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Téléphone  :  514  875-­‐7454  •  Télécopieur  :  514  875-­‐5990  
www.educalcool.qc.ca  

ALCOOL AU VOLANT :

LES MESURES EFFICACES


DANS LES CONDITIONS EFFICACES D’ABORD.

AVIS D’ÉDUC’ALCOOL
RELATIVEMENT À LA PERSPECTIVE D’ABAISSER
DE 80 À 50 MG LA LIMITE LÉGALE D’ALCOOL POUR CONDUIRE.

AOÛT 2017

1
Présentation

Éduc’alcool est un organisme sans but lucratif qui mène depuis près de vingt-six ans
des actions de prévention, des programmes d’éducation et des campagnes
d’information pour promouvoir la consommation responsable de l’alcool.

Les objectifs de l’organisme sont les suivants :

• éduquer le grand public et particulièrement les jeunes à la consommation de


boissons alcooliques ;

• promouvoir la modération dans la consommation d'alcool ;

• prévenir et dénoncer les méfaits causés par l'abus d'alcool ;

• fournir de l'information sur les effets psychologiques et physiologiques de


l'alcool ;

• valoriser la notion de plaisir liée à une consommation réfléchie et équilibrée ;

• établir le contexte historique et culturel qui entoure la consommation de


produits alcoolisés ;

• faire le point sur les mythes entourant l'alcool ;

• effectuer et soutenir des recherches sociales et scientifiques.

Le slogan d’Éduc’alcool reflète bien la mission de l’organisme : « La modération a


bien meilleur goût ». Au Québec, c’est plus qu’un slogan. C’est devenu une
expression courante et consacrée, un proverbe dont le taux de notoriété dépasse les
95%.

Éduc’alcool a mis sur pied de multiples programmes et projets s’adressant à une


multitude de groupes cibles. Il a, au fil des ans, acquis une crédibilité incontestable
à la fois au pays et à l’étranger.

Depuis sa fondation, Éduc’alcool a consacré plus de 50 millions $ pour l’éducation


des Québécois à l’alcool. Mais, il a bénéficié de tant de partenariats, de tant
d’espaces et de temps d’antenne gratuits dans les médias, que l’on peut facilement
chiffrer à plus de 120 millions $ la valeur de ses actions.

Les programmes d’Éduc’alcool dans le domaine de la conduite avec les facultés


affaiblies sont nombreux.

Ils visent les apprentis conducteurs avec le programme « Boire. Conduire. Choisir »
qui est diffusé dans les écoles de conduite du Québec en partenariat avec elles.

Ils visent les chasseurs, les plaisanciers, les bateliers et les pêcheurs grâce à des
programmes ciblés, réalisés notamment avec la Société de sauvetage.

2
Notre initiative, la mise en ligne sur notre site Internet d’un « Planificateur de
soirée » qui permet aux consommateurs de prévoir leur taux d’alcoolémie en
fonction de leurs intentions de boire a connu un succès tout à fait remarquable. Des
dizaines de milliers de Québécois y ont eu recours faisant de lui un instrument de
prévention fort efficace de la conduite avec les facultés affaiblies.

Notre application « le Calcoolateur » que l’on peut télécharger sans frais à la fois
pour iPhone et pour appareils Android offre els mêmes fonctionnalités sur appareils
portables.

Il est naturellement impossible de citer ici la multitude d’actions menées par notre
organisme. Qu’il suffise cependant de signaler que plusieurs de ces programmes tels
A toi de juger, La grossesse et l’alcool en questions, Parler d’alcool avec ses enfants,
entre autres, sont repris dans de nombreux pays étrangers. De plus, l’expérience
d’Éduc’alcool est citée en référence dans bien pays dont plusieurs, tels l’Australie, la
Suisse, la Suède, la France, le Portugal, le Costa Rica pour n’en citer que quelques-
uns, s’inspirent de son action.

Le rayonnement d’Éduc’alcool déborde nos frontières puisqu’il a fait en sorte que


l’organisme est appelé à présider des colloques internationaux et même à conseiller
des gouvernements à l’étranger. Il siège notamment au conseil d’administration du
Conseil international sur les problèmes de l’alcoolisme et des toxicomanies,
organisation non gouvernementale fondée il y a 108 ans et qui est en relations avec
l’Organisation mondiale de la santé à Genève et le Bureau de contrôle des
stupéfiants à Vienne. Il en préside la section « Éducation à l’alcool ». C’est une
référence mondiale en matière de prévention.

3
Introduction

L’alcool est une des causes principales de décès sur les routes canadiennes et
québécoises. Selon les plus récentes données disponibles, près de 40 % dees
accidents de la route sont dus à l’abus d’alcool. Le problème est particulièrement
tragique chez les jeunes, mais il n’est pas restreint à ces derniers.

L’impact sur la société des accidents non mortels est encore plus important. Une
estimation prudente du nombre de personnes sérieusement blessées, parfois même
de façon permanente, est d’au moins dix fois le nombre de décès. Ce fléau
représente annuellement, seulement en frais d’indemnisation des victimes de la
route, une facture globale de plus de 100 millions $ pour les Québécois. D’ailleurs,
plus les collisions sont graves, plus la probabilité que l’alcool soit en jeu augmente.
La conduite avec les capacités affaiblies par l’alcool est la plus grande source des
coûts sociaux et économiques engendrés par la consommation abusive d’alcool au
Canada et au Québec.

L’action sociétale peut réduire le nombre de collisions, de blessures et de décès


attribuables à la conduite en état d’ébriété. Au Canada tout comme au Québec, les
stratégies pour réduire la conduite avec facultés affaiblies comprennent
généralement les trois éléments de base suivants : la dissuasion et la
sensibilisation, les communications et les mesures législatives.

La mise en œuvre de ces trois stratégies au cours des dernières années a été
associée à une importante réduction du nombre d’accidents attribués à la
consommation d’alcool. En 1987, 50% des conducteurs québécois blessés
mortellement et soumis à un test d’alcoolémie avaient une concentration d’alcool
dans le sang (CAS) supérieure à 0,08, alors que ce pourcentage avait baissé à
22,3% en 1999 (Mayhew, Brown & Simpson, 2002). Ces changements indiquent
que les efforts déployés pour réduire ce problème peuvent être efficaces et que c’est
par milliers que des décès prématurés et des blessures graves peuvent être évités.

Aujourd’hui, le gouvernement fédéral envisage d’amender le Code criminel pour


réduire la limite légale de la CAS de 0,08 gramme par 100 millilitres de sang à 0,05
gramme. Il souhaite que cette mesure réduise le nombre de morts et de blessés sur
les routes. Les plus récentes données canadiennes indiquent que, parmi les
conducteurs décédés ayant consommé de l’alcool, environ 10% avaient entre 0,01
et 0,049 mg d’alcool dans le sang, environ 6% avaient entre 0,05 et 0,08 mg,
quelques 26% avaient entre 0,081 et 0,160 mg et la plus grande proportion, soit
58% avait une CAS supérieure à 0,160 mg.

