Assurance Incendie
Assurance Incendie
Assurance Incendie
Assurance incendie
septembre 2016
Généralités 1 - 4
Sect. 2 - Risque 8 - 38
Sect. 7 - Contentieux 79 - 95
Bibliographie
Création des tribunaux judiciaires La loi no 2019-222 du 23 mars 2019 (JO 24 mars),
dite de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, a été adoptée pour
simplifier les procédures judiciaires. Ainsi, depuis le 1 er janvier 2020, les tribunaux de
grande instance ont fusionné avec les tribunaux d'instance pour devenir les tribunaux
judiciaires.
Généralités
2. Historique. - À travers les siècles, le feu n'a cessé d'être source de ruines et de
dommages. L'histoire de notre civilisation est ainsi jalonnée d'incendies catastrophiques
détruisant villes, villages et monuments.
5. Réglementation applicable. - Aucune disposition du livre Ier, titre Ier, du code des
assurances n'écartant le contrat d'assurance contre l'incendie du droit commun du contrat
d'assurance (V. Contrat d'assurance [Civ.] ), celui-ci est donc soumis aux règles communes
aux assurances de dommages non maritimes et aux assurances de personnes, sorte de
« droit commun des contrats d'assurance », notamment aux dispositions relatives à la
conclusion et preuve du contrat (chap. II du code), aux obligations de l'assureur et de l'assuré
(chap. III du code) et à la compétence et prescription (chap. IV du code). Les règles relatives
aux assurances de dommages non maritimes, portées par le titre II du même livre, lui sont
également applicables ; de plus, il fait l'objet, en raison de sa spécificité, d'un chapitre propre,
le chapitre II du même titre dont nous rencontrerons les dispositions.
6. Polices. - Dans la pratique les assureurs classent les risques (V. infra, no 8) en deux
familles : celle des risques simples (habitation, profession libérale, commerce, artisanat et
petite industrie) et celle des risques industriels, cette dernière étant beaucoup plus exigeante
quant à l'évaluation du risque, la définition de la garantie et la tarification. La première associe
généralement à la garantie « incendie » d'autres couvertures rassemblées sur un contrat
« multirisques » : responsabilité civile, dégâts des eaux, vol, etc. Le plus souvent les
conditions générales des contrats relatifs aux risques des particuliers correspondent aux
modèles élaborés par les techniciens de la profession. Certains risques industriels peuvent
générer des sinistres de très grande ampleur (ex. de l'explosion de l'usine AZF de Toulouse,
survenue le 21 sept. 2001). Certes, par la réassurance, les assureurs se protègent contre ces
événements catastrophiques mais la garantie des réassureurs n'est pas illimitée. C'est
pourquoi l'assureur, approché par le demandeur à l'assurance de tels risques, répondra en
limitant sa couverture à une fraction des conséquences de leur réalisation. Naît alors la
coassurance dans le cadre de laquelle plusieurs assureurs prennent chacun en charge une
part du risque, sans solidarité entre eux mais avec des conventions de gestion, nécessaires
pour simplifier la relation avec l'assuré (Civ. 1re, 14 nov. 2001, no 99-10.029 , Bull. civ. I,
no 273 ; RGDA 2002. 53, note Bigot. – Civ. 1re, 4 déc. 2001, no 98-17.457 , Bull. civ. I,
no 298 ; RGDA 2002. 72, note Bigot ; Gaz. Pal. 17 mai 2002, note Favre Rochex. –
COURTIEU, La coassurance, JCP E 2002. Chron. 950). Le code des assurances (art. L. 111-
6 ) consacre, en application de la directive no 88/357 du 22 juin 1988 (JOCE, no L 172,
4 juill.), une distinction entre grands risques et risques de masse, les premiers correspondant
à une activité dont l'importance dépasse les seuils définis par l'article R. 111-1, mais cette
qualification n'agit que sur la couverture en libre prestation de services par les entreprises
dont le siège est situé sur un État de l'Espace économique européen non membre de l'Union
européenne (C. assur., art. L. 351-4 et L. 351-5 ). Le contrat d'assurance prend la forme
d'une police d'assurance, complétée, le cas échéant, par des avenants. Cette police est
composée, selon les cas, de conditions générales comportant les règles générales relatives à
la formation, l'objet et la cessation du contrat, de conventions spéciales venant préciser en
détail les conditions d'application des garanties (bases de déclaration de la valeur des biens
couverts, mesures de prévention…) et de conditions particulières, précisant les différents
éléments d'individualisation du contrat (parties contractantes, biens assurés…).
7. Comme toute opération d'assurance, celles qui s'appliquent à l'incendie ont pour
composantes fondamentales le risque et la prime ou cotisation.
Section 2 - Risque
8. Le risque est une donnée amphibologique puisque le code des assurances qualifie ainsi
aussi bien l'événement dont la survenance déclenche la garantie d'assurance (titres des
chapitres V et VIII du titre II du livre I er : risques de catastrophes naturelles et de catastrophes
technologiques. – V. infra, nos 9 s.) que les biens assurés (C. assur., art. L. 181-1 et L. 310-
4 : situation du risque. – V. infra, nos 11 s.), alors qu'il est davantage la probabilité de
survenance d'un événement et de ses conséquences dont la réalisation (art. L. 113-5 )
ouvre l'obligation de l'assureur (V. infra, nos 31 s.).
11. Dualité. - Les risques pris en charge par le contrat d'assurance dépendent des objectifs
qui ont motivé la décision de l'assuré, de son « intérêt à la conservation d'une chose »
(C. assur., art. L. 121-6 ). A-t-il voulu garantir les biens dont il est propriétaire ? Ceux qui
appartiennent à des tiers, qu'il les détienne ou non ? Dans le premier cas il s'agira d'une
assurance de choses et dans le second d'une assurance de responsabilité. L'appellation
d'assurance de choses se retrouve ainsi aux articles L. 121-6 : « Toute personne ayant
intérêt à la conservation d'une chose peut la faire assurer », et L. 122-5 du code des
assurances : « pertes et détériorations de la chose assurée ». Assurance et chose et
assurance de responsabilité peuvent d'ailleurs cohabiter dans le même contrat quand celui-ci
intègre une assurance pour le compte de qui il appartiendra (art. L. 112-1 ). L’assurance
pour le compte d’autrui repose sur le mécanisme de la stipulation pour autrui ; elle peut, par
exemple dans le cas du dépôt, garantir la responsabilité du détenteur d'un bien ne lui
appartenant pas et devenir, quand le détenteur peut s’exonérer de cette responsabilité,
assurance de chose au bénéfice du propriétaire.
15. Les assurances de choses comprennent en standard des garanties de base (V. infra,
no 16), auxquelles peuvent venir s'ajouter, selon les circonstances de conclusion du contrat,
diverses garanties optionnelles (V. infra, nos 17 s.). Et le législateur est venu imposer des
garanties obligatoires (V. infra, nos 20 s.).
A - Garanties de base
16. Imprécision du texte légal. - « L'assureur contre l'incendie répond de tous dommages
causés par conflagration, embrasement ou simple combustion » (C. assur., art. L. 122-1 ).
Le texte est ici peu précis puisqu'il se contente de faire référence à trois conséquences de
l'incendie sans pour autant venir le définir. On peut alors voir l'incendie comme un
« phénomène de combustion vive, se produisant hors d'un foyer normal et attaquant des
matières qui n'étaient pas à ce moment destinées à la combustion, avec un développement
de chaleur suffisant pour entraîner la combustion totale de ces matières sans intervention
extérieure » (DESCHAMPS, La garantie de l'assureur incendie. Notions d'incendie,
d'explosion et d'accident, RGAT 1951. 5). En l'absence de définition légale totalement
satisfaisante les conditions générales des contrats viennent le plus souvent donner des
précisions sur les événements garantis, en indiquant notamment que, l'incendie est « une
combustion avec flammes en dehors d'un foyer normal ». Les dommages causés à des
marchandises par la seule imprégnation des liquides inflammables dont elles avaient été
aspergées par des incendiaires, seul le chiffon imprégné ayant brûlé, ne relèvent pas de la
garantie incendie (Civ. 1re, 11 oct. 1989, RGAT 1989. 883). En tout état de cause, l'incendie
suppose à la fois une combustion vive, c'est-à-dire une flamme, et un feu accidentel. C'est
pour cette raison que si les dommages dus aux fumées consécutives à l'incendie sont
compris dans la garantie, en sont, en revanche, exclus, sauf convention contraire, ceux
« occasionnés par la seule action de la chaleur ou par le contact direct et immédiat du feu ou
d'une substance incandescente s'il n'y a eu ni incendie, ni commencement d'incendie
susceptible de dégénérer en incendie véritable » (art. L. 122-1 ). Dans la pratique
contractuelle courante cette exclusion est écartée par les garanties prenant en charge : les
conséquences des accidents ménagers résultant de l'action subite de la chaleur ou du
contact direct et immédiat du feu ou d'une substance incandescente – sauf les accidents de
fumeurs –, même s'il n'y a eu ni incendie ni commencement d'incendie ; celles des
dégagements accidentels de fumées résultant du dysfonctionnement d'un appareil de
chauffage ; les dommages résultant de la chute de la foudre, non suivie d'incendie, qu'elle
survienne sur les biens assurés ou sur ceux d'autrui, et ceux qui sont conséquences d'une
explosion ou d'une implosion, la première étant définie comme étant une action subite et
violente de la pression ou de la dépression de gaz ou de vapeurs, que ceux-ci aient existé
avant cette action ou que leur formation lui ait été concomitante (LELEU DE LA SIMONE,
Incendie ou explosion ?, RGAT 1987. 547) ; quoique n'étant pas explosion, est également
couvert le « coup d'eau », phénomène de surpression, qui résulte de l'introduction dans les
appareils à vapeur, entre le piston et le fond du cylindre, d'une eau provenant de la
condensation accidentelle de la vapeur, laquelle crée un risque d'éclatement du cylindre ;
l'intérêt des assureurs à la protection des bâtiments assurés par des installations d'extinction
automatique à eau, type sprinkler, est tel qu'ils prennent en charge les conséquences du gel
de ces installations et de leurs fuites d'eau accidentelles, y compris celles consécutives au
gel.
B - Garanties optionnelles
17. L'existence de certains risques spécifiques a conduit les assureurs à élaborer des
garanties optionnelles. C'est principalement le cas pour les accidents à cause électrique
(V. infra, no 18) mais aussi pour quelques risques divers (V. infra, no 19).
