Sciences Du Langage Et Enseignement Des Langues

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Bibliographie non exhaustive :

 Pierre Martinez, La didactique des langues étrangères, PUF, 1996


 Oswad Ducrot et Jean-Marie Schaeffer, Nouveau dictionnaire encyclopédique des
sciences du langage, Editions du seuil, 1995
 Pascal Zesiger, Écrire : approches cognitive, neuropsychologique et développementale,
Paris, PUF, 1995
 Bruno Germain, Le choix d'une méthode d'apprentissage de la lecture : Un débat, des
querelles et des perspectives, Dans Le Débat 2005/3 (n° 135), pages 188 à 193
 Jane Arnold, Comment les facteurs affectifs influencent-ils l’apprentissage d’une
langue étrangère ?, Dans Etudes de linguistique appliquée, 2006
 Poulet Alain, Questions sur les Dys-, des réponses, Tom Pousse, 2016.
 Tupula Kabola Agathe, Je bégaie… laissez-moi parler!, Éditions du CHU Sainte-Justine,
2018

Introduction

L'enseignement des langues a parcouru un long chemin au fil des décennies,


passant d'approches traditionnelles à des méthodologies plus modernes et
efficaces. L'une des clés de cette transformation est l'intégration des sciences du
langage, une discipline académique qui explore la nature, la structure et
l'acquisition des langues humaines. Dans ce cours, nous allons examiner
comment les sciences du langage ont influencé et amélioré l'enseignement des
langues.
Les sciences du langage englobent un large éventail de domaines, notamment la
psycholinguistique, la sociolinguistique, et la pragmatique, pour n'en citer que
quelques-uns. Ces disciplines se penchent sur les aspects variés des langues
humaines, de la grammaire et du vocabulaire à la manière dont les langues sont
utilisées dans la communication quotidienne.
Les sciences du langage jouent un rôle central dans l'enseignement des langues
dans la compréhension des structures linguistiques, la comparaison entre les
langues, la phonétique et la prononciation.
En effet, la linguistique permet aux enseignants de comprendre les structures
grammaticales et lexicales d'une langue en profondeur. Cette connaissance
précieuse guide la conception de programmes d'enseignement et de matériel
pédagogique efficaces.
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La linguistique comparée aide, par ailleurs, les enseignants à mettre en évidence
les similitudes et les différences entre la langue maternelle des apprenants et la
langue cible, ce qui facilite la prévision des erreurs courantes et la
personnalisation de l'enseignement.
La phonétique, une branche de la linguistique, permet de comprendre la
production et la perception des sons dans une langue. Cela aide les enseignants à
enseigner une prononciation correcte et à remédier aux accents étrangers.
Il est important de rappeler également que la psycholinguistique se penche sur la
manière dont les individus acquièrent et traitent les langues. Elle offre des idées
cruciales pour l'enseignement des langues.
La psycholinguistique examine les mécanismes mentaux impliqués dans
l'apprentissage d'une langue. Les enseignants peuvent utiliser ces connaissances
pour élaborer des stratégies pédagogiques qui optimisent le processus
d'acquisition linguistique.
Elle permet de comprendre comment les apprenants traitent l'information
linguistique, et permet aux enseignants de concevoir des activités et des exercices
qui correspondent aux processus cognitifs naturels.
La sociolinguistique, quant à elle, se concentre sur les aspects sociaux de la
langue, tels que les dialectes, les variations et les attitudes linguistiques. Elle
permet de comprendre les variations linguistiques et les normes culturelles. Elle
aide les enseignants à sensibiliser les apprenants à la diversité linguistique et
culturelle.
La sociolinguistique souligne également l'importance de l'adaptation linguistique
en fonction du contexte social. Cela aide les apprenants à développer des
compétences de communication inter linguistique appropriées.
En étudiant comment le langage est utilisé dans la communication quotidienne, la
pragmatique exerce une influence significative sur l'enseignement des langues en
favorisant une utilisation fonctionnelle et contextuelle. L'enseignement basé sur la
pragmatique met l'accent sur la compétence communicative, en enseignant aux
apprenants comment utiliser la langue de manière appropriée dans différentes
situations. Elle tient compte de la communication non verbale, comme les gestes

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et les expressions faciales, qui sont essentiels pour la compréhension
interculturelle.

Les sciences du langage jouent un rôle vital dans l'enseignement des langues.
Elles fournissent aux enseignants des connaissances essentielles sur la structure,
l'acquisition, la communication et la diversité des langues, ce qui permet de créer
des environnements d'apprentissage plus efficaces et adaptés.
Voici un aperçu du plan du cours :
 Théories de l'apprentissage des langues : Cette section explorera les
principales théories sous-tendant l'apprentissage des langues, y compris le
behaviorisme, le cognitivisme, le constructivisme, et les approches plus
contemporaines comme l'approche socioculturelle. Cette compréhension
sera essentielle pour une approche critique de l'enseignement et de
l'apprentissage des langues.
 Acquisition et développement du langage : Cette section se penchera sur
le processus naturel par lequel les êtres humains acquièrent leur première
langue. Nous examinerons spécifiquement les phases non-linguistique et
linguistique de ce processus, ainsi que les théories clés telles que la théorie
de l'innéisme de Chomsky et la théorie de l'interactionnisme social de
Vygotsky.
 Les facteurs responsables de l'apprentissage d'une langue seconde ou
étrangère : Dans cette section, nous examinerons les facteurs qui
influencent l'apprentissage réussi d'une langue supplémentaire, qu'il
s'agisse d'une langue seconde ou étrangère. Les sujets abordés incluront
l'âge d'acquisition, la motivation, l'input linguistique et les stratégies
d'apprentissage.
 Acquisition et apprentissage du langage écrit : Cette section se
concentrera sur le développement de la lecture et de l'écriture chez les
individus. Nous explorerons les différentes étapes de l'acquisition de la
lecture, les théories de la lecture et de l'écriture, ainsi que les méthodes
d'enseignement efficaces pour développer ces compétences.