À la lumière de ces données et puisque le réel problème est plutôt la présence de


gros buveurs qui n’hésitent pas à conduire après avoir bu de grandes quantités
d’alcool. Éduc’alcool s’interroge sur l’efficacité de la réduction de la limite légale de
0,08 à 0,05, alors que le pays a sensiblement amélioré sa performance en matière
de conduite en état d’ébriété au cours des vingt dernières années sans abaisser la
CAS dans le Code criminel.

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Il importe de noter aussi que nous avons parfois tendance, comme société, à nous
poser les questions par le mauvais bout de la lorgnette. Ainsi, dans le cas qui nous
concerne, plutôt que de débattre des mérites d’une mesure spécifique (la réduction
du taux d’alcoolémie), nous serions sans doute mieux avisés de nous demander :
« Que faut-il faire pour améliorer le bilan routier en ce qui concerne la conduite avec
facultés affaiblies »?

Il faut savoir que la question de la réduction du taux d’alcoolémie est une affaire
complexe. Beaucoup plus complexe qu’il n’apparaît à première vue.

En effet, il est difficile, sinon impossible, d’attribuer à la baisse du taux


d’alcoolémie (à ce niveau) des mérites spécifiques directs. Les paramètres de
l’équation sont de fait multiples :

• La norme de 0,08 n’est pas tombée du ciel. C’est le taux d’alcoolémie à partir
duquel les effets de l’alcool augmentent sur une base exponentielle. Elle a
donc une base scientifique.
• Dans les pays où l’on a réduit le taux d’alcoolémie de 0,08 à 0,05 %, le
nombre d’accidents sous l’effet de l’alcool a diminué pour toutes les
catégories de conducteurs.
• Mais dans tous ces pays, les changements à la loi ont été précédés ou
accompagnés d’autres mesures, notamment des campagnes d’information,
l’augmentation des barrages routiers, la publicisation des mesures,
l’augmentation de la perception que l’on va se faire arrêter si l’on boit trop,
les cours obligatoires pour les serveurs des établissements licenciés. Si bien
que l’on ne peut déterminer dans quelle mesure on peut attribuer
l’amélioration constatée à la réduction du taux d’alcoolémie.
• D’ailleurs, la performance s’est aussi grandement améliorée au fil des ans
dans des pays et États qui ont adopté toutes ces mesures sans baisser le
taux légal d’alcoolémie (le Québec en est un exemple).
• Il est indiscutable que l’alcool affaiblit les facultés des conducteurs même à
un niveau de 0,05 ou 0,06 %.
• Toutefois, il est essentiel de noter qu’à de hauts niveaux d’alcoolémie, l’alcool
n’est pas toujours nécessairement la cause des accidents de la route.
D’autres éléments tels la vitesse, l’état de la chaussée, l’état du véhicule -
particulièrement celui des pneus et des freins - la fatigue et bien d’autres
éléments peuvent causer des accidents. Certes, un conducteur qui a un taux
d’alcoolémie de 0,06 ou de 0,07 risque davantage d’être impliqué dans un
accident de la route, mais il faut éviter d'avaliser à tout coup que c’est l’alcool
qui est la cause de l’accident. D’ailleurs une majorité d’accidents de la route
sont dus à des conducteurs parfaitement sobres.
• Il existe des mesures dont on est certain de l’efficacité. Parmi elles, la
perception qu’on a moins de chances de s’en sortir sans se faire arrêter, les
programmes de formation obligatoires des serveurs, la notoriété des
sanctions et le fait de mettre le sujet à l’ordre du jour du débat public.

Or, pour éviter d’analyser le problème sous le seul angle de la réduction du taux
d’alcoolémie, pour éviter de nous retrouver dans le mauvais débat, Éduc’alcool se
propose de partir du problème plutôt que de la solution pré-établie, sans ignorer le
débat sur le taux d’alcoolémie.
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Nous tenterons donc de répondre à cette simple question : Quelle est la meilleure
façon de réduire les problèmes sur nos routes?

De plus, la sécurité routière étant de juridiction provinciale, il est clair que c’est à ce
niveau que doit se faire l’immense majorité des interventions en tenant compte de
la culture de chacune des provinces. Le gouvernement du Canada n’a de juridiction
que dans le domaine du Code criminel. Aussi la seconde question qui se pose est :
« Doit-on rendre criminel la conduite automobile avec un taux d’alcoolémie de 50
mg par 100 ml de sang », la gravité du crime – à ce niveau de consommation –
justifie-t-elle les sanctions considérables que subissent les citoyens qui ont un
dossier criminel et la graduation des sanctions ne devrait-elle pas s’appliquer en
fonction de la gravité de l’acte posé ?

Méthodologie

L’identification des articles scientifiques a été réalisée à l’aide de PUBMED et


PSYINFO avec les descripteurs suivants ; 1) 0,05 AND 0,08 AND driving et 2)
reducing BAC. Une recherche a aussi été effectuée afin de repérer des rapports
scientifiques ayant été publiés sur le sujet. À la lecture des rapports repérés, il est
ressorti qu’une grande majorité d’auteurs se référaient à un article écrit par Mann et
al., (2001). En effet, cet article est une référence en matière de limite légale de CAS
puisqu’il fait le sommaire de l’ensemble des études publiées sur le sujet jusqu’en
2000. Par conséquent, pour ce qui est des études publiées avant 2001, notre avis
cite grandement les résultats tels que décrits par Mann et al., (2001). Depuis, une
étude recensée ici a spécifiquement porté sur les effets d’une réduction de la limite
légale (Bernhoft & Behrensdorff, 2003).

Les effets d’une réduction de la limite légale de la CAS

Depuis quelques années, on note une recrudescence de l’intérêt des politiciens et de


divers groupes pour réduire la limite légale du taux d’alcool dans le sang pour
opérer un véhicule moteur. Il n’est pas simple de répondre à la question quant à ce
que devrait être une telle limite. Non, seulement le problème de la limite acceptable
se pose, mais se pose aussi celui de son efficacité. Ce dernier élément nous entraîne
sur un terrain juridique où des connaissances en droit d’imposent – surtout au
Canada où le régime constitutionnel prévoit que deux niveaux de gouvernement
sont impliqués. Par ailleurs, au-delà des considérations juridiques, bon nombre de
recherches se sont penchées sur les impacts d’une telle mesure sur le nombre
d’accidents et de décès reliés à l’alcool. Les études que nous présentons
permettront de répondre à la question : quels pourraient être les effets généraux
d’une réduction de la limite légale du taux d’alcoolémie de 0,08 à 0,05 aujourd’hui?