18. Il s'agit des dommages causés aux appareils électriques ou électroniques et aux
canalisations électriques par des accidents d'ordre électrique étrangers à l'incendie. Leur
garantie est strictement encadrée pour qu'en soient écartés ceux qui relèvent de l'usure des
installations ou d'un déficit d'entretien : exclusion des installations d'une puissance supérieure
à certains seuils et des biens informatiques, leur garantie relevant de contrats spécifiques ;
application d'un barème de dépréciation pour vétusté et d'une franchise (C. assur.,
art. L. 121-1 ) laissant dans tous les cas à la charge de l'assuré une part de l'indemnisation.
2° - Événements divers
19. Il s'agit de ceux que constituent : le choc ou la chute de tout ou partie d'un appareil de
navigation aérienne ou d'un engin spatial ; le choc d'un véhicule terrestre identifié ; l'action de
la grêle et du poids de la neige ou de la glace sur les toitures ; l'incendie ou l'explosion causé
par une source de rayonnements ionisants, ainsi que l'aggravation des dommages assurés,
due à une telle source. Bien entendu cette extension ne peut s'appliquer que si l'assuré,
propriétaire, détenteur ou usager d'une telle source, n'est pas soumis aux articles L. 511-1 et
suivants du code de l'environnement ou bénéficie d'une autorisation de détention de sources
radioactives. Pour l'article L. 122-6 du code des assurances, l'assureur ne couvre pas, sauf
convention contraire, les incendies directement occasionnés par les éruptions de volcans, les
tremblements de terre et autres cataclysmes. La garantie des catastrophes naturelles, à la
définition desquelles (V. infra, no 22) répondent certains de ces événements, pourra
cependant l'obliger à cette prise en charge.
C - Garanties obligatoires
21. Pour l'article L. 122-7 du code des assurances (al. 1 à 3) : « Les contrats d'assurance
garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en
France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à
la garantie de l'assuré contre les effets du vent dû aux tempêtes, ouragans ou cyclones, sur
les biens faisant l'objet de tels contrats, sauf en ce qui concerne les effets du vent dû à un
événement cyclonique pour lequel les vents maximaux de surface enregistrés ou estimés sur
la zone sinistrée ont atteint ou dépassé 145 km/h en moyenne sur dix minutes ou 215 km/h
en rafales, qui relèvent des dispositions des articles L. 125-1 et suivants du présent code. –
Sont exclus les contrats garantissant les dommages d'incendie causés aux récoltes non
engrangées, aux cultures et au cheptel vif hors bâtiments. – Sont également exclus les
contrats garantissant les dommages d'incendie causés aux bois sur pied ». Les paramètres
relatifs à la vitesse du vent ont pour objectif de définir le partage entre cette garantie et celle
des catastrophes naturelles. Quand le dommage a pour causes les effets conjugués du vent
et d'un autre phénomène, celle qui a été déterminante doit être recherchée (pour le vent et la
grêle : Civ. 1re, 2 juill. 1996, no 94-11.559 , D. 1996. IR 189 ; RGDA 1997. 931, note
Maurice ; Gaz. Pal. 24 janv. 1997).
2° - Catastrophes naturelles
22. La prise en charge des dommages résultant de ces événements est organisée par les
articles L. 125-1 et suivants du code des assurances. Aux termes de l'article L. 125-1, alinéa
1er : « Les contrats d'assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que
l'État et garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés
en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit
à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles, dont ceux des
affaissements de terrains dus à des cavités souterraines et à des marnières sur les biens
faisant l'objet de tels contrats ». Selon l'alinéa 3 du même article : « Sont considérés comme
les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels
directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent
naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu
empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises ». Sont cependant exclus de cette prise en
charge obligatoire (C. assur., art. L. 125-5 ) les dommages causés aux récoltes non
engrangées, aux cultures aux sols et au cheptel vif hors bâtiment – qui sont indemnisés dans
le cadre du régime de garantie des calamités agricoles (C. rur., art. L. 361-1 s.) – et ceux
que peuvent subir les véhicules aériens, maritimes, lacustres et fluviaux, ainsi que les
marchandises transportées et les dommages aux bâtiments garantis dans le cadre de
l'obligation d'assurance (C. assur., art. L. 242-1 s.).
ACTUALISATION
22. Régime d'assurance CatNat : sols argileux. - Une ordonnance du 8 février 2023
apporte des modifications substantielles à l'assurance contre les catastrophes naturelles
(CatNat) afin de renforcer la prise en charge des sinistres causés par le phénomène
naturel de retrait-gonflement des sols argileux (RGA) (Ord. n o 2023-78 du 8 févr. 2023,
JO 9 févr., D. actu. 7 mars 2023, obs. J. Delayen).
3° - Catastrophes technologiques
23. Champ d'application. - L'article 17 de la loi no 2003-699 du 30 juillet 2003 (JO 31 juill.),
relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des
dommages, organise l'indemnisation des victimes de catastrophes technologiques en créant,
entre autres, les articles L. 128-1 à L. 128-3 du code des assurances. Aux termes de l'article
L. 128-2, alinéas 1 et 2 : « Les contrats d'assurance souscrits par toute personne physique en
dehors de son activité professionnelle et garantissant les dommages d'incendie ou tous
autres dommages à des biens à usage d'habitation ou placés dans des locaux à usage
d'habitation situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à
moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré pour les dommages résultant des catastrophes
technologiques affectant les biens faisant l'objet de ces contrats. – Cette garantie s'applique
également aux contrats souscrits par ou pour le compte des syndicats de copropriété, et
garantissant les dommages aux parties communes des immeubles d'habitation en
copropriété, ainsi qu'aux contrats souscrits par les organismes visés à l'article L. 411-2 du
code de la construction et de l'habitation et garantissant les dommages aux immeubles
d'habitation dont ils ont la propriété ». Est catastrophe technologique la « survenance d'un
accident dans une installation relevant du titre I er du livre V du code de l'environnement et
endommageant un grand nombre de biens immobiliers » (art. L. 128-1, al. 1er). Les
installations concernées sont celles que définit l'article L. 511-1 du code de l'environnement :
usines, ateliers, dépôts, chantiers, carrières et, d'une manière générale, celles qui peuvent
présenter des dangers pour, entre autres, la sécurité. En relèvent également « les accidents
liés au transport de matières dangereuses ou causés par les installations mentionnées à
l'article 3-1 du code minier » (art. L. 128-1, al. 2). En sont exclus les accidents nucléaires
(art. L. 128-1, al. 3). Le décret no 2005-1466 du 28 novembre 2005 (JO 30 nov.) précise aux
articles R. 128-1 et suivants du code des assurances les conditions d'application de
l'article L. 128-1 (al. 4). L'article R. 128-1 précise notamment que « l'état de catastrophe
technologique est constaté en cas de survenance d'un accident rendant inhabitables plus de
cinq cents logements ». La catastrophe est constatée par une décision de l'autorité
administrative qui précise les zones et la période de survenance des dommages appelant la
garantie d'assurance (art. L. 128-1, al. 1er). L'article R. 128-1, alinéa 2, précise que l'état de
catastrophe technologique est constaté, dans un délai maximal de quinze jours, par un arrêté
conjoint du ministre chargé de l'économie, du ministre chargé de la sécurité civile et du
ministre chargé de l'environnement, ce dernier est publié au Journal officiel.
24. Exclusion de la garantie. - L'article 68 de la même loi crée l'article L. 128-4 du code des
assurances qui exonère l'assureur de dommages aux biens de cette obligation d'assurance
lorsque : le bien assuré est situé dans une zone où un plan de prévention des risques
technologiques interdit les constructions nouvelles et l'extension des constructions existantes,
l'existence du bien étant postérieure à ce plan ; ou lors de sa mise en place, il a été construit
en violation des règles administratives tendant à prévenir les dommages causés par une
catastrophe technologique.
4° - Actes de terrorisme
25. Selon l'article L. 126-2 du code des assurances (réd. issue L. n o 2006-64 du 23 janv.
2006, JO 24 janv.) : « Les contrats d'assurance garantissant les dommages d'incendie à des
biens situés sur le territoire national ainsi que les dommages aux corps de véhicules
terrestres à moteur ouvrent droit à la garantie de l'assuré pour les dommages matériels
directs causés aux biens assurés par un attentat ou un acte de terrorisme tel que défini par
les articles 421-1 et 421-2 du code pénal subi sur le territoire national. La réparation des
dommages matériels, y compris les frais de décontamination, et la réparation des dommages
immatériels consécutifs à ces dommages sont couvertes dans les limites de franchise et de
plafond fixées au contrat au titre de la garantie incendie ». Toute clause contraire est réputée
non écrite (cette disposition ne s'applique qu'aux contrats d'assurance de biens, Civ. 3e,
13 nov. 2002, no 00-18.838 , RCA 2003. Comm. 82, note Groutel). Par ailleurs, pour les
contrats applicables aux grands risques, l'article R. 126-2 du code des assurances encadre
les franchises et les exclusions applicables (Décr. no 2006-1202 du 29 sept. 2006, JO
30 sept.).
§ 2 - Assurances de responsabilité
26. L'assurance incendie peut prendre en charge les dommages dont la survenance relève
de la responsabilité de l'assuré, qu'elle soit extracontractuelle (V. infra, no 27) ou contractuelle
(V. infra, no 28).
A - Responsabilité extracontractuelle
ACTUALISATION
27. Communication de l'incendie aux immeubles voisins : pas de responsabilité
pour troubles du voisinage. - La responsabilité du fait des troubles excédant les
inconvénients normaux de voisinage ne peut être étendue au cas de communication
d'un incendie entre immeubles voisins, lequel est régi par les dispositions de l'ancien
article 1384, devenu 1242, alinéa 2, du code civil (Civ. 2 e, 7 févr. 2019, no 18-10.727 ,
D. actu. 4 mars 2019, obs. E. Botrel).
B - Responsabilités contractuelles
28. a) Celle du locataire, à bail ou à crédit-bail, du bien assuré, est fondée sur les articles
1733 et 1734 du code civil. Le preneur répond de l'incendie à moins qu'il ne prouve que
l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou par vice de construction, ou que le feu
a été communiqué par une maison voisine (art. 1733). Cette responsabilité s'applique non
seulement aux dommages subis par le bien faisant l'objet de la location mais également à
ceux causés à des locaux voisins donnés à bail par le même propriétaire (Civ. 3e, 27 nov.
