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DOCUMENTATION
30/09/2008
Utilisation du plutonium
dans les REP
e combustible au plutonium mis au point pour les réacteurs à eau légère est
L aujourd’hui un produit industriel utilisé par les exploitants de centrales en
Belgique, en Allemagne, en Suisse et en France.
Le MOX (« Mixed Oxides ») est le nom couramment utilisé pour désigner ce
combustible. Il se présente sous la forme d’une céramique dans laquelle l’oxyde
de plutonium (PuO2) est intimement mélangé avec une matrice d’oxyde d’ura-
nium (UO2), cet uranium pouvant être naturel, appauvri ou issu du retraitement.
Le plutonium n’existe pas dans la nature. Il est formé en réacteur par capture
de neutrons. Une partie est consommée par fission in situ, le reste est présent
dans le combustible usé déchargé du réacteur.
Le plutonium est une matière fissile à fort potentiel énergétique. Un gramme
de plutonium dans le MOX produit la même quantité d’électricité qu’une tonne
de pétrole.
Initialement prévu pour être utilisé dans les réacteurs à neutrons rapides, le
plutonium peut se substituer à l’uranium 235 dans les réacteurs à eau. Cette uti-
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Uranium de retraitement
Fabrication
Retraitement des éléments
Plutonium combustibles
Combustible neuf
Piscine,
UOX Réacteur Transport
site
Entreposage
Fabrication assemblages
Retraitement Conditionnement
MOX URE
Conversion, Entreposage
enrichissement longue durée
Plutonium
Conditionnement
Actinides mineurs
Produits de fissions
Fabrication
Conditionnement
assemblages
des déchets
ou cibles
RNR ou Stockage
réacteur adapté définitif
l’usine de La Hague pour le retraitement des combustibles irradiés Or, le combustible déchargé des REP contient du plutonium dont
était d’ailleurs à l’étude. Ceux-ci fonctionnant en surgénérateur les isotopes impairs sont fissiles dans les REP et de l’uranium dans
permettraient une économie importante d’uranium enrichi. lequel la proportion d’isotope 235 est supérieure à celle de
Au début des années 1980, l’ajournement d’un développement l’uranium naturel. Le retraitement du combustible usé permet
massif des RNR était décidé. Seuls les réacteurs rapides Phénix et d’extraire ces matières. Retraitement, MOX, utilisation de l’uranium
Superphénix seraient alors à même de mobiliser du plutonium issu du retraitement constituent un ensemble cohérent d’utilisation
sachant que des capacités de retraitement existaient. des matières valorisables.
Cette situation nouvelle a conduit EDF, en liaison entre autres L’utilisation du plutonium dans les REP permet à court terme :
avec ses partenaires industriels Cogema, Framatome et le CEA, à — d’économiser de l’uranium enrichi ; le plutonium avec ses
réexaminer sa politique du cycle du combustible. isotopes 239 et 241 présente de bonnes qualités neutroniques ;
Dans le cadre d’une recherche de politique cohérente du cycle du — d’utiliser comme support dans la fabrication du MOX de l’ura-
combustible et en particulier pour ce qui concerne la partie aval nium appauvri dont les stocks augmentent à la sortie des usines
(figure 2), retraitement et utilisation des matières fissiles récupéra- d’enrichissement ;
bles participent à la réduction du coût de production du kilowatt- — de diminuer le nombre d’assemblages à entreposer en piscine.
heure en valorisant ces matières. Dans la mesure où retraitement et MOX sont associés, le recyclage
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dans les REP conduit à diminuer d’un facteur d’au moins quatre le — les pays dont la politique n’est pas totalement arrêtée : Espa-
nombre d’assemblages à entreposer. En effet, pour disposer du plu- gne, Corée du Sud, Taiwan… ;
tonium nécessaire à la fabrication d’un assemblage MOX, il faut — les pays qui ont décidé de stocker les assemblages et de ne pas
retraiter environ quatre assemblages UO2. retraiter le combustible : États-Unis, Suède, Finlande.