Les effets spécifiques d’une réduction de la limite légale du


taux d’alcoolémie

Sept pays ont réduit la limite légale de CAS et ont été l’objet d’études visant à
évaluer les effets d’une telle mesure. Un de ces sept pays est les États-Unis, mais

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puisque dans ce pays, on n’a pas réduit la limite légale à un seuil qui est inférieur à
celui présentement en vigueur au Canada, ces études ne seront pas citées.

En 1988, les Autrichiens ont fait passer la limite de 0,08 à 0,05. Une étude portant
sur les effets de cette loi a montré que par rapport au nombre total d’accidents de la
route, il y avait eu une diminution de 9,4% d’accidents de la route où l’alcool était
en jeu (Bartl & Esberger, 2000). Par ailleurs, ces auteurs ont noté qu’au même
moment, d’intenses campagnes médiatiques et une surveillance policière accrue
avaient été mises en place et que par conséquent, il était impossible d’identifier la
cause réelle de la diminution du nombre d’accidents. Bartl & Esberger (2000) ont
conclu que combiner une réduction de la limite légale de CAS à campagnes de
prévention et une surveillance policière accrue entraînait des effets positifs à court
terme.

C’est probablement au même genre de phénomène que les Français ont assisté. En
effet, une étude réalisée dans la province de Haute-Savoie en France a indiqué que
le nombre d’accidents de la route causé par l’alcool était passé de 100 à 64, un an
après l’introduction de la loi réduisant à 0,05 le seuil d’alcoolémie permis (Mercier-
Guyon, 1998). Le fait que les effets de la nouvelle loi se soient fait ressentir qu’un
an après l’application de celle-ci indique que d’autres facteurs aient pu être
responsables de cette diminution du nombre d’accidents.

Le Danemark est un autre pays où, en 1997, la limite légale de CAS à été réduite à
0,05. Bernhoft et Behrensdorff (2003) ont évalué les effets de cette nouvelle loi sur
les habitudes de consommation des Danois, le nombre d’accidents de la route, le
nombre d’arrestations pour conduite en état d’ébriété. Les résultats de cette étude
ont montré que les Danois buvaient significativement moins deux heures avant de
conduire depuis l’introduction de la nouvelle loi et l’analyse des données portant sur
les arrestations a montré qu’il y avait eu une diminution significative du nombre de
conducteurs arrêtés avec une très haute CAS. Les auteurs de cette étude ont
toutefois dû conclure que cette plus grande responsabilisation ne s’était pas traduite
en une réduction du nombre d’accidents et d’accidents avec décès. Les auteurs
notent que le fait que les données analysées datent de 1998, soit un an seulement
après l’introduction de la loi, aient pu être trop récentes pour que des effets sur les
accidents puissent être observés.

En 1990, les Suédois ont réduit le seuil légal de CAS à 0,02. Alors que la Suède
avait adopté un seuil de 0,05 dans les années 50, cette réduction additionnelle
semblerait avoir amélioré davantage la sécurité routière. Norström et Laurell (1997)
ont montré qu’au cours des 6 années suivant l’introduction de seuil limite de 0.02, il
y a eu une réduction de 9,7% d’accidents mortels, une réduction de 11%
d’accidents impliquant un seul véhicule et une réduction de 7,5% de tous les types
d’accidents. Ces auteurs ont noté que l’effet le plus significatif avait été noté au
niveau des accidents mortels et des accidents impliquant une seule voiture, soit les
deux catégories d’accidents où l’alcool est généralement le plus en cause. Ceci
suggère que la réduction d’accidents ne peut pas uniquement être attribuable à une
tendance, mais sans doute – au moins en partie – à la réduction de la limite légale
de CAS.

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Finalement, c’est en Australie qu’il y a eu le plus grand nombre d’études portant sur
les effets d’une diminution de la limite légale de CAS. Smith (1986) a évalué les
effets du passage de la limite légale de 0,08 à 0,05 dans Queensland en 1983, en
comparant la CAS des conducteurs impliqués dans des accidents avant et après
l’introduction de la loi. Selon cette étude, la nouvelle loi a entraîné des diminutions
significatives du nombre d’accidents impliquant une personne en état d’ébriété.
Cette diminution fut plus prononcée chez les conducteurs avec une haute CAS (>
0.15) qu’une basse CAS (entre 0.8 et 0.15).

En Australie du Sud, la limite légale a été réduite à 0,05 en 1991. Kloeden & McLean
(1994) ont montré que le nombre de conducteurs sur les routes la nuit ayant
consommé de l’alcool avait été réduit de 14,1% après l’adoption de la loi. Les
résultats d’une deuxième étude portant sur l’Australie du Sud n’ont pas montré que
la nouvelle loi avait entraîné une réduction du nombre de conducteurs en état
d’ébriété blessés mortellement (Kloeden et al., 1995). Henstridge, Homel & Mackay
(1995) ont réalisé une étude rigoureuse qui a analysé des tests aléatoires
d’alcoolémie (TAA) et la loi du 0,05 qui prévaut en Australie en contrôlant pour des
facteurs qui sont généralement ignorés. Cette étude australienne était contrôlée
pour les effets saisonniers, les conditions météorologiques, les tendances
économiques, l’utilisation de la route, le jour de la semaine et la consommation
d’alcool. Alors que le but principal de l’étude était l’effet des TAA, les effets de la
nouvelle loi sont aussi ressortis comme étant significatifs. L’étude a statistiquement
tenu compte des effets d’autres mesures relatives à la consommation d’alcool afin
de déterminer la valeur spécifique du déclin qui pouvait être directement attribuée
aux TAA ou à la nouvelle loi. Cette étude a démontré que les États australiens qui
avaient fait passer la limite de 0,08 à 0,05 avaient obtenu de réelles réductions
d’accidents où l’alcool était en jeu. Suite à la décision de Queensland en Australie de
réduire la limite 0,05 en 1982, une diminution de 18% des accidents avec décès et
une diminution de 14% des accidents graves ont été observées. Ces résultats sont
indépendants de ceux attribuables aux TAA puisque ces tests ne furent introduits
que 8 ans plus tard. De façon similaire, on a estimé que l’introduction d’une limite
de 0,05 dans le New South Wales avait entraîné des diminutions de 7% des
collisions graves, 8% d’accidents avec décès et 11% d’accidents survenant la nuit et
n’impliquant qu’un seuil véhicule. Les auteurs ont traduit ceci en une réduction
annuelle de 605 accidents graves, 75 accidents mortels et 296 accidents la nuit et
n’impliquant qu’un seuil véhicule. Quoique la limite de 0,05 n’ait été introduite que
deux ans avant les TAA dans le New South Wales, les auteurs ont tenu compte de
ce fait dans leur étude et ont bel et bien tenté de déterminer les réductions
d’accidents attribuables à chacune des mesures.