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 Les troubles de la parole et du langage : Enfin, nous plongerons dans le
domaine des troubles de la parole et du langage, en étudiant les différents
types de troubles, leurs causes potentielles, et les approches d'évaluation et
d'intervention pour aider les individus qui en souffrent.

I. Linguistique et didactique
La didactique a mis longtemps à se dégager de la discipline de référence
primordiale que la linguistique a constituée pour elle.
La didactique se construit d’une part sur la méthodologie des langues étrangères,
d’autre part sur la linguistique appliquée à l’enseignement des langues
étrangères. La méthodologie est alimentée par la sociologie, la psychologie, les
sciences de l’éducation, l’idéologie, la politique, la technologie de l’éducation etc.
Quant à la linguistique appliquée à l’enseignement des langues étrangères, elle
est irriguée par la phonétique, la grammaire, la lexicologie, la sémantique, la
stylistique etc.
Il reste clair que l’objet à enseigner est bien une langue, et comme c’est l’objet
même de la description linguistique, le didacticien a tout à gagner à ce travail
conduit à côté du sien.
Il n’est pas niable, en effet, qu’une bonne description de la langue comme
système, sous l’angle de ces composantes (phonétique, morphologie, lexique,
syntaxe, sémantique), ne peut qu’aider le didacticien. Mais la question est de
savoir ce qu’est une bonne description.
Il faut distinguer qu’il y a une langue usitée dans la communication sociale, une
langue décrite comme système, une langue enseignée et une langue apprise.
La vision de la langue dans la linguistique moderne se caractérise par l’absence
de jugement sur la langue, la prise en compte des variétés sociales et régionales,
une vision structurale d’un système où jouent des contrastes et des oppositions,
une dualité langue et parole, un système qui s’oppose à l’usage, le code au
message, le langage au comportement verbal.
Aujourd’hui, on met de plus en plus l’accent sur des facteurs extérieurs liés à la
prise de décision éducative et à la définition d’objectifs d’enseignement pour

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construire l’architecture de l’enseignement à partir de contenus. Les choix relatifs
à ces contenus touchent à l’oral, à la grammaire, à l’analyse fonctionnelle, aux
activités communicatives, à la civilisation et à des formes d’éducation plus
générale visant l’approche de la langue (apprendre à apprendre, s’autonomiser,
etc.).

II. Théories de l’apprentissage des langues


1. Les théories du langage et leurs implications

L’enseignement des langues présuppose à la fois une théorie du langage et une


analyse des systèmes linguistiques à enseigner, car la représentation de l’un et de
l’autre influence la conception de l’enseignement.
La psychologie moderne et la psycholinguistique nous proposent plusieurs
grandes manières d’envisager la question du langage.
a) Les théories mécanistes font de l’activité langagière le résultat d’une chaine
de réactions matérielles de cause à effet. Cette activité comportementale a
été schématisée dans la formule « stimulus-réponse-renforcement »
(Skinner) et évoque le fameux réflexe conditionné du chien Pavlov. Elle
évacuerait dans sa forme extrême l’hypothèse d’une fonction symbolique
du langage humain et ferait envisager l’apprentissage comme une situation
optimale pour la production de réponses automatisées. Un stimulus suscite
une réponse (par exemple : en français « il faut que » entraîne un mode
subjonctif). La répétition de ce processus crée un renforcement et une
naissance d’un automatise.
b) Les théories mentalistes ou néo rationalistes insistent, elles, sur le caractère
« naturel » de l’acquisition de la langue première. L’existence de capacités
innées qui seraient spécifiques à l’espèce humaine et à l’apprentissage
linguistique (Pour « Noam Chomsky, un « dispositif d’acquisition du
langage ») autoriserait, à partir de la parole en circulation dans le milieu
extérieur, l’émergence d’une compétence, la construction d’un système de
règles intériorisé et à validité « universelle ».

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Deux hypothèses, moins radicalement en conflit, ont encore marqué la
réflexion actuelle.
c) D’abord, la théorie « constructiviste » de Jean Piaget : s’il y a dispositif,
c’est un dispositif cognitif général et le développement du langage doit être
traité comme celui de la fonction de représentation propre à l’espèce
humaine dans son ensemble. Il manifeste donc à la fois l’importance de
facteurs internes, biologiques, et une forte intégration à la construction
progressive et globale de l’individu dans ses rapports avec son milieu.
d) En deuxième lieu, la perspective sociocognitive adoptée par le psychologie
biélorusse Vygotsky : sans nier que « les formes supérieures de
comportement culturel ont des fondements naturels », il montre comment
des « schèmes représentatifs » se bâtissent chez l’enfant dans l’interaction
avec le milieu physique, de même que des « schèmes communicatifs » le
font au contact du milieu social.
On fait souvent référence à un autre concept élaboré par Vygotsky, celui de
« zone proximale de développement ». L’expression désigne la « différence
entre le niveau de résolution de problème atteint avec l’aide d’adultes et
celui atteint seul ».

2. L’ancrage social des langues


Comme les monnaies, les langues ont des valeurs. Il y a une « économie
des échanges linguistiques » (Bourdieu, 1982), qu’il n’est pas sans effet de
connaitre, car enseigner ou apprendre, c’est aussi commercer (le commerce,
c’est aussi, au sens classique, les relations, l’échange). Quelques définitions
s’imposent.
On appellera langue première (L1) d’un individu tout simplement celle qu’il
a acquise en premier, chronologiquement, au moment du développement
de sa capacité de langage.
Sera, par ailleurs, langue seconde pour le même individu toute langue qu’il
aura apprise ensuite, par exemple à l’école et non plus dans le milieu
proche où il a été élevé.