Vis-à-vis de la non-prolifération et du contrôle des matières sensi- Début 1997, 25 réacteurs de type REP ou REB répartis dans quatre
bles, la position française, qui consiste à ne retraiter que la quantité pays contenaient des recharges avec assemblages MOX : 11 en
de combustible irradié strictement nécessaire à la fabrication du France (dont St Laurent B1 depuis 1987), 9 en Allemagne (dont Obri-
MOX utilisable à très court terme, évite la constitution de stock de gheim depuis 1972), 3 en Suisse et 2 en Belgique.
plutonium.
Aujourd’hui, les usines de fabrication à l’échelle industrielle des
Cette stratégie préserve le long terme : assemblages MOX sont à :
— une utilisation du plutonium dans les REP n’a pas d’incidence — Dessel en Belgique ;
sur le développement futur d’un parc de RNR, la qualité du pluto- — Cadarache et Marcoule (usine MELOX) en France ;
nium issu du retraitement d’assemblages MOX convenant parfaite- — Sellafield en Grande-Bretagne.
ment à un cœur RNR ;
— une tension sur le marché international des matières énergéti-
ques n’est pas à exclure. Dans ce cas, on pourrait assister à un redé-
marrage de l’énergie nucléaire pour la production d’électricité. Une
forte demande en uranium en découlerait, demande qui vraisembla- 1.4 Stratégie de retraitement
blement ne pourrait être assurée qu’après ouverture ou réouverture et économie du MOX
de gisements ce qui prendrait du temps. Le plutonium mais aussi
l’uranium issu du retraitement seraient alors fortement valorisés ;
— concernant l’environnement, l’utilisation du plutonium dans
les REP ne modifie pas sensiblement les choses : les quantités de L’économie du recyclage du plutonium dans les réacteurs, qu’ils
produits de fission sont du même ordre de grandeur qu’avec l’UO2 soient à neutrons thermiques comme les REP ou à neutrons rapides,
(figure 6), les quantités de plutonium sont légèrement diminuées est un sujet complexe. Le recyclage est en effet difficile à isoler de
(20 à 30 %) et les quantités d’actinides mineurs légèrement augmen- l’ensemble du cycle de combustible, jusqu’au stockage définitif des
tées. déchets, sans oublier évidemment le retraitement du combustible
usé. L’Agence de l’Énergie Nucléaire (AEN) de l’OCDE a comparé
Considérant que le recyclage des matières valorisables, pluto- l’ensemble des cycles avec ou sans retraitement et a conclu, d’une
nium et uranium issus du retraitement des combustibles irradiés part, que des incertitudes importantes (1 à 2 c/kWh) affectaient les
restait la voie privilégiée de l’aval du cycle du combustible, la déci- deux stratégies, d’autre part, que la différence de coût entre les
sion a été prise en 1985 de charger dans des REP du combustible au deux stratégies était inférieure à cette incertitude mais impossible à
plutonium. Certaines dispositions administratives avaient d’ailleurs chiffrer dans l’état actuel des connaissances.
été prises puisque les décrets d’autorisation prévoyaient cette
possibilité pour seize tranches REP de 900 MW : Tricastin 1 à 4, Comme rappelé précédemment, la France a choisi la stratégie de
Gravelines 1 à 4, Dampierre 1 à 4, St Laurent B1 et B2 et le Blayais 1 retraitement dans une perspective de valorisation des matières
et 2. fertiles (uranium appauvri) et fissiles (plutonium) dans les réacteurs
à neutrons rapides et s’est dotée des installations correspondantes.
Une telle décision prise après avoir pesé les réalités et les Aujourd’hui, les installations de retraitement existent, et le retraite-
contraintes politiques, techniques, industrielles, économiques, envi- ment est considéré aussi (d’abord ?) comme une des voies possi-
ronnementales et sociales a nécessité études et compléments bles de gestion des déchets non recyclables. Le plutonium produit
d’investissements : apparaît alors comme un sous-produit dont la seule valorisation
— au niveau des centrales en vue d’obtenir les autorisations de possible à court terme est le recyclage dans les REP.
