rois ancêtres. Parmi les rois
anciens, sont sélectionnés Ménès, Montouhotep II et Ahmosis. Nous avons là
les souverains fondateurs de longues périodes de prospérité et d’unité : Ménès
pourrait correspondre à Narmer, premier roi de la Ire dynastie, Montouhotep II
et Ahmosis réunifient l’Égypte, respectivement après les Première et Deuxième
Périodes intermédiaires, sous la houlette d’un pouvoir royal unique.
Les sources écrites et iconographiques égyptiennes dans leur ensemble
montrent d’ailleurs un réel souci du passé et la construction d’une mémoire,
en particulier d’une mémoire monarchique. Dans l’idéologie royale, prin-
cipale productrice d’images et de textes, le pouvoir a la claire volonté de
s’inscrire dans la longue lignée des rois égyptiens, qui remonte jusqu’aux
temps mythiques. Mythe et histoire ne sont d’ailleurs pas séparés, le temps
des hommes s’inscrivant dans la continuité du temps des dieux : dans le
Canon de Turin, aux dieux succèdent sur le trône d’Égypte les esprits divi-
nisés dit akhou*, puis les hommes. De régulières références sont faites aux
rois anciens : culte rendu aux souverains morts et parfois restauration de
leurs monuments ; recours aux figures de rois prestigieux dans les œuvres
littéraires ; « faux » historique, comme la stèle de la famine sur l’île de Sehel
à la 1re cataracte*, qui se présente comme un décret de Djoser, premier roi
de l’Ancien Empire, mais qui a en réalité été gravée à l’époque ptolémaïque.
On remarque aussi l’inscription régulière de listes royales sur les murs des
temples (Akh-ménou de Thoutmosis III à Karnak, temple de Séthy Ier à
Abydos, etc.). Il s’agit là encore pour le roi régnant de rendre hommage aux
rois ancêtres et de légitimer son propre règne.
La royauté et les élites ont également largement recours aux références
visuelles au passé. De nombreux monuments présentent un style et une ico-
nographie marqués par un certain archaïsme*, c’est-à-dire des références
conscientes et recherchées à l’art de périodes jugées prestigieuses. L’art, outil
de communication de l’idéologie parfaitement maîtrisé par la royauté, est
d’ailleurs employé pour présenter la vision d’un « temps immobile ». C’est la
stabilité qui est mise en avant, jamais le changement : du protodynastique à
l’époque romaine, on retrouve les mêmes images du roi égyptien massacrant
les ennemis ou faisant offrande aux dieux.
Référence au passé donc, mais aussi volonté de le dépasser, comme l’in-
dique le recours fréquent, dans les textes royaux et privés, à des expressions
comme « cela n’avait jamais été fait auparavant ». Les Égyptiens semblent
en effet avoir conjugué deux visions du temps : une vision linéaire et une
vision cyclique. Cette dernière est la plus évidente lorsque l’on examine les
10
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de plusieurs points de vue, de plusieurs aspects d’un même objet ou être, sans
tenir compte d’une quelconque unité de temps ou de lieu. Une image n’est
donc pas la copie objective de la réalité mais un discours analytique sur cette
réalité. Cette multiplicité des points de vue au sein d’une image est à prendre
en compte pour la commenter. L’espace graphique devient ainsi « pure intel-
lectualité, organisation d’idées-images, combinaison de signes graphiques
possédant un contenu déchiffrable. L’apparente incohérence résulte seule-
ment de l’inaptitude de l’image à s’exprimer selon la structure spatio-tempo-
relle étrangère qu’on voudrait lui imposer » (R. Tefnin). Lire et comprendre
une image égyptienne suppose de prendre en compte le contenu symbolique
de chaque élément mais aussi la façon dont ces éléments sont structurés les
uns par rapport aux autres.
Le milieu égyptien
18
Dé
ser
Désert Libyque 0 2000 km
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ab
iqu
e
ÉGYPTE
ARABIE SAOUDITE
1 MER
Lac Nasser
ROUGE
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5
IL
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Khartoum YÉMEN
ra
ÉRYTHRÉE
NIL
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BLE
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SOUDAN Golfe
C
Lac d’Aden
Tana
ÉTHIOPIE
SOUDAN
DU
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SUD
RÉPUBLIQUE Lac
Turkana
DÉMOCRATIQUE SOMALIE
DU CONGO Lac
Albert KENYA
OUGANDA
Lac
Édouard Lac
Victoria
Lac RWANDA
Kivu
TANZANIE
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Anciennes levées
Plaine inondée durant la crue
40 m
Hautes
eaux
Dépôts alluviaux
35 m
(Holocène)
Basses
eaux 30 m
Sables et graviers pléistocènes
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Gezira
Zone marécageuse
Sédimentation Mai Juin Juil Ao Sept Oct Nov Dec Jan Fév Mars Avr
700
600 Apport de
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Le milieu égyptien
Gezira
Zone marécageuse
Sédimentation Mai Juin Juil Ao Sept Oct Nov Dec Jan Fév Mars Avr
700
Fig. 3.2 Coupe morphologique du sud du Delta
600 Apport de
l’Atbara
Débit en millions de m3/jour
À partir du xixe siècle, le cours du fleuve et son régime ont été progres-
sivement modifiés par des travaux500 de grande ampleur, qui ont culminé avec
la construction du Haut-Barrage 400 d’Assouan entre 1960 et 1971. Dans un
contexte de forte croissance démographique, il s’agissait alors de rationaliser
l’agriculture égyptienne et d’augmenter
300 la surface cultivable tout en créant
Apport du
une source importante d’énergie électrique.
200
La dernière
Nil Bleu crue du fleuve a eu
lieu en 1964. La construction de ce qui était alors le plus grand barrage au
monde a noyé la Basse-Nubie sous100les eaux du lac Nasser, qui s’étend entre
Égypte et Soudan sur environ 500 km de long pour
Apport du Nilune
Blanc largeur moyenne
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600 Apport de
l’Atbara
Débit en millions de m3/jour
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Apport du
200 Nil Bleu
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