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Dans une autre acception, « langue seconde » prend un sens collectif. On
parle parfois de statut spécial lié par exemple à une histoire coloniale et un
environnement favorable : une « logistique » médiatique, scolaire,
administrative, commerciale qui favorise l’emploi de la langue seconde
( Cuq, 1989). C’est le statut du français dans plusieurs pays d’Afrique ou
dans les départements et collectivités d’outre-mer. Dans plusieurs cas, la
langue seconde a accédé à l’appellation de « langue officielle » à côté ou à
la place des langues nationales (anglais en Afrique orientale, français en
Haïti).
En résumé, ce qui distinguera une langue étrangère, c’est son caractère de
langue apprise après la première et sans qu’un contexte de pratique sociale
quotidienne ou fréquente en accompagne l’apprentissage. Pour s’en tenir à
un exemple, un Marocain peut avoir dans son « répertoire verbal »
l’amazigh comme langue première, et l’arabe dialectal, l’arabe littéral et le
français comme langues secondes, l’anglais ou l’espagnol, appris au lycée
comme langues étrangères proprement dites.

3. La psycholinguistique
L’étude des processus psychologiques par lesquels les sujets humains élaborent et
mettent en œuvre le système de leur langue constitue un domaine de recherche
relativement récent.
L’acte de naissance de la psycholinguistique – ainsi dénommé en 1954 par
Osgood et Sebeok- est un séminaire à l’université Cornell réunissant au début des
années cinquante des psychologues et des linguistes désireux de définir un
champ de recherche commun.
La discipline issue de cette rencontre a depuis lors connu un essor considérable,
s'est diversifiée, réorganisée, spécialisée et a développé des techniques
d'investigation originales, devenant ainsi l'une des sciences cognitives les plus
vivantes et les plus riches. Les opérations impliquées dans la compréhension ou
la production les messages verbaux, constitutives de l'activité langagière, ne sont
en général pas directement accessibles à la simple observation ni à l'introspection.

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Pour les analyser, la psycholinguistique dispose de deux principales voies
d'approche :
L’étude expérimentale du traitement du langage chez l’adulte, qui permet
de distinguer et manipuler des variables et d'en déduire certaines lois
d'organisation des conduites langagières ; et l'approche développementale
centré sur l'acquisition du langage chez l'enfant, qui permet de découvrir
certains ordres d'acquisition et d'en déduire des niveaux de complexité. À
ces deux principales approches s'ajoute en outre celle de la
neurolinguistique qui, s’attachant aux aspects pathologiques du langage,
fournit des éléments tant sur son organisation cérébrale que sur son
fonctionnement.

a. Les tendances générales de la psycholinguistique

Pour que la psycholinguistique se constitue en discipline scientifique, il fallait non


seulement que la linguistique se débarrasse des considérations d'ordre
psychologique ; mais que la psychologie élabore des concepts descriptifs et
explicatifs du comportement compatibles avec une activité complexe que l'activité
langagière.
Le behaviorisme fondé en 1924 par Watson, en constituant la psychologie
expérimentale comme l'étude du comportement observable, avait créé certaines
des conditions nécessaires à cette élaboration (attachée notamment au nom de
Skinner), mais en avait aussi singulièrement borné le développement. Le langage
est en effet dans cette perspective réduit à n'être qu'un ensemble de réponses
verbales associées à des situations types, selon le schéma stimulus-réponse
caractéristique du réflexe conditionné. Or, si le schéma du conditionnement peut
expliquer la formation de certaines habitudes verbales, il ne peut rendre compte
de la spécificité de l'activité langagière dont le propre est d'être productive,
structurante et structurée.
Bien que les théories médiationnistes aient tenté de dépasser le modèle S-R en
introduisant la notion de « variables intermédiaires », c'est surtout sous l'égide de
la théorie de l'information, issue des travaux de Shannon, que va se développer la

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discipline nouvelle définie par Osgood et Sebeok. Le langage va être considéré
comme un comportement de communication, et la psycholinguistique comme
l'étude des processus de codage et de décodage des messages verbaux. L'une des
préoccupations principales des travaux de cette époque est ainsi d'évaluer les
effets de la structure probabiliste du code linguistique sur les performances des
sujets dans différentes tâches d'identification, de rappel, d'anticipation, etc.
Les insuffisances de cette approche apparaîtront toutefois assez vite. Comme le
souligne Chomsky - dont les Syntactic Structures paraissent en 1951 -, il est patent
que les processus de codage et de décodage doivent fonctionner sur des messages
sans cesse nouveaux, et que les modèles d’« automates finis » ne sont pas
compatibles avec le caractère productif des conduites langagières. Et ainsi la
deuxième époque de la psycholinguistique est dominée par le modèle chomskiste
de la grammaire générative qui va constituer tout au long des années soixante la
base quasi exclusive des travaux psychologiques, attachés à mettre en évidence la
réalité psychologique des transformations et le rôle de la structure profonde dans
le traitement du langage. Le bilan de ces travaux est assez négatif, puisque la
réalité psychologique des transformations n'a pu être établie, pas plus que
l'existence d'une structure profonde syntaxique, mais du moins les psychologues
y ont-ils trouve l’idée qu'on pouvait chercher à construire des modèles du
fonctionnement de l'esprit humain sans retomber dans les illusions du
mentalisme ou de l'introspection.
À partir des années soixante-dix, la psycholinguistique parfois dite « de
troisième génération » va réagir contre la domination du modèle générativiste et
se donner comme objectif de construire un (ou des) modèle(s)
psycholinguistique(s) du locuteur, en centrant davantage sa recherche sur
l'analyse des processus proprement psychologiques sous-jacents à l'utilisa-fion du
savoir linguistique. La psycholinguistique se trouve ainsi plus étroitement
intégrée à l'étude des processus cognitifs, et analyse le traitement du langage en
liaison avec d'autres systèmes cognitifs tels que perception, mémoire,
raisonnement. Après avoir accordé un privilège quasi exclusif à l'examen du
traitement syntaxique, la psycholinguistique, d'une part s'est engagée dans