recevoir et de charger du MOX puis d’assurer un fonctionnement C’est dans ce nouveau contexte que se font les évaluations
des tranches dans des conditions normales de sûreté et de économiques : d’un côté, le retraitement et la gestion des déchets
performances ; (conditionnement, entreposage, stockage), ce dernier poste faisant
— au niveau de l’industrie du cycle : conception de l’assemblage l’objet de provisions ; de l’autre le recyclage proprement dit,
mais aussi décision de construire à Marcoule l’usine de fabrication comprenant la conversion du plutonium et de l’uranium appauvri, et
de MOX appelée MELOX. Elle est conçue pour fabriquer dans un la fabrication du combustible.
premier temps de l’ordre de 120 t/an de MOX. Dans ces conditions, avec les coûts actuels d’enrichissement de
En 1987, la tranche St Laurent B1 divergeait avec en réacteur une l’uranium et de fabrication de l’un et l’autre combustibles, les coûts
première recharge contenant du MOX. de cycle seront pratiquement les mêmes, avec peut-être un léger
avantage pour le MOX, dès que les durées de séjour en réacteur
seront les mêmes – ce que l’on nomme « parité ». Ce n’est pas
encore le cas, comme nous le verrons (§ 3), les assemblages MOX
ne restant dans le cœur que pendant trois cycles au lieu de quatre
1.3 Situation et perspectives industrielles pour les assemblages UO2. Il en résulte, transitoirement, un surcoût
internationales d’environ (5 %) (0,25 à 0,3 centime) pour le cycle MOX.
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Dans un REP, la production de plutonium a pour origine la capture 900 MW 4 cycles annuelle 3,7 %
d’un neutron par un noyau d’uranium 238. Le processus se déroule 1 300 MW 3 cycles 18 mois 4%
en réacteur selon le schéma simplifié de la figure 3.
1 450 MW 4 cycles annuelle 3,4 %
La composition isotopique du plutonium utilisé pour fabriquer le
MOX sera celle du combustible irradié retraité pour en extraire ce
plutonium. En première approximation la composition du combus-
tible irradié dépendra du taux de combustion de l’assemblage Avec le MOX, le gestionnaire va rechercher la même longueur de
(tableau 1). campagne qu’avec l’assemblage UO2.
Une formule d’équivalence permet de définir, à partir de la
Tableau 1 – Composition du combustible irradié connaissance de sa teneur isotopique, la teneur en plutonium de
en fonction du taux de combustion l’assemblage MOX qui fournira la même énergie que l’assemblage
UO2 qu’il remplace.
Taux de combustion Cette teneur (t ) est définie comme le rapport entre la masse des
des assemblages Composition isotopique (en %) isotopes lourds contenus dans le dioxyde de plutonium et la masse
retraités des isotopes lourds contenus dans l’oxyde mixte :
(MWj/t) 239Pu 240Pu 241Pu 242Pu
masse (Pu + Am)
t = -----------------------------------------------------------
33 000 57,1 23,5 11,9 5,5 masse (U + Pu + Am)
45 000 53,2 24,2 12,5 6,9 L’enrichissement équivalent du combustible MOX sera celui du
60 000 49 24,9 13 8,4 combustible UO2 qu’il va remplacer dans la recharge (Ue).
Dans le combustible MOX, la matrice support est constituée
d’uranium appauvri en 235U (Uapp).
Les isotopes du plutonium évoluant hors réacteur, la proportion Ces différents paramètres peuvent se relier entre eux par la
de noyaux fissiles, donc la capacité à fournir de l’énergie, dépendra relation :
du « vieillissement » du MOX à la date de sa mise en réacteur. Ue = Uapp (1 – t ) + α t
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α = ∑ αi pi
avec αi le facteur d’équivalence de chacun des isotopes,
pi la proportion massique de l’isotope i.
Les isotopes considérés sont : 238Pu, 239Pu, 240Pu, 241Pu, 242Pu,
241Am.
