Les Zones de Transition Forêt

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Les Zones de Transition Forêt-Savane du Cameroun

I. Introduction générale

La phytogéographie, discipline qui étudie la distribution des plantes à travers le monde et les facteurs
qui influencent cette répartition, revêt une importance particulière au Cameroun. Ce pays, situé au
cœur de l’Afrique centrale, présente une diversité écologique exceptionnelle, allant des forêts denses
et humides du sud aux savanes sèches du nord. Entre ces deux grands biomes se trouvent des zones
de transition, appelées écotones, où les caractéristiques de la forêt et de la savane se rencontrent et
interagissent.

Ces zones de transition sont d’un intérêt scientifique majeur en raison de leur biodiversité unique et
de leur rôle crucial dans le maintien des équilibres écologiques. Elles abritent une grande variété
d’espèces végétales et animales, et jouent un rôle essentiel dans la régulation climatique, la
conservation des sols et la fourniture de services écosystémiques vitaux.

Ce devoir a pour objectif d’explorer en profondeur les zones de transition au Cameroun, en


s’appuyant sur les travaux de René Letouzey, un pionnier de la phytogéographie dans cette région.
Nous examinerons les aspects bio-physiques, la localisation, la composition floristique, les menaces,
ainsi que les biens et services écosystémiques de ces zones. En mettant en lumière l’importance de
ces écotones, nous espérons contribuer à une meilleure compréhension et à une conservation
efficace de ces précieux écosystèmes.

II. Présentation biophysique

Les zones de transition forêt-savane au Cameroun représentent une interface écologique où les
forêts tropicales humides rencontrent progressivement les savanes. Ces zones sont caractérisées par
des facteurs climatiques, topographiques, édaphiques (relatifs au sol) et hydrologiques qui
influencent la répartition de la végétation et la biodiversité.

➢ Le climat
Désigne l’ensemble des conditions météorologiques moyennes observées sur une longue
période (généralement 30 ans) dans une région donnée. Il prend en compte des paramètres
tels que la température, les précipitations, l’humidité, le vent et la pression atmosphérique.

Les zones de transition forêt-savane du Cameroun se situent principalement sous un climat soudano-
guinéen. Ce climat se caractérise par :

• Deux saisons principales : une saison sèche prolongée (5 à 7 mois) et une saison des
pluies (5 à 6 mois).

• Températures moyennes annuelles : 24-28°C.

• Précipitations : Varient entre 900 et 1 500 mm par an.


➢ La topographie
Désigne la description des formes de relief à la surface de la Terre. Elle permet d’étudier les
altitudes, les pentes, les vallées et les montagnes.

La topographie des zones de transition forêt-savane quant - à elles se caractérisent par des reliefs
variés comme les plateaux, collines basses et bas-fonds. Les hauteurs, bien drainées, favorisent les
espèces de savane adaptées aux sols ferrugineux, tandis que les dépressions, avec des sols
hydromorphes, retiennent l’eau et abritent une végétation mixte. Les pentes intermédiaires
accueillent des arbustes et arbres résistants. Ainsi, la topographie crée une mosaïque écologique où
coexistent des espèces de savane et de forêt1.

➢ Le sol :
C’est la couche superficielle de la croûte terrestre, résultant de la décomposition des roches
(altération) et de l’accumulation de matières organiques issues des êtres vivants. C’est un
milieu essentiel pour la croissance des plantes. dans les zones de transition foret-savane on
retrouve:

• Les sols ferrugineux sont des sols riches en fer sous forme d’oxydes ou d’hydroxydes,
ce qui leur donne une couleur rougeâtre à brun-rouge. Ils se développent principalement dans des
climats tropicaux ou subtropicaux, où l’altération chimique des roches est intense sous l’effet de la
chaleur et de l’humidité.

Ces sols sont largement dominants dans les régions de L’Adamaoua et du Nord-Cameroun

• Sols hydromorphe

Les sols hydromorphes sont des sols formés sous l’influence d’une forte humidité due à un excès
d’eau, soit en surface, soit dans le sous-sol.