2002, no 01-12.403 , AJDI 2003. 499, obs. Beaugendre ; RCA 2003. Comm. 114,
note Groutel), à condition qu'un rapport causal relie ces dommages secondaires à l'incendie,
ce qui n'est pas le cas quand ils résultent d'un dégât des eaux dû à un défaut de bâchage du
toit de l'immeuble, même si ce dispositif a été consécutif à l'incendie (Civ. 3e, 19 févr. 2003,
no 00-13.253 , RCA 2003. Comm. 125). A contrario le dommage constitué par les frais de
relogement des locataires d'un immeuble voisin, dont le propriétaire de l'immeuble n'est pas
le bailleur, concerne des tiers au contrat de location pour lesquels les dispositions de l'article
1733 du code civil ne sont pas applicables (Civ. 3e, 28 janv. 2016, no 14-28.812 , D. 2016.
880, note Waltz-Teracol ).
30. Même en cas de jouissance d'une partie des lieux par le propriétaire, assimilable à celle
d'un locataire, le preneur demeure responsable de l'incendie qui s'est déclaré dans les lieux
qu'il occupe exclusivement (Civ. 3e, 2 avr. 2003, no 01-17.724 , D. 2003. IR 1135 ; RCA
2003. Comm. 204, note Groutel). L'origine criminelle de l'incendie exonère, à elle seule, le
preneur alors que, pour jouer ce rôle, elle devrait intégrer l'imprévisibilité, l'une des
composantes de la force majeure (Civ. 1re, 14 janv. 2003, RGDA 2003. 356, note Favre
Rochex). Le nouvel article 1218 du code civil (issu de l'Ord. n o 2016-131 du 10 févr. 2016)
propose une définition de la force majeure en matière contractuelle. Cette dernière est
caractérisée par « …un évènement, échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être
raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être
évités par des mesures appropriées… ». Cette responsabilité peut être écartée par une
renonciation à recours du bailleur, inscrite dans le bail, ou par celle de l'assureur du
propriétaire, mentionnée à son contrat d'assurance. Le code rural (art. L. 415-3) ne retient la
responsabilité du fermier qu'en cas de faute grave. b) La responsabilité de l'occupant des
lieux, à titre gratuit ou non, lié au propriétaire par une convention autre qu'un bail, relève de
l'ancien article 1302 du code civil (devenus les articles 1351 et 1351-1 du code civil depuis
l'ordonnance de 10 févr. 2016. – Pour un sous-locataire s'étant maintenu dans les lieux après
la résiliation judiciaire du bail principal, Civ. 3e, 14 déc. 2005, no 04-15.756 , RCA 2006.
Comm. 92, note Groutel). c) La responsabilité du propriétaire à l'égard du locataire est définie
par les articles 1719 et 1721 du code civil. Il est tenu, sauf convention contraire contenue
dans le bail, de faire jouir paisiblement le preneur, pendant la durée du bail, de la chose louée
et de l'indemniser de la perte résultant des vices et défauts de celle-ci. L'article 58 de la loi
no 2014-366 du 24 mars 2014 (ALUR, préc. supra, no 29) prévoit désormais que « chaque
copropriétaire est tenu de s'assurer contre les risques de responsabilité civile dont il doit
répondre en sa qualité soit de copropriétaire occupant, soit de copropriétaire non occupant ».
Les copropriétaires supportent donc une obligation d'assurance individuelle de leur
responsabilité civile, notamment à l'égard des voisins et des tiers ou de la copropriété. d) En
vertu de l'article 14 de la loi n o 65-557 du 10 juillet 1965 (C. civ. Dalloz), le syndicat de
copropriété est responsable « des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le
vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes
actions récursoires ». La loi no 2014-366 du 24 mars 2014 (mod. L. 10 juill. 1965) prévoit
désormais l'obligation de s'assurer pour le syndicat de copropriété, et l'article 9-1 prévoit que
« chaque syndicat de copropriétaires est tenu de s'assurer contre les risques de
responsabilité civile dont il doit répondre ». e) Si la chose vient à périr, le locateur d'ouvrage
n'est libéré qu'en établissant son absence de faute (C. civ., art. 1789 ). f) En application des
articles 1927 et suivants du code civil, le dépositaire d'une chose a la charge de prouver qu'il
est étranger à sa détérioration. Afin que le déposant soit, dans tous les cas, indemnisé, le
contrat d'assurance du dépositaire contient souvent une clause dite d'« assurance pour
compte » (C. assur., art. L. 112-1 . – V. supra, no 11), stipulation pour autrui au nom de
laquelle le contrat s'applique en premier lieu à la responsabilité du dépositaire et qui, si ce
dernier s'en affranchit, devient assurance de chose au bénéfice du déposant.
31. Pour apprécier les contours de la garantie-incendie il convient de préciser tant les biens
(V. infra, nos 32 s.) que les dommages couverts (V. infra, nos 35 s.).
§ 1er - Biens
32. Description générale. - Sont couverts les bâtiments ainsi que tous leurs aménagements
et installations qui ne peuvent être détachés sans être détériorés ou sans détériorer la
construction. Cette définition inclut donc une partie des biens meubles immeubles par
destination. Sont assimilés à ces biens les aménagements immobiliers tels que les
installations privatives de chauffage ou de climatisation ainsi que tout revêtement de sol, de
mur et de plafond exécutés aux frais du propriétaire ou qui, exécutés aux frais du locataire,
sont devenus la propriété du bailleur. Sont exclus les terrains, pelouses, arbres et plantations,
les clôtures et les ouvrages de génie civil.
33. Assurance vie privée. - Quand il s'agit de biens affectés à la vie privée, s'ajoutent au
bâtiment les biens suivants : le mobilier personnel qui comprend tous les meubles et objets –
y compris les animaux domestiques – appartenant à l'assuré, aux membres de sa famille, à
ses employés et ouvriers et à toute autre personne résidant ou se trouvant momentanément
dans les biens assurés. En sont exclus : les biens utilisés pour les besoins de la profession
de l'assuré ; les objets de valeur tels que bijoux, pierreries, perles fines, métaux précieux,
statues, tableaux et collections ; sont qualifiés de « fonds et valeurs » les espèces
monnayées, billets de banque, chèques et autres « papiers de valeur », lesquels ne sont
couverts que pour les professionnels les détenant. Il faut noter que les propriétaires de
logement à titre individuel ne sont pas soumis à une obligation légale de s'assurer. Bien
évidemment la prudence commande de souscrire un tel contrat afin de protéger les biens
possédés. De plus une telle obligation peut être imposée contractuellement, notamment dans
le cas où l'immeuble assuré serait grevé d'une hypothèque donnée en garantie du
remboursement d'un prêt. En effet dans une telle situation, le prêteur a tout intérêt à exiger de
l'emprunteur, lors de la conclusion du contrat de prêt, la souscription d'un contrat d'assurance
multirisques habitation couvrant le bien hypothéqué, puisqu'il pourra alors bénéficier des
dispositions de l'article L. 121-13 du code des assurances qui prévoit l'attribution aux
créanciers privilégiés ou hypothécaires des indemnités d'assurance notamment d'incendie.
34. Assurance professionnelle. - Lorsque l'activité de l'assuré est professionnelle, les biens
protégés par l'assurance deviennent alors : les bâtiments affectés à l'exercice de cette
activité ; les matériels industriels, commerciaux ou agricoles comprenant les mobiliers,
instruments, outillages et machines utilisés pour les besoins professionnels. En sont exclus
les supports d'information : disques, disquettes, bandes, cartouches, etc. ; les marchandises,
c'est-à-dire tous les éléments destinés à être transformés ou vendus, depuis les matières
premières jusqu'aux produits finis, y compris les approvisionnements et les emballages se
rapportant à la profession.
§ 2 - Dommages
35. Dommages matériels directs. - Quand elle est de choses, s'appliquant aux biens à la
conservation desquels l'assuré a intérêt, l'assurance contre l'incendie met à charge de
l'assureur « les dommages matériels résultant directement de l'incendie ou du
commencement d'incendie », lesquels, sauf convention contraire, sont « seuls à charge de
l'assureur » (C. assur., art. L. 122-2 , al. 1er). Les conditions générales des contrats
définissent le dommage matériel comme étant une atteinte à la matière, à la structure ou à la
substance d'une chose, d'un objet, par survenance de l'événement garanti. La rigueur de
cette limitation est atténuée par le code lui-même lorsqu'il assimile aux dommages matériels
directs ceux que subissent les « objets compris dans l'assurance » causés par « les secours
et les mesures de sauvetage » (art. L. 122-3 ) et qu'il impose à l'assureur la prise en charge
de « la perte ou la disparition des objets assurés survenue pendant l'incendie, à moins qu'il
ne prouve que cette perte ou cette disparition est provenue d'un vol » (art. L. 122-4 .
– V. aussi KULLMANN, Détermination de la garantie d’assurance. Le rôle de la loi, RCA
2016, dossier 19). Si, en assurances de dommages, l'assureur ne répond pas des pertes et
détériorations de la chose assurée provenant d'un vice propre (art. L. 121-7 ), il doit prendre
en charge les dommages d'incendie qui en sont la suite, « à moins qu'il ne soit fondé à
demander la nullité du contrat d'assurance par application de l'article L. 113-8, premier
alinéa » (art. L. 122-5 ). Enfin, selon l'article L. 121-8 du code des assurances, applicable à
l'ensemble des assurances de dommages : « L'assureur ne répond pas, sauf convention
contraire, des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère, soit par la
guerre civile, soit par des émeutes ou par des mouvements populaires ». L'exigence d'une
relation directe entre l'incendie et les dommages est traitée avec bienveillance lorsqu'elle est
reconnue pour les frais de l'architecte participant à la reconstruction de l'immeuble détruit
(Civ. 1re, 11 mars 1986, RGAT 1986. 219).