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l'étude des niveaux élémentaires du traitement - par exemple des mécanismes
présidant à la perception de la parole et à l'identification des mots -, et a d'autre
part intégré de plus en plus à son champ d'investigation les aspects sémantiques
et pragmatiques du langage et cherché à rendre compte non seulement du
traitement des phrases mais aussi d'unités plus larges telles que les organisations
discursives. A travers la diversité des objets, ainsi qu'à travers aussi la diversité
des modèles dont témoigne par exemple le débat toujours ouvert entre les tenants
de la modularité et ceux de modèles Interactifs comme le connexionnisme,
l'approche en termes de traitement de l'information s'est progressivement
imposée.
La psycholinguistique aujourd'hui s'attache à déterminer la nature et le
mode de fonctionnement des opérations mobilisées dans le traitement des
différents composants du langage, phonologique, lexical, syntaxique, sémantique
ou pragmatique.

III. Acquisition et développement du langage


L’intérêt pour le problème de l’acquisition du langage est ancien, pendant
longtemps lié aux débats sur l’origine de l’homme et des langues. En effet, la fin
des années 1950 marque un tournant dans l’étude de l’acquisition du langage,
révolutionnée par l’apparition de nouveaux instruments théoriques et
méthodologiques.
L’acquisition du langage devient l’objet direct et central d’une branche de la
psychologie cognitive, la psycholinguistique développementale, qui, s’appuyant à
la fois sur les analyses de la linguistique, les résultats de la neurobiologie et les
modélisations de l’intelligence artificielle, apporte quant à elle des données
comportementales de plus en plus riches et variées sur le développement
langagier de l’enfant.
Ces données montrent une remarquable homogénéité dans les moments et l’ordre
d’apparition des principales étapes de l’acquisition du langage. Tous les enfants
du monde, dans des conditions normales, acquièrent l’essentiel du système
linguistique de leur langue maternelle en un temps relativement court : la

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constitution du système linguistique commence vers la fin de la première année,
avec la production des premiers mots identifiables, et peut être estimée
opérationnelle vers 4-5 ans. A cet âge en effet, l’enfant maîtrise l’essentiel du
système phonologique, connaît à peu près le sens et les conditions d’emploi de
plusieurs milliers de mots, et utilise correctement la plupart des formes
morphologiques et syntaxiques de sa langue. Cela ne signifie cependant pas que
le processus d’acquisition du langage n’ait pas commencé bien avant la
production des premiers mots, ni qu’il soit terminé une fois effectué l’installation
des contraintes fondamentales de la langue. Prenant appui sur un équipement
neurobiologique approprié, le développement pré linguistique de la première
année de la vie crée les conditions d’apparition du système linguistique
proprement dit. D’autre part, bien que ce système linguistique soit pour
l’essentiel constitué vers 4-5 ans, il continue à se réorganiser et s’affiner sous
l’effet d’acquisition tardives qui se poursuivent jusqu’à la préadolescence au
moins.

1. Le développement pré-linguistique et l’acquisition de la phonologie

Durant la première année de vie, différentes capacités communicatives et


cognitives se développent de manière convergente pour former ver 8-10 mois un
ensemble de conditions préalables et nécessaires à l’émergence de la compétence
linguistique proprement dite. Le développement du langage s’appuie en effet sur
une forte motivation à communiquer verbalement avec autrui, motivation
partiellement innée mais s’enrichissant au cours de la première année.

Est nécessaire aussi le développement de la capacité à catégoriser les objets, base


de la dénomination et de la référence. Conjointement des progrès sont effectués
dans la capacité d’imitation, nécessaire à la reproduction des nouveaux patterns
vocaux et gestuels, ainsi que dans la capacité de mémoire à court terme. Mais
c’est surtout le développement dans la capacité à percevoir et à produire les sons
de parole – en d’autres termes le développement phonologique – qui est le

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précurseur le plus direct du langage, puisque le son est le véhicule privilégié du
langage articulé.

Des progrès considérables ont été faits durant les trente dernières années dans
l’étude de la perception et de la production de la parole chez les très jeunes
enfants. Au début, des années soixante-dix, Eimas a été l’un des premiers à
étudier la perception du langage chez le nourrisson en utilisant la technique de la
succion non nutritive ( le bébé a tendance à téter plus vigoureusement lorsqu’il
entend un stimulus nouveau ou intéressant), et à montrer ainsi que les bébés de
quelques mois discriminaient des contrastes phonétiques subtils et avaient, à
l’instar des adultes, une perception catégorielle des sons de la parole.
Les recherches menées par la suite, par Melher et ses collaborateurs notamment,
suggèrent que les bébés sont capables de faire des distinctions fines entre les
stimuli langagiers : ils réagissent différemment à deux langues comme le français
et le russe, et manifestent une préférence pour les sons de leur langue maternelle.
Ils sont particulièrement sensibles aux indices globaux, en particulier aux indices
prosodiques comme l’intonation, mais semblent aussi capables de discriminer
entre des syllabes différentes.
Les courants actuels de recherche sur la perception se tournent vers l’exploration
de ce qu’on a parfois appelé « l’apprentissage par oubli ». En effet, les bébés sont
potentiellement capables, à la naissance ou dans les premières semaines de la vie,
de percevoir tous les contrastes phonétiques utilisés dans les langues naturelles, y
compris ceux qui sont inutiles dans leur langue maternelle. Le bébé japonais par
exemple perçoit le contraste entre /ra/ et /la/ que les adultes ont beaucoup de
difficultés à entendre parce qu’il ne fait pas partie des oppositions pertinentes du
japonais. On peut donc se demander quand et comment les enfants perdent cette
capacité initiale pour s’orienter vers la sélection des contrastes pertinents dans
leur langue, passant ainsi de la flexibilité de départ à des structures plus rigides
mais plus efficaces. Il semble que vers 8-12 mois cette perte sélective, ou
inhibition de la perception des sons non pertinents, soit effectuée.