Le tableau 3 donne les valeurs des sections efficaces de fission et t teneur en plutonium
de capture des différents isotopes du plutonium et de l’uranium
pour un assemblage MOX enrichi à 5,3 % en Pu (calculs EDF- Figure 4 – Exemple de zonage d’assemblages MOX,
SEPTEN). dessin initial Saint Laurent B1
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Tableau 4 – Compositions isotopiques des plutoniums dans le MOX en fonction de leur origine
Composition isotopique (en %)
Origine du plutonium
238Pu 239Pu 240Pu 241Pu 242Pu 241Am Pu équivalent (**)
(%)
UNGG U naturel 5 GWj/t 0,2 72,7 22,2 4,1 0,8 < 0,1 4,04
REP e = 1,8 % (*) 10 GWj/t 0,6 66,6 21,1 8,1 2,6 1,0 4,38
REP e = 3,25 % 33 GWj/t 1,8 57,9 22,5 11 5,6 1,1 5,3
e : enrichissement en 235U.
(*) Combustible de la région la moins enrichie d’un premier cœur REP 900 MW
(**) Plutonium équivalent à de l’uranium enrichi à 3,25 %.
UNGG : Uranium naturel gaz graphite
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N Pu2 Pu2 N
N Pu2 Pu2 N
10–2 235U
N Pu0 Pu0 N
233
N UO2 neuf Figure 7 – Courbes de distribution des produits de fission des U-
235
Pu0 MOX neuf U - 239Pu dans un flux thermique
Pu1 MOX irradié 1 cycle
Pu2 MOX irradié 2 cycles En complément des études relatives au cœur évoquées précédem-
ment, l’encadré liste les principaux thèmes analysés et résume les
Figure 6 – Plan de chargement à l’équilibre principales conclusions.
Ces écarts proviennent, d’une part, de l’activité des assemblages Principaux thèmes analysés et principales conclusions
neufs, d’autre part, de la distribution des produits en fission Fabrication du MOX ●
(figure 7) modifiant ainsi le terme source dans le cœur.
La sûreté et les aspects radioprotection sont analysés dans le
Ces aspects sont traités dans l’article [B 3 655] Produits de fission.
cadre de l’autorisation du démarrage de l’usine MELOX.
Des dispositions particulières ont été prises au niveau de la manu- ● Transport des assemblages neufs
tention et de l’examen des assemblages neufs sur site, afin de mini-
miser l’exposition des intervenants. Les châteaux de transport ont été modifiés pour prendre en
Concernant l’activité du réfrigérant primaire, des spécifications compte les paramètres suivants :
— la puissance dégagée par les assemblages MOX ;
identiques à celles définies pour les cœurs UO2 ont été reconduites
— la radioprotection avec les débits de dose dus aux neutrons
en cas de rupture de gaine.
émis par le plutonium et aux γ en provenance, en particulier, de
Une attention particulière a été portée sur la production de tritium l’américium 241.
qui, dans un REP, a deux origines distinctes : ● Manutentions en centrale des assemblages neufs
— les réactions neutroniques sur les produits employés pour le
L’activité des assemblages MOX a nécessité l’installation
conditionnement chimique du réfrigérant primaire (10B, 6Li, 7Li),
d’une protection biologique dans le poste d’examen du combus-
dont les teneurs sont plus élevées dans un cœur « moxé » ;
tible. Les assemblages neufs sont stockés directement sous eau
— la formation par fissions dans le combustible et la diffusion dans la piscine et ne transitent pas par le bâtiment combustible.
d’une fraction minime au travers du gainage en zircaloy.
● Entreposage du combustible usé en piscine de désacti-
Bien que des études théoriques aient fait apparaître une augmen- vation
tation de la production de tritium avec le combustible MOX, le
retour d’expérience ne l’a pas confirmé. La puissance résiduelle du MOX décroît plus lentement que
celle de l’UO2. Alors qu’un assemblage UO2 peut être transporté
L’analyse des conséquences radiologiques des accidents entraî- au bout d’un an, il faut attendre deux ans et demi pour que la
nant des ruptures de gaine, voire la fusion du cœur, est menée en puissance de l’assemblage MOX atteigne la même valeur.
comparant les inventaires des produits de fission des cœurs tout
● Transport du combustible irradié
UO2 et des cœurs « moxés ». Les termes sources étant très proches
les assemblages MOX ne modifient pas l’ordre de grandeur des acti- Compte tenu des caractéristiques du conteneur de transport
vités. (TN12) et des assemblages irradiés, chaque transport contient
quatre assemblages MOX et huit assemblages UO2.
