Frontières, Territoires et Mobilités
au Maghreb
(Antiquité et Moyen Age)
Actes du Ve colloque international du laboratoire
LR13ES11, Sousse 3-5 mai 2018
Frontières, Territoires et mobilités
au Maghreb
(Antiquité et Moyen Age)
Textes édités par
Abdellatif MRABET
Centre
de Publication
Universitaire
Faculté des Lettres
Le laboratoire de Recherche
et des Sciences
«Occupation du sol, peuplement et
Humaines
modes de vie dans le Maghreb
de sousse
antique et médiéval» LR13 ES11
2021
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Lotfi Belhouchet et ali…
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Mohamed SAIDI et al…
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Christine Hamdoune†
Jean-Pierre Laporte
laportj@orange.fr
Najoua Chebbi
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Mondher Brahmi
brahmi_mondher@yahoo.fr
Faouzi Abdellaoui
faouzi_abdellaoui@yahoo.fr
Zakia Ben Hadj Naceur-Loum
zakialoum1@gmail.com
Lazhar Nebti
laznebti@yahoo.fr
Mohamed Grira
griram2000@gmail.com
et
Saïd Khacha
Lotfi Naddari
lotfinaddari@gmail.com
D’une rive à l’autre : les courants
d’échanges transméditerranéens à
l'Holocène
Animaux chassés, Animaux élevés,
Animaux représentés : Mobilité
territoriale des groupes humains
holocènes en Tunisie présaharienne
Réflexions sur des limites (fines)
de territoire dans deux cités de
Césarienne
Quelques sites anciens des franges
sud et sud-ouest de l’Aurès
La perception de l’espace gétule
par les auteurs anciens sous
l’Empire.
Le système défensif du limes
Montensis dans le Sud-ouest
tunisien
La territorialisation de l’olivier et
des techniques oléicoles en
Byzacène sous l’Empire
Circulation des biens de
consommation et économie
monétaire en Afrique du IVe au
VIIe siècle
Le déplacement des artisans : la
question des ateliers itinérants en
Afrique romaine
In his praedis Manliae Pudentillae :
À propos d’une femme clarissime
propriétaire à Timgad
D’Althiburos à Mactaris en passant
par Rome : chapitres de la
biographie du clarissime africain
M. Valerius Quadratus
Hosni Abid
hosni_abid@yahoo.fr
Anis Hajlaoui
hajlaoui.inp2011@gmail.com
et
Hédi Fareh
fareh_tn@yahoo.fr
Lamia Ben Abid
lamia.benabid@yahoo.fr
Pvblica Mvstitanorvm : Essai de
délimitation
Note sur une inscription inédite
trouvée dans la région des Aoulèd
Farhan, Sidi Bouzid Nord
Nizar Ben Slimane
benslimene.nizar@hotmail.fr
Sur le groupe statuaire de la
dynastie Julio-claudienne trouvé à
Zitha, cité pérégrine de la petite
Syrte
AFRICA, projet collaboratif de
cartographie de l’Afrique du Nord
antique : structuration de la base de
données et perspectives
Quelques réflexions sur un vase
naviforme du catalogue du Musée
Alaoui (CMA)- Tunis
Deux objets archéologiques inédits
conservés au site et au musée de
Carthage
Trois fils à plomb découverts sur le
site d’Oudhna
Boutheina Ben Hassine
benhassineboutheina@yahoo.fr
Les frontières et les territoires
ibadites au Maghreb médiéval
Fethi Bahri
fethi_bahri@yahoo.com
et
Chokri Touihri
touihri.chokri@inp.tn
« Qasr al-Sayyida » et Monastir :
des questions d’urbanisme et de
territoire à la lumière de
découvertes archéologiques
récentes
Luc Lapierre et al….
luc.lapierre@numericable.fr
Abdelhamid Barkaoui
barkaoui.hamid@yahoo.fr
Hamden Ben Romdhane
hamden042001@yahoo.fr
TABLE DES MATIERES
D’une rive à l’autre : les courants d’échanges
transméditerranéens a l'holocène …………………………..
1
Animaux chassés, animaux élevés, animaux représentés :
mobilité territoriale des groupes humains holocènes en
Tunisie présaharienne………………………………………
19
Réflexions sur des limites (fines) de territoire dans deux sites
de céserienne………………………………………………..
51
Quelques sites anciens des franges sud et sud-ouest de
l’Aurès……………………………………………………...
69
La perception de l’espace gétule par les auteurs anciens sous
l’empire……………………………………………………..
109
Le système défensif du limes montensis dans le sud-ouest
tunisien ……………………………………………………..
131
La territorialisation de l’olivier et des techniques oléicoles
en byzacène sous l’empire…………………………………
173
Circulation des biens de consommation et économie
monétaire en Afrique du IVe au VIIe siècle…………………
197
Le déplacement des artisans : la question des ateliers
itinérants en Afrique romaine……………………………….
225
In his praedis manliae pudentillae : à propos d’une femme
clarissime propriétaire a Timgad………………………….
247
D’Althiburos a Mactaris en passant par Rome : chapitres de
la biographie du clarissime africain m. valerius quadratus…
271
Pvblica mvstitanorvm : essai de délimitation……………….
295
Note sur des, clodii, tribules de la Quirina (d’après une
inscription inédite trouvée au nord de sidi Bouzid / Tunisie
centrale)…………………………………………………….
331
Sur le groupe statuaire de la dynastie julio-claudienne trouvé
à Zitha, cité pérégrine de la Petite Syrte……………………..
349
Africa, projet collaboratif de cartographie de l’Afrique du
nord antique : structuration de la base de données et
perspectives………………………………………………
371
Quelques réflexions sur un vase naviforme du catalogue du
musée Alaoui (CMA) – Tunis………………………………
391
Deux objets archéologiques inédits conservés au site et au
musée de Carthage………………………………………….
413
Trois fils à plomb découverts sur le site d’Oudhna…………
431
Les frontières et les territoires ibadites au Maghreb médiéval
445
« Qasr al-sayyida » et Monastir : des questions d’urbanisme
et de territoire a la lumière de découvertes archéologiques
récentes……………………………………………………..
467
AVANT – PROPOS
Consacré aux frontières, territoires et mobilités au pays du
Maghreb (Antiquité et Moyen Age), ce 5e colloque du laboratoire
«Occupation du sol, peuplement et modes de vie dans le Maghreb
antique et médiéval/ LR13ES11 » qui s’est tenu à Sousse du 03 au 05
mai 2018 n’est pas une reprise d’études antérieures. Certes, non
inédites, déclinées séparément ou par croisement -, pour des temps
variés-, les problématiques retenues ont été abondamment traitées lors
de précédentes manifestations scientifiques déjà publiées1. Cependant,
tout comme en conviendra aisément tout lecteur attentif, les actes cidessous rassemblés ne manquent pas d’originalité et ne reprennent
nullement des résultats connus. Leur apport, plus que dans la fraicheur
et l’intérêt des données qu’ils utilisent, réside dans la pertinence des
différentes démarches académiques consenties par les différents auteurs
qui y ont pris part. Conduites à des échelles spatiales variées (fines de
territoires de cités antiques, espace tribal, zones militaires, territoires
historiques, territoires économiques, zones d’échanges et de mobilité)
pour des temporalités différentes (Préhistoire, Protohistoire, Antiquité et
Moyen Age), leurs contributions allient le recours à l’histoire telle que
classiquement rendue par l’écrit (sources littéraires, épigraphie et
archives) à la sollicitation du sol et de l’objet archéologique (fouilles
archéologiques programmées ou de sauvetage, découvertes fortuites et
études d’objets). La production livrée en conséquence est fort diverse
et s’attache aux différents volets du triptyque proposé en étude. C’est
ainsi que quelques textes se rapportent à des questions d’identification
et de définitions de certains espaces historiques en les situant à
l’intérieur de leurs frontières physiques ou politico-culturelles,
reconstituées pour l’occasion. D’autres, davantage tournés vers les
territoires en examinent les portées économiques en les considérant
comme des espaces d’échanges et de circulation de biens et en jugeant
de leur vitalité au vu d’indicateurs divers (monnaie, céramique,
technologie oléicole, activités diverses…). D’autres encore se sont
intéressés à des questions de mobilités, celles des hommes, qui, par
1 La liste de tels colloques est par trop longue pour être déclinée ici ; nous en rappelons
celui que nous avons édité à Sousse, sous le titre de « Mobilité des hommes et des
idées en Méditerranée », Faculté des lettres et des sciences humaines de Sousse,
Sousse, 1999.
groupes ou individus et pour des mobiles différents, ont investi certains
espaces et les ont marqués de leur empreinte.
Cependant, en sus des actes du colloque stricto-sensu, le présent
ouvrage fait aussi part à d’autres contributions qui, bien que sans grand
lien avec les thématiques proposées à l’étude, viennent sacrifier à la
bonne tradition de traiter des actualités archéologiques et des
recherches en cours, en rendant compte qui, d’une fouille ouverte, qui
d’une enquête ou d’études d’objets ou de monuments inédits… Au
total, ce sont donc 26 études que nous mettons à disposition du lecteur
(22 textes en langue française, 4 en langue arabe) espérant ainsi, par
leur truchement, contribuer à davantage d’éclairage sur une
problématique qui, pour sur, alimentera bien d’autres recherches à
venir.
Abdellatif MRABET
D’ALTHIBUROS A MACTARIS EN PASSANT PAR
ROME : CHAPITRES DE LA BIOGRAPHIE
DU CLARISSIME AFRICAIN M. VALERIUS QUADRATUS
Lotfi Naddari*
Résumé
Cette recherche propose de reprendre l’ensemble du dossier épigraphique relatif au
clarissime althiburitain de l’époque d’Antonin le Pieux, M. Valerius Quadratus, dont
le cursus est couronné par la préture et le septemvirat des épulons. A la lumière d’un
lot homogène d’inscriptions latines connues de longue date, provenant de Rome,
d’Althiburos et de Mactaris auquel s’ajoutent une inscription fragmentaire faussement
attribuée à un légat de la IIIe légion Auguste ainsi que deux nouveaux blocs d’une
frise épigraphe d’un temple anonyme d’Althiburos, notre propos n’est pas de passer
en revue les différentes magistratures de son cursus déjà bien connues. Nous nous
proposons de faire le point d’abord sur ses séjours africainspour finir avecses actions,
ses générosités et les expressions d’allégeance manifestées à son égard.
Mots clefs : Rome, Althiburos, Mactaris, M. Valerius Quadratus, clarissimes
africains, Antonin le Pieux, recommandation impériale, ordre sénatorial, patrons
municipaux.
Abstract
This research proposes to take over the whole of the epigraphic file related to the
Althiburos clarissimus of the time of Antoninus Pius, M. Valerius Quadratus. In the
light of a homogeneous batch of long-time known Latin inscriptions, coming from
Rome, Althiburos and Mactaris to which are added a fragmentary inscription
wrongfully allotted to a legatus of Legio III Augusta, and two new blocks of an
epigraphic frieze of an anonymous temple of Althiburos, our matter is not to review
his various already well-known magistracies. Our initial task is to establish the
chronology of his African staysand especially to take stock of his actions, its
generosities and the expressions of allegiance towards his person.
Key words: Althiburos, Mactaris, Rome, M. Valerius Quadratus, African
clarissimi, Antoninus Pius, imperial recommendation, senatorial order,
municipal patroni.
*
Faculté des Sciences humaines et sociales (Université de Tunis). Membre du
Laboratoire de Recherche «Occupation du sol, peuplement et modes de vie dans le
Maghreb antique et médiéval », Faculté des Lettres et des Sciences humaines de
Sousse (Tunisie). (lotfinaddari@gmail.com).
**
Ce texte a profité des remarques savantes de MM. A. Beschaouch, L. Maurin, A.
M’Charek et M. Khanoussi. Qu’ils trouvent ici l’expression de mes remerciements les
plus sincères.
272
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
Introduction
Parmi la liste des clarissimes africains ayant parcouru une
brillante carrière sénatoriale sous le règne de l’empereur Antonin le
Pieux se distingue le célèbre citoyen d’Althiburos M. Valerius
Quadratus, dont le cursus est couronné par la préture et le septemvirat
des épulons. A Althiburos, sa ville natale, cité africo-romaine de
tradition numido-punique, identifiée avec Hr. Medeïna dans le secteur
central du Haut Tell tunisien (Fig. 1), il est connu par un hommage qu’il
avait rendu à l’empereur Antonin le Pieux et par une inscription
monumentale fragmentaire, celle d’une frise d’un temple anonyme
situé sur le côté nord-est du forum. A Mactaris, ville voisine, il était
également à l’honneur comme en témoigne un hommage public qui lui
a été rendu dans une inscription dont la lecture complète vient d’être
définitivement établie à la lumière d’un fragment épigraphe récemment mis au jour. A Rome même, une base de statue lui fut élevée ; elle
occupe actuellement une place de choix parmi les inscriptions des
membres de l’ordre sénatorial exposées au Musée des Thermes de
Dioclétien à Rome.
Ce sont ces quatre inscriptions latines qui ont fourni la matière
historique nécessaire pour l’établissement des notices prospographiques qui lui furent consacrées dont la plus étoffée, à côté de celle que
lui réserva M. Corbier dans une étude sur les familles clarissimes
d’Afrique proconsulaire, est la notice établie par M. Cébéillac dans son
ouvrage sur Les quaestores principis etcandidatiaux Ier et IIe siècles de
l’Empire1.
1
PIR, III, 124 ; RE, VIII, A, col. 216, n° 325 ; CEBEILLAC M., 1972, n° LXVIII,
149-151 ; CORBIER M., 1982, p. 707-708.
p.
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
273
Fig. 1 : Carte de localisation : Althiburos en Zeugitane, Mactaris en
Byzacène.
(D’après Desanges et al. 2010).
Aujourd’hui, le réexamen de ce dossier épigraphique enrichi par
une inscription d’Althiburos connue de longue date, mais faussement
attribuée à un légat de la IIIe légion Auguste, et la découverte de deux
nouveaux blocs de la frise épigraphe d’un temple anonyme situé sur le
côté nord-est du forum de la même ville mentionnant le nom de ce
clarissime, et surtout la mise au jour récente du deuxième fragment de
l’hommage qui lui fut rendu à Mactaris, permettent de traiter certains
détails de sa biographie :
- Sa mobilité entre Rome et le secteur central de la
Proconsulaire. Les périodes de repos observés entre les magistratures
de son cursus sénatorial, ont été l’occasion de deux séjours africains, au
moins, qui l’ont conduit chez lui, à Althiburos, et dans la ville voisine
Mactaris ;
- Sa notoriété, dans sa ville natale, dans la ville voisine Mactaris
et à Rome même, grâce à une indulgentia impériale ;
- Ses générosités, ses bienfaits et la reconnaissance exprimée
en sa faveur dans ces deux villes du secteur central de la Proconsulaire.
***
274
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
I- LE DOSSIER EPIGRAPHIQUE
Nous commençons d’abord par l’inscription de Rome, la plus
tardive ; elle retrace le cursus de Quadratus jusqu’à la préture et le
septemvirat des épulons.
1- CIL, VI, 1533 = CIL, XIV, 3996 (Rome). (Fig. 2)
Base en marbre découverte à l’est de Rome, sur lavia Tiburtina
et exposée actuellement au Musée des Thermes de Dioclétien, à Rome.
Fig. 2 : CIL, VI, 1533 = CIL, XIV, 3996.
(Cliché de l’auteur)
M(arco) Valerio, M(arci) f(ilio), Quirina (tribu), / Quadrato,
(decem) uiro / stli(t)ib(us) iud(icandis), trib(uno) laticl(auio) / leg(ionis)
III Aug(ustae), seuiro / equitum r(omanorum), q(uaestori) Aug(usti), /
trib(uno) pl(ebis) candidato, / praetori, (septem) uiro / epulonum.
« À Marcus Valerius Quadratus, fils de Marcus, tribule de la
Quirina, membre du collège des dix hommes chargés de juger les
litiges, tribun laticlave de la Troisième légion Auguste, sévir des
chevaliers romains, questeur de l’Auguste, tribun de la plèbe candidat,
préteur, septemvir des banquets sacrés. »
Date : Peu de temps après 151 ou 155 apr. J.-C.
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
275
2- CIL, VIII, 27776 = AE 1908, 168 (Althiburos).
Base de statue.
Imp(eratori) Caes(ari), divi Hadr(iani) fi[l(io)], / [d]ivi Traiani
Parth(ici) nep(oti), / [d]ivi Ner(uae) pronepoti, T(ito) Aelio / Hadr(iano)
Antonino Pio, pont(ifici) / max(imo), trib(unicia) potes[t(ate) V]III (?),
imp(eratori) / II, co(n)s(uli) IIII, p(atri) p(atriae), optimo prin/cipi, ob
singularem eius / in se indulgentiam, / M(arcus) Valerius, M(arci)
fil(ius), Quir(ina tribu), / Quadratus, (decem) uir stlit(ibus) /
iud(icandis), trib(unus) mil(itum) [[leg(ionis) III]] Aug(ustae), /
quaes[t(or)] eius desig(natus), / posu[it].
« À l’empereur César, fils du divin Hadrien, petit-fils du divin
Trajan le Parthique, arrière-petit-fils du divin Nerva, Titus Aelius
Hadrien Antonin le Pieux, grand pontife, revêtu de la 8 e ( ?) puissance
tribunicienne, salué deux fois imperator, consul pour la 4e fois, père de
la patrie, le meilleur des princes, en raison de sa bienveillance
particulière à son égard, Marcus Valerius Quadratus, fils de Marcus,
tribule de la Quirina, membre du collège des dix hommes chargés de
juger les litiges, tribun militaire de la Troisième légion Auguste,
questeur désigné du prince, (lui a) érigé (ceci). »
Date : entre le 25 février 145 et le 24 février 146 ou bien entre
le 10 décembre 149 et le 9 décembre 150. Les dates sont proposées en
fonction de la 8e ou la 13e puissance tribunicienne restituable au niveau
de la 5e ligne.
3- CIL, VIII, 27772 (Althiburos) : restitution partielle d’une
inscription encore incomplète (Fig. 3-5).
Six fragments non jointifs du linteau d’un temple anonyme situé
sur le côté nord-est du forum d’Althiburos. Ils alignent un long texte,
malheureusement très lacunaire, réparti en deux lignes1. Les quatre
premiers ont été inventoriés dans le CIL, VIII (Fig. 3) ; les deux autres,
découverts par M. Torcheni dans le site même d’Althiburos dans le
cadre de la préparation de sa thèse portant sur Le centre monumental
d’Althiburos2 (Fig. 4 et 5), présentent les mêmes caractéristiques
1
Dimensions cumulées des fragments : H. 55 cm ; L. 50 cm ; ép. 75 cm ; Hl. : 21 cm
(l. 1), 13 cm (l. 2).
2
TORCHENI M., 2017, p. 289, fig. 164.
276
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
techniques que les premiers fragments1. Comportant quelques éléments
du nom de ce clarissime et de son cursus, ils s’insèrent sans aucune
difficulté parmi les quatre premiers : l’un, entre les fragments a et b ;
l’autre, juste après le fragment c. (Voir tableau n° 1).
Fig. 3 : Les quatres premiers fragments du linteau d’un temple anonyme
d’Althiburos.
(CIL, VIII, 27772).
Fig. 4 a et b : Photo et relevé du 1er fragment
inédit découvert par M. Torcheni.
1
Fig. 5 : 2e fragment
inédit découvert par M.
Torcheni.
H. 58 cm ; L. 51 cm ; ép. 76 cm ; h.l. : entre 14 et 21 cm. Je tiens à exprimer ma
gratitude à mon ami Mounir Torcheni qui a bien voulu me communiquer les photos
de ces deux fragments et le relevé de l’ensemble des blocs épigraphes retrouvés jusque
là.
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
277
TABLEAU 1: ARRANGEMENT DES FRAGMENTS DU LINTEAU DU
TEMPLE ANONYME D’ALTHIBUROS
Bloc a
Bloc
inédit
Bloc b
Bloc c
Bloc
inédit
Bloc d
[---]VS M[---]
[---]LERIVSM [---]
M VAL
[.]EG III AV
ERI C[---]
[---QVAE[---]
OI[---]
ESIGN [---]
M V[.]
[---]S MVN
[---]IVS M[---]
[---a]LTHIBVR[---]
Mais avant de proposer une lecture de ce texte, qui demeure
malgré tout lacunaire, quelques détails d’ordre épigraphique méritent
d’être présentés. Tout d’abord, la restitution [Cer]eri ou [Ven]eri
proposée par les éditeurs du CIL, VIII (l. 1 du fragment b)1s’avère
caduque. En effet, le premier fragment découvert par M. Torcheni met
définitivement fin à cette hypothèse ; les lettres M VAL de ce nouveau
fragment viennent s’associer sans aucun risque d’erreur avec les lettres
ERI pour former la séquence onomastique M. VALERI2. Ensuite, pour
la fin de la première ligne des fragments a et d, lesrelevés réalisés par
M. Torcheni permettent d’identifier des hastes obliques qui
correspondent très vraisemblablement au jambage droit de la lettre M.
Enfin, pour la partie finale du texte, nous proposons à titre d’hypothèse
la restitution suivante : [patronu]S MVN[icipi A]LTHIBVR[itani
dedicauit]. La même ordinatio est attestée dans des textes parallèles
provenant de Thamugadi, par exemple, dans lesquels ce sont des
patrons de la colonie, dont certains sont des légats de la IIIe legion
Auguste, qui procèdent à la dédicace des monuments publics3. En effet,
avant d’être coopté patron du municipe de Mactaris (n° 5), il est
possible que Quadratus l’était d’abord chez lui. Le libellé de cette partie
conclusive (le nom et le cursus de ce clarissime au nominatif précédant
le toponyme de la ville et son statut juridique) permet, en effet,
d’envisager une telle hypothèse.
Malheureusement, malgré les progrès de la lecture du texte, le
début de cette inscription monumentale continue à poser de sérieux
problèmes qui empêchent de proposer une lecture satisfaisante.
Pour le moment, le texte pourrait s’établir partiellement comme
suit :
Ligne 1 :
[---]us M[---] M(arci) Valeri C[---]oi[---] M V[--]ius M[---]/
C’est la lecture que proposa d’abord A. Merlin. Cf. MERLIN A., 1912, p. 424-425.
Torcheni M., 2017, p. 290 et 310.
3
Voir à titre d’exemple : CIL, VIII, 2392 = ILS, 1178 ; CIL, VIII, 2400 = 17911.
1
2
278
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
Ligne 2:
[--- M(arcus) Va]leriusM(arci) [f(ilius) Quir(ina
tribu) Quadratus (decem) uir stlit(ibus) iud(icandis), trib(unus)
mil(itum) l]eg(ionis) III Au[g(ustae),] Quae[stor Aug(usti) d]esign[atus
---patronu]s mun[icipi A]lthibur[itani fecit vel dedicauit].
Date : Malgré son état fragmentaire, cette inscription est
vraisemblablement contemporaine de la précédente ou légèrement
postérieure. M. Valerius Quadratus est encore simplement quaestor
Augusti designatus, mais peut-être déjà coopté patronus municipi.
4- CIL, VIII, 1829 (Althiburos) (Fig. 6).
Fragment d’épistyle comportant un texte, malheureusement
lacunaire, réparti sur trois lignes1.
Lecture des éditeurs du CIL,
VIII.
[L(ucius) Naeuius]
Quadrat[ianus]/ [leg(atus)
Aug(usti) pro pra]et(ore)
leg(ionis) III Aug(ustae) [---] / [--] TVS [---].
Fig. 6 : CIL, VIII, 1829.
Ce texte incomplet n’a pas été retenu par tous ceux qui se sont
intéressés à la carrière de ce notable althiburitain, membre de l’ordre
sénatorial. Pourtant, dans la première ligne nous lisons QVADRAT
correspondant à une bonne partie du cognomen Quadratus. Dans la
deuxième on peut lire ET LEG III AVG que les éditeurs du CIL VIII
restituent en [leg. aug. propra]ET(ore) pour proposer à titre d’hypothèse
d’identifier un légat de l’époque de Pertinax : [L. Naeuius]
Quadrat[ianus, leg(atus) Aug(usti) propra]et(ore) leg(ionis) III
Aug(ustae). Et c’est à la lumière de cette hypothèse de lecture que les
auteurs des fastes des provinces romaines d’Afrique et les spécialistes
de l’histoire militaire avaient retenu cette inscription d’Althiburos
parmi la série des textes mentionnant le nom de ce légat2.
1
Dimensions : L. 125 cm ; h. 40 cm ; Hl. 13 cm, 8 cm, 3 cm, 6 cm.
THOMASSON B.-E., p. 168, n° 48 ; PALLU DE LESSERT A. C., t. I, p. 403 ; LE BOHEC
Y., p. 398.
2
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
279
Toutefois, une remarque d’ordre épigraphique s’impose à nous ;
elle est relative à l’abréviation (propra)et.dans la lecture proposée par
les éditeurs du CIL, VIII :
[leg(atus) Aug(usti) propra]et(ore)leg(ionis) IIIAug(ustae).
En fait, il s’agit là d’une abréviation inconnue dans toutes les
inscriptions relatives aux légats propréteurs de la Troisième légion
Auguste où l’on trouve exclusivement l’abréviation courante et banale
pr. pr. = pr(o)pr(aetore)1. Elle apparaît, d’ailleurs, dans deux milliaires
mentionnant le nom de ce même légat L. Naeuius Quadratianus2. Ainsi,
par voie de conséquence, les deux premières lettres de la deuxième
ligne doivent être lues IT, soit la partie finale de l’abréviation [mil]it.
qui fait partie de la formule courante pour les jeunes clarissimes que
nous retrouvons d’ailleurs dans le cursus du clarissime althiburitain M.
Valerius Quadratus:
[trib(unus) mil]it(um) leg(ionis) III Aug(ustae).
La troisième ligne comporte seulement les trois lettres TVS pour
lesquelles les éditeurs du CIL, VIII ne proposent aucune solution. Elles
correspondent, de toute évidence, à la partie finale de la formule
quaest(or) Aug(usti) designatus,qui apparaît également à la fin du
cursus du clarissime althiburitain dans les deux autres inscriptions
d’Althiburos.
Ainsi, cette inscription monumentale fragmentaire d’Althiburos
trouve place dans le dossier épigraphique relatif à M. Valerius
Quadratus. Cela autorise d’établir le texte comme suit :
[M(arcus) Valerius M(arci) fil(ius) Quir(ina)] Quadrat[us] /
[(decem) uir stlit(ibus) iud(icandis) trib(unus) mil]it(um) leg(ionis) III
Aug(ustae), / [quaest(or) Aug(usti) designa]tus [---fecit vel dedicauit].
Date : Vraisemblablement contemporaine des deux précédentes :
de fait, M. Valerius Quadratus est encore quaestor Augusti designatus.
1
Voir à titre indicatif indicesCIL, VIII, p. 187-191.
CIL, VIII, 10238 :Imp(eratore) Caes(are) P(ublio) He/luio Pertina/ce Aug(usto)
p(atre) p(atriae) trib(unicia) p(otestate) / co(n)s(ule) II L(ucio) Naeuio / Quadratian/o
leg(ato) Aug(usti) pr(o) / pr(aetore) a Lambaese / m(ilia) p(assuum) / LVIIII. CIL,
VIII, 10242 = 22337 :Imp(eratore) Caes(are) P(ublio) [Helu]/[i]o Pertinace /
Aug(usto) p(atre) p(atriae) trib(unicia) p(otestate) / co(n)s(ule) II L(ucio) Nae/uio
Quadra/tiano leg(ato) A/ug(usti) pr(o) pr(aetore) [a] La/mbease / m(ilia) p(assuum) /
L[---].
2
280
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
5- CIL, VIII, 11811 = ILPB, 103 (Mactaris) (Fig. 7-9).
La partie du texte de cet hommage découvert depuis longtemps
à Mactaris est gravée sur un fragment d’une plaque en calcaire1. La mise
au jour récente dans cette même ville du fragment adjacent apporte des
compléments précieux relatifs au cursus de M. Valerius Quadratus et
permet surtout de connaître le statut de Mactaris sous le règne
d’Antonin le Pieux comme de se rendre compte des liens qui unissaient
cette ville, chef-lieu du Pagus Thuscae et Gunzuzi, à ce clarissime
althiburitain2.
Fig. 7 : CIL, VIII, 11811 = ILPB,
103.
Fig. 8 : La dalle adjacente.
(Clichés de l’auteur)
1
2
Dimensions : H. 107 cm ; l. 56 cm ; ép. 25 cm ; Hl. : entre 6,5 et 9 cm.
NADDARI L., Municipium Mactaritanum, MEFRA, 2018. (à paraître).
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
281
Fig. 9 : Reconstitution de l’hommage rendu à Mactaris au clarissime M.
Valerius Quadratus.
Le texte complet, à la lumière du nouveau fragment, doit
s’établir comme suit :
M(arco) Valerio, / [M(arci) f(ilio), Quiri]/na (tribu), Quadrato,
(decem) uir(o)] / stlitibus [i]udican/dis, trib(uno) [la]ticlauio /
Leg(ionis) III A[ug](ustae), q(uaestori) A[ug(usti)], patrono
m[u]/nicip[i]. D(ecreto) d(ecurionum), p(ecunia) p(ublica).
« À Marcus Valerius Quadratus, fils de Marcus, tribule de la
Quirina, membre du collège des dix hommes chargés de juger les
litiges, tribun laticlave de la Troisième Légion Auguste, questeur
d’Auguste, patron du municipe. Décret des décurions, dépense
publique. »
Date : Mentionnant la questure impériale, gérée au plus tard en
l’année 151 apr. J.-C., cette dédicace doit être légèrement postérieure
aux trois inscriptions d’Althiburos qui se limitent à mentionner que
Quadratus était simplement quaestor Augusti designatus. Mais, elle doit
être légèrement antérieure à l’hommage qui lui fut rendu à Rome et qui
retrace sa carrière jusqu’à la préture, gérée au plus tard en 155 apr. J.C. et le septemvirat des épulons.
Ce texte se présente alors sous la forme d’un hommage public
que la curie de Mactaris, et non les municipes Althiburitani retenus
jusqu’ici1, a rendu au clarissime althiburitain, coopté alors patron du
municipe. Il offre essentiellement l’intérêt de savoir que Mactaris fut
1
BESCHAOUCH A., 1969, p. 203 ; ILPB, 103.
282
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
municipium sous le règne d’Antonin le Pieux avant d’être promue au
rang de colonie honoraire sous le règne de Marc Aurèle, d’où sa
nomenclature complète révélée par la documentation épigraphique
sévérienne et post-sévérienne1.
II- CENTRES D’INTERETS REVELES PAR LA DOCUMENTATION
EPIGRAPHIQUE MISE A CONTRIBUTION
1- Chronologie d’un cursus sénatorial soutenu par une
indulgentia imperatoris
Originaire d’Althiburos, Quadratus appartient à la famille des
Valerii. Néanmoins, exception faite des textes mentionnés ci-dessus, ce
gentilice n’est connue dans cette même ville que par des textes
funéraires2. En effet, on ne sait rien à propos d’autres membres de sa
famille restreinte, dont il est possible qu’ils lui ont été associés dans la
dédicace du temple anonyme. (n° 3) Il s’agit en fait d’un gentilice peu
fréquent dans ce secteur central de la Proconsulaire. Il est attesté en
particulier dans les deux colonies juliennes d’Assuras et de Sicca
Veneria, à Mactaris et surtout dans le municipe d’Vzappa. Alors que
dans la première, il est révélé simplement par un texte funéraire3, dans
la deuxième on connait le clarissime Valerius Romanus qui fut curator
reipublicae et patron de la colonie4. Quant à Mactaris, outre certains
Valerii connus par quelques épitaphes5, son tableau onomastique
compte surtout un prêtre de Cybèle de l’époque de Sévère Alexandre
probablement : P. Valerius [---]tianus6. Mais, c’est à Vzappa, cité du
pagus Thuscae et Gunzuzi, située à une quinzaine de kilomètres à l’estnord-est de Mactaris, que des clarissimes d’une même famille sont
connus : les Valerii Galliani, dont le plus célèbre est C. Valerius
Gallianus Honoratianus qui fut curateur reipublicae Karthaginis7.
Ce sont les textes du dossier épigraphique présenté en première
partie qui éclairent d’une vive lumière certains chapitres de la
biographie de Quadratus, ceux étroitement liés au déroulement de son
cursus et des périodes de repos observées entre les magistratures gérées.
1
NADDARI L., Municipium Mactaritanum, MEFRA, 2018. (À paraître).
CIL, VIII, 16480, 27807, 27815 (épitaphe chrétienne).
3
CIL, VIII, 1821.
4
CIL, VIII, 15881 = ILS, 5505 = ILPB, 366.
5
Voir en dernier lieu M’CHAREK A., 1982, p. 81, 98, 117, 144.
6
AE, 1955, 49. Voir en dernier lieu BELKAHIA-KAROUI TH., n° 196.
7
CIL, VIII, 11935, 12522 = ILS, 600. Voir en dernier lieu BELKAHIA-KAROUI TH.,
n° 250-253.
2
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
283
Présenté selon un rythme ascendant dans toutes les inscriptions,
son cursus, dont les honneurs sont énumérés de façon détaillée,
comporte à la fois des magistratures sénatoriales inférieures et une
supérieure, précédées de fonctions préliminaires préparatoires. En
respectant l’annalité et le biennium, il semble que toute cette carrière
ait été effectuée sans rupture sous le règne de l’empereur Antonin le
Pieux.
Sur la foi de l’ensemble des documents énumérés, ce clarissime,
avant de briguer la questure qui lui donna accès au Sénat, a commencé
sa carrière sénatoriale par le decemvirat judiciaire (X uir stlitibus
iudicandis). Ensuite, il fut tribun militaire de la Troisième légion
Auguste ; un service militaire d’une année dans la IIIe légion Auguste
stationnée à cette époque à Lambèse1.
L’inscription de Rome est la seule à préciser que Quadratus,
après cette magistrature inférieure, et avant d’être appelé à la questure
de l’Auguste, fut seuir equitum romanorum. C’est une charge purement
honorifique et onéreuse se terminant par l’organisation de jeux2. Il
s’agit là, en fait, d’une marque de prestige étant donné que le sévirat
d’une turme des chevaliers romains, tout comme la préfecture des féries
latines et la questure de l’empereur qu’il géra un peu plus tard, est un
jalon habituel de la carrière sénatoriale des patriciens. C’est là en fait
deux faveurs qui mettent en relief la place particulière qu’occupait ce
clarissime althiburitain et les appuis reçus de l’empereur Antonin le
Pieux lui-même et peut-être même de la part d’un « clan » de sénateurs
africains influents à Rome à la fin de la première moitié du IIe siècle3.
Les trois inscriptions d’Althiburos (n° 2, 3 et 4) soulignent que
ce clarissime était quaestor Augusti designatus. L’une d’elles (n° 2), un
hommage rendu par Quadratus à Antonin le Pieux, précise que c’est par
une indulgentia impériale qu’il fut choisi comme quaestor Augusti
designatus4. Les deux inscriptions de Rome et de Mactaris (n° 1 et 5)
précisent qu’il fut effectivement quaestor Augusti.
Ceci n’implique pas nécessairement un déplacement vers ce camp africain. R.
Cagnat (CAGNAT R., 2002, p. 93) précise que « ce service n’était généralement pas
effectif. » J.-M. Lassère (LASSERE J.-M., 2005, t. II, p. 650), précise que « ce temps
de commandement est souvent remplacé, surtout pour les jeunes patriciens, par un an
de service dans une administration. »
2
LASSÈRE J.-M., 2005, t. II, p. 650.
3
CORBIER M., 1982, p. 750.
4
A ce sujet A. Chastagnol précise que « L’empereur détient en outre une large part
dans la nomination des questeurs, premier échelon qui donne accès au rang de sénateur
1
284
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
L’inscription de Mactaris, gravée peu après l’année de sa
questure impériale, qu’il géra en 147 ou en 151 apr. J.-C., précise que
Quadratus fut coopté patronus municipi Mactaritani. C’est
probablement durant un court séjour africain coïncidant avec le
biennium à observer entre la questure impériale et le tribunat de la
plèbe, que ce clarissime fut coopté et honoré publiquement. Ainsi, il est
possible qu’il le fût également à Althiburos, sa ville natale, mais un peu
auparavant, lorsqu’il fut simplement quaestor Augusti designatus. Le
libellé de l’inscription monumentale d’Althiburos (n° 3), peut-être
légèrement tardive par rapport à l’hommage qu’il a rendu à Antonin
dans cette même ville, permet d’envisager une telle hypothèse. En effet,
c’est durant un premier court séjour africain, après sa désignation par une
indulgentia imperatoris à la questure de l’Auguste, qu’il fut peut-être
choisi par ses concitoyens comme patronus municipi Althiburitani.
De retour à Rome, et pour terminer ses magistratures
inférieures, M. Valerius Quadratus fut tribunus plebis candidatus.Cela
signifie que le tribunat lui échut, tout comme la questure, par une
recommandation impériale. C’est l’empereur Antonin le Pieux luimême qui aura soutenu et appuyé sa candidature et son élection. Ainsi,
cette bienveillance d’Antonin le Pieux à l’égard de ce jeune clarissime
se manifeste une seconde fois ; c’est lui-même peut-être qui a réussi à
ménager cette deuxième commendatio. Ceci témoigne de la notoriété
de Quadratus et de la confiance acquise auprès d’un empereur gagné à
sa cause en raison de mériteset de compétences que la documentation
mise à contribution passe sous silence1. Mais, cette faveur impériale
n’est pas un fait insolite ou exceptionnel ; Fr. Jacques d’ailleurs, en
traitant des curateurs des cités de l’Occident, précise que « huit des
tribuns bénéficièrent de la recommandation impériale. »2 De même, non
loin d’Althiburos, à Ksar Bou Fatha, un site archéologique des environs
immédiats de Mactaris, une base épigraphe fait connaître le cursus d’un
clarissime de rang consulaire, Q. Cassius Agrianus Aelianus, qui fut
de plein droit. C’est lui en effet qui dresse la liste des postulants. » Cf. CHASTAGNOL
A., 1992, p. 155.
1
Dans l’introduction de son ouvrage sur Lesquaestores principis et candidati aux Ier
et IIe siècles, M. Cébeillac fait l’énumération de certains de ces facteurs : « la parenté
avec des membres de la dynastie, l’ancienneté et la notoriété de la gens à laquelle on
appartenait, la brillante carrière d’un père ou de proches, les amitiés, un rôle de
puissant notable local, une action d’éclat à l’occasion d’une campagne militaire, un
service rendu. » Cf. CEBEILLAC M., 1972, p. 6.
2
JACQUES FR., 1984, p. 62.
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
285
tribunus candidatus après avoir été également quaestor candidatus1. En
restant dans cette région du Haut Tell tunisien, à ceux-ci, on peut ajouter
un troisième personnage qui n’est pas des moindres. Il s’agit de C.
Iunius Faustinus Placidus Postumianus, le patron de la cité de Tituli, au
nord d’Ammaedara, dont le cursus s’est déroulé durant l’époque
sévérienne semble-t-il2. Il fut à deux reprises candidatus
Augusti:tribunus plebis candidatus dans un premier temps, puis praetor
candidatus. Ici nous saisissons l’une des modalités de l’intégration et de
l’ascension remarquable des Africains dans la capitale de l’Empire :
l’indulgentiaimperatoris.
La carrière sénatoriale de Quadratus s’est arrêtée, selon notre
documentation, à la préture, une magistrature supérieure mentionnée
uniquement dans l’inscription de Rome (n° 1). S’agissant de la charge
religieuse, notre clarissime fut VII uir epulonum, soit l’un de plusieurs
sacerdoces traditionnels que recevaient les sénateurs les plus en vue,
futurs consuls et gouverneurs de provinces. Toutefois, on ne sait rien si
l’exercice de cette fonction sacerdotale suit directement la préture ou si
une période de repos a été observée.
Voilà le cursus d’un clarissime africain, qui, grâce à une
indulgentia impériale et profitant peut-être aussi de l’appui de sénateurs
influents, d’origine africaine, est arrivé à gérer la préture, en sautant
l’échelon de l’édilité. Malheureusement, en raison des limites de notre
documentation, on ne sait rien à propos des causes de la rupture d’une
carrière aussi prometteuse déjà soulignée par M. Cébéillac, lorsqu’elle
précise que « l’issue normale aurait dû être, pour le moins, le
consulat. »3
1
PIR2, C. 480 ; CIL, VIII, 23601 = AE 1898, 107 : Q(uinto) Cassio Agriano / Aeliano
c(larissimo) u(iro) co(n)s(uli) / praetori tri[bu]/no candidat[o q(uaestori)] / candidato
[tri]/umuiro capi[ta]/li seuiro tu[rma]/rum deducend[a]/rum cur[ato]ri / rei p(ublicae)
col(oniarum) Mactari/tanorum Zamen/sium Regioru[m]. Cf. GAUCKLER P., 1898,
CRAI, p. 276. Voir également CORBIER M., 1982, p. 717 et 712.
2
CIL, VIII, 597 + 11754 = AE, 1982, 942 = AE, 2003, 1975. KALLALA N., 2003, p.
381-394.
3
CEBEILLAC M., 1972, p. 150.
286
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
TABLEAU 2 : CURSUS DE M. VALERIUS QUADRATUS : ESSAI DE
CHRONOLOGIE
Magistrature/prêtrise
Date*
Document
SEJOUR A ROME
X uir stlitibus iudicandis
140 ou 143
1, 2, 3, 4, 5
Tribunus militum
laticlauius Leg. III Aug.
142 ou 145
1, 2, 3, 4, 5
Seuir equitum romanorum
144 ou 147
1
Quaestor Augusti
designatus
entre le 25 février 2, 3, 4
145 et le 24 février
146 ou bien entre le
10 décembre 149 et le
9 décembre 150
1er COURT SEJOUR EN AFRIQUE PROCONSULAIRE
[Patronus municipi
Althiburitani ?]
146 ou 150
3
147 ou 151
1 et 5
RETOUR A ROME
Quaestor Augusti
2e COURT SEJOUR EN AFRIQUE PROCONSULAIRE
Patronus municipi
Mactaritani
148 ou 152
5
Tribunus plebis
candidatus
149 ou 153
1
Praetor
151 ou 155
1
VII uir epulonum
?
1
RETOUR A ROME
* Datation proposée en fonction de la restitution de la VIIIe ou
la XIII puissance tribunicienne de l’empereur Antonin le Pieux dans le
document n° 2.
e
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
287
2- Générosités, actions et allégeance
La documentation épigraphique mise à contribution met en
lumière, d’une part les générosités et les actions du clarissime
althiburitain et d’autre part les honneurs de reconnaissance reçus en
contrepartie.
Dans deux des inscriptions d’Althiburos (n° 3 et 4), à caractère
monumental gravées sur des frises, le nom de Quadratus apparait au
nominatif traduisant son engagement à faire équiper sa ville natale de
monuments ou au moins à présider la dédicace en qualité peut-être de
patronus municipi. Par leurs dimensions, ces frises auraient couronnée
à coup sûr les entrées de deux monuments imposants. L’un d’eux, celui
révélé par le document n° 4, se rapporte à un temple situé sur le côté
nord-est du forum, identifié à titre d’hypothèse par M. Torcheni comme
un temple du culte impérial1. C’est là une hypothèse qui pourrait trouver
appui dans l’hommage que Quadratus a rendu durant la même année à
Antonin le Pieux en lui consacrant une base pour supporter sa statue.
(n° 2) Il serait ainsi un temple destiné à Antonin le Pieux et les siens.
Ainsi, par ces actes de générosités ou simplement la présidence
des dédicaces, il marque une phase importante de l’histoire de
l’équipement monumental d’une ville qui a continué à s’équiper
progressivement des monuments emblématiques des cités romaines par
l’entremise de sa caisse publique et surtout par l’évergétisme
nobiliaire2. De même, de manière semble-t-il ostentatoire, il fait élever
une base de statue en l’honneur d’Antonin le Pieux (n° 2). Son érection
trouve justification dans la faveur impériale (indulgentiaimperatoris)
dès le début de sa carrière sénatoriale et dans le fait de l’avoir choisi
comme quaestor Augusti designatus. Comme le précise Fr. Hurlet, par
cette base commémorative, M. Valerius Quadratus est le seul parmi les
notables africains bénéficiaires de faveurs impériales spécifiques à
avoir contribué à la diffusion de l’image du pouvoir impérial en
Proconsulaire3. Mais à l’arrière-plan d’un hommage qu’il a voulu
rendre à l’empereur bienfaiteur, cette dédicace est plutôt destinée à
mettre en valeur le cursus de ce clarissime althiburitain et à afficher
1
TORCHENI M. 2017, p. 312.
Son capitole à titre d’exemple ne fut construit qu’un peu plus tard sous le règne de
l’empereur Commode, avec une phase d’agrandissement et de monumentalisation
d’époque sévérienne. Son théâtre également semble avoir été édifié sous le règne de
l’empereur Commode. Voir à ce sujet KALLALA N., 2010, p. 236-237.
3
HURLET FR., 2000, p. 344.
2
288
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
publiquement parmi ses concitoyens son ascension sociale remarquable
dans la capitale de l’Empire, son rôle actif dans l’administration
romaine et surtout son intégration à la cour impériale.
L’ensemble de ces inscriptions d’Althiburos (n° 2-4),
parallèlement aux précisions fournies quant au cursus de ce clarissime,
présente l’intérêt de montrer les liens étroits que Quadratus a entretenus
avec sa ville natale en dépit des obligations d’une résidence à Rome.
De même, se dégage l’image d’un clarissime évergète qui semble avoir
été promptement engagé dans l’équipement monumental de sa ville,
peu de temps après sa promotion au rang de municipe sous le règne
d’Hadrien.
A Mactaris, l’hommage public qui lui fut rendu, en 148 ou en
152 apr. J.-C., par décret des décurions et par dépense publique, est
rédigé selon un libellé à caractère solennel analogue à celui des
hommages qui honorent les patrons des cités romaines d’Afrique. Il
serait l’expression d’allégeance de l’ordodecurionum de cette cité à
l’égard du notable althiburitain qui aurait contribué à l’acquisition de
cette ville du statut du municipe lorsqu’il gérait la questure de
l’empereur Antonin le Pieux1. En effet, dans l’état actuel de la
documentation, cet hommage est le premier et l’unique document qui
fait état de ce statut pour cette importante ville de la future province de
la Byzacène.Ainsi, choisi comme patronus municipi à Mactaris,
Quadratus se distingue d’un premier patron de la ville de l’époque
d’Hadrien : C. Bruttius Praesens L. Fulvius Rusticus, le proconsul
d’Afrique de l’année 133-134 apr. J.-C.2 L’hommage qui lui fut rendu
se limite à préciser qu’il fut simplement patronus, sans autres précisions
sur le statut de la ville3. Il serait difficile d’admettre que Mactaris était
municipium depuis le règne d’Hadrien et que les Mactaritains ne font
aucune allusion. Elle serait plutôt un municipe d’Antonin le Pieux,
avant d’accéder au rang de colonie sous Marc Aurèle d’où sa
nomenclature officielle révélée par des documents épigraphiques
1
Cette idée est déjà développée par N. Kallala et alii. Cf. KALLALA N., SANMARTI J.,
RAMON J., ALVAREZ R., MARAOUI TELMINI B. ET BELARTE C., 2014, p. 141. Sur le
thème des intermédiaires entre les cités et les autorités publiques, voir CHRISTOL M.,
2008, p. 523-544.
2
THOMASSONB.-E., 1996, n° 68, p. 57-58 ; PICARDG. CH., 1957, p. 150.
3
AE, 1950, 66 = 1951, 227 = 1952, 53 = 94.
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
289
sévériens et post-sévériens : colonia Aelia Aurelia Mactaris1. Ainsi la
contribution du clarissime althiburitain pour l’acquisition du statut du
municipe nous semble vraisemblable.
Quant au support, une plaque de belle facture, devait être
encastrée dans la face d’un piédestal monumental destiné à supporter la
statue du clarissime honoré et qui doit occuper une place de choix dans
l’un des espaces les fréquentés de la ville, l’un des deux forums ou dans
l’un des monuments publics, les thermes à titre d’exemple2.
En effet, par chance exceptionnelle, il se trouve qu’un portrait
en marbre d’un jeune homme barbu a été découvert à Mactaris lors
d’une fouille menée par M. Bordier, contrôleur civil de Maktar, luimême le découvreur du premier fragment de l’hommage rendu à
Quadratus3. (n° 5)Il a été remis le 10 mai 1933 au Musée Alaoui,
l’actuel Musée National du Bardo4, où il a été reproduit, comme des
milliers de pièces archéologiques, sur des négatifs en plaque de verre5.
(Fig. 10-11) On déplore toutefois l’absence de toute information à
propos des conditions et du contexte précis de la découverte, aussi bien
du portrait que de la plaque épigraphe.
Nous devons à M. Yacoub, ancien conservateur du Musée du
Bardo, une mention très brève de ce portrait qui figurait parmi les pièces
exposées dans la salle IX (salle de Carthage romaine)6. Un descriptif,
plus fournie lui a été consacré par L. Bianchi dans le cadre d’une étude
qu’il mena avec A. Equini Schneider à propos de quatre portraits
conservés au Musée du Bardo7. Selon ce spécialiste de la statuaire
romaine, le portrait se rapporte à un homme barbu, aux traits réguliers,
âgé de trente à quarante ans. Par sa coiffure et par la qualité de rasage
de la barbe, ce portrait montre des caractères d’époque antonine, malgré
1
CIL VIII, 11801 = ILS, 458 ; CIL VIII, 11804 = ILS 6787 ; CIL VIII, 677 = 11910 ;
AE 1949, 47. Cf. NADDARI L., Municipium Mactaritanum, MEFRA, 2018. (À
paraître).
2
Concernant l’emplacement des statues dans les centres monumentaux dans les cités
romaines, voir à titre d’exemple Le Roux 2008, p. 569-591.
3
CAGNAT R, 1888, p. 144.
4
Cf. la fiche descriptive : Inv. 2918-2921. J’adresse mes vifs remerciements à M. A.
Drine, Mmes. F. Nait-Ighil, Sarra Jabli et Karima Arfaoui pour leur concours dévoué à
l’acquisition des photos et des données relatives à ce portrait.
5
Inv. 2918-2921. Sur cette riche collection de négatifs en plaque de verre, voir
GHALIA T., 2015, p. 92-111.
6
YACOUB M., 1982, p. 50 ; fig. 47.
7
EQUINI SCHNEIDER A. ET BIANCHI L., 1988, p. 286-288.
290
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
certaines lignes de styles qui donnent l’impression d’une exécution
durant une époque ultérieure. Mais, L. Bianchi, en raison de la forme
des pupilles et par le traitement des surfaces, notamment la zone entre
les joues et la bouche, et par le module de la tête allongée, avance une
datation du début de l’époque antonine. Il l’insère ainsi parmi les
portraits des types antoniniens connues en dehors des provinces
africaines.
Toutes ces considérations incitent à émettre l’hypothèse
d’attribuer ce portrait, d’époque antonine selon L. Bianchi, plus
précisément de l’époque d’Antonin le Pieux selon M. Yacoub 1, à la
statue de M. Valerius Quadratus qui aurait surmontée le piédestal
monumental sur la face duquel a été encastrée l’hommage qui lui a été
rendu. Son cursus, comme il est analysé plus haut, s’est déroulé sous le
règne d’Antonin le Pieux. De même, Quadratus, lorsqu’il fut honoré à
Mactaris comme patronus municipi, durant le repos observé entre la
questure de l’Auguste et le tribunat de la plèbe, il avait peut-être entre
trente et quarante ans, contrairement aux quaestores Augusti d’origine
patricienne dont l’âge minimum pour exercer cette magistrature est de
25 ans. Ceux d’origine provinciale n’y accèdent qu’à un âge plus
avancée2.
1
2
YACOUB M., 1982, p. 50.
CHASTAGNOL A., 1992, p. 158.
D’Althiburos à Mactaris en passant par Rome …
291
Fig. 10 et 11 : Vues de face et de profil du portrait d’un homme d’époque
antonine (Mactaris).
(Clichés de la collection de négatifs en plaque de verre du Musée du Bardo :
Inv. 2918-2921).
292
Frontières, Territoires et mobilités au Maghreb
CONCLUSION
L’ensemble de ces inscriptions, parallèlement aux précisions
qu’elles fournissent à propos du cursus de ce clarissime africain,
présente l’intérêt de montrer les liens qu’il avait solidement maintenus
avec la province africaine, non seulement à l’égard de sa ville natale,
Althiburos, mais à l’égard de la ville voisine de Mactaris également.
C’est un attachement particulier qui s’est manifesté en dépit des
obligations d’une résidence à Rome et de l’honneur d’y gérer des
magistratures sénatoriales et surtout de faire partie de la cour impériale.
Ainsi, se dégage une série de trois images d’un clarissime
africain du milieu du IIe siècle de l’ère chrétienne :
- Un clarissime qui, en qualité d’évergète, s’est promptement
engagé à l’équipement monumental de sa ville natale peu de temps
après sa promotion au rang de municipe sous le règne d’Hadrien et à la
diffusion de l’image du pouvoir impérial,
- Un clarissime fortement investi pour faire aboutir le dossier de
la promotion juridique de la ville voisine de Mactaris au rang de
municipe. Son engagement semble avoir été déterminant, voire décisif,
ce qui lui a valu sa cooptation comme patronus municipi Mactaritani,
- Un clarissime, qui, profitant à deux reprises de recommandations et de faveurs impérialesexceptionnelles, s’est assuré une
intégration et une ascension remarquable, à la fois sociale et politique,
dans le cadre de la capitale de l’Empire. C’est là l’une des modalités de
promotion que les notables africains ont su maîtriser et manipuler, dont
le résultat direct est la formation à Rome d’un « clan africain » actif,
vigilant et d’importance décisive.
BIBLIOGRAPHIE
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- YACOUB M., 1982, LE MUSEE DU BARDO, TUNIS.
الحدود ،المجـال والحركيّة ببالد المغـرب
فـي العصور القديـمة والوسيـطة
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2021
مخبر البحث "إشتغال األرض ،التعمير
وأنماط العيش" ببالد المغرب في
العصور القديمة والوسيطة
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تطور مجال جبل نفوسة في العصر
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من الحدود البشرية إلى الحدود السياسي
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تطور مجال جبل نفوسة في العصر الوسيط......................