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L’étude de la production de la parole est plus ancienne, mais a bénéficié
des progrès récents de l’analyse acoustique. On sait depuis assez longtemps que
les enfants commencent entre 2 et 6 mois à produire des sons vocaliques, le /a/
étant généralement la première voyelle.
Le babillage canonique, avec intercalage de consonnes et souvent redoublement
syllabique (/dadada/) apparaît généralement vers 6-8 mois. Le système
phonologique se stabilisera vers 3 ans et la différenciation des phonèmes sera
achevée aux environs de 5 ans, encore que certaines constrictives sourdes et
sonores (f, s, ch, j) puissent n’être pas correctement co-articulées avant 7 ou 8 ans.
Cependant, le développement phonologique est aussi fortement influencé par
l’environnement – fréquence de certains mots dans la langue parlé dans
l’entourage de l’enfant- et par la structure phonologique de la langue en cours
d’acquisition. C’est entre 6 et 10 mois que les patterns sonores du babillage
prennent la forme de ceux de la langue apprise. Dès lors, le développement
phonologique est en interaction étroite avec le développement lexical et
grammatical de l’enfant.
La constitution du système linguistique
L’élaboration du système linguistique consiste pour l’enfant en l’installation et
l’intégration des contraintes fondamentales de sa langue. Cette élaboration des
contraintes fondamentales de sa langue. Cette élaboration résulte de l’interaction
entre l’affinement des compétences communicatives, l’ajustement, du contrôle
phonologique, le développement du lexique, et la mise en place des principales
contraintes grammaticales. On considère souvent qu’elle est marqué par quatre
étapes clefs :
 Le début de la compréhension
 La production des premiers mots
 L’émergence de la combinatoire
 La grammaticalisation

a. Le début de la compréhension

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On admet généralement que les premières preuves systématiques de la
compréhension de mots sont données vers 8-10 mois, lorsque les enfants
répondent de manière appropriée à certaines demandes ou interdictions.

b. La production des premiers mots


Le début de la production de mots est un peu plus tardif, puisque les premiers
mots conventionnels apparaissent généralement vers 11-13 mois. L’augmentation
du vocabulaire productif et réceptif est relativement lente jusqu’à la fin de la
seconde année, pour être marquée vers 18-20 mois par une rapide accélération
désignée par le nom d’« explosion du vocabulaire ». L’explosion du vocabulaire
s’accompagne d’un changement dans sa composition : aux noms servant des
fonctions d’étiquetage et de demande s’ajoute une proposition croissante
d’éléments prédicatifs tels que verbes et adjectifs, qui permettent l’attribution de
propriétés aux référents.
Deux phénomènes ont été souvent remarqués dans l’acquisition de ce premier
lexique, la sous-généralisation et surtout la surgénéralisation.
 La surgénéralisation lexicale consiste à appliquer une étiquette verbale à un
ensemble de référents plus large qu’il n’est d’usage dans la langue adulte :
l’enfant par exemple appelle « papa » tous les adultes de sexe masculin, ou
« chien » tous les animaux à quatre pattes.
 Processus inverse, la sous-généralisation consiste par exemple à associer le
terme « chaussure » aux seules chaussures de la mère.

c. L’émergence de la combinatoire
Les premières combinaisons de mots sont généralement observées vers 18-20
mois, coïncidant souvent avec l’explosion du vocabulaire. Elles marquent une
étape capitale dans la constitution du système langagier de l’enfant, puisque
l’aspect combinatoire est précisément une caractéristique essentielle du langage.
On a beaucoup étudié, chez des enfants acquérant des langues diverses, tant la
forme que le contenu de ces premières combinaisons de deux mots. Du point de
vue formel ces énoncés se caractérisent par l’absence de marquage
morphologique grammatical (pas d’inflexion, verbale ni de marques de genre

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ou de nombre), et par la rareté, sinon l’absence, de mots fonctionnels (articles,
prépositions, auxiliaires, conjonctions, pronoms), ce qui a valu au langage du
jeune enfant, essentiellement chargé sémantiquement, l’appellation de « langage
télégraphique ».

d. La grammaticalisation
Le début de la grammaticalisation traduit l’émergence de moyens
spécifiquement linguistique, et variables selon les langues, d’encoder les
significations. L’ordre des mots, la morphologie et un certain nombre de
structures syntaxiques sont les principaux indices formels qui servent à marquer
les relations grammaticales.
On peut être surpris de la rapidité avec laquelle le jeune enfant maîtrise les règles
séquentielles fondamentales de sa langue : dès 30 mois, la plupart des énoncés
sont correctement ordonnés. La mise en place des différents sous-systèmes
morphologiques et des structures syntaxiques s’effectue progressivement à partir
de 2 ans et se trouve pour l’essentiel réalisée vers 4-5 ans.
Par ailleurs, certains phénomènes observés au cours du développement
grammatical semblent très généraux, se retrouvant de manière analogue chez des
enfants qui acquièrent des langues différentes. Tel est le cas du phénomène de
surgénéralisation syntaxique. Il existe par exemple une étape de l’acquisition oû
l’on observe dans les productions spontanées de jeunes anglophones l’emploi de
formes verbales irrégulièrement incorrectes comme « goed » alors que les mêmes
enfants avaient précédemment produit la forme correcte « went » : formes
correctes et incorrectes coexistent ensuite pendant un certain temps avant que les
formes correctes ne soient définitivement adoptées. Les erreurs en partie
analogues des jeunes enfants français sont bien connues, et tout le monde s’est
réjoui d’entendre des « ils sontaient » ( au lieu de ils étaient) et autres « j’ai
prendu ».
Ces erreurs sont particulièrement intéressantes parce qu’elles suggèrent une
suite d’étapes acquisitionnelles : on considère communément que, dans une
première étape, l’enfant reproduit la forme correcte qu’il a globalement extraite

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de l’input et mémorisée telle quelle, tandis que, parvenu à une étape ultérieure, il
ne se contente plus d’imiter ce qu’il entend, mais se donne une règle – en
l’occurrence une règle de formation du passé- et généralise cette règle au-delà de
son champ d’application, produisant alors des formes irrégulières erronées
construites sur le mode des formes régulières.