36. Jeu des garanties optionnelles. - Les dommages directement causés par l'incendie,
quand il est d'importance, vont générer des dépenses et des préjudices qui peuvent être pris
en charge par des garanties optionnelles. Il s'agit : des frais de démolition, de déblai,
préalables indispensables de la réparation ou de la reconstruction, et de ceux qui résultent
des mesures conservatoires imposées par décision administrative ; des frais de déplacement
des objets mobiliers, nécessités par la réparation du bâtiment, et des frais de relogement
exposés par l'assuré lorsqu'il doit quitter les lieux ; des honoraires de décorateurs, de
bureaux d'études et de contrôle technique et d'ingénierie, ceux des architectes étant compris
dans la valeur d'assurance des bâtiments ; des frais nécessités par une mise en état des
lieux en conformité avec la législation et la réglementation en matière de construction. Sont ici
visés les textes dont l'inobservation est passible de sanctions administratives ou pénales et
ceux que mentionneraient les conditions particulières du contrat ; le remboursement de la
prime d'assurance « dommages-ouvrage » (C. assur., art. L. 242-1 s.) ; la perte d'usage
représentant tout ou partie de la valeur locative des locaux occupés par le propriétaire ou le
locataire responsable, en cas d'impossibilité de les utiliser temporairement en tout ou en
partie ; la perte de loyers subie par le propriétaire lorsqu'il est l'assuré ; la perte financière
résultant pour le locataire ou l'occupant des frais qu'il a engagés pour réaliser des
aménagements immobiliers ou mobiliers, nécessaires à une utilisation normale des lieux et
qui sont devenus propriété du bailleur lorsque, par le fait du sinistre, le bail est résilié de plein
droit ou l'occupation a pris fin ou, en cas de continuation du bail, le propriétaire refuse de
reconstituer ces aménagements, lorsqu'ils ont été endommagés ; le remboursement des
intérêts de l'emprunt auquel a dû avoir recours l'entreprise qui, assujettie à la TVA, assure
ses biens hors cette taxe, de quoi il résulte que la dette de l'assureur peut être inférieure au
coût des travaux de remise en état à laquelle l'assuré doit faire procéder, ce qui lui inflige un
déficit de trésorerie ; la prise en charge des honoraires dus par l'assuré à son expert : enfin,
les pertes dites indirectes constituées, pour les risques professionnels, par les déficits que ne
prennent pas en charge les extensions de garantie ci-dessus.
39. Modes de fixation. - Celles-ci sont fixées de trois façons : soit une expertise préalable à
la souscription du contrat les a évaluées et les futurs partenaires ont pris accord sur ses
résultats ; soit le futur assuré, prenant le risque de sous-assurance ou de surassurance
(V. infra, nos 60 et 62), en fixe le montant, que l'assureur ne discute pas ; soit, enfin,
l'assureur ne limite pas sa garantie. Il en est ainsi lorsque, pour les risques de particuliers, il
offre une garantie illimitée pour les dommages causés aux tiers (V. infra, no 50). Il convient
par ailleurs de déterminer avec précision quelle est la nature de l'assurance applicable,
assurance de choses (V. infra, nos 40 s.) ou assurance de responsabilité (V. infra, nos 49 s.),
puisque les garanties ne seront pas les mêmes dans chacun de ces cas (Civ. 2e, 14 janv.
2016, no 14-29.763 , RCA 2016. Comm. 136, par Groutel).
40. La détermination de la valeur assurée varie selon la nature des dommages subis par
l'assuré : dommages aux biens (V. infra, nos 41 s.), frais et pertes indirectes (V. infra, no 44)
ou pertes d'exploitation (V. infra, no 45). Il est par ailleurs possible que le contrat contienne
une clause d'indexation (V. infra, nos 46 s.).
41. Valeur assurée. - Lorsqu'elle est techniquement possible, la remise en état du bien
sinistré définira, par son coût, la dette de l'assureur. Dans le cas contraire, la valeur assurée,
convenue par les parties lors de la souscription du contrat, constitue la base à partir de
laquelle s'évaluera, après prise en compte de ses évolutions dans le temps, l'obligation de
l'assureur après sinistre. 1o Elle est valeur vénale quand elle est le prix que le bien mobilier
aurait eu pour contrepartie en cas de vente, que celle-ci s'inscrive ou non dans le cadre d'une
activité commerciale. Il suffit qu'existe un marché de l'occasion (MAGNAN, Les clauses
« valeur vénale » et « valeur économique », RGAT 1992. 243). La Fédération française des
sociétés d'assurances préfère à cette dénomination celle de valeur économique. 2 o Valeur de
remplacement ou d'usage, elle est celle appliquée à un bien qui n'était pas destiné à la vente
et qui peut trouver son semblable sur le marché. Cette norme s'applique au matériel
professionnel. Les marchandises sont évaluées avant leur vente à leur prix d'achat,
augmenté des frais des traitements qui leur ont été appliqués, et à leur prix de vente quand,
vendues, elles ne sont pas encore livrées. 3 o Valeur à neuf quand la garantie prend en
charge le coût du remplacement du bien détruit par son équivalent neuf, tel celui de la
reconstruction d'un bien immobilier détruit. 4o S'appliquant surtout aux objets d'art ou de
collection, la valeur agréée résultera d'une évaluation par l'expert qu'aura désigné l'assureur.
5o La valeur déclarée par l'assuré est celle à partir de laquelle l'assureur définira le montant
de la prime et les conditions de la garantie, sans être engagé par cette évaluation, et
disposera éventuellement des sanctions que lui offrent les articles L. 121-3 et L. 121-5 du
code des assurances (V. infra, nos 60 et 62).
42. Prise en compte de la vétusté. - Le principe indemnitaire (V. infra, nos 56 s.), qui
s'oppose à ce que le sinistre procure un enrichissement à l'assuré, permet donc aux contrats
de prévoir que l'application de ces systèmes d'évaluation sera suivie d'un abattement pour
vétusté prenant en compte l'âge (qui n'est pas toujours réducteur : Paris, 29 janv. 1997,
D. 1997. IR 55 ) et l'état du bien sinistré. La recevabilité de cette pratique, reniée par le droit
de la responsabilité (V. infra, nos 49 s.), ne donne pas lieu à contestation en assurances de
choses (Civ. 1re, 26 avr. 2000, 97-20.827, RGDA 2000. 825, note Kullmann. – Civ. 1re,
27 févr. 2001, no 98-19.863 , RGDA 2001. 402, note Favre Rochex). Les garanties valeur à
neuf dérogent à cet effet réducteur, exigeant, pour leur application, que, pour neutraliser un
enrichissement contraire au principe indemnitaire, la remise du bien à neuf soit effectivement
réalisée – quand il s'agit d'un immeuble sur l'emplacement primitif et sans modification
notable de sa destination – dans un certain délai. Cette exigence de reconstruction dans un
délai restreint constitue une condition de la garantie et non pas un délai de prescription
(Civ. 1re, 4 déc. 2001, no 98-18.766 , RGDA 2002. 197, note Favre Rochex. – Civ. 1re, 2 oct.
2002, no 99-16.457 , RGDA 2003. 102, note J. Bigot). Par conséquent l'assuré qui n'aurait
pas procédé à la reconstruction dans le délai stipulé dans la police pourrait se retourner
contre l'éventuel responsable pour lui réclamer une indemnité correspondant à l'abattement
pour vétusté appliquée par son assureur (Civ. 2e, 11 déc. 2014, nos 13-27.135 et 14-
o
12.804 , RCA 2015, n 106). Les contrats prévoient généralement que, dans cette
perspective, l'indemnité d'assurance sera versée au fur et à mesure des travaux et
acquisitions contribuant à la reconstitution de la valeur à neuf, sur justifications des frais
engagés (Civ. 1re, 2 oct. 2002, préc.). La reconstruction d'un immeuble peut se heurter à une
impossibilité absolue, liée par exemple à une règle d'urbanisme, telle celle qui impose à la
remise en état d'un immeuble bâti ou de son terrain, de s'effectuer d'une manière compatible
avec son environnement (C. assur., art. L. 121-17 ). Dans cette hypothèse, le contrat,
renonçant à la condition, accepte de garantir en valeur de reconstruction (ex. d'impossibilité :
Civ. 1re, 4 oct. 1989, RGAT 1989. 884, note Kullmann. – Civ. 1re, 10 janv. 1990, no 87-
17.893 , RCA 1990. Comm. 132).
43. Ces mesures ne prennent pas en compte les motivations ou comportements de l'assuré
ayant pu agir sur le montant de son préjudice réel. Ainsi ne sont-elles pas influencées par le
fait : que l'assuré n'ait acquis l'immeuble sinistré que dans le but de procéder à sa démolition
(Civ. 3e, 25 mai 1977, RGAT 1977. 497, note A.B.) ; ou que l'immeuble incendié ait été
revendu, semble-t-il avant remise en état, au même prix que celui qui avait été retenu par une
promesse de vente antérieure au sinistre (Civ. 1re, 11 oct. 1994, no 91-14.904 , RGAT 1995.
43, note Kullmann ; RCA 1994. Comm. 416).
44. Détermination. - Quand les frais pris en charge par l'assureur (V. supra, no 36)
correspondent à des dépenses ou pertes justifiées (par ex. : honoraires d'experts, de
décorateurs, prime de l'assurance dommages-ouvrage, pertes de loyers, intérêts d'emprunt,
etc.), c'est sur le montant de celles-ci que s'établira la dette de l'assureur : remboursement
total ou partiel selon les dispositions contractuelles et dans la limite des plafonds de garantie.
Dans le cas contraire, l'absence de justificatifs devrait logiquement conduire, au nom du
principe indemnitaire (V. infra, no 57), à un refus de l'assureur. Pour atténuer cet effet négatif,
l'assureur proposera à l'assuré une garantie purement forfaitaire d'un montant peu élevé :
généralement 10 % des capitaux assurés sur bâtiments et matériels ou 5 % des capitaux
assurés sur marchandises.
§ 3 - Pertes d'exploitation
45. La garantie prend en compte deux composantes de la perte : les frais généraux
permanents de l'entreprise, dont le sinistre n'arrête pas le cours, et la chute du bénéfice net
d'exploitation, données comptables dont la somme constitue la marge brute. L'application du
taux de celle-ci aux chiffres d'affaires d'avant et d'après le sinistre va évaluer la dette de
l'assureur.
§ 4 - Indexation
46. Contraintes liées à l'indice. - La valeur d'un bien est, dans le temps, sujette à
fluctuations. L'évolution des prix des marchés, à la hausse ou à la baisse, les aménagements
valorisants que l'assuré a effectués, les effets dévalorisants du défaut d'entretien, etc., seront
tels qu'au jour du sinistre la valeur assurée pourra ne plus correspondre à la valeur réelle. Si
la seconde est inférieure à la première, c'est elle qui décidera de l'indemnisation, pénalisant
l'assuré qui aura payé des primes surévaluées, au bénéfice de l'assureur. Dans le cas
contraire, l'assuré devra subir les effets du capital assuré plafonnant l'obligation de l'assureur.