Les effets globaux d’une réduction de la limite légale du


taux d’alcoolémie

Les études épidémiologiques démontrent que ceux qui conduisent avec les plus
bas niveaux d’alcoolémie, incluant ceux qui se situent entre 0,05 et 0,08,
constituent une proportion relativement petite des conducteurs et ne sont
responsables que de très peu d’arrestations, collisions, blessures et décès.
Statistiquement, ce sont les conducteurs avec les plus hauts niveaux de CAS qui
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sont plus à risque d’être impliqués dans des accidents de la route et sont
responsables de la majorité des problèmes causés par la conduite en état d’ébriété.
Par conséquent, une importante question est de savoir si diminuer le taux
d’alcoolémie per se aurait seulement un effet sur les conducteurs visés par l’écart
entre l’ancienne et la nouvelle loi, ou si des effets plus généraux s’étendant à ceux
qui conduisent à des niveaux bien supérieurs à 0,08 seraient observés.

Certaines des études déjà citées se sont penchées sur cette question. La majorité
de ces études suggèrent qu’une réduction de la limite légale a en soi un effet à tous
les niveaux de CAS, incluant la proportion de conducteurs avec les plus hauts
niveaux de CAS (0.15 et plus) qui ont été testés, arrêtés ou blessés mortellement.
Ces études indiqueraient que viser la majorité modéré aurait un effet sur les
cas problématiques.

L’étude de Smith (1986) a montré que la réduction du nombre d’accidents


impliquant l’alcool avait été de 12% parmi ceux avec des CAS supérieures à .15,
alors qu’elle avait été de 8% chez ceux avec des CAS entre 0,05 et 0,08. Une autre
étude australienne, celle de Kloeden et Mclean (1994) qui a analysé les résultats
des tests d’alcoolémie des policiers a montré que la loi avait entraîné une réduction
de 32,7% du nombre de conducteurs se faisant prendre avec une CAS supérieure à
0,05 et une réduction de 38,2% chez ceux avec une CAS supérieure à 0,08. Ces
résultats sont semblables à ceux de Brooks et Zaal (1993) selon qui un an après
l’introduction de la loi, les tests d’alcoolémie ont révélé une diminution significative
de 34% du nombre de conducteurs se faisant prendre avec une CAS entre 0.150 et
0.19 et une diminution de 59% du nombre de conducteurs avec une CAS supérieure
à 0.2. Sans décrire leurs analyses statistiques Mercier-Guyon (1998) et Bartl et
Esberger (2000) ont indiqué que l’introduction d’une nouvelle loi avait eu des effets
chez les conducteurs avec une CAS entre 0,05 et 0,08, de même que chez ceux
avec une CAS au-dessus de 0,08.

Chez les Danois, l’introduction de la nouvelle loi avait été fort contestée par ceux
qui soutenaient qu’une telle réduction de la limite légale n’allait pas affecter les
conducteurs récalcitrants qui conduisent avec une CAS très élevée. Or, un an après
que l’amendement ait été apporté, Bernhoff et Behrensdorff (2003) ont observé
qu’il y avait eu un changement dans la distribution de la CAS des conducteurs, ce
qui indiquerait qu’au-delà de la population générale, les récalcitrants auraient aussi
réagi à la nouvelle loi.

L’étude de Norström et Laurell (1997) qui portait sur les effets d’une réduction de
0.02 à 0,05 a aussi révélé que suite à l’adoption de la nouvelle loi, la CAS moyenne
des chauffeurs pris en défaut était passée de 0.168 à 0.154 et que les plus grandes
réductions apparaissaient être chez les conducteurs avec les CAS les plus élevées.

Ces observations indiquent que lorsqu’une réduction de la limite légale a des effets
positifs sur la sécurité routière, ces effets ne seraient pas exclusifs à ceux visés
directement par la réduction. Au contraire, ces effets semblent être le résultat d’un
effet dissuasif sur l’ensemble de ceux qui boivent et conduisent et un tel effet serait
peut-être encore plus prononcé chez ceux qui conduisent avec les plus hauts
niveaux de CAS. Les chauffards et les récidivistes sont, avec raison, la cible de
plusieurs inquiétudes quant à la sécurité routière. Or, il semblerait que les
9
chauffards soient susceptibles d’être influencés par la loi et la répression policières,
dans la mesure où les lois sont appliquées. Cependant, les mécanismes derrière ces
effets positifs sont encore forts méconnus et la recherche scientifique devra
éventuellement s’y attarder (Bernhoft & Behrensdorff, 2003; Fell & Voes, 2003;
Mann et al., 2001). Les études démontreraient qu’une réduction de la limite de CAS
aurait un effet dissuasif sur tous et non pas seulement sur ceux qui sont
précisément visés par l’écart entre l’ancienne et la nouvelle loi.

Toutefois, il apparaît important d’insister sur le fait que l’établissement d’un seuil
limite de CAS est une question sociopolitique et culturelle. Il en découle qu’il
faut être fort prudent avant d’inférer les résultats d’un pays à ce qui pourrait être
obtenu dans un autre. Par exemple, Mann (2002) a repris les résultats suédois et
australiens, les a appliqués aux données canadiennes sur les accidents de la route
et a conclu qu’au Canada, une réduction de la limite de CAS permettrait de sauver
entre 185 et 555 vies annuellement. Or, il convient de douter de la justesse d’une
imputation qui néglige complètement le contexte culturel. En effet, peut-on
présumer qu’une loi aura les mêmes effets dans des pays où la culture du boire est
celle de l’intoxication, que dans un autre où la culture dominante est celle de la
modération? En Suède, au Danemark et en Australie, boire modérément est
inhabituel. Il est donc fort probable que fixer une limite à 0,08, 0,05 ou 0.02
revienne implicitement à imposer à ceux qui prennent le volant d’être absolument
sobres. Certes, plusieurs études déjà mentionnées quant aux effets d’une réduction
de la CAS sont encourageantes, mais avant d’adopter d’emblée une telle mesure, il
semblerait important d’étudier davantage la conduite en état d’ébriété dans le
contexte culturel québécois.

De fait, nous demeurons dans le domaine des sciences sociales et tout comme il est
généralement impossible d’isoler les effets précis de mesures telles que la
sensibilisation, l’éducation et l’information sur les comportements des individus, il
l’est tout autant d’évaluer les effets nets d’une loi. Par ailleurs, ce n’est pas parce
qu’il est impossible d’isoler les effets d’une telle loi, qu’il faille rejeter d’emblée l’idée
d’une telle mesure. Il faut plutôt s’attarder à identifier quelles sont les conditions
garantes et essentielles au succès d’une nouvelle loi.