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République Tunisienne
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Actes du colloque international
Édités par
Mustapha KHANOUSSI et Mansour GHAKI
L’exposition "DIE NUMIDER", 40 ans après
Bilan et perspectives
des recherches sur les Numides
© Institut National du Patrimoine
ISBN n° 978-9973-0974-3-9
Conception : Taoufik Sassi
Tunis, 2021
2
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
République Tunisienne
Ministère des Affaires Culturelles
Institut National du Patrimoine
Actes du colloque international
L’exposition "DIE NUMIDER", 40 ans après
Bilan et perspectives
des recherches sur les Numides
(Tunis, 27-29 novembre 2019)
Édités par
Mustapha KHANOUSSI et Mansour GHAKI
Tunis - 2021
Table des matières
Accueil
Mansour GHAKI
7
Allocution de bienvenue
Taoufik Redissi
Institut National du Patrimoine (INP)
11
Allocution de bienvenue
Daouda Sow
Agence de Mise en Valeur du Patrimoine et de la Promotion Culturelle (AMVPPC)
15
Mustapha Khanoussi
L’EXPOSITION DIE NUMIDER, REITER UND KÖNIGE NÖRDLICH
DER SAHARA (Les Numides, Cavaliers et rois au Nord du Sahara) ET SON CATALOGUE, 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
17
Wassel Eddargh et Lotfi Belhouchet
LA SÉDENTARISATION ET LA HIÉRARCHISATION DE LA SOCIÉTÉ AU
MAGHREB DE L’HOLOCÈNE À L’AUBE DE L’HISTOIRE
29
Khoukha Ayati
L’ÂGE DU CUIVRE ET DU BRONZE EN ALGÉRIE
41
Mohamed Saidi
L’OCCUPATION HUMAINE NÉOLITHIQUE ET PROTOHISTORIQUE
DANS LA RÉGION DE GAFSA :
ÉTAT DE LA QUESTION ET PERSPECTIVES DE RECHERCHES
63
Emna Ghith-Hmissa
MURS DES NÉCROPOLES MÉGALITHIQUES ET AGGLOMÉRATIONS
DE SÉDENTARITÉ À L’ÉPOQUE NUMIDE
Souad Miniaoui
UNE NOUVELLE NÉCROPOLE DOLMÉNIQUE DANS LA RÉGION DE
MAKTHAR : KALAAT SIDI ALI BEN AHMED
83
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
117
5
Sergio Ribichini (avec la collaboration de Attilio Mastino)
L’APPORT DE LA RECHERCHE ITALIENNE AUX ÉTUDES SUR LES
NUMIDES AU COURS DES QUARANTE DERNIÈRES ANNÉES
165
Mansour Ghaki
L’ÉPIGRAPHIE LIBYQUE ET PUNIQUE/NÉOPUNIQUE EN NUMIDIE.
L’ÉTAT D’AVANCEMENT DE LA RECHERCHE
181
Jean-Pierre Laporte
LES ROIS NUMIDES ET LE MONDE HELLÉNISTIQUE
207
Ouiza Aït Amara
LE DISPOSITIF MILITAIRE NUMIDE DANS LE CATALOGUE « DIE
NUMIDER ».
239
Khaoula Bennour
LES DIVINITÉS LIBYCO-NUMIDES ET LES CROYANCES D’ORIGINE
PHÉNICO-PUNIQUE L’INTERPRETATIO PUNICA
263
Habib Baklouti
SUR DES CITERNES ET CHÂTEAUX D’EAU " MÉGALITHIQUES " EN
PAYS NUMIDE : À THUGGA-DOUGGA ET DANS SES ENVIRONS
303
Samir Aounallah, Véronique Brouquier-Reddé, Haythem Abidi,
Yvan Maligorne, Yamen Sghaïer, Sonia Hafiane Nouri, Frédéric
Poupon, Jérémy Artru, Hanène Ben Slimène, Olfa Dammak-Latrach
et Fatma Touj
L’OCCUPATION DE LA PÉRIPHÉRIE DE DOUGGA : BILAN PRÉLIMINAIRE.
321
Hichem Ksouri
IDENTIFICATION D’UNE TECHNIQUE DE CONSTRUCTION NUMIDE
351
Djahida Mehentel et Hakima Touahri
L’HABITAT NUMIDE EN ALGÉRIE : L’EXEMPLE DE CIRTA ET
TIDDIS
373
Doris Bages
CIRTA LA NUMIDE : BILAN ET PERSPECTIVES DE RECHERCHES SUR
LES PÉRIODES PRÉROMAINES DE CONSTANTINE (ALGÉRIE)
395
Chokri Touihri
LA DÉCOUVERTE D’UNE AGGLOMÉRATION PRÉROMAINE À SIDI
SAÏD, RÉGION DE BARGOU, PRÉSENTATION PRÉLIMINAIRE
411
6
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
Mustapha Khanoussi
LE FAIT URBAIN EN PAYS NUMIDE À LA LUMIÈRE DES RECHERCHES
DEPUIS L’EXPOSITION « DIE NUMIDER »
427
Mohamed Tlili
UNE MULUCHA ORIENTALE INÉDITE D’APRÈS LES SOURCES ARABES
SES COMPLICATIONS ET SES IMPLICATIONS SUR LA GÉOGRAPHIE
HISTORIQUE DE LA NUMIDIE ARCHAÏQUE
449
Ali Chérif
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM
DE BOU JLIDA DANS L’ANTIQUITÉ (RÉGION DE BOU ARADA –
AL-AROUSSA, TUNISIE)
501
Mohamed Ellefi
À PROPOS D’UNE CONFÉDÉRATION TRIBALE DE LA PROCONSULAIRE MÉRIDIONALE COMPOSÉE DE TROIS NATIONUM ANTIQUIO
RUM (LES NYBGENII, LES NIGITIMI ET LES NUKPII)
539
Fatma Naït-Yghil
LES NUMIDES DANS LES MUSÉES TUNISIENS
563
Benseddik Nacéra
MASSINISSA, SYPHAX, JUBA..EN ALGÉRIE AUJOURD’HUI.
575
Programme
587
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
7
Accueil
C
’est à la fois un honneur et un plaisir pour moi, en mon nom personnel et au nom
de mon ami et collègue, Mustapha Khanoussi, que de vous souhaiter la bienvenue
et un « bon colloque ». L’idée de commémorer l’anniversaire de l’exposition tenue à Bonn
portant le titre de : Die Numider. Reiter und Könige nördlich der Sahara (Les Numides.
Cavaliers et rois au Nord du Sahara) il y a 40 ans presque jour pour jour, revient à Mustapha
Khanoussi.
En 1979, Exposer des objets numides et Réserver un livre de près de 700 pages aux
numides relevaient presque d’une gageure ; ce fut et cela reste une première, puisque depuis
aucune initiative de ce type et de cette ampleur n’a vu le jour et c’est rendre un hommage
sincère à ceux qui furent à l’origine de cette manifestation scientifique et culturelle que
d’organiser ce colloque.
Notre rencontre porte pour titre :
DIE NUMIDER, 40 ans après… 1979-2019
Bilan et perspectives des recherches sur les autochtones de l’Afrique du nord
Elle s’inscrit logiquement dans la continuité de ce qui a été fait par tous ceux qui
depuis des décennies s’occupent des études libyques, numides et maures donc du substrat
amazighe depuis les temps préhistoriques, à l’aube de l’histoire et durant la période antique ;
l’installation de civilisations méditerranéennes sur le territoire de ce que les grecs appelaient
la Libye a amené l’historiographie du XIXe s. et d’une grande partie du XXe à conceptualiser
les études historiques, à « périodiser » l’histoire de l’Afrique antique souvent en réduisant
à des « survivances » la composante autochtone ; on parla d’époque punique, de période
romaine, de siècle byzantin, etc. Il est clair que des Africains adoptèrent, à des degrés
différents, les civilisations phénicienne, gréco-romaine et le christianisme, il est non moins
évident qu’ils adaptèrent ces mêmes civilisations ; nous faisons mieux de parler de « période
libyco-punique», d’époque afro-romaine et de christianisme africain » et pour le faire les
études consacrées à la composante autochtone sont nécessaires et devraient être de plus en
plus nombreuses.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
9
Vos contributions, je me fie aux titres enregistrés, parce qu’elles apportent du nouveau
pour les études numides en particulier et autochtones en général, ne peuvent qu’enrichir cette
approche ; elles toucheront divers aspects de la civilisation tel que l’habitat, la religion, les
rites et architecture funéraires, l’apport des sources épigraphiques, etc. C’est dire la richesse
de notre colloque et l’importance que nous accordons tous à sa réussite.
Je conclue en vous renouvelant mes souhaits de réussite, en soulignant l’adhésion
immédiate et sans réserve de nos institutions chargées du Patrimoine sous l’égide du Ministère
des affaires culturelles, l’Institut National du Patrimoine et l’Agence de Mise en Valeur du
Patrimoine et de la Promotion Culturelle ; je me dois aussi de vous faire part du soutien à
cette initiative de l’Institut Supérieur des Sciences Humaines de Tunis « Ibn Charaf », du
CNRPAH d’Alger, de la SAIC (Scuola Archeologica Italiana di Cartagine) de Sassari et de
l’Institut archéologique allemand de Berlin.
Mansour Ghaki
Directeur de recherches
10
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
Allocutions de bienvenue
LES NUMIDES 40 ANS APRÈS
Monsieur Le Ministre des Affaires Culturelles, Monsieur Le Directeur Général de
l’Agence de Mise en Valeur du Patrimoine et de Promotion Culturelle, mes chers amis et
collègues. Je souhaite à nos invités la bienvenue et un bon séjour en Tunisie. je me réjouis
de voir se multiplier les colloques sur les autochtones de l’Afrique du Nord, il y’a presque
un mois nous avons le plaisir d’assister au colloque international portant le thème « être
autochtone, devenir autochtone, définitions et représentations».
Je remercie les organisateurs du colloque international sur les Numides 40 ans après,
bilan et perspectives des recherches sur les autochtones de l’Afrique du Nord. Quarante
ans aussi après l’exposition «Die Numider. Reiter und Konige nordlich der Sahara» «Les
Numides, cavaliers et rois au Nord du Sahara» tenue au Rheinisches Landesmuseum
Bonn du 29 novembre 1979 au 29 février 1980. Cette exposition dans laquelle a participé
un grand nombre de savants (Fredrich Rakob, Mounir Bouchenaki, Maria Alfôldi, Heinz
Günter Horn, Christoph Rüger, Hans Baldus, Fatima Kadra .... ) a drainé beaucoup de
visiteurs et a fait connaître au grand public l’histoire et la culture matérielle des autochtones
de l’Afrique du Nord de la préhistoire à l’Antiquité. Cette belle exposition complétée par un
ouvrage de 674 pages, demeure jusqu’à présent un outil scientifique fondamental pour
toute étude sur les autochtones de l’Afrique du Nord, bâtisseurs des royaumes Massyle,
Massaesyle et Maure.
Depuis la parution du catalogue et des textes de cette exposition, plusieurs autres
découvertes et études ont été réalisées en Tunisie. Les fouilles et les études sur la Préhistoire
ont connu, un intérêt de plus en plus grandissant avec la multiplication des travaux de
prospection et de fouilles sur les sites préhistoriques de Doukenet el Khotifa, Kef el Agueb,
Bir Oum Ali, Redeyef, Oued Akkarit, Nefta, Aïn Guettar, Oued Lazalim, Ain Brimba, Kef
Hamada, Hergla, El Allia et de Jebba.
Les études sur les Numides de Tunisie des périodes protohistoriques et historiques de
ces dernières années se sont intéressées à l’épigraphie libyque et néo- punique, aux haounnet
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
11
(dans le Nord-Ouest et le Cap-Bon) et à la présence punique en pays numide, aux structures
funéraires mégalithiques (Ellès, Althiburos, Maktar, Mided, Jebel el Goraa, et el Menaguib
dans le sud tunisien).
Parmi les découvertes relevant des III-Ile s. av. J.-C. on peut citer les vestiges d’habitat
d’époque numide mis au jour à Bulla Regia dans la partie ouest des thermes Memmiens et près
du Forum et du marché romains. Les bas-reliefs de Borj Hellel représentant les divinités et
de Henchir Abbassa figurant un cavalier numide, proviennent de la région de Chemtou. Sous
le Forum romain du même site ont été repérés une série de bazinas. D’autres témoignages
d’habitat sont signalés à Musti, l’actuelle El Krib et à Balta dans la région de Bou Salem. Les
travaux récents sur le site de Dougga ont abouti à la découverte d’un sanctuaire (Mqds) de
l’époque de Massinissa (202-148 av. J.-C.), de dolmens, de bazinas et de soubassement
de mausolée. Plusieurs niveaux d’habitats et de monuments publics datables des IVe-lIe
s. av. J.-C. ont été dégagés dans le site de Zama. Les fouilles récentes menées à Carthage,
Utique et à Althiburos (Medeina) ont donné de la céramique modelée d’origine autochtone
en provenance des strates les plus profondes, attribuées aux IXe- VIlle s. av. J.-C.
Bien que le nombre des sites et des monuments relevant des périodes pré- et
protohistoriques soit d’une richesse exceptionnelle (abris, grottes, peintures et gravures
rupestres, industries lithiques, tumuli, bazinas, haounnet, mausolées, dolmens, Rammadya),
les témoignages sur les communautés autochtones restent insuffisamment exploités et
valorisés, non seulement en Tunisie mais dans toute l’Afrique du Nord.
La plupart des travaux archéologiques sur les autochtones ont été effectués dans des
sites réoccupés par les Romains, dont le programme urbanistique de grande envergure,
a profondément modifié la trame urbaine des sites autochtones (Dougga, Bulla Regia,
Zama, Chemtou, Maktar, Henchir Bourgou, Cirta, Calma, Siga, Tamouda, Banasa, Volubilis,
Tiddis .... ).
Généralement, la découverte des vestiges des sites autochtones ont été mis au jour lors
de campagnes de fouilles programmées dans le cadre des recherches sur l’archéologie
romaine. Pour une meilleure connaissance de notre histoire et de notre identité culturelle
dont les racines s’enfoncent dans les profondeurs de la préhistoire, une stratégie de recherche
s’impose dans toute sa rigueur. A l’image d’autres pays qui ont travaillé sur les concepts
identitaires de l’autochtonie, des notions d’ interculturel, inter-culturalisme et d’interaction
entre les autochtones et les Étrangers, fondateurs des « colonies », Il faudrait programmer
des campagnes de prospections, de fouilles et d’inventaires dans des secteurs qui étaient à
l’écart des grands bouleversements urbanistiques provoqués jadis par l’installation d’autres
occupants
Malgré l’intérêt accordé aux travaux scientifiques sur les autochtones du Mag;hreb,
des efforts supplémentaires sont nécessaires pour mener à bien des projets de recherches
soumis à un programme précis à l’exemple des pays européens qui ont énormément investi
12
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
et multiplié les études sur les Celtes en France, les Ibères en Espagne, les Nuraghes en
Sardaigne, les Sicules, les Élynes et les Sicanes en Sicile. Aujourd’hui, la thématique de
l’autochtonie est considérée comme une spécialité à part entière, comparable à d’autres
disciplines en connexion avec l’histoire, l’anthropologie, l’archéologie, l’archéométrie ....
La recherche sur l’autochtonie en Afrique du Nord est restée longtemps figée et
enfermée dans la sphère classique des Sciences Humaines. Aujourd‘hui, nous sommes appelés
à œuvrer pour sa promotion et à lui donner les moyens pour s’imposer comme une discipline
reconnue et de nécessité première pour travailler sur les grands thèmes et les problématiques
de cette civilisation jusqu’à présent méconnue.
Les contributions scientifiques programmées dans ce colloque international
constituent une bonne occasion pour faire l’état de la question et enrichir le débat entre
les spécialistes des périodes couvrant une large séquence chronologique de la Préhistoire à
l’Antiquité, elles permettront de faire un bilan et de confronter les données à la lumière des
nouvelles découvertes et études sur les autochtones de l’Afrique du Nord. Cette manifestation
scientifique donnera la possibilité aux différentes écoles de croiser les idées autour des
concepts fondamentaux susceptibles de faire progresser les recherches sur l’autochtonie au
Maghreb.
Taoufik Redissi
Directeur de la Direction de la coopération,
de la formation et de l’édition.
INP - Tunis.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
13
Allocutions de bienvenue
Mesdames, Messieurs
Permettez-moi au nom de Monsieur le Directeur Général de l’Agence de Mise en
Valeur du Patrimoine et de Promotion Culturelle retenu ce matin, de souhaiter la bienvenue
et adresser mes chaleureuses salutations à tous ceux qui ont fait le déplacement de Tunis
pour célébrer, dans le partenariat et la collaboration, cette rencontre scientifique « Bilan et
perspectives des recherches sur les autochtones de l’Afrique du Nord » 40 après l’exposition « Die
Numider ».
C’est l’occasion de remercier les partenaires, autres que les institutions patrimoniales
tunisiennes, que sont l’Institut Supérieur des Humanités de Tunis ; le Centre National de
Recherches Préhistoriques, Anthropologiques et Historiques- Alger/Algérie ; l’Institut
Archéologique Allemand – Berlin/Allemagne et la Scuola Archeologica Italiana di Cartagine
– Italie.
Permettez-moi aussi, en vous y associant tous, de rendre hommage au dévouement, à
l’esprit créatif et au travail remarquable, des membres des comités d’honneur, organisationnel
et scientifique pour leur mobilisation. La présence de l’AMVPPC qui souscrit à cette rencontre
dénote de l’exemplarité du partenariat entre les institutions patrimoniales tunisiennes et leurs
homologues étrangers.
Aujourd’hui en abordant le vaste dossier de l’autochtonie en Afrique du Nord,
vous n’aviez pas choisi la facilité tellement le champ de recherche est vaste et complexe.
Questionnements réels, démarches fantasmées, gesticulations politiques et idéologiques, par
rapport au bilan et limites actuelles de nos connaissances que beaucoup de chercheurs, ces
quarante dernières années, ont mis en évidence simultanément, ou presque dans plusieurs
disciplines.
Les études et recherches focalisées ont permis de déceler les traces matérielles de ces
« marginaux » de l’histoire en donnant plus de vivacité pour une meilleure connaissance
d’ensemble face à la panoplie des préjugés, arrière- pensées, voire d’éviter les stéréotypes
souvent véhiculés encore de nos jours.
Heureusement, vous aviez eu l’intelligence de diversifier les thématiques afin de mieux
le circonscrire et de poser les éléments d’une problématique. Les titres des communications
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
15
délimitent un sujet aux dimensions vastes, tributaires de sources parcellaires, étant d’époque
antique. Mais au-delà du contenu des communications, dont je ne doute pas de la qualité
et de la pertinence, je reste persuadé que l’établissement d’un cadre de concertation et
de recherche autour de ce thème pourrait confronter voire rapprocher les approches et
démarches méthodologiques autour du fonds autochtone nord-africain sur les Libous, les
Numides selon la dénomination ou terminologie utilisées et dont Hérodote fournit une
description ethnoculturelle minutieuse.
« Car en Libye, les bords de la mer, qui la limite vers le nord à partir de l’Egypte jusqu‘au
Cap Soloeis qui marque la fin du continent libyen, sont habités d’un bout à l’autre par des hommes
de race libyenne divisés en nombreuses peuplades ».
40 ans après cette belle exposition qui avait réuni déjà certains d’entre vous, ce colloque
international prouve si bien en était l’abnégation et les efforts fournis en vue de renforcer la capacité
de résilience de notre partenariat et je voudrais encourager nos chercheurs à continuer à travailler
sur une interaction durable entre les institutions de recherche, les universités mais aussi avec les
opérateurs patrimoniaux.
Permettez-moi aussi de replacer ce partenariat entre nos institutions dans un cadre
encore plus large, celui d’un espace « euro-maghrébin » de la recherche. Car c’est ensemble
que nous pourrons construire une vision commune de nos destins et de nos besoins. Au-delà
de tout cela, le sentiment de destin commun sans lequel la communion d’esprit n’eût existéet qui nous réunit aujourd’hui- c’est peut-être l’accent invincible de cette belle fraternité qui
nous unit tant.
Je ne saurai conclure mon allocution sans réitérer mes vifs remerciements à tous ceux
qui sont présents ici et rendre hommage à celles et ceux qui se sont mobilisé pour rendre
possible cet événement, car ils œuvrent tous pour faire découvrir et partager différents aspects
de la richesse patrimoniale tunisienne à travers cette coopération.
Merci de votre attention.
Daouda Sow
Directeur des Études,
de la Programmation et de la Coopération Internationale
AMVPPC
16
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
Programme
Mercredi 27/11/2019
9h00 : accueil des participants et inscription
Séance I
9h30 : Allocutions d’ouverture
M. Mansour Ghaki pour le Comité
d’organisation, mot de bienvenue
M. Mustapha Khanoussi pour le Comité d’organisation, rappel du cadre de l’organisation du colloque
M. Taoufik Redissi représentant de
M. Faouzi Mahfoudh, Directeur Général de
l’Institut National du Patrimoine
M. Daouda Sow représentant de M.
Mehdi Najar, Directeur Général de l’Agence
de Mise en Valeur et de Promotion Culturelle
M. Farid Kherbouche, Directeur du
Centre National de Recherches Préhistoriques, Anthropologiques et HistoriquesAlger / Algérie
M. Sergio Rebichini, représentant de
M. Attilio Mastino Président de la Scuola
Archeologica Italiana di Cartagine/ Italie
10h00 : M. Mustapha Khanoussi,
Présentation introductive ″l’exposition Die
Numider, 40 ans après″
10h20 : pause-café
Séance II
Présidence : M. Taoufik Redissi
10h50 : M. Lotfi Belhouchet, La sédentarisation et la hiérarchisation de la société au Maghreb du Néolithique à l’aube de
l’Histoire.
11h20 : M. Farid Kherbouche,
Contextes culturel, économique et environnemental des occupations néolithiques
de la grotte de Gueldaman, dans les Babors
d’Akbou, en Algérie.
11h50 : M. Mohamed Saïdi, L’occupation humaine néolithique et protohistorique dans la région de Gafsa : Etat de la
question et perspectives de recherche
12h10 : Mme Khoukha Ayati, L’âge
du cuivre et du bronze en Algérie
12h30 : Mme Emna Ghith, Murs en
pierres sèches et agglomérations de sédentarité en territoire numide
12h50 : discussion
13h00 : déjeuner
Séance III
Présidence : Mme Nacéra Ben Seddik
14h30 : M. Mustapha Khanoussi,
Rapport sur le fait urbain en pays numide
15h00 : MM. Attilio Mastino et
Sergio Ribichini, Sur la contribution de la
recherche italienne aux études sur les Numides et sur les autochtones au Maghreb
en général au cours des 40 dernières années, notamment en Lybie et en Tunisie.
15h30 : Mmes Djahida Mehentel et Hakima Touahri, L’habitat numide en Algérie ;
l’exemple de Cirta et Tiddis.
16h00 : discussion
16h10 : pause-café
Séance IV
Présidence : M. Jean-Pierre Laporte
16h30 : Mme Souad Miniaoui, Une
nouvelle nécropole dolménique de tradi-
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
587
tion libyque dans la région de Makthar : Kalaat Sidi Ali Ben Ahmed
17h00 : M. Habib Baklouti, Sur des
installations hydrauliques mégalithiques en
pays numide
17h30 : discussion
Jeudi 28 novembre 2019
Séance V
Présidence : M. Farid Kherbouche
9h00 : Mmes et MM. Véronique
Brouquier-Reddé et Samir Aounallah,
Hamden Ben Romdhane, Haythem Abidi,
Théo Ben Makhad, Hanène Ben Slimane,
Michel Bonifay, Ali Chérif, Pauline Cuzel,
Chloé Damay, Olfa Dammak, Danièle Foy,
Fatma Haddad, Sonia Hafiane Nouri, Solenn de Larminat, Yvan Maligorne, Tomoo
Mukai, Nesrine Nasr, Frédéric Poupon, Afef
Riahi, Yamen Sghaïer, Fatma Touj, L’occupation de la périphérie de Dougga : bilan
préliminaire.
9h30 : Mme Ouiza Aït Amara, Le dispositif militaire numide dans le catalogue
« Die Numider ».
9h50 : M. Hichem Ksouri, Identification d’une technique de construction
pré-romaine à Bulla Regia
10hh10 : Mme Khaoula Bennour, Les
divinités libyco-numides et les croyances
d’origine phénico-punique : l’interpretatio
punica
10h30 : discussion
10h50 : pause-café
588
Séance VI
Présidence : M. Sergio Ribichini
11h10 : Mme Nacéra Benseddik,
Massinissa, Syphax, Juba..en Algérie, aujourd’hui.
11h40 : M. Ali Chérif, Mizaeotherena,
le nom antique de Bou Jlida d’après deux
fragments inédits d’une inscription monumentale d’époque sévérienne.
12h00 : M. Mohamed Ellefi, A propos d’une confédération tribale de la Proconsulaire méridionale composée de trois
nationum antiquiorum (les Nybgenii, les Nigitimi et les Nukpii)
12h20 : M. Jean-Pierre Laporte, Les
rois numides et le monde hellénistique
12h50 : discussion
13h00 : déjeuner
Séance VII
Présidence : M. Habib Baklouti
14h30 : M. Mansour Ghaki, Rapport
sur l’épigraphie libyque et punique
15h00 : Mme Doris Bages, Cirta
la Numide : bilan et perspectives de recherches sur les périodes préromaines de
Constantine (Algérie)
15h20 : Mme Fatma Naït-Yghil, les
Numides dans les musées tunisiens
15h40 : discussion
16h00 : pause-café
Séance VIII
Présidence : Mme Véronique Brouquier-Reddé
16h20 : M. Mohamed Tlili, Une Muluccha orientale d’après les sources arabes
ses complications et ses implications sur la
géographie historique de la Numidie archaïque
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides
Ali CHÉRIF
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE
BOU JLIDA DANS L’ANTIQUITÉ
(Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)1
À la mémoire du Professeur Jehan Desanges
Introduction
Les progrès enregistrés dans le domaine de la toponymie sont étroitement liés au
rythme des découvertes épigraphiques. On peut cependant bénéficier dans certains cas de
l’apport non négligeable d’autres types de sources qui permettent d’identifier de nouveaux
toponymes ou d’en localiser d’autres2. Un premier bilan sur la toponymie africaine a été
dressé par J. Desanges, il couvre les années 1965-19903 ; récemment, une actualisation de
nos connaissances a donné matière à un second bilan toponymique publié par S. Aounallah
et H. Ben Romdhane recensant ainsi les nouveautés enregistrées dans ce domaine depuis
19904.
1 Université de Jendouba, Institut supérieur des sciences humaines (alicherif.isshj@gmail.com).
Je remercie mon ami Nabil Khalsi, un fils de Bou Jlida, professeur d’histoire et de géographie et actuellement
censeur au lycée secondaire Farhat Hached de Bou Arada, qui m’a beaucoup facilité le travail du terrain et
l’accès à plusieurs maisons du village.
2 Je pense particulièrement ici à l’œuvre de saint Augustin, notamment les nouvelles lettres découvertes par
Johannes Divjak. Sur l’apport de cette nouvelle correspondance à la géographie historique de l’Afrique
antique, voir par exemple Desanges, Lancel 1983, p. 87-99 ; Lepelley 1983, p. 279-281 ; On signalera
également les actes de martyres tels que les actes de saint Gallonius où sont mentionnées les deux cités
voisines d’Uthina et de Thimida Regia. On consultera sur cet important document, Chiesa 1996, p. 241-268 ;
Lepelley 1999, p. 205-221 ; M’Charek 2004-2005, p. 190-194.
3 Desanges 1990a, p. 251-272 (bilan arrêté sans doute à l’année 1987, d’après la bibliographie recensée). Il
est à noter aussi l’apport considérable de la publication des Actes de la Conférence de Carthage en 411 à la
toponymie nord-africaine, voir Lancel 1991.
4 Aounallah, Ben Romdhane 2015, p. 223-239.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
501
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
Dans la région de Bou Arada, outre la découverte de la ciuitas Crimeteris signalée
par A. Beschaouch5 et la nouvelle localisation de la ciuitas Tapphugabensis6, la mise au jour
d’un nouveau document épigraphique à Bou Jlida nous donne l’occasion de revenir sur la
forme du toponyme antique de cette localité. Jusqu’ici, nous disposons pour ce qui est de
ce toponyme, de trois documents épigraphiques provenant de trois endroits différents, sans
compter un quatrième qui devrait être ajouté au dossier. Ces témoignages étant lacunaires,
les commentateurs on dû retenir provisoirement la forme hypothétique Mizeoter7. Traiter
du nom antique de Bou Jlida impose d’examiner en premier lieu la dédicace du temple de
Saturnus Achaiae où se trouve mentionnée une gens Bacchuiana. Le titre choisi pour cette
recherche sous-entend une question principale : au temps d’Antonin le Pieux Bou Jlida est-elle
dénommée Gens Bacchuiana ou Mizaeotherena, nom révélé par une inscription récemment
mise au jour dans cette localité ?
1. La gens Bacchuiana : sodalité religieuse ou tribu à part entière ?
Les ruines de Bou Jlida, presque complètement recouvertes par l’habitat moderne8,
s’étendent au pied du flanc sud-occidental du Jbel Rihane, à 80 km à vol d’oiseau au sudouest de Carthage et à 5,5 km au nord-est d’El-Aroussa, l’antique Thabbora (fig. 1). Le
site archéologique est surtout célèbre pour avoir livré une importante inscription gravée
sur un linteau en pierre calcaire autrefois réemployé dans le marabout de Sidi Agueb, mais
actuellement déposée devant une maison9.
5 C’est une cité à localiser dans les environs d’Auitta Bibba, aujourd’hui Henchir Bou Ftis. Voir Beschaouch
2001, p. 216-217 (d’où AE 2004, 1813). Un autre toponyme (GAOARI), non attesté par ailleurs, a été
signalé par le même auteur, toujours dans la région de Bou Arada, Beschaouch 1987-1989, p. 289-290. J.
Desanges (dans Beschaouch 1987-1989, p. 290 : observation faite postérieurement à la séance du 19 juin)
« a proposé de rapprocher Gaoari de l’ethnique Gauuaritanus, qui qualifie un évêque de Byzacène, nommé
Victor, en 484 de notre ère (…) » (Voir Lancel 2002, p. 366). « Peut-être faut-il aussi attribuer à Gaoari le
Rogatus episcopus Gayaritanus mentionné en 411 » (Voir Lancel 1991, p. 1378-1379).
6 Sur cette cité qui correspond au site archéologique de Henchir Sidi Abd en-Nour, voir désormais Chérif
2016, p. 27-49 (d’où AE 2016, 1886). On ajoutera la ciuitas Valusitana récemment révélée par une dédicace
religieuse d’époque sévérienne encore inédite (paraîtra prochainement).
7 Voir en dernier lieu, Desanges et alii 2010, p. 180.
8 AAT I, f. 36 – Bou Arada au 1/50.000e, n° 74. Un deuxième article, en cours de préparation, sera consacré
à Bou Jlida où je donnerai les résultats des prospections archéologiques effectuées ces dernières années ; je
publierai par la même occasion une série d’épitaphes inédites qui seront insérées dans un commentaire sur
les différents aspects de la romanisation de cette agglomération.
9 Dimensions : Long. 200 cm ; H. 36,5 cm ; Ep. 16 cm. Hl. 4-7,5 cm.
502
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
au pied du flanc sud-occidental du Jbel Rihane, à 80 km à vol d’oiseau au sud-ouest de
Carthage et à 5,5 km au nord-est d’Al-Aroussa, l’antique Thabbora (fig. 1). Le site
archéologique est surtout célèbre pour avoir livré une importante inscription gravée sur un
linteau en pierre calcaire autrefois réemployé
dans le marabout de Sidi Agueb, mais
Ali CHÉRIF
8
actuellement déposée devant une maison .
Fig. 1 : Carte de localisation de Mizaeotherena – Bou Jlida.
Fig. 1 : carte de localisation de Mizaeotherena – Bou Jlida.
En voici le texte. CIL VIII, 12331 = ILS 4440 (fig. 2 et 3) :
Saturno Achaiae Aug(usto) sacr(um) / Pro sal(ute) Imp(eratoris) Caes(aris) Antonini
Aug(usti) Pii p(atris) p(atriae) / gens Bacchuiana templum sua pec(unia) fecerunt id(emque)
En voici /leCandidus
texte. CILBalsamonis
VIII, 12331fil(ius)
= ILS 4440
(fig. 2 et 3) :
dedic(auerunt)
ex (undecim)pr(imis)
amplius spatium in quo
templum fieretSaturno
/ donauit.
Achaiae Aug(usto) sacr(um) / Pro sal(ute) Imp(eratoris) Caes(aris) Antonini
Date : AntoninAug(usti)
le Pieux,Pii
139-161.
p(atris) p(atriae) / gens Bacchuiana templum sua pec(unia) fecerunt
id(emque) dedic(auerunt) / Candidus Balsamonis fil(ius) ex (undecim)pr(imis)
amplius spatium in quo templum fieret / donauit.
AAT I, f. 36 – Bou Arada au 1/50.000e, n° 74. Un deuxième article, en cours de préparation, sera consacré à
Date
: Antonin
139-161.
Bou Jlida
où je
donnerai le
lesPieux,
résultats
des prospections archéologiques effectuées ces dernières années ; je
publierai par la même occasion une série d’épitaphes inédites qui seront insérées dans un commentaire sur les
différents aspects de la romanisation de cette agglomération.
8
Dimensions : Long. 2 m ; H. 0,365 m ; Ep. 0,16 m. Hl. 0,075-0,04 m.
7
2
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
503
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
Fig. 2 : Copie de CIL VIII, 12331 : la dédicace du temple de Saturnus Achaiae.
Fig. 2 : Copie de CIL VIII, 12331 : la dédicace du temple de Saturnus Achaiae.
Fig.
3 : 2La: copie
dédicace
temple
Saturnus
A. Chérif,
pris le 05-02-2020)
Fig.
dedu
CIL
VIII,de12331
: la Achaiae
dédicace(Cliché
du temple
de Saturnus
Achaiae.
Fig.
dédicace
prislele 05-02-2020)
05-02-2020)
Fig.33: :laLa
dédicacedudutemple
templede
deSaturnus
SaturnusAchaiae
Achaiae(Cliché
(Cliché A. Chérif,
Chérif, pris
L’inscription a été repérée le 14 octobre 1885 par le capitaine Bordier et son sous-lieutenant
Tauzia de Lespin, elle a été tout de suite communiquée au Comité des travaux historiques et
L’inscription
a été le
repérée
le 14 octobre
1885
par le capitaine
Bordier
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1885
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religion
et
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Lettres
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religion
et de laailleurs
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culte,
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de Saturnus
Poinssot
donnélelieu
à de par
nombreux commentaires.
Le débat a surtout
porté surAchaiae.
deux points
essentiels
:
10
nombreux
commentaires.
Le de
débat
a surtout
porté sur deux. Mais
pointsune
essentiels
:
voulu assimiler
ce Saturne
l’Achaïe
à Hadès-Pluton
telle assimilation
a été
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le par
culte,
par11ailleurs
unique
en
terre
d’Afrique,
Saturnus Achaiae.
a a
* Sur
le *par
culte,
ailleurs
unique
en terre
d’Afrique,
dede
Achaiae.Cl.
Cl.Poinssot
Poinssot
rejetée
Le Glay
; la
communis
opinio
admet
que
leSaturnus
Saturnus
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correspondait
11
voulu
assimiler
ce
Saturne
de
l’Achaïe
à
Hadès-Pluton
.
Mais
cette
assimilation
a
été
rejetée
12 Saturne de l’Achaïe à Hadès-Pluton10. Mais une telle assimilation a été
voulu
assimiler
ce
au vieux
Kronos
.
12
par M. Le Glay ; la communis opinio admet que le Saturnus Achaiae correspondait au vieux
rejetée par13M. Le Glay11 ; la communis opinio admet que le Saturnus Achaiae correspondait
Kronos
. point,
Le second
12 celui qui nous intéresse le plus ici, se rapporte à la définition de cette gens
au*vieux
Kronos
.
Bacchuiana.
Quel
donner
motnous
gensintéresse
? La littérature
est loin d’avoir
parvenude
à
* Le secondsens
point,
celuiauqui
le plusmoderne
ici, se rapporte
à la définition
élucider
cette
question,
et
révèle
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divergentes.
cette
gens
Bacchuiana.
sens
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? se
La rapporte
littératureà moderne
est loin
d’avoir
* Le
second
point,
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nous
intéresse
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ici,
la définition
de cette
gens
Première
interprétation
:
pour
nombre
de
commentateurs,
la
gens
Bacchuiana
est
tenue
pour
parvenu
à
élucider
cette
question,
et
elle
nous
révèle
deux
lectures
divergentes.
Bacchuiana. Quel sens donner au mot gens ? La littérature moderne est loin d’avoir parvenu à
13
une communauté
tribale.
Considéré
par R. Cagnat
, cet avis a été par la suite admis
élucider
cette question,
et14 nous
révèled’abord
deux lectures
divergentes.
par
plusieurs
historiens
C’est particulièrement
le regretté J. Gascou qui a le plus insisté sur
10 Cagnat
1885,
p. 153-154 :.; Cagnat,
Reinach de
1885,
p. 260.
- Première
interprétation
pour nombre
commentateurs,
la gens Bacchuiana est tenue pour
11
Poinssot
1962,
p.
1276-1281.
cette idée en notant : « il est difficile de concevoir qu’une sodalité
religieuse ait eu en son sein
13
une12communauté
tribale. Considéré d’abord par R. Cagnat , cet avis a été par la suite admis
Le Glay 1966, p. 123 et 235.
14
par913plusieurs
historiens
. C’est particulièrement
le regretté
J. Gascou
a le plus
Le Glay 1961,
p. 123 ; Beschaouch
1985, p. 968 ; Desanges
1987-1989,
p. 171 (=qui
Desanges
1999,insisté
p. 199) ;sur
Cagnat 1885, p. 153-154 ; Cagnat, Reinach 1885, p. 260.
Lipiński
1995,
p.
256-257
;
Cadotte
2007,
p.
25-26
où
on
lit
:
«
Cette
assimilation
des
deux
dieux
cette
son sein
10 idée en notant : « il est difficile de concevoir qu’une sodalité religieuse ait eu en(c’est-àPoinssot 1962, p. 1276-1281.
Baal
Hammon
et 235.
Saturne) était déjà en usage depuis longtemps lors de l’occupation romaine, puisque le
Ledire
Glay
1966,
p. 123 et
Baal
Hammon
de
Carthage
était identifié
l’équivalent
grec de Saturne,
le Ve s. av
J.-C.,p.comme
Le Glay 1961, p. 123 ; Beschaouch
1985, p.à Kronos,
968 ; Desanges
1987-1989,
p. 171 (=dès
Desanges
1999,
199) ;
9
Cagnat
1885,
p.un
153-154
; Cagnat,
Reinach
1885,
p.où
260.
Lipiński
1995,
p.
256-257
; Cadotte
2007,
p.parle
25-26
on lit : «humains
Cette assimilation
des
deux
dieux
(c’est-à-dire
en
fait
foi
passage
de
Sophocle
qui
des
sacrifices
offerts
à
ce
dieu
par
les
«
barbares
»,
10
Poinssot
1962,
p.allusion
1276-1281.
Baalfaisant
Hammon
et
Saturne)
était
déjà end’enfants.
usage depuis
longtemps
lors
de l’occupation
romaine,
puisque
le Baal
ainsi
aux
sacrifices
(…)
D’ailleurs,
le
Saturnus
Achaiae
de
la
Gens
Bacchuiana
est
11
Le
Glay
1966,
p. 123
235.
Hammon
de Carthage
était
identifié
Kronos,
l’équivalent
de Saturne, dès le Ve s. av J.-C., comme en fait
probablement
un et
écho
de cette àvieille
assimilation
» etgrec
p. 495.
12
Le
1961,de
p. Sophocle
123 ; Beschaouch
1985,
p. 968humains
; Desanges
1987-1989,
Desanges
199) ;
foi Glay
un passage
qui parle des
sacrifices
offerts
à ce dieu p.
par171
les (=
« barbares
», 1999,
faisant p.
ainsi
Lipiński
p. 256-257
; Cadotte
2007,
p. 25-26
où on litAchaiae
: « Cettedeassimilation
des deuxestdieux
(c’est-à-dire
allusion1995,
aux sacrifices
d’enfants.
(…)
D’ailleurs,
le Saturnus
la Gens Bacchuiana
probablement
un Hammon
écho de cette
vieille assimilation
et p.
495. depuis longtemps lors de l’occupation romaine, puisque le Baal
Baal
et Saturne)
était déjà»en
usage
13
504
L’exposition
Numider»
40 ans après.
Bilan et perspectives
des recherches
(p. 501
- 538) en fait
Cagnat
p. 154.
s. av J.-C.,
comme
Hammon
de1885,
Carthage
était«Die
identifié
à Kronos,
l’équivalent
grec de Saturne,
dès sur
le les
VeNumides
14
Glay 1961,
p. 123 ; Poinssot
1962,
1279-1281
; Le Glay
1966,à p.
et 123
Pflaum
1970, p.»,89
; Shawainsi
foi unLepassage
de Sophocle
qui parle
desp.sacrifices
humains
offerts
ce83
dieu
par ;les
« barbares
faisant
1973, p.
5-6sacrifices
; Ferchioud’enfants.
1979, p. 21
; Beschaouch
p. 971 ; Achaiae
Jacques 2012,
26. Bacchuiana est probablement
allusion
aux
(…)
D’ailleurs,1985,
le Saturnus
de la p.Gens
11
12
un écho de cette vieille assimilation » et p. 495.
Cagnat 1885, p. 154.
13
3
Ali CHÉRIF
- Première interprétation : pour nombre de commentateurs, la gens Bacchuiana est tenue
pour une communauté tribale. Considéré d’abord par R. Cagnat14, cet avis a été par la suite
admis par plusieurs historiens15. C’est particulièrement le regretté J. Gascou qui a le plus
insisté sur cette idée en notant : « il est difficile de concevoir qu’une sodalité religieuse ait eu
en son sein un groupement d’undecimprimi, qui apparaît par ailleurs comme caractéristique
de communautés urbaines. Nous estimons donc que B.D. Shaw a raison de penser que la
localité nommée gens Bacchuiana était le centre urbain du territoire rural occupé par la tribu
portant la même dénomination »16.
- Deuxième interprétation : la gens Bacchuiana est plutôt une sodalité religieuse, une sorte
de confrérie ou de communauté mystique vouée au culte de Bacchus. C’est l’explication qui
a été envisagée à maintes reprises par J. Desanges, qui n’exclut pas pour autant la possibilité
d’une base clanique ou même ethnique pour cette gens17. Le même auteur dans une notice
consacrée à cette gens, publiée dans l’Encyclopédie berbère, conclut son bref développement
en ces mots : « Si près de Carthage, à la fois punicisée (à preuve le nom du père de l’évergète
et la présence d’undecimprimi) et dévouée à un culte grec, cette gens, au siècle des Antonins,
était peut-être un groupement mystique, dont le recrutement a pu être en grande partie
clanique, plutôt qu’une tribu libyque »18. J. Peyras19, Cl. Lepelley20 et A. Ibba21 ont donné leur
approbation à ce point de vue.
Le problème posé par la gens Bacchuiana est étroitement lié à deux données : d’une part
à la question du fait tribal dans l’arrière-pays de Carthage à l’époque romaine, et d’autre part à
l’étymologie du nom porté par cette gens. Pour ce qui est du premier point, peut-on vraiment
s’assurer de l’existence de communautés tribales dans le secteur de Bou Arada – El-Aroussa et
ses environs au cours de cette période ? Faisant le point de nos connaissances.
14 Cagnat 1885, p. 154.
15 Le Glay 1961, p. 123 ; Poinssot 1962, p. 1279-1281 ; Le Glay 1966, p. 83 et 123 ; Pflaum 1970, p. 89 ; Shaw
1973, p. 5-6 ; Ferchiou 1979, p. 21 ; Beschaouch 1985, p. 971 ; Jacques 2012, p. 26.
16 Gascou 1998, p. 95.
17 D’abord dans un article fondamental sur la gens africaine, Desanges 1987-1989, p. 173 et 175. Rappelons
que l’éminent savant a inclus, dans un premier temps, cette gens dans son catalogue des tribus africaines,
Desanges 1962, p. 83.
18 Desanges 1991, p. 1299. Dans une autre étude sur l’hellénisme dans l’Afrique du Nord antique, le même
auteur (Desanges 2007, p. 181) notait : « Nous nous demandons, pour notre part, si la gens Bacchuiana ne
tire pas son nom d’une expertise dans le culte et les mystères de Bacchus-Liber, dieu lié en Afrique à Saturne
et à Kronos, une spécialisation qui n’exclut nullement un caractère ethnique, car il a existé dans nombre de
civilisations des tribus qui se sont spécialisées dans des fonctions matérielles ou spirituelles ».
19 Peyras 1995, p. 277 où on lit : « … il peut aussi bien s’agir d’une sodalité vouée au culte de Bacchus, qui
aurait reposé sur une base ethnique ».
20 Lepelley 1999, p. 215.
21 Ibba 2002, p. 211.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
505
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
Dans cette région, l’épigraphie nous a fourni quatre emplois du mot gens.
* Gens Galliana : cette gens est connue par une dédicace à Saturne découverte par N.
Ferchiou dans le Jbel Mansour, dans une ferme située à 11,5 km à vol d’oiseau au sud de Bou
Arada et à 6 km à l’ouest de Gales, aujourd’hui Aïn el-Kharroub22. Elle est donnée en ces
termes23 : Saturno Aug(usto) sacr(um) / Gentis Gallianae / L(ucius) Magnius Bass/us u(otum)
sol(uit) l(ibens) a(nimo).
L’éditrice du document retient le sens de tribu pour cette gens24. J. Desanges, pour sa
part, est d’avis que la gens Galliana « a quelque chance d’avoir eu l’importance d’une tribu ou
au moins d’une fraction, malgré le caractère insolite de sa dénomination »25. L’aspect tribal
lui a été également reconnu par M. Le Glay26.
* Gens Atianorum : une inscription encore inédite, communiquée par A. Beschaouch
à la Commission de l’Afrique du Nord le 19 juin 1989, fait mention d’une gens Atianorum et
nous dit qu’un temple de Saturne, délabré, a été entièrement restauré par des Attii27. « … il
ne semble pas qu’il faille voir dans cette gens – écrit J. Desanges –, dont la présence est attestée
dans la région d’Aradi (Bou Arada), à une dizaine de kilomètres au nord-ouest de Gales et à
quelque 90 km de Carthage, une entité tribale. Il doit s’agir plutôt d’une famille agnatique très
nombreuse et influente »28.
* Sur une stèle votive dédiée à Saturne provenant de Thignica (aujourd’hui Aïn Tounga,
à 16 km à vol d’oiseau au nord-ouest de Bou Jlida), on lit : Saturno / Aug(usto) sac(rum) / ex
gente Q(uinti) Ma/rci(i) Latronis / uotu(m) soluer(unt) l(ibentes) anim(o)29.
Q. Marcius Latro pourrait être, selon M. Le Glay, soit le chef d’une tribu, soit celui
d’une famille30.
* Sur une autre stèle fragmentaire de même type et de même provenance, on lit : --- /
genti eorum sacr(um) / u(otum) l(ibentes) a(nimo) s(oluerunt)31.
22 Ferchiou 1978, p. 9.
23 Ferchiou 1978, p. 17. Voir aussi Ibba 2002, p. 203-204. L’inscription n’a pas été recensée par l’Année épigraphique.
24 Ferchiou 1978, p. 17 où on peut lire « Par ailleurs, l’épithète Galliana appliquée à une tribu de nomades
plus ou moins fixée à la terre, peut faire songer au problème de l’origine des Galli, Gallae, Gallici existant en
Afrique ».
25 Desanges 1987-1989, p. 171. Voir aussi p. 175 où on lit : « La gens Galliana paraît avoir donné son nom à la
ville voisine de Gales, auquel cas il s’agirait bien d’une communauté ethnique, et non d’une famille, si large
fût-elle, de Gallii ».
26 Ferchiou 1978, p. 17 ; Le Glay 1988, p. 198.
27 Beschaouch 1987-1989, p. 289.
28 Desanges 1987-1989, p. 171. Ibba 2002, p. 208, préfère plutôt le sens d’une sodalité vouée au culte d’un
Saturne local.
29 CIL VIII, 15110 = ILS, 4443f.
30 Le Glay 1961, p. 139, n° 38.
31 CIL VIII, 15148. Le Glay 1961, p. 150, n° 78. Nous avons repris le texte tel qu’il est développé par Ibba 2002,
506
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
Pour les deux inscriptions d’Aïn Tounga, on a affaire, selon A. Ibba, à un groupement
familial ou une association cultuelle32.
Pour ma part, en traitant de la localisation de Tapphugaba, j’ai proposé, mais encore
sous toutes réserves, de voir dans l’adjectif « Tapphugabensis » porté en commun par deux
localités voisines situées non loin de Bou Jlida (fig. 1), l’une organisée en cité sufétale, la ciuitas
Tapphugabensis33, l’autre en centre de domaine impérial, le Fundus Tapphugabensis (l’actuel
Henchir Chaïeb)34, une dénomination qui a peut-être conservé le souvenir d’une tribu qui
aurait occupé le territoire situé entre oued Chgaga à l’est et oued et-Tine à l’ouest (devenu
oued er-Rmil au-delà de Henchir al-Moussaouer, vers le nord)35. Ce secteur est désigné de
nos jours, comme à l’époque coloniale, par l’appellation de Bled Tajmout36.
Si l’on récapitule, trois équations différentes sont à envisager : gens = tribu (peut-être le
cas de la gens Galliana) ; gens = famille (le cas de la gens Atianorum = familles des Attii) ; gens
= collège religieux ou sodalité à caractère cultuel (le cas des deux inscriptions de Thignica).
Dans son approche d’ensemble, A. Ibba détermine le sens à donner aux termes gensgentiles selon la répartition géographique des documents. Ainsi il pense qu’il faut attribuer aux
différentes attestions enregistrées dans le centre-est de la Zeugitane le sens d’« association
cultuelle »37. Dans cette région, qui est celle qui nous concerne ici, il établie l’équivalence
« gens / gentiles = sodalitas / sodales ».
Venons-en maintenant au second point, celui de l’étymologie du nom porté par notre
gens. J. Desanges a montré que le suffixe –ianus se rapportant à des ethnonymes est attesté en
nombre bien limité en Afrique antique, tels que les Austoriani et les Cantauriani d’Ammien
Marcellin38 ou les Urceliani (Ursiliani) et la Muctuniana manus de Corippe39. De plus, aucun
de ces ethnonymes « n’est formé sur un radical de gentilice bien attesté en Afrique »40. En
outre, il n’est pas complètement exclu que ce nom puisse être rattaché au monde libyque.
Ainsi à Taucheira (ville cyrénéenne située à 70 km au nord-est de l’actuelle Benghazi, en
Libye), O. Masson a noté la présence par deux occurrences de l’anthroponyme Bakhis41 ; et
non loin de ce lieu, aux confins de l’Egypte, des Iobakkhi sont mentionnés par Ptolémée et
p. 209 ; M. Le Glay le donne au singulier.
Ibba 2002, p. 209.
Cf. supra, n. 6.
Sur ce domaine agricole, voir Chérif 2019, p. 97-126.
Chérif 2016, p. 42-44 (et fig. 11) ; Chérif 2017, p. 420-427 ; Chérif 2019, p. 100.
Carte topographique au 1/50.000e de « Djebel Mansour », n° 41 (Bled Tadjemout).
Ibba 2002, p. 211.
Desanges 1987-1989, p. 170. Sur ces tribus, voir Desanges 1990b, p. 1170 ; Desanges 1992, p. 1756. On
consultera en dernier lieu sur les Austuriani, Modéran 2003, p. 123-130, 165-172 et 279-281.
39 Desanges 1987-1989, p. 170 ; Modéran 2003, p. 108-109 et 275 (Les Urceliani) et p. 296-298 (La Muctuniana
manus).
40 Desanges 1987-1989, p. 171.
41 Masson 1976, p. 60.
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GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
qui « n’étaient sans doute pas étrangers au culte de Bacchus ou d’une divinité indigène qui lui
était assimilée »42. Un autre cas problématique mérite d’être évoqué, celui de la gens Saboidum
que fait connaître une inscription de Cirta. L’inscription est rédigée en ces termes :
M(arco) Coculnio / Sex(ti) fil(io) Quir(ina) / Quintilliano lato/clauo exornato ab
/ Imp(eratore) Caesare L(ucio) Septimio / Seuero Pertinace Augusto Pio / Parthico
Arabico Parthico / Adiabenico quaestori desig(nato) / post flamonium et honores /
omnes quibus in colonia Iulia / Iuuenali Honoris et Virtutis Cirta / patria sua functus
est / Florus Labaeonis fil(ius) / princeps et undecimprimus / gentis Saboidum
amico merenti / de suo p[osuit ide]mq(ue) dedic(auit) / l(ocus) [d(atus)] d(ecreto)
d(ecurionum)43.
Le débat entre spécialistes a porté notamment sur la nature de cette gens. J. Peyras
y voit « une sodalité vouée à Dionysos Saboidos »44, mais J. Gascou et M. Benabou la
considèrent comme une tribu45. A. Ibba, pour sa part, ne tranche pas la question : la gens
Saboidum est ou bien une tribu sédentaire d’Afrique ou une association cultuelle liée au
monde indigène, mais il ajoute que le mot gens, suivi ici d’un génitif pluriel, ferait penser
plus au sens de « peuple » qu’au sens de sodalité46. Tout récemment, J. Desanges se
demande « si la gens Saboidum n’est pas un groupement mystique dont le recrutement était
en majeure partie, sinon exclusivement, tribal »47. Quoi qu’il en soit, nos connaissances sur
cette gens limitées à la seule épigraphe de Cirta, ne permettent pas à vrai dire de se décider
de sa véritable nature.
Revenons à la gens Bacchuiana. Peut-on privilégier la deuxième interprétation, celle qui
attribue à cette gens le sens d’association ou sodalité religieuse ?
J’ai préféré48 dans un premier temps la lecture défendue par J. Gascou, mais il
semble qu’il faille renoncer à cet avis. En effet, si l’on admet que la gens Bacchuiana est une
tribu, et tout en tenant compte d’une remarque faite par A. Beschaouch selon laquelle la
promotion de la commune au rang de municipe se situerait au temps de Caracalla49, une
question s’impose : le laps de temps entre Antonin le Pieux et Caracalla, au maximum 78
ans (139-217), est-il suffisant pour que Bacchuiana évolue juridiquement d’une tribu à une
ciuitas, ensuite d’une ciuitas à un municipe ? Autrement, la romanisation culturelle a-t-elle
préparé le terrain pour une éventuelle transformation juridique ? Pour répondre, il est utile
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Desanges 2001, p. 3767. Voir aussi Desanges 1987-1989, p. 173.
CIL VIII, 7041 = 19423 = ILS 6857 = ILAlg. II, 1, 626.
Peyras 1995, p. 279.
Gascou 1998, p. 98-99 ; Benabou 2005, p. 462-463.
Ibba 2002, p. 206.
Desanges 2019a, p. 7111.
Chérif 2016, p. 42, n. 42.
Voir infra, la troisième partie de cet article.
508
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
d’examiner au moins deux exemples de tribus qui ont pu obtenir, au terme d’un processus
d’intégration et romanisation, le statut municipal.