C'est pour neutraliser – ou atténuer – cet effet négatif que le contrat fait appel à une clause
d'indexation qui organise une adéquation automatique et permanente des conditions
d'assurance – prime et garantie – à l'évolution des valeurs. Cette disposition doit se prêter à
l'exigence, portée par l'article L. 112-2 du code monétaire et financier, selon laquelle une
relation directe doit être établie entre les prix des biens, produits et services choisis comme
indices et l'objet de la convention. Lorsqu'il s'agit d'une convention relative à un immeuble
bâti, la clause prévoyant une indexation sur la variation de l'indice national du coût de la
construction, publié par l'Institut national des statistiques et des études économiques, est
réputée réaliser cette relation directe (C. mon. fin., art. L. 112-2 ). Dès lors cet indice peut
être choisi, en assurance de choses, pour épouser les variations de valeur des biens
immobiliers. Les contrats relatifs aux risques simples (V. supra, no 5) se réfèrent au coût de la
construction publié par la Fédération nationale du bâtiment. L'indice risques industriels tient
compte de ce que, globalement, les capitaux assurés comprennent pour 25 % les bâtiments,
pour 45 % le matériel et pour 30 % les marchandises, à partir de quoi il mixe les index
s'appliquant à ces biens, relatifs aux coûts de la construction, de la main-d'œuvre, des prix de
gros des produits métallurgiques et des prix de gros de l'ensemble des produits industriels.
47. Application dans le temps. - Une certaine confusion règne sur le choix de l'indice
applicable à l'indemnité due par l'assureur, aggravée par la coexistence de l'indexation et des
sanctions résultant du paiement tardif par l'assureur. L'indexation mettant à jour les valeurs
assurées et la prime, il semble logique d'évaluer l'indemnité due sur la base du dernier indice
précédant le sinistre lequel a actualisé les obligations de l'assuré – montant de la prime – et
de l'assureur – valeurs garanties. Après avoir validé cette version (Civ. 1re, 27 sept. 1983,
RGAT 1984. 193), la première chambre civile de la Cour de cassation considère aujourd'hui
que « l'actualisation par l'effet de l'indexation compense la seule dépréciation monétaire entre
le jour où la créance est évaluée et le jour du paiement » (Civ. 1re, 6 juin 2000, no 97-
14.965 , RGDA 2000. 829, note Mayaux ; dans le même sens : Civ. 1re, 14 janv. 1992,
no 90-13.243 , RGAT 1992. 370, note Rémy. – Civ. 1re, 16 mai 1995, no 92-15.376 ,
RGAT 1995. 569, note Kullmann). C'est là accepter une distorsion entre la dette de l'assureur
et la prime payée par l'assuré, encore plus visible lorsque le contrat (de responsabilité) a été
résilié entre la date du sinistre et celle du paiement (Civ. 1re, 12 févr. 1991, no 88-17.498 ,
RCA 1991. Comm. 193. – GROUTEL, L'indexation des primes et des garanties, RCA 1991.
Chron. 13).
48. En revanche, le cumul entre les effets de l'indexation et ceux du retard de paiement,
lorsque, pour ce dernier, les conditions portées par l'article 1153 du code civil pour
l'application des intérêts moratoires sont réalisées, ne peut être écarté (Civ. 1re, 16 mai 1995
et Civ. 1re, 6 juin 2000, préc. – En sens contraire : Civ. 1re, 14 janv. 1992, préc.), leur objectif
étant pour les premiers de définir la dette de l'assureur et pour les seconds de pénaliser le
débiteur attardé.
49. La garantie incendie peut prendre en charge tant la responsabilité délictuelle (V. infra,
no 50) que contractuelle (V. infra, no 51) de l'assuré.
§ 2 - Responsabilités contractuelles
51. a) La responsabilité du locataire ou de l'occupant est prise en charge par quatre
garanties : celle des risques locatifs ordinaires qui s'applique aux dommages causés au
propriétaire du bâtiment, mobilier et matériel : la somme assurée est au moins égale au prix
de reconstruction des bâtiments loués et à la valeur du matériel et du mobilier loués, sans
déduction de leur vétusté ; celle des risques locatifs supplémentaires, qui élargit la
précédente à l'ensemble immobilier dont l'assuré n'occupe qu'une partie ; celle du trouble de
jouissance invoqué par un ou plusieurs colocataires à la suite de l'incendie ; enfin, celle des
pertes de loyers subies par le propriétaire, générées par l'impossibilité d'occuper pendant un
certain temps les locaux loués, non seulement ceux du responsable mais également ceux
des colocataires. Le montant des garanties applicables aux trois dernières hypothèses est
évalué par l'assuré. b) La garantie de responsabilité du propriétaire à l'égard de ses locataires
prend en charge la réparation des dommages causés à leurs biens et les troubles de vie que
peut leur causer le sinistre, tels les frais de déplacement et de relogement. Son montant est
évalué par le propriétaire assuré. c) Avec la garantie de responsabilité du dépositaire ou du
locateur d'ouvrage s'appliquant aux biens reçus en dépôt ou confiés, c'est la valeur de ceux-ci
qui définira son montant.
52. Critères de tarification. - Les paramètres majeurs qui décident de la tarification des
risques résultent à la fois des circonstances du risque (V. supra, no 9), des conditions de la
garantie, des montants relatifs à celle-ci : plafonds, franchises, etc. La technique d'évaluation
de la prime ou cotisation varie en fonction de la nature des risques, selon qu'ils sont simples
ou industriels (V. supra, no 5). Elle est établie par des traités professionnels, qui intègrent
cette distinction, auxquels se réfèrent, sans dérogation majeure, les entreprises
d'assurances. Sous certaines conditions, cette pratique professionnelle ne porte pas atteinte
aux règles de concurrence édictées par l'article 81 du Traité de Rome (Règl. n o 358/2003 du
27 févr. 2003, JOCE, no L 53, 28 févr.). Parmi les risques simples, les risques d'habitation
sont essentiellement mesurés par le statut de l'occupant, la situation du bien immobilier et les
valeurs à garantir. Quand il s'agit d'exploitations commerciales, industrielles et artisanales, le
seuil de leur passage vers les risques industriels dépend en premier lieu de l'importance des
capitaux à garantir et de la nature des bâtiments. Les traités professionnels étant dépourvus
d'autorité, il est évident que chaque entreprise d'assurances adapte ceux-ci aux objectifs de
sa politique commerciale et à la relation d'intérêt qui l'unit à l'assuré.
55. Les principes applicables à l'indemnisation versée par l'assureur en cas de sinistre varient
selon la nature de l'assurance incendie, assurance de choses (V. infra, nos 56 s.) ou de
responsabilité (V. infra, nos 63 s.).
58. TVA. - a) Si le paiement par l'assureur de la taxe sur la valeur ajoutée, qui conclut la
facture de remise en état du bien sinistré, est à charge de l'assureur, il deviendrait
enrichissement de l'assuré lorsque, par son statut, il peut être crédité du montant de cette
taxe (Civ. 1re, 15 déc. 1998, no 96-20.969 , JCP E 2000. 1522, note Courtieu ; RCA 1999.
Comm. 86. – Civ. 1re, 17 juill. 2001, no 98-18.758 , RGDA 2001. 1030, note Mayaux. –
Civ. 1re, 15 janv. 2002, no 98-20.945 , RCA 2002. Comm. 157. – Com. 16 nov. 1999, no 96-
22.046 , JCP 2000. IV. 1011, RCA 2000. Comm. 70. – BERTHIN-LACHAUD, Les juges, la
TVA et les règlements de sinistres, RGDA 1997. 947). Le statut fiscal de l'assuré s'apprécie
au jour de la fixation de l'indemnité (Civ. 1re, 1er déc. 1998, no 96-21.278 , D. 1999. 231,
obs. Berr ; RGDA 1999. 100, note Mayaux ; Gaz. Pal. 18 juin 1999, note Favre Rochex ;
RCA 1999. Comm. 54). C'est à l'assuré qu'il revient de le prouver (Civ. 1re, 15 janv. 2002,
no 98-20.945 , RCA 2002. Comm. 157).
59. Garantie valeur à neuf. - b) La garantie valeur à neuf (V. supra, no 41) ne peut
s'appliquer lorsque le bien sinistré a été remis en état et que le montant des dépenses, justifié
par factures, est inférieur à cette valeur (Civ. 1re, 29 avr. 1997, no 94-20.688 , RGDA 1997.
865, note Mayaux).
60. Surassurance. - c) Le contrat a pu être conclu pour une somme supérieure à la valeur du
bien sinistré, mettant ainsi en question le principe indemnitaire. Dans cette hypothèse l'article
L. 121-3 du code des assurances impose les solutions suivantes : s'il y a eu dol ou fraude de
l'une des parties – l'assuré voulant contourner ce principe ou l'assureur entendant bénéficier
d'une prime plus avantageuse, sans contrepartie indemnitaire – l'autre partie peut demander
la nullité du contrat et réclamer, en outre, des dommages et intérêts (al. 1er) ; s'il n'y a eu ni
dol ni fraude, le contrat est valable, mais seulement jusqu'à concurrence de la valeur réelle
des objets assurés et l'assureur n'a pas droit aux primes pour l'excédent. Seules les primes
échues lui restent définitivement acquises, ainsi que la prime de l'année courante quand elle
est à terme échu (al. 2).
61. Cumul d'assurances. - d) Sans que leur souscription ait eu pour objectif dominant un
cumul d'indemnisation, plusieurs contrats, conclus ou non par le même souscripteur, peuvent
couvrir le même risque et leur application conjointe enrichir leur bénéficiaire. Ainsi en sera-t-il
de ceux qui garantissent, en assurance de choses, les dommages subis par un bien loué,
souscrits, l'un par le propriétaire de celui-ci, l'autre par le locataire (Civ. 1re, 26 avr. 2000,
no 97-20.987 , RCA 2000. Comm. 247, note Groutel ; RGDA 2000. 797, note Fonlladosa).
Pour déjouer l'enrichissement, l'article L. 121-4 du code des assurances organise les
obligations du ou des assurés et celles des assureurs impliqués lorsque les polices
correspondent à un même intérêt et un même risque. La jurisprudence récente ajoute à cette
double identité l'unicité de souscripteur (Civ. 1re, 21 nov. 2000, no 99-18.891 , D. 2001.
IR 39 ; RGDA 2000. 1052, note Kullmann ; JCP E 2001. 1135, obs. Courtieu ; Gaz. Pal.
3 août 2001, note Favre Rochex ; RCA 2001. Comm. 63. – Civ. 1re, 29 oct. 2002, no 99-
16.749 , RCA 2003. Comm. 57, note Groutel ; Gaz. Pal. 20 juill. 2003, note Favre Rochex).