Entre 2007 et 2009, trois articles scientifiques révisés par les pairs ont
spécifiquement porté sur l’association entre une réduction de la limite légale de
concentration d’alcool dans le sang (CAS) et les accidents de la route. Une étude
américaine a examiné les effets d’une telle réduction dans 28 États américains entre
1976 et 2002 (Wagenaar, Maldonado-Molina, Ma, Tobler, & Komro, 2007). Durant
cette période, la majorité des états à l’étude ont réduit la CAS légale de 0,1 à 0,08.
Dans l’ensemble, Wagenaar et ses collègues ont observé que chaque unité de
changement de 0,01 est statistiquement associée au nombre d’accidents de la route
survenant la nuit ; au nombre d’accidents avec un conducteur dont la CAS se situe
entre 0 et 0,07, entre 0,08 et 0,14 et au-delà de 0,15. Par ailleurs, si ces auteurs
ont trouvé une association significative à l’échelle nationale, ils ont relevé de
grandes variations entre les États. Selon eux, ces dernières seraient dues aux
provisions légales, aux procédures administratives, à l’allocation des
ressources et au pouvoir coercitif qui entourent la loi relative à la CAS
permise pour conduire dans chaque État et qui sont autant de dimensions dont on
reconnaît l’impact sur le nombre d’accidents de la route.
10
Au Japon, en 2002, la CAS permise pour conduire un véhicule est passée de 0,05 à
0,03. À notre connaissance, deux études ont spécifiquement étudié les effets de
cette nouvelle loi sur le nombre d’accidents et de décès sur la route. Selon l’étude
de Nagata (Nagata, Setoguchi, Hemenway, & Perry, 2008), du point de vue de la
santé publique, la mise en place de cette nouvelle loi fut bénéfique. En contrôlant
pour un ensemble de facteurs influents, ces auteurs ont observé des réductions de
20% du nombre d’accidents de la route mortels, de 23% du nombre d’accidents
graves non mortels et de 32% du nombre d’accidents avec blessés. Alors qu’avant
la loi, 15% des accidents de la route étaient dus à la conduite en état d’ébriété,
cette proportion a diminuée à 11% en 2004. L’étude de (Desapriya, Shimizu, Pike,
Subzwari, & Scime, 2007) corrobore ces résultats et montre que l’effet bénéfique fut
observé à travers les catégories d’âge et ce, tant chez les femmes que chez les
hommes.

Par ailleurs, il est important de noter qu’au Japon, la réduction de la limite légale du
taux d’alcool dans le sang pour opérer un véhicule moteur a été accompagnée de
plusieurs mesures très coercitives. Notamment, l’amende associée à la conduite
en état d’ébriété a été décuplée en passant d’environ 450 dollars canadiens à
4 250 $, le nombre de points d’inaptitude a sévèrement été ajusté et finalement
selon la nouvelle loi, les serveurs et les passagers sont tout aussi coupables que les
conducteurs. Puisque les autorités ont largement mis en application les nouvelles
dispositions de la loi, Desapriya et ses collègues (2007) ont conclu que c’est la
réduction de la limite légale de la CAS associée à ces mesures qui explique la
réduction significative du nombre d’accidents au Japon depuis 2002. Et il y
a certainement lieu de se demander si les réductions observées ne sont pas
davantage associées aux mesures coercitives qu’à la nouvelle limite de 0,03 en tant
que telle.

Les étapes intermédiaires

La conclusion de Mann et al. (2001) selon laquelle la réduction de la limite légale de


la CAS a un effet dissuasif sur l’ensemble de la population est amplement citée. Par
ailleurs, ce qui l’est parfois moins est que ces auteurs insistent tout autant sur
le fait qu’une nouvelle loi doit nécessairement être doublée de la volonté
d’accompagner cette loi d’un ensemble des mesures et de ressources qui
garantissent son succès. Une étude de cas sur la conduite en état d’ébriété
produite par le Gouvernement du Canada (2000) conclu que pour être efficaces,
l’adoption ou la modification de dispositions législatives doivent faire partie d’un
agencement de mesures. Selon le CCATM (2003), la diminution du nombre de
collisions imputables à l’alcool requiert les trois éléments de base que sont

(a) la coercition et la sensibilisation,


(b) les initiatives législatives et
(c) les communications.
« Le projectile magique ne réside pas dans une seule contre-mesure » (CCATM,
2003).

11
À la lumière des études consultées, il y a un consensus général à l’effet que le
succès d’une nouvelle loi passe par une série d’étapes intermédiaires que
sont la sensibilisation, l’éducation et l’information. Le recensement de 2002 du
CAMH sur les pratiques exemplaires pour réduire les collisions dues à l’alcool relève
l’importance d’informer le public et de le sensibiliser à la loi ainsi qu’aux
conséquences et aux façons d’éviter la conduite en état d’ébriété. Plus précisément,
les mesures de sensibilisation doivent parvenir à créer l’élément dissuasif le plus
reconnu : la perception du risque d’être arrêté. Tant le CAMH que le gouvernement
canadien abondent dans le même sens et concluent leurs rapports en soulignant
que le public doit être avisé des risques d’arrestation puisque c’est lorsque
l’éducation attire l’attention du public sur ces risques et les pénalités qu’entraîne la
conduite en état d’ébriété qu’elle est la plus efficace. La population doit percevoir
que la loi est mise en application et que le risque pour les fautifs d’être interceptés
est élevé.

Selon Krüger & Vollrath (2004), ce sont essentiellement les ressources policières qui
permettent d’entretenir de telles perceptions et sans ces ressources, les effets de la
loi seront probablement nuls. « Sans mesures d’exécution de la loi, les citoyens ne
croiront pas qu’ils risquent de se faire prendre et d’être punis et ils pourraient ne
pas être suffisamment incités à se conformer à la loi » (Gouvernement du Canada,
2000).

En France, entre 2001 et 2007 malgré une réduction de 40% du nombre d’accidents
de la route, la conduite automobile en état d’ébriété a augmenté de 10%
(Constant et al., 2009). Les auteurs de cette étude montrent qu’en France, la
réduction du nombre d’accidents de la route est davantage associée à la loi portant
sur la vitesse qu’à celle portant sur la limite légale de CAS. Ils estiment que la
raison à ce fait est que les Français considèrent élevée la possibilité de se
faire épingler pour vitesse, mais qu’ils considèrent très mince celle de se
faire arrêter pour conduite en état d’ébriété. L’importance de la croyance en la
probabilité réelle de se faire arrêter constitue donc le facteur déterminant.