* Le cas des Suburbures.
Ce peuple est mentionné par Pline l’Ancien et Ptolémée50, et par une série d’inscriptions.
Le dossier épigraphique qui lui est relatif offre plusieurs éléments qui témoignent d’une
intégration progressive d’une partie au moins de la tribu, celle établie à Aziz Ben Tellis, site
archéologique correspondant sans doute au chef-lieu de la gens51. On relève les étapes suivantes :
- Sous Trajan, en 116-117, deux bornes identiques52 ont été plantées pour limiter les
confins méridionaux du territoire de cette tribu, l’une trouvée « à la pointe nord-est du Chottel Beïda, à 300 mètres environ de la limite extrême de ce Chott »53, l’autre recueillie dans un
site anonyme à 8,5 km à l’est de la précédente54.
- En 199, une respublica apparaît à Aziz Ben Tellis55. C’est la même qui posa deux
bornes milliaires sous Caracalla près d’El-Eulma (en 215)56 et de Borj Mamra (en 216)57, et
50 On consultera sur cette tribu, Desanges 1962, p. 135-136 ; Desanges 1980, p. 332-335 ; Desanges 2019b,
p. 7610-7611.
51 Dans l’AAA, fe. 17 au 1/200.000e, Constantine, n° 214, Gsell qualifie le site archéologique d’Aziz Ben Tellis
de « R. r. fort étendues ».
52 AE 1904, 144 = ILS 9380 = ILAlg. II, 3, 7529 et ILS 9381 = ILAlg. II, 3, 7534 : Ex auctoritate / Imp(eratoris)
Caesaris, di/ui Neruae f(ilii), Neru[ae]/ Traiani Optimi / Aug(usti), Germ(anici), Dac(ici), / [P]arthici, fines
/ adsignati gen[ti] / Suburburum pe[r T(itum)] Sabinium / Barba[rum], / leg(atus) Aug(usti) propr(aetore).
Trajan est parthicus en 116 et meurt en 117. Voir Kienast 1990, p. 123 ; Lasserre 2005, p. 1007.
53 Cagnat 1903, p. 99 ; AAA, fe. 16 au 1/200.000e, Sétif, n° 472.
54 Cagnat 1903, p. 99 ; AAA, fe. 16 au 1/200.000e, Sétif, n° 473 (Bled bou Medjou) ; Simon 1934, p. 145-146.
55 AE 1917-18, 45 = ILAlg. II, 3, 7578 : [Imp(eratori) C]aes(ari) [M(arco)] Aur[e]lio / [Ant]onino Aug(usto),
pon[t(ifici)] / [ma]x(imo), tr(ibunicia) pot(estate) II, proco(n)[s(uli)], / [Im]p(eratoris) Caes(aris) L(ucii)
Septimi(i) Se/[u]eri Pii Pertinacis / Aug(usti), Arab(ici) Adiab(enici) Par(thici) / max(imi), pont(ificis)
max(imi), tri(bunicia) / pot(estate) VII, imp(eratoris) XI, co(n)s(ulis) II, / proc(onsulis), propag(atoris)
imperi(i), / p(atris) p(atriae), fortissimi felic<issimi>/que principis, filio, / diui M(arci) Antonini Pii, /
Ger(manici), Sar(matici), nepoti, diu[i] / Antonini Pii pronep(oti), / [d]iui Hadriani abnep(oti), / diui Traiani
et diui / Neruae adnep(oti), res/[p]ubl(ica) gent(is) Subu(rburum) col(onorum ?), / [Q(uinto) A]nicio Fausto,
leg(ato) / [Auggg(ustorum) p]r(o) pr(aetore), c(larissimo) u(iro), co(n)s(ule). Et ILAlg. II, 3, 7577 (inscription
quasi identique à la précédente).
56 AE 1942-43, 68 : [Imp(eratori) Caes(ari) M(arco) Aurelio Antonino Aug(usto), --- diui] / M(arci) Ant(onini)
Pii, Ger(manici), [Sar(matici), nepoti, diui] / Ant(onini) Pii pronep(oti), diui [Hadr(iani) adnep(oti)], / diui
Tra(iani) Part(hici) et diui [Neruae abnep(oti) Part(hici)] / m(a)x(imi), Brit(anici), Ger(manici) m(a)x(imi),
[pont(ifice) / m(aximo)], / trib(unicia) p[ot(estate)] XVIII, im[p(eratore) III, / co(n)s(ule)] / IIII, p(atre)
p(atriae), res [publ(ica)] / g]ent(is) / Subur[b]ur(um), ui[as ex(h)aus]/tas / restituit [ac nouis] / munitionib(us)
dila[tauit]/ (Millia pasuum) XVIIII.
57 CIL VIII, 10335 = ILS 5862 : [Imp(eratore) Caes(are) M(arco) Aurelio Antonino] / Pio Felice Aug(usto), p]
ont(ifice) / m(aximo), trib(unicia) pot(estate) XVIIII, imp(eratore) III, / [co(n)s(ule)] IIII, p(atre) p(atriae),
proco(n)s(ule), res pub(lica) / g]ent(is) Suburbur(um) uias ex/(h)austas r[e]stituit ac no/uis mun[itio]nib(us)
dilatauit / (Millia passuum) XXI.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
509
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
une troisième à Mechta Zebabcha, sous le règne de Sévère Alexandre (en 224)58. Au temps
de l’organisation tribale, apparaît à Aziz Ben Tellis la fonction de defensor gentis. X. Dupuis en
examinant l’énoncé des bornes milliaires érigées par la respublica gentis Suburburum et par la
colonie de Cuicul, et plus spécialement la formule uias torrentibus exhaustas restituit ac nouis
munitionibus dilatauit, conclut que les « Suburbures auraient donc pu avoir été placés sous
la tutelle administrative de Cuicul, ou si l’on veut “attribués” à la colonie voisine »59. Selon
le même auteur, certains préfets produumuirs connus à Cuicul pourraient être chargés de
l’administration des territoires attribués à cette gens60.
- La respublica gentis Suburburum est devenue ciuitas, comme nous l’apprend une
inscription découverte à Aziz Ben Tellis datable du IIIe siècle (après 224)61. Le document
contient dans les lignes 3-4 l’indication fontem CAPVTAMSAGAE. J. Carcopino a cru établir
à partir de cette expression que le nom antique de la cité serait ciuitas Caputamsagae62. X.
Dupuis, en reprenant l’examen de ce texte, propose de lire Caput Amsagae et de comprendre
qu’il s’agit de la source autour de laquelle a été construite la fontaine63. Le véritable toponyme
antique semble être [I]dicra, mentionné dans un texte publié par St. Gsell et trouvé aussi à
Aziz Ben Tellis64. Idicra est une étape mentionnée par l’Itinéraire d’Antonin à mi-chemin entre
Mileu et Cuicul65 ; elle est attestée comme évêché en 411 et 48466.
* Le cas des Nattabutes.
Les Nattabutes sont également mentionnés par Pline l’Ancien et Ptolémée67. Une
inscription découverte à Oum Krékèche68, datée de l’année 20969, mentionne soit la g(ens)
58 Cagnat 1903, p.101 (inscription non répertoriée par l’AE) : Impe(ratore) Caes(are), diui Seueri pii nepoti,
diui Antonini Mag(ni) Pii filio, [M. Aurelio Seuero Alexandro Pio, F]el(ice), Aug(usto), pont(ifice) max(imo),
trib(unicia) pot(estate), p(atre) p(atriae), co(n)s(ule), [Iul(iae) Mameae] Aug(ustae) filio, [Iul(iae) Maesae]
Aug(ustae) nepote, respub(lica) gentis Suburb(urum) uias torrentibus exhaustas restituit ac nouis munitionibus
dilatauit. (Millia passuum) XXV.
59 Dupuis 1999, p. 133.
60 Dupuis 1999, p. 133-134.
61 AE 1913, 225 = ILAlg. II, 3, 7583 : L(ucius) Papirius Natalis H[ibe]/rnalis, honoraria milit(ia) / ornatus,
fontem Caput / Amsagae uetustate / dilapsum et torren/tibus adsiduis dimmo/litum, ab imo usque ad / summum,
quadrato la/pide nouo et signino / opere, ob amorem ciui/tatis suae, sua pecunia, / depensis (sestertium) DC
mil(ibus) n(ummum), / instruxit et cultum re/fecit idemq(ue) dedicaui[t].
62 Carcopino 1914, p. 561-566.
63 Voir le commentaire des textes ILAlg. II, 3, 7582 et 7583.
64 AE 1917-18, 46 = ILAlg. II, 3, 7582 : Martininus, uixit a[nn]/os XXXIII, militauit an[nos ---] / eques, mortus
Ercu[--- I]/dicra, natus region[e ---]/issesa uicu Baniolu [--- me]/[m]orie pater Istra[uit ---/---]s fec[it ---].
65 Itinéraire d’Antonin, 28, 4. Cf. Jaubert 1912, p. 46-47.
66 Lancel 1991, p. 1397 ; Lancel 2002, p. 345.
67 On consultera sur cette tribu, Desanges 1962, p. 123-124 ; Desanges 1980, p. 328-329 ; Desanges 2012, p. 5259.
68 AAA, fe.18 au 1/200.000e, Souk Arrhas, n° 135 (Oum Krékèche ou Guerguech ou Gergesch).
69 CIL VIII, 4826 = ILAlg. II, 2, 6097 : Diuo Com[modo diui] / M(arci) Antonini Pii G[erman(ici)] / Sarmat(ici)
filio fr[atri] / Imp(eratoris) Caes(aris) L(uci) Septi[mi Seue]/ri Pii Pertinacis [Aug(usti) Ara]/bici Adiab(enici)
510
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
Nattabutum70, soit la c[iu(itas)] Nattabutum71. Plus tard, au temps de Valens (364-378), une
autre inscription mentionne l’ordo municipi(i) Nat(tabutum)72. Cette cité est probablement la
même qui apparaît dans un texte73 de Guelaa Bou Atfane (13 km à l’est d’Oum Krékèche74) :
c(iuitatis) N(attabutum). Le développement du N en N(attabutum) proposé par G. Wilmanns
(CIL VIII, 4836) est considéré comme probable par T. Kotula et accepté par J. Gascou75.
En s’en tenant seulement à ces deux exemples76, on peut constater déjà que le processus
de transformation juridique a été très lent. Les Suburbures ont dû attendre plus que deux
siècles, entre le principat d’Auguste (date de la documentation de Pline) et une date avancée
dans le IIIe siècle, pour voir leur respublica gentis transformée en cité. De même pour les
Nattabutes qui ne parvinrent à s’organiser en ciuitas qu’au début du IIIe siècle, sans compter
l’intervalle de temps pour obtenir le statut municipal. Dès lors, une durée de moins de 80
ans pour la gens Bacchuiana paraît surprenante, même si on ignorait si cette gens avait existé
ou non avant Antonin le Pieux ; le passage d’une ciuitas – phase intermédiaire entre gens et
municipe, imposée par la logique des conditions du développement culturel mais non encore
attestée par l’épigraphie de Bou Jlida – à un municipium ne saurait se produire en quelques
décennies dans un centre très peu romanisé où l’un de ses notables est encore pérégrin et fils
d’un certain Balsamon au milieu du IIe siècle.
Cela étant dit, la signification ethnologique du terme gens dans la dédicace de Saturnus
Achaiae devient douteuse, et nous semble même contestable. Il est d’autre part inadmissible
qu’une association, quelle que soit l’importance numérique du groupement qui la compose,
ait pu donner naissance à une cité. Dans cet ordre d’idées, Candidus n’est plus à considérer
70
71
72
73
74
75
76
Parth(ici) m[ax(imi) pont(ificis)] / max(imi) trib(uniciae) pot(estate) XV[II imp(eratoris) XI] / co(n)s(ulis)
III proco(n)s(ulis) pro[paga]/tor(is) imp(erii) fortissimi [feli]/ciss[imique prin]cipis [patruo] / Imp(eratoris)
Caes(aris) [M(arci) Au]reli [An]/tonini Pi[i] Fe[licis Aug(usti)] pon[t(ificis)] / max(imi) tri(buniciae)
pot(estate) XII co(n)s(ulis) [III] / proco(n)s(ulis) fortissimi [fe]/licissimique PR prin[cip(is)] / et super omnes
p[rin]/cipes nobi(li)ssim(i) c[iu(itas)] / Nattabutum.
C’est l’avis de St. Gsell, dans ILAlg. I, 561 (commentaire). Le texte est donné infra, n. 72. Kotula 1965, p. 355,
n. 36, opte aussi pour g[ens].
Lecture envisagée d’abord par G. Wilmanns dans CIL VIII, 4826 puis retenue par H.-G. Pflaum dans ILAlg.
II, 2, 6097 ; elle est aussi acceptée par Lepelley 1981, p. 440 ; Gascou 1982b, p. 266 et Modéran 2003, p. 30,
n. 12.
AE 1895, 82 = ILAlg. II, 2, 6098 : D(omino) n(ostro) / Flauio / Valenti / Pio uictori / triumphatori / semper
Aug(usto) / ordo municipi(i) / Nat(tabutum) posuit id(em)q(ue) [dedicait].
CIL VIII, 4836 = 16911 = ILS 6804 = ILAlg. I, 561 : Flaminalis / Saturi [f(ilius)] qui fl/amonicum c(iuitatis)
N(attabutum) g(essit) / item principatu(m) / ciuitatis suae do/num merentibus / ciuibus Fortunae / signum
marmor/eu{u}m dedit s(ua) p(ecunia) f(ecit) item / dedicauit.
AAA, fe. 18 au 1/200.000e, Souk Arrhas, n° 200 (Guelaa bou Atfane).
Kotula 1965, p. 355 ; Gascou 1982b, p. 266, n. 207. Voir aussi Benabou 2005, p. 463-464.
On peut citer aussi le cas des Nybgenii : voir Trousset 2011, p. 219-201 ; Trousset 2012, p. 5679-5683 ;
Boussetta 2016, p. 113-128 ; Helali 2017, p. 107-119. Mais la transformation de la tribu en ciuitas apparaît
comme une décision politique prise par Trajan (un cantonnement imposé dans des limites bien définies)
plutôt que le résultat d’un développement interne de cette communauté.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
511
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
comme l’undecimprimus de la gens Bacchuiana, mais de la cité que le nouveau document,
dont il sera question plus loin, dénomme Mizaeotherena. Une telle explication n’a pas
d’ailleurs échappé à J. Gascou. Ecoutons l’auteur : « Pour admettre que la gens Bacchuiana
est une sodalité, il faudrait dissocier l’undecimprimus Candidus de cette gens : la gens aurait
offert le temple, et Candidus, qui a offert le terrain pour la construction du temple, serait
l’undecimprimus (prêtre, magistrat ?) de la cité appelée Miz... qui recevra plus tard le titre de
municipe »77. Toutefois, l’éminent spécialiste de l’histoire municipale des cités africaines a fini
par rejeter cette alternative. La conséquence qui découle de ce qui précède, c’est qu’il est peutêtre temps de rayer la gens Bacchuiana de la liste des inscriptions relatives à l’undécimprimat
et la remplacer par Mizaeotherena. On parvient de la sorte à établir que toutes les attestations
de cette institution en Afrique proconsulaire concernent des notables de cités. M. Sebaï, dans
un réexamen récent du dossier des undecemprimi, est parvenue à la même conclusion : « Pour
conclure sur la possibilité d’une collusion entre undécimprimat et « confrérie mystique »
dans le cadre de la gens Bacchuiana et de la gens Saboidum, je dirais que les éléments en faveur de
cette hypothèse sont bien minces et ne résistent pas à l’analyse objective de la documentation.
(…) il n’y a pas de raison objective de considérer les undecemprimi comme un collège religieux
ou une confrérie mystique »78. L’auteur conclut en outre, que l’undécimprimat n’est point une
magistrature religieuse et ne peut plus être assimilé au flaminat. L’argument religieux qui fait
des « onze premiers » des personnes chargées des cultes rendus aux divinités honorées, doit
être par conséquent abandonné79. Les détenteurs de l’undécimprimat constitueraient donc,
selon M. Sebaï, une sorte d’« élite réduite à une dizaine d’individus »80 ; ce titre désignerait ces
membres d’honneur selon une habitude romaine plutôt que pérégrine ou héritée des puniques.
2. A la quête de la forme authentique du toponyme antique
Le fait de supprimer la prétendue tribu gens Bacchuiana de la carte administrative
de la Proconsulaire, constitue en soi une reconnaissance que cette appellation ne revêtait
aucunement la valeur d’un toponyme. Examinons en premier lieu les différentes transcriptions
de ce toponyme avant de passer à l’apport du nouveau document.
2.1. Que savons-nous d’abord ?
Jusqu’ici, nous ne disposons que de trois documents épigraphiques mentionnant le
nom antique de Bou Jlida, mais avec des lectures différentes. Un quatrième document, qui n’a
jamais été interprété en rapport avec ce nom, devait être à notre avis ajouté à la série.
77
78
79
80
Gascou 1998, p. 95, n. 12.
Sebaï 2017, p. 96.
Sebaï 2017, p. 102.
Cf. note précédente.
512
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
a. L’inscription
de Testour
voyage ne fut publiée
qu’en 1838
par A. Dureau de la Malle80. Le second témoignage e
Le document
le plusfray
anciennement
connu est
une colonne épigraphe
autrefois
conservée fondateur
celui du « trinitaire
tolédan
Francisco
Ximénez
de Santa
Catalina,
à Testour et à propos de laquelle on possédait deux versions dues à deux
voyageurs
du XVIIIe
81
administrateursiècle.
de D’abord
l’Hôpital
Saint-Jean
de
Mathe
de
Tunis
»
,
qui
a
entrepris plusieu
celle donnée par Jean-André Peyssonnel, médecin et naturaliste marseillais
qui alaparcouru
de Tunis
pendant
mois enLes
1724-1725.
relation
de son
excursions dans
mêmela Régence
Régence
entre
1720dix-sept
et 1735.
écritsLade
ce voyageur
espagn
81
voyage ne fut publiée82qu’en 1838 par A. Dureau de la Malle . Le second témoignage est celui
sont pour la plus
part inédits . J.-A. Peyssonnel au cours de la journée de 10 août 1724 pass
du « trinitaire tolédan fray Francisco Ximénez de Santa Catalina, fondateur et administrateur
à Testour, a relevé
la présence
colonne
été apportée
; les deu
de l’Hôpital
Saint-Jean ded’une
Mathe de
Tunis »82,qui,
qui a dit-il,
entreprisa plusieurs
excursionsd’ailleurs
dans la
même
entredéchirées
1720 et 1735.par
Les cet
écritsauteur
de ce voyageur
espagnol
83
dernières lignes
ont83Régence
été ainsi
(Fig.
4) : sont pour la plus part
inédits . J.-A. Peyssonnel au cours de la journée de 10 août 1724 passée à Testour, a relevé la
présence d’une colonne qui, dit-il, a été apportée d’ailleurs ; les deux dernières lignes ont été
ainsiDO…
déchirées par cet auteur84 (Fig. 4) :
RVRA…
MVN.
TERENI…
MVN. RVRA… DO…
TERENI…
Fig. 4 : Fig.
L’inscription
dedeTestour
tellequ’elle
qu’elle
relevée
par Peyssonnel.
4 : l’inscription
Testour telle
a étéest
relevée
par Peyssonnel.
(D’après
Dureau
Malle1838,
1838,
p. 139)
(D’après
Dureaude
dela
la Malle
p. 139)
La même colonne a été également vue par le père Ximenez ; il nous dit à son propos dans
Diario de Tunez
(Vol.
fol.
81 Dureau
de laVI
Malle
1838.85 rº) : « J’ignore si cette colonne a été retrouvée ici et ce si
82 Álvarez Dopico 2013, p. 320.
s’appelait Mizado,
je penche plutôt pour qu’elle vienne d’un site appelé Pizado à deux lieu
83 On consultera cependant sur l’œuvre de Ximenez, González Bordas 2015a ; González Bordas 2019, p. 183-208.
84 Dureau
la Malle
1838, p. 139.
texte n’a pas
été reproduit
dans la deuxième
édition
la relation
de ce
d’ici vers le midi,
oùdel’on
trouve
lesLeruines
d’un
site ancien,
dont
le de
nom
a pu
être corromp
voyage, Peyssonnel 1987, p. 103 (Lettre sixième adressée à l’abbé Bignon).
et qui se serait appelé Mizado »84. Ximenez a fait état du texte gravé sur cette colonne da
trois de ses ouvrages
: l’Historia de los Cartagineses, le Diario de Tunez et
513l’Historia d
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Reyno de Tunez85. C’est la copie donnée dans le Diario qui fut insérée par la suite dans
volume VIII du Corpus inscriptionum latinarum sous le n° 1395 (Fig. 5). Voici la lecture d
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
La même colonne a été également vue par le père Ximenez ; il nous dit à son propos dans
le Diario de Tunez (Vol. VI fol. 85 rº) : « J’ignore si cette colonne a été retrouvée ici et ce site
s’appelait Mizado, je penche plutôt pour qu’elle vienne d’un site appelé Pizado à deux lieues
d’ici vers le midi, où l’on trouve les ruines d’un site ancien, dont le nom a pu être corrompu,
et qui se serait appelé Mizado »85. Ximenez a fait état du texte gravé sur cette colonne dans
trois de ses ouvrages : l’Historia de los Cartagineses, le Diario de Tunez et l’Historia del Reyno
de Tunez86. C’est la copie donnée dans le Diario qui fut insérée par la suite dans le tome VIII
du Corpus inscriptionum latinarum sous le n° 1395 (Fig. 5). Voici la lecture des deux dernières
lignes, qui diffère de celle donnée par Peyssonnel :
MVNI. MIZADO
TERENI.
Fig.55: :copie
Copiede
deXimenez
Ximenez reproduite
reproduite par
Fig.
parleleCIL
CILVIII,
VIII,1395.
1395.
Ces deux versions sont les ultimes témoignages de la colonne de Testour, qui n’a jamais été
Ces deux versions sont les ultimes témoignages de la colonne de Testour, qui n’a jamais
retrouvée
depuis.
Les divergences
de lecture
entreentre
Peyssonnel
et Ximenez
sontsont
peut-être
dues
été retrouvée
depuis.
Les divergences
de lecture
Peyssonnel
et Ximenez
peut-être
à dues
une mauvaise
conservation
de
la
partie
finale
du
champ
épigraphique,
mais
on
pourrait
les
à une mauvaise conservation de la partie finale du champ épigraphique, mais on pourrait
ramener
à unàmanque
d’aptitude
dans
le le
domaine
surtout pour
pour lelepremier
premier8786. .
les ramener
un manque
d’aptitude
dans
domainededel’épigraphie,
l’épigraphie, surtout
Toutefois, malgré la disparition de cette colonne, la lacune relevée dans la transmission du
nom
de la cité,
ne sera Bordas
palliée2015a,
qu’avec
à Carthage,
d’un Bordas
fragment
85 Traduction
de González
p. 683.laJe découverte,
remercie mon ami
Hernán González
qui ad’une
bien
voulu
me
communiquer
nombre
de
ses
travaux
(inédit
et
publiés)
consacrés
à
l’œuvre
de
F.
Ximenez.
inscription contenant l’ethnique ṂIZEOTERENEN[ses]. Cette nouvelle donnée, qu’on
86 González Bordas 2015a, p. 682-683.
évoquera
dans un instant, a été tout de suite mise à contribution pour corriger la lecture de
87 Les limites
et les faiblesses des deux auteurs dans la transmission des textes épigraphiques ont été notées à
87
Ximenez
; elle
permet
conséquemment
de proposer
l’apparat
plusieurs
reprises.
Relativement
à Peyssonnel,
Ch. Monchicourt
nouscritique
disait : «suivant
De même: qu’il agrée sans
Ligneréflexion
1 : après
les lettres
DDNN,de même
on litPeyssonnel
tantôt «copie
FLAVI
F », soin
tantôt
FLAVII
F »,
les épigraphes
les plus fautives,
sans aucun
celles«qu’il
a l’occasion
88ajoute un peu plus loin : « Peyssonnel est en somme un auteur qu’il ne faut consulter
de
découvrir
».
Et
tantôt « FLAVIO » . Dans les deux premières copies, Ximenez a ajouté un F qui indiquerait
qu’avec précaution » (Monchicourt 1916, p. 362 et 363). Contre ce jugement, Rampal 1917, p. 388-399,
dans considère
ce cas unque
rapport
de filiation. Je serais tenté d’y voir plutôt un S. Je lirais alors FLAVIIS,
la préoccupation première de Peyssonnel était l’histoire naturelle, et qu’il est injuste de le
89
comme
cela
est archéologue
bien attesté
dans plusieurs
. On
ne s’étonnera
pas que
traiter
comme
ou épigraphiste.
Cette inscriptions
question a été aussi
abordée
par Lucette Valensi
danscette
son
introduction à la deuxième édition de la relation de Peyssonnel (Peyssonnel 1987, p. 7-38). Un autre constat
sur la valeur historique des deux voyageurs est publié par Duval 1965, p. 94-135, qui se déclare d’accord avec
les critiques de Monchicourt à propos de Peyssonnel (notamment au sujet de la prétendue visite à Sbeïtla et
86
Lesàlimites
et lesmais
faiblesses
des deux
auteursun
dans
la transmission
des textesetépigraphiques
notées à
Kasserine),
qui reconnaît
à Ximenez
certain
mérite d’archéologue
d’épigraphiste.ont
Sur été
la pratique
plusieurs
reprises. de
Relativement
Monchicourt
disait : récents
« De même
qu’il agrée
sans
les travaux
d’H. González
Bordas
épigraphique
Ximenez etàunPeyssonnel,
peu moins Ch.
de Peyssonnel,
voirnous
réflexion
les épigraphes
les plus; González
fautives, de
même2015b,
Peyssonnel
copie
sans aucun
soin2019,
cellesp.qu’il
a l’occasion de
(González
Bordas 2015a
Bordas
p. 25-46
; González
Bordas
183-208).
découvrir ». Et ajoute un peu plus loin : « Peyssonnel est en somme un auteur qu’il ne faut consulter qu’avec
précaution » (Monchicourt 1916, p. 362 et 363). Contre ce jugement, Rampal 1917, p. 388-399, considère que la
préoccupation première de Peyssonnel était l’histoire naturelle, et qu’il est injuste de le traiter comme
514
«DieCette
Numider»
40 ansaaprès.
Bilan abordée
et perspectives
recherches
sur lesdans
Numides
501 - 538) à la
archéologue
ouL’exposition
épigraphiste.
questions
été aussi
par des
Lucette
Valensi
son(p.
introduction
deuxième édition de la relation de Peyssonnel (Peyssonnel 1987, p. 7-38). Un autre constat sur la valeur
historique des deux voyageurs est publié par Duval 1965, p. 94-135, qui se déclare d’accord avec les critiques de
Monchicourt à propos de Peyssonnel (notamment au sujet de la prétendue visite à Sbeïtla et à Kasserine), mais
qui reconnaît à Ximenez un certain mérite d’archéologue et d’épigraphiste. Sur la pratique épigraphique de
Ali CHÉRIF
Malgré la disparition de cette colonne, la lacune relevée dans la transmission du nom de la
cité, sera toutefois palliée avec la découverte, à Carthage, d’un fragment d’une inscription
contenant l’ethnique ṂIZEOTERENEN[ses]. Cette nouvelle donnée, qu’on évoquera dans
un instant, a été tout de suite mise à contribution pour corriger la lecture de Ximenez88 ; elle
permet conséquemment de proposer l’apparat critique suivant :
Ligne 1 : après les lettres DDNN, on lit tantôt « FLAVI F », tantôt « FLAVII F »,
tantôt « FLAVIO »89. Dans les deux premières copies, Ximenez a ajouté un F qui indiquerait dans
ce cas un rapport de filiation. Je serais tenté d’y voir plutôt un S. Je lirais alors FLAVIIS, comme cela
est bien attesté dans plusieurs inscriptions90. On ne s’étonnera pas que cette corégence soit exprimée
par un seul F au lieu de FF ou encore FFFL91. La leçon « FLAVIO » est aussi envisageable : on
dispose d’un nombre d’exemples où ce datif singulier est lié seulement au nom de Valentinien
Ier dans des inscriptions adressées à lui, à son frère Valens et à son fils Gratien92. En définitive, les
différentes versions du texte de la colonne m’incitent à préférer la lecture FLAVIIS.
Ligne 5 : on lira MIZAEO au lieu de MIZADO : après MIZ, on conservera le A que
donnait Ximenez et qui ne figurait pas sur le fragment de Carthage ; on corrigera aussi le D en E.
Lignes 5-6 : après muni(cipium), il y a lieu de restituer soit MIZAEO/TERENE[nse]93
soit MIZAEO/TERENE[nsium]94. Dans l’une et l’autre forme, on corrigera le I donné par
Peyssonnel et Ximenez en E.
88 Le mérite en revient à Ch. Tissot qui a discerné le premier la complémentarité entre la colonne de Testour
et le fragment de Carthage : Tissot 1888, p. 764. Voir aussi Wilmanns, dans CIL VIII, p. 938. Une explication
complètement erronée a été avancée en 1880 par Robert Mowat qui a cherché à lire, après une fâcheuse
déformation du texte, Mediterranei au lieu de Mizeotereneni : « MIZEOTERENEN, dis-je, est visiblement une
altération de medioterenen[i], forme provinciale équivalente à mediterranei ; je rétablis la désinence du pluriel,
car je crois que l’abréviation MVNI qui précède est plutôt pour muni(cipes) que pour muni(cipium) ; en d’autres
termes, il s’agit non d’un municipe distinct de Carthage (puisque la pierre provient de la banlieue), mais des
habitants du quartier de cette ville situé vers l’’intérieur des terres, appelés, pour cette raison, Mizeotereneni,
autrement dit Mediterranei, par opposition aux habitants du quartier maritime, municipes Portuenses » (Mowat
1880, p. 179-180). Voir Vassel 1917, p. 360-361, qui critique cette opinion.
89 Voir sur ces trois transcriptions, González Bordas 2015a, p. 682-683.
90 Je citerai à titre d’exemple : AE 1975, 364 = AE 1981, 303 (Castilenti, Regio V) : [Ddd(ominis)] nnn(ostris)
Flauiis Valentin[ia]no, / Valenti et Gratiano piis felicibus / {h}ac triump(h)atoribus semper / Auggg(ustis), bono
r(ei) p(ublicae) natis.
91 On trouvera dans certains cas FFFL comme dans CIL VIII, 9012 ( Jemmaa Saharidj, antique Bida en
Maurétanie césarienne) : Dd(ominis) nn(ostris) Fffl(auiis) / [Va]lent[iniano V]ale[n]ti / [e]t Gr[at]ino Piis
[F] e/[lici]bus [---.
92 Je donnerai comme exemple une borne milliaire de la voie Carthage-Théveste : AE 2015, 1826 (Hr. elBaghla) : Dd(ominis) [nn(ostris)] / Flauio / Valentiniano / et Valenti uict/oribus semper Aug(ustis) / municipium
/ Thignica. Voir d’autres parallèles dans Salama 2002, p. 36 et 46.
93 C’est la restitution qu’avait proposée Wilmanns, dans CIL VIII, p. 938.
94 Salama 1987, p. 59.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
515
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
Au vu de toutes ces remarques, je proposerai pour la colonne de Testour la présentation
suivante :
- Support : colonne, sans autres informations. P. Salama y voit une borne milliaire95.
- Dimensions : non précisées par Peyssonnel et Ximenez.
- Lieu de découverte : Testour, mais s’agissant de toute évidence d’un milliaire, cette
colonne devrait être dressée initialement le long d’une voie. P. Salama la situe sur la transversale
reliant Bisica à Thabbora96. Mais l’identification très probable du nom de Mizaeotherena
sur un autre milliaire de la voie Carthage-Théveste (on verra le document plus loin), laisse
envisageable l’attribution de notre colone à cette même grande artère.
- Transcription : le texte est distribué sur six lignes au moins. On n’est pas sûr que l’inscription
soit complète à la fin, elle pourrait contenir la formule deuotum numini maiestatique eorum.
DD NN FLAVIIS
VALENTINIANO ET VA
LENTI PII FELICES VIC
SEMPER AVGG
MVNI MIZAEO
TERENE[…]
Dd(ominis) nn(ostris) Flauiis
Valentiniano et Va
lenti pii felices uic(toribus)
semper Augg(ustis)
muni(cipium) Mizaeo/terene[nse].
- Traduction : « A nos Seigneurs Flavius Valentinien et Flavius Valens, pieux, heureux,
victorieux, toujours Augustes ; le municipe de Mizaeoterena ».
- Datation : règne conjoint de Valentinien Ier et Valens, 364-37597.
b. L’inscription de Carthage
Le second document où figurait le nom de notre cité est un fragment de la fameuse
inscription dite des ethniques98 ; ce fragment, considéré comme non retrouvé99, a été
95
96
97
98
99
Salama 1987, p. 207, n° inv. 155 et n. 296.
Cf. note précédente.
Lassèrre 2005, p. 1041.
CIL VIII, 10530 = 12552a.
Benzina Ben Abdallah, Sebaï 2011, p. 325.
516
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
- Datation : règne conjoint de Valentinien Ier et Valens, 364-37596.
b. L’inscription de Carthage
Ali CHÉRIF
Le second document où figurait le nom de notre cité est un fragment de la fameuse inscription
dite des ethniques97 ; ce fragment, considéré comme non retrouvé98, a été découvert « à
Carthage entre
Byrsa et entre
les quais
»99et
, illes
fait
partie
tarif
fiscald’un
datétarif
par fiscal
Ch. Saumagne
du
découvert
« à Carthage
Byrsa
quais
»100d’un
, il fait
partie
daté par Ch.
100
101
. Parmi
les cités .énumérées
dans
règne conjoint
de Valentinien,
Valens
et Gratien
(367-375)
Saumagne
du règne
conjoint de
Valentinien,
Valens
et Gratien
(367-375)
Parmi les cités
les
listes
alphabétiques
des
communautés
dont
les
terres
étaient
soumises
aux
prestations
énumérées dans les listes alphabétiques des communautés dont les terres étaient soumises
ṂIZEOTERENEN[ses]
(Fig. 6).
annonaires,
se trouve
celle des
aux
prestations
annonaires,
se trouve
celle des ṂIZEOTERENEN[ses]
(Fig. 6).
Il est généralement admis que pour un adjectif ethnique en –ensis devait correspond un
Il est généralement admis que pour un adjectif ethnique en –ensis devait correspondre
substantif en –a101.102Cela est confirmé par l’exemple qui nous occupe ici : Mizeoterena (ou
un substantif en –a . Cela est confirmé par l’exemple qui nous occupe ici : Mizeoterena (ou
Mizaeotherena) est la cité des Mizeoterenenses (ou Mizaeotherenenses).
Mizaeotherena) est la cité des Mizeoterenenses (ou Mizaeotherenenses).
Fig.
: CopiededeCIL
CILVIII,
VIII, 10530
10530 ==12552a.
Fig.
6 :6 copie
12552a.
c. L’inscription de Bou Jlida
c. L’inscription de Bou Jlida
N. Ferchiou a publié en 1979 le seul document épigraphique découvert à Bou Jlida et
N. Ferchiou
a publié
en 1979
seuldédicace
document
épigraphique
découvert
à Bou Jlida
mentionnant
le nom
de la cité.
C’estleune
impériale
partiellement
conservée
dont et
le
mentionnant
le
nom
de
la
cité.
C’est
une
dédicace
impériale
partiellement
conservée
dont
le
texte est seulement connu par un croquis (Fig. 7). Voici les informations dont nous disposons
texte
est seulement connu par un croquis (Fig. 7). Voici les: informations dont nous disposons
sur cette inscription distribuée sur cinq lignes au moins102
sur cette inscription distribuée sur cinq lignes au moins103 :
- Support : bloc recoupé à droite.
- Support
: bloc
recoupé à droite.
- Dimensions
: non
précisées.
- Lieu -de
découverte: non
: dans
le village de Bou Jlida. Bloc non retrouvé.
Dimensions
précisées.
- Lieu de découverte : dans le village de Bou Jlida. Bloc non retrouvé.
- Apparat
critique;:Lasserre
le texte2005,
tel qu’il
nous est parvenu a subi un martelage au niveau de sa
Kienast
1990, p. 322-326
p. 1041.
CIL
VIII,
10530
=
12552a.
partie
supérieure et il a été amputé de sa partie droite.
98
Benzina Ben Abdallah, Sebaï 2011, p. 325.
99
TissotLigne
1888, 1
p. :764.
seulement deux lettres ont été lues séparées par une lacune : I et O. Dans cette
100
Saumagne
1950,
p. 127.
ligne
devait se développer
la titulature d’un empereur frappé d’une damnatio memoriae.
101
On consultera toujours Galand 1951, p. 778-786 (= Galand 2002, p. 49-57). Voir aussi Beschaouch 1974a, p.
223 ; Beschaouch 1993-1995, p. 250.
102
1979,p.p.764.
19 = AE 1979, 651.
100Ferchiou
Tissot 1888,
96
97
101 Saumagne 1950, p. 127.
14
102 On consultera toujours Galand 1951, p. 778-786 (= Galand 2002, p. 49-57). Voir aussi Beschaouch 1974a,
p. 223 ; Beschaouch 1993-1995, p. 250.
103 Ferchiou 1979, p. 19 = AE 1979, 651.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
517
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
Ligne 2 : elle commence par le mot municipium donné en toutes lettres. Le reste de la
ligne étant disparu dans la lacune. N. Ferchiou suggère la restitution d’un qualificatif tiré d’un
nom d’un empereur : Aelium ou Aurelium ; elle a précisé qu’il « y a encore place pour une ou
deux lettres entre le mot municipium et le bord du bloc »104. Deux lectures sont possibles (je
reviendrai plus loin en détail sur la justification de ces deux choix) : municipium [Aur(elium)
Com(modum)] ou municipium [Aur(elium) Ant(oninianum)]. On restituera donc une ou deux
lettres avant le bord du bloc et quatre ou cinq autres dans la partie perdue.
Ligne 3 : après l’adjectif Felix, s’étend le nom de la cité partiellement effacé. On lit
d’abord les lettres MIZ bien claires ; « ensuite, après un espace d’une ou deux lettres, apparaît
le haut d’un T, puis, après une nouvelle lacune, une lettre incertaine qui paraît avoir une
boucle, – un R peut-être, – enfin un D »105. Au terme de son apparat critique, et après un
rapprochement avec le tarif fiscal et la colonne de Testour, N. Ferchiou admet la restitution
Miz[eo]t[e]r106.
Cette solution pose deux problèmes : le premier qu’elle ne reprend pas la forme exacte
du toponyme, telle quelle est connue maintenant. Le second, se rapporte au nombre de lettres
que l’espace disponible permet de restituer. A mon avis, le nom de la cité est à coup sûr donné
en abrégé, car il est impossible d’insérer cinq ou six lettres dans l’espace aussi réduit entre
le Z et le D, et de lire ainsi AEOTHE ou AEOTE107. Dans l’impossibilité de procéder à une
vérification directe sur la pierre et étant donné que la lettre qui précède le D est incertaine,
d’après Ferchiou elle-même, je proposerais de lire MIZ[a]ẹọ D[euotum] : le T serait plutôt un
E et la boucle du supposé P correspondrait en fait à une partie du O108.
Ligne 4 : après NVMIN, on restitue la suite de la formule de dévotion. L’économie
générale de cette ligne, et de l’ensemble du texte, m’incite à retenir la restitution [maiestatiq(ue)
eius].
Ligne 5 : ne pose pas de problème, on restitue aisément PP avant DD.
- Transcription : on proposera la restitution globale suivante. La partie droite manquante
devait correspondre approximativement au ⅓ du texte.
[[--- I O ---]]
ṂVNICIPỊVṂ [……]
FELIX MIZ[.]ẸỌ D[……]
NVMIN[……………]
PP DD
104 Ferchiou 1979, p. 20.
105 Ferchiou 1979, p. 19.
106 Ferchiou 2000, p. 69, propose aussi la forme Mizeotera.
107 A la ligne précédente, le même espace logeait seulement trois lettres.
108 L’abréviation des noms des cités est fréquente dans l’épigraphie : dans AE 2016, 1907, on lit pa[gu]s et ciuitas
Thugg(ensis) ; dans AE 2016, 1916, on lit mun(icipium) Iul(ium) Aur(elium) Musti(tanum) …etc.
518
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
[[--- I O ---]]
ṃunicipịuṃ
[Aur(elium) Com(modum)]
uel [Aur(elium)
Ant(oninianum)]
ṃunicipịuṃ [Aur(elium)
Com(modum)]
uel [Aur(elium)
Ant(oninianum)]
Felix Miz[a]ẹọ(therenensium)
Felix Miz[a]ẹọ(therenensium)
d[euotum] d[euotum]
numin[i
maiestatiq(ue)
eius]
numin[i maiestatiq(ue) eius]
p(ecunia) p(ublica) d(ecreto) d(ecurionum).
p(ecunia) p(ublica) d(ecreto) d(ecurionum).
- Traduction
: « [[---]]
/ le municipium
AureliumCommodum
Commodum (ou
Antoninianum)
- Traduction
: « [[---]]
/ le municipium
Aurelium
(ouAurelium
Aurelium
Antoninianum) /
/
Felix
Mizaeotherenensium
dévoué
à
Sa
puissance
divine
et
à
Sa
majesté.
Dépense
publique.
Felix Mizaeotherenensium dévoué à Sa puissance divine et à Sa majesté. Dépense
publique.
Par décret des décurions ».
Par décret des décurions ».
109
108
: le IIIed’après
siècle, d’après
N. Ferchiou
et l’Année
épigraphique
- Datation- Datation
: le IIIe siècle,
N. Ferchiou
et l’Année
épigraphique
..
Fig.
7 : croquis de l’inscription AE 1979, 651, d’après Ferchiou 1979, p. 32, fig. 1.
Fig. 7 : Croquis de l’inscription AE 1979, 651, d’après Ferchiou 1979, p. 32, fig. 1.
d. Milliaire
de Théodose
Ier conservé
à Testour
2.2. La fixation
définitive
du toponyme
antique.
Outre la colonne signalée par Peyssonnel et Ximenez à Testour, A. Merlin a publié en
110 enrichi
Le dossier
nom antique
de dans
Bou un
Jlida,
que nous
venons de
delaprésenter,
1908 unerelatif
borneau
milliaire
remployée
monument
historique
même villeest
, le
bain de Sidi
el-‘Arianedocument
qui continue
fonctionner
jusqu’à
jours, de
toutlaprès
de ladugrande
récemment
d’unAlinouveau
quiàpermet
de régler
la nos
question
forme
toponyme
mosquée.
la copieetproposée
le premierd’abord
éditeur :cette nouvelle inscription.
d’une
manièreVoici
définitive
assurée.par
Présentons
109 Ferchiou
1979,
p. 22.
- Support
: deux
fragments
d’une frise simple, taillés dans un calcaire blanc. Le fragment 1 est
110 Merlin 1908, p. CCLX : « j’ai copié dans un bain maure de cette localité, voisin de la place publique, le texte
incomplet
à gauche, à droite, et partiellement en bas ; une partie du texte a disparu à cause de
d’une borne milliaire ».
l’usure et des éclats qui ont surtout affecté la première ligne et la partie gauche de la surface
épigraphique. Le fragment 2 est incomplet à gauche et complet à droite, malgré l’épaufrure au
519
«Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
niveau L’exposition
de l’angle
inférieur provoquant la disparition partielle d’une lettre. Les deux fragments
constituaient sans doute initialement un seul bloc qui a été brisé lors d’un remploi109. La
brisure a fait disparaître deux lettres au niveau de à la jonction des deux fragments.
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
[Partie enterrée] / Caes(ari) / Theudo/[si]o (sic) Pio Feli/[ci] ac trium/[fat]ori semper
/ [A]ug(usto) M[---]eo/[---]na de(uota ou uotum) / [n(umini) m(aiestati)q(ue)] eius / [---]L
(palme)111.
Nous avons eu l’occasion de revoir le texte de cette inscription dans le cadre d’une
enquête consacrée au tronçon de la voie Carthage-Théveste parcourant le territoire de
Mustis112. Les lettres reproduites par Merlin pour les lignes 7-8, m’ont incité à restituer le nom
antique de Bou Jlida, Mizaeotherena. Après deux missions effectuées à Testour le 13 et le 28
janvier 2021113, j’ai pu repérer cette borne dans le même bain indiqué par Merlin. En voici une
présentation.
- Support : colonne en pierre calcaire entièrement recouverte de plusieurs couches de
peinture. Un grand trou haut de 14 cm ; large de 5 à 8 cm et profond de 4 cm, a un peu affecté
la ligne 6 et surtout les lignes 7 et 8 (Fig. 8).
- Dimensions : H. 152 cm ; Diam. 34 cm.
- Champ épigraphique : gravé dans l’arrondi de la colonne. Hl. 5,5-7,5 cm. Merlin a déjà
signalé que les dernières lignes sont endommagées au début ; la partie gauche est en grande
partie dissimulée par un petit mur de l’une des banquettes de la salle de déshabillage, haut
de 67 cm ; plusieurs lettres ne sont plus donc visibles consécutivement à ce remploi. Tout
de même, ce qui reste apparent du texte est déchiffrable malgré les différentes couches de
peinture appliquées à la surface de la colonne (Fig. 9).
- Apparat critique : L.1 : non relevée par Merlin car la partie sommitale a été en 1908
plus enterrée que ne l’est maintenant114. J’ai pu déchiffrer un N d’où la restitution évidente
d’un D au début de cette ligne. De la ligne 2 à la ligne 6, nous reprenons la lecture de Merlin,
car notre examen récent ne permet de rien modifier. L.7 : Merlin a déchiffré après [A]VG,
un M qui peut renvoyer, selon lui, au mot m(unicipium). Après le M, une lacune de quelques
lettres suivie de EO. La position actuelle de la colonne ne permet pas d’évaluer la longueur
de l’espace entre le M (qui n’est plus visible ou emporté par le trou) et les lettres EO. Ce qui
fait que deux restitutions sont possibles : M[VN MIZA]EO ou M[IZA]EO. L. 8 : le début est
devenu illisible et est en partie emporté par le trou. En tenant compte de l’identification de la
cité avec Mizaeotherena, on restituera THERE. On lit à la fin NADE. L.9 : elle commence très
probablement par un V ; on remarque ensuite un O encore reconnaissable mais non relevé
111 Merlin 1908, p. CCLX = ILAfr 664.
112 Chérif, à paraître. Le texte de ce milliaire est revu dans le cadre de la série des bornes où apparaissaient les
noms des collectivités qui les avaient érigées sur les tronçons de la voie Carthage-Théveste qui parcouraient
leurs territoires.
113 Je tiens à remercier mes collègues Aziza Miled (INP) et Ramla Hassairi (AMVPPC) pour tous les
renseignements fournis à propos du lieu de conservation de la borne. Mes remerciements s’adressent aussi à
Rabeh Akkez, de l’association de sauvegarde de l’horloge andalouse à Testour et à Maher et Malek fils de Si
Abdelhamid Boujemaa, propriétaire du bain, qui m’ont facilité l’examen de la borne.
114 D’après Merlin, La hauteur apparente en 1908 est de l’ordre de 145 cm.
520
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
par Merlin. L’espace entre le O et les lettres finales EIVS est de 6,5 cm, il ne suffit pas pour
loger 4 ou 5 lettres comme le propose Merlin TANMQ ou TVMNMQ. On peut seulement
insérer dans cet espace deux lettres : le T de deuot115 et le N de numini. La formule deuot(a
-tum) n(umini) eius est par ailleurs fréquente116. L. 10 : réservée au chiffre de la distance.
Merlin a déchiffré seulement un L suivi d’une palme. Il faut plutôt lire XIIIL (Fig. 10), une
numérotation en écriture rétrograde (= 63 milles).
Ces restitutions permettent une distribution équilibrée des lettres sur les lignes 4-9 :
entre 9 et 12 caractères par ligne.
- Transcription : 10 lignes sont donc partiellement conservées. Les lettres sont des
capitales irrégulières et l’ajustement des lignes est assez maladroit. Voici le texte tel qu’il a été
lu par A. Merlin avec les compléments issus de la révision que j’ai faite :
[.] N
CAES
THEVDO (sic)
[..]O PIO FELI
[..] AC TRIVM
[…]ORI SEMPER
[.]VG M[---]EO
[…..]NA DE
[.]O[. .] EIVS
XIIIL (Palme).
[D(omino)] n(ostro)
Caes(ari)
Theudo- (sic)
[si]o Pio Feli115 Le mot est généralement réduit à la seule initiale D ou inscrit en toutes lettres. L’abréviation deuo n’est
pas encore attestée d’après les recensements de l’EDCS. Mais on trouve dans certaines inscriptions
l’emploi de l’abréviation deuot : CIL VIII, 968 = ILS 6785 (Nabeul) : Imp(eratori) Caesari / M(arco) Aurelio
Kar(o) / Pio Felici Aug(usto) / pont(ifici) max(imo) trib(unicia) p(otestate) / co(n)s(uli) p(atri) p(atriae)
proc(onsuli) col(onia) / Iul(ia) Neapolis deuot(a) / numini eius. Et CIL VIII, 26181 = AE 1902, 48 = ILS 6790
(Thibaris) : Imp(eratori) Caes(ari) C(aio) Vale/rio Diocletiano / Pio Felici Aug(usto) / pontifici max(imo) /
trib(unicia) pot(estate) co(n)s(uli) / III p(atri) p(atriae) proco(n)s(uli) / res p(ublica) munic[i]/pi(i) Mariani /
Thibaritanorum / deuot(a) numi[ni] / [maiestatiq(ue) eius]. Vois aussi note suivante.
116 On la trouve par exemple sur un milliaire d’Auitta Bibba, ILT 674 = AE 1992, 28 = AE 1998, 1535 : [D]
D(ominis) nn(ostris) Impp(eratoribus) / [C]onstantio et / [[Maximiano]] / [A]ugg(ustis) munici/pium Auitta
/ deuot(um) n(umini) eor(um).
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
521
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
[ci] ac trium[fat]ori semper
[A]ug(usto), M[iza]eo uel m[un(icipium) Miza]eo[there]na de[u]o[t(a uel -tum) n(umini)] eius
(Millia passuum) XIIIL (palme).
- Traduction : « A notre seigneur César Théodose, Pieux, Heureux et Triomphateur,
toujours Auguste ; Mizaeotherena ou le municipium Mizaeotherena dévoué à Son essence
divine. 63e (mille) ».
- Datation : 379-395 ap. J.-C.
Si notre restitution du nom de Mizaeotherena est admissible, ce
qui paraît très probable vu que les lettres conservées (EO au milieu du
nom et NA à la fin) ne peuvent être rapprochées qu’avec ce toponyme,
cette borne fut placée par cette collectivité sur la voie CarthageThéveste au mille 63, sur la variante Turris-Coreua-Mizigi117. Le
gisement de ce mille est situé à 1,5 km à l’est de Henchir Dermoulya,
il a déjà livré un milliaire de Caracalla indiquant également le 63e
mille118. Cet emplacement se trouve à 10 km au nord de Bou Jlida,
ce qui ne manque pas de nous renseigner sur l’étendue du territoire
de cette cité. L’identification du nom de la cité émettrice de la borne
dédiée à Théodose Ier, incite à poser la question de la voie à laquelle
a pu appartenir l’autre colonne milliaire signalée par Peyssonnel et
Ximenez. P. Salama l’avait placé sur la route Bisica-Thabbora119. Le fait
que Mizaeotherena ait implanté en son nom une borne sur le parcours
de la voie Carthage-Théveste, cela supposerait qu’un tronçon de cette
voie traversait son territoire, d’où la conclusion évidente de l’existence
de deux points extrêmes correspondant à l’entrée et à la sortie de la
voie. Le milliaire anciennement connu pourrait être placé soit au
mille 63 à côté de celui de Théodose Ier, soit à un mille précédent.
Fig. 8 : le milliaire de
Théodose Ier dans son
contexte de remploi
(Cliché A. Chérif).
117 Salama 1987, n° inv. 165, a enregistré cette borne parmi celles de la voie Carthage-Théveste.
118 Davin 1929-1928, p. 668-669.
119 Salama 1987, n° inv. 155.
522
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
Fig. 9 : le champ épigraphique
(Cliché A. Chérif).
Fig. 10 : détail de la ligne 10 : le mille XIIIL
(Cliché A. Chérif).
2.2. La fixation définitive du toponyme antique.
Le dossier relatif au nom antique de Bou Jlida, que nous venons de présenter, est
enrichi récemment d’un nouveau document qui permet de régler la question de la forme du
toponyme d’une manière définitive et assurée. Présentons d’abord cette nouvelle inscription.
- Support : deux fragments d’une frise simple, taillés dans un calcaire blanc. Le fragment
1 est incomplet à gauche, à droite, et partiellement en bas ; une partie du texte a disparu à
cause de l’usure et des éclats qui ont surtout affecté la première ligne et la partie gauche de
la surface épigraphique. Le fragment 2 est incomplet à gauche et complet à droite, malgré
l’épaufrure au niveau de l’angle inférieur provoquant la disparition partielle d’une lettre. Les
deux fragments constituaient sans doute initialement un seul bloc qui a été brisé lors d’un
remploi120. La brisure a fait disparaître deux lettres au niveau de la jonction des deux fragments.
- Lieu de découverte : dans le village de Bou Jlida, précisément dans le secteur nord-est
où s’est développée la cité antique.
120 On peut penser à un premier remploi dans l’enceinte tardive, puis un second remploi au moment de la
construction de la maison ; les propriétaires de cette demeure ont probablement récupéré les blocs dans
ladite enceinte qui constitue leur mur de séparation avec leur voisin (voir Fig. 11).
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
523
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
- Conditions de découverte : les deux blocs ont été mis au jour lors de la rénovation d’une
maison ; ils étaient en remploi comme des piliers pour soutenir l’ancienne toiture. Encore
conservés in situ (Fig. 11).
- Dimensions :
Fragment 1 (Fig. 12) : H. 41,5 cm ; Long. 163 cm : Ep. 36 cm.
Fragment 2 (Fig. 13) : H. 41,5 cm ; Long. 158 cm : Ep. 36 cm.
- Champ épigraphique : dédicace gravée sur trois lignes ; lettres en capitales allongées et
régulières mais peu profondes. Les lettres de la première ligne sont plus aérées. Hl. L. 1 : 10,511 cm ; L. 2 : 10,3-11 cm ; L. 3 : 5,7-6,7 cm.
Fig. 11 : les deux fragments de la frise, le jour de leur découverte le 13 janvier 2012.
On remarque en arrière plan un tronçon de l’enceinte tardive (Cliché A. Chérif).