§ 2 - Sous-assurance
62. Règle proportionnelle de capitaux. - Que ce soit volontairement, pour bénéficier d'une
prime plus avantageuse, ou involontairement, l'assuré, lorsque c'est lui qui fixe la valeur du
bien proposé à l'assurance, peut avoir sous-évalué celle-ci. L'assureur a donc été pénalisé en
recevant une prime d'un montant inférieur à ce qui aurait dû être. Dans cette hypothèse
« l'assuré est considéré comme restant son propre assureur pour l'excédent, et supporte, en
conséquence, une part proportionnelle du dommage, sauf convention contraire » (C. assur.,
art. L. 121-5 ). C'est l'application de la règle proportionnelle de sommes ou de capitaux,
distincte de la règle proportionnelle de prime (V. supra, no 53) en ce que la première pénalise
l'insuffisance des garanties et la seconde l'inexactitude de la déclaration des circonstances du
risque. L'indemnité est alors réduite selon la formule suivante : Indemnité réduite = Préjudice
réel X Valeur assurée/valeur réelle. Ne peut justifier l'application de cette règle la mention,
aux conditions particulières du contrat, d'une somme qui définit le plafond de la garantie et
non le capital assuré au titre de la garantie « pertes d'exploitation » (Civ. 1re, 29 oct. 2002,
no 00-13.557 , RGDA 2003. 107, note Favre Rochex). Tenant compte de ce que l'assuré a
pu, de bonne foi, par exemple en raison de sa méconnaissance des règles du marché, sous-
évaluer la valeur contestée, des accords contractuels dérogent couramment à l'application de
cette sanction. Les plus fréquents consistent : en une renonciation pure et simple de
l'assureur, en contrepartie du paiement d'une surprime ; en une clause de tolérance par
laquelle la sanction est écartée lorsque l'écart entre valeur réelle et valeur déclarée est
inférieur à un certain seuil – généralement 10 % – ; en un report sur les valeurs insuffisantes
des excédents de garantie pouvant être constatés sur d'autres valeurs.
65. Outre des dispositions communes, relatives à la déclaration du sinistre (V. infra, no 66), le
code des assurances prévoit des dispositions spécifiques aux assurances de choses
(V. infra, no 67) et aux assurances de responsabilité (V. infra, no 78).
67. En assurances de choses, les polices d'assurance viennent imposer des obligations
supplémentaires, relatives à la fois à la sauvegarde des biens garantis (V. infra, no 68) et à la
remise d'un état des pertes (V. infra, no 69). Une déchéance spécifique s'appliquera à
l'assuré en cas de déclarations frauduleuses (V. infra, nos 71 s.). À défaut le paiement de
l’indemnité devra être effectué (V. infra, nos 74 s.).
68. Sauvegarde. - Les conditions générales des contrats ajoutent à cette obligation de
déclaration celle de prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour limiter
l'importance du sinistre et sauvegarder les biens garantis, laquelle n'exige pas autre chose
que des initiatives courantes comme l'utilisation des moyens personnels d'extinction, l'appel
aux sapeurs-pompiers et, lorsqu'elle est possible, la mise hors zone ou la protection des
biens susceptibles d'être gagnés par l'incendie. Rappelons (V. supra, no 35) que les
dommages matériels causés aux biens compris dans l'assurance par ces secours et mesures
de sauvetage sont assimilés aux dommages matériels directement causés par l'incendie et
sont donc à charge de l'assureur. Les manquements de l'assuré peuvent conduire l'assureur
à refuser sa garantie pour la partie des dommages en résultant.
69. Obligation contractuelle de remise. - Les conditions générales des contrats imposent à
l'assuré de remettre à l'assureur, dans un délai de vingt à trente jours, courant de la date du
sinistre, un état estimatif des biens détruits, disparus ou endommagés, dit « état des pertes »,
certifié sincère et véritable, signé de lui. Si le contrat le prévoit, la livraison tardive de ce
document peut, lorsqu'elle a causé préjudice à l'assureur, lui valoir des dommages-intérêts
(Civ. 1re, 5 mai 1988, RGAT 1988. 555, note Kullmann). Bien entendu, il revient à l'assuré de
prouver la présence, lors de la survenance de l'incendie, des matériels dont il invoque la
perte (Civ. 1re, 4 déc. 2001, no 98-19.523 , RGDA 2002. 199, note Favre Rochex). La
remise dudit document à l'assureur va exercer une influence, positive pour l'assuré, sur la
durée de la procédure d'indemnisation en ouvrant des délais à l'exécution de l'expertise
(V. infra, no 73). La phase suivante sera la fourniture par l'assuré des informations et
documents que l'assureur lui demandera, les considérant comme nécessaires aux opérations
d'expertise.
§ 3 - Expertise
71. Désignation de l'expert. - Les conditions générales des contrats n'écartent pas la
possibilité d'une évaluation de gré à gré de la dette de l'assureur, mais il est évident qu'une
telle modalité ne peut s'appliquer qu'à des dommages minimes, voire dérisoires. C'est
pourquoi, quoique l'expertise unilatérale par l'assureur ne soit pas interdite, la voie la plus
fréquente pour l'évaluation des dommages est l'expertise amiable contradictoire, dont l'usage
et les modalités sont fixés par les conditions contractuelles. Sauf rédaction invitant à une
qualification contraire, la clause rendant obligatoire l'expertise amiable contradictoire n'est
pas compromissoire (Civ. 1re, 3 juill. 1990, RGAT 1990. 882), comme telle nulle lorsque le
contrat n'est pas conclu, à raison d'une activité professionnelle (C. civ., art. 2061 ).
Chacune des parties désigne l'expert qui représentera ses intérêts, la remise de leur rapport
résultant de l'exécution d'un contrat de louage d'ouvrage lequel, contrairement au mandat,
correspond à l'indépendance du missionné (PIMBERT, La responsabilité de l'expert et de
l'assureur, RGDA 2016. 219). À défaut d'accord entre les professionnels, un tiers expert peut
alors être désigné, soit amiablement, soit en référé.
72. Mission. - La mission commune des experts consiste essentiellement à : rechercher les
causes, les circonstances et le point de départ du sinistre, lesquels pourront révéler la
responsabilité d'un tiers ; établir la valeur avant sinistre des biens assurés ; évaluer les
dommages directement causés par l'incendie, les pertes dont la garantie est prévue par le
contrat et le montant du sauvetage. À cela, celui qu'aura désigné l'assureur ajoutera une
vérification de l'exactitude des déclarations effectuées par l'assuré avant la souscription du
contrat et au cours de celui-ci, sur les circonstances du risque. Avec l'accord des parties les
experts peuvent se faire assister d'un spécialiste ou sapiteur lorsqu'un problème particulier
exige une compétence spécifique.
73. Nous savons que la remise par l'assuré de l'état des pertes ouvre des délais à l'exécution
des opérations d'expertise (V. supra, no 69) à l'expiration desquels, lorsque celle-ci n'est pas
close, l'assuré – voire l'assureur – peut prendre des initiatives En effet l'article L. 122-2,
alinéa 2, du code des assurances dispose : « Si, dans les trois mois à compter de la remise
de l'état des pertes, l'expertise n'est pas terminée, l'assuré a le droit de faire courir les intérêts
par sommation ; si elle n'est pas terminée dans les six mois, chacune des parties peut
procéder judiciairement ». La sommation qui fait courir les intérêts moratoires est celle de
l'ancien article 1139 du code civil et peut donc, outre sa forme classique de l'acte d'huissier,
être effectuée par lettre missive lorsqu'il ressort de ses termes une interpellation suffisante.
L'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, applicable depuis le 1er octobre 2106, prévoit
d'ailleurs un nouvel article 1344 disposant que « le débiteur est mis en demeure de payer soit
par une sommation ou un acte portant interpellation suffisante, soit, si le contrat le prévoit, par
la seule exigibilité de l'obligation ». Une assignation en référé-provision vaut sommation
(Civ. 1re, 14 janv. 1992, no 89-11.947 , RGAT 1992. 281, note Maurice) et les intérêts
moratoires qu'elle fait naître s'appliquent à l'indemnité totale et pas seulement à la provision
objet de l'instance (Civ. 1re, 16 févr. 1994, no 91-13.831 , RGAT 1994. 770, note
F. Chardin). Implicitement l'article L. 122-2 du code des assurances rend irrecevable toute
instance judiciaire ouverte avant l'expiration du délai de six mois courant de la remise de l'état
des pertes, ce qui ne peut que surprendre sachant qu'aucune disposition légale ou
réglementaire ne rend l'expertise obligatoire. Ce rejet s'applique à toute forme d'instance
qu'elle soit au fond ou en référé-provision (Com. 22 oct. 1996, no 93-18.929 , RGDA 1997.
272, note J. Bigot). Lorsque l'assureur refuse de mettre en œuvre l'expertise amiable, l'assuré
peut alors, avant l'expiration du délai de six mois, ouvrir une instance en référé pour
désignation d'un expert (Civ. 1re, 10 mai 1984, D. 1986. IR 94, note Berr et Groutel ; RGAT
1985. 117).
§ 4 - Paiement de l'indemnité
74. Délai. - Les conditions contractuelles fixent généralement à trente jours après réalisation
de l'accord amiable sur le montant de l'indemnité le délai à l'expiration duquel celle-ci doit être
versée au bénéficiaire. Quand la garantie est en « valeur à neuf » (V. supra, no 41), un délai
est fixé – deux ans pour les biens immobiliers – à l'expiration duquel la reconstruction de
l'immeuble ou le remplacement du mobilier, du matériel doit avoir été effectué par l'assuré
pour que naisse l'obligation à paiement de l'assureur. Il ne s'agit pas là d'une simple modalité
de paiement de l'indemnité mais d'une condition de l'application de la garantie (Civ. 1re,
4 déc. 2001, no 98-18.766 , RGDA 2002. 197, note Favre Rochex). En tant que condition de
la garantie, l'exigence de reconstruction dans le délai de deux ans n'a donc pas vocation à
régler les rapports de l'assuré avec le responsable du sinistre ou son assureur. Dès lors elle
ne saurait paralyser l'action de l'assuré contre le responsable pour lui réclamer une indemnité
correspondant à l'abattement pour vétusté que son assureur lui avait appliquée (Civ. 2 e,
11 déc. 2014, nos 13-27.135 et 14-12.804 , RCA 2015. Comm. 106, note Groutel).
76. Subrogation. - Lorsque l'incendie engage la responsabilité d'un tiers, le paiement auquel
procède l'assureur le dote d'une subrogation dans les droits et actions de l'assuré contre cet
auteur (C. assur., art. L. 121-12 ). Il est toutefois possible que l'assureur accepte d'insérer
dans le contrat une clause de renonciation à recours (Com. 18 mai 2016, no 14-50.029 ,
inédit, faisant référence à une clause de renonciation à recours contre tous les occupants et
leurs assureurs). À titre d'illustration, dans les contrats d'assurance multirisques agricole il est
souvent prévu une clause de renonciation à recours contre le propriétaire, le fermier, métayer
ou le locataire.