La peur de se faire prendre


Plusieurs études consultées concluent que c’est la crainte de se faire arrêter qui
est associée à la réduction de la prise de risque en matière de conduite
avec facultés affaiblies (Desapriya et al., 2007; Vanlaar, 2008; Freeman &
Watson, 2009; McCartt, Hellinga, & Wells, 2009; Beck, Fell, & Yan, 2009; Matthews
et al., 2009; Taggi & Macchia, 2009). Dans une étude américaine réalisée auprès de
850 individus détenant un permis de conduire du Maryland, il fut démontré que
72% ne croient pas qu’il soit probable qu’ils se fassent intercepter s’ils conduisent
en état d’ébriété. De plus, moins de la moitié de ces derniers croient qu’ils ne seront
ni arrêtés ni accusés s’ils se font intercepter. On est donc en droit de se demander
quel pourrait être l’effet d’une loi dont la majorité ne croit pas à
l’application.

D’autres études ont souligné qu’une composante principale de la force de


dissuasion en matière de conduite en état d’ébriété est la présence
policière. Dans une étude réalisée dans l’État de la Virginie, des chercheurs ont

12
comparé une communauté de contrôle à une autre où fut mise en place une
approche intégrée de prévention relative à la limite légale de CAS pour conduire.
Entre l’hiver 2006 et l’automne 2007, une campagne médiatique d’information
quant à cette loi fut diffusée et la surveillance policière fut accrue. Notamment, le
nombre de barrages policiers est passé de 15 à 60 par mois. Les résultats de cette
étude ont montré que durant cette période, la proportion de buveurs interceptés au
volant d’une voiture avec une alcoolémie supérieure à 0,08 était significativement
moindre dans la communauté testée que dans la communauté de contrôle, surtout
chez les jeunes âgés de moins de 25 ans. Ceci a amené les auteurs à conclure que
dans la lutte contre la conduite en état d’ébriété, la surveillance policière
ainsi que la médiatisation de cette surveillance sont d’importants facteurs
de protection. Ces résultats ont été corroborés par ceux de Fell et al. (Fell,
Tippetts, & Levy, 2008) dans une étude réalisée dans sept états américains.

En Italie, le nombre de personnes au volant d’une voiture avec une CAS supérieure
à la limite légale est passé de 15% à 6% après que le nombre de barrages policiers
soit passé de 250 000 à 800 000 par an (Taggi & Macchia, 2009). Au Canada, une
récente étude a elle aussi souligné l’importance de la surveillance policière et de la
mise en application de la loi actuelle pour réduire le nombre d’accidents de la route
chez les jeunes (Chamberlain & Solomon, 2008).

Une revue systématique de la littérature portant sur l’influence d’une surveillance


policière de l’alcool au volant sur les accidents de la route a fait ressortir que, dans
plus de la moitié des études consultées, une surveillance accrue était associée à une
réduction totale du nombre d’accidents de la route (Goss et al., 2008). Par ailleurs,
les auteurs soulignent la faiblesse méthodologique de plusieurs de ces études et
signalent qu’il serait prématuré de conclure à une relation certaine de cause à effet
entre les variables.

Parmi les autres mesures qui peuvent contribuer au succès d’une loi, de plus en plus
d’études recommandent la mise en place de programmes s’adressant plus
directement aux récidivistes et aux récalcitrants. En effet, il est maintenant reconnu
que ce petit groupe d’individus est responsable de la majorité des accidents de la
route (Beirness et al. 1997; Simpson and Mayhew 1991; Simpson et al. 2004;
Sweedler 1995 in : Beirness et al., 2005). Au Canada, 84% de tous les
déplacements où le conducteur dépasse la limite légale de CAS sont réalisés par
moins de 3% des détenteurs de permis de conduire (Beirness et al., 2005). Certes,
ces programmes ne pourraient remplacer une loi, mais couplées à cette dernière, ils
peuvent aider à créer un contexte général d’intolérance et d’intransigeance face à la
conduite en état d’ébriété. Par conséquent, le CAMH recommande que l’installation
d’un éthylomètre anti-démarreur sur les véhicules des récidivistes soit rendue
obligatoire. De plus, le CAMH recommande de rendre obligatoire un programme de
formation reconnu destiné aux propriétaires, directeurs et serveurs des
établissements qui vendent de l’alcool.

Des cours obligatoires pour les serveurs


Il est maintenant reconnu que les serveurs peuvent jouer un rôle déterminant dans
la réduction du nombre de conducteurs ivres au volant puisque notamment, ces

13
employés sont souvent en contact avec les récalcitrants, soit le noyau dur de ceux
qui refusent de respecter les limites actuelles. Les récalcitrants – généralement des
hommes qui conduisent avec des taux d’alcoolémie qui dépassent largement le 0,08
et qui ne se soucient aucunement des limites légales – se retrouvent régulièrement
dans les bars et autres établissements publics où l’on sert de l’alcool. Ceux qui
servent de l’alcool sont dans une position privilégiée identifier les situations où il y a
risque d’intoxication et prévenir la consommation abusive d’alcool. Une des
recommandations du tout récent rapport préparé pour la Commission Européenne
sur l’alcool en Europe est précisément de mettre en place des programmes efficaces
pour les serveurs et les employés des établissements qui vendent de l’alcool afin de
réduire les risques de conduite en état d’ébriété. (Anderson & Baumberg, 2006).

De plus, selon le CAMH (2002) les programmes bien développés ont su démontrer
leur efficacité à atteindre de tels buts. La formation des serveurs des établissements
licenciés dans l’Oregon a permis de réduire de près du quart le nombre d’accidents
mortels (Holder et Wagenaar, 1994; Dejoong et Hingson, 1998). Les programmes
communautaires de Californie ont, eux aussi, réduit considérablement le taux de
conduite avec facultés affaiblies et le nombre d’accidents mortels sur les routes
(Voas, 1997; Voas, Holder et Gruenewald, 1997). Ainsi, pour la population en
général et les récalcitrants en particulier, les programmes de serveur peuvent
s’avérer une excellente mesure préventive

Entre 2007 et aujourd’hui, des études ont souligné le potentiel de certaines mesures
pour réduire le nombre de chauffards sur les routes. Une étude américaine (Naimi,
Nelson, & Brewer, 2009) et une recherche suédoise (Jones & Holmgren, 2009) se
sont toutes deux intéressées à décrire les individus qui prennent la route en état
d’ébriété. Selon Naimi, outre le fait d’être un homme et celui d’être âgé de plus de
35 ans, c’est le fait d’avoir bu dans un établissement licencié qui est de loin le plus
grand facteur de risque associé à la conduite en état d’ébriété. Par conséquent, ces
auteurs concluent qu’afin de réduire le nombre de chauffards sur les routes, un
programme de formation reconnu destiné aux serveurs des établissements
qui vendent de l’alcool doit être rendu obligatoire.