- Apparat critique :
Fragment 1 : Ligne 1 : elle est presque entièrement effacée mais à la fin sont encore
conservées les traces de 5 lettres : un M ayant l’allure d’un V à cause de la disparition
pratiquement totale des deux jambages, puis les vestiges de deux lettres dont la lecture
est devenue assez confuse à cause des accidents subis par la surface épigraphique. Vu son
emplacement dans cette partie du texte où sont énumérés les différents titres de l’empereur,
524
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
cette lettre M devrait renvoyer à l’adjectif maximus et donc à des cognomina ex uirtute tels que
Parthicus maximus ou Britannicus maximus. Je retiens donc volontiers cette lecture. Ensuite
on parvient à déchiffrer les deux derniers signes de cette ligne : PO de pontificis121 ; Ligne 2 :
Ensuite
parvient à effacé,
déchiffrer
les deux
derniers le
signes
cette ligne
: PO
de apontificis
;
le début
est on
entièrement
ensuite
on identifie
mot de
MATRIS
dont
le M
disparu110
mais
110
Ensuite
on
parvient
à
déchiffrer
les
deux
derniers
signes
de
cette
ligne
:
PO
de
pontificis
;
Ligne
2
:
le
début
est
entièrement
effacé,
ensuite
on
identifie
le
mot
MATRIS
dont
le
M
a
on voit encore le jambage droit du A, le bas du T, et les traces assez érodées des lettres RIS. A
Ligne
: le début
entièrement
effacé,
ensuite
identifie
le
MATRIS
dont
le Mdes
aau
mais
on
encore
le jambage
droit
du A,; on
le bas
du
et mot
les traces
assez
érodées
la findisparu
de la 2ligne
on voit
lit est
clairement
CASTRORVM
Ligne
3 : T,
quelques
lettres
ont
disparu
disparuRIS.
maisAon
encore
leon
jambage
droitledunom
A,CASTRORVM
ledebas
traces
érodées
des
lettres
lavoit
fin de
la ligne
on
lit clairement
;M
Ligne
3 assez
: quelques
lettres
commencement
de
cette
ligne,
lit ensuite
la du
citéT,: et
unles
emporté
par
la cassure,
lettres
RIS. au
A la
fin de la lignedeoncette
lit clairement
CASTRORVM
; Ligne
3 : quelques
lettres
ont
disparu
commencement
ligne,
on
lit
ensuite
le
nom
de
la
cité
:
un
M
emporté
les vestiges d’un I, ensuite ZAE, vient après une écornure qui a emporté la moitié inférieure
ont la
disparu
au commencement
on litvient
ensuite
nomécornure
de la citéqui
emporté
par
cassure,
les vestiges
I,cette
ensuite
ZAE,
après
une
aM
emporté
la
de quatre
lettres
: OTHE,
qu’ild’un
estde
facile
deligne,
restituer
malgré
laleforte
usure
qui :a un
frappé
l’espace
par la inférieure
cassure, les
vestiges
d’un :I,OTHE,
ensuitequ’il
ZAE,
vient
après
une écornure
qui
a emporté
la
moitié
de
quatre
lettres
est
facile
de
restituer
malgré
la
forte
usure
qui
encore conservé (la moitié supérieure des lettres). Le reste du toponyme est suffisamment
inférieure
de quatre
lettres : (la
OTHE,
qu’il
est faciledes
de restituerLe
malgré
usure qui
amoitié
frappé
l’espace
conservé
moitié
supérieure
reste la
duforte
toponyme
est
lisible
: RENA.
Aprèsencore
le nom,
on peut lire
aisément,
malgré lettres).
l’usure, DECRETIS
DECVRIO.
a
frappé
l’espace
encore
conservé
(la
moitié
supérieure
des
lettres).
Le
reste
du
toponyme
est
suffisamment lisible : RENA. Après le nom, on peut lire aisément la formule DECRETIS
Les lettres
NV ont disparu.
Le MAprès
final du
mot
decurionum
est
gravé auladébut
de la ligne 3 du
suffisamment lisible
: RENA.mot
nom,abîmé
on peut
aisément
formule DECRETIS
DECVRIONVM
: le premier
étantleassez
maislire
de lecture
certaine.
fragment
2.
DECVRIONVM
: le premier mot étant assez abîmé mais de lecture certaine.
Fragment 2 : beaucoup mieux conservé que le fragment 1. Ligne 1 : à la fin, après TRIB, on
Fragment
2 : 2beaucoup
conservé
que
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Ligne
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en grande partie disparue est un V ; Ligne 3 : palme haute de 5 cm
la fin
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extruxit.
incisée
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extruxit.
Fig. 9 : Le fragment 1 (Cliché A. Chérif).
Fig. 12
A.Chérif).
Chérif).
Fig.: le
9 : fragment
Le fragment1 1(Cliché
(Cliché A.
Fig. 13
le :fragment
2 (Cliché
Fig.:10
Le fragment
2 (Cliché A.
A. Chérif).
Chérif).
Fig. 10 : Le fragment 2 (Cliché A. Chérif).
121 On retiendra l’abréviation pont(ificis) relativement assez fréquente, mais ce n’est qu’un choix parmi d’autres
Aule terme
toutes
ces remarques,
je proposerai
la donné
transcription
car
mot estde
parfois
abrégé
(P, PONT, PONTIF),
parfois
en toutessuivante
lettres. pour l’ensemble du
Au terme de toutes ces remarques, je proposerai la transcription suivante pour l’ensemble du
texte gravé sur les deux fragments :
texte gravé sur les deux fragments :
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
110
On
110
525
retiendra l’abréviation pont(ificis) relativement assez fréquente, mais ce n’est qu’un choix parmi d’autres
retiendra
l’abréviation
pont(ificis)
relativement
assez
fréquente,
mais
ce n’est qu’un choix parmi d’autres
car On
le mot
est parfois
abrégé (P,
PONT, PONTIF),
parfois
donné
en toutes
lettres.
car le mot est parfois abrégé (P, PONT, PONTIF), parfois donné en toutes lettres.
18
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
Au terme de toutes ces remarques, je propose la transcription suivante pour l’ensemble
du texte gravé sur les deux fragments :
Ligne 1 : [---] Ṃ++ PO[..] MAX • GER MAX TRIB{Q}P̣
Ligne 2 : [..] --- [.]ẠṬRIṢ CẠSTRORVM [..] SENATVS ET PATRIAE TOTIVSQṾ
Ligne 3 : [………….] --- [.]ỊẒAEỌ[.]HẸRENA DẸCṚẸTIS DECVRIO[..]M
PECVNIA PVBLICA EXTRVXIT uac. (Palme).
{q} p
Ligne 1 : [---]ṃ [ax(imi)] po[nt(ificis)] max(imi) ger(manici) max(imi) trib(unicia)
Ligne 2 : [ot(estate) --- m]ạṭriṣ cạstrorum [et] senatus et patriae totiusqụ
Ligne 3 : [e domus diuinae --- M]ịẓaeọ[t]hẹrena dẹcṛẹtis decurio[nu]m pecunia
publica extruxit. (Palme)
- Datation : le titre de Germanicus maximus et les titres de mère des camps, du Sénat et
de la Patrie, laissent entrevoir deux datations possibles : soit Caracalla et Julia Domna, donc
fin septembre 213 – 8 avril 217122, soit Philippe l’Arabe et son épouse Marcia Otacilia Severa,
c’est-à-dire fin 247-249123. Mais si l’on prendra en compte la possibilité de restituer ṃaximi
pontificis maximi, il deviendra possible de privilégier une datation au temps de Caracalla. En
effet, de l’examen minutieux de la chronologie du règne de Philippe l’Arabe entrepris par X.
Loriot, il convient de retenir seulement deux épithètes triomphales qui ont été sans doute
portées par Philippe et son fils : Germanicus maximus et Carpicus maximus124, Par conséquent,
les titres triomphaux de Persicus maximus et Parthicus maximus ont été abusivement attribués
à Philippe dans quelques inscriptions, exclusivement non africaines125. En outre, le cognomen
122 Kienast 1990, p. 162-165 ; Lassère 2005, p. 1014-1015. Il ne peut s’agir de Iulia Mamaea ou de Iulia Maesa,
car Sévère Alexandre n’a jamais été Germanicus maximus.
123 Kienast 1990, p. 197-200 ; Lassère 2005, p. 1019. Philippe l’Arabe est Germanicus maximus vers la fin de
l’année 247.
124 Loriot 1975, p. 792-794. On lira aussi le commentaire d’une inscription grecque de Bulgarie (AE 1975,
765), où apparaissent les titres de Parthicus Adiabenicus. Voir aussi Kienast 1990, p. 197.
125 Comme par exemple dans ces inscriptions trouvées en Pannonie Inférieure : CIL III, 10619 = ILS 507 :
Imp(eratori) Caes(ari) / M(arco) Iul(io) Philippo / P(io) F(elici) Inuicto Aug(usto) / pont(ifici) maximo /
Parthico maximo / trib(unicia) potest(ate) co(n)s(uli) / p(atri) p(atriae) proco(n)s(uli) et / M(arco) Iul(io)
Ph[il]i[pp]o / nobilis[si]mo Ca[es(ari)] / [et M]ar[ciae] Otaci[l]iae / Seuerae sanctissimae Aug(ustae) / coniugi
Aug(usti) n(ostri) matri / castrorum et exercitus / leg(io) II Adi(utrix) [P(ia)] F(idelis) / Philippiana deuota /
num[ini m]aiestati/[que eorum] ; CIL III, 14354, 6 : Imp(eratori) Caes(ari) / M(arco) Iul(io) Philippo / P(io)
F(elici) Maximo / Parthico / maximo / trib(unicia) pot(estate) co(n)s(uli) / p(atri) p(atriae) proco(n)s(uli) et
/ M(arco) Iul(io) Philippo / nobilissimo Caes(ari) / et Marciae Otaciliae / Seuerae sanctissimae / Aug(ustae)
coniugi Aug(usti) n(ostri) / matri castrorum et / exercitu{u}s leg(io) II Ad(iutrix) / P(ia) F(idelis) Philippiana
deuota / [n]umini maiestatique / eorum / [ab] Aq(uinco) m(ilia) p(assuum) / II ; CIL III, 4634 : Imp(eratori)
526
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
Carpicus maximus qui pourrait éventuellement être restitué sur notre inscription, et qui lui
a été peut-être octroyé à la fin de l’année 247, n’est attesté par aucun document africain126.
Quoi qu’il en soit, tout en préférant la fourchette 213-217, la date précise de cette dédicace ne
sera obtenue qu’après la découverte d’autres fragments portant le nom de l’empereur ou des
indications plus explicites sur sa titulature.
Qu’en est-il maintenant du monument auquel appartiennent ces deux fragments ?
S’agissant d’une frise simple (aucun décor sur les différentes faces), cela conviendrait mieux
à une façade d’un monument (un temple par exemple) plutôt qu’à un portique. La longueur
totale des deux fragments après restitution des lettres manquantes pourrait être estimée à
3,30 - 3,40 mètres. Si l’on restitue toute la première ligne dont le P de pot(estate) constituait la
fin avec une titulature développée de Caracalla (mais sans mention des ascendants), précédée
de la formule Pro salute127, on aura affaire à une frise à trois blocs s’étalant sur 10 mètres
environ128. S’il est question d’un temple, on devra ajouter le nom de la divinité au début de
l’inscription, ce qui augmentera encore plus la longueur, mais on n’est pas sûr dans ce cas que
tous les blocs aient les mêmes dimensions. Quelle qu’ait été la longueur exacte de cette frise,
l’édifice, dont les vestiges devraient se trouver à proximité du tronçon de l’enceinte tardive, ne
semble pas avoir manqué d’importance au sein de la parure monumentale de la cité.
Ce nouveau document, si laconique soit-il, nous apporte un éclairage décisif sur la
forme du toponyme antique. Le nom tel qu’il est conservé au début de la troisième ligne
du fragment 1 doit être restitué et fixé sous la forme MIZAEOTHERENA (Fig. 14).
Caes(ari) / M(arco) Iul(io) Philippo / P(io) F(elici) Inuicto Aug(usto) / Part(h)ico maximo / pontifici maximo
/ trib(uniciae) potestatis / p(atri) p(atriae) proco(n)s(uli) a Br(i)g(etione) / m(ilia) p(assuum) XXXIII.
Une inscription de Rome lui attribue le titre de Persicus maximus : CIL VI, 1097 = ILS 506 : Maximo et Inuicto
ac super om[nes fortissimo] / Imp(eratori) Caes(ari) M(arco) Iulio Philippo Pio F[elici Aug(usto) pont(ifici)
max(imo)] / Pers(ico) max(imo) trib(unicia) pot(estate) [co(n)s(uli) desig(nato) p(atri) p(atriae) et] / M(arco)
Iulio Philippo nobilissimo [Caesari principi iuuentutis et] / [Otaciliae Seuerae Aug(ustae) ma]tri [Caes(aris) et
castrorum et] / [exercitus // uot(a) XX annal(ibus) felic(iter).
126 Philippe l’Arabe est le premier empereur à avoir porté le titre de Carpicus maximus ; il est connu notamment
par des monnaies et des papyri, voir Suski 2013, p. 144.
127 Je donnerai comme exemple l’inscription CIL VIII, 25808 = AE 1898, 100 (Furnos Minus) : [Pro sa]lute
Imp(eratoris) Caes(aris) M(arci) Aureli Seueri Antonini Pii Felicis Aug(usti) Part(hici) max(imi) Germ(anici)
max(imi) Brit(annici) max(imi) pontif(icis) [max(imi) trib(unicia) pot(estate) ---] / imp(eratoris) III co(n)
s(ulis) IIII p(atris) p(atriae) proco(n)s(ulis) et Iuliae Domnae Aug(ustae) Piae Felic(is) matris Aug(usti) et
castror(um) et senat(us) et patr(iae) tot[iusque domus diuinae] / [---] Sentius Felix Repostus ob honorem fili(i)
sui L(uci) Senti Felicis Repostiani fl(amonii) p(er)p(etui) siue XIp[rimatus] / et mag(istratus) non administrati
sua pecunia fecit. Le nombre de lettres pour cette première ligne serait aux alentours de 83. Pour Philippe
l’Arabe, partant des exemples reproduits dans la note 114, le nombre de lettres de cette ligne varie entre 46 et
64 (du début du texte jusqu’au P de pot(estate), mais sans compter la formule Pro salute).
128 Deux autres fragments anépigraphes, également taillés dans un calcaire blanc, sont encore conservés dans
la maison voisine, de l’autre côté de l’enceinte tardive ; ils font ensemble 2,66 m. de longueur (chacun
incomplet d’un côté). Cependant, la hauteur est légèrement supérieure (42 au lieu de 41,5 cm) et l’épaisseur
est de l’ordre de 37 et 39 cm (et non 36 cm).
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
527
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
Cette nouvelle donnée confirme le lien établi entre l’adjectif ethnique Mizeoterenenses – ou
plutôt Mizaeotherenenses – cité dans le tarif fiscal de Carthage et le toponyme Mizaeotherena.
On peut s’assurer désormais que l’ensemble de la documentation relative à ce nom ne
concerne que l’antique Bou Jlida.
Qu’en est-il de l’origine de ce toponyme ? Les lettres MIZ entre dans la construction
du nom d’une autre cité de la Proconsulaire, la ciuitas Mizigitanorum129, actuellement Henchir
Aïn Babouch, à 14,5 km à l’ouest de Bou Jlida et à 10 km à l’est de Dougga, sur la voie
Carthage-Théveste130. M. de Vos Raaijmakers et R. Attoui supposent un lien avec les Mazices
et les Amazigh, ils pensent que dans « l’antiquité il y a eu un clan Amazig qui est resté dans la
plaine fertile de la vallée Khalled tandis qu’à l’époque coloniale française, la population locale
a été reléguée vers les montagnes pierreuses »131. Dans l’état présent de nos connaissances,
il est difficile de se résoudre à cette explication. Cependant, peut-on envisager un éventuel
rapprochement avec les Misiciri, un ethnonyme qui comporte une base lexicale en MSKR
(Misiciri) / MZKR (Miziciri)132 ? Là aussi, on est réduit à une simple conjecture qui demeure
tout de même une piste méritant d’être explorée. Somme toute, il semble que nous aurions
affaire tant pour Mizaeotherena que pour Mizigi à des toponymes de construction locale
(libyque ou punique)133.
Fig. 14 : détail du fragment 1 : le nom de la cité (Cliché A. Chérif).
3. L’évolution du statut juridique de Mizaeotherena
Pour traiter de cette question, nous tenons à rappeler que les renseignements
disponibles ne permettent qu’une approche préliminaire et, par conséquent, les résultats qui
en sont issus resteront, jusqu’à plus ample informé, provisoires. Deux étapes principales sont
pour le moment envisageables.
129 AE 1921, 42 = ILAfr. 500 : Ciuitas / Mizigi/tanorum / cum aiacen/tes suos / pas(sus) / MCC.
130 AAT I, f. 33 – Teboursouk au 1/50.000e, n° 220. Desanges et alii 2010, p. 180-181 ; De Vos Raaijmakers,
Attoui 2013, site n° 385, p. 123-124.
131 De Vos Raaijmakers, Attoui 2013, site n° 385, p. 123-124.
132 M’Charek 2018, p. 131.
133 Une épitaphe de Madauros atteste l’anthroponyme Mizguar, CIL VIII, 16899 = ILAlg. I, 2624 : D(iis)
[M(anibus)] s(acrum). / Mizguar / Baricis f(ilius) / p(ius) u(ixit) an/nis XXXI. / H(ic) [s(itus)] e(st).
Voir Jongeling 1994, p. 97.
528
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
3.1. Mizaeotherena, une cité de statut pérégrin
Aucun document épigraphique n’a livré à ce jour la première attestation du mot ciuitas.
Cependant, si l’on accepte le développement fait plus haut, selon lequel la Gens Bacchuiana
mentionnée sous le principat d’Antonin le Pieux était une simple association religieuse, on
peut estimer à bon droit que l’agglomération avait été déjà constituée en ciuitas peregrina
ayant le nom de Mizaeotherena. En admettant cette conclusion, il devient nécessaire, je pense,
d’interpréter autrement le cadre dans lequel s’inscrivaient les libéralités d’Aebutius Saturninus
et Aebutius Victor, fils de Titus Aebutius. Ces Aebutii, qui sont des descendants d’immigrants
italiens134, ont dédié un autel à Silvain Mercure pour la sauvegarde de l’empereur Hadrien135
et ont construit une porte d’entrée pour le temple de Tellus et Cérès136. Il est plus tentant
de croire que cet évergétisme privé eut lieu non pas dans le contexte d’une supposée tribu
Bacchuiana, mais plutôt dans un cadre poliade qui n’est autre que la ciuitas Mizaeotherena. Ces
Aebutii, attestés d’abord en tant que colons à Carthage sous Auguste137, ont dû se retrouver
par la suite dans des agglomérations situées dans son arrière pays138. Dans ce même sens, il
importe aussi de placer au temps de cette ciuitas une inscription fragmentaire dédiée à Saturne
pour le salut d’Antonin le Pieux, que M. Le Glay considérait comme un doublet de la dédicace
à Saturnus Achaiae139. Rappelons enfin que Candidus en tant que membre des onze premiers,
devait être considéré comme l’un des notables de Mizaeotherena encore cité pérégrine.
3.2. La promotion municipale
La cité pérégrine, comme beaucoup d’autres ciuitates, est parvenue à obtenir, au terme d’un
processus de romanisation sur lequel on reviendra prochainement140, le statut municipal.
Le municipe est clairement mentionné dans le fragment épigraphique trouvé à Bou Jlida et
dans la colonne (milliaire) de Testour ; peut-être aussi sur le milliaire dédié à Théodose Ier.
134 Beschaouch 1985, p. 971-972. D’autres Aebutii sont aussi connus à Bou Jlida : Ferchiou 2000, p. 69, a signalé
l’épitaphe inédite de C. Aebutius Pacatus ; deux autres épitaphes, également inédites, que j’ai découvertes
dans le village, mentionent deux Aebutii, un homme et une femme.
135 AE 1986, 718 : « P[ro salut]e I[mp(eratoris)] / Hadriani Aug(usti) /, Siluano deo sac(rum). / Aebuti(i)
Saturninus / et Victor, T(iti) Aebuti(i) f(ilii), ara(m) sua p(ecunia) f(ecerunt) idemque / dedicarunt ». Sur ce
document, on consultera Ferchiou 1979, p. 23-24 et surtout l’interprétation de Beschaouch 1985, p. -972
973. Voir aussi Cadotte 2007, p. 494-495, n° 121.
136 CIL VIII, 12332 = ILS 3959 : Telluri et Cereri Aug(ustis) sac(rum). / Aebuti(i) Saturninus et Victor, T(iti)
Aebuti(i) f(ilius), / ianuam cum suis o[r]namentis suis (sic) s(ua ) p(ecunia) f(ecit), id(em)q(ue) d(edicauit). Cf.
Cadotte 2007, p. 494, n° 120.
137 Lassère 1977, p. 459. On connaît une Aebutia Felicula (CIL VIII, 24863). Voir sur cette épitaphe, Lassère
1973, p. 32 ; Lassère 1977, fig. 17, p. 207.
138 A Thugga entre autres, voir Khanoussi - Maurin (dir.) 2002, p. 647.
139 CIL VIII, 23922 : Saturno [---] / [--- pr]o salute Imp(eratoris) [---] / [Had]riani Anto[nini] / [Aug(usti)] Pi[i
p(atris) p(atriae) ---. Voir Le Glay 1961, p. 124, n° 2.
140 Cf. supra, n. 8.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
529
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
Dans la colonne de Testour, aucun surnom honorifique n’est indiqué sur la pierre. Par contre,
dans l’inscription publiée par N. Ferchiou, à la ligne 2 conservée, l’espace disponible après le
mot municipium laisse entrevoir quatre possibilités de restitution141 :
municipium [Aurelium]
uel
municipium [Aur(elium) Com(modum)]
uel
municipium [Antoninianum]
uel
municipium [Aur(elium) Ant(oninianum)]
- Première solution : dans une communication présentée devant la Commission de
l’Afrique du Nord le 17 novembre 1980, A. Beschaouch a évoqué brièvement la question de la
promotion municipale de notre agglomération en signalant une inscription qui mentionne le
municipium A[---]. Selon l’auteur, « il s’agit donc d’A[urelium] et c’est commode qui est ici le
conditor »142. Nous savons, toutefois, que l’épithète Aurelium seule fait référence à Marc Aurèle143
alors que pour attribuer cette création à Commode, on s’attendra à Aurelium Commodum144.
C’est ainsi que Thuburbo Maius, colonie de Commode, s’intitulait colonia Aurelia Commoda
Thuburbo Maius145 ; et Pupput, également colonie créée par le dernier Antonin, portait le titre
officiel de colonia Aurelia Commoda Pia Felix Augusta Pupput146.
141 Nous avons jugé difficile la restitution Aelium et donc une mutation juridique sous Hadrien. La cité n’a pas
encore atteint le niveau d’intégration qui lui permettra de solliciter une telle promotion. Pour Beschaouch
1979-1980, p. 150, il ne peut s’agir d’« A[elium], à cause des undecimprimi signalés sous Antonin le Pieux.
Mais on sait depuis la publication d’une inscription de Thignica, une dédicace à Neptune pour la sauvegarde
de l’empereur Gallien (AE 2006, 1762), datée de l’année 265 ap. J.-C., que l’undécimprimat a existé dans
cette cité, alors municipe de Septime Sévère et Caracalla (Gascou 2003, p. 241-242).
142 Beschaouch 1979-1980, p. 150.
143 On citera comme exemples le municipium Aurelium (ou Aurelia) Vina (CIL VIII, 959 = 12441) ; le
municipium Aurelium Ureu (AE 1974, 692) et le municipium Aurelium Augustum Segermes (CIL VIII, 11170
et 11172). On renverra sur les cas de Vina et de Segermes à Gascou 1972, p. 142-144 ; Gascou 1982a, p. 195197, et à propos d’Ureu à Beschaouch 1974a, p. 223-228 et 234.
144 Gascou 1972, p. 143 où on peut lire : « l’épithète Commoda ou Commodum (ou encore Commodiana
ou Commodianum) est toujours jointe à Aurelia ou Aurelium dans les noms de colonies et municipes de
Commode, et qu’Aurelium ou Aurelia seul ne peut désigner une création de cet empereur ».
145 CIL VIII, 848 = ILS 498 : [Imp(eratori)] Cae[sari] / M(arco) Antoni[o Gor]/diano diui M(arci) [Anto]/
ni Gordiani nep(oti) diui / Antoni Gordiani so/roris fil(io) Pio Fel(ici) Aug(usto) for/tissimo felicissim[o]
/ pont(ifici) max(imo) trib(unicia) po[t(estate)] / patri patriae proco(n)s(uli) / col(onia) Iulia Au[re]/
lia Com[moda] / Thubu[rbo] / Maius [d(ecreto) d(ecurionum) p(ecunia) p(ublica)]. Voir sur ce document,
Benzina Ben Abdallah 1986, n° 356, p. 135-136. Sur la promotion de Thuburbo Maius, on consultera Gascou
1972, p. 127-129, 162-164 et 178 ; Gascou 1982a, p. 203-204.
146 CIL VIII, 24093 = AE 1899, 123 (= 162) = ILS 6788 : Magno ac fortissi/mo principi / Imp(eratori) Caes(ari)
Liciniano / Licinio Pio Felici / Inuicto Aug(usto) / col(onia) Aurelia Commoda P(ia) F(elix) / Aug(usta) Pupput
numini maies/tatique eius deuotissima. Voir sur ce document, Benzina Ben Abdallah 1986, n° 416, p. 166-167.
530
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
La restitution Aurelium si elle ne devrait être pas exclue, elle nous paraît peu
vraisemblable du fait que la romanisation telle qu’elle est perçue au temps d’Antonin le Pieux,
ne semble pas avoir sensiblement évoluée sous le règne de son successeur.
- Deuxième solution : la restitution Aur(elium) Com(modum), donc une promotion
sous Commode, est probable. L’espace disponible après le mot municipium exclut que les deux
surnoms soient transcrits en toutes lettres, ce qui justifie les abréviations que j’ai retenues, très
courantes d’ailleurs (je viens de citer les exemples de Thuburbo Maius et Pupput).
- Troisième solution : l’épithète Antoninianum, qui attribue naturellement la fondation
du municipe à Caracalla, me semble improbable car elle est trop longue pour la lacune (12 au
lieu de 6 à 8 lettres), tout de même trop courte si l’on songe à une abréviation telle que Antqui est la plus fréquente (voir les exemples illustrant la solution suivante).
- Quatrième solution : j’ai évoqué plus haut l’inscription signalée par A. Beschaouch en
1980 et où est mentionné le municipium A[---]. L’auteur avait admis la restitution A[urelium]
mais il a dû opter quelques années plus tard, en 1985, pour une promotion sous Caracalla147. Le
document n’est pas encore publié, mais nous sommes portés à suivre cet avis en revendiquant
la gratification de la ciuitas Mizaeotherena du statut municipal pour cet empereur. Le choix de
restituer Aur(elium) Ant(oninianum), titres qu’on retrouve dans les titulatures de Carthage148,
de Fornos Minus149 et d’Abbir Maius150, pourrait d’ailleurs être renforcé si l’on accepte que la
frise épigraphe qu’on a déjà présentée est bien datable du règne de Caracalla. En effet, est
encore conservée à la fin de cette inscription (ligne 3) l’indication Mizaeotherena decretis
decurionum pecunia publica extruxit. On a donc affaire à un édifice construit par la cité, et
l’ordo de la cité, contrairement à un formulaire habituel dans les textes épigraphiques, a émis
Sur la promotion de Pupput, on consultera Gascou 1972, p. 166-167 ; Gascou 1982a, p. 205 ; Beschaouch
1997, p. 363-374.
147 Beschaouch 1985, p. 967, n. 2 où on lit : « … je montre d’une part que c’est sous Caracalla que le chef lieu
de la Gens Bacchuiana, collectivité locale de statut pérégrin, a obtenu la promotion municipale, d’autre part
que ce municipe était doté du droit latin majeur ». L’octroi de ce droit est déduit d’un fragment d’inscription
encore inédit que l’auteur a signalé dans une note antérieure (Beschaouch 1979-1980, p. 150) ; il s’agit d’une
dédicace à Jupiter datée d’Elagabal ou de Sévère Alexandre ; elle porte entre autres les lettres suivantes :
SCR[…]DD, qu’il propose de lire [decurione]s c(iues) R(omani) DD.
148 Cf. note suivante.
149 CIL VIII, 25808b = AE 1909, 162 = ILS 9403 (Henchir Msaadine) : L(ucio) Octauio Felici Octa/uiano
decurioni / col(oniae) Iul(iae) Aur(eliae) Ant(oninianae) Kart(haginis) / flamini diui Pii magis/tro sacrorum
Cerealium / anni CCLXXVI professori / aedilitatis patrono et / curatori iterum munici/pii Aureli Antoniniani
Fur/nit(anorum) minor(um) ob insignem / iustitiam et beneuolentiam / eius uniuersus populus / ex aere conlato
statuam / posuit ob cuius dedicatio/nem ipse ludos scaenicos / et epulum populo dedit / et gymnasium / l(ocus)
d(atus) d(ecreto) d(ecurionum). Voir Gascou 1982b, p. 281-282 ; Gascou 1996, p. 144-152 ; Desanges et alii
2010, p. 146-147.
150 AE 1975, 872 (Abbir Maius) : P(ublio) Petronio Victorico / laudatissimo uiro ab splen/didissimo ordine
col(oniae) Aurel(iae) Ant(oninianae) Ka/rt(haginis) et municipii Aur(eli) Ant(oniniani) Abbir(itani) Mai(oris)
im/munitate consecuto… (Voir Beschaouch 1974b, p. 118-123).
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
531
GENS BACCHUIANA OU MIZAEOTHERENA ? A PROPOS DU NOM DE BOU JLIDA DANS
L’ANTIQUITÉ (Région de Bou Arada – El-Aroussa, Tunisie)
non pas un décret mais plusieurs décrets. Certes nous manquons de parallèles pour expliquer
cet emploi151, mais il est peut-être possible d’envisager une interprétation de l’usage de ce
pluriel dans une petite cité comme la notre. Peut-on imaginer que cet énoncé, par ailleurs
complètement inaccoutumé, constituerait l’indice d’un évènement de grande portée
pour l’histoire de la communauté civique ? L’ordo decurionum n’aurait-il pas été amené à
édicter « exceptionnellement » plusieurs mesures pour commémorer un changement
constitutionnel à Mizaeotherena, en l’occurrence le passage d’une ciuitas au rang de municipe ?
Ce raisonnement n’est pas superflu, mais il n’est pas non plus démontrable pour le moment.
Le monument dont il est question dans l’inscription ne correspondrait-il pas peut-être au
capitole, lieu de culte de la triade capitoline152 ? Ou s’agit-il d’une toute autre construction qu’il
faudrait intégrer dans un projet édilitaire mis en place pour adapter la parure monumentale
au nouveau statut ? Nous ne saurions élucider ces questions tant que les lacunes dans notre
documentation demeurent grandes. Nous espérons que nos recherches futures apporteront
plus d’éléments, épigraphiques et archéologiques, permettant d’aborder les problèmes relatifs
à l’évolution juridique et urbanistique de cette ville avec plus de clarté et de sûreté.
Conclusion
On retiendra au terme de ce développement une première donnée maintenant
certaine : la forme du toponyme antique de Bou Jlida est Mizaeotherena, qui doit remplacer
désormais sur nos cartes celle de Mizeoter. C’est ce toponyme qui semble avoir été porté
par la collectivité au moment de la construction d’un temple à Saturnus Achaiae au temps
d’Antonin le Pieux. Ce nom n’apparaît pas dans le texte de la dédicace car il s’agit d’un acte
d’évergétisme privé. Cette constatation permet d’aboutir à une deuxième donnée : le terme
gens est employé ici non pas au sens tribal, mais pour désigner un groupe d’individus réunis
dans une association religieuse spécialisée dans le culte de Bacchus.
Si on est en mesure d’adhérer à présent à l’interprétation qui retire la gens Bacchuiana du
catalogue des tribus africaines, on ne peut néanmoins prétendre l’élucidation de la question
du fait tribal dans l’arrière pays de Carthage et plus particulièrement dans la région de Bou
Arada – El-Aroussa. J. Peyras dénie l’existence de populations non sédentaires dans cette
151 Pour l’Afrique, d’après une recherche effectuée à partir de la banque de données allemande « EpigraphikDatenbank Clauss / Slaby », ce pluriel est employé dans deux inscriptions : IRT 565 = AE 1952, 173 (Lepcis
Magna) : « … ordo ciuitatis Lepcimag(nensis) / cum populo statuam marmorem / ob haec merita decretis et
suf(f)ragiis / concin{n}entibus conlocauit » (Date : entre 355 et 378, voir Chastagnol 1967, p. 127 et 129) ; AE
1908, 68 = ILAlg. I, 2108 (Madauros) : « … ab splendido ordin[e] decretis titulis ded[icauit] ». La restauration
d’un édifice balnéaire en 407-408, sous le proconsulat de Pompeius Proculus, au temps du règne d’Arcadius,
Honorius et Théodose II (Voir Lepelley 1981, p. 131).
152 Kallala 1992, p. 185-196, a d’ailleurs démontré, du moins pour l’Afrique, qu’il n’existe aucun lien entre
l’érection d’un temple capitolin et la transformation juridique de la cité.
532
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
Ali CHÉRIF
région de la Proconsulaire au IIe siècle153. Il a sans doute raison en ce qui concerne les deux
attestations de Thignica et celle de la région d’Aradi, qui n’ont aucune signification « tribale »,
mais le problème de la gens Galliana n’est pas encore tranché.
Nous tenons en outre à insister sur la séparation qu’il faudrait désormais établir entre
l’activité religieuse de la gens Bacchuiana et l’undecimprimat. Candidus est undecimprimatus
au sein d’une cité, qui est, selon nous, Mizaeotherena. Si l’on se résout à cette conclusion, cela
permettra d’harmoniser les cadres juridiques dans lesquels apparaissent les undecimprimi :
c’est toujours pour la Proconsulaire un contexte poliade154. Cette cité pérégrine obtint la
dignité municipale au début du IIIe siècle, Caracalla en est probablement l’auteur. L’argument
percutant nous manque encore, mais l’exploration que nous menons dans le village de Bou
Jlida peut nous apporter du nouveau à tout moment.
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153 Peyras 1995, p. 277 et 289-290.
154 Le problème de la gens Saboidum reste ouvert.
L’exposition «Die Numider» 40 ans après. Bilan et perspectives des recherches sur les Numides (p. 501 - 538)
533
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Journal of Roman Archaeology 36 (2023), 433–453
doi:10.1017/S1047759423000466
L’amphithéâtre de Lepti Minus:
un acte de munificence locale
Lotfi Naddari1 and Najib Ben Lazreg2
1
2
University of Tunis <lotfinaddari@gmail.com>
Institut National du Patrimoine, Tunis <najibbenlazreg@gmail.com>
Abstract: A text recently discovered in the surroundings of Lepti Minus (Lamta, in the Tunisian
Sahel), inscribed on the main face of a statue base, sheds substantial light on the construction of
the amphitheater of the city: the context for its construction, the nature of its financing, and the
identity of the benefactors who took charge of it. It consists of a public hommage paid by the
populus Leptitanorum to L. Octavius Felix, a local notable, member of the equestrian order, coopted as patron of the city. The text provides interesting information about onomastic and social
considerations, the equestrian career of this local notable, L. Octavius Felix, primipilaris in the
prefecture of the camp of the Legio VII Gemina in Spain, and the management of the construction
of the amphitheatre.
Keywords: Lepti Minus, local notable, equestrian order, primipilus, praefectus castrorum, patronage,
amphitheater
Résumé: Un texte récemment mis au jour dans les environs de Lepti Minus (Lamta, dans le Sahel
tunisien), gravé sur sur la face principale d’une base de statue, apporte un éclairage substantiel
concernant l’édification de l’amphithéâtre de la ville: le contexte d‘édification, la nature du
financement et l’identité des évergètes qui l‘ont pris en charge. Il s’agit donc d’un hommage
public que le populus Leptitanorum a rendu à L. Octauius Felix, un notable local, membre de l’ordre
équestre, coopté en qualité de patron de la cité. Le texte présente ainsi des centres d’intérêt
multiples: des considérations onomastiques et sociales, le cursus équestre du notable laptitain,
L. Octauius Felix, du primipilat, à la préfecture du camp de la Legio VII Gemina, en Espagne, et a
prise en charge de la construction de l’amphithéâtre.
Mots-clès: Lepti Minus, notable local, ordre équestre, primipile, praefectus castrorum, patronat,
amphithéâtre
Les fouilles archéologiques qui ont été menées régulièrement de 1990 à 2010 dans les
faubourgs est de Lepti Minus, par l’Institut national du patrimoine (Tunisie) ou en
collaboration avec les universités du Michigan et du Manitoba, sous forme
d’interventions de sauvetage, ont eu à traiter surtout de secteurs de nécropoles et de
fours de potiers romains. Ces mêmes travaux ont compris des prospections qui ont
affiné nos connaissances concernant le tissu urbain, son évolution à travers les âges et
d’établir la chronologie des différentes phases d’occupation du site depuis l’époque
punique1 jusqu’à la fin de la période byzantine, avec une apogée aux IIe–IIIe s. Les
différents travaux, anciens ou récents,2 entrepris dans cette ville portuaire majeure du
Byzacium, ont permis de localiser divers vestiges puniques, romains et post-romains (le
forum, des temples, des aqueducs, des thermes, le théâtre, l’amphithéâtre, la jetée du
port, des cuves de salaisons, une église, une citadelle) et d’identifier des zones
suburbaines composées de nécropoles et de quartiers artisanaux.3 Néanmoins, comme
1
2
3
Pour la période punique voir Ben Younes et Sghaïer 2018.
Voir Leptiminus 1, 2, 3 et 4.
Mattingly et Stone 2011, 276, fig. 7,3.
© The Author(s), 2024. Published by Cambridge University Press
https://doi.org/10.1017/S1047759423000466 Published online by Cambridge University Press
433
L. Naddari and N. Ben Lazreg
beaucoup d’autres sites antiques, surtout côtiers, Lepti Minus a souffert de toutes sortes de
destructions, allant de l’exploitation de ses pierres et de ses marbres au pillage de ses
vestiges. De ce fait, le site présente actuellement un faciès arasé et aux vestiges souvent
inintelligibles. Ainsi, outre le fait que ses édifices sont enfouis ou très effacés, on ne dispose
pas de témoignages épigraphiques permettant de connaître les conditions et le contexte de
leur édification, leur coût, et les noms de leurs donateurs. Le dossier épigraphique,
relativement peu fourni, composé de bases honorifiques ou d’épitaphes, n’apporte aucun
éclairage à cet égard.4 Tout ceci fait ressortir l’importance de l’inscription dont il est question
ici, qui se rapporte à un acte d’évergétisme lié à la construction de l’amphithéâtre.
Ce monument en mauvais état de conservation et que partiellement visible a été peu
étudié. Il est aménagé dans une petite colline située sur la rive gauche de l’oued Bou
Hjar, à la périphérie occidentale de Lepti Minus (Fig. 1).5 Une brève notice, qui passe en
revue les différents descriptifs sommaires qui lui furent réservés, est consignée dans le
premier volume de la série des rapports de fouilles publiés jusque-ici.6 Aujourd’hui,
dans ce qui subsiste de la cavea, on peut voir quelques caissons construits qui ont servi
d’assises aux gradins actuellement disparus et l’arène, dont la surface, non dégagée, est
occupée par des oliviers multi-centenaires (Figs. 2–3). Dans son ouvrage sur les
amphithéâtres du monde romain, Jean-Claude Golvin le classe parmi les petits
amphithéâtres d’Afrique, comparable à ceux de Sufetula et d’Acholla, datables
probablement, mais sans argument décisif, du IIe s. ap. J.-C.7
Un texte épigraphique mis au jour en juillet 2009 dans un chantier de construction d’une
usine à El-Jibsa,8 une zone rurale alors enclavée dans les faubourgs nord-est de Ksar Helal,
non loin de Sayyada, et à 5 km au sud-est de Lamta, apporte un précieux éclairage sur le
contexte de l’édification de ce monument de spectacle, la nature de son financement et
l’identité des évergètes (Figs. 4–6). Il figure sur la face principale du dé d’une base de
statue, en bon état de conservation, de 154 cm de hauteur, 77 cm de largeur et 49 cm
d’épaisseur, taillée dans une pierre calcaire jaunâtre de bonne facture. Convertie
tardivement en contrepoids de pressoir,9 elle est pourvue d’une corniche de couronnement
et d’une base moulurée, dans lesquelles sont taillées latéralement deux encoches en queue
d’aronde.10 Des trous de scellement de la statue, aujourd’hui disparue, sont encore visibles
sur la face supérieure. Ainsi, de par sa forme, sa taille et la teneur du texte gravé, cette base
a dû se trouver dans un espace bien fréquenté, le forum de la ville vraisemblablement.
4
5
6
7
8
9
10
Benzina Ben Abdallah 1986, n° 97; Aounallah et al. 2007, 151–66; Aounallah et al. 2019, 104–8.
Actuellement le monument est connu sous le nom de Hofrat al-Sijn (« la fosse de la prison »), un
toponyme qui rappelle celui de l’amphithéâtre de Thuburbo Maius, dit « al-Habs » (« la
prison »). Voir à ce sujet Slim 1984, 143 n. 38; Lachaux 1979, 84–85.
Leptiminus 1, 42–48. Voir également Slim 1984, 143, n° 7; Golvin 1988, 132, n° 114, pl. XVI, n° 2.
Voir en dernier lieu Montali 2015, 378–82.
Il mesure 81 x 62 m; son arène est de 45 x 26 m. Voir Golvin 1988, 132.
Le site El-Jibsa correspond probablement au champ de ruines indiqué sur la carte 1/50.000e de
Moknine (LXVI) par le sigle RR portant le nom de Ben Amria: 262.500 N; 589.650 E (Institut
géographique national, Paris, 1931).
Pour les pierres inscrites converties en éléments de pressoir voir Grira 2011.
L’ébauche d’une rainure longitudinale pour relier les deux encoches latérales est encore visible
sur la face principale, en haut et en bas du champ épigraphique. Une autre est partiellement
aménagée dans la face opposée.
434
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L’amphithéâtre de Lepti Minus
Fig. 1. Plan de la ville de Lepti Minus. (Plan de D. Stone.)
Le texte, qui court sur 13 lignes, est gravé à l’intérieur d’un champ épigraphique
mouluré, de 80 cm de longueur et 53 cm de largeur, lui-même en bon état de
conservation, exception faite des séquelles laissées par les dents d’une pelle mécanique
qui ont fait disparaître quelques lettres des six premières lignes, facilement restituables.
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L. Naddari and N. Ben Lazreg
Fig. 2. Vue aérienne de l’amphithéâtre de Lepti Minus. (Google Earth.)
Fig. 3. Plan de l’amphithéâtre de Lepti Minus. (D’après Golvin, 1998, pl. XVI, n° 2.)
436
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L’amphithéâtre de Lepti Minus
Fig. 4. La base en l’honneur de L. Octavius Felix.
(Cliché des auteurs.)
Fig. 5. Relevé de la base en l’honneur de
L. Octavius Felix. (Relevé des auteurs.)
Le texte, disposé selon l’axe de symétrie verticale, aligne des capitales carrées parfaitement
tracées, de hauteur variable: 4 cm pour la première ligne, 3,2 cm pour la dernière et 1,8 cm
pour le reste. Une ligature est attestée à la fin de la huitième ligne, IP dans REIP:
L OCTAVIO Q F
˙
[..]IRINA FELICI
P[. ..]AEFECTO CASTROR
LEG[..]NIS VII GEM
OB MVN[.]FICENTIAM
QVAM I[.] ET M OCTAVIVS
IVLIANVS FRATE[.] EIVS
SVPER CETERA QVAE REIP
SVAE CONTVLERVNT
AMPHITHEATRVM QVO
QVE S P F
POPVLVS LEPTITAN
PATRONO
437
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L. Naddari and N. Ben Lazreg
Fig. 6. Le texte épigraphique. (Cliché des auteurs.)
[L(ucio)] Octauio, Q(uinti) f(ilio), | [Qu]irina (tribu), Felici | p(rimi)[p(ilo)], pr]
aefecto castror(um) | Leg[io]nis VII Gem(inae), | ob mun[i]ficentiam, | quam i
[s] et M(arcus) Octauius | Iulianus, frate[r] eius, | super cetera quae reip
(ublicae) | suae contulerunt, | amphitheatrum quo/que s(ua) p(ecunia) f
(ecerunt). | Populus Leptitan(orum) | patrono.
A Lucius Octauius Felix, fils de Quintus, tribule de la Quirina, primipile, préfet du
camp de la VIIe Légion Gemina, pour la munificence que, lui et son frère Marcus
Octauius Iulianus, outre les contributions apportées à la caisse municipale, ils ont
aussi fait (construire) l’amphithéâtre à leurs frais, le populus des Leptitains (a fait
faire ceci) à (son) patron.
Il importe de souligner l’absence de critères fiables pour établir une datation précise
du texte. Cependant, faisant référence au populus leptitanorum, ce texte doit être
postérieur à la promotion de la cité au rang de colonie sous le règne de Trajan. Les
données paléographiques (l’emploi de la capitale carrée) et le contexte général du texte
accréditent en fait la datation proposée par Golvin pour l’édification de l’amphithéâtre
de la ville. En effet, sur la base de quelques détails architecturaux, il propose de placer
438
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L’amphithéâtre de Lepti Minus
son édification au IIe s. ap. J.-C.11 Mais, il est tout à fait légitime que son édification soit
placée entre la deuxième moitié du IIe et la première moitié du IIIe s.
Il s’agit donc d’un hommage public que le populus de Lepti Minus a rendu à L. Octavius
Felix, un notable local, membre de l’ordre équestre, coopté en qualité de patron de la cité.
Outre la mention des contributions apportées conjointement avec son frère M. Octavius
Iulianus au trésor public de la cité, certes des sommes d’argent dépensées dans des
projets divers, le texte a l’originalité de révéler un cas d’évergétisme municipal: la
construction de l’amphithéâtre.
Considérations onomastiques et sociales
L’inscription fait connaître deux membres de la famille des Octavii de Lepti Minus:
L. Octavius Felix et son frère M. Octavius Iulianus. En dépit de l’inscription du
premier dans la tribu Quirina, l’expression reip(ublicae) suae (l. 9) confirme leur origine
leptitaine dans une ville marquée par l’importance de la tribu Papiria en conséquence
de sa promotion au rang de colonie sous le règne de Trajan.12 Ici, c’est la deuxième
attestation de la tribu Quirina dans le tableau onomastique de cette ville, dans
laquelle Oc[tavius?] Catu[linus?], membre de la famille des Octavii probablement,
lui-même patron de la cité, est déjà inscrit. Sa séquence onomastique est révélée par
l’hommage public que la iuuentus de la curia Ulpia lui a rendu.13 Un autre membre de
la même famille, L. Octavius Fortunatus, dont le nom est révélé par le texte
d’une base de statue tout récemment mise au jour, est au contraire tribule de la
Papiria.14 Soulignons à cet égard que, parallèlement à la Quirina et la Papiria,15
celle de l’empereur Trajan, alors conditor coloniae, trois autres tribus romaines sont
attestées dans le dossier épigraphique de cette ville: la Palatina,16 la Claudia17 et la
Galeria.18
Ainsi, des membres de la famille des Octavii, tribules de la Quirina et de la Papiria,
semblent avoir occupés une place de premier ordre dans la société leptitaine. En effet,
alors que L. Octavius Felix a parcouru une brillante carrière militaire, les autres se sont
contentés d’un cursus strictement municipal. [.] Oc[tavius?] Catu[linus?] fut
respectivement édile, questeur, pontife, préfet juridictionnel et antistes sacrorum.19 Pour
11
12
13
14
15
16
17
18
19
Golvin 1988, 132.
Gascou 1972b; Gascou 1972a, 80–81; Gascou 1982, 170; Le Bohec 1989b; Beschaouch 1991;
Dupuis 1992.
CIL VIII 22901 = IlTun. 138 et 139 = AE 1896, 32 = AE 1968, 630 = Aounallah et al. 2007, n° 3.
Aounallah 2021.
CIL VIII 22903 = IlTun. 138 et 140 = Aounallah et al. 2007, n° 5. La tribu Papiria figure également
dans le texte d’une base de statue convertie en contrepoids d’huilerie récemment découverte au
sud-ouest de la ville de Lamta. Voir Aounallah 2021: L(ucio) Octauio L(ucii) f(ilio), Pap(iria) |
Fortunato, flam(ini) | Augg(ustorum) IIuir(o) ob fi|dem in re publi|ca et instantia | operis templi |
cur(iae) uniuersae.
CIL VIII 58 = CIL VIII 11114.
CIL VIII 22903 = ILS 9088 = IlTun. 137 = AE 1896, 94.
IlAfr. 52.
CIL VIII 22901 = IlTun. 138 et 139 = AE 1896, 32 = AE 1968, 630 = Aounallah et al. 2007, n° 3.
439
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L. Naddari and N. Ben Lazreg
sa part, L. Octavius Fortunatus est arrivé au faîte des honneurs municipaux. Il fut duumuir
avant d’être flamine chargé du culte de deux Augustes.20
L’indication de la tribu Quirina, sans mettre en cause l’origine leptitaine de L. Octavius
Felix, ni de son frère, ni de [.] Oc[tavius?] Catu[linus?], pourrait suggérer une obtention de
la citoyenneté romaine bien avant la promotion de la ville au statut de colonie sous Trajan,
peut-être durant l’époque flavienne. Mais rien n’empêche de les tenir, tout comme les
autres citoyens, tribules de la Palatina, de la Claudia et de la Galeria, pour des
descendants d’Italiens, peut-être membres d’un conuentus ciuium romanorum antérieur au
règne de César, et qui serait contemporain de ceux des villes voisines d’Hadrumetum et
de Thapsus.21 En fait, par l’indication de ces tribus romaines, ces citoyens manifestent
une distinction de prestige par rapport aux nouveaux citoyens, tribules de la Papiria,
fraîchement honorés de la ciuitas romana en conséquence de la promotion de la ville au
statut de colonie.
Le cursus de L. Octavius Felix, du primipilat, à la préfecture du camp de la Legio VII
Gemina, en Espagne, au patronat de la cité de Lepti Minus
Le texte de la dédicace retrace seulement le cursus de L. Octavius Felix, coopté en qualité
de patron de la cité. Mais rien n’empêche d’imaginer l’érection d’une base jumelle en
l’honneur de M. Octavius Iulianus pour afficher en détail son cursus, peut-être strictement
municipal, et d’y voir également un patronus de la même cité.22 En dressant solennellement
une statue à L. Octavius Felix, le populus leptitanorum, en tant que corps municipal, lui
exprime sa reconnaissance et perpétue son cursus militaire et le souvenir de l’ensemble des
libéralités et des services dont la cité a bénéficiée, tout en mettant en vedette la prise en
charge, avec son frère, la construction de l’amphithéâtre de la ville.
Sans avoir accompli une carrière équestre procuratorienne,23 il semble en avoir été
admis par le biais du primipilat. Il fut en effet enrôlé dans la Legio VII Gemina, qui
tenait garnison à Legio (Léon) en Espagne Citérieure (la Tarraconaise) depuis son
installation sous Vespasien jusqu’au règne de Dioclétien, avec un séjour africain pour
certaines de ses vexillations.24 Il n’est donc pas étonnant de voir ici un de ses officiers
recruté au sein d’une cité africaine. L. Octavius Felix y exerça deux charges mentionnées
ici successivement dans l’ordre direct. Il fut d’abord primus pilus avant d’être promu au
poste de praefectus castrorum. C’est un cas de promotion habituelle dans le cursus des
soldats des légions romaines. Le poste de praefectus castrorum était généralement ouvert
aux anciens centurions qui avaient déjà servi comme primipiles. En fait, venant prendre
place parmi les primipiles de cette légion (Tab. 1),25 il était alors le premier centurion de
20
21
22
23
24
25
Aounallah 2021.
Gascou 1972b, 141.
Le dossier épigraphique africain, au-delà des gouverneurs et de leurs légats choisis comme
patrons de cités, révèle des cas de patrons cooptés en même temps dans la même famille.
Voir à titre d’exemple: CIL VIII 11026, 11027 et 11030 (Gigthis); IlTun. 722 = AE 1942–43, 103
(Thuburbo Maius); IlTun. 250 = AE 1932, 34 = AE 1950, 83 (Pheradi Maius); CIL VIII 1181 = AE
2017, 1666 (Utica).
Pflaum 1970, 355–81.
Le Bohec 1989a, 379; Le Roux 2011, 287–343 (en particulier n. 49); Le Roux 2000.
Dobson 1978, 357.
440
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Tableau 1.
Liste des primipiles de la Legio VII Gemina.
Nom
L. Atilius Verus
P. Aelius
Marcellus
Origo
Date
Cursus
-
69
-
Apulum
-
– Centurio Frumentario
– Sub princeps peregrinorum
Référence
AE 1912, 188 (Oescus); Tac. Hist. 3,22,8
(= Dobson 1978, 83)
CIL XI 5215 = ILS 2650 (Fulginiae); CIL III 7795
(Apulum); CIL III 1181 (Apulum)
(= Dobson 1978, 226)
– Adlectus ad munera praefectorum legionum VII
Clau. et primae Adiutricis
– V(ir) e(gregius).
– Flamen luculari Laurenti Lauinati
– Patronus et decurio coloniae Apulesium
– Patronus ciuitatium Foro flaminensium,
Fulginiatium itemque Iguuinorum
L. Oppius
Secundus
-
[---]
-
-
– Primus pilus Leg. VII Geminae,
– Praef. Kastrorum Leg. VII C.P. F.
234
– P(rimus) p(ilus) Leg. VII Geminae Seuerianae
Alexandrianae Piae Felicis,
CIL III 14514 (Viminacium)
(= Dobson 1978, 99)
CIL II 2664 (Legio)
(= Dobson 1978, 202)
– Ex corniculario praefectorum praetorio
L. Octavius
Felix
Lepti
Minus
e
e
ère
2 moitié du II –1
moitié du IIIe s.
– Primus pilus
– Praefectus castrorum
Texte ci-présenté
L’amphithéâtre de Lepti Minus
– Ad status et primus pilus leg. VIII Gem. Piae
Felicis
441
L. Naddari and N. Ben Lazreg
Tableau 2.
Liste des praefecti Legionis VII Geminae.
Origo
Nom
Minicius Iustus Italicus
Valerius
Heraclianus
?
L. Octavius
Felix
Lepti
Minus
Cursus
Date
-
- Princeps Leg. XXII
Deiotarianae?
69
- Praefectus castrororum
Leg. VII Geminae
91
- Cos(?)
Fin du IIIe s.
- Vir perfectissimus
Référence
Dobson 1978, 85 = Le
Roux 1982, 295, n° 21
CIL V 5835
- Praefectus Leg. VII
Geminae
2e moitié du IIe–1ère
moitié du IIIe s.
- Primus pilus Leg. VII
Geminae (?)
Texte ci-présenté
- Praefectus castror. Leg.