On les retrouve dans les vallées fluviales et dépressions des zones de transition, comme le long des
rivières Bénoué et Nyong.

• Sols limono-argileux

Ces sols présentent une texture fine et une bonne capacité de rétention d’eau et de nutriments.

Ils sont fertiles mais souvent sujets à l’érosion dans les zones à forte pente.

Ils sont Présents dans les zones comme la ceinture guinéenne- soudanienne et sont

Très prisés pour les cultures vivrières (maïs, manioc, haricot) et pour l’agriculture mixte

• Sols sableux

Sols légers avec une faible capacité de rétention d’eau et de nutriments.

1
White,F.(1983).
Ils sont souvent peu fertiles et sujets à l’érosion éolienne et hydrique.

Ils sont Présents dans les zones de transition foret-savane, de savane ouverte du Nord et des
plateaux de l’Adamaoua et sont Exploités pour des cultures résistantes comme le mil et le sorgho.Ils
servent également de pâturages pour l’élevage

➢ Hydrologie

C’est la science qui étudie les eaux continentales, leur répartition, leur mouvement et leurs
interactions avec l’environnement. Cela inclut :

• Les cours d’eau : rivières, fleuves.

• Les nappes phréatiques et eaux souterraines.

• Les zones humides : marécages, mares.

Exemple : L’hydrologie des zones de transition forêt-savane au Cameroun est marquée par des cours
d’eau intermittents comme la rivière Bénoué et des mares temporaires en saison des pluies.

➢ Facteurs biotiques et abiotiques

• Facteurs abiotiques : température, précipitations irrégulières, érosion des sols.

• Facteurs biotiques : interactions entre espèces végétales et animales adaptées à ces


conditions mixtes.

III. Localisation

Les principales zones de transition forêt-savane au Cameroun se situent :

• Région de l’Est : en bordure des forêts tropicales humides.

• Région de l’Adamaoua : vaste plateau central formant une transition naturelle entre
forêt et savane.

• Nord-Cameroun : dans les régions de Garoua et Ngaoundéré, où prédominent les


savanes arborées.

IV. Compositions floristiques

Les zones de transition forêt-savane se caractérisent par une flore diversifiée, mélangeant des
espèces végétales typiques des écosystèmes forestiers et de savane. Cette végétation est adaptée
aux conditions écologiques intermédiaires, telles que les variations d’humidité, les sols ferrugineux
ou hydromorphes, et les périodes de sécheresse2.

2
AUBREVILLE,A. (1949)
➢ Espèces forestières
sont des espèces végétales ou animales qui se développent dans des zones de transition
écologique, où deux écosystèmes différents se rencontrent, comme la forêt et la savane.
Elles possèdent des caractéristiques d’adaptation leur permettant de survivre dans des
conditions intermédiaires3.

• Daniellia oliveri (arbre à bois précieux).

• Khaya senegalensis (acajou africain, utilisé pour le bois d’œuvre).

• Albizia zygia (utilisé en agroforesterie).

➢ Espèces de savane

Les savanes sont dominées par une végétation herbacée avec des arbres et arbustes dispersés,
adaptés aux conditions climatiques marquées par une alternance saison sèche-saison humide et des
sols souvent pauvres.

• Vitellaria paradoxa (karité, source de beurre végétal).

• Lophira lanceolata (bois-énergie, stabilisation des sols).

• Terminalia glaucescens (plante médicinale).

➢ Végétation mixte
Désigne une combinaison d’espèces végétales provenant de deux écosystèmes différents,
comme la forêt et la savane. Elle est caractéristique des zones de transition où les conditions
écologiques permettent la coexistence de plantes adaptées à des environnements variés

Les zones de transition abritent une stratification végétale :

• Couche herbacée : La couche herbacée est la première strate végétale, souvent la


plus dominante dans les écosystèmes de savane ou de prairie. Elle est composée de plantes
herbacées, qui sont des plantes à tiges non ligneuses (non boisées) et souvent à croissance rapide.
Cette couche est particulièrement importante dans les zones de transition ou les écosystèmes
ouverts. Graminées telles qu’Andropogon gayanus4.