● Retraitement du combustible irradié
2.3.4 Incidence du MOX sur le cycle
du combustible Le retraitement du MOX est analysé dans le cadre des autori-
sations de fonctionnement de l’usine de la Hague. Des actions
La constitution des dossiers présentés à l’autorité de sûreté en de recherche et de développement spécifiques ont permis de
vue d’obtenir l’autorisation de mettre du MOX en réacteur a néces- vérifier que le MOX était retraitable. A ce jour, EDF n’a pas pris
sité un balayage de l’ensemble du cycle du combustible afin de la décision de faire retraiter les assemblages MOX. Ce sujet est
mettre en évidence les différences par rapport au cycle à l’uranium. développé dans l’article « Cycles du combustible ».
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3. Voies de développement un cœur contenant des assemblages UO2 et MOX présenterait des
contraintes importantes.
L’augmentation du rapport de modération du cœur, en retirant
Elles se situent dans deux directions : des crayons de combustible ou en modifiant le pas du réseau de
l’assemblage est une voie qui vise aussi à augmenter la consomma-
— recherche à court et moyen termes d’une utilisation plus éco- tion de plutonium. Le réacteur à modération accrue (RMA) présente
nomique du MOX ; cependant l’inconvénient d’avoir une puissance volumique plus
— investigations permettant de définir des voies qui permet- faible ce qui, à puissance de cœur équivalente, conduirait à une
traient une utilisation plus massive du plutonium en associant éven- augmentation des dimensions de la cuve.
tuellement le recyclage des actinides mineurs.
D’une façon générale, l’augmentation de la quantité de plutonium
dans le cœur ne peut qu’exacerber les phénomènes. Aussi l’effica-
cité du contrôle du cœur doit-elle être particulièrement examinée.
3.1 Amélioration de la gestion actuelle L’analyse de situations accidentelles fait apparaître certaines limita-
tions, par exemple sur la teneur en plutonium à ne pas dépasser, et
une grande sensibilité à la composition isotopique.
Baisser le prix de revient du kilowattheure, souci permanent du
producteur d’électricité, passe par la recherche d’une baisse de la
part du combustible (coût du cycle) dans ce prix.
Dans la gestion actuelle dite « hybride » les assemblages UO2
3.3 Maîtrise des masses de plutonium
restent pendant quatre campagnes en réacteur alors que les assem- et d’actinides mineurs
blages MOX sont déchargés au bout de trois. Ce déficit de l’ordre de
15 % du taux de combustion du MOX par rapport à l’UO2 conduit à
un coût de cycle supérieur d’environ 5 % au coût du cycle d’un cœur Le multirecyclage du plutonium et des actinides mineurs, dont la
tout UO2. faisabilité dans les réacteurs à neutrons rapides fait l’objet de
programmes dans le réacteur Phénix, fait également l’objet
Plusieurs méthodes ont été développées pour comparer sur le d’études pour les REP.
plan économique MOX et UO2 (études OCDE, AIEA, EDF…). Ces
études deviennent rapidement complexes dès que sont envisagées Sur le plan de la physique, le recyclage dans un réacteur à
différentes hypothèses sur l’aval du cycle (cf. § 1.4). neutrons thermiques est moins favorable que dans un RNR, du fait
que les isotopes pairs du plutonium n’y sont pas fissiles ; ceci a
En se limitant à l’amont du cycle et en considérant une production deux conséquences :
d’énergie égale les composantes du coût de cycle sont :
— la nécessité d’un surenrichissement pour compenser la perte
— le prix de l’uranium naturel, de la conversion, de l’enrichisse- de réactivité ; on atteint assez rapidement un taux de vide positif, ce
ment et de la fabrication du combustible ; qui est une limite de sûreté ;
— le coût de l’uranium appauvri converti en oxyde (faible) et le — une production accrue d’actinides mineurs, ce qui n’est guère
coût de fabrication (de l’ordre de 4 à 5 fois celui de l’UO2). favorable à leur incinération.