VII Geminae
la première cohorte de la légion pour une période donnée. Son grade de praefectus
castrorum lui confère un haut rang parmi les officiers de l’état-major de cette légion. Il
était alors chargé de son équipement, de l’entretien des constructions, notamment les
remparts, de la bonne organisation des milites et de la qualité de leurs entrainements et
disponibilités. Ainsi, L. Octavius Felix vient s’ajouter à la liste très réduite des praefecti
castrorum Legionis VII Geminae connus jusque-là par la documentation épigraphique et
littéraire (Tab. 2).26 Le premier, Minicius Iustus, dont l’origine est inconnue, fut princeps d’une
légion d’Egypte puis praefectus castrorum de la Legio VII Gemina, en 69, au début du règne
de Vespasien.27 Le second, Valerius Heraclianus, membre de l’ordre équestre, est mentionné
par une épitaphe mutilée provenant de Mediolanum (Milan).28 De datation incertaine, et en
rappelant que Valerius Heraclianus fut egregius uir, praefectus Legionis VII Geminae Spaniae, elle
souligne l’évolution du cursus du commandement militaire conformément aux réformes de
Gallien,29 selon lesquelles le praefectus legionis occupa le haut grade dans les légions romaines;
les legati Augusti propraetore et les tribuni laticlauii ayant été supprimés.
L’hommage rendu à L. Octavius Felix a l’intérêt d’être plus explicite quant à son cursus
et à son devenir en rapportant sa cooptation en qualité de patronus, certes en raison d’un
cursus militaire de valeur, et de son engagement direct dans la vie civique de sa ville
d’origine, Lepti Minus. Toutefois, notre texte est moins clair quant à la progression et au
déroulement de ses années de service ou de ses stipendia. En effet, on ignore tout à
propos du début de son service militaire, accompli peut-être dans d’autres officia ou
dans d’autres garnisons.30 Le commanditaire de la dédicace, le populus Leptitanorum, s’est
26
27
28
29
30
Pour la liste des praefecti castrorum, voir Devijver 1976–77, A 150, A 163, C 258, I 13, O 19, V 74.
Dobson 1978, 85, 209.
CIL V 5835 = Le Roux 1982, 384 n. 115.
Le Roux 1982, 384.
Pour l’origine géographique et sociale et les types de carrières des centurions de la Legio VII
Gemina, voir Le Roux 2011.
442
https://doi.org/10.1017/S1047759423000466 Published online by Cambridge University Press
L’amphithéâtre de Lepti Minus
Tableau 3.
Liste des Leptitani Minores dans les légions romaines (Lassère 1977, 637).
Nom
Date
[---] Mariolus
Q. Caecilius
Cerealis
M. Fabius Sucessus
L. Fannius Fuscus
[. F]lavius Geta
L. Iulius
Aemilianus
[.] Iunius Annianus
M. Scribonius
Festus
[---]
[---]uinus
(prétorien)
M. Aemilius
Respectus
C. Arissius Rogatus
[---] Lep(tis Minus/
Magna)
[---] Lep(tis Minus/
Magna)
[--- Cr]escens (Lep
(ti Minus/Magna)
L. Octavius Felix
Légion
Référence
109 ap. J.-C.
En Égypte
Honorés de l’honesta Legio II Traiana Fortis
(Nicopolis, Égypte)
missio en 157 ap.
J.-C.
CIL III 13583
CBI 733 = AE 1955, 238 = AE
1969–70, 633 = AE 1999, 80 =
AE 2012, 1806
Milieu du IIe s.
À Rome
CIL VI 32623, 15
Début du IIe s.
Legio III Aug.
(Lambaesis)
CIL VIII 58 = 11114
3e quart du IIe s.
Fin du IIe–IIIe s.
AE 2003, 1890 = AE 1992, 1867a
= AE 1989, 882 = AE 1987, 1063
CIL VIII 18087
Fin du IIe–IIIe s.
CIL VIII 18087
Fin du IIe–IIIe s.
AE 1992, 1872 = AE 1917–18, 29
2e moitié du IIe–1ère
moitié du IIIe s.
Legio VII Gemina
Texte ci-présenté
contenté de mettre en vedette les deux postes les plus prestigieux, ceux accomplis dans la
Legio VII Gemina. De tels détails étaient habituellement révélés par des documents
épigraphiques d’autres primipiles ou praefecti castrorum.31
Ancien primipile et praefectus castrorum legionis VII Geminae, L. Octavius Felix vient
également enrichir le dossier des milites originaires de Lepti Minus (Tab. 3). Certains,
qui avaient servi dans la Legio II Traiana Fortis, stationnée à Nicopolis, en Égypte,
furent honorés de l’honesta missio en l’année 157, l’année vicennale de l’empereur
Antonin le Pieux.32 Un autre leptitain, dont on ignore le nom, figure parmi la liste des
membres d’une cohorte prétorienne ( praetoriani), mentionnés par une inscription mutilée
de Rome du milieu du IIe s. ap. J.-C.33 D’autres, au nombre de quatre, ont été enrôlés
dans la Legio III Augusta, stationnée à Lambaesis, en Numidie. Toutefois, alors que
31
32
33
C’est le cas de C. Caesius Silvester dont le cursus est révélé par une inscription du milieu du IIe
s. ap. J.-C. (CIL XI 5696 = CBI 876 = AE 2013, 475). Après le poste de beneficiarius, il fut promu
comme euocatus Augusti, puis centurion dans cinq légions, puis primus pilus avant d’occuper
le poste praefectus castrorum de la Legio IIII Flavia Felix.
CBI 733 = AE 1955, 238 = AE 1969/1970, 633 = AE 1999, 80 = AE 2012, 1806. Sur la concordance
entre la démobilisation des soldats des armées romaines et les fêtes décennales et vicennales
de l’empereur Antonin le Pieux, voir Naddari 2015, 102.
CIL VI 32623, 15.
443
https://doi.org/10.1017/S1047759423000466 Published online by Cambridge University Press
L. Naddari and N. Ben Lazreg
Tableau 4.
Milites legionis VII Geminae d’origine africaine.
Nom
Origine
M. Claudius
Restitutus
C. Postumius
Africanus
[. A]vitius
Rufus
Q. Geminius
Sabinus
Service Leg. VII
Gem.
Date
Cirta
Tribunus
Ammaedara
Tribunus
Sabratha
Vicus Annaeus
Tribunus
militum
Centurio
L. Mantius
Hispanus
C. Sulgius
Caecilianus
Lambaesis
Centurio
Tuccabor
Centurio
P. Aufidius
Exoratus
L. Octavius
Felix
Africain?
Centurio
Lepti Minus
- Primus pilus, 2e moitié du IIe–
- Praefectus
1ère moitié du
castrorum
IIIe s.
Legatus
162–66
Augusti
Q. Tullius
Maximus
Afrique
proconsulaire
Réf.
Sous Hadrien ou CIL VIII 7039 = IlAlg. II, 1, 665
Antonin
= ILS 1437
160–80
AE 1988, 1119 = AE 2014, 1454
= AE 2018, 1859
2e moitié du IIe s. IRT 96 = AE 1955, 228
79–97
CIL VIII 825 = 12232 = 23841 =
IlTun. 689
IlTun. 778 = AE 1923, 28 = AE
1950, 57 = AE 2008, 16 = AE
2012, 1875
2e moitié du IIe s. CIL VIII 2938
Sous Septime
Sévère ou
Caracalla
100–30
CIL VIII 1322 = 14854 = ILS
2764 = IlTun. 1287 = AE 1937,
116 = AE 1956, 11
AE 1966, 209
Texte ci-présenté
CIL II 2660a–d
l’origine leptitaine (Lepti Minus) est certaine pour les deux premiers,34 elle reste
hypothétique pour les deux autres, en raison de l’indication de l’origo qui se limite à
l’abréviation LEP, laquelle fait également songer à Lepcis Magna.35
D’autre part, L. Octavius Felix s’ajoute à liste de huit milites africains enrôlés dans la
Legio VII Gemina durant le IIe et le début du IIIe s. (Tab. 4).36 Leur origine africaine est
assurée, exception faite pour P. Aufidius Exoratus, dont le nom est révélé par une
inscription de Barcelone.37 Il avait servi comme centurion successivement dans la III
Legio Augusta, puis dans la XXX Legio Ulpia Victrix, en Pannonie, et enfin dans la VII
Legio Gemina, en Espagne. Pour les autres, ils sont originaires de cités appartenant à
différents secteurs de la Proconsulaire du Haut-Empire: Ammaedara, Tuccabor, Vicus
Annaeus, Cirta, Lambaesis et Sabratha. Toutefois, nous ne sommes pas suffisamment
informés à propos de l’origine exacte de Q. Tullius Maximus, legatus Augusti legionis VII
Geminae Felicis, probablement sous le règne conjoint de Marc Aurèle et Lucius Verus. Un
texte de Léon, en Espagne, rapporte que ce légat e Lybia rector legionis Hiberae.38 D’autre
34
35
36
37
38
CIL VIII 58 = 11114; AE 2003, 1890 = AE 1992, 1867a = AE 1989, 882 = AE 1987, 1063.
CIL VIII 18087.
Pour la liste des soldats de la VII Legio Gemina attestés en Afrique proconsulaire, voir
Khanoussi 2006, 46.
AE 1966, 209. Le Bohec 1989a, 160, n° 116 et 117. Le Roux 1982, 315.
CIL II 2660b.
444
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L’amphithéâtre de Lepti Minus
Tableau 5.
Les patrons de Lepti Minus.
Cursus
Nom
Date
L. Aemilius
Adiutor
Antistes sacrorum Liberi patris IIIe s. (?)
curiae Augustae.
[.] Oc[tavius?]
Catu[linus]
(Quirina)
L. Octavius Felix
(Quirina)
Aedilis, quaestor aerarii,
pontifex, praefectus iure
dicundo, antistes sacrorum
Primus pilus, praefectus
castrorum Leg. Geminae
Référence
CIL VIII 22900 = ILS 3371 = IlTun.
138 = AE 1895, 184 = AE 1896,
33 = AE 1968, 630.
IIe s. (?)
CIL VIII 22901 = IlTun. 138 =
IlTun. 139 = AE 1896, 32 = AE
1968, 630.
2e moitié du IIe– Texte ci-présenté
1ère moitié du
IIIe s.
part, alors que trois d’entre eux avaient servi comme tribuni et quatre comme centuriones,
L. Octavius Felix et Q. Tullius Maximus avaient réussi à gagner respectivement les postes
les plus importants dans cette même légion, ceux de praefectus castrorum et de legatus
Augusti. Cela témoigne de la place particulière qu’occupaient les Africains dans le
commandement de cette légion et la gestion des affaires de sa garnison.
L. Octavius Felix rappelle d’autres primipiles qui, une fois la carrière militaire terminée,
assument d’autres responsabilités civiles, honorifiques et prestigieuses, dans le cadre de
leurs cités d’origine.39 En dépit d’une « pérégrination militaire » qui peut les conduire
dans des contrées lointaines, ils avaient gardé et maintenu des rapports très étroits avec
leurs pays d’origine, aussi bien durant leur service qu’au moment de la retraite. C’est
ainsi qu’il faut éventuellement comprendre les générosités accomplies par L. Octavius
Felix. C’est là un comportement social et de prestige, qui le rapproche davantage de ses
concitoyens. De ce fait, il vient s’ajouter à la liste jusqu’ici très réduite des patroni de
cette ville (Tab. 5). En effet, nous connaissons déjà L. Aemilius Adiutor qui, au début du
IIIe s. probablement, fut antistes sacrorum du culte de Liber Pater de la curia Augusta.40
C’est en raison de ses mérites, que la même curie lui a publiquement rendu hommage.
Toutefois, en dépit de l’absence de l’indication de sa tribu, il doit faire partie de la
famille des Aemilii connus par l’épigraphie leptitaine, dont deux, qui appartenaient à
l’ordre équestre, sont tribules de la Palatina: M. Aemilius Super et son frère M. Aemilius
Respectus.41 Par conséquent, ces Aemilii de Lepti Minus, seraient vraisemblablement les
descendants d’Aemilii originaires de Rome, installés précocement dans cette ville et
organisés dans un conuentus ciuium romanorum.42 Nous connaissons également [.] Oc
[tavius?] Catu[linus], tribule de la Quirina, coopté comme patron à son tour.43 A ce titre,
il doit faire partie de la même famille des Octavii, celle de L. Octavius Felix, lui-même
tribule de la Quirina. Ainsi, il semble que les Aemilii et les Octavii, descendants de
deux familles du conuentus ciuium romanorum de cette ville, ont gardé une certaine
prééminence et une notoriété dans le cadre d’une ville qui doit sa promotion au rang de
colonie à l’empereur Trajan. Ce sont les descendants des premières familles de notables,
39
40
41
42
43
Nelis-Clément 2000, 55.
CIL VIII 22900 = ILS 3371 = IlTun. 138 = AE 1895, 184 = AE 1896, 33 = AE 1968, 630.
CIL VIII 58 = 11114.
Devijver 1976–77, 87; Belkahia Karoui 2009, 330.
CIL VIII 22901 = IlTun. 138 et 139 = AE 1896, 32 = AE 1968, 630 = Aounallah et al. 2007, n° 3.
445
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L. Naddari and N. Ben Lazreg
inscrits dans la Palatina et la Quirina, qui continuèrent à occuper les premiers rangs dans
une société qui, depuis le règne de Trajan, est inscrite dans la tribu Papiria. L’apparition de
cette nouvelle tribu dans le tableau onomastique leptitain, en conséquence de la promotion
de la cité au rang de colonie, n’a pas fait péricliter les anciennes tribus romaines, en
l’occurrence la Palatina et la Quirina. Il semble que, dans la ville de Lepti Minus, malgré
sa promotion au rang de colonie sous Trajan et l’inscription de l’ensemble des nouveaux
citoyens romains dans la tribu Papiria, ce sont les anciennes familles d’origine italienne
qui continuèrent à garder la notoriété et l’estime de l’ensemble des curies et du populus
de la ville. Le patronat, nous semble-t-il, apanage et monopole au sein des familles les
plus illustres, est acquis, non seulement en raison de cursus réussis, municipaux ou
militaires, mais sous l’effet et le poids historique qu’exerçaient ces familles d’ascendance
italienne.
La cooptation L. Octavius Felix en qualité de patron, certes par l’ordo de la cité et le
consentement du populus, a pu venir de l’aura que lui donnait le grade élevé qu’il avait
acquis dans l’armée.44 Ainsi, ce choix se justifie amplement par sa réussite dans l’armée
et peut-être aussi par ses origines italiennes, s’il était bien un descendant de l’une des
familles du conuentus ciuium romanorum de Lepti Minus.
La prise en charge de la construction de l’amphithéâtre
Le patron que les Leptitains se sont choisi, doit aussi sa cooptation peut-être aux
générosités accomplies dans sa ville natale et surtout à sa contribution, avec son frère, à
la construction de son amphithéâtre. C’est une munificence extrêmement intéressante qui
vient enrichir l’équipement monumental de la ville, mais semble-t-il sans rapport avec
l’obtention d’un honor quelconque. C’est là un exemple d’évergétisme libre exécuté dans
le cadre d’un projet familial, et non ob honorem. De nombreuses attestations
épigraphiques africaines révèlent des cas de figures semblables. Pour le seul cas de
Thugga, à titre illustratif, on peut rappeler l’exemple des membres de deux familles des
plus illustres: les Gabinii et les Marcii. Deux membres de la première gens, A. Gabinius
Datus et M. Gabinius Bassus, à leurs frais et sur un terrain leur appartenant, ont
construit un complexe religieux: les temples de la Concorde, de Frugifer et de Liber
Pater, ainsi que d’autres temples et les xystes.45 Deux membres de la deuxième gens, le
père et son fils, L. Marcius Simplex et L. Marcius Simplex Regillianus, ont pris en charge
la construction du capitole.46 Toutefois, alors que le lien entre l’édification de
l’amphithéâtre et la cooptation en qualité de patronus, n’est pas expressément mentionné,
il est tout à fait envisageable que l’inscription honore et remercie un patron qui a
peut-être répondu par des libéralités à sa désignation dans le cadre d’un évergétisme ob
honorem. D’ailleurs, une inscription de Thugga qualifie curieusement le patronat d’honor
« comme si c’était une magistrature ».47
44
45
46
47
Jaïdi 2006, 42.
CIL VIII 1493 = CIL VIII 15520 = CIL VIII 26469a–b = IlTun. 1389 = Khanoussi et Maurin 2000, 69–
71, n° 27.
CIL VIII 1471 = CIL VIII 15513 = Khanoussi et Maurin 2000, 87, n° 31. De même, un autre membre
de la famille des Marcii, P. Marcius Quadratus, mentionné ci-dessous, a construit à ses frais le
théâtre de Thugga. CIL VIII 26606 = IlTun. 1434 = ILS 9364 = Khanoussi et Maurin 2000, 90–92,
n° 33; CIL VIII 26528.
Khanoussi et Maurin 2000, 144–45, n° 49 = AE 1997, 1656.
446
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L’amphithéâtre de Lepti Minus
Il est important de souligner ici que c’est seulement le populus leptitanorum, sans que
l’ordo de la cité ne soit impliqué, qui a exprimé sa reconnaissance aux deux frères.
D’habitude, à la lumière du dossier épigraphique africain, c’est l’ordo, seul,48 ou
quelques fois associé au populus,49 qui honore les patrons des cités. En effet, dans l’état
actuel du dossier épigraphique africain notre texte est le troisième en l’honneur d’un
patron d’une cité honoré exclusivement par son populus. Les deux autres proviennent de
Furnos Minus, en Afrique proconsulaire, en l’honneur de deux patroni du municipe:
L. Octavius Felix Octavianus50 et Q. Paccius Victor Candidianus.51 C’est peut-être la
nature de la munificence, l’amphithéâtre en l’occurrence, qui explique un tel engagement
du populus leptitanorum. Certes, il est le principal bénéficiaire pour satisfaire son plaisir
et c’est peut-être lui-même qui a demandé la construction. Le vocabulaire de deux
inscriptions de Thugga liées à la construction du cirque est nettement suggestif à cet
égard. Elles ont l’intérêt de préciser que c’est ad uoluptatem populi (« pour le plaisir du
peuple ») et postulante uniuerso populo (« à la demande du peuple tout entier ») que le
terrain du cirque a été légué et que le monument a été construit.52 En effet, les
innombrables monuments et documents relatifs aux divers types de spectacles en
Afrique romaine reflètent le grand engouement de la société d’alors pour les loisirs.
C’est l’élite municipale qui a favorisé et diffusé certaines de ces attractions, notamment
les ludi de l’amphithéâtre, d’origine italique, et ce sont les membres des conuentus
italiens installés dans les villes commerciales, notamment portuaires, qui en auraient été
les initiateurs. L’origine italienne de certains membres de l’élite leptitaine, et de celle de
ces évergètes qui ont financé la construction de l’amphithéâtre, s’inscrit dans cet ordre
d’idées. D’initiatrice dans ce domaine, cette classe a été prise dans l’engrenage de la
passion des populi qu’elle a su utiliser à bon escient à des fins électorales et/ou pour
valoriser son image. Cette nobilitas s’est prévalue par des libéralités dans les spectacles,
notamment ceux qui avaient la faveur de la foule. Cette ostentation est
particulièrement visible dans les mosaïques qui exhibent des catalogues d’animaux
d’arène, des combats, la singularité de leur organisation, leur coût, et l’affichage de
l’appartenance à des sodalités.
A ce sujet, bien que Lepti Minus n’ait pas encore révélé son potentiel en mosaïques, qui
au vu des prospections est important et prometteur, on ne devrait pas être surpris par la
découverte, un jour, de pavements ou d’autres supports ayant trait aux spectacles
d’amphithéâtre, comme il s’en est trouvé dans des villes de la région, comme
Hadrumetum, Uzitta, Smirat et Thysdrus. La mosaïque incomplète d’un caldarium des
grands Thermes de l’Est, présentant un catalogue d’animaux d’arène, fait certainement
partie d’un répertoire riche et varié relatif à ce genre de spectacle.53
Cependant, tout ceci relèverait du détail par rapport à ce que nous apprend cette
inscription rarissime dans son genre, qui propulse la générosité à son stade suprême,
qui est celui d’offrir le monument, fort coûteux, qui allait accueillir ces divertissements
48
49
50
51
52
53
Voir à titre d’exemple: CIL VIII 1222, 11933, 12296, 12297, 25524, 25525, 25528; IRT 571 et 591.
Voir à titre d’exemple: CIL VIII 11031; IRT 103 et 577; AE 1975, 880 et 882.
CIL VIII 25808b = ILS 9403 = AE 1909, 162.
CIL VIII 25808c = AE 1909, 163.
Khanoussi et Maurin 2000, 38–39, n° 14; 114–17, n° 39.
Ben Lazreg 1992, 83, 85–86, figs. 11–14; DeLaine 2001, 12, et pls. A, B et C.
447
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L. Naddari and N. Ben Lazreg
en faveur de l’ensemble des Leptitains. C’est ainsi qu’elle vient enrichir le dossier
épigraphique assez pauvre relatif au financement de la construction des amphithéâtres
africains.54 Dans l’état actuel de la documentation épigraphique africaine, trois textes
seulement en font référence. Le premier, de l’époque d’Hadrien, provient d’Uthina, en
Proconsulaire.55 Etant gravé sur une dalle en marbre apostée dans l’amphithéâtre, ce
texte serait probablement commémoratif de l’édification du monument, peut-être
contemporain du capitole dans son premier état et des grands thermes.56 Il souligne que
c’est un notable anonyme de la ville, admis dans l’ordre équestre, après avoir parvenu
au faîte des honneurs municipaux, couronnés par le flaminat perpétuel, qui a
vraisemblablement pris en charge la construction de ce monument d’envergure. Il s’agit
d’une importante libéralité, un don de valeur exceptionnelle de 350.000 sesterces.
Le deuxième texte, provenant de Rusicade, relate la contribution d’un certain C. Annius
[---], décurion des quatre colonies de la confédération cirtéenne, qui, en plus des sommes
honoraires en l’honneur du décurionat et du pontificat et de la somme versée pour les
travaux du théâtre, a alloué 30.000 sesterces pour ceux de l’amphithéâtre, une somme
faible au demeurant par rapport au prix du monument.57 Le troisième, de Thuburnica,
perpétue, non point la construction de l’amphithéâtre, mais simplement la reconstruction
et l’embellissement du monument aux frais de l’édile C. Sallustius Felix, peut-être à
l’occasion de son intégration dans l’ordo de la colonie.58
A ces trois textes, il est possible d’ajouter le dossier épigraphique de l’amphithéâtre de
Theueste. Composé d’un lot de neuf textes, très brefs, gravés sur les linteaux de portes
aménagées essentiellement dans le mur de l’arène, ce dossier révèle les noms suivants:
les Honoratiani, les Victorinianii, les Venerii et les Ambibulianii.59 On hésite encore sur
leur identification: des familles des plus distinguées de Theueste, ou des membres de
sodalités, voire même des uenatores.60
Ces données expresses et incontestables, relatives à la contribution des notables
municipaux à la construction et à l’embellissement des amphithéâtres, viennent
relativiser les propos de Richard Duncan-Jones qui stipule que les amphithéâtres
n’étaient pas généralement pris en charge par des particuliers.61 Par ailleurs, trois
inscriptions de Numidie informent sur l’intervention impériale pour la restauration de
deux amphithéâtres, de Lambaesis et d’El Outhaia (l’antique Mesarfelta?). Ils furent
l’objet d’une restauration, partielle pour le premier, aux frais des empereurs Marc Aurèle
et Commode.62 Au début du règne de Septime Sévère, en 194, c’est à dire une quinzaine
54
55
56
57
58
59
60
61
62
Jouffroy 1986, 402. Pour les inscriptions africaines, voir: CIL VIII 2488 = AE 1950, 197; CIL VIII
6995 = IlAlg. II, 1, 560 = ILS 411; CIL VIII 8482 = CIL VIII 20348; AE 1955, 135 et 137; CIL VIII
23948 = AE 1894, 53 = AE 1956, 67.
AE 2004, 1821 = AE 2011, 1678; Ben Hassen et Maurin 2004, 30–32, 141.
Ben Hassen et Maurin 2004, 141.
CIL VIII 7983 = 7984 = IlAlg. II, 34.
AE 1988, 1116 = Wilkins 1988.
AE 1967, 550.
Wilkins 1988, 217.
Duncan-Jones 1982, 75.
AE 1955, 135; CIL VIII 2488 = AE 1950, 197.
448
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L’amphithéâtre de Lepti Minus
d’années plus tard, celui de Lambaesis fut encore une fois l’objet d’un embellissement et
d’une restauration, complète cette fois-ci.63
Toutefois, nous ne sommes pas informés au sujet du coût de la construction de
l’amphithéâtre de Lepti Minus. Devant ce silence, on ne trouverait pas mieux, pour se faire
un ordre d’idées sur ce sujet, que de se conforter par des chiffres fournis par des
inscriptions de Rusicade et d’Uthina. La somme d’argent mentionnée par l’inscription
provenant de cette dernière, 350.000 sesterces, serait peut-être allouée à la construction de
l’amphithéâtre, comme celui de Bou Hjar encastré dans une colline, mais plus grand, d’une
contenance de 16.225 spectateurs.64 De même, on peut trouver des éclairages non moins
importants dans deux inscriptions de Madauros et de Calama relatives à la construction
de leurs théâtres au début du IIIe s.65 Avec une capacité d’accueil qui ne dépasse pas 1200
spectateurs, et une cavea appuyée sur un mur de soutènement, le théâtre de Madauros,
construit aux frais de M. Gabinius Sabinus, a coûté 375.000 sesterces, c’est à dire un peu
plus cher que l’amphithéâtre d’Uthina.66 Pour celui de Calama, plus imposant par ses
dimensions et ses décorations, et qui devait accueillir entre 3000 et 4000 spectateurs, Annia
Aelia Restituta ( flaminica perpetua) a consacré la somme de 400.000 sesterces.67 Cependant,
il est difficile de souscrire à des comparaisons simplistes étant donné les différences des
coûts de construction selon les régions, les périodes et la nature du décor. On peut
toujours concéder que les amphithéâtres, bien que plus imposants par leur monumentalité,
mais partiellement aménagés dans des collines,68 et qui auraient été très austères pour
certains, auraient été relativement moins couteux. Dans ce sens, on peut toujours citer
Peter Wilkins, qui à propos de l’amphithéâtre de Thuburnica, et en se fondant sur la thèse
de David Bomgardner, avance une somme moyenne entre 300.000 et 400.000 sesterces.69
L’état de conservation de l’amphithéâtre de Lepti Minus et la disparition de beaucoup
de ses composantes ne permettent pas d’en estimer le coût. D’ailleurs, le texte de cette base
honorifique ne rend pas compte des détails de cette libéralité. Il est tout à fait envisageable
qu’une autre inscription, faisant référence à tous ces détails ait été gravée sur une frise qui
courait le long d’un entablement de l’un des compartiments de l’amphithéâtre valorisant à
la fois la notabilité des deux Octavii et la munificence accomplie. Elle serait comparable à
l’une des inscriptions du théâtre de Thugga, celle de la frons scaenae gravée sur
l’entablement de la colonnade inférieure de la scène70 ou celle de la summa cavea.71 Outre
le nom du donateur, P. Marcius Quadratus, les deux inscriptions de Thugga « donnent
un luxe de détails sur les éléments composant le théâtre lui-même, certaines de ses
annexes (basiliques, portiques, xystes) ou composantes (la scène et ses rideaux) et son
ornementation ».72
63
64
65
66
67
68
69
70
71
72
AE 1955, 137.
Ben Hassen et Golvin 1998, 107.
Bourgarel Musso 1979, 34–35; Lachaux 1979, 17.
IlAlg. I, 2121.
CIL VIII 5365 = 17495 = IlAlg. I, 286.
Lachaux 1979, 17.
Wilkins 1988, 218; Bomgardner 1984.
CIL VIII 26606 = IlTun. 1434 = ILS 9364 = Khanoussi et Maurin 2000, 90–92, n° 33.
CIL VIII 26528.
Khanoussi et Maurin 2000, 90–92, n° 33.
449
https://doi.org/10.1017/S1047759423000466 Published online by Cambridge University Press
L. Naddari and N. Ben Lazreg
Par ailleurs, notre texte nous apprend le don désintéressé de la part des deux frères qui
se sont déjà distingués par d’autres libéralités en faveur de la ville. Passées sous silence,
sous le couvert de l’expression volontairement vague et formulée selon un style incisif
(super cetera quae reipublicae suae contulerunt), ces libéralités sont certainement très
inférieures par rapport à la somme allouée à la construction de l’amphithéâtre.
***
Par extrapolation, ce document et d’autres provenant de Lepti Minus nous apprennent
aussi sur la grande diversité de sa population et surtout sur sa diaspora.73 Si grâce à
quelques inscriptions on a pu suivre les pérégrinations de quelques Leptitains militaires,
on est en droit d’imaginer que celles d’autres, civils, notamment marchands ou marins,
ou avec d’autres profils, ont dû être plus importantes.
Ainsi, pour le peu de découvertes qui ont été faites dans ce site et son arrière-pays, par
rapport à d’autres de la région, comme Hadrumetum ou Thysdrus, faute de fouilles
extensives, Lepti Minus n’a pas fini de surprendre par la qualité de ses trouvailles, qui
joignent à leur singularité une touche de raffinement. Les mosaïques de la Néréide
musicienne au visage tatoué,74 de la naissance d’Hélène et des Dioscures,75 de Vénus
Anadyomène,76 le sarcophage en marbre montrant le Christ entre Pierre et Paul,77 la
salle funéraire chrétienne souterraine liée à un complexe de catacombes et pavée de
mosaïques tombales représentant des figures humaines,78 les ateliers d’amphores
commerciales79 …, donnent la mesure de l’importance de cette ville portuaire, sa
prospérité économique, et surtout du raffinement artistique et culturel qu’elle a atteint. Il
n’est pas donc étonnant que dans une telle atmosphère qu’on ait poussé l’idéal à se
surpasser par des actes de générosités extrêmes. Ceci nous ramène à la pensée du
regretté de Hans-Georg Pflaum selon laquelle « Lepti Minus n’est pas aussi misérable
que l’indique son nom ».80
Remerciements: Nous adressons nos vifs remerciements à MM. Azedine Beschaouch, Patrick Le
Roux et Louis Maurin qui ont bien voulu lire le manuscrit de ce texte et nous faire part de leurs
précieuses remarques. Que notre ami David Stone trouve ici l’expression de nos remerciements les
plus sincères.
73
74
75
76
77
78
79
80
Voir par exemple Marcia Pompeiana, flaminique perpétuelle originaire de Caesarea de
Maurétanie, et peut-être aussi son mari M. Nonius Capito. Voir Aounallah et al. 2007,
n° 4 (= CIL VIII 22902) et 5 (= CIL VIII 22903). Les mosaïques tombales chrétiennes trouvées
dans deux salles souterraines communiquant avec des catacombes mentionnent des noms
grecs; voir Ben Lazreg 2021, 541–44. Un couple d’affranchis impériaux porte des noms grecs,
Anthia et Onesimus, à moins d’une mode appliquée artificiellement aux esclaves; voir
Benzina Ben Abdallah 1986, n° 97. L’onomastique grecque de cette épitaphe païenne viendrait
corroborer celle constatée dans la salle funéraire chrétienne mentionnée ci-dessus.
Ben Lazreg 2017, 167, fig. 23; Ben Lazreg 2019, figs. 75 et 78.
Ben Lazreg 2013, 173–93.
Leptiminus 2; Ben Lazreg 2019, figs. 75 et 78.
Bejaoui 2002.
Ben Lazreg 2002; Ben Lazreg 2019, figs. 71 et 79.
Mattingly et al. 2011, 223; Stone et al. 2011.
Pflaum 1959, 91.
450
https://doi.org/10.1017/S1047759423000466 Published online by Cambridge University Press
L’amphithéâtre de Lepti Minus
Abréviations
Leptiminus 1 = N. Ben Lazreg et D. J. Mattingly. 1992. Leptiminus (Lamta): A Roman Port City in Tunisia.
Report no. 1. JRA Suppl. 4. Ann Arbor, MI: Journal of Roman Archaeology.
Leptiminus 2 = L. M. Stirling, D. J. Mattingly et N. Ben Lazreg. 2001. Leptiminus (Lamta): Report no. 2,
The East Baths, Cemeteries, Kilns, Venus Mosaic, Site Museum, and Other Studies. Portsmouth, RI: Journal
of Roman Archaeology.
Leptiminus 3 = D. L. Stone, D. J. Mattingly et N. Ben Lazreg. 2011. Leptiminus (Lamta): Report no. 3, The
Field Survey. JRA Suppl. 87. Portsmouth, RI: Journal of Roman Archaeology.
Leptiminus 4 = N. Ben Lazreg, L. D. Stirling et J. P. Moore. 2021. Leptiminus (Lamta): Report no. 4, The
East Cemetery: Stratigraphy, Ceramics, Non-Ceramic Finds and Bio-Archaeological Studies. JRA Suppl. 110.
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RENDRE À BELALIS CE QUI EST À BELALIS
Lotfi NADDARI*
RÉSUMÉ
L’identification de Ksar Mezouar, un site archéologique rural des environs de Vaga,
avec le centre d’un saltus impérial repose sur un texte lacunaire d’une grande inscription
mentionnant un « conflit social » de l’époque de Commode. Cependant, en dépit de la
valeur de ce texte comme élément d’identification, la nature domaniale de ce site reste
litigieuse en raison de la découverte ici même d’un lot de quatre inscriptions qui traduisent
une ambiance strictement municipale, d’où l’hésitation des spécialistes à le ranger dans la
liste des cités ou celle des propriétés impériales. L’examen de ces derniers textes à la lumière
du corpus épigraphique de ville voisine de Belalis Maior, permet de dégager des parentés à
la fois chronologiques et thématiques ; elles favorisent la possibilité d’une restitution de ces
inscriptions à Belalis Maior et garder à Ksar Mezouar sa nature strictement domaniale.
Mots clés : Ksar Mezouar, Belalis Maior, domaines impériaux, lois agraires, Commode,
Marc Aurèle, équipement monumental, proconsuls d’Afrique, ambiance municipale.
ABSTRACT
The identification of Ksar Mezouar, a rural archaeological site in the vicinity of Vaga,
with the center of an imperial saltus is based on a lacunar text of a large inscription mentioning
a « social conflict » from the time of Commodus. However, in spite of the value of this text
as an element of identification, the state nature of this site remains disputed because of the
discovery here of four inscriptions which translate a strictly municipal atmosphere, hence the
hesitation of the specialists to classify it in the list of the cities or that of the imperial properties.
The examination of these last texts in the light of the epigraphic corpus of the neighboring
town of Belalis Maior, allows to identify both chronological and thematic relationships; they
favor the possibility of a restitution of these last inscriptions to Belalis Maior and to keep Ksar
Mezouar in its strictly domanial nature.
*
Université de Tunis (Faculté des Sciences Humaines et Sociales) ; membre du laboratoire de recherche
« Occupation du sol, peuplement et modes de vie dans le Maghreb antique et médiéval » (LR13 ES11),
Université de Sousse (Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Sousse). lotfinaddari@gmail.com.
3
Lotfi NADDARI
Key words : Ksar Mezouar, Belalis Maior, imperial estates, agrarian laws, Commodus,
Marcus Aurelius, monumental equipement, proconsuls of Africa, municipal atmosphere.
INTRODUCTION
L’étude que nous consacrons à la regio Vagensis et Vilthensis, une circonscription
domaniale du tractus Carthaginiensis, que fait connaitre une dédicace d’époque sévérienne1,
nous a conduit à réexaminer le dossier épigraphique des centres domaniaux de la rive gauche
de l’oued Majrada, non loin de Vaga, de Viltha et de Belalis Maior : Saltus Burunitanus (Souk
el Khémis), Aquae Traianae (Hammam Sayyala), Aïn Zaga, Hr. Sriou…, et surtout Ksar
Mezouar2, objet de la présente contribution.
Le site en question se trouve à une quinzaine de km au nord-nord-est de la ville de Vaga
et à 8 km à l’est-nord-est de Belalis Maior, sur la voie qui reliait Vaga à Hippo Diarrhytus, via
Thizica et Matera.
Fig. 1. Carte de localisation de Ksar Mezouar et de Belalis Maior.
(Carte de l’auteur)
1
2
Naddari 2020, p. 509-524.
AAT1, Béja, XVIII, 89.
4
Rendre à Belalis ce qui est à Belalis
Sur le plan archéologique, le site est aujourd’hui dominé par une ferme d’époque
coloniale en mauvais état de conservation, dans la cour de laquelle sont exposés plusieurs
objets antiques : des éléments de décor architectonique en particulier (fragments de futs
de colonnes, chapiteaux et bases…) ainsi qu’une meta et un catillus et des pierres de grand
appareil.
Les éditeurs de L’Atlas archéologique de Tunisie, en se fondant sur un rapport du capitaine
Moinier remontant à l’année 1883, retiennent l’existence d’une enceinte fortifiée construite
en pierres de grand appareil (Fig. 2). Il doit s’agir ainsi d’un matériel archéologique qui révèle
en effet la nature rurale et domaniale de ce site. D’ailleurs, il fut identifié avec le centre d’un
saltus impérial à la lumière de l’une des Grandes inscriptions de la moyenne vallée de l’oued
Majrada : le texte lacunaire d’une table brisée en trois fragments relatant un « conflit social »
de l’époque de Commode3 rappelant celui des inscriptions du même genre provenant de
Souk el Khémis (Saltus Burunitanus)4 et de d’Aïn Zaga5. (Fig. 3)
Fig. 2. Les ruines de la fortification de Ksar Mezouar.
(D’après MOINIER 1883, BAH, XVIII, p. 59-64).
3
4
5
CIL, VIII, 14428 = IlTun. 1220.
CIL, VIII, 10570 = CIL, VIII, 14464 = ILS, 6870 = IlTun., 1237.
CIL, VIII, 14451 = ILPB, 180.
5
Lotfi NADDARI
Fig. 3. La grande inscription de Ksar Mezouar, fragment a du CIL, VIII, 14428 = IlTun. 1220.
Toutefois, en dépit de la valeur et de la teneur de cette grande inscription, la nature
domaniale de ce site est restée litigieuse en raison de la découverte dans le même site d’un lot
de quatre inscriptions qui traduisent une ambiance strictement municipale dans le cadre de
la Proconsulaire du Haut et du Bas-Empire, que voici6 :
1- CIL, VIII, 14427 = AE, 2017, 1713
Plaque (?). Hl. : 3,5-2,5 cm.
Pro salute Imp(eratoris) Caes(aris) M(arci) Aureli Antoni/ni Aug(usti) Armeniaci
Medici Parthici maximi / Germanici et Faustinae Aug(ustae) liberor(um)
q(ue) eor(um) / Victorias duas quas C(aius) Annedius Seuerus / [ob] honorem
decurionatus C(aii) Annedi Hono/[rati Se]ueri Terentiani et C(aii) Annedi Seueri /
[---]ati filior(um) suor(um) taxatis legitim/[is apud acta pro]miserat C(aius)
Annedius Hon[ora/tus Seuerus Terentianus] fil(ius) eius amp[liata pe]/[cunia posuit
idemq(ue) dedicauit. L(ocus) d(atus) d(ecreto) d(ecurionum)].
« Pour le salut de l’Empereur César Auguste Marcus Aurelius Antoninus, vainqueur
des Arméniens, des Mèdes, grand vainqueur des Parthes, vainqueur des Germains,
de Faustine Augusta et de leurs fils. Les deux (statues) de Victoire qu’avaient promises
Caius Annedius Seuerus avec les sommes légitimes en l’honneur du décurionat de
6
CIL, VIII, 14427 ; CIL, VIII, 14429 ; CIL, VIII, 14430 = ILPB, 377 ; CIL, VIII, 14431.
6
Rendre à Belalis ce qui est à Belalis
ses fils Caius Annedius Honoratus Seuerus Terentianus et Caius Annedius Seuerus
[Honor]atus ?, son fils, Caius Annedius Honoratus Seuerus Terentianus les a érigées
et dédiées en augmentant la somme. Emplacement concédé par décret des
décurions. »
Date : entre 172 et 175 apr. J.-C. Marc Aurèle est dit Germanicus en 172 ; il n’est pas
encore Sarmaticus, titre ex uirtute qui lui a été attribué en l’année 175.
2- CIL, VIII, 14429 (H. 60 cm ; l. 100 cm ; Hl. 10 cm).
[---]m semper Augg(ustorum) T[---]
[--- ci]uitatis et alios p[---]
[--- ad]iuuantibus Cl(audio) V[---]
[--- du]ouir[o --- cu]r[a]tor[e rei publ(icae) ?---].
Pour cette dédicace monumentale fragmentaire en l’honneur de deux empereurs dont
les noms sont difficiles à restituer, outre l’expression semper Augg(ustorum), caractéristique
de la titulature impériale du Bas-Empire, elle comporte le cursus d’un notable arrivé au faîte
des honneurs municipaux, duumvir puis curator reipublicae ainsi que le mot ciuitas au génitif
singulier (ciuitatis).
3- CIL, VIII, 14430 = ILPB 377
[Pro salute ( ?) ---- DD NN]
[---]
[--- inuictissim- vel inuict]orum prin[cipum ---]
[---] proprio sum(p)tu c[onstruxit ?---].
Une dédicace impériale en l’honneur de deux empereurs du Bas-Empire (inuictissimi
principes) pour commémorer la construction d’un monument indéterminé aux frais d’un
évergète local.
4- CIL, VIII, 14431 (dalle ; H. 50 cm ; large de 120 cm ; Hl. entre 14 et 10 cm),
[---]o Iuliano u(iro) c(larissimo) am[plissimoq(ue) proconsule ---]
[per ?---]um excepto[rem ---]/
D(ecreto) D(ecurionum).
7
Lotfi NADDARI
C’est un fragment d’une inscription monumentale signée d(ecreto) d(ecurionum),
mentionnant à l’ablatif de datation un proconsul qualifié d’amplissimus. C’est un qualificatif
déterminant pour l’identification du gouverneur de la Proconsulaire nommé Iulianus. Cl.
Lepelley hésita en fait entre trois proconsuls du IVe siècle :
• Amnius Anicius Iulianus (vers 300-303)7,
• M. Ceionius Iulianus (entre 326 et 333)8,
• Sextius Iulianus (entre 371 et 373)9.
Néanmoins, A. C. Pallu de Lessert, par une étude croisée qui met à contribution
quelques inscriptions provenant de sites de la Proconsulaire, a déjà tranché cette affaire en
faveur du second : M. Ceionius Iulianus10. Son nom figure déjà sur cinq inscriptions : une
de Thubursicu Bure11, une de Bulla Regia12, une de Madauros13, et deux de Belalis Maior14.
En effet, ce proconsul est le seul parmi ces trois qui est dit amplissimus proconsul dans les
textes provenant de Thubursicu Bure et de Bulla Regia mentionnées ci-dessus. Pour les deux
autres proconsuls envisageables, alors qu’Amnius Anicius Iulianus n’est mentionné jusque-là
par aucun texte épigraphique africain, Sextius Iulianus est bien connu par un lot de quatre
textes épigraphiques de la Proconsulaire15 et par des lettres groupées dans Symmaque16, mais
sans qu’il ne soit qualifié d’amplissimus proconsul.
Ainsi ces quatre inscriptions à caractère municipal découvertes à Ksar Mezouar viennent
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PLRE, p. 473-474 ; PALLU DE LESSERT 1901, II, p. 5,9.
PLRE, p. 476 ; PALLU DE LESSERT 1901, II, p. 39, 212.
PLRE, p. 479-480 ; PALLU DE LESSERT 1901, II, p. 75.
Pallu de Lessert 1901, II, p. 39-41.
CIL, VIII, 15269 = IlTun., 1337 : [---] dedicante [---] / Caeionio Iu/liano ampli/ssimo proc/onsule cla[rissimo
uiro [---].
CIL, VIII, 25525: Kamenii / consularis / familiae uiro / adque a paren/tibus patrono / Ceionio Iuliano /
ampl(issimo) procons(uli) c(larissimo) u(iro) / uice sacra cog/noscen[ti] / [sple]ndidissim[us] / [ordo Bull(ae)
Reg(iae)] / [patrono posuit].
IlAlg., I, 4011 = 2162 = AE, 1922, 16: [Ceion]io (?) Iulia/no [c(larissimo) u(iro) p]atrono col(oniae) / bono
[a]dque prae/stanti e[t] senatoriae / dignitatis ornamen/[to] / cuius proconsulatu / [beneficia] plurima ci/
[uitas et res] publica fuerit / [consecuta s]tatuam marmo/[ream pone]ndam cliens / ordo Ma[dau]rensium et/si
impari beneficiis eius ho/norifico obsequio decre/uit eamque Aurelii / Saturninus Crescenti/anus fl(amen) p(er)
p(etuus) p(atronus) c(oloniae) et Nicander / fl(amen) p(er)p(etuus) p(atronus) c(oloniae) fratres etiam atque /
aduectam propria li/beralitate posuerunt.
CIL, VIII, 14436 = ILS, 5518 (= Mahjoubi 1978, p. 150-152, fig. 49a et b) : B{a}eatissimo saeculo In[u]i[c]
torum principum [Fl(aui) Valeri Constantini Maximi] / uictoris semp(er) Aug(usti) et Constantini Iun(ioris)
et Constanti gloriossim(orum) Caes(arum) --- non solum ordinis] / aedem siue curiam sed et sexsagonem (!)
seruata [porticu et murorum parte --- refecit cu]/riam uero a fundamentis conla(psam) proconsulatu M(arci)
Ce[io]ni Iul[iani] c(larissimi) u(iri) [---] / et Gezei Largi Materniani c(larissimi) u(iri) leg(ati) eius pat(roni)
c(oloniae) n(ostrae) ex istitu[tione---] / et aiutorium L(uci) Modi Valentionis cur(atoris) r(ei) p(ublicae) eius
curante [---]. AE, 1978, 864 (= Mahjoubi 1978, p. 207, fig. 85 bis) : Beatissim[o saeculo inuictorum
principum Fl(aui) Valeri Constantini maximi uictoris semper Aug(usti) et Constantini Iun(ioris) et Constanti
glori]/osissimor[um Caes(arum) ---] / parua solum [---] / quo cla(u)sa(?) clu[aca?---pro]/[con]sul(atu) [M(arci)
C]ae(i)on[i Iuliani c(larissimi) u(iri) ---]/[---]a uetusta[te conlapsa ---].
CIL, VIII, 1447 (Thubursicu Bure), CIL, VIII, 12455 = 995 = ILS, 788 (Carpis), CIL, VIII, 12537
(Carthage), CIL, VIII, 16400 (Hr. Bou Houia, environs de Musti).
Ep. III, 1, 9.
8
Rendre à Belalis ce qui est à Belalis
instaurer une véritable ambiguïté administrative d’où l’hésitation et la difficulté à ranger ce
site parmi la liste des cités ou celle des propriétés impériales. D’ailleurs, Cl. Lepelley l’intègre
dans le deuxième volume de son ouvrage consacré aux cités des provinces africaines au BasEmpire17 ; en revanche E. Beaudouin et M. Grira, à titre illustratif, le classent parmi les
propriétés impériales de cette même province18.
***
Ainsi, après avoir posé le problème d’identification de la nature de ce site en fonction
des documents qui y furent découverts, nous tenterons un essai de contextualisation en vue
lever le doute à propos de la nature de ce site : domaniale ou municipale ?
L’examen de l’ensemble de ces textes à la lumière du corpus épigraphique de ville voisine
de Belalis Maior (Hr. El Faouar), permet de dégager des parentés à la fois chronologiques et
thématiques entre les inscriptions découvertes ici et là. S’agissant de la dédicace n° 4, elle
a d’abord l’intérêt de mentionner à l’ablatif de datation le proconsul M. Ceionius Iulianus
(entre 326 et 333), pour commémorer un acte édilitaire : la construction ou la restauration
d’un monument bâti sous son égide. Ensuite, pour la 2e ligne, les éditeurs du CIL, VIII
proposent de restituer [per ?---]um excepto[rem---] laissant comprendre que l’objet de la
dédicace a été réalisé par les soins d’un exceptor (secrétaire) anonyme. C’est ainsi d’ailleurs
que cette fonction apparait dans la liste des apparitores et officiales magistratuum, imperatoris,
vectigalium des indices du CIL, VIII19. Toutefois, on voit mal une participation d’un exceptor,
dont la fonction est rarement mentionnée dans l’épigraphie africaine20, dans une affaire liée à
l’équipement monumental sous la tutelle d’un proconsul. Néanmoins, contrairement à cette
restitution, il est tout à fait possible que le mot fragmentaire excepto[---] soit lui-même à l’objet
de la dédicace d’où la restitution excepto[ria], un accusatif pluriel du substantif exceptorium
(= piscine/réservoir). C’est là un monument assez fréquent dans l’épigraphie africaine où
l’eau était mise en réserve essentiellement au service des thermes21. Ainsi, si cette restitution
est admise, il semble que cette inscription monumentale soit liée à la construction ou à la
restauration des exceptoria (= les réservoirs) durant le proconsulat de M. Ceionius Iulianus,
326 et 333, sous Constantin le Grand. Par ceci, le monument en question, les exceptoria en
l’occurrence, et l’autorité de présidence (le proconsul M. Ceionius Iulianus) accentuent le
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Lepelley 1981, t. II, p. 255.
Beaudouin 1898, p. 27-115, 194-219, 301-350, 545–584, 694-746 ; Grira 1997, p. 37-39 ; 109-110
et 139-141
Voir Indices du CIL, VIII, p. 198.
Dans l’état actuel du dossier épigraphique africain, sauf faute de ma part, on compte seulement quatre
textes (un peu plus : voit EDCS) mentionnant d’une façon certaine la fonction d’exceptor : CIL, VIII,
10723 = CIL, VIII, 17634 (Vazanis) ; CIL, VIII, 17896, 34 (Thamugadi), IRT, 13 (Lepcis Magna) ; AE,
1929, 62 (texte chrétien de Bir Tlelsa).
CIL, VIII, 4291 = ILS, 3063 (Aïn Drine), AE, 1912, 182 AE, 1917-1918, 98 = IlAfr. 285 IlAfr. 268
(Thuburbo Maius), CIL, VIII, 5335 = IlAlg. I, 256 (Calama), IlTun. 1500 = IlAfr., 573 = AE, 1904, 121 =
AE, 1925, 31 = ILPB, 225 = DFH, 42 (Thugga). Voir également Merlin A., 1917, p. 66-77 (p. 73-74
particulièrement).
9
Lotfi NADDARI
caractère municipal de cette inscription monumentale, dont la teneur est loin d’être liée à
une structure rurale quelconque dans laquelle le proconsul n’exerce d’ailleurs aucune tutelle
administrative.
Soulignons à cet égard que dans le contexte géographique local, le proconsul M. Ceionius
Iulianus, mentionné ici dans cette inscription de Ksar Mezouar, apparaît également dans
deux inscriptions de la ville voisine de Belalis Maior22, dont l’une est de surcroît relative à un
chantier de réaménagement des thermes du forum : « la réparation de la conduite qui évacue
les eaux du grand bassin du frigidarium vers le collecteur des latrines »23. De même, un château
d’eau a été repéré à proximité de cette installation thermale, composée d’un puits-réservoir
et de deux citernes juxtaposées24. C’est peut-être à ce château d’eau de Belalis Maior et de ses
composantes que fait allusion la séquence [---]um excepto[ria] de l’inscription fragmentaire
découverte à Ksar Mezouar. Il semble qu’un programme d’équipement monumental à Belalis
Maior ait été exécuté durant le proconsulat de M. Ceionius Iulianus : reconstruction de la
curie (aedem siue curiam) et d’un édifice à six côtés (sexago), réaménagement des thermes du
forum, et de ses exceptoria éventuellement, d’où la restitution que nous proposons pour la
deuxième ligne de cette même inscription n° 4 :
[thermar ?]um excepto[ria].
Par cette lecture nous inscrivons cette inscription découverte à Ksar Mezouar dans le
dossier homogène relatif au programme de construction et de restauration dans la ville de
Belalis Maior sous les auspices du proconsul Iulianus, surtout celui du réaménagement des
thermes du forum. Tout cela lui a valu sa cooptation, ainsi que son légat du diocèse de
Carthage (Gezeius Largus Maternianus), comme patroni de la ville25.
Pour toutes ces raisons nous proposons de restituer ce texte comme suit :
[B{a}eatissimo saeculo Inuictorum principum Fl(aui) Valeri Constantini Maximi /
uictoris semp(er) Aug(usti) et Constantini Iun(ioris) et Constanti gloriossim(orum)
Caes(arum) --- M(arco) Ceioni]o Iuliano u(iro) c(larissimo) am[plissimoq(ue)
proconsule et Gezeio Largo Materniano c(larissimo) u(iro) leg(ato) eius] / [thermar ?]
um excepto[ria ---]/ D(creto) d(ecurionum) [p(ecunia) p(ublica)].
Apparat critique : Le texte souligné est restitué en se fondant sur les deux textes cités de
la même époque, évoquant le même proconsul, provenant de Belalis Maior (CIL, VIII, 14436
= ILS, 5518 et AE, 1978, 864 (= Mahjoubi A., 1978, p. 207, fig. 85 bis).
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CIL, VIII, 14436 = ILS, 5518 (= Mahjoubi 1978, p. 150-152, fig. 49a et b) ; AE, 1978, 864 (=Mahjoubi
1978, p. 207-208, fig. 85 bis).
AE, 1978, 864 (=Mahjoubi 1978, p. 207-208).
Mahjoubi 1978, p. 201-204.
CIL, VIII, 14436 = ILS, 5518 (=Mahjoubi 1978, p. 150-152, fig. 49a et b).
10
Rendre à Belalis ce qui est à Belalis
Nous envisageons par là un déplacement de cette inscription de Belalis Maior, vers Ksar
Mezouar, son lieu de découverte. De même, deux autres inscriptions de ce même site (n° 2
et 3), de par leurs supports (des fragments de linteaux probablement) et de leurs libellés,
rappellent des textes de Belalis Maior renvoyant également à des chantiers de construction
effectués sous le Bas-Empire romain. Plus significative est l’inscription n° 2 datable du règne
conjoint de deux empereurs du Bas-Empire qualifiés de semper Augusti; elle serait peut-être
contemporaine de celle commemorative de la reconstruction des portiques du forum de Belalis
Maior sous le règne conjoint de Constantin et Licinius Augustes et de Crispus, Licinius et
Constantin II le Jeune Césars26.