IV. Les facteurs responsables de l’apprentissage d’une langue


seconde ou étrangère
1. Facteurs liés à l’apprenant
De nombreuses études montrent que la qualité des résultats dépend
largement des situations d’acquisition. Par exemple pour des enfants en classe
d’immersion de français mais qui vivent ailleurs dans un milieu anglophone,
l’absence de pairs natifs est un élément différenciateur important.
Pour l’adulte, l’âge auquel commence l’acquisition est un facteur
différenciateur.

a. Les styles d’apprentissage


Pour un large courant de la didactique moderne, certaines façons
d’apprendre sont régulièrement préférées par un individu, on peut alors
parler de style d’apprentissage.
Les styles d’apprentissage sont régulièrement liés aux styles cognitifs.
Parmi les typologies de styles d’apprentissage, les plus connues sont celle de
David Kolb et celle de Peter Honey et Alan Mumford.
Kolb distingue quatre styles d’apprentissage : le style convergent, le style
divergent, le style assimilateur et le style accommodateur. Ces modèles ont
été largement critiqués, notamment parce qu’il privilégie trop les dimensions
bipolaires. S’inspirant tout de même de Kolb, Honey et Mumfield conçoivent
les styles d’apprentissage :
 L’actif « aime s’engager dans de nouvelles expériences », est
« spontané à l’esprit ouvert : il agit d’abord et réfléchit ensuite ». Il
est « sociable », c’est-à-dire, qu’il « aime jouer un rôle actif en

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interaction avec d’autres personnes et résoudre les problèmes en
équipe ».
 Le réfléchi « aime prendre du recul pour réfléchir les situations, aime
étudier toutes les facettes d’une question avant de poser un geste »,
est « prudent » et accumule et analyse les données.
 Le théoricien, lui, aime organiser ses observations et les intégrer à
des système théoriques », est « perfectionniste et analytique »,
« détaché et rationnel », il « aborde un problème de façon verticale,
en suivant une démarche logique. Pour lui « suivre une démarche
systématique est très important lorsque des problèmes sont
abordés ».
 Le pragmatique aime mettre en pratique les nouvelles idées, a
l’esprit pratique et les deux pieds sur terre. Enthousiaste, il
s’intéresse vivement à l’application pratique des idées.
La définition de styles d’apprentissages a séduit de nombreux didacticiens
parce qu’elle a contribué de façon importante à étayer l’intuition qu’il y a des
différences entre les apprenants qu’il s’agit pour l’enseignant à la fois de les
reconnaitre et de les dépasser.

2. L’immersion ou le rôle du contexte informel (familial, social)


Le principe général de l’immersion est de tenter de recréer autant que possible
les conditions d’appropriation naturelle d’une langue. Cette image du bain
linguistique repose sur le constat que tout être humain, sauf cas pathologique,
développe ses capacités de langage à travers au moins une langue pour peu qu’il
bénéficie d’un environnement social convenable.
Comme il n’y a pas de raison que ce qui a marché une fois pour
l’appropriation de la langue maternelle ne prouve pas à nouveau ses capacités, le
principe d’une exposition aussi longue que possible à un environnement
linguistique donné est généralement et à juste titre considéré comme positif.
Fondée sur une simple pratique naturelle de bon sens, l’immersion
linguistique est cependant devenue une véritable méthodologie didactique qui
consiste à mettre un apprenant de la façon le plus large possible au contact de la
17
langue qu’il désire s’approprier : il s’agit de recréer dans la classe les conditions
d’appropriation qui prévalent hors de la classe. Autrement dit, l’immersion
consiste à faire entrer le plus possible des phénomènes réputés acquisitionnels
dans un espace prévu pour l’enseignement-apprentissage. On pourrait dire qu’il
s’agit de la recherche du mélange idéal entre acquisition et apprentissage.

3. Le rôle des facteurs affectifs


Parmi les facteurs qui conditionnent le plus l’apprentissage des langes
étrangères, il y a l’anxiété. Elle est principalement lié à des sentiments tels que la
peur, la frustration, la tension et l’insécurité.
En effet, l’anxiété peut conditionner de manière significative les objectifs
d’apprentissage. Certaines études ont montré qu’il existe une anxiété spécifique
liée à l’apprentissage d’une deuxième langue.
Une nouvelle langue est une langue « étrangère » et l’apprenant peut, en
conséquence, se sentir lui-même « étrange » quand il la parle. Ceci est notamment
vrai dans le cas des adolescents, qui se caractérisent par leur besoin d’être
acceptés par leurs pairs. De nombreux exemples montrent que des élèves sachant
prononcer correctement la langue cible font de productions incorrectes pour ne
pas se faire remarquer et être ainsi « comme les autres ». La situation est encore
plus compliquée si le locuteur ne s’identifie pas à la langue cible.
De toute évidence, l’anxiété est l’ennemie de l’apprentissage et il faut
s’efforcer de limiter son influence en classe.
La prise en compte de l’estime de soi conduit l’apprenant non seulement à un
mieux-être et à une meilleure disposition envers les apprentissages, mais elle peut
aussi produire de meilleurs résultats scolaires. D’un côté, si l’estime de soi est
basse, l’élève va croire qu’il manque de capacité, et il va, donc, refuser de faire
l’effort nécessaire à l’apprentissage d’une nouvelle langue. D’un autre côté, les
croyances négatives sur soi-même l’empêcheront de se concentrer sur les tâches
didactiques à réaliser pour pouvoir apprendre, car une grande partie de ses
énergies cognitives seront dépensés à nourrir des préoccupations concernant son
manque de capacité ou de valeur.