77. Intérêts moratoires. - En cas de retard dans le paiement de l'indemnité, l'assureur devra
payer des intérêts moratoires : il s'agit de dommages et intérêts destinés à réparer le
préjudice que ce retard a pu causer à l'assuré. Il s'agit là d'une application du droit commun
des obligations. Le taux des intérêts est fixé chaque année par décret. De façon générale, en
droit commun des assurances, se pose la question de la détermination du point de départ des
intérêts moratoires. Deux textes sont potentiellement applicables à l'indemnité d'assurance, il
s'agit des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil (anc. art. 1153 et 1153-1). Ce débat n'a pas
toutefois pas lieu d'être en assurance incendie, puisque le législateur a lui-même fixé le point
de départ des intérêts moratoires en décidant à l'article L. 122-2, alinéa 2, du code des
assurances que « si, dans les trois mois à compter de la remise de l'état des pertes,
l'expertise n'est pas terminée, l'assuré a le droit de faire courir les intérêts par sommation ».
78. L'indemnisation n'est soumise à aucune règle légale ou conventionnelle qui dérogerait à
celles qui s'appliquent au droit commun de la responsabilité. Dans la pratique, des
conventions entre les professionnels de l'assurance organisent les relations entre assureurs
de choses et de responsabilités. Il en est ainsi, entre autres : de celles qui prévoient des
renonciations à recours des premiers contre les seconds : en matière de valeur à neuf, de
pertes indirectes forfaitaires et d'honoraires d'experts ou contre l'assureur du propriétaire,
responsable, par l'article 1719 du code civil, des dommages d'incendie ou d'explosion causés
à un locataire par le fait d'un colocataire, etc. ; de celle qui organise la procédure d'expertise
pour en rendre les conclusions opposables à l'assureur du responsable. Bien entendu ces
accords sont inopposables aux assurés, qu'ils le soient en choses ou en responsabilités. Les
conclusions de l'expertise organisée par l'assureur de chose, et à laquelle n'ont été invités à
participer ni le responsable ni son assureur, leur sont, en principe, inopposables (Civ. 1re,
13 févr. 1996, no 94-10.148 , RCA 1996. Comm. 192). Le contraire a pu être décidé lorsque
« le rapport a été régulièrement versé aux débats et soumis à la discussion contradictoire des
parties » (Civ. 1re, 11 mars 2003, no 01-01.430 , RCA 2003. Comm. 170, note Groutel).
Quelle peut être l'efficacité d'une telle discussion longtemps après que les conséquences du
sinistre ont été effacées ?
Section 7 - Contentieux
79. Lorsqu'un litige relatif au contrat d'assurance incendie survient, donnant lieu à des
recours en justice, se posent à la fois la question de la prescription applicable à l'action
exercée (V. infra, nos 80 s.) et celle de la compétence juridictionnelle (V. infra, nos 91 s.).
80. Prescription d'ordre public. - L'article L. 114-1 du code des assurances prévoit que les
actions dérivant du contrat d'assurance se prescrivent par un délai de deux ans ; il s'agit
d'une prescription biennale, fondée sur l'ordre public (Civ. 1re, 25 juin 1991, no 89-19.897 ,
RGAT 1991. 837, note Margeat et Landel). En outre l'article L. 114-3 du code des assurances
prévoit que « par dérogation à l'article 2254 du code civil, les parties au contrat d'assurance
ne peuvent, même d'un commun accord, ni modifier la durée de la prescription, ni ajouter aux
causes de suspension ou d'interruption de celle-ci ». Cette prescription n'atteint cependant
que l'action dérivant du contrat d'assurance et ne peut être étendue au moyen de défense
opposé à une telle action : l'exception est ainsi perpétuelle (Civ. 3e, 14 févr. 2007, no 05-
21.987 , RCA 2007. Comm. 140, obs. Courtieu).
81. Actions soumises à la prescription. - Le code des assurances ne fournit pas de critère
précis permettant de distinguer les actions soumises à la prescription biennale de celles qui
ne le sont pas. C'est donc la jurisprudence qui est venue délimiter le champ d'application de
cette prescription spéciale. Les tribunaux considèrent que l'action en nullité du contrat
d'assurance, par exemple pour fausse déclaration intentionnelle du risque, est soumise à la
prescription biennale (par ex., Civ. 1re, 28 oct. 1975, RGAT 1976. 508, note Besson). Il en va
de même de l'action en paiement des cotisations exercée par l'assureur contre le
souscripteur (Civ. 1re, 6 oct. 1993, no 90-16.493 , RCA 1994. Comm. 380), de l'action de
l'assuré en règlement de l'indemnité à la suite d'un sinistre, (Civ. 1re, 3 oct. 1995, no 93-
16.596 , RCA 1995. Comm. 380), de l'action en responsabilité contractuelle exercée contre
l'assureur (Civ. 2e, 9 févr. 2012, no 10-27.032 ), de l'action en exécution d'une transaction
relative au règlement du sinistre (pour une transaction relative un incendie ayant détruit
l'immeuble assuré : Civ. 2e, 19 nov. 2015, no 13-23.095 , D. 2015. 2441 ; RDI 2016. 46,
obs. Noguéro ). Lorsqu'un tiers, à l'exclusion du tiers-victime, invoque le bénéfice de
l'assurance, il peut se voir opposer la prescription biennale par l'assureur : par exemple, pour
le bénéficiaire d'une assurance contractée pour le compte de qui il appartiendra (Civ. 1 re,
17 juill. 1985, RGAT 1986. 359).
§ 2 - Délai
83. Point de départ. - L'article L. 114-1 du code des assurances précise que la prescription
biennale commence à courir à compter de l'événement donnant naissance à l'action. La
jurisprudence est venue préciser la nature de cet événement pour les différents types
d'actions soumises à la prescription. Ainsi pour l'action de l'assuré en réclamation de la
garantie de l'assureur, il s'agit du jour où cet assuré a eu connaissance de la réalisation du
risque de nature à entraîner le jeu de la garantie (Civ. 1re, 14 nov. 2001, no 98-21.616 ,
RGDA 2002. 85, note Bruschi). Pour l'action en paiement de la prime, c'est le jour de
l'échéance de la prime, fixé par le contrat Lorsque la police d'assurance fait dépendre la mise
en jeu de la garantie de certaines conditions, la prescription ne commencera à courir qu'à
compter de leur réalisation, conformément à l'article 2233, alinéa 1er, du code civil. Ainsi en
matière d‘assurance catastrophe naturelle, où la garantie est subordonnée à un arrêté
constatant l'état de catastrophe naturelle, la jurisprudence décide que le point de départ de la
prescription est situé à la date de publication de cet arrêté interministériel (Civ. 1re, 15 déc.
1993, no 91-20.800 , RGAT 1994. 489, note Kullmann). Il pourrait aussi s'agir de la
condition de reconstruction de l'immeuble incendié.
84. Point de départ retardé. - Dans certains cas le point de départ de la prescription
biennale peut être retardé. Ces hypothèses légales sont déterminées par l'article L. 114-1 du
code des assurances : 1) Déclaration irrégulière du risque. En vertu de l'article L. 114-1, 1 du
code des assurances, lorsque l'assureur exerce une action contre le souscripteur en cas de
réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, la prescription ne
commence à courir qu'à compter du jour où l'assureur en a eu connaissance. Est ici visée la
situation où l'assuré a effectué une déclaration irrégulière des risques, sanctionnée par les
articles L. 113-8 et L. 113-9 du code des assurances. 2) Connaissance du sinistre. Selon
l'article L. 114-1, alinéa 2, 2o, du code des assurances, en cas de sinistre, le délai ne court
« que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s'ils prouvent qu'ils l'ont ignoré
jusque-là ». 3) Recours d'un tiers. Selon l'article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances
« quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de
prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou
a été indemnisé par ce dernier. Le point de départ de la prescription sera alors, entre le jour
où le tiers a exercé une action en justice contre l'assuré et le jour où le tiers a été indemnisé
par l'assuré, seul celui des deux événements qui s'est réalisé le premier. De plus, la
jurisprudence prend en considération l'impossibilité d'agir, conformément à l'article 2234 du
code civil qui prévoit que « la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui
dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou
de la force majeure ». On peut y voir une application de l'adage de droit commun « contra
valentem agere non currit praecriptio ». La jurisprudence apprécie de manière stricte
l'impossibilité d'agir, exigeant la démonstration d'un « un obstacle insurmontable à l'exercice
de l'action ». Une hypothèse courante en jurisprudence est celle de l'ignorance du contrat
d'assurance ou de l'identité de l'assureur. Ainsi, la prescription biennale ne court pas contre
un assuré pour compte qui ignorait l'existence d'une garantie souscrite à son profit par une
autre personne (Civ. 1re, 11 oct. 1988, RGAT 1989. 47, note Bigot).
85. Calcul. - Le délai de prescription commence à courir le lendemain, à zéro heure, du jour
où s'est réalisé l'événement qui donne naissance à l'action et expire deux ans après la date
du point de départ, le jour de l'échéance à minuit (C. civ. art. 2229 ). Lorsque le jour de
l'échéance est un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, le délai est prorogé jusqu'au
premier jour ouvrable suivant (C. pr. civ., art. 642 ).
§ 3 - Information de l'assuré
86. Exigence légale. - Selon l'article R. 112-1 du code des assurances les contrats
d'assurance doivent rappeler les dispositions des titres I et II du livre 1 er de la partie
législative du code des assurances relatives à la prescription des actions dérivant du contrat
d'assurance. Le non-respect de cette obligation n'est assorti d'aucune sanction légale.
Toutefois la jurisprudence décide que le défaut d'information sur la prescription entraîne
l'inopposabilité de la prescription ; il est ainsi affirmé que « les polices d'assurance doivent
rappeler les dispositions de la loi concernant la prescription des actions dérivant du contrat
d'assurance ; que l'inobservation de ces dispositions est sanctionnée par l'inopposabilité à
l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du même code » (Civ. 2e, 2 juin
2005, no 03-11.871 , RGDA 2005. 619, note Kullmann).
§ 4 - Interruption et suspension de la prescription
– la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait (C. civ.,
art. 2240 ). La reconnaissance par l'assureur du droit à garantie de l'assuré entraînerait
donc une telle interruption.