Selon Jones, les conducteurs interceptés au volant en état d’ébriété sont


généralement de très gros buveurs (Jones & Holmgren, 2009). D’autres chercheurs
ont aussi montré que ce sont les plus gros buveurs qui enfreignent la loi en
matière d’alcool au volant (Holmgren, Holmgren, Kugelberg, Jones, & Ahlner,
2008; Freeman & Watson, 2009; Matthews et al., 2009). Par conséquent, ces
auteurs croient que d’un point de vue sociétal, ce sont des programmes
d’éducation et de traitement pour les comportements troubles reliés à la
consommation d’alcool qui risquent d’être les plus efficaces pour réduire les
accidents de la route où l’alcool en en jeu (Holmgren et al., 2008; Jones &
Holmgren, 2009).

Au Québec, ce cours existe depuis 15 ans. Il s’appelle « Action Service ». Il a été


mis sur pied par Éduc’alcool et l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec. Il a
été entièrement révisé, modernisé et amélioré. Depuis bientôt 10 ans, il est mis en
ligne pour celles et ceux qui seraient éloignés des grands centres. Il est aussi
disponible en DVD pour desservir les clients intéressés dans des zones où l’Internet
haute vitesse ne serait pas accessible.
14
Malheureusement, malgré les multiples représentations faites par Éduc’alcool depuis
douze ans pour rendre ce cours obligatoire, comme ses équivalents le sont dans
pratiquement toutes les provinces canadiennes, rien ne semble convaincre le
gouvernement du Québec de prendre ses responsabilités à cet égard lui qui
s’obstine dans son refus d’adopter une mesure pourtant universellement reconnue
comme l’un des moyens les plus efficaces de réduire la conduite avec les facultés
affaiblies.

Finalement, il importe de mentionner que l’ensemble de ces mesures


complémentaires ne permettent pas uniquement d’assurer le succès d’une loi, mais
d’en assurer les effets à long terme. Les pays qui ont adopté de nouvelles lois
mais qui après un certain temps, ont relâché les moyens garants de son
succès, ont vu les premiers changements positifs s’estomper et la situation
revenir à la case départ. En effet, les effets bénéfiques d’une nouvelle loi tendent
à s’estomper avec le temps si la perception du risque d’être appréhendé par la
police devient trop faible. Ce phénomène a été observé en Grande-Bretagne (Ross,
1973) en Australie (Homel, 1990) et en Ontario où en 1981, on avait introduit la
suspension de 12 heures du permis de conduire des conducteurs interceptés avec
une CAS supérieure à 0,05. Quoique la loi ontarienne ait initialement eu des effets
bénéfiques, ils ne furent que de courte durée. Vingillis et al. (1988) ont attribué une
partie de cet échec au fait qu’il n’y avait eu aucune campagne d’éducation, que la
couverture médiatique avait été très limitée et que les policiers avaient dû attendre
un certain temps avant d’obtenir les ressources leur permettant d’appliquer
correctement la nouvelle loi. En fait, un an après l’adoption de cette loi, il fut permis
de constater qu’il existait un niveau de connaissance très restreint de la loi en
Ontario (Vingilis, 1991)

Si les études épidémiologiques sur les effets globaux d’une réduction de la limite
légale du taux d’alcoolémie sont encourageantes et pourraient inciter à vouloir
tenter cette démarche législative, les conclusions et les recommandations de
rapports et d’études sur la nécessité de doubler une loi de mesures
complémentaires amènent à considérer qu’au Québec, ce serait plutôt la
revitalisation de telles mesures qui est le plus susceptible de réduire le
nombre d’accidents de la route causés par la consommation d’alcool.

Un sondage de la Traffic Injury Research Foundation réalisé par Beirness et al.


(2005) indique que plus de 3,5 millions de Canadiens admettent avoir conduit après
avoir consommé de l’alcool au moins une fois au cours des 12 derniers mois. Ceci
n’est probablement pas étranger au fait que présentement au Canada et au Québec,
la peur de se faire arrêter soit faible. Coxon (2004) rapporte plusieurs études selon
lesquelles les conducteurs qui se font arrêter en état d’ébriété ont probablement
conduit entre 200 et 2000 fois dans cet état d’illégalité avant d’être finalement
interceptés.

En fait, le gouvernement québécois a, à toute fin pratique, abandonné l’usage


d’étapes intermédiaires. Tel que déjà mentionné, les programmes de serveurs ne
sont pas obligatoires, aucune grande campagne de sensibilisation n’a été déployée
récemment, et à l’exception des périodes des fêtes, il est devenu de connaissance
commune que les chances de se faire arrêter sont fort minces. Le plus récente
15
sondage CROP (mai 2017) mené pour le compte d’Éduc’alcool a fait ressortir le fait
que 7% des conducteurs ont admis avoir conduit avec un taux d’alcoolémie
supérieure à la limite légale. C’est normal : plus de 7 Québécois sur 10 indiquant
qu’ils n’ont même pas aperçu un barrage routier au cours des 12 derniers mois et
plus des trois-quarts (76%) n’ont pas passé à travers un barrage au cours de la
dernière année.

À la lumière des études mentionnées précédemment, il n’est donc pas surprenant


que les effets de la loi actuelle s’estompent graduellement et que par conséquent,
certains voient en cette érosion la nécessité d’une loi plus sévère.

Disons-le clairement : Éduc’alcool adhère pleinement à l’objectif de réduire le


nombre et les conséquences néfastes de la conduite avec des facultés affaiblies. Le
bilan du pays à cet égard, comme à bien d’autres, a progressé de façon
remarquable au fil des ans (malgré une récente stagnation). Le nombre des décès
sur la route attribuable à l’abus d’alcool est passé de 50% à 40% du total et il
baisse encore. Il n’en demeure pas moins qu’il y a encore trop de décès qui lui sont
attribuables, chaque décès Étant un décès de trop. Il importe donc de prendre des
mesures adéquates et efficaces pour tenter de réduire ce nombre.

Des réflexions importantes


Des réflexions s’imposent ici :

1) On aura beau amender toutes les lois du pays, Code criminel compris, si les
citoyens ont la perception que la loi ne sera pas appliquée, ils ne changeront
pas leurs comportements. Et la loi perdrait dès lors non seulement son
efficacité mais aussi sa légitimité. On pourrait bien instaurer la peine de mort
en cas de conduite avec les facultés affaiblies, ce n’est pas tant la sévérité de
la sanction que la perception de sa probabilité qui fera la différence.