• Couche arbustive : La couche arbustive est constituée d’arbustes ou de plantes


ligneuses de petite taille, qui ont une tige principale mais ne sont pas assez grands pour être

3
White, F. (1983). The Vegetation of Africa: A Descriptive Memoir to Accompany the UNESCO/AETFAT/UNSO
Vegetation Map of Africa. UNESCO, Paris.
4
Boulvert, Y. (1986). Les savanes d’Afrique centrale et occidentale.
considérés comme des arbres. Elle se situe généralement au-dessous de la couche arborée et joue un
rôle intermédiaire dans la végétation buissons dispersés comme Combretum spp5..

• Couche arborée : La couche arborée est la strate supérieure de la végétation,


dominée par des arbres de grande taille. Ces arbres ont un tronc ligné et généralement une canopée
(sommet des arbres) bien développée. Cette couche joue un rôle majeur dans la structuration de
l’écosystème. arbres clairsemés, résistants à la sécheresse.

V. Menaces6

Une menace dans les zones de transition forêt-savane désigne toute activité, processus ou
phénomène naturel ou anthropique qui perturbe l’équilibre écologique de ces zones et compromet
leur structure, leur fonctionnement ou leur capacité à se régénérer. Les principales causes de ces
menaces dans les zones de transition forêt-savane sont entre autres :

➢ Pression anthropique

La pression anthropique désigne les activités humaines qui exercent un impact négatif sur les
écosystèmes.

• Défrichement pour l’agriculture et l’élevage :

La conversion des terres pour l’agriculture et l’élevage est fréquente dans les zones de transition.
Cela entraîne la destruction de la végétation naturelle et perturbe l’équilibre des écosystèmes.

• Exploitation forestière excessive :

L’abattage des arbres pour le bois d’œuvre, le bois-énergie et d’autres usages met en péril les forêts
dans ces zones, réduisant leur capacité à réguler le climat et protéger les sols.

• Urbanisation croissante :

L’expansion des zones urbaines entraîne une déforestation accrue dans les régions périphériques et
l’artificialisation des sols, compromettant les habitats naturels.

➢ Changements climatiques

Les changements climatiques aggravent la dégradation des écosystèmes fragiles des zones de
transition.

• Réduction des précipitations :

Avec le changement climatique, on observe une baisse des précipitations dans certaines régions, ce
qui rend difficile la régénération naturelle de la végétation.

• Augmentation de la sécheresse :

5
White, F. (1983). The Vegetation of Africa. UNESCO, Paris
6
Articles scientifiques sur les écosystèmes de transition forêt-savane dans des bases comme Google Scholar,
ResearchGate ou JSTOR
Des périodes prolongées de sécheresse entraînent la dégradation des sols (érosion, baisse de
fertilité) et affaiblissent les végétaux, les rendant vulnérables aux autres pressions.

➢ Feux de brousse

Les feux de brousse sont souvent déclenchés pour des raisons agricoles ou pastorales (régénération
des pâturages), mais ils détruisent les écosystèmes.

• Bien que ces feux soient parfois utilisés comme stratégie de gestion traditionnelle,
leur intensité et leur fréquence accrue affectent la régénération naturelle des espèces végétales. Cela
contribue à la perte de biodiversité.

➢ Surpâturage

Le surpâturage se produit lorsque la pression exercée par les troupeaux dépasse la capacité de
régénération des pâturages.

• Cela mène à l’érosion des sols en raison de la disparition de la couverture végétale.


Une fois les sols dégradés, ils deviennent moins productifs et plus sensibles à l’érosion éolienne et
hydrique.