L’augmentation du taux de combustion du MOX fait, en relatif, Des études ont montré cependant qu’il n’était pas strictement
baisser le poste fabrication dans le coût du cycle. impossible de faire du multirecyclage et d’incinérer des actinides
Le projet « Parité MOX » initié par EDF est basé sur la recherche dans les REP, au moins en les diluant dans une matrice d’uranium
d’une utilisation des assemblages MOX dans les mêmes conditions légèrement enrichi ; l’économie d’une telle solution reste à étudier.
que les assemblages UO2. Tous les assemblages resteraient alors
pendant quatre campagnes en réacteur. Dans ces conditions, le coût
de cycle d’une gestion avec MOX rejoindrait celui d’une gestion tout
UO2 et pourrait même être inférieur.
Le taux de combustion des assemblages MOX doit être d’au
4. Actions de recherche
moins 50 000 MWj/t. La teneur en plutonium, équivalente à et de développement
l’uranium enrichi à 3,7 % des assemblages UO2, pourra selon les
caractéristiques du combustible retraité duquel sera issu le pluto-
nium, atteindre 7 %.
4.1 Évolution des actions de recherche
La mise en œuvre de cette nouvelle gestion suppose :
et développement sur le MOX
— la qualification d’un combustible MOX pour un taux de com-
bustion d’au moins 50 000 MWj/t ;
— l’aboutissement des études relatives à la chaudière (analyses La décision de recycler, à l’échelle industrielle, du plutonium dans
liées à la sûreté et au fonctionnement), une évaluation des inciden- les REP a été prise à une époque où l’essentiel de l’expérience fran-
ces sur l’ensemble du combustible. çaise sur la fabrication et le comportement du combustible était issu
de l’expérience sur le RNR.
L’étendue des connaissances et la richesse de l’expérience issues
3.2 Augmentation de la quantité des travaux sur les oxydes mixtes des RNR : techniques de fabrica-
tion, propriétés des oxydes d’uranium et de plutonium, comporte-
de plutonium dans les cœurs ment sous irradiation, retraitement…, ont constitué un héritage
appréciable.
Les taux de recyclage dans les REP est actuellement limité à 30 % En parallèle aux développements du combustible RNR, l’intérêt
d’assemblages MOX. Des études à caractère prospectif ont été pour le combustible MOX commençait à apparaître tant en France
entreprises afin d’évaluer les possibilités d’augmenter la proportion qu’à l’étranger.
de MOX. Dès 1963, le premier assemblage MOX fabriqué par Belgonu-
Le REP 100 % MOX a été particulièrement étudié. Un tel cœur cléaire était chargé dans le réacteur BR3 en Belgique.
présenterait l’avantage de ne pas nécessiter de zonage pour les En 1968, le réacteur bouillant italien de Garigliano recevait une
assemblages. Par contre, le passage d’un cœur tout plutonium vers recharge de combustible MOX.
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Suivait, sous l’égide d’EURATOM, un programme de recherches — qualifier la méthode de calcul des puissances locales à partir
destiné à valider les outils de calcul de neutronique. Les expériences des mesures internes dans certains assemblages ;
critiques réalisées dans les réacteurs Minerve et Eole du CEA, sur — valider le calcul des absorbants insérés dans des assemblages
différentes configurations d’assemblages ont permis de mesurer MOX ;
certains paramètres fondamentaux de la physique du cœur : distri- — conforter les moyens d’étude du coefficient de vidange.
bution de puissance, efficacité des absorbants, effet Doppler, coeffi-
cient de température… ■ Suite du programme EPICURE, le programme MISTRAL (MOX
Le programme EURATOM a mis en œuvre, dans le réacteur de la Investigation of Systems Technically Relevant of Advanced Light
centrale nucléaire des Ardennes, le chargement d’assemblages water reactor) est dédié à l’étude des cœurs 100 % MOX. Lancé en
MOX expérimentaux de deux types différents : « tout plutonium » 1996, il doit s’achever en 2000. Réalisé dans le réacteur Eole, il fait
(Westinghouse) et à « îlots plutonium » (association Belgonucléaire- l’objet d’une collaboration entre les trois partenaires français Fra-
CEA-RBU). Des crayons ont fait l’objet d’analyses isotopiques sur matome, CEA, EDF et le Nuclear Power Engineering Corporation au
l’uranium, le plutonium et les actinides mineurs ainsi que Japon.