2) La sanction proposée doit être socialement acceptable et culturellement


justifiée. Le Canada, et singulièrement le Québec, ne sont pas l’Australie, ni
la Suède. Nous n’avons – heureusement - pas la même culture de l’alcool. Ce
qui a fonctionné dans une culture ne fonctionnera pas nécessairement dans
une autre. Par ailleurs, on est en droit de se demander si le poids énorme
d’avoir un dossier criminel est un bon exemple de gradation des sanctions –
et du sentiment de justice et d’équité – qui sont nécessaire à la crédibilité et
à l’acceptabilité des lois. Éduc’alcool n’a pas de réponse à cette question qui
mérite à tout le moins d’être considérée dans le débat en cours.

Les pays et les nations s’inspirent régulièrement les uns des autres pour développer
et mettre en œuvre leurs politiques, incluant celles de sécurité routière. On parle
alors de transfert des politiques, soit un processus "par lequel la connaissance des
politiques, des arrangements administratifs, des institutions et des idées d’un
contexte politique donné (passé ou présent) sont utilisées dans l'élaboration de
politiques, d'arrangements administratifs, d'institutions et d'idées dans un autre
système politique » (Dolowitz & Marsh 2000: 5).

16
Par ailleurs, un transfert des politiques n'est évidemment pas un processus de tout
ou rien. Dolowitz & Marsh (2000) ont identifié quatre gradations différentes de
transfert de politique:

i) la copie (transfert direct et complet d'une politique ou d'un programme


d'une autre juridiction);
ii) l’émulation (transfert des idées de base d'une politique ou d'un programme
dans une autre juridiction avec des ajustements pour différentes
circonstances);
iii) la combinaison (transfert de politiques et programmes de plusieurs
juridictions différentes) et ;
iv) l'inspiration (la politique dans une juridiction est utilisée comme stimulus
intellectuel pouvant inspirer un changement de politique, mais dont le
résultat final n’a rien à voir avec la politique originale) (voir aussi Rose,
1991).

Sur la base de ces connaissances, à la question « peut-on comparer l'Irlande et


l'Écosse au Canada? » nous proposerions la réponse suivante : Il est peu probable
que le Canada, un vaste pays regroupant 13 juridictions, puisse copier les politiques
irlandaise et écossaise en matière de conduite avec facultés affaiblies. Par ailleurs, il
est plausible que le Canada puisse émuler, combiner ou s’inspirer des lois, des
mesures et des sanctions développées dans ces deux pays.

La deuxième question que nous soumettons à la réflexion porte sur les


conséquences de la copie. Si le Canada copiait les politiques irlandaise ou écossaise,
les effets seraient-ils les mêmes? Il est impossible de répondre avec certitude à
cette question. En fait, la seule manière d’y répondre est sous forme de possibilités
et de probabilités. En ce sens, nous pourrions dans le débat nous inspirer du cadre
décisionnel développée par Kahneman (1973) :

Every decision must be seen against the backdrop of uncertainty that will never be
totally abridged. Because of this, every decision must be seen as a gamble.

1. Every real-life and real-time measure of possibilities and variation must be


taken to assure that odds can be calculated about outcomes.
2. Values must be assigned to every possible outcome, and then choices must
be made to drive those most valuable possibilities.

Cela mérite à tout le moins d’être analysé avant de prendre des décisions.

17
L’avis d’Éduc’alcool

Éduc’alcool invite donc la ministre de la Justice du Canada à

(1) se concerter avec ses homologues provinciaux – qui détiennent la clé du


succès dans ce domaine - pour, en tout premier lieu, établir un consensus
de fond à l’effet d’implanter les mesures intermédiaires qui sont reconnues
pour rendre les lois plus efficaces :

• Appliquer les lois actuelles dans toute leur sévérité et augmenter


considérablement les chances que les délinquants se fassent
prendre en accroissant les contrôles routiers et en simplifiant les
procédures policières. « Sans mesures d’exécution de la loi, les
citoyens ne croiront pas qu’ils risquent de se faire prendre et d’être
punis et ils pourraient ne pas être suffisamment incités à se
conformer à la loi » (Gouvernement du Canada, 2000).

• Rendre obligatoires les cours de formation des serveurs des


établissements licenciés dans toutes les provinces et par conséquent
le cours Action Service au Québec.

• Remettre la conduite en état d’ébriété au cœur du débat public. Il


est établi que pour que ce problème social disparaisse, tant le
gouvernement, que les éducateurs et le grand public doivent
demeurer engagés dans le débat. Il faut que de nouvelles
campagnes de sensibilisation à ce sujet soient diffusées à l’année.

(2) faire avec eux un inventaire avant de prendre des décisions dont les
conséquences sont très lourdes à bien des égards. Bien que nous n’ayons
pas les ressources pour mesurer quantitativement l’ensemble des
répercussions possibles d’une copie des lois et sanctions adoptées ailleurs
dans la collectivité, nous devons nous donner les moyens de relever un
certain nombre d’indicateurs qui risquent d’être affectés par les mesures
proposées dont :

• Nombre de collisions mortelles causées par une conduite avec facultés


affaiblies
• Nombre d’accidents avec blessures causés par une conduite avec
facultés affaiblies
• Ressources policières requises
• Achalandage des bars et restaurants
• Formation des serveurs des établissements licenciés
• Utilisation des solutions alternatives : conducteurs désignés, taxis et
transports en commun Capacité d’appliquer les lois
• Adoptions des étapes intermédiaires
• Consensus des autorités gouvernementales
18
• Cohérence des politiques et acceptabilité culturelle
• Sensibilisation de l’opinion publique

Notre société a des moyens limités. Elle ne peut investir des ressources
partout. Elle ne peut tout faire en même temps. Et si elle tente de tout faire
à la fois, elle risque plus souvent qu’autrement de rater tous ses objectifs.
Adopter une mesure sans en prévoir l’implantation et le succès, c’est un peu
comme ne pas l’adopter du tout. Or l’implantation des changements
nécessite du temps, des efforts, des ressources humaines et des ressources
financières.

Une fois ces mesures sérieusement implantées, une fois qu’on en aura
mesuré l’effet réel, alors il y aurait lieu de débattre de l’opportunité
d’abaisser le taux légal d’alcoolémie. Ce débat se fera à la lumière de la
situation qui prévaudra alors.

Aussi, avant de songer à baisser le taux légal d’alcoolémie au volant dans le


Code criminel, si tant est que cette mesure soit justifiée, il faut que le
ministère fédéral de la Justice prenne les moyens de se donner le minimum
de chances d’assurer la réduction de la conduite avec les facultés affaiblies.
Amender une loi est facile. Obtenir des résultats demande bien plus.

Pour l’heure, le moins que l’on puisse dire est que, dans le contexte actuel,
cette mesure isolée n’est ni pertinente, ni crédible car, à défaut de réunir les
conditions préalables, elle risquerait aussi d’être inefficace.

19
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