18
Les attitudes des apprenants peuvent se rapporter à la langue elle-même, à la
communauté des locuteurs de la langue, à l’intérêt ou la valeur de l’apprentissage
de la langue, etc. Les attitudes sont favorables ou défavorables à des degrés
divers ( elles représentent ce que l’on aime ou l’on déteste) et tendent à conserver
une certaine stabilité, même si elles peuvent subir des modifications. Les
attitudes sont importantes parce qu’elles sont des antécédents des
comportements, prédisposent l’élève à agir d’une manière ou d’une autre, à faire
un effort suffisant pour apprendre la langue ou à refuser de la faire. On s’accorde
généralement pour dire que les attitudes à l’égard de différents aspects de la
langue cible influencent la réussite dans son apprentissage et que c’est pour cela
qu’elles méritent d’être prises en compte, même si leur modification n’est pas
évidente.

V. Acquisition et apprentissage du langage écrit


1. Les stades d’acquisition du langage écrit (logographique,
alphabétique et orthographique)
Divers modèles ont été proposés pour rendre compte de l’acquisition du
langage écrit. Ceux-ci ont été généralement conçus pour décrire l’acquisition de la
lecture, avec le postulat plus ou moins explicite que l’acquisition de l’orthographe
se conformerait aux mêmes principes. Nous prendrons appui ici sur le modèle
développé par Frith.
Frith décrit trois étapes successives communes à l’acquisition de la lecture et à
celle de l’orthographe.
La première appelée logographique correspond à la reconnaissance
instantanée de mots familiers sur la base de certaines caractéristiques graphiques
de ces mots. Cette reconnaissance est globale et ne tient pas compte de l’ordre des
lettres dans le mot. Par contre, les propriétés spatiales du mot ( le type de
caractères, le « logo ») ainsi que le contexte semblent jouer un rôle important dans
les capacités de l’enfant à identifier le mot écrit. Cette stratégie peut s’appliquer à
un vocabulaire qui se limite à quelques dizaines, voire quelques centaines de
mots.

19
L’étape suivante, dénommée alphabétique, correspond à la connaissance et à
l’utilisation des correspondances phonèmes-graphèmes. Les mots sont décodés
analytiquement, lettre par lettre. Cette stratégie permet de prononcer toutes les
séquences écrites (mots et pseudo-mots), mais pas nécessairement de manière
appropriée si les mots contiennent des ambiguïtés ou des irrégularités.
La troisième étape, dite orthographique, se traduit par une analyse des mots
en unités orthographiques en l’absence de conversion phonologique. Ces unités
sont représentées en tant que séquences de lettres abstraites. Elles sont de nature
morphémique et peuvent se combiner pour former de nouveaux mots. Les deux
dernières stratégies peuvent être mises en relation, respectivement, avec les voies
phonologique (procédure d’assemblage, stratégie alphabétique) et lexicale
(procédure d’adressage, stratégie orthographique).
Avec ce modèle, Frith tente de rendre compte du développement tant de la
lecture que de l’orthographe.

2. Les méthodes d’apprentissage de la lecture (méthodes globale,


syllabique et mixte)
Par « méthode syllabique », on entend une approche de l'écrit par la
découverte des lettres et de leurs combinaisons, afin de déchiffrer la langue. On
part ainsi du code écrit, les lettres composant des syllabes, pour faire des mots,
qu’on apprend à « oraliser ». On combine et on déchiffre. La première erreur de
cette « méthode » est de partir des lettres qu’on nomme, pour construire des
syllabes écrites (bé ? a = ba), ce qui est très artificiel pour un enfant qui n’a
pas encore l'habitude de l'écrit. Mais son défaut principal repose surtout sur le fait
que la méthode affirme que savoir déchiffrer suffit pour savoir lire, niant par-là
l'importance incontournable de l'apprentissage de la compréhension, de la
construction du sens et de l'étude de la structure des phrases et des textes.
Par « méthode globale », on entend l'entrée dans l'écrit par l'immersion dans
les textes. En réaction à la méthode syllabique, cette démarche se focalise sur le
principe qu’il faut travailler le sens des textes, même si le résultat demeure
approximatif. Le terme de « global » renvoie, in fine, à la perception « globale » du
sens du texte, par tâtonnement et approximations successives : peu importe de
20
« reconnaître » tous les mots, il faut se « faire une idée » du sens général de ce qui
est lu. On voit où le bât blesse : le déchiffrage des mots n’a plus d’importance
pour une telle forme d’accès au sens ; il est même rejeté.
La « méthode mixte » va donc naître dans les années 1980 et se développer
largement. Elle est supposée mettre tout le monde d’accord, en piochant dans les
deux méthodes disponibles, un peu de « globale » et un peu de « syllabique ». En
fait, les méthodes mixtes ont aussi connu des variantes ; au moins deux.