Nous accréditons ainsi une constation de Cl. Lepelley lorsqu’il souligna « à Belalis
Maior au IVe siècle, une importante campagne de restauration, d’agrandissement et de
reconstruction des principaux monuments municipaux. »27
Ce parallélisme patent entre les inscriptions du Bas-Empire découvertes à Ksar Mezouar
et celles découvertes dans la ville voisine de Belalis Maior datables de la même période se
confirme davantage par le dossier épigraphique de l’époque de Marc Aurèle. En effet, la
dédicace découverte à Ksar Mezouar rendant hommage à l’empereur Marc Aurèle, à Faustine
la Jeune et à leurs enfants, datée entre 172 et 175 apr. J.-C. (n° 1), est une inscription à
caractère municipal par excellence. Elle emploie un vocabulaire courant dans le langage
épigraphique municipal : le décurionat, la taxatio et l’ampliatio. Elle fait référence à deux
statues de la Victoire élevées pour le salut de Marc Aurèle, son épouse Faustine la Jeune et
leurs enfants, en l’honneur du décurionat de deux jeunes frères de la famille des Annedii.
À son tour cette inscription s’insère parfaitement dans un dossier épigraphique assez
riche de Belalis Maior rendant hommage aux membres de cette même famille. On connait
déjà :
• Une base de statue en l’honneur de Marc Aurèle datable de l’année 164-165 ap. J.-C.28
• Trois dédicaces rendant hommage à ses fils : M. Annius Verus, au milieu de l’année
166, avant l’obtention du titre de Caesar29, Aurelia Galeria Lucilla,30 et Aurelia
Sabina, sa fille cadette, datée peu après sa naissance en 170 ou 171/172 au plus tard31.
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31
AE, 1978, 846 (=Mahjoubi 1978, p. 165-169): [Beatissimo (?) saecolo (?) domi]norum nostror[um Flaui
Valeri Consta]ntini maximi [et Liciniani] Licini semper [Augg(ustorum) et Flaui Valeri Crispi et Lic]iniani
Licini [et Fl]aui Clau[di Constantini] iunioris florentissimorum Caesarum [---] Garg[ilius ---] pecunia
[publica].
Lepelley 1981, II, p. 81.
CIL, VIII, 14435 (=Mahjoubi 1978, p. 155) : Imp(eratori) Caes(ari) / M(arco) Aurelio / Antonin[o] /
Aug(usto) Armeni/aco p(ontifici) m(aximo) tr(ibunicia) p(otestate) / XVIIII imp(eratori) III co(n)s(uli) III /
d(ecreto) d(ecurionum) p(ecunia) p(ublica).
AE, 1978, 839 : [M(arco) An]nio Vero / [Imp(eratoris) Ca]es(aris) M(arci) Au/[reli A]ntonini / [Aug(usti)]
Armeniaci / [P]arthici Medici / filio / d(ecreto) d(ecurionum) p(ecunia) p(ublica). Pour la datation de ces
hommages rendus aux enfants de Marc Aurèle à Belalis Maior, légèrement différente par rapport à celle
proposée par A. Mahjoubi (Mahjoubi 1978, p. 156-158) voir Hurlet 2000, p. 323.
AE, 1978, 840 : [[Aureliae Galeriae]] / [[Lucillae Aug(ustae)]] / Imp(eratoris) Caes(aris) L(uci) Aureli / Veri
Aug(usti) Armeni/aci Parthici Ma/ximi Medici / d(ecreto) d(ecurionum) p(ecunia) p(ublica).
AE, 1978, 841 : Aureliae [Sabinae] / Imp(eratoris) Caes(aris) M(arci) Au[reli] / Antonini Aug(usti) / Armeniaci
[Par]/thici Med[ici] / [fili]ae / d(ecreto) d(ecurionum) p(ecunia) p(ublica). Pour la date de naissance de cette
11
Lotfi NADDARI
Ainsi, tout porte à croire que toutes ces inscriptions de l’époque de Marc Aurèle
découvertes à Belalis Maior et celle de Ksar Mezouar appartiennent à un dossier épigraphique
homogène provenant vraisemblablement de la première. Elles témoignent de la place
particulière qu’occupait cet empereur et les membres de sa famille à Belalis Maior et dans
l’ensemble des cités de la pertica de Carthage32.
Pour l’homogénéité de ce dossier de l’époque de Mac Aurèle, à la fois chronologique et
formelle, il est possible que toutes ces inscriptions aient été exposées dans un même espace,
dans le forum de la ville par exemple. Mais, rien n’empêche de songer à un temple du culte
impérial, un augusteum, non seulement pour le culte de Marc Aurèle, mais également celui
de l’ensemble de la domus diuina : son épouse Faustine la Jeune et tous leurs enfants, même
ceux morts en bas-âge. Nous le rapprochons à d’autres augustea africains pour le culte de cette
même famille : à Sufetula33, à Thysdrus34 et à Sabratha35.
La proximité entre les deux sites et surtout les parentés chronologiques et thématiques
entre les inscriptions découvertes ici et là, semblent favoriser l’idée d’un déplacement et d’un
transport de ces inscriptions, à un moment qui nous échappe, de Belalis Maior vers le site
de Ksar Mezouar, pour servir peut-être de matériaux de remploi lors de la construction de la
fortification tardive repérée à la fin du XIXe siècle36.
Il est utile de souligner que le scénario du déplacement de ces pierres inscrites de Belalis
Maior à Ksar Mezouar, que nous envisageons, pour servir de matériaux de remploi au profit
d’une forteresse de l’antiquité tardive, n’est pas un fait insolite. Un cas parallèle, très fameux,
est celui des pierres inscrites, des éléments d’architraves et des frises monumentales de la ville
de Mactaris déplacés durant l’antiquité tardive vers le site dit Ksar Bou Fatha, situé à quelque
4 km vers le sud37.
***
Ainsi, de ce qui précède, c’est la nature domaniale du site de Ksar Mezouar qui serait à
retenir à la lumière de l’inscription commémorative de la pétition de l’époque de Commode
et nier l’existence de toute phase ou ambiance municipale dans ce saltus impérial. Toutes les
inscriptions à caractère municipal du Haut et du Bas Empire qui y furent découvertes seraient
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36
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fille de Marc Aurèle, en 170 ap. J.-C. ou en 171/172, voir Kienast 1990, p. 140 ; Ameling 1988, p. 6770 ; Hurlet 2000, p. 323, note 95.
Mahjoubi 1978, p. 158-159.
Naddari 2018, p. 1167-1199.
Slim 2001, p. 161-180 ; Naddari et Hssini Hamdi 2017, p. 119-141.
Bartoccini 1964, p. 21-42.
Ce rapprochement est valable également pour une inscription chrétienne rédigée en grec byzantin
découverte à Ksar Mezouar (CIL, VIII, 14426) ; elle présente des parentés à la fois formelle, textuelle
et chronologique avec une inscription découverte à Belalis Maior (Mahjoubi 1978, p. 341, fig. 130, a).
Gravées toutes les deux sur des cippes-autels de 50 cm de côté, elles alignent des textes grecs très brefs
faisant référence à une expression liturgique chrétienne d’époque byzantine.
Pour les inscriptions de Mactaris trouvées à Ksar Bou Fatha, voir à titre d’exemple : AE, 1899, 113 ; CIL,
VIII, 677 = 11910 ; CIL, VIII, 23599 = AE, 2010, 1791 ; CIL, VIII, 23601 = AE, 1898, 107. Le dossier
archéologique et épigraphique de ce site fera l’objet d’une étude à part.
12
Rendre à Belalis ce qui est à Belalis
à restituer au dossier épigraphique de Belalis Maior, d’où notre titre « rendre à Belalis ce qui
est à Belalis ».
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES CITÉES
Ameling 1988 : W. Ameling, « Der Archon Dionysios. Zur Datierung einiger attischer
Portraits der mittleren Kaiserzeit », Boreas, 1988, 11, p. 67-70.
Bartoccini 1964 : R. Bartoccini, « Il tempio Antoniniano di Sabratha », Libya antiqua,
1964, vol. I, p. 21-42.
Beuadouin 1898 : E. Beuadouin, Les grands domaines de l’Empire romain, d’après les
travaux récents, NHDF, 1898, 22, p. 27-115, 194-219, 301-350, 545–584, 694-746.
Grira 1997 : M. Grira, Les domaines impériaux de la province de Zeugitane (situés en
Tunisie) : essai de géographie historique et approche archéologique des centres domaniaux,
Mémoire de DEA dirigé par le Pr. A. M’Charek, 1997, Faculté des Sciences humaines et
sociales de Tunis.
Hurlet 2000 : Fr. Hurlet, « Pouvoir des images, images du pouvoir impérial. La province
d’Afrique aux deux premiers siècles de notre ère », MEFRA, 2000, t. 112, n° 1, p. 297-364.
Kienast 1990 : D. Kienast, Römische Kaisertabelle, Darmstadt, 1990.
Lepelley 1981 : CL. Lepelley, Les cités de l'Afrique romaine au Bas-Empire. Notice d'histoire
municipale, t. II, Paris, 1981.
Mahjoubi 1978 : A. Mahjoubi, Recherches d’histoire et d’archéologie à Henchir El-Faouar
(Tunisie). La cité des Belalitani Maiores, Publications de l’Université de Tunis, 1978.
Moinier 1883 : A. Moinier, « Note sur le Ksar-Mezouar », BAH, XVIII, 1883, p. 59-64.
Naddari 2018 : L. Naddari, « Au cœur de Sufetula (Sbeïtla, en Tunisie centrale) : forum
et capitole réparti en trois temples ou bien plutôt augusteum pour le culte d’Antonin le
Pieux et les siens ? », Comptes rendus de l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres, 2018, 3
(juillet-octobre), p. 1167-1199.
Naddari 2020 : L. Naddari, « Regio Vagensis et Vilthensis. : une nouvelle circonscription
de gestion des domaines impériaux en Afrique proconsulaire », CRAI, 2020, 2 (juilletdécembre), p. 509-524.
Naddari et Hssini Hamdi 2022 : L. Naddari et O. Hssini Hamdi, « L’édifice du culte
impérial de Thysdrus : épigraphie et statuaire », Africa, XXV, 2022, p. 135-157.
Pallu de Lessert 1901 : A. C. Pallu de Lessert, Fastes des provinces africaines (Proconsulaire,
Numidie, Maurétanies) sous la domination romaine, Paris, 1901.
Slim 2001 : L. et H. Slim, « Un édifice du culte impérial à Thysdrus ? », Vbique amici,
Mélanges offerts à J. M. Lassère, Université de Montpellier, 2001, p. 161-180.
13
Mélanges
de
l’Ecole
française
de Rome
Antiquité
MEFRA
130-2 2018
MEFRA – 130/2 – 2018, p. 509-521.
Municipium Mactaritanum
Lotfi n addari *
L. Naddari, Faculté des Sciences humaines et sociales de Tunis, Laboratoire de Recherche « Occupation
du sol, peuplement et modes de vie dans le Maghreb antique et médiéval », Faculté des Lettres et des
Sciences humaines de Sousse (Tunisie) – lotfinaddari@gmail.com
Le réexamen du dossier épigraphique mis à contribution pour écrire l’histoire municipale de la colonia Aelia Aurelia
Mactaritana permet de revoir les scénarios proposés par les spécialistes de l’histoire municipale des cités africo-romaines.
Pour une cité profondément romanisée, chef-lieu du pagus Thuscae et Gunzuzi et siège du bureau des Quattuor publica Africae,
il serait difficile d’admettre qu’elle ait pu garder le statut de ciuitas pérégrine jusqu’au dernier quart du IIe siècle de l’ère
chrétienne avant d’accéder au rang de colonie. Aujourd’hui, la révision d’une inscription datable du règne de Marc Aurèle
(CIL VIII, 11799 + IlAfr, 200 a et b + AE, 1960, 114) et la découverte d’un fragment épigraphe qui vient compléter une
dédicace en l’honneur du clarissime africain M. Valerius Quadratus (CIL VIII, 11811 = ILPB, 103) nous donnent l’occasion
d’envisager autrement les différentes phases de l’histoire municipale de cette cité et de préciser notamment qu’elle fut
d’abord municipe de droit latin.
Mactaris, Althiburos, histoire municipale, Antonin le Pieux, Marc Aurèle, capitole, thermes, proconsul d’Afrique,
M. Valerius Quadratus, notables municipaux.
Municipium Mactaritanum. A new examination of the epigraphic evidence used to write the municipal history of the
colonia Aelia Aurelia Mactaritana enables to revise the scenarios suggested before by the specialists of the cities of Roman
Africa. Indeed, for a deeply romanized city, the chief town of the district known as pagus Thuscae et Gunzuzi, and the headquarter of the Quattuor publica Africae, it would be difficult to admit that Mactaris remained a mere civitas peregrina until the
last quarter of the second century A.D. before reaching the rank of a colony. The revision of the reading of an inscription
dating back to the time of Marcus Aurelius (CIL VIII, 11799 + IlAfr 200 a et b + AE, 1960, 114) and the discovery of a new
epigraphic fragment of a dedication in honor of the African vir clarissimus, M. Valerius Quadratus (CIL VIII, 11811 = ILPB,
103), allow to reconstruct in a different way the various phases of the municipal history of the city and especially to establish that before receiving the status of colony, it was a Latin municipium.
Mactaris, Althiburos, municipal history, Antoninus Pius, Marcus Aurelius, capitol, thermal baths, proconsul of Africa,
M. Valerius Quadratus, municipal notable.
Les différentes phases de l’histoire municipale de Mactaris (Makthar, dans le secteur central
du Haut Tell tunisien) (fig. 1), chef-lieu du pagus
Thuscae et Gunzuzi1, ont été hypothétiquement
établies à partir de documents épigraphiques fragmentaires. Cela explique les différents scénarios
proposés par les spécialistes de l’histoire municipale des provinces romaines d’Afrique, notamment
G.-Ch. Picard, A. Beschaouch et J. Gascou. En
* Ce texte a profité des remarques savantes de A. M’Charek,
A. Beschaouch, L. Maurin et Kh. Marmouri. Qu’ils trouvent
ici l’expression de mes remerciements les plus sincères.
1. AE, 1963, 96 ; Picard – Mahjoubi – Beschaouch 1963.
effet, exception faite des documents sévériens et
post-sévériens révélant la nomenclature complète
de cette cité, colonia Aelia Aurelia Mactaritana2, deux
dédicaces fragmentaires ont été mises à contribution pour émettre des hypothèses retraçant le
processus de sa promotion juridique : une inscrip-
2. CIL VIII, 11801 = ILS, 458 ; CIL VIII, 11804 = ILS 6787 ;
CIL VIII, 677 = 11910 ; AE 1949, 47. Une dédicace en l’honneur de C. Sextius Martialis (CIL VIII, 11813 = ILS, 1410),
un notable de Mactaris et membre de l’ordre équestre,
datant probablement de la fin du règne de Commode, fait
également mention du statut de colonie, mais sans épithètes
impériales. Voir M’Charek 1982, p. 125 ; Magioncalda 1992 ;
Belkahia-Karoui 2009, p. 408-410, no 144.
Municipium Mactaritanum
510 Lotfi n addari
Fig. 1 – Carte de localisation de Mactaris, en Byzacène.
D’après Desanges et al. 2010.
tion monumentale de l’époque de Marc Aurèle
et un hommage rendu au clarissime althiburitain de l’époque d’Antonin le Pieux, M. Valerius
Quadratus3.
Rappelons à cet égard que pour J. Gascou,
Mactaris, sans passer par le statut intermédiaire de
municipium, était restée une simple ciuitas pérégrine jusqu’à sa promotion directe au rang de
colonie entre 176 et 180, c’est-à-dire sous le règne
conjoint de Marc Aurèle et de son fils Commode4.
Selon cette interprétation, les épithètes Aelia et
Aurelia renverraient respectivement à Commode
et à Marc Aurèle. Voilà déjà une lecture difficile à admettre compte tenu de la primauté de
l’épithète Aelia, renvoyant à Commode, par
rapport à Aurelia faisant référence à Marc Aurèle
et qui aurait dû logiquement devancer Aelia. De
son côté A. Beschaouch envisage un autre scénario
de promotion municipale en deux temps : tout
d’abord une ciuitas de droit latin sous Hadrien
(d’où l’épithète Aelia), promue ensuite au rang de
colonie honoraire sous Marc Aurèle seul, ce qui
justifierait l’emploi de l’épithète Aurelia5 ; cette
3. CIL VIII, 11799 + IlAfr 200 a et b + AE, 1960, 114 ; CIL VIII,
11811 = ILPB, 103.
4. Gascou 1982a, p. 197-198.
5. Beschaouch 1996, p. 252.
nouvelle interprétation a été alors retenue sans
réserve par J. Gascou qui a abandonné l’idée d’un
passage direct du statut de cité pérégrine à celui de
colonie romaine6. Pour G.-Ch. Picard, la ville aurait
été un « semi-municipe » entre la fin du règne de
Trajan et le règne conjoint de Marc Aurèle et de
Commode, sans pour autant que cela contredise
l’idée qu’elle serait restée une simple ciuitas au
moins jusqu’à l’année 169-1707.
Mais la question qui se pose est de savoir si l’on
peut admettre que Mactaris, siège du bureau des
Quattuor publica Africae depuis l’époque flavienne,
chef-lieu du pagus Thuscae et Gunzuzi au moins à
partir du règne de Trajan et ville profondément
romanisée, siège d’un conventus ciuium Romanorum
au plus tard au début du IIe siècle apr. J.-C.8, ait
pu demeurer une simple ciuitas pérégrine jusqu’au
dernier quart du IIe siècle. Précisons d’abord que
le statut de ciuitas a été déduit de l’examen d’une
inscription monumentale, incomplète et fragmentaire, datée de l’année 169-170 apr. J.-C.9. Il s’agit
d’un texte distribué sur six blocs jointifs en assez
bon état de conservation (tabl. 1). Ils proviennent
6.
7.
8.
9.
Gascou 2003, p. 235.
Picard 1953 ; Picard 1987, p. 461.
Picard 1966 ; Picard 1987, p. 461.
CIL VIII, 11799 + IlAfr, 200 a et b + AE, 1960, 114.
511
des vestiges des thermes situés au nord-ouest de la
basilique des Juvenes10. La longueur totale devait
dépasser les 12 m. L’examen de l’ordinatio du texte
et l’identification d’un champ anépigraphe à la
fin du fragment no 3 et au début du fragment no 4
permettent de se faire une idée de l’agencement
et du tracé de ces éléments de linteau et peutêtre même des entrecolonnements. Ces éléments
doivent faire partie d’une frise architravée alignée
sur deux ou trois faces d’un portique.
Bloc Texte
Dim. (cm)
Réf.
1
IMP CAES M AVRELI
ANT
280 × 59 × 40
AE,
1960,
114
2
ONINI AVG ARMENIACI
PARTHICI MEDICI
255 × 59 × 40
IlAfr,
200, b
3
MAXIMI PP TRIB POT
XXIIII COS III
279 × 59 × 40
CIL VIII,
11799, a
4
[- - -]IAS
M[AC]TARITANOR[- - -]
210 × 59 × 40
CIL VIII,
11799, b
5
NNO SEXTI LATERANI
PROCOS CV L RVPILIVS
AV[- - -]
249 × 59 × 40
CIL VIII,
11799, c
6
RESTITVTASA
non indiquées IlAfr,
200, a
Reconnaissant l’intérêt considérable de cette
dédicace « du point de vue de l’histoire de l’art
et de l’histoire politique » de la ville et les difficultés d’identification du monument consacré,
G. Ch. Picard a proposé la lecture suivante en
adoptant partiellement celle de J. Schmidt au
CIL VIII (11799).
[I(oui) M(aximo) O(ptimo), Iunoni Reginae, Mineruae
Augustae], [pro] restituta sa[lute] Imp(eratoris) Caes(aris)
M(arci) Aureli Antonini, Aug(usti), Armeniaci, Parthici,
Medici, [pontificis] maximi, p(atris) p(atriae), trib(uniciae) pot(estatis) XXIIII, co(n)s(ulis) III, [imp(eratoris)
V, - - - ciui]tas M[ac]taritanor[um - - - extruxit? a]nno
Sexti Laterani proco(n)s(ulis), c(larissimi) v(iri); L(ucius)
Rupilius Au[--- leg(atus) eius dedicauit].
lecture proposée, la dédicace renvoie à l’inauguration du capitole12 qui aurait été édifié durant la
24e puissance tribunicienne de l’empereur Marc
Aurèle, sous le proconsulat de L. Sextius Lateranus
(169-170)13. De même, selon cette même lecture,
ce serait la ciuitas Mactaritanorum qui aurait financé
un tel temple.
Toutefois, cette interprétation, retenue sans la
moindre réserve par tous les spécialistes de l’histoire municipale des cités africaines14, présente à
notre avis quelques difficultés et gagnerait à être
révisée, car les blocs épigraphes pourraient être
répartis et lus d’une manière différente.
D’abord, en ce qui concerne la formule [ciui]tas
M[ac]taritanor[um], considérée par les éditeurs du
CIL VIII et surtout par G.-Ch. Picard comme étant
l’auteur de la dédicace, il convient de souligner
qu’il s’agit là d’une simple conjecture fondée sur
l’identification de la haste précédant la terminaison
-AS avec la lettre T, ce qui justifierait la restitution
du mot [ciui]tas. À en croire le relevé présenté
par J. Schmidt au CIL VIII, on aurait affaire à
une haste légèrement oblique qui se distinguerait nettement du tracé des deux autres T du mot
M[ac]TARITANOR[um]. Malheureusement, ce bloc,
aujourd’hui beaucoup plus détérioré qu’il ne l’était
à la fin du XIXe siècle, ne permet plus de procéder
à une vérification du tracé de cette lettre (fig. 2).
Fig. 2 – État actuel du champ épigraphique du bloc no 4 (CIL VIII,
11799).
Cl. L. Naddari.
À en juger par son contenu, son support, ses
dimensions, son décor figuré11 et, surtout, par la
10. Picard 1957, p. 151.
11. Picard 1957, p. 151 et pl. XLV c.
12. Un capitole non encore identifié sur le terrain.
13. Pallu de Lessert 1896, p. 213-214 ; Thomasson 1996, p. 69,
no 86.
14. Picard 1957, p. 151-152.
Municipium Mactaritanum
512 Lotfi n addari
Une meilleure lecture de cette partie du texte
pourrait être suggérée par le texte du sixième
bloc comportant les lettres RESTITVTASA que
L. Châtelain15, puis G.-Ch. Picard, placèrent au
début du texte en guise de formule introductive de souhait : [pro] restituta sa[lute], suivie de la
titulature de l’empereur Marc Aurèle au génitif.
Toutefois, cette expression n’a pas de parallèle
dans le langage épigraphique16. Dans un pareil
contexte, la formule pro salute, fréquemment
usitée dans l’épigraphie monumentale africaine17,
aurait amplement suffi. C’est d’ailleurs cette même
formule qui fut restituée par les éditeurs du CIL
lorsqu’ils publièrent les trois premiers fragments
de cette même inscription18. En outre, c’est par
cette même formule que commence la quasi-totalité des dédicaces de monuments construits en
Afrique pour rendre hommage à l’empereur Marc
Aurèle19. Ainsi, au lieu d’être placé en tête de l’inscription, ce bloc trouverait une meilleure position
entre les blocs 4 et 5, ce qui permettrait une autre
répartition des lettres. Nous dégageons d’abord le
mot RESTITVTAS, un participe à l’accusatif pluriel
qui doit s’accorder avec un substantif féminin au
pluriel également, un monument objet d’un chantier de restauration. En effet, le pendant direct du
participe restitutas ne saurait être à notre avis que
le mot incomplet se terminant par la désinence
-AS que nous lisons sur le bloc 4, juste avant le
mot M[ac]TARITANOR[um]. Pour cette partie du
texte, au lieu d’un nominatif singulier dédicant
de l’inscription monumentale, en l’occurrence la
[ciui]TAS M[ac]TARITANOR[um], il serait question
d’un accusatif pluriel, l’objet de la dédicace tout
simplement. Ainsi, nous proposons d’établir cette
partie du texte comme suit :
15. Châtelain 1910, p. 401.
16. Pour le volume VIII du CIL par exemple, voir indices,
p. 336-337. A. Saastamoinen (Saastamoinen 2010, p. 92)
précise que cette formule n’apparaît en Afrique qu’une
seule fois, dans le cas de cette inscription fragmentaire de
Mactaris.
17. Saastamoinen 2010, p. 90-93.
18. CIL VIII, 11799.
19. Voir à titre illustratif les inscriptions suivantes : CIL VIII, 587
(= IlTun, 500 = ILS, 5567), 801, 1267 (= IlTun, 1275 = ILS,
5461), 14378 (+ AE, 1991, 1675), 14427, 14754, 15261
(= 1443), 22689 (= AE, 1903, 355 = AE, 1948, 5 = 1998,
1518 = IRT, 2), 25468 (= IlTun, 1221 = ILPB, 321), 27987
(= AE, 1909, 216 = IlAlg, I, 3787), 23022 (= AE, 1893, 66),
AE, 1949, 27 ; AE, 1993, 233 ; AE, 1994, 1885 (pro salute et
reditu) ; AE, 1996, 1712.
[- - -]AS M[ac]TARITANOR[um] RESTITVTAS [- - -]
Diverses possibilités sont envisageables pour
définir le monument concerné par cette opération
de restauration et dont le nom relève sans doute
de la première déclinaison : basilica, curia, cella,
platea… Compte tenu du contexte de découverte
de ces blocs (les thermes situés au nord-ouest de la
basilique des Juvenes) nous opterions à titre d’hypothèse pour le mot pluriel [therm]as et restituerions en conséquence :
[therm]AS M[ac]TARITANOR[um] RESTITVTAS [- - -]
En effet, la haste légèrement oblique précédant
la terminaison -AS, de tracé différent par rapport à
celui de la lettre T attestée deux fois dans le mot
suivant (M[ac]TARITANOR[um]), serait celle du
jambage droit de la lettre M. D’ailleurs, le tracé de
cette même lettre dans plusieurs mots de ce même
texte conforte cette lecture (fig. 6).
Une longue liste de textes parallèles accrédite cette lecture en établissant un lien syntaxique
entre un monument objet d’une dédicace (au
singulier ou au pluriel) et l’adjectif restituta à l’accusatif également :
– thermas Gal[lienianas r]eformatas et excultas
(IlAfr, 506),
– aquas Curtiam et Caeruleam perductas (…) restitutas (CIL VI, 1258 = ILS, 218 c),
– [harenam(?)] amph[itheatri longi temporis [- - re]stitutam (CIL VI, 32092),
– balineum refect(um) [et] basilicam uetustate
conlapsum a solo restitutam (CIL VII, 287 = RIB,
605 = ILS, 2548).
En conséquence, l’hypothèse qui fait de cette
inscription la dédicace du capitole doit être écartée.
D’ailleurs cette identification n’était fondée en
réalité que sur le décor de l’intrados du soffite du
deuxième bloc figurant la triade capitoline représentée au milieu d’un décor floral et animalier
fantastique composé de rinceaux et de monstres
(fig. 3)20. C’est là « un thème classique largement
diffusé dans l’art lapidaire romain »21, et ce ne pourrait donc pas être tenu comme un indice d’identification certaine ; il revêt une valeur symbolique, en
rapport avec l’idéologie impériale et la religion de
Rome dans des monuments bien fréquentés.
20. Picard 1957, p. 151.
21. Benabid 2010, p. 829.
513
Fig. 3 – Le décor figuré du 2e soffite (IlAfr, 200, b).
Cl. L. Naddari.
Quant à la lettre A à la fin de ce sixième
bloc, après la forme adjectivale (restitutas), elle
s’associe sans aucune difficulté avec les lettres
NNO lisibles au début du bloc no 5 de cette
même inscription pour former le mot ANNO.
Nous proposons donc de restituer et de lire cette
partie finale du texte (blocs 4, 6 et 5) comme suit :
[therm]as (?) M[ac]taritanor[um] restitutas anno Sexti
Laterani proco(n)s(ulis) c(larissimi) u(iri)
La séquence thermas Mactaritanorum que nous
proposons pour cette partie du texte désignant le
monument objet de la dédicace à l’accusatif pluriel
suivi d’un adjectif ethnique au génitif pluriel dérivé
du nom de la ville pourrait paraître curieuse pour
dénommer un édifice thermal des Mactaritains à
Mactaris même. Mais on peut la rapprocher de cas
similaires révélés par une dizaine d’inscriptions
faisant suivre des monuments objets de dédicaces
par des adjectifs ethniques, généralement au datif.
Nous citons quelques-uns à titre d’exemples dans
le tableau 2.
Forme
Toponyme
Référence
balneas Amiterninis
Amiternum
CIL IX, 4196
balneae municipum municipii Aelii Chobae
Choba
CIL VIII, 8375
= ILS, 6876
thermas Ocricolanis
Ocriculum
CIL XI, 4090 ;
AE, 1995, 439
therm]as [- - - municipii
Augusti] Veientis
Veii
CIL XI, 3812
thermas Spoletinis
Spoletium
CIL XI, 4781 =
ILS, 739
thermas rei publicae suae Tagilis
Tagilitanae
AE, 1979, 352
the[a]trum coloniae
Emerite[nsium]
AE, 1915, 33 =
AE, 1935, 4
Emerita
De l’emploi de restituta découle ainsi que la
date de construction des thermes de l’Ouest, transformés tardivement en église22, serait à placer entre
22. Thébert 2003, p. 146.
Fig. 4 – Les thermes de l’Ouest à Mactaris. Le bloc no 1 encore
remployé dans les vestiges de l’église installée dans le frigidarium ;
le bloc no 4 encore dans les environs immédiats du monument.
Cl. L. Naddari.
le règne de Trajan et celui d’Antonin le Pieux23
(fig. 4). À la lumière de ces détails chronologiques,
la construction et plus tard la restauration de ces
thermes seraient antérieures à l’édification des
grands thermes de l’Est de la même ville, inaugurés en 199 apr. J.-C.24.
N’étant pas la présumée ciuitas Mactaritanorum,
le sujet de la dédicace est assurément L. Rupilius
Au[---], mentionné au nominatif à la fin du texte,
juste après la nomenclature du proconsul d’Afrique
au génitif. Rappelons que selon la restitution
proposée par les éditeurs du CIL, VIII, retenue par
G.-Ch. Picard, il serait identifiable avec un légat
du proconsul qui aurait présidé la cérémonie de
la dédicace. Une pareille solution a été également
retenue par les éditeurs de la Prosopographia Imperii
Romani et par B.E. Thomasson25, tandis qu’elle
n’est pas acceptée par Pallu de Lessert26. D’ailleurs,
s’il en était ainsi, son nom serait mentionné avec le
même cas que celui de son supérieur hiérarchique
comme on peut le constater dans deux inscriptions
découvertes à Calama et à Ucres dans lesquelles les
noms des proconsuls et leurs légats apparaissent
tous au génitif27. Du reste, l’emploi de l’année
23. Ce monument serait peut-être contemporain de l’édification de l’arc de Trajan ou de l’érection des bases de statues
de l’époque d’Hadrien rendant hommage à Sabine, son
épouse (AE, 1951, 43), à L. Aelius Caesar, son fils (AE,
1951, 44) et à C. Bruttius Praesens, proconsul d’Afrique de
l’année 133-134 (AE, 1950, 66 = 1951, 227 = 1952, 53 =
94) ou contemporain des hommages rendus à l’empereur
Antonin le Pieux, en l’année 157-158 apr. J.-C. (CIL VIII,
622 = 11781 ; CIL VIII, 23599).
24. G.-Ch. Picard (Picard 1974, p. 14) estime que ces thermes
sont contemporains des Grands thermes Est de la ville qui
sont d’époque sévérienne, datant de l’année 199 apr. J.-C.
précisément. Voir également Thébert 2003, p. 146.
25. PIR, R 149 ; PIR2, R 212 ; Thomasson 1996, p. 112, no 42.
26. Pallu de Lessert 1896, p. 213-214.
27. CIL VIII, 5290 = IlAlg, I, 179 = ILS, 5477 ; CIL VIII, 1170 =
14287 = ILS, 413.
Municipium Mactaritanum
514 Lotfi n addari
proconsulaire n’implique pas nécessairement une
mention du proconsul et de son légat.
Ce détail mérite en effet que l’on s’y arrête,
car A. M’Charek a déjà ouvert une autre piste que
celle d’un légat, inconnu par ailleurs. En effet,
dans une importante notice réservée à la famille
des Rupilii, mettant en exergue la place particulière
qu’ils occupèrent parmi l’élite de la société mactaritaine28 (tabl. 3), cet auteur identifie le personnage en question avec « l’un des plus riches de la
cité puisqu’il s’agit du premier mactaritain connu
qui se distingue par son évergétisme, en assumant les frais de construction d’un monument
public »29. Ainsi, son nom étant au nominatif, il
peut être évidemment tenu pour l’évergète qui
aurait financé le projet de restauration ou éventuellement l’autorité municipale ayant présidé à
la dédicace. Nombreuses sont en effet les inscriptions latines d’Afrique qui font emploi de l’année
proconsulaire suivie par la mention des autorités
présidant aux dédicaces : membres de l’élite locale
arrivés au faîte des honneurs municipaux, curatores reipublicae30, flamines perpétuels31 ou même
membres de l’ordre sénatorial32 ou de l’ordre
équestre33.
28. M’Charek 1982, p. 203-204. Voir également BelkahiaKaroui 2009, nos 135, 143, 191 et 192. Certains des
membres de cette famille, notables municipaux, ont pu
accéder aux ordres supérieurs, au moins à partir de la
première moitié du IIIe siècle. Ils continuèrent à marquer
la vie municipale de Mactaris et même de la ville voisine de
Mididi au moins jusqu’à la fin du IIIe siècle. Parmi eux se
distingue en particulier P. Rupilius Pisonianus, vir egregius,
curateur des deux cités (Mactaris et Mididi), où il supervisa
des travaux de restauration de monuments sous le règne de
Dioclétien et de Maximien (CIL VIII, 624 + 11782 +23413 =
AE, 1946, 62 et 119 ; CIL VIII, 11774. Lepelley 1981, p. 292
et 296 ; Belkahia-Karoui 2009, p. 203 et 434-435, no 191).
Une inscription de Rome (CIL VI, 1157 = Belkahia-Karoui
2009, p. 397, no 135), datée entre 333 et 337 apr. J.-C., fait
également connaître un Rupilius Pisonianus, vir clarissimus
et praefectus vigilum.
29. M’Charek 1982, p. 203.
30. Voir à titre d’exemple : CIL VIII, 12272 ; CIL VIII, 23849 =
ILPB, 408.
31. Voir à titre d’exemple : CIL VIII, 1490 = 26568 = IlAfr, 533
= DFH, 43 ; CIL VIII, 5337 = IlAlg, I, 254.
32. Voir à titre d’exemple : CIL VIII, 26566 = AE, 1908, 165 =
DFH, 21 ; CIL VIII, 5335 = IlAlg, I, 256 ; CIL VIII, 26567 =
IlAfr, 532 a.
33. CIL VIII, 1277 = 14772 = ILS, 6809.
Nom
Cursus
Date
Réf.
A. Rupilius
Saturninus
-
Fin II première
moitié du
IIIe s.
CIL VIII,
11865
Q. Rupilius
Honoratus
Flamine
perpétuel ;
adlectus in
equestres
turmas par
l’empereur
Sévère
Alexandre
Après 235
CIL VIII,
627 = ILS,
1315
P. Rupilius
Pisonianus
Egregius vir,
curateur rei
publicae de
Mactaris et
de Mididi
290-293
CIL VIII, 624
+ 11782 +
23413 = AE,
1946, 62 et
119 ; CIL VIII,
11774
Rupilius
Pisonianus
Préfet des
vigiles, vir
clarissimus
333-337
CIL VI, 1157
e
À partir de Belkahia-Karoui 2009, nos 135, 143, 191
et 192.
On retiendra que cette inscription monumentale de Mactaris, vraisemblablement gravée pour
le salut de l’empereur Marc Aurèle, rappelle tout
simplement l’achèvement des travaux de restauration des thermes (?) durant le proconsulat de
T. Sextius Lateranus (169-170 apr. J.-C.). Rupilius
Au[---] serait simplement un notable municipal
qui aurait présidé la cérémonie de la dédicace des
thermes ou l’évergète qui les aurait financés.
Une mise au point relative à un détail de la titulature de Marc Aurèle s’impose avant de proposer
une lecture complète du texte ; elle concerne le titre
de pontifex maximus, octroyé le 7 mars 16134, qui fait
parfois défaut dans les inscriptions mentionnant la
titulature de cet empereur. Ici, c’est le mot [pontificis] qui a été restitué en raison du mot MAXIMI
lisible au début du bloc 3 et inséré en conséquence
juste après le titre ex uirtute Medicus qui occupe la
fin du texte du bloc 2. Par conséquent, et compte
tenu aussi des dimensions de chacun des blocs de
cette grande inscription et de la position des mots
(MEDICI à la fin du premier et MAXIMI au début
du second), le mot pontificis, même s’il est transcrit en toutes lettres, aurait occupé un bloc de
longueur très réduite, voire incompatible avec le
34. Kienast 1990, p. 137.
515
reste des blocs. C’est pourquoi une solution plus
simple consisterait à envisager de relier les blocs 2
et 3 (fig. 5 et 6), de façon à lire :
Bloc 2 : IlAfr, 200, b
…ONINI AVG
ARMENIACI
PARTHICI MEDICI
Bloc 3 : CIL VIII, 11799 a
|
MAXIMI PP TRIB POT
XXIIII COS III…
au lieu de
…ONINI AVG
ARMENIACI
PARTHICI MEDICI
|
[pontificis] MAXIMI PP
TRIB POT XXIIII COS III…
De la sorte, la séquence à retenir est selon nous
la suivante : Armeniaci Parthici Medici maximi au lieu
de la séquence classique Armeniaci Parthici maximi
Medici. Pour un pareil schéma on peut évoquer
un parallèle dans une dédicace de l’année 173
apr. J.-C. découverte à Vchi Maius commémorant
la restauration et le transfert d’un monument religieux dans laquelle se succèdent les titres ex uirtute
de Marc Aurèle Armeniacus, Parthicus, Medicus
maximus et Germanicus ; le titre pontifex maximus fait
ici défaut également35.
Fig. 5 – La partie finale du bloc no 2 : IlAfr, 200.
Cl. L. Naddari.
Fig. 6 – Bloc no 3 : CIL VIII, 11799 a.
Cl. L. Naddari.
35. CIL VIII, 26249 = AE, 1997, 1673 = AE, 1999, 1513 = AE,
2012, 1881. Voir en dernier lieu Khanoussi – Mastino 2012,
p. 150-153.
À la lumière de tout ce qui précède, nous
proposons de lire le texte de Mactaris qui nous
occupe ici comme suit :
[Pro salute] Imp(eratoris) Caes(aris) M(arci) Aureli
Ant|onini, Aug(usti), Armeniaci, Parthici, Medici | maximi, p(atris) p(atriae), trib(unicia) pot(estate) XXIIII, co(n)
s(ulis) III, | [imp(eratoris) V, - - - therm]as (?) M[ac]taritanor[um] | restitutas, a|nno Sexti Laterani proco(n)s(ulis), c(larissimi) v(iri); L(ucius) Rupilius Au[- - - dedicauit.
D(ecreto) d(ecurionum), p(ecunia) p(ublica) ?].
Pour le salut de l’empereur César Marc Aurèle
Antonin, Auguste, vainqueur des Arméniens, vainqueur des Parthes, très grand vainqueur des Mèdes,
père de la patrie, revêtu de la 24e puissance tribunicienne, élu consul pour la troisième fois, salué
imperator pour la cinquième fois, Lucius Rupilius
Au[- - -], a dédié les thermes (?) des Mactaritains
restaurés durant l’année du proconsul Sextius
Lateranus, homme clarissime. Par décret des décurions, à frais publics (?).
Il en ressort que Mactaris est loin d’être
restée une simple ciuitas pérégrine jusqu’à
l’année 169-170 apr. J.-C. ; à cette date, elle
doit être municipe de droit latin ou colonie36.
Les corrections apportées à cette dédicace permettront de relancer le débat au sujet de l’histoire
municipale de Mactaris et d’envisager un scénario
différent en mettant à contribution un second
document, en l’occurrence l’hommage rendu dans
cette même ville à l’un des clarissimes africains
les plus illustres de l’époque d’Antonin le Pieux,
M. Valerius Quadratus37. On pourra ainsi retracer
autrement le processus de promotion juridique de
Mactaris, à la faveur d’une meilleure connaissance
du cursus de ce notable et des liens qui l’unissaient à cette ville. En effet, la partie du texte de
cet hommage connue jusqu’ici, conservée dans les
réserves du Musée National du Bardo, est gravée sur
fragment d’une plaque en calcaire brisée à gauche
et écornée en bas à droite (fig. 7)38. Rédigé au datif,
36. Sur le droit latin provincial voir en particulier
Saumagne 1965 ; Le Roux 1986 ; Le Roux 1996 ;
Le Roux 1998 ; Chastagnol 1990 ; Chastagnol 1995.
37. CIL VIII, 11811 = ILPB, 103. PIR, III, V 124 ; PIR2, V 186 ;
RE, VIII, A, col. 216, no 325 ; Corbier 1982, p. 707-708 ;
Cébeillac 1972, no LXVIII, p. 149-151.
38. Nous adressons nos remerciements les plus sincères à
Moncef Ben Moussa, conservateur du Musée National du
Municipium Mactaritanum
516 Lotfi n addari
le texte retrace le cursus sénatorial de ce clarissime
connu également par d’autres textes épigraphiques
provenant de sa ville natale, Althiburos, et de la
capitale de l’empire39. Par un heureux concours
de circonstances, un deuxième fragment de cette
plaque, mis au jour dans des conditions qui nous
échappent et passée inaperçue pendant une longue
période, se trouve aujourd’hui exposé dans la cour
de la maison des fouilles de Makthar (fig. 8)40.
Commençons par donner, d’abord, le contenu du
premier fragment :
M VALERIỌ [- - -]
NA QVADṚ[- - -]
STLITIBVṢ[- - -]
DIS TRIB Ḷ[- - -]
LEG III AVG Q Ạ[---]
NICIP[---]
Fig. 7 – CIL VIII, 11811 = ILPB, 103.
Bardo, et à Fatma Naït Ighil pour avoir autorisé l’examen
direct de cette dédicace.
39. CIL VI, 1533 = CIL XIV, 3996 ; CIL VIII, 1829, 27772, 27776
= AE, 1908, 168. Dimensions : H. 107 cm ; l. 56 cm ; ép.
25 cm ; Hl. : entre 6,5 et 9 cm.
40. Nous adressons nos vifs remerciements à Jamel Hajji,
chargé de recherches à l’INP et conservateur du site archéologique de Mactaris pour avoir facilité l’examen direct de ce
fragment.
Deux lectures, avec quelques variations qui
concernent les deux dernières lignes, ont été
proposées par A. Beschaouch et Z. Benzina Ben
Abdallah, que voici :
Lecture de A. Beschaouch41 :
M(arco) Valerio, / [M(arci) f(ilio), Quiri]/na, Quadr[ato,
Xuiro] / stlitibus [iudican]/dis, trib(uno) l[aticlauio] / leg(ionis) III Aug(ustae), q(uaestori) A[ug(usti) des(ignato). Mu]/nicip/[es mun(icipii) Aelii / Hadriani Aug(usti)
Althiburitani].
Lecture de Z. Benzina Ben Abdallah42 :
M(arco) Valerio, / [M(arci) f(ilio), Quiri]/na, Quadr[ato,
Xuiro] / stlitibus [iudican]/dis, trib(uno) l[aticlauio] / leg(ionis) III Aug(ustae), q(uaestori) A[ug(usti) des(ignato).
Municipes mu]/nicip[i(i) Althiburitani].
Notons que c’est l’identité des dédicants placés
à la fin de l’inscription qui a posé problème : les
municipes, sans autre précision ethnique selon
R. Cagnat, les [mu]nicip[es municipii Aeli Hadriani
Aug(usti) Althiburitani] selon une restitution
proposée par A. Beschaouch – qui ne disposait
pas alors d’une photo de l’inscription –, suivi par
Z. Benzina Ben Abdallah et par tous ceux qui se
sont intéressés au cursus de ce clarissime et à l’histoire municipale de Mactaris. Commandés et conditionnés par la lecture traditionnelle de l’inscription de Mactaris corrigée plus haut, selon laquelle
Mactaris serait restée une simple ciuitas pérégrine
jusqu’à l’année 169-170, ils étaient tous enclins à
voir dans les municipes Althiburitani les dédicants
de cet hommage, étant donné qu’Althiburos est
connue pour être un municipe d’Hadrien et la ville
natale du clarissime honoré.
La découverte à Makthar du deuxième fragment (fig. 8) et la lecture que nous venons
de proposer à propos de l’inscription datée de
l’année 169-170 apr. J.-C. permettent de relancer
le débat au sujet du processus de la promotion juridique de Mactaris, notamment en ce qui concerne
le statut de municipium avant la promotion coloniale.
Le deuxième fragment de la plaque épigraphe
étant incomplet en haut, écorné à gauche,
41. Beschaouch 1969, p. 203.
42. ILPB, 103.
517
présente aujourd’hui un champ épigraphique
légèrement écaillé comportant un texte qui vient
compléter sans difficulté celui du premier fragment43. En outre, l’ordinatio du texte, sa mise en
page, la hauteur dégressive des lettres et le style
d’écriture adopté (des capitales africaines carrées
de belle facture), confortent l’appartenance des
deux fragments à une même dédicace (fig. 9-10).
Voici en effet le texte gravé sur le deuxième fragment :
[- - - - - -]
[- - -]ẠTO X VỊṚ
[- - -]VDICAṆ
[- - -]TICLAVIO
[- - - ]PATRONO M[.]
[- - -] Ḍ D P P
Fig. 9 – Les deux fragments de l’hommage rendu au clarissime
M. Valerius Quadratus.
Fig. 10 – Reconstitution de l’hommage rendu au clarissime
M. Valerius Quadratus.
Le texte complet doit s’établir comme suit :
Fig. 8 – Le deuxième fragment de la plaque.
43. H. 52,5 à droite et 48 cm à gauche ; l. 60 cm ; ép. 25 cm ;
h. l. : entre 9 et 6,5. Les nuances de couleur entre les deux
fragments sont dues en fait aux conditions de conservation.
Alors que le premier se trouvait depuis la fin du XIXe siècle
dans les réserves du Musée Alaoui (l’actuel Musée National
du Bardo), le second, conservé dans la cour à ciel ouvert de
la maison des fouilles de Makthar, était depuis longtemps
exposé aux intempéries.
M(arco) Valerio, / [M(arci) f(ilio), Quiri]/na (tribu),
Quadrato, (decem)uir(o)] / stlitibus [i]udican/dis, trib(uno) [la]ticlauio / leg(ionis) III A[ug](ustae), q(uaestori)
A[ug(usti)], patrono m[u]/nicip[ii]. D(ecreto) d(ecurionum), p(ecunia) p(ublica).
À Marcus Valerius Quadratus, fils de Marcus, de la tribu Quirina, membre du collège des dix hommes chargés de juger les litiges, tribun laticlave de la Troisième
légion Auguste, questeur d’Auguste, patron du municipe. Par décret des décurions, à frais publics.
Municipium Mactaritanum
518 Lotfi n addari
Il est ainsi question d’un hommage public
que la curie de Mactaris a rendu, decreto decurionum, pecunia publica, au clarissime althiburitain
M. Valerius Quadratus, qui était alors patron du
municipe44. Deux conclusions d’un grand intérêt
sont à retenir : d’une part l’hommage émane non
point des municipes Althiburitani retenus jusqu’ici,
mais de la curie du municipe de Mactaris. D’autre
part, c’est, dans cette dédicace de l’époque d’Antonin le Pieux, la première attestation du statut
du municipium pour cette importante cité d’origine numide qui fut le chef-lieu du pagus Thuscae
et Gunzuzi.
Mentionnant la questure impériale du clarissime honoré, gérée au plus tard en 151 apr. J.-C.,
cette dédicace doit être légèrement postérieure
aux trois inscriptions d’Althiburos qui se limitent à
mentionner qu’il fut simplement quaestor Augusti
designatus. Mais elle doit être légèrement antérieure à l’hommage qui lui fut rendu à Rome et
qui retrace son cursus jusqu’à la préture, gérée au
plus tard en 155 apr. J.-C.
Le libellé de cet hommage public rendu
en 148 ou en 152 apr. J.-C. est rédigé selon un
style solennel comparable à celui des inscriptions
laudatives accompagnant souvent les statues qui
honorent les patrons des cités romaines d’Afrique.
Les caractéristiques techniques du support choisi,
la paléographie et le formulaire épigraphique
impliquent une mise en scène de l’hommage plutôt
qu’une simple base de statue. On peut songer à
un piédestal monumental destiné à supporter la
statue du clarissime honoré, sur la face duquel
serait encastrée la plaque reconstituée et qui devait
occuper une place de choix dans le paysage urbain
de la ville : soit dans le forum de Trajan, soit à l’entrée d’un monument public valorisant45.
44. L’étude détaillée du cursus de ce notable althiburitain
paraîtra dans les actes du 5e colloque international Frontières,
territoires et mobilités au Maghreb (Antiquité et Moyen-âge)
organisé par le laboratoire de recherches « Occupation du
sol, peuplement et modes de vie dans le Maghreb antique
et médiéval », faculté des Lettres et des Sciences Humaines
de Sousse, 3-5 mai 2018. Coopté comme patronus municipi
Mactaritani, il est possible qu’il fût préalablement patron à
Althiburos. Le libellé de l’une des inscriptions de cette ville
(CIL VIII, 27772) permet en effet d’envisager cette hypothèse.
45. Concernant l’emplacement des statues dans les centres
monumentaux dans les cités romaines, voir à titre
d’exemple Le Roux 2008, p. 569-591.
Accompli en vertu d’un décret des décurions
et par dépense publique, cet hommage doit être
l’expression d’une gratitude manifestée par les
membres de l’ordo decurionum du municipe de
Mactaris, enorgueillis peut-être par un privilège
quelconque, à l’égard d’un clarissime qui aurait
rendu service à leur cité lorsqu’il remplissait la
questure de l’empereur Antonin le Pieux. Profitant
de ses liens étroits avec cet empereur, pour avoir
bénéficié de son indulgentia à deux reprises et
pour avoir été son propre quaestor, M. Valerius
Quadratus a pu jouer un rôle important dans la
promotion juridique de Mactaris46. En dépit du
silence de cette inscription à propos du contexte
de l’hommage rendu, il est tout à fait envisageable
que le motif de la cooptation comme patron du
municipe soit en rapport avec le rôle d’intermédiaire qu’il aurait assuré entre les Mactaritains et
l’administration impériale en faveur de l’acquisition de ce statut47. Les Mactaritains auraient ainsi
eu recours aux services d’un personnage illustre,
au profil imposant. Réciproquement, pour le clarissime honoré, c’était là une occasion pour accroître
sa notoriété et un rayonnement en dehors de sa
ville natale, dans la mesure où il fit aboutir le
dossier de promotion de Mactaris qui était en léger
« retard juridique » par rapport aux cités voisines,
Zama Regia et Althiburos ayant été respectivement
colonie et municipe par Hadrien48.
Le fait que Mactaris ait été municipium au
moment de l’hommage rendu au clarissime
46. L’idée d’un lien entre un bienfait quelconque de la part
de ce clarissime althiburitain à la cité de Mactaris et une
reconnaissance de cette dernière a été déjà développée par
N. Kallala, J. Sanmarti, J. Ramon, R. Alvarez, B. Maraoui
Telmini et M.C. Belarte dans le cadre d’une publication
commune portant sur la ville numide d’Althiburos et le
monde de Carthage. Cf. Kallala et al. 2014, p. 141.
47. Sur les patrons des cités romaines d’Afrique voir en dernier
lieu Jaïdi 2006, p. 41-60. Pour le thème des intermédiaires
entre les cités et les autorités publiques, voir Christol 2008.
48. Notons à cet égard l’intégration légèrement tardive des
notables Mactaritains dans les deux ordres supérieurs de
l’empire, à partir du dernier tiers du IIe siècle apr. J.-C. Pour
un récapitulatif sur les familles sénatoriales et équestres
de Mactaris, de l’ensemble des cités de la Thusca et de la
Byzacène, voir Belkahia-Karoui 2009, p. 45-48 et 67-75.
Leur nombre s’accrut durant l’époque sévérienne pour
se poursuivre jusqu’au IVe siècle. Dans l’état actuel de la
documentation, notamment celle de datation précise, le cas
le plus ancien est celui de Sex. Iulius Possessor, membre
de l’ordre équestre de l’époque de Marc Aurèle et Lucius
Verus. Pour le cursus de ce notable Mactaritain, voir en
dernier lieu Belkahia-Karoui 2009, no 138.
519
althiburitain permet de conforter la conclusion
formulée plus haut selon laquelle cette cité possédait déjà ce rang au moment de la dédicace pour
le salut de Marc Aurèle. On écartera donc l’idée
d’une promotion directe de Mactaris du statut de
ciuitas pérégrine au rang de colonie honoraire.
Ces données conduisent à une révision de la
nomenclature officielle de cette cité telle qu’elle
est révélée par la documentation épigraphique
sévérienne et post-sévérienne (colonia Aelia Aurelia
Mactaritana)49. On a affaire en fait à une nomenclature récapitulative et énumérative des deux phases
de promotion de la ville jusqu’au statut de colonie.
L’épithète Aurelia renverrait à l’empereur Marc
Aurèle, tandis que l’épithète Aelia désignerait à
notre avis Antonin le Pieux (T. Aelius Antoninus
Pius)50. En effet, contrairement aux propos de
J. Gascou51, il semble que l’épithète Aelium-a,
quand elle est employée seule (sans l’épithète
Hadrianum-a), doive renvoyer à Antonin le Pieux
plutôt qu’à Hadrien. Cette solution nous semble
convenir au cas de Mactaris. En effet, outre le lien
que nous envisageons entre l’hommage rendu au
clarissime althiburitain et l’élévation de cette ville
au rang de municipe de droit latin, un faisceau
d’indices signifiants, tirés de l’examen de la documentation épigraphique mactaritaine, conforte
l’hypothèse d’une promotion sous le règne de cet
empereur. Dans cette ville, Antonin le Pieux est
honoré par trois dédicaces52 ; deux d’entre elles
sont les plus anciens documents à faire connaître
un vocabulaire institutionnel d’une cité de statut
romain – le triumuirat quinquennalis par exemple53.
49. CIL VIII, 11801 = ILS, 458 ; CIL VIII, 11804 = ILS, 6787 ;
CIL VIII, 677 = 11910 ; AE 1949, 47.
50. CIL VIII, 8375 = ILS, 6876 (municipium Aelium Choba) ; AE,
1958, 128 (colonia Aelia Augusta Tipasa) ; IlAfr, 432 (municipium Aelium Thizika) ; CIL VIII, 1779 (colonia Aelia Augusta
Lares) ; CIL VI, 1685 (colonia Aelia Augusta Mercurialis
Thaenae).
51. Gascou 1972, p. 124.
52. CIL VIII, 622 = 11781 ; CIL VIII, 23599. La troisième,
signalée par G.-Ch. Picard (Picard 1974, p. 23) mais à ce
jour inédite, est une dédicace gravée sur une frise clavée
qui se rapporte à un monument « probablement tétrastyle
consacré à Antonin le Pieux ».