➢ Exploitation des ressources

L’exploitation excessive des ressources végétales met en péril les espèces naturelles.

• Surexploitation des plantes médicinales :

L’augmentation de la demande pour les plantes médicinales pousse à leur collecte excessive,
menaçant leur survie.

• Bois-énergie :

La coupe d’arbres pour produire du bois de chauffage ou du charbon est une pratique courante dans
les zones rurales, entraînant une déforestation progressive

6. Biens et services écosystémiques

VI. Biens

➢ Ressources alimentaires : Les zones de transition forêt-savane fournissent une grande


diversité de ressources alimentaires qui jouent un rôle clé pour les populations locales en
matière de sécurité alimentaire. Fruits (karité), graines, feuilles comestibles7.
➢ Plantes médicinales : Les plantes médicinales sont essentielles pour les populations locales,
particulièrement dans les régions où l’accès aux soins modernes est limité. Elles servent à
traiter plusieurs maladies et infections8.

• Terminalia glaucescens : traitement des infections.

7
FAO (Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture)
8
Sur Google Scholar, utilisez des mots-clés comme “Terminalia glaucescens medicinal uses”, “Vitellaria
paradoxa in food and medicine” ou “Khaya senegalensis exploitation and conservation”.
• Vitellaria paradoxa : soin de la peau.

➢ Bois d’œuvre et bois-énergie : Les arbres des zones de transition forêt-savane sont
exploités à la fois pour leur bois d’œuvre (construction, menuiserie) et pour le bois-
énergie (chauffage et cuisson). Cette exploitation peut toutefois fragiliser ces
écosystèmes Khaya senegalensis, Daniellia oliveri9.

VI. Services10

➢ Régulation climatique : Ces zones absorbent le CO₂ grâce à la végétation et limitent


la désertification en stabilisant le climat local.
➢ Protection des sols : Les racines des plantes réduisent l’érosion hydrique et éolienne,
préservant la fertilité des sols.
➢ Ressources hydriques : Elles favorisent l’infiltration de l’eau pour recharger les
nappes phréatiques et régulent les cours d’eau.
➢ Habitat pour la faune : Elles offrent des refuges essentiels pour la biodiversité
animale en servant d’aires de reproduction et de migration.
➢ Rôle culturel : Elles fournissent des ressources végétales utilisées dans les rituels
traditionnels et transmettent des savoirs locaux liés à l’utilisation des plantes.

VII. Conclusion11

Les zones de transition forêt-savane au Cameroun représentent des écosystèmes essentiels qui
assurent des services écologiques vitaux pour l’environnement et les populations locales. Elles jouent
un rôle clé dans la régulation climatique en absorbant le CO₂ et en freinant la désertification. Grâce à
la végétation, elles protègent les sols contre l’érosion et favorisent la gestion des ressources
hydriques en maintenant les nappes phréatiques et en régulant les cours d’eau.

Ces zones sont également un habitat indispensable pour une riche biodiversité, abritant de
nombreuses espèces animales et végétales qui y trouvent refuge, nourriture et chemins migratoires.
Enfin, elles ont une importance culturelle majeure, car elles fournissent des ressources pour les
traditions locales, telles que les plantes médicinales ou les bois sacrés, tout en permettant la
transmission des savoirs ancestraux.

Cependant, ces écosystèmes fragiles sont menacés par la pression anthropique, les changements
climatiques et la surexploitation des ressources. Leur préservation est essentielle pour maintenir
leurs services écologiques et garantir un équilibre durable entre l’homme et la nature.

9
Exemple d’article: “Ethnobotanical Uses of Trees in West Africa”.
10
IUCN (2018). Savannahs and Forest Transitions: Ecosystem Services and Biodiversity. Union Internationale
pour la Conservation de la Nature
11
Nasi, R., & Mayaux, P. (2016). Forest-Savanna Transition Zones in Africa: Opportunities and Challenges.
Environmental Research Letters

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