VI. Les troubles de la parole et du langage


Les sciences cognitives étudient les structures et les activités psychologiques
dont la fonction est la connaissance.
En médecine le préfixe dys- indique un dysfonctionnement primitif,
intervenant d’emblée, à différencier du préfixe a- (« pas ou « sans »), faisant
référence à la perte de quelque chose d’acquis.
L’aphasie représente la perte secondaire du langage oral acquis ; la dysphasie
l’anomalie primaire du développement du langage. « Dys-» s’applique donc
précisément à la situation de troubles d’apprentissages liés à une défaillance
apparue lors du développement d’une fonction cognitive. Mais « dys » renvoie
aussi à la notion de « spécificité ».

a. La dyslexie
Le trouble sévère et persistant en langage écrit est nommé dyslexie.
Dyslexie nomme un trouble grave et durable de l’identification des mots écrits.
Mais le langage écrit concerne à la fois la lecture et la production d’écrits.
La transcription écrite est également impactée par le trouble dyslexique. On
parle habituellement de « dyslexie-dysorthographie ».
 Les troubles de la lecture peuvent avoir pour origine des troubles
cognitifs spécifiques divers. Ce sont très souvent les capacités de
discrimination et de conscience phonologiques qui sont responsables
du trouble d’identification des mots écrits : l’enfant peine à retrouver
les sons « cachés derrière les lettres » (c’est la dyslexie « classique », dite
« phonologique »). Mais un trouble grave et persistant de

21
reconnaissance des lettres, de saisie d’un nombre suffisant de lettres
d’un coup, d’organisation des mouvements oculaires qui permettent de
passer d’un mot à l’autre ou d’une ligne à la suivante, peut perturber
gravement et durablement la lecture. Tout comme un trouble grave et
persistant de la mémoire de travail ou de la mémoire à long terme qui
est sollicitée pour la lecture des mots « irréguliers » (monsieur, femme,
paon…) ou présentant des lettres « muettes » (huit, bonheur, chat). Elle
est indispensable à la mémorisation des règles.

b. La dysphasie

Il s’agit d’un trouble spécifique, grave et durable, de la compréhension et/ou de


l’élaboration du langage oral satisfaisant aux critères de dys-. C’est un trouble
spécifique de la communication verbale. En revanche, les enfants dysphasiques
conservent indemnes leurs fonctions non-verbales.
C’est un trouble spécifique du développement des structures cérébrales
impliquées dans la cognition linguistique, impliquant un ou plusieurs système ou
sous-système au sein des fonctions linguistiques : phonologie, syntaxe, lexique,
pragmatique etc.
 L’atteinte de la compréhension du langage ( ou dysphasie réceptive),
avec conséquences obligées sur le développement de l’expression
 Les dysphasies expressives : les plus fréquentes concernent les enfants
déficitaires dans les domaines de la phonologie et de la syntaxe. Le plus
souvent l’enfant parle peu, de façon « télégraphique », utilise les vernes
à l’infinitif et peu de mots de liaison. Le déficit de communication
verbale perturbe la relation aux autres et l’enfant est souvent considéré
comme un enfant timide.
 D’autres dysphasies expressives concernent le lexique avec un sévère
« manque du mot ». En général les adultes ont une assez grande
tolérance pour ce trouble d'accès au lexique. Mais ce trouble peut
malheureusement s’avérer grave de conséquences, il peut, par exemple,
s’accompagner d’une dyslexie-dysorthographie sévère.

22
 Une autre forme de dysphasie concerne la programmation
phonologique, avec un enfant cette fois très fluent, mais s’exprimant
dans un jargon parfois incompréhensible.
Une des caractéristiques de l’enfant dysphasique est que, malgré le trouble
structurel du langage, il parvient très souvent à être correctement informatif.
Dans la très grande majorité des cas, pour accroitre l’informativité ( c’est-à-dire la
capacité à transmettre des informations), l’enfant utilise le langage non-verbal : il
montre, prend l’adulte par la manche pour l’amener vers ce qu’il souhaite, mime,
utilise un dessin etc.

c. Le bégaiement

Le bégaiement est un trouble d’exécution de la parole ayant une origine


neuromusculaire, c’est-à-dire que le trouble concerne les commandes nerveuses
des muscles impliqués dans la production de la parole. Il n’affecte pas le langage,
qui correspond aux concepts linguistiques nous permettant de formuler nos
idées. Ainsi, le bégaiement, contrairement au trouble du langage, n’affecte pas la
connaissance du sens des mots, le choix des mots, la capacité à organiser ces mots
en phrases ou la façon de combiner ces phrases dans la conversation pour
exprimer différents propos.
Les personnes qui bégaient n’ont pas de difficulté à accéder au mot juste et à
utiliser un vocabulaire précis. Elles savent pertinemment quels mots et quelle
structure grammaticale utiliser, mais les mots sortent difficilement au moment
d’articuler les sons.
Le bégaiement est davantage un problème d’ordre « mécanique » perturbant la
fluidité de la parole.

23
Table des matières
Bibliographie non exhaustive :...........................................................................................1
Introduction........................................................................................................................1
I. Linguistique et didactique...........................................................................................4
II. Théories de l’apprentissage des langues......................................................................5
1. Les théories du langage et leurs implications.......................................................................5
2. L’ancrage social des langues................................................................................................6
3. La psycholinguistique..........................................................................................................7
a. Les tendances générales de la psycholinguistique...............................................................................8

III. Acquisition et développement du langage.............................................................10


1. Le développement pré-linguistique et l’acquisition de la phonologie.................................11
a. Le début de la compréhension..........................................................................................................13
b. La production des premiers mots......................................................................................................13
c. L’émergence de la combinatoire........................................................................................................14
d. La grammaticalisation........................................................................................................................14

IV. Les facteurs responsables de l’apprentissage d’une langue seconde ou étrangère..15


1. Facteurs liés à l’apprenant.................................................................................................15
a. Les styles d’apprentissage..................................................................................................................16
2. L’immersion ou le rôle du contexte informel (familial, social).............................................17
3. Le rôle des facteurs affectifs..............................................................................................17
V. Acquisition et apprentissage du langage écrit...........................................................19
1. Les stades d’acquisition du langage écrit (logographique, alphabétique et orthographique)
19
2. Les méthodes d’apprentissage de la lecture (méthodes globale, syllabique et mixte).........20
VI. Les troubles de la parole et du langage..................................................................20
a. La dyslexie.........................................................................................................................................21
b. La dysphasie......................................................................................................................................21

24
c. Le bégaiement...................................................................................................................................23

25

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