d’examens destructifs en laboratoire chaud. Dans le cadre des études de stratégies envisageant des augmen-
En Europe, dès 1968, Alkeim en Allemagne fabriquait des assem- tations de quantité de plutonium dans les cœurs, il est important de
blages MOX dans son usine de Hanau. connaître la limite admissible vis-à-vis des critères de sûreté et, en
En Suisse, des assemblages MOX étaient chargés dans le réac- particulier, du coefficient de vidange.
teur Beznau 1. En France, une expérimentation était lancée dans la
CAP (chaudière avancée prototype) au CEA. Elle contenait deux ■ L’expérience VIPO (Void coefficient measurement In Plutonium
types d’assemblages fabriqués, les uns par Belgonucléaire, les mixed Oxyde lattice) avait pour but de compléter la qualification du
autres par le CEA au CFCa. schéma de calcul du coefficient de vidange pour des teneurs en plu-
Prise en compte de l’expérience sur le RNR, acquisition de tonium de 9,7 à 14,4 %. Ce programme réalisé dans la pile VENUS
connaissance en neutronique et sur le combustible ont contribué à (Vulcain Experimental Nuclear Studies) du Centre d’études nucléai-
conforter le dossier qui a conduit à la décision française de 1985 : le res de Mol en Belgique, en collaboration avec le Japon, l’Angleterre,
recyclage du plutonium dans les REP. la Belgique et la France complète le programme EPICURE.
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Dans le cadre de recherches de solutions concernant l’aval du présentés à l’autorité de sûreté en vue de l’obtention des autorisa-
cycle, plusieurs voies d’investigation prenant en compte les REP tions de chargements du MOX et de l’exploitation des tranches.
sont explorées afin de réduire les masses de plutonium et d’acti- Ces dossiers analysés et critiqués par les Départements spécia-
nides mineurs. lisés de l’IPSN ont fourni les éléments présentés aux différents
groupes permanents chargés de donner avis et recommandations
sur la sûreté des tranches nucléaires et des installations du cycle,
■ Les informations techniques contenues dans cet article provien- qui se sont réunis plusieurs fois depuis 1986.
nent essentiellement des études menées en France dans le cadre de
l’utilisation du MOX en REP. Placées sous la responsabilité techni- Parmi les très nombreux documents sur le MOX, des synthèses
que du SEPTEN, de la Direction de l’Équipement à EDF, elles sont la récentes sont particulièrement intéressantes.
contribution de multiples acteurs : Citons les réunions techniques organisées par la Société fran-
— le CEA, FRAMATOME, FRAGEMA, COGEMA, Belgo- çaise d’énergie nucléaire :
nucléaire … — le 27 octobre 1995 : la R et D du combustible MOX dans les
— à EDF : les services chargés de la stratégie et des Études éco- réacteurs à eau sous pression ;
nomiques, la délégation aux Combustibles, l’Exploitation du Parc — le 17 juin 1997 : 1987-1997 10 ans de combustible MOX en
nucléaire, la Direction des Études et Recherches ; France ;
— au sein de la Direction de l’Équipement : le Service de la Qua- — et les articles parus dans la Revue Générale Nucléaire ;
lité des Réalisations, les Centres d’Ingénierie et les différents dépar- — le Plutonium : n° 1 - 1995 ;
tements du SEPTEN. — Cycle du Combustible - Recherches et Réalisations : n° 2 -
1996 ;
Ces très nombreuses études de faisabilité ou de réalisation ont — Les Avancées dans le Domaine du Combustible Nucléaire :
contribué à la réalisation de dossiers qui, pour la plupart, ont été n° 3 - 1997.
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