53. CIL VIII, 622 = 11781 ; CIL VIII, 23599. D’autres inscriptions un peu plus tardives font également état de magistratures romaines : en premier lieu, le triumvirat quinquennalis
(CIL VIII, 630 + 11827 = Belkahia Karoui 2009, no 197.
De même pour une inscription découverte à Maghrawa
(l’antique Macota) (CIL VIII, 686 = Belkahia Karoui, 2009,
no 201), malheureusement de lecture incertaine, et qui
Magistrats suprêmes, les triumuiri quinquennales,
héritiers des trois suffètes puniques, chargés du
cens, ne font de surcroît apparition dans l’épigraphie locale qu’à partir d’Antonin le Pieux. Cela
vient en effet couronner un processus de romanisation institutionnelle engagé depuis le règne de
Trajan quand une nomenclature romaine des institutions commence à s’établir54.
Plus significatif, c’est à partir du règne d’Antonin
le Pieux que commence à apparaître dans l’épigraphie locale le cursus honorum romain couronné par
la préfecture des cités du pagus Thuscae et Gunzuzi,
honneur accordé par délégation impériale aux
notables de Mactaris ayant parcouru de brillantes
carrières municipales. Sous le règne de Trajan,
c’est-à-dire à un moment où Mactaris était encore
une ciuitas pérégrine, le premier praefectus ciuitatium
du pagus Thuscae et Gunzuzi connu jusqu’ici a été
choisi parmi les officiers militaires55. De même, par
la formule patronus municipi, M. Valerius Quadratus
se distingue nettement du premier patron connu à
Mactaris, C. Bruttius Praesens L. Fulvius Rusticus,
qui fut proconsul d’Afrique à l’époque d’Hadrien
(133-134 apr. J.-C.)56. L’hommage qui lui fut rendu
en vertu d’un décret des décurions et par dépense
publique se limite à mentionner qu’il fut patronus
tout court, sans autres précisions sur le statut de la
pourrait faire référence à un notable [- - -] Mactaritanus,
on peut hésiter entre le duumvirat quinquennalis ou le
triumvirat quinquennalis) ; en second lieu, la praefectura iure
dicundo pro duumviris. (CIL VIII, 23421 = Belkahia Karoui
2009, no 202).
54. Picard 1957, p. 149.
55. AE, 1963, 96 ; Picard – Mahjoubi – Beschaouch 1963.
Voir en dernier lieu Aounallah 2010, p. 24-25. C’est là
un schéma qui n’est pas sans rappeler celui de la préfecture des tribus africaines. En effet, au début de l’époque
impériale, peut-être jusqu’à la fin du règne des Flaviens,
les praefecti gentis étaient choisis parmi les chevaliers en
même temps qu’ils géraient leurs milices équestres. Un
peu après, sous Trajan au plus tard, les praefecti gentis furent
choisis parmi les notables municipaux des cités africaines :
ceux de la préfecture des Musulamii et des Musunii Regiani
par exemple, appartenaient aux notables de la colonie
flavienne d’Emerita Ammaedara.
56. Thomasson 1996, no 68, p. 57-58 ; Picard 1957, p. 150.
Sur la foi d’une inscription fragmentaire (IRT, 545), il est
possible que ce même proconsul ait été également coopté
comme patron de la ville de Lepcis Magna. La restitution que
nous proposons pour les deux dernières lignes ([triumviro
capitali, patrono] / [Le]pcit[ani publice]) est fondée sur deux
dédicaces analogues provenant de cette même ville de la
future province de Tripolitaine (IRT, 517 et 536) adressées
à deux autres proconsuls d’Afrique choisis comme patrons
de la cité.
Municipium Mactaritanum
520 Lotfi n addari
ville57. On imagine mal que Mactaris ait été municipium à cette époque-là (sous Hadrien) et que les
Mactaritains aient omis d’y mentionner le statut
de leur cité.
Par cette promotion au rang de municipe de
droit latin sous le règne d’Antonin le Pieux – qui
suppose l’obtention automatique de la citoyenneté
romaine de ceux qui ont réussi à se faire élire à une
magistrature locale ou même ceux qui intégrèrent
chaque année la curie de la ville58 – se confirme
l’hypothèse selon laquelle Mactaris, tout en conservant le rôle de chef-lieu du pagus Thuscae et Gunzuzi,
fut l’une des deux ciuitates promues qui avaient
échappé au contrôle du praefectus pagi Thuscae et
Gunzuzi59. Rappelons que ce district administratif
comptait en 157 apr. J.-C. 62 ciuitates au lieu de
64 à la fin du règne de Trajan. Mieux encore, le
choix sous le règne d’Antonin le Pieux de l’un des
notables municipaux de Mactaris comme praefectus
de l’ensemble du pagus Thuscae et Gunzuzi contribue
à ce que se perpétue la prééminence de cette cité,
devenue municipe de droit latin, dans son contexte
administratif et régional.
Ce sont là des détails de l’histoire municipale et institutionnelle de Mactaris sur lesquels
on reviendra ultérieurement dans une étude plus
large portant sur l’œuvre municipale d’Antonin le
Pieux dans les provinces romaines d’Afrique. Dès
lors, on ne pourra plus limiter son action au seul
cas de Gigthis qu’il gratifia du statut de municipe de
droit latin majeur60.
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1981.
Le Roux 1986 = P. Le Roux, Municipe et droit latin en
Hispania sous l’Empire, dans RHD, 64, 1986, p. 325350.
Le Roux 1996 = P. Le Roux, Droit latin et municipalisation
en Lusitanie sous l’Empire, dans E. Ortiz de Urbina,
J. Santos (dir.), Teoria y practica del ordenamiento municipal en Hispania, Actes du symposium (Vitoria-Gasteiz,
1993), Vitoria, 1996, p. 239-253.
Le Roux 1998 = P. Le Roux, Rome et le droit latin, dans
RHD, 76, 1998, p. 313-341.
Le Roux 2008 = P. Le Roux, Les centres monumentaux des cités
de la péninsule Ibérique au Haut-Empire : à propos des sta-
tues, dans Cl. Berrendonner, M. Cébeillac-Gervasoni,
L. Lamoine (dir.), Le quotidien municipal dans l’Occident
romain, Clermont-Ferrand, 2008, p. 569-591.
Magioncalda 1992 = A. Magioncalda, L’epigrafe da Mactar
di C. Sextius Martialis (CIL, VIII, 11813), dans L’Africa romana, 9, 1992, p. 265-289.
M’Charek 1982 = A. M’Charek, Aspects de l’évolution démographique et sociale à Mactaris aux IIe et IIIe siècles ap. J.-C.,
Tunis, 1982.
M’Charek 1992 = A. M’Charek, Inscriptions découvertes entre
Zama Regia (Henchir Jama) et [Ma]rag(ui) Sara (Henchir
Chaâr), dans L’Africa romana, 9, 1991, p. 251-265.
Mastino 1984 = A. Mastino, La ricerca epigrafica in Tunisia
(1973-1983) II. Il caso di Mactaris, dans L’Africa romana,
1, 1984, p. 73-128.
Pallu de Lessert 1896 = A.-C. Pallu de Lessert, Fastes des
provinces africaines (Proconsulaire, Numidie, Maurétanies)
sous la domination romaine, Paris, 1896, vol. I.
Picard 1953 = G.-Ch. Picard, Les places publiques et le statut
municipal de Mactar, dans CRAI, 1953, p. 80-82.
Picard 1957 = G.-Ch. Picard, Ciuitas Mactaritana, Paris,
1957 (Karthago, 8).
Picard – Mahjoubi – Beschaouch 1963 = G.-Ch. Picard,
A. Mahjoubi, A. Beschaouch, Pagus Tuscae et Gunzuzi,
dans CRAI, 1963, p. 121-130.
Picard 1966 = G.-Ch. Picard, Le conventus ciuium romanorum de Mactar, dans Africa, 1, 1966, p. 65-78.
Picard 1974 = G.-Ch. Picard, 1974, Les fouilles de Mactar
(Tunisie) 1970-1973, dans CRAI, 1974, p. 9-33.
Picard 1987 = G.-Ch. Picard, Le statut politique de Mactar de
Trajan à Marc Aurèle, dans L’Africa romana, 4-2, 1987,
p. 461-467.
Saastamoinen 2010 = A. Saastamoinen, The phraseology of Latin building inscriptions in Roman North Africa,
Helsinki, 2010.
Saumagne 1965 = Ch. Saumagne, Le droit latin et les cités
romaines sous l’Empire : essais critiques, Paris, 1965.
Thébert 2003 = Y. Thébert, Thermes romains d’Afrique du
Nord et leur contexte méditerranéen. Études d’histoire et
d’archéologie, Rome, 2003 (BEFAR, 315).
Thomasson 1996 = B.-E. Thomasson, Fasti Africani.
Senatorische und ritterliche Amtsträger in den römischen
Provinzen Nordafrikas von Augustus bis Diokletian, Arlöv,
1996 (Acta Instituti Romani Regni Sueciae, 4°, 53).
MEFRA 130/2 – 2018
Sommaire
STUDI OSTIENSI. QUARTO SEMINARIO
Premessa, par Nicolas Laubry, Fausto Zevi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
267-268
iL territorio di ostia nei periodi più antichi
Un ritrovamento nel c.d. Fiume morto. Nuove riflessioni su Ostia arcaica, par Angelo peLLegrino, Andrea carbornara,
Antonia arnoLdus huyZendveLd . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
269-271
La necropoli di Ficana tra le prime e le ultime campagne di scavo: brevi cenni sulle novità emerse, par
Margherita bedeLLo tata, Maria Rosa Lucidi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
273-276
Il rituale funerario aristocratico di età orientalizzante: nuovi dati da Ficana, par Alessandro bedini . . . . . . . . . . .
277-281
Solonium, par Filippo coareLLi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
283-287
IL territorio deLLa coLonia di ostia aLLa Luce di nuove indagini
Mezzo millennio di storia romana a Casal Bernocchi-Malafede. I risultati degli scavi 2015, par Carla caLdarini et al.
289-294
Ritrovamenti archeologici nel corso delle opere di sistemazione del Canale Bagnolo (via Ostiense Km 22,700), par
Sandro LorenZatti, Cristian d’ammassa, Angelina de LaurenZi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
295-301
Recenti indagini archeologiche nell’area dello svincolo stradale di Ostia Antica sulla via del Mare, par Simona pannuZi
et al. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
303-307
Sistemazioni di anfore per usi diversi nel Suburbio di Ostia, par Andrea carbonara et al. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
309-313
Sistematizzazione dei dati archeologici nel suburbio ostiense tra la valle di Malafede e i lembi dello Stagno, par
Anna bucceLLato, Fulvio coLetti, Emanuele giannini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
315-320
Indagini archeologiche tra il Canale Trasverso e l’Episcopio. Osservazioni preliminari sulle fasi post-classiche di Porto,
par Cristian d’ammassa, Antonio manna, Renato sebastiani . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
321-324
La villa A di Dragoncello (Acilia). Alcuni dati dello scavo e dallo studio dei reperti, par Gloria oLcese et al. . . . . . .
325-340
epigrafia
Ostia dispersa, par Maria Letizia caLdeLLi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
341-350
Epigrafi ostiensi nelle vendite all’asta o dagli antiquari, par Lucio benedetti . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
351-359
Due iscrizioni nello Schloß Glienicke di Berlino, par Antonio Licordari . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
361-366
Frammento epigrafico relativo a P. Claudio Abascanto, par Fausto Zevi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
367-374
Procurator annonae et procurator utriusque portus au III siècle : l’évolution vers une seule fonction ?, par
Michel christoL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
375-386
Le donne di Ostia come proprietarie di immobili e schiavi, par Christer bruun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
387-393
e
Varia
Un nuovo rilievo fittile con scena di mestiere dalla Necropoli dell’Isola Sacra, par Franca tagLietti . . . . . . . . . . . .
395-398
Vetri e indicatori di produzione vetraria a Ostia e Porto, par Barbara Lepri, Lucia saguì . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
399-409
Un accumulo di marmi di spoglio rinvenuti lungo la via Portuense antica in località Tenuta di Ponte Galeria, par
Matthias bruno, Andrea carbonara, Cinzia moreLLi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
411-425
VARIA
Dioniso e Arianna in un ipogeo dei Cristallini: la religiosità dionisiaca dei chariestatoi di Neapolis, par
Lucia A. scatoZZa höricht . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
427-450
Sextus Pompée, un imperator (il)légitime à plus d’un titre : nouvelles interprétations autour de la titulature praef.
clas. et orae marit. ex s. c., par Bertrand augier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
451-466
L’Heliogabalium del Palatino, i suoi giardini e la cultura materiale urbana a Roma nell’età dei Severi, par
Giorgio riZZo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
467-508
Municipium Mactaritanum, par Lotfi naddari . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
509-521
Un suonatore di cetra venduto all’asta e due bronzetti dall’acropoli di Cuma. Amare riflessioni, par Carlo rescigno . .
523-526
Table des matières du tome 130 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
527-528
Mélanges de l’École française de Rome
ANTIQUITÉ
Directeur
Catherine virLouvet
Directrice de l’École française de Rome
Rédaction
Nicolas Laubry
Directeur des études pour l’Antiquité
Directeur des publications
Richard figuier
Secrétariat de rédaction
Franco bruni
Sophie duthion
Composition
Hélène franchi
Comité de lecture
Audrey bertrand
Université Paris Est-Marne-la-Vallée
Elisa nicoud
CNRS, UMR 7264-CEPAM (Nice Sophia Antipolis)
Maria Letizia caLdeLLi
Sapienza-Università di Roma
Marinella pasquinucci
Università degli Studi di Pisa
Dominique castex
CNRS, UMR 5199-PACEA (Bordeaux)
Paolo poccetti
Università degli Studi di Roma Tor Vergata
Jean-Pierre guiLhembet
Université de Paris 7-Denis Diderot
Gilles sauron
Université de Paris 4-Sorbonne
Olivier huck
Université de Strasbourg
Christopher J . smith
University of St Andrews & British School at Rome
Jean-Luc LamboLey
Université de Lyon 2
Gianluca tagLiamonte
Università del Salento
Daniele manacorda
Università degli Studidi Roma Tre
Koenrad verboven
Ghent University
Dario mantovani
Università degli Studi di Pavia
École française de Rome
Piazza Navona 62
00186 ROMA
© École française de Rome – 2019
ISSN 0223-5102
ISBN 978-2-7283-1390-7
LR13ES11 - مخبر البحث
: املزاق، البيزاقينة،البيزاقيوم
اشتغال االرض التعمير وامناط العيش
فعاليات الندوة العلمية الدولية السادسة
2019 جوان15 ،14 ،13 ،سوسة
أع ّدها للنشر
عبد اللطيف مرابط
Mosaïque de Smirat - Musée archéologique de Sousse
Byzacium, Byzacène, Muzaq :
: املزاق، البيزاقينة،البيزاقيوم
Occupation du sol, peuplement
اشتغال االرض التعمير وامناط العيش
et modes de vie
التعمير و أمناط العيش يف بالد املغرب،“ اشتغال األرض
” يف العصور القدمية و الوسيطة
Laboratoire de Recherche - LR13ES11
“ Occupation du sol, peuplement et modes de vie
dans le Maghreb antique et médiéval ”
Byzacium, Byzacène, Muzaq :
Occupation du sol, peuplement et modes de vie
Actes du 6e colloque international
Sousse, 13, 14 et 15 juin 2019
Édités par
Abdellatif MRABET
Mosaïque de Smirat - Musée archéologique de Sousse
Byzacium, Byzacène, Muzaq :
Occupation du sol, peuplement et modes de vie
Édités par Abdellatif MRABET
Coordination : Tarek MANI
© Laboratoire de Recherche - (O. S. P. M. V. M. A. M.)
ISBN 978-9973-962-48-5 / Sousse - 2021
Conception et Impression : Focus Graphics
Univérsité de Sousse
Faculté des Lettres et Sciences Humaines
Laboratoire de Recherche - LR13ES11
“ Occupation du sol, peuplement et modes de vie
dans le Maghreb antique et médiéval ”
Actes du 6e colloque international
Byzacium, Byzacène, Muzaq :
Occupation du sol, peuplement et modes de vie
Sousse, 13, 14 et 15 Juin 2019
Édités par
Abdellatif MRABET
Sousse - 2021
4
Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
Liste des colloques internationaux antérieurs organisés et publiés par le laboratoire
de recherche LR13ES11 « Occupation du sol, peuplement et modes de vie dans le
Maghreb antique et médiéval » :
- Géographie Historique du Maghreb antique et médiéval. Etat des lieux et
perspectives de recherches, Actes du premier colloque international du LR13ES11,
Sousse 14, 15 et 16 mars 2014, Sousse avril 2015.
- Le réseau routier dans le Maghreb Antique et médiéval, Actes du deuxième
colloque international du LR13ES11, Sousse 06, 07 et 08 avril 2015, Sousse juillet
2016.
- Le peuplement du Maghreb antique et médiéval, Actes du troisième colloque
international du LR13ES11, Sousse 05, 06 et 07 mai 2016, Sousse mai 2017.
- Vie et genres de vie au Maghreb. Antiquité et Moyen Age, Actes du quatrième
colloque international du LR13ES11, Sousse 04, 05 et 06 mai 2017, Sousse novembre
2017.
- Frontières, Territoires et Mobilités au Maghreb (Antiquité et Moyen Age), Actes
du cinquième colloque international du LR13ES11, Sousse 03, 04 et 05 mai 2018,
CPU, Tunis, 2021.
SOMMAIRE
Auteur Titre de l’article Pages
Préface :....................................................................................................................................................................08
Sofiène Ben Moussa, Lotfi Belhouchet, Nabiha Aouadi et Rached Jaballi :
Peuplement et mode de vie préhistoriques dans la région d’El-Alia (Salakta, Mahdia, Tunisie orientale)............12
Ouiza Ait Amara :
Thapsus, la bataille et le rôle de Juba Ier.............................................................................................................29
Zakia Ben Hadj Naceur-Loum :
Les monnaies de tombes de la Byzacène (146 av. J.-C. - 40 ap. J.-C.) : essai de réflexion sur les rites et les
gestes funéraires.......................................................................................................................................................54
Najoua Chebbi :
Essai d’identification des tribus voisines des Capsitani sous le Haut-Empire..................................................66
Mohamed Chérif Marzougui :
Les Musunii Regiani en Byzacène occidentale, de la natio à la « respublica » : dynamique socioculturelle......83
Lotfi Naddari :
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux......................................................................................105
Claude Briand-Ponsart :
Les fondations privées en Byzacène pendant le Haut-Empire.........................................................................122
Slah Selmi :
Namgiddo d’Vzaae.............................................................................................................................................134
Slim Aliouet et Mondher Brahmi :
Recherches géoachéologiques sur la voie antique Speculum / Capsa : Cartographie des dynamiques de son
paysage géomorphologique et essai de restitution................................................................................................143
Hamden Ben Romdhane, Nesrine Nasr, Moufida Jnen, Kais Trabelsi, Bessem Ben Saad et
Mansour Othman :
Etudes topographique et archéologique de Henchir Douamis, un site antique inédit des environs de
Caput Vada.....................................................................................................................................164
Nabil Belmabrouk :
L’occupation du sol dans la région de Macomades minores-Iunci...................................................................197
Anis Hajlaoui :
A propos de l’occupation d’un site de la Byzacène intérieure : Hr El Araïs (Tunisie centrale).......................218
Lazhar Nebti :
Les artisans de la Byzacène : étude épigraphique...........................................................................................230
Fethi Béjaoui :
Décor des mosaïques tardives de Byzacène, un art populaire ?......................................................................247
François Baratte :
Quelques remarques sur la sculpture architecturale et ornementale en Byzacène à la fin de l’Antiquité....265
Abdellatif Mrabet, Mohamed Riadh Hamrouni et Tarek Mani :
Nouveaux témoins de production amphorique antique au sud d’Hadrumetum / Sousse..............................279
Olfa Hsini Hamdi :
Statues en toge de Thysdrus.............................................................................................................................309
Mohamed Grira :
Les Staberii : une famille africo-romaine de la région de Sufes (Sbiba, Tunisie centrale)...............................321
Leila Ladjimi Sebaï :
Un nouveau flamine chrétien en Afrique romaine : à propos d’un texte inédit provenant de
Agger (Hr Sidi Amara) ...........................................................................................................342
Mohamed Ellefi :
La province ecclésiastique de la Byzacène au Vè siècle..................................................................................350
Mourad Chetoui et El Arbi Arbi Sghaier :
Note préliminaire sur la découverte d’une église rurale tardive à Koustilya (Tozeur), région de la Byzacène
méridionale.........................................................................................................................................................369
Hédi Fareh :
Maux et fléaux en Byzacène (146 av. J.-C. /698 ap. J.-C.)...............................................................................397
Jean-Pierre Laporte :
Les Gandolphe et l’archéologie de Sousse et de la Tunisie (XIXe-XXe siècles)...............................................424
Hanène Ben Slimène :
Un nouveau duc de la Byzacène sur des sceaux byzantins inédits de Carthage............................................441
Mondher Brahmi :
L’archéologie rurale et le développement local de la région de Gafsa : quelques perspectives pour une
diversification du tourisme rural............................................................................................................................450
البيزاقيوم ،البيزاقينة ،املزاق :اشتغال االرض التعمير وامناط العيش (أعمال الندوة الدولية السادسة)
البيزاقيوم ،البيزاقينة ،املزاق :
اشتغال االرض التعمير وامناط العيش
1
2
اسية» ونشأة املدينة األميرية بإفريقية وبالد ُ
املزاق( .ص-6ص)32
«الع ّب ّ
أسماء عمارة
أعدها للنشر :عبد اللطيف مرابط
تنسيق :طارق ماني
حقوق النشر محفوظة ملخبر البحث " LR13ES11اشتغال األرض ،التعمير وأنماط العيش
ببالد املغرب في العصور القديمة والوسيطة" ،جامعة سوسة
ردمد - 978-9973-962-48-5 :سوسة 2021 -
تصميم و طباعة :فوكيس ڤرفيكس
البيزاقيوم ،البيزاقينة ،املزاق :اشتغال االرض التعمير وامناط العيش (أعمال الندوة الدولية السادسة)
جامعة سوسة
كلية األداب والعلوم اإلنسانية
مخبر البحث -
LR13ES11
“ اشتغال األرض ،التعمير و أمناط العيش
ببالد املغرب يف العصور القدمية و الوسيطة ”
البيزاقيوم ،البيزاقينة ،املزاق :
اشتغال االرض التعمير وامناط العيش
فعاليات الندوة العلمية الدولية السادسة ملخبر البحث “اشتغال األرض ،التعمير
وأنماط العيش ببالد املغرب في العصور القديمة والوسيطة"
سوسة 15 ، 14 ، 13 ،جوان 2019
أعدها للنشر
عبد اللطيف مرابط
سوسة 2021 -
3
البيزاقيوم ،البيزاقينة ،املزاق :اشتغال االرض التعمير وامناط العيش (أعمال الندوة الدولية السادسة)
5
الفهرس
اجلزء العربي
عنوان املقال
املؤلف
أسماء عمارة
الصفحة
“الع ّباس ّية” ونشأة املدينة األميرية بإفريقية وبالد املُزاق6......................................
بالساحل من خالل األسرار اجلل ّية يف املناقب ال ّدهمان ّية البن الد ّباغ القيرواني33.....
بثينة بن حسني التّعمير ّ
رشدي بلمبروك
محاولة حتديد موقع أم األصابع48...............................................................
محمد اللواتي هنشير النّفيضة :امللكية العقّارية وخدمة األرض72...............................................
جهادالصويد
بالد حمامة (جبل وسالت) :الشواهد األثرية واخلصائص املجالية93...........................
AVANT-PROPOS
Portant sur la Byzacène, un important espace taillé dans le vaste territoire
de l’ancienne Proconsulaire du haut empire, les présents actes constituent une
somme de 25 textes - 20 en langue française, 5 en langue arabe - consentis par
des historiens et des archéologues appartenant à des horizons professionnels
divers, des enseignants - chercheurs mais aussi des praticiens, archéologues
et numismates. Ils viennent ici enrichir et prolonger - sans les reprendre des recherches antérieures consacrées à l’étude de ce qui fut l’une des plus
dynamiques provinces africaines de l’antiquité tardive et qui, à ce titre, avait déjà
motivé bien d’autres colloques, dont celui tenu par nos soins, ici même, à la
faculté des lettres et des sciences humaines de Sousse, voici plus de vingt ans.
Déclinées selon les axes qui font l’objet et le programme scientifiques du
laboratoire LR13ES11 - l’occupation du sol, le peuplement et les modes de vie - les
contributions ici rassemblées font la part belle à l’interrogation du sol et nous
livrent de ce fait de nombreuses données archéologiques inédites, obtenues
tantôt par la fouille programmée, tantôt par des enquêtes de terrain basées sur
la simple prospection. En effet, comme de tradition, le thème de l’occupation du
sol est celui qui nous apporte le plus de nouveautés archéologiques, servi pour
la Byzacène orientale par d’intéressants résultats obtenus sur différents sites,
que ce soit du côté de Sahline, dans les environs d’Hadrumetum/ Sousse, à Hr
Douamis, près de Caput Vada/ Chebba, à El Alia, près de Salakta - recherche de
préhistoire - ou encore plus au sud, du côté de Macomades Minores Iunci/ Younga.
S’agissant de la Byzacène intérieure, méridionale et occidentale, la moisson est
également bonne notamment avec un compte-rendu de fouille d’une petite
église rurale tardive sise à Koustylia, entre Thiges et Tusuros, en bordure du
Chott el-Jérid. A cela, s’ajoutent, des données de géo-archéologie recueillies le
long de la voie Speculum-Capsa ainsi que d’autres, entièrement archéologiques,
issues d’opérations de prospection menées en Byzacène centrale, notamment à
Hr El Arais…
L’archéologie étant aussi dans l’étude de la culture matérielle et dans le
déchiffrement et l’analyse sémiotique des artefacts et de leur appréciation
économique, certains textes se sont intéressés aux productions artisanales pour
les étudier sous l’angle des savoir-faire et de la création (mosaïques et sculptures
diverses issues d’ateliers de Byzacène) ou pour mieux en cerner les foyers et
apprécier l’apport typo-chronologique (production amphorique). D’autres encore,
dans une autre démarche de terrain mais, qui tient plus de la géographie historique
que de l’archéologie, ont plutôt cherché à configurer et délimiter des espaces
(province ecclésiastique de Byzacène) ou à situer des entités tribales dans leurs
territoires (tribus au voisinage des Capsitani et les Musunii Regiani)…
Construit sur la base d’une documentation principalement écrite - sources
littéraires, listes conciliaires, épigraphie -, un autre lot de contributions traite
de sujets aussi variés que la bataille de Thapsus, en 46 av. J-C., la politique
municipale d’Antonin le pieux (Mactaritana II), les fondations privées ou encore les
maux et les fléaux que la province a connus pendant l’antiquité. De même, moins
hétéroclites, plus homogène car d’échelle réduite est aussi un autre ensemble
de textes attachés à nous faire connaître des individualités et à retracer leurs
parcours - un nouveau duc de Byzacène, un flamine chrétien de la cité d’Agger,
Namgiddo d’Uzae, les staberii de la région de Sufes…
Consacrée au temps médiéval et poste médiéval, la partie des actes
rédigée en langue arabe est constituée de cinq contributions voulues en réponse
à des interrogations ponctuelles diverses, qu’il s’agisse d’identification et de
localisation de station routière avec recours à la prospection géophysique (Oum
el Asabe sur la voie El-Jem-Sfax) ou d’études sur l’histoire et le peuplement
de différents sites (site princier d’el-Abbassiya dans la région de Kairouan ou
celui d’Enfidha) ou territoires (le Sahel et les villages de Bled Hmama, dans la
montagne de Ouesselet).
Cependant, le sujet de la Byzacène étant par trop vaste, les actes comptent
aussi une contribution d’historiographie (Les Gandolphe) et une autre d’approche
patrimoniale en vue de développement local dans la région de Gafsa, deux
heureux détours qui ajoutent à l’intérêt de l’ensemble.
Abdellatif MRABET
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux
Lotfi Naddari
105
(p. 105-121)
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux1*
Lotfi Naddari2**
Résumé
Ce travail est la suite d’une recherche que nous avons consacrée à l’acquisition de Mactaris
(Makthar, dans le Haut Tell tunisien) du statut de municipe (Naddari L., 2018, p. 509-521). Il met
à contribution une dédicace monumentale en l’honneur de l’empereur Antonin le Pieux signalée
par G. Ch. Picard dans son rapport des fouilles effectuées entre 1970 et 1973. Par son formulaire
épigraphique, par sa datation précise, et surtout en la rapprochant à un hommage public que les
Mactaritains avaient rendu au clarissime africain, le notable althiburitain M. Valerius Quadratus,
coopté patronus municipii Mactaritani, cette dédicace, demeurée inédite jusque là, trouve une
place de choix dans le dossier de l’histoire municipale de cette cité de la future province de
Byzacène. Elle conforte en effet l’hypothèse de sa promotion au statut de municipe sous le
règne d’Antonin le Pieux. Ainsi, deux acquis majeurs en sont les résultats. Premièrement, il est
définitivement établi que Mactaris, avant d’être promue au statut de colonie sous le règne de
Marc Aurèle, a été bel bien municipe. Deuxièmement, on ne pourra plus limiter l’action municipale
de l’empereur Antonin le Pieux au seul cas de Gigthis qu’il gratifia du statut de municipe de droit
latin majeur ; la liste est encore plus longue et son œuvre municipale dans les provinces romaines
d’Afrique est beaucoup plus importante…
Mots-clés : Mactaris, Antonin le Pieux, dédicace monumentale, municipe, M. Valerius Quadratus.
Summary
This work is the result of a research that we have devoted to the acquisition of Mactaris
(Makthar, in the Tunisian High Tell) of the status of municipium (NADDARI L., 2018, p. 509-521). It
includes a monumental dedication in honor of Emperor Antoninus The Pius, as mentioned by G.
Ch. Picard in his report on excavations carried out between 1970 and 1973. By its epigraphic form,
its precise dating, and above all by bringing it closer to a public tribute that the Mactaritans have
paid to the African clarissime, the Althiburitan notable M. Valerius Quadratus, co-opted patronus
municipii Mactaritani, this dedication, still unpublished to nowadays, finds a place of choice in
the record of the municipal history of this city of the future Byzacene province. It confirms the
hypothesis of its promotion to the status of municipium during the reign of Antoninus The Pious.
Thus, two major achievements are the results. First, it is definitively established that Mactaris, before
being promoted to colony status under the reign of Marcus Aurelius, was indeed a municipium.
Secondly, it will no longer be possible to limit the municipal action of Emperor Antoninus The Pius
to the single case of Gigthis, which he granted the status of a major Latin law municipium; the list
is even longer and his municipal work in the Roman provinces of Africa is much more important...
Keywords : Mactaris, Antoninus The Pius, monumental dedication, municipium, M. Valerius
Quadratus.
Dans le rapport sur la campagne de fouille à Mactaris (1970-1973) publié dans les Comptes
rendus de l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres, G. Ch. Picard a signalé une dédicace en
l’honneur de l’empereur Antonin le Pieux gravée sur une frise clavée faisant partie des inscriptions
et des blocs récupérés de divers monuments de la ville et remployés dans les murs fortifiés des
1* Cette recherche doit beaucoup aux remarques et aux suggestions prodiguées par MM. A. Beschaouch et L.
Maurin. Qu’ils trouvent ici l’expression de ma profonde gratitude. Qu’il me soit permis également d’adresser mes
remerciements les plus sincères à MM. J. C. Golvin et H. Ksouri pour leurs remarques d’ordre architectural. Mes
remerciements vont également à mon ami S. Ben Khelifa pour son aide considérable.
2 ** Faculté des Sciences humaines et sociales de Tunis (Université de Tunis) ; membre du Laboratoire de Recherche
« Occupation du sol, peuplement et modes de vie dans le Maghreb antique et médiéval », Faculté des Lettres et des
Sciences humaines de Sousse (Tunisie) – lotfinaddari@gmail.com
106
Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
Grands Thermes de l’Est. (Fig. 1) Il l’attribue à un monument « probablement tétrastyle consacré
à Antonin le Pieux. »3 Néanmoins, ce document est demeuré jusqu’à nos jours inédit.
Les prospections que nous avons conduites dans le secteur sud-est du site archéologique
de Mactaris4 ont permis le repérage de quatre fragments de cette dédicace monumentale
incomplète. Elle vient s’ajouter, en effet, à deux hommages connus de longue date provenant de
cette même cité, en l’honneur de ce même empereur 5. Par son formulaire épigraphique, par sa
datation précise, et surtout en la rapprochant de l’hommage rendu au clarissime africain, notable
althiburitain, M. Valerius Quadratus, coopté patronus municipii Mactaritani6, la nouvelle dédicace
en l’honneur d’Antonin le Pieux s’insère dans le le dossier de l’histoire municipale de cette cité
du Pagus Thuscae et Gunzuzi. Mieux encore, elle conforte les résultats auxquels nous sommes
parvenu à propos de la promotion juridique de cette cité au statut de municipe de droit latin sous
Antonin le Pieux7.
Mais avant de présenter le nouveau document et le commenter en le confrontant aux
hommages déjà rendus à Antonin le Pieux, ainsi qu’à une dédicace inédite en l’honneur de Marc
Aurèle César, et pour la clarté de nos propos, nous procédons d’abord au rappel des acquis des
recherches que nous avons engagées à propos de l’histoire municipale de cette cité.
Fig. 1 : Les thermes de l’Est de Mactaris.
(Cliché de l’auteur)
C’est en effet à la lumière de la révision du texte d’une fameuse inscription monumentale de
Mactaris datant de l’époque de Marc Aurèle8, qu’il nous a été possible de proposer une nouvelle
lecture de l’histoire municipale de cette ville. Par la réorganisation de ses claveaux épigraphes,
il s’avère en effet qu’elle renvoie tout simplement à la commémoration de la fin d’un chantier
de restauration des thermes ([therm]as Mactaritanorum restitutas) et qu’elle ne comporte pas
la mention d’une [ciuit]as Mactaritonorum, sujet de la dédicace du capitole comme le proposait
G. Ch. Picard9. Il en ressort, manifestement, que Mactaris est loin d’être restée ciuitas pérégrine
jusqu’à l’année 169-170 apr. J.-C.
3 Picard G.-Ch., 1974, p. 23.
4 J’adresse mes vifs remerciements à MM. A. Drine et M. Chaouali, qui, par les facilités et les autorisations nécessaires,
ont bien voulu rendre possible la réalisation de ce travail. Ma reconnaissance va également au personnel du site
archéologique de Mactaris pour leur disponibilité inlassable : Borni Benslema, Hamida Mrabti, Souad Nessiri, Sami
Belaouaied, Taher Madhkour, Mohamed Belguith, Mohamed Amine Chaâbane, et Monji Hachadi.
5 CIL VIII, 622 = 11781 et CIL VIII, 23599.
6 CIL, VIII, 11811 = ILPB, 103. Corbier M., 1982, p. 707-708 ; Naddari L., 2018 a, p. 509-521 ; Naddari L., 2020. (à paraître)
7 Sur le droit latin provincial voir en particulier Saumagne Ch., 1965; Chastagnol A., 1990, p. 351-365 ; Chastagnol A.,
1995, p. 217-227 ; Le Roux P., 1986, p. 325-350; ID., 1996, p. 239-253; ID., 1998, p. 313-341; ID., 2017, p. 585-608.
8 CIL VIII, 11799 + IlAfr, 200 a et b + AE, 1960, 114. C’est sur la base de cette dédicace qu’a été retenue l’idée que
Mactaris est restée une simple ciuitas pérégrine jusqu’à l’année 169-170 apr. J.-C. Cf. Picard G. Ch., 1953, p. 80-82.
9 Picard G. Ch., 1957, p. 151-152.
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux
Lotfi Naddari
107
(p. 105-121)
Cet acquis a permis de relancer le débat autour de l’histoire municipale de cette cité et
d’envisager un nouveau scénario en mettant à contribution un hommage rendu, dans cette
même ville, au clarissime althiburitain de l’époque d’Antonin le Pieux, M. Valerius Quadratus10. La
dalle fragmentaire connue jusqu’ici, qui affiche une partie de son cursus sénatorial11, vient d’être
complétée en effet par un deuxième fragment adjacent12, lequel permet d’établir le texte complet
comme suit :
M(arco) Valerio, / [M(arci) f(ilio), Quiri]/na (tribu), Quadrato, (decem)uir(o)] / stlitibus
[i]udican/dis, trib(uno) [la]ticlauio / leg(ionis) III A[ug](ustae), q(uaestori) A[ug(usti)],
patrono m[u]/nicip[ii]. D(ecreto) d(ecurionum), p(ecunia) p(ublica).
Il est ainsi question d’un hommage public que la curie de Mactaris a rendu, decreto
decurionum, pecunia publica, à ce clarissime coopté patron du municipe13. Accompli en 148
ou en 152 apr. J.-C., cet hommage de l’époque d’Antonin le Pieux est, dans l’état actuel de la
documentation, la première attestation du statut du municipium pour la cité de Mactaris. Il doit
être l’expression de la gratitude manifestée par les membres de l’ordo decurionum à l’égard
d’un clarissime qui, par ses liens étroits avec l’empereur Antonin le Pieux, a, à notre avis, contribué à la
promotion de leur ville au rang de municipe14.
C’est ainsi que nous avons eu l’opportunité de réviser le sens de la nomenclature officielle
de cette cité telle qu’elle est révélée par une documentation épigraphique d’époque sévérienne
et post-sévérienne : colonia Aelia Aurelia Augusta Mactaritana15. En effet, l’épithète Aurelia placée
en seconde position renvoie à coup sûr à l’empereur Marc Aurèle, tandis que l’épithète Aelia placée
en incipit dérive du gentilice impérial Aelius, à notre avis celui d’Antonin le Pieux (T. Aelius Antoninus Pius)
plutôt que celui d’Hadrien (P. Aelius Hadrianus)16. Exception faite en effet de l’inscription monumentale
signalée par G. Ch. Picard, Antonin le Pieux est déjà honoré par deux dédicaces (textes n° 1 et 2)17 traduisant
la place de choix qu’il occupait parmi les empereurs honorés dans cette ville.
Texte n° 1: CIL VIII, 622 = 11781 (Mactaris)
Imp(eratori) Caesari, diui Hadri/ani f(ilio), diui Traiani Parthi/ci n(epoti), diui Neruae
pron(epoti),/ T(ito) Aelio Hadriano An/tonino Aug(usto) Pio, pont(ifici) max(imo), /
trib(unicia) pot(estate) XX, imp(eratori) II, co(n)s(uli) IIII, p(atri) p(atriae), / P(ublius)
[---] [---] CVIVS (?) / I[---]I / IM[---]M ob hono[r]em praefec/tur[ae ---]io / in[---].
Date: 10 décembre 156- 9 décembre 157 apr. J.-C.
Texte n° 2: CIL VIII, 23599 = AE, 2010, 1791 (Ksar Bou Fatha, environs de Mactaris)18
Imp(eratori) Caesari, diui Hadriani / fil(io), diui Traiani Parthic(i) n(epoti), / diui Neruae
pron(epoti), T(ito) Aelio / Hadriano Antonino Aug(usto) / Pio, pont(ifici) max(imo),
trib(unicia) po(testate) XXI, imp(eratori) II, / co(n)s(uli) IIII, p(atri) p(atriae), P(ublius)
I[ulius A]diectus (?) praef(ectus) LXII / ciu[itatium pagus Thuscae et Gunzuzi --IIIui]r [q(uin)q(uennalis)], secun/[dum p]ollicitationem [su]am, pecunia [s]ua posuit
idemq(ue) dedic(auit). D(ecreto) d(ecurionum).
10 CIL, VIII, 11811 = ILPB, 103 ; PIR, III, V 124 ; PIR2, V 186 ; RE, VIII, A, col. 216, n° 325 ; Corbier M., 1982, p. 707-708 ;
Cébeillac M., 1972, n° LXVIII, p. 149-151.
11 CIL VIII, 11811 = ILPB, 103. Son cursus est révélé également par d’autres textes épigraphiques provenant de sa
ville natale, Althiburos, et de Rome : CIL VI, 1533 = CIL XIV, 3996; CIL VIII, 1829, 27772, 27776 = AE, 1908, 168.
12 Naddari L., 2021, p. 271-294.
13 Naddari L. 2021, p. 271-294.
14 Sur les patrons des cités romaines d’Afrique voir en dernier lieu Jaïdi H., 2006, p. 41-60. Pour le thème des
intermédiaires entre les cités et les autorités publiques, voir Christol M., 2008, p. 523-544.
15 CIL VIII, 11801 = ILS, 458 ; CIL VIII, 11804 = ILS, 6787 ; CIL VIII, 677 = 11910 ; AE 1949, 47.
16 Beschaouch A., 1996, p. 252.
17 CIL VIII, 622 = 11781; CIL VIII, 23599.
18 AAT , XXX, (f. Maktar), 185.
1
108
Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
Date: 10 décembre 157- 9 décembre 158 apr. J.-C.
Ces deux dédicaces ont l’intérêt également de faire référence, pour la première fois dans
cette ville, au vocabulaire institutionnel d’une cité de statut romain. C’est le cas des triumuiri
quinquennales, magistrats suprêmes chargés du cens, héritiers des trois suffètes puniques.
(texte n° 2) Elles font connaître également, pour la première fois, à Mactaris, un cursus honorum
romain couronné par la préfecture des cités du pagus Thuscae et Gunzuzi. Insérée dans le cursus
municipal, cette préfecture fut accordée par délégation impériale à un notable de Mactaris arrivé
au faîte des honneurs municipaux. Un peu avant, sous le règne de Trajan, c’est-à-dire lorsque
Mactaris était simplement ciuitas pérégrine, le choix des praefecti ciuitatium du pagus Thuscae
et Gunzuzi se faisait parmi des militaires19. Tout ceci est le couronnement d’un processus de
romanisation institutionnelle entamé depuis le règne de Trajan20.
***
S’agissant de l’inscription monumentale brièvement signalée par G. Ch. Picard, objet de la
présente étude, elle est gravée sur quatre claveaux, dont deux sont parfaitement jointifs21. Taillés
en pierre calcaire jaunâtre, et tous de forme trapézoïdale, à joints obliques, comparables aux
claveaux de l’inscription du capitole d’Althiburos par exemple22, ces claveaux, de 65 cm de hauteur
et de 52 cm d’épaisseur (sauf pour le 2e, en mauvais état de conservation), alignent un texte gravé
sur les faces principales dépourvues de toute trace de moulures ou de traits de délimitation du
champ épigraphique. Le texte est réparti en trois lignes de capitales monumentales carrées (H. l. :
l. 1 : 13 cm, l. 2 : 12 cm, l. 3 : 9 cm).
Pour le premier claveau, écorné en haut à gauche, long de 123 cm dans sa partie supérieure
et de 117 cm dans sa partie inférieure, on peut lire sur sa face principale le texte suivant : (Fig. 2)
CAES DIVI HA
LIO HADRIANO A
Fig. 2 : Claveau n° 1.
(Cliché de l’auteur)
Le deuxième claveau, qui peut bien être celui que le CIL, VIII a inventorié sous le numéro
11803, brisé de tous côtés, est de 86 cm de longueur dans sa partie supérieure, et de 90 cm
de longueur dans sa partie inférieure. (Fig. 3) Seule la deuxième ligne est nettement lisible
19 AE, 1963, 96; Picard G. Ch., Mahjoubi A. et Beschaouch A., 1963, p. 121-130. Voir en dernier lieu Belkahia-Karoui Th.,
2009, p. 441. Aounallah S., 2010, p. 24-25.
20 Picard G. Ch., 1957, p. 149.
21 Picard G. Ch., 1974, p. 23.
22 Kallala N., 2010, p. 231-244 et fig. hors texte. Pour une restitution architecturale complète du capitole d’Althiburos
et une remise en place de sa frise clavée, voir Torcheni M., 2017, pl. LIII.
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux
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(p. 105-121)
comportant les lettres TONINO ; les deux autres étant partiellement conservées. Pour la première,
on arrive à distinguer la fin de l’arrondi de la lettre D suivi de la partie inférieure des lettres RIA
ainsi que le départ du jambage de la lettre N. Pour la troisième ligne, on distingue seulement la
partie supérieure des lettres DD.
Fig. 3 : Claveau n° 2.
(Cliché de l’auteur)
DRIA[..]
. ...
TONINO
.
D
D
. .
Le troisième claveau, le plus long, est en bon état de conservation, en dépit d’une légère
cassure en haut à gauche et d’un écaillement partiel de son épiderme. Il est de 161 cm de long
dans sa partie supérieure et de 147 cm dans sa partie inférieure. (Fig. 4) Il compte deux lignes
bien conservées23 comportant le texte suivant :
F DIVI TRAIANI P
AVG PIO P M TR POT XV
Fig. 4 : Claveau n° 3.
(Cliché de l’auteur)
Quant au quatrième claveau, il est long de 90 cm dans sa partie supérieure et de 105 cm dans
sa partie inférieure. (Fig. 5) Il comporte trois lignes avec des lettres en bon état de conservation.
On peut lire :
-
ART N DIVI NE
I IMP II COS I
PP
23 On distingue également une toute petite partie d’une hedera dont le reste devait se poursuivre dans un claveau
adjacent.
110
Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
Fig. 5 : Claveau n° 4.
(Cliché de l’auteur)
Tableau 1 : Récapitulatif du contenu épigraphique des quatre claveaux :
Claveau 1
Claveau 2
Claveau 3
Claveau 4
DRIA[..]
F DIVI TRAIANI P
ART N DIVI NE
LIO HADRIANO A
[.]TONINO
AVG PIO P M TR POT XV
I IMP II COS I
vacat
D
. D.
vacat
PP
CAES DIVI H[.]
. ...
Un trou de louve est taillé au niveau du centre de gravité de la face supérieure des claveaux.
(Fig. 6-8) Alors que ceux des claveaux 1, 2 et 4 sont de forme quadrangulaire, de disposition
transversale ou longitudinale, celui du claveau 3 est une cavité « cruciforme » de 12 cm de
longueur, 10 cm de largeur et 12 cm de profondeur, soit des dimensions et un profil en rapport
avec le volume d’un bloc central, plus pesant, et offrant l’avantage d’un encastrement hermétique
des éléments métalliques de la louve.
Fig. 6
Fig. 7
Fig. 8
Trous de louve des claveaux 2, 3 et 4. (Clichés de l’auteur)
Ainsi, pour cette inscription monumentale, et en langage architectural, elle se présente sous
la forme d’une plate-bande alternant une succession de claveaux trapézoïdaux de base longue
et courte. C’est un choix architectural qui a l’avantage d’alléger systématiquement la poussée
des éléments supérieurs de l’entablement en diffusant leur poids de façon horizontale. C’est le
claveau n° 3, le plus long et le plus lourd, et qui doit occuper une position axiale, correspondant
à la clef de cette plate-bande clavée. (Fig. 12) Son équilibre parfait est assuré par emboîtement
hermétique entre les deux claveaux voisins, n° 2 et 4.
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Fig. 9 : Les claveaux épigraphes. (Cliché de l’auteur)
Fig. 10 : Relevé des claveaux épigraphes. (Relevé de l’auteur)
Le texte, qui ne présente pas de difficultés de lecture, se présente comme suit :
[Imp(eratori) Caes(ari), diui H[a]dria[ni] f(ilio), diui Traiani Part(hici) n(epoti), diui Ne[ruae
pronepoti],/ T(ito) Ae]lio Hadriano A[n]tonino Aug(usto) Pio, p(ontifici) m(aximo),
tr(ibuniciae) p(otestatis) XVI, imp(eratori) II, co(n)s(uli) I[III, p(atri) p(atriae) ---]./ D(ecreto)
d(ecurionum), p(ecunia) p(ublica).
Justification de la restitution :
-
la XVIe puissance tribunicienne autorise la restitution du chiffre III à la fin de la deuxième
ligne, à la suite du chiffre I, pour donner le quatrième consulat de l’empereur Antonin le
Pieux. De même, le consulat d’Antonin le Pieux est habituellement suivi du titre p(ater)
p(atriae), reçu depuis 139 apr. J.-C.
Datation : 10 décembre 152- 9 décembre 153, en fonction de la XVIe puissance tribunicienne.
Il s’agit donc d’un hommage public rendu par décret des décurions et sur dépense publique,
en l’année 152-153 apr. J.-C., à l’empereur Antonin le Pieux. Il est contemporain de deux dédicaces
de Lepcis Magna commémoratives de l’édification de deux temples (peut-être un seul) construit(s)
aux frais d’une certaine Calpurnia Honesta24. En raison de leurs dimensions, du parallélisme du
texte, de son ordinatio, de sa répartition en trois lignes ajustées selon un axe de symétrie verticale,
ces claveaux doivent occuper la façade d’un grand monument. (Fig. 9 et 10)
Cet hommage vient s’ajouter donc aux dédicaces, que nous venons de passer en revue, en
l’honneur du même empereur. Mais, contrairement à ces deux derniers, rendus par deux notables
municipaux, ou plutôt par un même notable mactaritain, P. Iulius Adiectus25, celui-là revêt un
caractère officiel et solennel étant décreté par l’ordo de la cité et financé par une dépense publique.
Par sa datation précise, il prend plus d’ampleur et d’intérêt que nous analyserons un peu après.
Pour une lecture complète de cette dédicace, il reste de se prononcer à propos de sa partie
finale emportée par la disparition de deux claveaux qui s’imposent au moins par des soucis de
parallélisme et d’équilibre achitectural, trois de part et d’autre du claveau central. (Fig. 11)
24 IRT, 370 et 371. Rémy B., 2005, p. 766, n° 85 et 86.
25 Dans une étude que nous avons consacrée aux decennalia et vicennalia d’Antonin le Pieux dans les provinces
romaines d’Afrique (Naddari L., 2015, p. 108, note 67), nous avons émis l’hypothèse de voir dans P. Iulius Adiectus le
dédicant des deux hommages rendus à Antonin le Pieux.
112
Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
Fig. 11 : L’inscription monumentale en l’honneur d’Antonin le Pieux : essai de reconstitution 1.
Dans l’état actuel de la dédicace et en l’absence d’indices révélateurs d’une circonstance
spéciale ou d’un monument objet de la dédicace, l’espace manquant autorise à penser au
même élan de dévotion et à continuer en conséquence l’exaltation de l’empereur honoré en
restituant, par la même occasion, un contexte bien précis de la dédicace. En effet, du point de vue
chronologique, on retient tout d’abord, que cet hommage est relativement plus ancien que les
deux autres rendus au même empereur (texte n° 1 et 2), datés respectivement des années 156157 et 157-158 apr. J.-C. Plus intéressant est de souligner la parfaite concordance chronologique
entre cette nouvelle dédicace et l’une des deux dates que nous avons proposées pour l’hommage
public que les Mactaritans ont rendu au clarissime d’Althiburos M. Valerius Quadratus, coopté
patronus municipii. De fait, comme nous l’avons mentionné plus haut, pour l’hommage rendu à
ce notable, nous avons hésité entre deux dates possibles, 148 ou 152 apr. J.-C. Pourtant, il est tout
à fait envisageable que les deux hommages publics soient contemporains ; tous deux datés de
l’année 152-153 apr. J.-C. L’emploi de la capitale carrée, même si l’argument paléographique est
d’une précision relative, appuie ce rapprochement chronologique. Ainsi, ces deux hommages, qui
paraissent appartenir à un programme politique et municipal, réfléchi et concerté, se complètent
harmonieusement pour permettre d’écrire une nouvelle page de l’histoire municipale de cette
ville. Ainsi, on peut, sans hésiter, trouver un éclairage et un rapprochement suggestif dans le
contenu de l’hommage rendu à ce clarissime pour restituer la partie manquante à la fin de la
dédicace monumentale d’Antonin le Pieux. Il semble en fait, que les Mactaritani, enorgueillis par
le statut de municipe, vanté ostensiblement, avaient promptement honoré le patronus municipii,
vraisemblablement en reconnaissance d’une entremise pour l’acquisition de ce statut26. Par
conséquent, il serait plus bienséant, plus décent et plus convenant qu’ils honorent au préalable
le fondateur du municipe, Antonin le Pieux en l’occurrence. Tout ceci offrira des éléments de
solution pour la restitution de la fin de la dédicace monumentale. En effet, si cette lecture des
évènements s’avérait juste, et en considérant l’éclairage apporté par la formule patronus municipii
de l’hommage de M. Valerius Quadratus, il s’impose à nous de restituer la formule appropriée
conditor municipii à la fin de la deuxième ligne de la nouvelle dédicace monumentale. En effet,
l’espace épigraphique manquant à la fin de cette ligne, précédant la formule conclusive DD PP
(l. 3), permet de loger facilement une vingtaine de lettres, dont cinq qui s’imposent : III PP. Les
autres, une quinzaine lettres ou un peu plus, peuvent correspondre à la formule complète de
CONDITORI MVNICIPI ou sous une forme légèrement abrégée : CONDITORI MVN27. C’est là
un style de forumlaire épigraphique tout à fait analogue à celui d’autres dédicaces en l’honneur
26 D’ailleurs c’est ainsi que G. Ch. Picard explique la promotion de Mactaris au rang de colonie. Il précise que c’est à
Sex. Iulius Possessor, membre de l’ordre équestre « et à son gendre Plautius Ferruntianus que Mactar devra le statut
colonial conféré entre 176 et 180. » Cf. Picard, G. Ch., 1968, p. 304.
27 L’abréviation MVN pour municipium, qui n’est pas insolite en elle-même, est courante dans l’épigraphie
africaine : CIL, VIII 2451 (Mun(icipium) Bad(iensium)) ; CIL, VIII, 14769 (Mun(icipium) Cin(caritanum)) ; CIL, VIII, 4415
(Mun(icipium) Lambir(idtanum)) ; CIL, VIII, 12061-16062 (Mun(icipium) Muz(ucense)) ; CIL, VIII, 26591 et 26622
(Mun(icipium) Sept(imium) Aur(elium) Lib(erum) Thugga)) ; CIL, VIII, 15644 (Mun(icipium) T(h)ac(ciensium)) ; CIL, VIII,
4223 (Mun(icipium) Ver(ecundensium)) ; CIL,VIII, 21837 (Mun(icipium) Vol(ubilitanum)).
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux
Lotfi Naddari
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(p. 105-121)
d’Hadrien par exemple, conditor municipii d’Althiburos28 et d’Avitta Bibba29. Ainsi, la restitution que
nous proposons serait commandée par un reflexe spontané régissant l’attitude des autorités municiplaes
des cités africaines à l’égard de leurs conditores. C’est ainsi que l’on peut appréhender le contexte de ces
deux dédicaces de l’époque d’Antonin le Pieux.