88. Causes d'interruption spécifiques du droit des assurances. - Le code des assurances
prévoit quant à lui deux causes d'interruption spécifiques de la prescription biennale : la
désignation d'un expert et l'envoi d'une lettre recommandée. En application de l'article L. 114-
2 du code des assurances, la désignation d'un expert a pour effet d'interrompre la
prescription biennale ; elle n'entraîne toutefois pas la suspension de cette prescription
pendant la durée des opérations d'expertise. Il est cependant fait application de l'article 2239
du code civil qui dispose que « la prescription est également suspendue lorsque le juge fait
droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès. ». Par conséquent
la désignation d'un expert par le juge interrompt la prescription et entraîne la suspension de
son cours jusqu'au dépôt du rapport d'expertise (Civ. 2e, 19 mai 2016, no 15-19.792 , à
paraître au Bulletin). Par ailleurs, selon l'article L. 114-2 du code des assurances,
« l'interruption de la prescription peut, en outre, résulter de l'envoi d'une lettre recommandée
avec accusé de réception adressée par l'assureur à l'assuré en ce qui concerne l'action en
paiement de la prime et par l'assuré à l'assureur en ce qui concerne le règlement de
l'indemnité ».
91. Distinction. - La compétence juridictionnelle doit être envisagée en distinguant les règles
relatives à compétence d'attribution (V. infra, nos 92 s.), déterminant le tribunal matériellement
compétent, de celles relatives à la compétence territoriale (V. infra, no 95) déterminant le
tribunal géographiquement compétent.
92. Compétence des juridictions non répressives. - C'est la nature du contrat d'assurance
(civil, commercial ou mixte) qui permet de déterminer le tribunal compétent. La nature du
contrat dépend quant à elle de la qualité des parties. Si le contrat est civil pour les deux
parties, il relève de la juridiction civile ; il faut alors procéder à des distinctions selon le taux
de compétence. Ainsi, lorsque la demande n'excède pas 4 000 euros (COJ, art. L. 231-3), la
juridiction de proximité est compétente (toutefois les juridictions de proximité devraient être
supprimées à compter du 1er janvier 2017 ; le tribunal d'instance serait alors compétent pour
connaître des litiges portant sur une somme inférieure à 4 000 euros). Lorsque la demande
est comprise entre 4 000 et 10 000 euros, le tribunal d'instance est compétent (COJ,
art. L. 221-4 ), et lorsque la demande est supérieure à 10 000 euros, c'est le tribunal de
grande instance qui devient compétent (COJ, art. L. 211-3 ). En revanche, si le contrat est
commercial pour les deux parties : le tribunal de commerce est compétent. Par ailleurs, si le
contrat est mixte, c'est-à-dire de nature civile pour l'une des parties mais de nature
commerciale pour l'autre, on procède à une distinction : ainsi le demandeur commerçant n'a
la possibilité que de saisir la juridiction civile, tandis que le demandeur non commerçant
dispose d'une option : il peut attraire le défendeur soit devant la juridiction commerciale, soit
devant la juridiction civile. Ainsi, un assuré particulier non commerçant peut, selon son choix,
assigner une compagnie d'assurances commerciale devant le tribunal de commerce ou la
juridiction civile.
94. Compétence des juridictions répressives. - Les juridictions pénales sont compétentes
pour connaître des infractions pénales commises par l'assuré. L'article 2 du code de
procédure pénale ne permet toutefois l'accès au procès en qualité de partie qu'à « ceux qui
ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ». Or l'assureur
n'est pas victime de l'infraction pénale et son seul lien avec l'infraction réside dans son
obligation de garantie issue du contrat d'assurance. Cependant la loi n o 83-608 du 8 juillet
1983 autorise la mise en cause de l'assureur ou son intervention en tant que partie au procès
pénal de l'assuré mais en la limitant aux hypothèses d'homicide ou blessures involontaires. À
titre d'exemple l'assuré qui en mettant le feu à ses biens provoque la mort d'autrui commet un
homicide involontaire (C. pén., art. 221-6 ) qui rendrait possible la mise en cause de
l'assureur. Pour les autres infractions, telles que les blessures volontaires, le vol… l'assureur
demeure un tiers au procès pénal de l'assuré. La Cour de cassation refuse d'étendre les
dispositions de la loi de 1983 aux autres chefs d'accusation. Ainsi, elle rejette l'intervention de
l'assureur lorsque le prévenu est poursuivi pour incendie volontaire (Crim. 2 mars 1988,
RGAT 1989. 332, note Margeat). Par ailleurs, l'article 388-1 du code de procédure pénale fixe
les limites de l'intervention de l'assureur. Ainsi, seuls peuvent intervenir l'assureur de
responsabilité du prévenu ou de la personne civilement responsable du prévenu, lorsque la
victime a exercé une action civile en réparation et l'assureur ayant indemnisé la victime, par
exemple l'assureur de biens de la victime de l'infraction. Sont possibles tant l'intervention
volontaire de l'assureur que son intervention forcée ou sa mise en cause par l'une des parties
au procès. Par exemple la victime du dommage causé par l'assuré met en cause l'assureur
de responsabilité de celui-ci. En intervenant au procès pénal, l'assureur dispose alors de la
possibilité de débattre contradictoirement des intérêts civils de l'assuré. Dès lors la décision
relative à ces intérêts lui sera opposable.
§ 2 - Compétence territoriale
95. Principe. - L'article R. 114-1 du code des assurances fixe ici les règles relatives à la
compétence territoriale et pose le principe de la compétence du tribunal du domicile de
l'assuré dans toutes les instances relatives à la fixation et au règlement des indemnités dues.
Cette règle est impérative : il est ainsi interdit aux assureurs d'insérer dans leurs contrats des
clauses attributives de compétence au tribunal du lieu de leur siège social. Les actions ayant
un objet autre que la fixation et le règlement d'une indemnité d'assurance obéissent quant à
elles aux règles de compétence de droit commun. Le tribunal territorialement compétent est
donc celui du domicile du défendeur, sauf disposition contraire (C. pr. civ., art. 42 ). La
victime qui exerce l'action directe contre l'assureur dispose quant à elle d'une option entre les
règles posées par l'article R. 114-1 du code des assurances et celles des articles 42 et
suivants du code de procédure civile. Par exception, pour les assurances de choses
garantissant les immeubles ou les meubles par nature, telles que les assurances incendie de
ce type, l'article R. 114-1, alinéa 1er, du code des assurances prévoit que le tribunal
compétent est celui de la situation des objets assurés ; afin de faciliter le déroulement des
éventuelles expertises.
Index alphabétique
■Accident ménager 16
■Animaux domestiques 33
■Assurances de responsabilité 26 s.
⚪
responsabilité contractuelle 28 s., 51 s.
⚪
valeurs assurées 51
⚪
responsabilité délictuelle 50
⚪
responsabilité extracontractuelle 29
⚪
valeurs assurées 50
V. Indemnisation (assurances de responsabilité)
■Bail
⚪
frais 36
⚪
perte d'usage, de loyers 36, 51
⚪
responsabilité contractuelle 28 s.
⚪
valeurs assurées 51
■Bâtiments
⚪
garantis 32, 34
⚪
indexation 46
⚪
reconstruction 41, 42
■Biens garantis 32 s.
⚪
affectés à la vie privée 33
⚪
immobiliers 32
⚪
professionnels 33 s.
■Canalisation électrique 18
■Catastrophe technologique 23 s.
⚪
plan de prévention des risques technologiques 24
■Chaleur 16
■Choc, chute 19
■Clôture (non-garantie) 32
■Coassurance 5 s.
■Communication d’incendie 27
■Contentieux
V. Litige relatif au contrat d’assurance incendie
■Contrat d'assurance 5 s.
■Copropriété
⚪
catastrophe technologique 23
⚪
syndicat, responsabilité contractuelle 28 s.
■Cotisation
V. Prime
■Coup d'eau 16
■Cumul d'assurances 61
■Cyclone 21, 37
■Dépôt 28 s., 51
■Détecteurs de fumée 54
■Émeute 25, 35
■Énergie nucléaire
⚪
catastrophe technologique, exclusion 23
■Expertise 71 s.
⚪
clause d'obligation d'expertise amiable contradictoire 71
⚪
clôture, délai, retard 73
⚪
conclusions, inopposabilité 78
⚪
experts
⚪
assistance d'un sapiteur 72
⚪
désignation 71, 73
⚪
mission 72
■Explosion 16
■Faute
⚪
intentionnelle ou dolosive de l'assuré 11
⚪
responsabilité extracontractuelle 27
■Foudre 16
■Frais 36
⚪
valeurs assurées 44
■Franchise 57, 63
■Fumée 16
■Fumeurs 16
■Garantie
⚪
déchéance pour défaut ou retard de déclaration de sinistre 66
⚪
événements garantis 11 s.
V. Assurances de choses (garantie), Assurances de responsabilité
■Guerre 35
■Incendie (notion) 15 s.
■Marchandises 34, 41
■Mobilier 33 s.
■Objet de valeur
⚪
évaluation, valeur agréée 41
⚪
non-garantie 33
■Obligation d’assurance 29
■Perte
⚪
de la chose assurée 35
⚪
d'exploitation 37, 62
⚪
valeurs assurées 45
⚪
indirectes 36
⚪
valeurs assurées 44
■Plantations (non-garantie) 32
■Prime 52 s.
⚪
non-paiement, sanctions 53
■Professionnel
⚪
biens garantis 34
■Rayonnement ionisant 19
■Risque 8 s.
⚪
catégories 5, 52
⚪
circonstances 9 s.
⚪
notion 8
■Sabotage 25
■Sinistre (déclaration) 66
■Sous-assurance 62, 64
■Subrogation 76
■Support d'information 34
■Surassurance 60
■Tempête 21, 37
■Terrain
⚪
affaissement 22
⚪
non-garantie 32
■Terrorisme 25
■Tremblement de terre 19
■TVA 58
■Valeurs assurées 39 s.
⚪
fixation 39
V. Assurances de responsabilité, Valeurs assurées (assurances de choses)
Création des tribunaux judiciaires La loi no 2019-222 du 23 mars 2019 (JO 24 mars), dite
de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, a été adoptée pour simplifier les
procédures judiciaires. Ainsi, depuis le 1er janvier 2020, les tribunaux de grande instance ont
fusionné avec les tribunaux d'instance pour devenir les tribunaux judiciaires.
22. Régime d'assurance CatNat : sols argileux. - Une ordonnance du 8 février 2023
apporte des modifications substantielles à l'assurance contre les catastrophes naturelles
(CatNat) afin de renforcer la prise en charge des sinistres causés par le phénomène naturel
de retrait-gonflement des sols argileux (RGA) (Ord. n o 2023-78 du 8 févr. 2023, JO 9 févr.,
D. actu. 7 mars 2023, obs. J. Delayen).