Toutefois, deux autres formules de restitution sont possibles à la fin de la dédicace :
- MVN AEL MACTAR FEC (15 lettres)
- MVNICIPIVM AELIVM MACTARITANVM FECIT (33 lettres)
Alors que la première peut être retenue, la deuxième n’est pas du tout envisageable en
raison du nombre élevé de lettres. De la sorte, en privilégiant notre hypothèse de préférence
mentionnée en haut, nous arrangeons les claveaux épigraphes de cette dédicace comme suit :
Tableau 2 : Récapitulatif
d’Antonin le
Pieux.
du contenu de l’ensemble des claveaux de la dédicace monumentale en l’honneur
Claveaux
Disparu 1
1
2
3
4
Disparu 2
Disparu 3
imp
CAES DIVI HA
DRIAni
F DIVI TRAIANI P
ART N DIVI NE
ruae pronep
oti
t. ae
LIO HADRIANO A
nTONINO
AVG PIO P M TR POT XV
I IMP II COS I
iii p p conditor
i mun
DD
vacat
PP
Fig. 12 : L’inscription monumentale en l’honneur d’Antonin le Pieux : essai de reconstitution 2.
Ceci donnera la lecture complète suivante :
[Imp(eratori)] Caes(ari), diui H[a]dria[ni] f(ilio), diui Traiani Part(hici) n(epoti), diui Ne[ruae
pronepoti],/ T(ito) Ae]lio Hadriano A[n]tonino Aug(usto) Pio, p(ontifici) m(aximo), tr(ibuniciae)
p(otestatis) XVI, Imp(eratori) II, co(n)s(uli) I[III, p(atri) p(atriae), conditori mun(icipii) ?]./
D(ecreto) d(ecurionum), p(ecunia) p(ublica).
« A l’empereur César, fils du divin Hadrien, petit-fils du divin Trajan le Parthique, arrièrepetit-fils du divin Nerva, Titus Aelius Antonin le Pieux Auguste, grand pontife, revêtu de la
16e puissance tribunicienne, salué imperator pour la deuxième fois, consul pour la quatrième
fois, père de la patrie, fondateur du municipe ( ?). Par décret des décurions, dépense
publique. »
***
28 CIL, VIII, 1825 = 27775 : [Imp(eratori) Caes(ari) diui Traiani Parthici fil(io) diui Ner]uae n(epoti) Traiano Ha[dria]no
Aug(usto)] / [pont(ifici) max(imo) --- p(atri) p(atriae) condi]t[o]ri municipi(i). D(ecreto) d(ecurionum) p(ecunia) [p(ublica).
// Imp(eratori) Caes(ari) ---]divi Ne[ruae nepoti Traiano Hadriano Aug(usto)] / [--- p(atri)] p(atriae)] conditori municipi(i).
D(ecreto) d(ecurionum), p(ecunia) [p(ublica)].
29 CIL, VIII, 799 = 12266 = AE 1937, 27 = IlTun., 671 : Imp(eratori) C[aes(ari) diui T]raiani [Parthici] f(ilio) diui [Ner]/
uae n[ep(oti) Traia]no Hadri[ano Aug(usto)] pont(ifici) m[ax(imo)] / trib(unicia) p[ot(etstate) XXI imp(eratori)] II co(n)s(uli)
III p(atri) p(atriae) [condito]ri munic[ipii]. // L(ucio) Aelio C[aesari Imp(eratoris) Caes(aris) Traiani Hadrian]i Aug(usti)
f(ilio) [trib(unicia) pot(estate) co(n)s(uli) II. // Vibiae (?) Matidiae Au]g(ustae) f(iliae) Sabin[ae Augustae Imp(eratoris) C]
aes(aris) Hadriani A[ug(usti).]
114
Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
De l’étude croisée de ces trois dédicaces en l’honneur d’Antonin le Pieux, et en mettant à
contribution l’ensemble de la documentation épigraphique latine de Mactaris, il est possible de se
prononcer sur la nature du statut de municipe accordé par cet empereur. Il s’agit, nous –semblet-il, du droit latin majeur. Conformément à ce statut, la ciuitas romana serait accordée à tous les
membres de l’élite municipale, dont la majorité, sinon la totalité, est en possession de ce droit au
moins à partir du règne de Trajan ou d’Hadrien au plus tard30. Ainsi, il semble que l’acquisition de
ce statut sous Antonin le Pieux n’était pas corollaire d’une attribution massive de la citoyenneté
romaine, ce qui explique la rareté du gentilice impérial Aelius dans le tableau onomastique de
cette ville31. De même, la tribu Quirina, celle choisie, avec la Votinia, par Antonin le Pieux pour
ses fondations et ses promotions provinciales32, y est extrêmement rare même parmi les membres de
l’élite municipale mactaritaine. En effet, dans l’état actuel de la documentation, parmi tous les notables
de Mactaris, seul le fameux Sex. Iulius Possessor, procurateur impérial, dont la carrière est connue par
trois inscriptions provenant d’Hispalis, en Bétique, et de Mactaris, est tribule de la Quirina33. D’autre part,
seulement deux épitaphes, datables de la fin du Ier siècle ou le début du IIe, font référence à cette tribu
romaine34. Les défunts, dont l’un appartenant à la famille des Iulii, sont, selon G. Ch. Picard, des quirites
allogènes qui faisaient partie du conventus ciuium romanorum. Il les identifie à « [des] Italiens de la classe
moyenne venus de tous les points de la péninsule et renforcés de quelques orientaux … fixés dans la ville
de leur propre initiative. »35
Ces indications appellent en fait quelques remarques en guise de bilan. Quoi qu’il en soit,
force est de souligner l’effet restreint du droit latin majeur acquis sous Antonin le Pieux en matière
de diffusion de la citoyenneté romaine à Mactaris. Il se limite, en fait, à l’honneur accordé à la ville
de porter le surnom impérial Aelium accolé au titre de municipium. C’est là un privilège et une
étape incontournable qui révèlent à tout le moins une accélération progressive de la romanisation
juridique balisant la route pour l’acquisition du statut colonial. Ceci ne tardera pas à lui être décerné
par Marc Aurèle, d’où l’épithète impériale Aurelia. Le droit latin majeur, comme une formule lente
et sélective de romanisation juridique, traduit en fait une extension de la citoyenneté romaine, per
honorem, et ce simplement aux membres de l’élite municipale, ceux encore de statut pérégrin,
magistrats annuels sortants et membres de l’assemblée municipale locale, et les membres de
leurs familles inclus36. C’est-à-dire que demeuraient pérégrins tous les Mactaritani qui n’ont pas
réussi à accéder à une magistrature locale ou à bénéficier d’une faveur exceptionnelle accordée à
titre individuel.
Vient également à l’appui de notre raisonnement, qui fait d’Antonin le Pieux le conditor
municipii, l’apparition dans l’épigraphie mactaritaine, seulement à partir du règne de cet empereur,
du cursus honorum romain couronné par la préfecture du pagus Thuscae et Gunzuzi. Nous
invoquons ici le cursus de P. Iulius A[diectus] mentionné dans les deux dédicaces en l’honneur
de cet empereur et que nous venons de passer en revue. (Textes n° 1 et 2) Il est le premier
magistrat municipal mactaritain à faire référence à un cursus employant un vocabulaire municipal
typiquement romain. Il rappelle que l’hommage rendu à cet empereur est fait secundum
pollicitationem, celle du triumvirat quinquennal, qui précédait sa délégation comme praefectus
30 Picard G. Ch., 1957, p. 148 ; Picard G. Ch., 1964, p. 76 ; Gascou J., 1972, p. 150 ; Gascou J., 1982, p. 198 ; M’Charek A.,
1982, 146.
31 Picard G. Ch., 1987, p. 465. CIL, VIII, 11872 : D(is) M(anibus) s(acrum) // Aelia Vi/ctoria / uixit a/n(n)is XLI // L(ucius)
Septi/mius / Satur/nus ui/csit (sic) an(n)is // D(is) M(anibus) s(acrum) // Pullae/nia Ro/gata ui/xit ann/is XLI // Septi/mio
Ru/fo uix/it an(n)is / LIII. CIL, VIII, 11868: D(is)] M(anibus) s(acrum) / [Ael]io Saturnino patri / [O]ctauiae L(uci) f(iliae)
Matronae matri / piissimis.
32 Lassère, J.-M., 2005, p. 119.
33 CIL, II, 1180 = ILS, 1403 ; CIL, VIII, 620 = 11796 = ILS, 4908 = ILPB, 98 ; AE, 1983, 976. Toutefois, l’origine
mactaroise de ce procurateur impérial n’est pas absolument certaine. Nous y reviendrons dans une étude à part qui
portera sur l’importance de Mactaris comme un bureau financier et fiscal de haute importance en Proconsulaire.
34 CIL, VIII, 638 et 643.
35 Picard G. Ch., 1964, p. 74.
36 Chastagnol A., 1995, p. 224.
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux
Lotfi Naddari
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pagi Thuscae et Gunzuzi37. Ainsi, il est tout à fait possible que cette dédicace, mis à part sa
concordance avec les uicennalia de l’empereur Antonin le Pieux38, soit également l’expression de
la gratitude exprimée par ce notable mactaritain, peut-être le premier parmi ses concitoyens, à
l’égard de l’empereur qui l’avait désigné pour la préfecture de ce district financier et fiscal.
Ainsi, pour évaluer la portée des trois hommages rendus à l’empereur Antonin le Pieux
à Mactaris, nous soulignons que seulement six ans ont été suffisants, après la promotion de
Mactaris au rang de municipe, en 152 apr. J.-C. vraisemblablement, pour voir l’un de ses notables
municipaux gagner la confiance de l’administration impériale et se voir chargé en 157-158 apr. J.C. de la préfecture du pagus Thuscae et Gunzuzi au lieu d’un militaire39. C’est désormais parmi ses
notables municipaux que sont choisis les praefecti de ce pagus. On est là avec l’un des bienfaits
de sa promotion au rang de municipe de drtoit latin majeur ; un prestige supplémentaire qu’elle
gagne après avoir été choisie comme chef-lieu du pagus Thuscae et Gunzuzi, au moins à partir
du règne de Trajan.
Il s’ensuit que ces dédicaces en l’honneur d’Antonin le Pieux, par l’emploi du datif de dévotion,
seraient l’expression d’une allégeance que les Mactaritains auraient publiquement manifestée à
l’égard du conditor municipii. Or, leur loyalisme est exprimé également en faveur de l’un des
membres de la famille impériale. En effet, un autre document épigraphique important, découvert
dans les mêmes Thermes de l’Est, encore inédit, daté du règne d’Antonin le Pieux, peut trouver
place dans ce dossier. C’est une dédicace incomplète en haut mais facilement restituable, qui rend
hommage à l’un des deux fils adoptifs d’Antonin le Pieux. (Fig. 13 et 14)
Cette dédicace est gravée sur la face principale d’un bloc de forme parallélépipédique (h. :
48,5 cm, l. 76,5 cm, ép. : 72,5 cm). Une moulure large de 4,5 cm délimite à droite et à gauche le
champ épigraphique qui renferme un texte réparti en 4 lignes de capitales allongées de 6 à 7 cm
de hauteur. Une encoche de forme quadrangulaire, trace d’un remploi tardif probablement, est
aménagée au niveau de la moulure gauche du champ épigraphique. De même, un trou de louve
en queue d’aronde, de disposition transversale, de 12,5 cm de longueur en surface et 17,5 cm
au fond, de 5 cm de largeur et de 9 cm de profondeur, est taillé au milieu de la face supérieure
piquetée. (Fig. 15) Il est destiné à faciliter l’opération de levage et de manutention du bloc
épigraphe. Un bloc supérieur, comportant le début du texte, est malheureusement disparu.
Fig. 13 et 14 : La dédicace en l’honneur de Marc Aurèle César.
(Cliché et relevé de l’auteur)
Voici le texte de la dédicace :
[---]
AELI HADRIANI ANTO
NINI AVG PII PP FIL
COS II
D[ .] PP
37 CIL, VIII, 23599 ; Belkahia-Karoui Th., 2009, p. 440-441, n° 200.
38 Naddari L., 2015, p. 99-110.
39 AE, 1963, 96; Picard G. Ch., Mahjoubi A. et Beschaouch A., 1963, p. 121-130. Voir en dernier lieu Aounallah S., 2010, p. 24-25.
116
Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
L’examen de ce texte (incomplet en haut) et la mention du deuxième consulat (l. 3), permettent
d’identifier facilement le dédicataire, l’un des deux fils adoptifs de l’empereur Antonin le Pieux.
Il s’agit, sous aucun doute, de M. Aelius Aurelius Verus César, le futur empereur Marc Aurèle,
celui qui a géré ses deux premiers consulats comme collègue de l’empereur Antonin le Pieux,
respectivement en 140, et en 145. Pour sa part, Lucius Verus, le deuxième fils adoptif d’Antonin le
Pieux, consul ordinaire pour la première fois en 154, n’a été élu une seconde fois qu’en 161, après
la mort d’Antonin le Pieux40.
Il s’agit donc, sans aucun doute, d’une dédicace dédiée, en vertu d’un décret des décurions et
par dépense publique, en l’honneur de Marc Aurèle César. Elle date de la période comprise entre
les années 145, date de son second consulat, et 161, date de son élection pour un troisième, juste
après son investiture à la suite de la mort d’Antonin le Pieux. Mais, il est tout à fait possible qu’elle
soit contemporaine de l’une des trois dédicaces en l’honneur d’Antonin le Pieux énumérées en
haut, avec une préférence pour la nouvelle dédicace, qui date de l’année 152-153.
Ainsi, en raison de ce qui précède, et tout en restituant, sans aucun risque d’erreur, le texte
du bloc supérieur disparu, on peut établir l’ensemble du texte comme suit :
[M AELIO CAES
IMP CAES T]
AELI HADRIANI ANTO
NINI AVG PII PP FIL
COS II
D[D] PP
[M(arco) Aelio Aurelio (Vero) Caes(ari), /Imp(eratoris) Caes(aris) T(iti)], / Aeli Hadriani Anto/
nini, Aug(usti), Pii, p(atris) p(atriae), fil(io),/ co(n)s(uli) II./ D(ecreto) [d(ecurionum)] p(ecunia)
p(ublica).
“A Marcus Aelius Aurelius (Verus), César, consul pour la seconde fois, fils de l’empereur César
Titus Aelius Hadrianus Antonin, Auguste, Pieux, père de la patrie. Décret des décurions,
dépense publique.”
Remarque: Pour la partie disparue du texte, et par souci d’ordinatio, nous avons préféré limiter
la restitution aux seuls titres: M. Aelius Aurelius Caesar, sans le titre Verus. C’est ainsi qu’apparaît
sa titulature du vivant d’Antonin le Pieux sur plusieurs dédicaces africaines41.
Pour cette dédicace en l’honneur de Marc Aurèle César, il est utile de revenir tout d’abord
sur des détails d’ordre architectural. De par sa forme et ses dimensions, ce fragment, sur lequel
devait venir se superposer un bloc épigraphe comportant le début de la dédicace, est difficilement
identifiable avec la partie inférieure d’une base de statue. Ensemble, les deux blocs sont destinés
plutôt à prendre place en hauteur, probablement à l’extrémité d’une frise clavée de l’entablement
d’un grand monument. Le trou de louve, de profil en queue d’aronde aménagé au niveau du
centre de gravité de sa face supérieure, pour la commodité de préhension, suffit pour justifier
cette identification. (Fig. 15)
40 Kienast D., 1900, p. 139 et 144.
41 Voir à tire d’exemple : CIL, VIII, 800 = 1177 = 12267; CIL, VIII, 1016 = 12465; AE, 1957, 231; AE, 1992, 1797; CIL,
VIII, 10558 = 14302.
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux
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Fig. 15 : Lit d’attente piqueté pourvu
d’un trou de louve au centre de gravité. (Cliché de l’auteur)
Enfin, pour des raisons de parallélisme, d’ordinatio et de cohérence historique, et en
considérant qu’il y’avait un pendant à la dédicace de Marc Aurèle César, force est de restituer
une dédicace en l’honneur du deuxième fils adoptif d’Antonin le Pieux : Lucius Verus (L. Aelius
Aurelius Commodus Verus), fils de L. Ceionius Commodus, qui deviendra L. Aelius Caesar, fils
naturel d’Hadrien42. Il en est pour se convaincre de la place privilégiée de Lucius Verus, d’où
la nécessité ici de la restitution d’une dédicace en son nom, que de suivre le débat à propos
du règlement successoral d’Hadrien lancé entre deux éminents historiens : J. Carcopino et H. G.
Pflaum43. Petit-fils d’Hadrien, il l’a préalablement recommandé à Antonin le Pieux dans le cadre
d’une double adoption, celle des futurs Lucius Verus et Marc Aurèle. En effet, dans une règle
d’hérédité dictée par Hadrien, bien que Lucius Verus n’ait que sept ans, il avait même la préséance
par rapport à Marc Aurèle. C’est simplement un ordre sucessoral, défendu par J. Carcopino, qui
fait promouvoir le petit-fils, qu’est Lucius Verus, au détriment du petit cousin, qu’est Marc Aurèle,
qui avait le grand estime d’Hadrien44.
Ainsi, la dédicace qui s’impose par déduction historique fera donc le pendant à celle de Marc
Aurèle César ; chacune trouvera place à l’extrémité d’une frise d’un grand monument, de part
et d’autre de la dédicace monumentale d’Antonin le Pieux45. De la sorte, si notre reconstitution
schématique de cette frise est recevable, et si le rapport entre ces trois dédicaces est valide, nous
aurons une frise épigraphe répartie en trois registres (Fig. 18), tout à fait comparable à l’attique
tripartite de la porte monumentale d’Antonin le Pieux et ses deux fils adoptifs à Sufetula. (Fig. 16
et 17)
42 L. Ceionius Commodus, qui deviendra L. Aelius Caesar, fils adultérin d’Hadrien, est très peu honoré dans les
provinces romaines d’Afrique. Pour le volume VIII du Corpus Inscriptionum Latinarum, on compte seulement trois
dédicaces provenant respectivement d’Avitta Bibba (CIL, VIII, 799 = CIL, VIII, 12266 = AE, 1937, 27 = IlTun., 671),
de Thamugadi (CIL, VIII, 17848) et de Rahel (CIL, VIII, 21663 = ILS, 5963 = AE, 1895, 68). Deux autres, découvertes
à Lepcis Magna, sont publiées dans l’IRT sous les numeros 367 et 381. Une dernière provient de Sutunurca (IlAfr.,
300 = ILPB, 160). Une grande dalle lui fut également consacrée à Mactaris (AE, 1951, 44): L(ucio) Aelio Caesari [I]
mp(eratoris) Caes[aris Tra]/iani Hadriani Aug(usti) pont(ificis) [m(aximi) trib(unicia) pot(estate)] / XXI co(n)s(ulis) p(atris)
p(atriae) f(ilio), diui Traiani Part[hici ne]/poti diui Neruae pronepoti tri[b(unicia) pot(estate) / d(ecreto) d(ecurionum),
p(ecunia) p(ublica ].
43 Carcopino J., 1949, p. 286-321 ; Carcopino J., 1965, p. 67-79 ; Pflaum H. G., 1964, p. 95-122. Voir également Petit P.,
1965, p. 334-337. Voir également Beschaouch A., 1968, p. 181.
44 Carcopino J., 1965, p. 72. Pour H. G. Pflaum (Pflaum H. G., 1964, p. 95-122), la prédilection en faveur de Lucius
Vérus, dans le cadre du règlement successoral d’Hadrien, s’explique par la volonté de s’assurer de la sympathie de la
puissante famille des Ceionii et la coterie sénatoriale groupée autour d’elle.
45 Dans des cas pareils, l’honneur rendu ne se limite pas à d’Antonin le Pieux. A Thysdrus ou à Sufetula à titre
d’exemples, des bases honorifiques furent érigées à Antonin le Pieux et les siens (Thysdrus : L. Verus : CIL, VIII, 50 =
ILS, 357 ; Domitia Aurelia Faustina (fille de Marc Aurèle César et de Faustine la Jeune) : Naddari L., 2015, p. 107, n° 22.
Sufetula : Marc Aurèle César : CIL, VIII, 228 = 11319 ; CIL, VIII, 229 = 11320 ; L. Verus : CIL, VIII, 228 = 11319 ; Faustine
la Jeune (fille d’Antonin le Pieux) : Naddari L., 2015, p. 105, n° 14.). De même à Cillium, une dédicace est élevée par un
notable municipal, qui, ob honorem aedilitatis, a offert trois statues en l’honneur d’Antonin le Pieux, de Marc Aurèle
César et de Lucius Vérus ainsi qu’une imago en argent en l’honneur de Faustine la Jeune lorsqu’il gérait le flaminat
d’Antonin le Pieux (AE, 2008, 1626 = AE, 1957, 77 ; Naddari L., 2008, p. 1913-1926).
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Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
Fig. 16 : La porte monumentale d’Antonin le Pieux à Sufetula,
avec un attique à trois champs épigraphiques.
Fig. 17 : Répartition des dédicaces de l’attique de la porte monumentale d’Antonin le Pieux à Sufetula
(CIL, VIII, 228 = 11319 = IlTun., 350 = ILPSbeitla 13.)
Toutefois, jusqu’à plus ample informé à propos de la topographie urbaine de Mactaris,
et en attendant de procéder aux confrontationes nécessaires entre notre frise épigraphe et les
éléments de décor architectonique de quelques monuments connus de la ville, on hésite encore
à la rattacher à un monument quelconque. Toutefois, deux monuments peuvent être retenus à
titre d’hypothèse de travail : soit un arc soit un temple, comme le proposait déjà G. Ch. Picard.
Le lien que nous envisageons entre l’édification de l’un ou de l’autre avec l’acquisition du statut
de municipe, lui procure une certaine « notoriété » pour occuper une place de choix dans la
topographie urbaine de la ville.
Conclusion
On sait combien est délicate, voire épineuse, l’interprétation d’un dossier épigraphique
quelque peu lacunaire qui risque de nous conduire dans de fauses pistes. Cette réflexion en effet
renouvelée portant sur l’histoire municipale de Mactaris à la lumière de deux nouvelles dédicaces
en l’honneur d’Antonin le Pieux et de son fils adoptif, Marc Aurèle César, ne prétend pas apporter
des éléments décisifs à l’idée qui fait de cet empereur le véritable conditor municipii. Toutefois, une
certitude persiste : bien qu’il n’existe pas de lien avéré et incontestable entre ces hommages et un
contexte historique précis, l’homogénéité du dossier constitué (les trois dédicaces en l’honneur
d’Antonin le Pieux éclairées par l’hommage rendu au clarissime africain M. Valerius Quadratus),
incite à privilégier la piste d’un contexte municipal lié à un bienfait impérial46. En effet, toutes ces
inscriptions, qui vont de pair, seraient l’expression de la gratitude manifestée par les Mactaritani,
qui, nous semble-t-il, ont promptement honoré le conditor municipii et ses héritiers, dynastes
présomptifs. Et, c’est par la même occasion qu’ils ont tenu à rendre hommage au clarissime
althiburitain, M. Valerius Quadratus. Coopté patronus municipii gratifie vraisemblablement l’action
qu’il a dû mener pour faire aboutir le dossier de promotiona de leur cité au rang de municipe.
Mais, jusqu’à plus ample informé, le dossier de l’histoire municipale de Mactaris reste encore
ouvert… en attendant le plaisir d’autres analyses, et, je l’espère, de découvertes !
46 Corbier M., 1982, p. 750.
Municipium Mactaritanum II : encore Antonin le Pieux
(p. 105-121)
Fig. 18 : Reconstitution schématique de la frise clavée.
Lotfi Naddari
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Byzacium, Byzacène, Muzaq : Occupation du sol, peuplement et modes de vie ( Actes du 6e colloque )
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58 2022
ANTIQUITÉS
AFRICAINES
ANTIQUITÉS AFRICAINES
L’AFRIQUE DU NORD DE LA PROTOHISTOIRE
À LA CONQUÊTE ARABE
Les Antiquités africaines publient des études historiques et archéologiques intéressant l’Afrique du Nord
depuis la Protohistoire jusqu’à la conquête arabe.
Fondateurs
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Rédactrice en chef
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Ginette Di Vita-Évrard, Xavier Dupuis, Mohamed Faraj Al Fallos, Toufik Hamoum, Frédéric Hurlet,
Victoria Leitch, Dirce Marzoli, David Mattingly, Jean-Paul Raynal, Jean-Christophe Sourisseau, Mustafa Turjman
Secrétaire de rédaction
Antonio Mendes da Silva
Les fascicules anciens (jusqu’au numéro 51 de 2015), ainsi que plusieurs volumes de la collection, sont disponibles sur
Persée, portail des revues françaises en Sciences humaines et sociales (https://www.persee.fr/collection/antaf), tandis que les
numéros récents (à partir du numéro 52 de 2016) sont accessibles en texte intégral sur la plateforme d’OpenEdition Journals
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ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l’éditeur
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Antiquités africaines, 58 | 2022
SOMMAIRE
François BRON, Notes d’épigraphie néopunique :
À propos de K. JONGELING, Handbook of Neo-Punic Inscriptions (2008) ....................................... 5
Luis AMELA VALVERDE, Lluís PONS PUJOL, … idemque Siciliam Africam Numidiam Mauretaniam mirabili
celeritate armis recepit (Bell. Afr. 22, 2). Controversia sobre la presencia de Pompeyo Magno
en Mauretania .......................................................................................................................... 15
Rudolf HAENSCH, Maurice SARTRE, Un Syrien de l’armée de Mauretania Caesariensis et sa famille .......... 27
Pauline CUZEL, Les deux metae du cirque de Thugga (Dougga) : nouvelles lectures ............................. 35
Michel CHRISTOL, Les vertus, l’action et l’œuvre du gouverneur de Tripolitaine
Laenatius Romulus (IRT 574) .................................................................................................... 49
Ali CHÉRIF, Nouvelles données sur une cité africo-romaine d’Afrique proconsulaire :
Mizaeotherena – Bou Jlida (Tunisie) ........................................................................................... 61
Leonard A. CURCHIN, Local Magistrates and Decurions in Mauretania Tingitana ................................ 111
Cecilia RICCI, Le dieu Mars en Afrique, une enquête épigraphique .................................................... 125
61-110
NOUVELLES DONNÉES SUR UNE CITÉ
AFRICO-ROMAINE D’AFRIQUE PROCONSULAIRE :
MIZAEOTHERENA – BOU JLIDA (TUNISIE)
Ali CHÉRIF*
Mots-clés : Bou Jlida, Mizaeotherena, limites du site archéologique, nécropoles, chronologie de l’occupation, épitaphes, onomastique,
romanisation, christianisme.
Résumé : Cette contribution présente les résultats des missions de prospection effectuées au cours des dernières années dans le village de
Bou Jlida. On a pu rassembler une nouvelle documentation épigraphique et archéologique permettant de mieux saisir les limites du site
antique et la répartition des nécropoles autour du centre urbain. Les nouvelles épitaphes ont enrichi de manière substantielle le répertoire
onomastique local, ce qui permettra d’aborder sur des bases plus solides la question de la romanisation de la population. La prospection
systématique des zones non encore bâties qui s’étendent à l’est et à l’ouest du village a permis de recueillir un matériel céramique diversifié
apportant des éléments nouveaux sur la chronologie du site.
Keywords: Bou Jlida, Mizaeotherena, limits of the archaeological site, necropolises, chronology of occupation, epitaphs, onomastics,
Romanisation, Christianity.
Abstract: This paper presents the results of survey missions carried out in recent years at the village of Bou Jlida. New epigraphic and
archaeological documentation has been gathered to provide a better understanding of the limits of the ancient site and the distribution of
the necropolises around the urban centre. The new epitaphs have substantially enriched the local onomastic repertoire, which will allow
the question of the Romanisation of the population to be approached on a more solid basis. Systematic survey of the as yet undeveloped
areas to the east and west of the village has also yielded a diverse ceramic assemblage that provides new insights on the chronology of
the site.
. اﳌﺴﻴﺤﻴﺔ، اﻟ َﺮوﻣﻨﺔ، أﺳامء اﻷﺷﺨﺎص، ﻧﻘﺎﺋﺶ ﺟﻨﺎﺋﺰﻳﺔ، ﺗﺄرﻳﺦ اﻟﺘﻮﻃّﻦ، اﳌﻘﺎﺑ ﺮ، ﺣﺪود اﳌﻮﻗﻊ اﻷﺛﺮي، ِﻣ ﻴ َﺰاﻳُ ﻮﺗﺮﻧﺎ، ﺑُ ﻮﺟ ﻠِ ﻴ ﺪَة: اﻟﻜﻠامت اﳌﻔﺎﺗﻴﺢ
ﻟﻘﺪ ﺗ ّﻢ ﺗﺠﻤﻴﻊ ﻣﻌﻄﻴﺎت ﻧﻘﺎﺋﺸﻴﺔ و أﺛﺮﻳﺔ ﺟﺪﻳﺪة متﻜﻨﻨﺎ ﻣﻦ ﺿﺒﻂ أﻓﻀﻞ. ﺗﻘﺪم ﻫﺬه اﻟﺪراﺳﺔ ﻧﺘﺎﺋﺞ اﳌﺴﺢ اﻷﺛﺮي اﻟﺬي ﺗ ّﻢ إﻧﺠﺎزه ﺧﻼل اﻟﺴﻨﻮات اﻷﺧرية ﺑﻘﺮﻳﺔ ﺑُ ﻮﺟ ﻠِ ﻴ ﺪَة: اﻟﺘﻠﺨﻴﺺ
ﻷﺳامء اﻷﺷﺨﺎص و ﻫﻮ ﻣﺎ ﺳ ﻴُ ﺴﺎﻋﺪ
َ ﺳﺎﻫﻤﺖ اﻟﻨﻘﺎﺋﺶ اﻟﺠﻨﺎﺋﺰﻳﺔ اﳌ ُﻜ ﺘَ ﺸَ ﻔﺔ ﺣﺪﻳﺜﺎ ﺑﺸﻜﻞ ﻫﺎم ﰲ إﺛ ﺮاء اﳌ ُ َﺪ ّوﻧﺔ اﳌﺤ ﻠّﻴﺔ.ﻟﺤﺪود اﳌﻮﻗﻊ اﻷﺛﺮي و اﻧﺘﺸﺎر اﳌﻘﺎﺑﺮ ﺣﻮل اﳌﺮﻛﺰ اﻟﺤﴬي ﻟﻠﻤﺪﻳﻨﺔ
ﻛام ﻣﻜﻨﺖ ﻋﻤﻠﻴﺎت اﳌﺴﺢ اﻷﺛﺮي ﻟﻸﺟﺰاء اﻟﺘﻲ مل ﺗﺸﻬﺪ ﺗﻮﻃﻨﺎ ِﻋ ﻤ َﺮاﻧﻴﺎ ﺣﺪﻳﺜﺎ و اﳌ ُﻤﺘ ﺪّة ﻋﲆ اﻟﺠﺎﻧﺒني اﻟﴩﻗﻲ و اﻟﻐﺮيب ﻟﻠﻘﺮﻳﺔ ﻣﻦ ﺟﻤﻊ ﻟُ َﻘ ﻰ.ﻋﲆ دراﺳﺔ ﻧَﺴﻖِ َر ْو َﻣ ﻨﺔ ﺳﻜﺎن اﳌﺪﻳﻨﺔ
ِ َﺧ َﺰﻓﻴﺔ ﻣﺘﻨﻮﻋﺔ ﻣﻬ ّﻤ ﺔ ﻟﺘﺤﺪﻳﺪ ﻣﺨﺘﻠﻒ
.اﻟﺤ َﻘ ﺐ اﻟﺰﻣﻨﻴﺔ اﻟﺘﻲ ﻣ ّﺮ ﺑﻬﺎ اﳌﻮﻗﻊ
Le village de Bou Jlida, qui s’étend au pied du flanc
occidental du Jbel Rihane, est situé à 80 km à vol d’oiseau
au sud-ouest de Carthage, à 15 km au sud de Testour, antique
Tichilla, et à 5,5 km au nord-est d’El-Aroussa1 (fig. 1). La
création de ce village est l’une des conséquences qui suivirent
l’expulsion définitive des Ousseltiya de leur montagne, le Jbel
* Université de Jendouba, Institut supérieur des sciences humaines
(alicherif.isshj@gmail.com).
Je dois vivement saluer les habitants de Bou Jlida qui ont délibérément
participé à notre enquête. C’est à leur patience inlassable et leur
volonté de reconstituer l’histoire de leur petit village que je dédie ce
modeste travail. Mes remerciements s’adressent aussi à mes collègues
et amis Riadh Smari et Zied Msellem pour leur aide dans les travaux
de terrain et Slim Béchrifia, Fatma Hadded et Yamen Sghaïer qui ont
bien voulu examiner le matériel céramique.
1. AATun I, f. 36– Bou Arada au 1/50 000e, nº 74.
Ouesslat, en 17622. Après cette date, les Ousseltiya durent
s’installer dans d’autres régions du pays et procédèrent dans
plusieurs cas à la fondation de nouveaux villages3. Dechret
Bou Jlida dut se constituer vers la fin du xviiie siècle, dans
un paysage naturel très proche de celui du Jbel Ouesslat4. J’ai
pu récupérer dans le terrain situé sur le côté droit de l’oued
2. Les Ousseltiya ont soutenu, entre 1759 et 1762, le soulèvement
conduit par Ismaïl fils de Younès Bey contre le pouvoir d’Ali Bey, l’un
des fils de Husseïn Ben Ali. Sur cette période et les événements qui
ont accompagné l’évacuation du Jbel Ouesslat et la dispersion de sa
population, voir Despois 1959 ; Valensi 1964 ; Mokni 2020 ; 2021.
3. Voir la liste des lieux d’installation des Ousseltiya après 1762
donnée par A. Mokni (2020, p. 80-85). Non loin de Bou Jlida, les
Ousseltiya se sont aussi installés à El-Aroussa, à Dechret Oued
el-Araar (1 km à l’ouest d’El-Aroussa), à Jbel Rihane, à Dechret
Mjinine dans le Jbel Mansour (6 km au sud-est de Bou Arada), etc.
4. Les Ousseltiya ont généralement choisi de s’établir dans des lieux
qui présentent des similitudes avec leur pays d’origine, c’est-à-dire
dans des régions montagneuses. Voir la carte de la « Dispersion des
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
INTRODUCTION
61
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 1 : Carte de localisation de Mizaeotherena (A. Chérif et R. Smari).
62
Bou Jemaa, libéré de toute structure moderne (zone B), un
fragment de panse de cruche à décor polychrome organisé en
registres superposés. Cette production rappelle la céramique
de Qallaline du xviiie siècle qui se caractérise notamment
par l’usage de la couleur bleue5 (fig. 2). Notre fragment se
situerait plutôt vers la fin de ce siècle et serait contemporain de la création du village. De plus, un document des
archives nationales tunisiennes, daté de l’année 1859, évoque
l’enrôlement de 26 hommes de Dechret Bou Jlida parmi 96
personnes redevables du payement de l’impôt à l’État6. Ainsi
cette implantation moderne entraîna la dissimulation presque
complète du site archéologique. Seules trois zones situées
le long des deux cours d’eau qui délimitent l’agglomération
urbaine antique échappèrent à l’occupation moderne.
Quel était le nom antique de Bou Jlida ? Depuis la découverte en 1885, par le capitaine Bordier7, d’une dédicace à
Saturnus Achaiae mentionnant une gens Bacchuiana et
datant du règne d’Antonin le Pieux8, les commentateurs se
sont divisés sur l’interprétation qu’il convient de donner au
terme gens. Les uns sont d’avis que le mot signifie tribu9 ;
d’autres, ont opté pour le sens de sodalité religieuse ou
confrérie mystique vouée au culte de Bacchus10. Sans revenir
sur les détails de ce débat, exposés ailleurs11, l’analyse de
l’ensemble de la documentation afférente à cette question
semble prouver que la signification ethnologique donnée
au mot gens est fort improbable. La supposée tribu gens
Bacchuiana n’a eu aucune existence réelle et l’agglomération
antique de Bou Jlida n’a jamais connu une telle organisation.
Ousseltiya en Tunisie » donnée par J. Despois (1959, pl. XI). Voir aussi
Mokni 2020, p. 86-88.
5. Sur ce type de cruche dit « cruche de mariage », utilisé à Jerba
dans le rituel traditionnel des noces, voir Louhichi 1994, p. 186 et
Cat. nº 178, p. 230. Les trois couleurs employées dans le décor de
cet objet sont le bleu, le jaune et le vert. La couleur bleue, utilisée
dans notre fragment pour dessiner un bandeau large de 5 à 6 mm,
au-dessous d’une série de feuilles simples dites qlub (noyaux) selon
la terminologie des céramistes de Nabeul, « tend à disparaître dans
la céramique du xixe siècle » (Louhichi 2010, p. 192, pièce 178).
L’apparition du bleu de cobalt datait de la fin du xiie siècle avec le
nouveau chromatisme qui accompagne la production céramique
hafside (Louhichi 1994, p. 185 ; 2010, p. 121-122 et 164).
6. Mokni 2020, p. 107.
7. Cagnat 1885, p. 153-154 ; Cagnat, Reinach 1885, p. 260.
8. CIL VIII, 12331 = ILS 4440 : Saturno Achaiae Aug(usto) sacr(um)
/ Pro sal(ute) Imp(eratoris) Caes(aris) Antonini Aug(usti) Pii p(atris)
p(atriae) / gens Bacchuiana templum sua pec(unia) fecerunt id(emque)
dedic(auerunt) / Candidus Balsamonis fil(ius) ex (undecim)pr(imis)
amplius spatium in quo templum fieret / donauit. Date : 139-161.
9. Voir surtout Gascou 1998, p. 95.
10. Voir notamment Desanges 1987-1989, p. 169-176 (= 1999,
p. 197-204) ; Peyras 1995, p. 277 ; Coltelloni Trannoy 2021,
p. 185-187.
11. Nous avons consacré à cette question un article récent, Chérif
sous presse, p. 501-538.
établie, elle permet de corriger la leçon Mizeoter jusqu’ici
adoptée dans la littérature scientifique18.
Les prospections que nous avons menées dans le village
et de part et d’autre des deux oueds, ont apporté un éclairage
déterminant pour la fixation du toponyme antique, mais elles
ont également contribué à mieux définir les limites du site,
l’identification des espaces funéraires et la précision de l’arc
chronologique de l’occupation. Il nous a été donné aussi, au
cours de ces travaux de terrain, de découvrir un lot important
d’inscriptions susceptibles d’enrichir nos connaissances sur
la population locale, notamment en ce qui concerne le
processus de son intégration dans la romanité.
1. QUE SAVONS-NOUS
DE BOU JLIDA ?
1.1. LES
Cette agglomération, sans doute d’abord une ciuitas
pérégrine12, est attestée comme municipe par deux inscriptions au moins, l’une signalée à Testour13 par Francisco
Ximénez entre 1720 et 1735 dans son livre intitulé Diario de
Túnez14, l’autre trouvée à Bou Jlida même par N. Ferchiou15.
Un milliaire dédié à Théodose Ier contient peut-être aussi une
troisième mention de ce statut16. L’exploration du village au
cours des dernières années m’a offert l’occasion de repérer
un nouveau document épigraphique constitué dans son état
actuel de deux linteaux faisant partie d’une longue inscription où il est possible de déchiffrer, sans risque d’erreur, le
nom antique de la ville : [M]ịẓaeọ[t]hẹrena. C’est en fait
la cité des Mizeoterenenses (ou Mizaeotherenenses), forme
adjectivale fournie par un fragment de l’inscription dite des
ethniques qui correspond à un tarif fiscal daté du règne
conjoint de Valentinien, Valens et Gratien (367-375)17. La
nouvelle forme du toponyme étant maintenant définitivement
12. Ce statut ne figure jusqu’à maintenant sur aucun document
épigraphique mais il se déduit en toute logique lorsqu’on écarte le
supposé statut tribal.
13. CIL VIII, 1395, où on peut lire à la fin muni(cipium) Mizado/
tereni, leçon qu’il convient de corriger en muni(cipium) Mizaeo/
terene[nse]. Le texte est gravé sur une colonne qui correspondrait
selon P. Salama (1987, p. 155) à une borne milliaire. Voir en dernier
lieu sur ce document, Chérif sous presse, p. 513-516.
14. Voir en dernier lieu González Bordas 2015, p. 682-683.
15. Ferchiou 1979a, p. 19 (d’où AE 1979, 651). Voir notre apparat
critique et les nouvelles restitutions proposées dans Chérif sous
presse, p. 517-519.
16. Le texte est donné infra, p. 74.
17. CIL VIII, 10530 = 12552a. Saumagne 1950, p. 127. Le fragment
provient de Carthage, il est déclaré comme non retrouvé par
Z. Benzina Ben Abdallah et L. Ladjimi Sebaï (2011, p. 325).
DONNÉES PUBLIÉES
La notice publiée dans l’Atlas archéologique de la Tunisie
nous donne déjà une idée sur l’état du site et le potentiel
archéologique encore préservé. Il ne reste en fait que fort
peu de chose à signaler : « Restes d’un bourg antique.
Enceinte byzantine. Barrage sur l’Oued-el-Aïn ; citernes.
Inscriptions »19. Ce bilan est demeuré pratiquement inchangé
vu l’absence de toute programmation d’interventions archéologiques20. Seulement de nouvelles inscriptions et des éléments
d’architecture ont été publiés par N. Ferchiou, sur lesquels on
reviendra plus loin.
Une première mention du site archéologique de Bou Jlida
se trouve dans un passage de Francisco Ximénez lorsqu’il
parle de la colonne de Testour que je viens d’évoquer. Il écrit
dans son Diario de Túnez (Vol. VI fol. 85 rº) : « J’ignore si
cette colonne a été retrouvée ici et ce site s’appelait Mizado,
je penche plutôt pour qu’elle vienne d’un site appelé Pizado
à deux lieues d’ici vers le midi, où l’on trouve les ruines d’un
site ancien, dont le nom a pu être corrompu, et qui se serait
appelé Mizado »21. Les deux lieues correspondent approximativement à la distance de 15 km à vol d’oiseau qui sépare
Testour de Bou Jlida. Au temps de Ximénez les ruines n’ont
pas encore été occupées par le village des Ousseltiya.
Les premières visites exploratoires commencent avec
Julien Poinssot en 1882. Dans sa brève description, l’auteur
insiste sur la construction du village aux dépens des ruines
et sur l’éradication des vestiges, récupérés intensivement
comme des matériaux pour la construction des maisons.
18. Voir en dernier lieu Desanges et alii 2010, p. 180 où les auteurs
ne prennent pas en considération le rapprochement fait par Ch. Tissot
(1888, p. 764), et après lui par G. Wilmanns (CIL VIII, p. 938), entre
la colonne de Testour et le fragment de Carthage pour en déduire la
forme exacte du toponyme.
19. AATun I, f. 36 – Bou Arada au 1/50 000e, no 74.
20. Desanges et alii 2010, p. 180 où on lira : « L’AATun signalait les
restes d’un bourg antique et une enceinte « byzantine » comme seul
vestige reconnaissable, ainsi, peut-être, qu’une nécropole au N.-E ».
21. Traduction de H. González Bordas (2015, p. 683).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 2 : Tesson de céramique de Qallaline (cliché A. Chérif).
DU SITE ANTIQUE
63
Il ajoute à propos du site : « Les autres édifices de la ville
antique sont presque tous détruits, cependant leurs fondations et quelques pans de murs encore debout permettent de
se faire une idée de son étendue »22. J. Poinssot fait également
état de quelques fragments d’architecture, d’un bas-relief
« d’un travail assez grossier représentant dans ses divers
compartiments des scènes de la vie domestique »23, et d’un
sarcophage en marbre blanc portant sur l’une de ses parois
une croix monogrammatique24 (fig. 3). Ces deux derniers
objets n’ont pu être retrouvés25.
Fig. 4 : Vue d’un tronçon de l’enceinte byzantine (cliché A. Chérif).
Fig. 3 : Le sarcophage orné d’une croix monogrammatique
(d’après POINSSOT 1882-1883, p. 294).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Le même explorateur signale en outre une enceinte
byzantine dont les murs conservaient encore une hauteur de
plusieurs mètres. De ce monument, seuls quelques tronçons
sont encore repérables. Les murs sont construits avec deux
parements en gros blocs et un remplissage en moellons
(fig. 4).
Il convient d’ajouter à ce qui précède les vestiges suivants :
– des installations hydrauliques reconnues par les
brigades topographiques après une mission effectuée
en 1901 : « Barrage établi sur l’oued El-Aïn, près d’une
source abondante. Citernes ruinées »26. Actuellement, tout a
quasiment disparu à part des traces infimes de structures en
moellons à peine perceptibles sur la berge gauche de l’oued ;
– de nombreux éléments d’architecture signalés par J.
Poinssot et surtout par N. Ferchiou : chapiteaux, fragments
de fûts et bases de colonnes, fragments d’architraves,
corniches, linteaux, etc.27 On signalera particulièrement un
linteau décoré, remployé dans le mur byzantin, datable « de
la deuxième moitié du 1er siècle avant J.-C., et, peut-être, au
cours du règne d’Auguste »28, et une série d’éléments d’archi-
64
22. Poinssot 1882-1883, p. 293. L’habitat moderne était moins étendu
au début du Protectorat français que ne l’est maintenant.
23. Poinssot 1882-1883, p. 293.
24. Poinssot 1882-1883, p. 294 ; CIL VIII, 12340a. La croix
monogrammatique apparaît au ive siècle et elle est employée à l’époque
byzantine (à Haïdra par exemple, cf. Duval 1975, p. 335).
25. Le sarcophage me semble avoir été repéré par J. Poinssot dans la
nécropole du Sud, car c’est la plus tardive comme on le verra plus loin.
26. Gauckler 1902, p. 31.
27. Ferchiou 1979a, p. 29-30 ; 1989, p. 435, no XVIII.I.Q.2 2
et pl. XCV, d. Voir aussi p. 349 (linteau décoré d’époque julioclaudienne). Plusieurs de ces objets existent encore dans les maisons
ou sur les bords des rues.
28. Ferchiou 1989, p. 478. Voir aussi p. 328-329, no XVIII.I.C.2. 2 et
pl. LXXXVI, c, et p. 417, 430, 482.
tecture composée d’une base de colonne « corinthienne » ou
« composite », d’un chapiteau composite et de cinq tronçons
d’architrave. Ces éléments ont été attribués par N. Ferchiou
à une colonnade d’un portique qui serait de l’époque sévérienne d’après le répertoire décoratif29.
Si les ruines sont en grande partie couvertes par l’habitat
moderne, quelques rares monuments ont tout au moins laissé
leurs traces à travers l’épigraphie. Cinq temples au moins ont
dû exister à Mizaeotherena, dont les vestiges ne peuvent plus
être identifiés et localisés :
– une épitaphe datable du ier siècle ap. J.-C. mentionne
une prêtresse des Cereres (sacerdos Cererum)30, ce qui
suppose l’existence d’un clergé et donc d’un lieu de culte
dédié à cette déesse ;
– un temple consacré à Tellus et à Cérès, auquel une porte
richement décorée a été ajoutée suite à un acte d’évergétisme
privé dû à deux Aebutii31. Les mêmes évergètes offrirent un
autel à Mercure Silvain pour la sauvegarde de l’empereur
Hadrien32 ;
– le fameux temple dédié à Saturnus Achaiae sous le
règne d’Antonin le Pieux, érigé sur un terrain privé donné
par Candidus Balsamonis fil(ius) ex (undecim)pr(imis)33. Le
linteau, autrefois placé à l’entrée du monument, a été trouvé
remployé dans le marabout de Sidi Agueb qui s’élève à
500 mètres au sud-est du village. Il est actuellement déposé
devant une maison construite sur la nécropole du Sud.
29. Ferchiou 1979a, p. 26-29 ; 1982, p. 850-856 et pl. X-XI.
30. Cf. infra, tabl. 1, no 1 : l’épitaphe d’Aemilia Amotmicar.
31. Dimensions du linteau (d’après le CIL) : H. 21 cm ; l. 164 cm ;
Ép. 28 cm. CIL VIII, 12332 = ILS 3959 : Telluri et Cereri Aug(ustis)
sac(rum). / Aebuti(i) Saturninus et Victor, T(iti) Aebuti(i) f(ilii),
/ ianuam cum suis o[r]namentis s(ua ) p(ecunia) f(ecit), id(em)
q(ue) d(edicauit). Cf. Poinssot 1882-1883, p. 294, no 144 ; Cagnat,
Gauckler 1898, p. 93-94 ; Cadotte 2007, p. 494, no 120.
32. Cet autel est présenté ci-dessous.
33. Cf. supra, n. 8.
34. CIL VIII, 23922 : Saturno [---] / [--- pr]o salute Imp(eratoris)
[---] / [Had]riani Anto[nini] / [Aug(usti)] Pi[i p(atris) p(atriae) ---.
Voir Le Glay 1961, p. 124, nº 2.
35. Espérandieu 1892, p. 156, nº 2 ; CIL VIII, 23924 : [---] deo
I[nuicto Soli] / [Pro sal(ute)] Imp(eratoris) Caes(aris) L(ucii) Domiti(i)
Aurelian[i] Pi[i felicis Aug(usti) ---. Il est possible que la suite du
texte comporte les noms de l’impératrice Ulpia Severina, épouse de
l’empereur.
36. Ferchiou 1979a, p. 22-23.
37. CIL VIII, 12333 = 23923 : --- co(n)]s(ulis) IIII [imp(eratoris)] X
p(atris) p(atriae) proco(n)s(ulis) / [---] eorum domus [---. Le bloc est
conservé sur une longueur de 1,66 m. L’inscription daterait du règne
de Gallien.
38. CIL VIII, 12334 = 23925. Espérandieu 1892, p. 156, nº 3.
L’inscription est composée de deux lignes au moins, mais la première
est complètement effacée. Lettres hautes de 10,5 cm.
39. Gascou 1976, p. 33-48.
40. Beschaouch 1985, p. 967, nº 2.
41. Chérif sous presse, p. 529-532.
42. AE 1986, 718 : P[ro salut]e I[mp(eratoris)] / Hadriani Aug(usti) /,
Siluano deo sac(rum). / Aebuti(i) Saturninus / et Victor, T(iti)
Aebuti(i) f(ilii), ara(m) sua p(ecunia) f(ecerunt) idemque / dedicarunt.
Sur ce document, on consultera Ferchiou 1979a, p. 23-24 (aucune
description des images sculptées sur les trois autres faces) et surtout
Fig. 5 : L’autel dédié à Silvain Mercure. La face inscrite
(cliché A. Chérif).
écryptés par A. Beschaouch. Sur la face opposée au texte,
fortement abîmée, sont conservées les traces de deux pieds,
certainement ceux de la divinité. Sur les faces latérales sont
figurés les attributs de Mercure, le bélier et le coq43. Les
deux évergètes sont aussi les donateurs de la porte du temple
de Tellus et Cérès dont j’ai parlé plus haut. Je reviendrai
plus loin sur ces Aebutii, sans doute membres de l’une des
familles les plus en vue à Mizaeotherena au iie siècle ap. J.-C.
Le second texte est un peu énigmatique. C’est un bloc
taillé dans du calcaire, remployé couché sur son côté
gauche dans la clôture d’une maison au nord du village44.
L’inscription est composée d’un seul mot gravé sur deux
lignes avec des lettres hautes de 8 cm ; l’écriture est une
capitale allongée bien soignée. On lit : Rhoda/niis (fig. 6)45.
N. Ferchiou, qui n’a pas pu retrouver le bloc, interprète
le mot comme indiquant un organisme inconnu46. Il s’agit
là d’une signature ou d’une marque qui rappelle le nom
Rhodanius ou Rodanius attesté uniquement par une inscription chrétienne de Rome47. Est connu également le cognomen
Rhodanus48, qui est aussi le nom du Rhône, le grand fleuve
de la Gaule. Cette marque se rapporte-t-elle à une quell’interprétation de A. Beschaouch (1985, p. 970-973). Voir aussi
Cadotte 2007, p. 494-495, nº 121.
43. Beschaouch 1985, p. 972-973. Voir aussi Cadotte 2007,
p. 24-125.
44. Dimensions : H. 50 cm ; l. 34 cm ; Ép. (visible) 24 cm.
45. Ferchiou 2000, p. 69. Inscription non reproduite par l’AE.
46. Cf. note précédente.
47. AE 2003, 220.
48. Par exemple CIL VI, 26531 et 26776 (Rome).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
– une dédicace incomplète consacrée à Saturne pour le
salut d’Antonin le Pieux présente des lettres hautes de 10 cm.
S’agit-il d’un temple différent de celui de Saturnus Achaiae ?
C’est possible. M. Le Glay admet pourtant que ce texte est un
doublet de l’inscription datée du même empereur34 ;
– une dédicace au deus inuictus Sol, pour le salut de
l’empereur Aurélien (270-275). Le support n’est pas indiqué
par l’éditeur35, mais il semble qu’il s’agisse d’un linteau, par
conséquent d’une porte, témoignant en toute évidence d’un
édifice.
Des blocs fragmentaires gravés d’inscriptions se rapportent également à l’équipement monumental de la ville.
C’est sans doute le cas d’un fragment de frise remployé
dans une maison et qui porte les lettres EORVM DOMVS.
Ce bloc, signalé par N. Ferchiou36, correspondrait-il à une
partie d’une inscription qui figure déjà dans le CIL VIII37,
également lacunaire, où se lisaient les mêmes mots à la ligne
2, gravés en lettres hautes de 11 cm ? Un autre fragment de
linteau contient quelques lettres d’une dédicace : --- ide]
mque curia [---38 . La curie est une institution que l’on
rencontre dans des municipes et des colonies, donc dans des
cités à constitution romaine. La plus grande majorité des inscriptions africaines relatives aux curies municipales se situe
au iie et au iiie siècle39. J’ai proposé, à la suite d’une remarque
formulée par A. Beschaouch40, d’attribuer la promotion
municipale de Mizaeotherena à Caracalla41. Si l’on retient
cette hypothèse très vraisemblable, notre fragment daterait
par conséquent du iiie siècle.
De toutes les inscriptions publiées, seulement deux ont
été retrouvées, en plus bien évidemment de la dédicace
à Saturnus Achaiae. D’abord un autel dédié à Mercure
Silvain pour la sauvegarde de l’empereur Hadrien par
Aebutius Saturninus et Aebutius Victor, tous deux fils de
Titus Aebutius42 (fig. 5). Les trois autres faces de l’autel
comportaient des représentations figurées remarquablement
65
1.2. L’APPORT
DES NOUVELLES PROSPECTIONS
Deux objectifs essentiels ont été préalablement fixés pour
les travaux de terrain consacrés au site archéologique de
Bou Jlida. Le premier est d’ordre topographique : parvenir à
délimiter, même approximativement, le noyau urbain, c’està-dire le centre monumental de la ville. Cela permettra d’actualiser nos connaissances sur les vestiges encore conservés
et d’en donner des compléments aux descriptions antérieures.
Parallèlement à cet essai, notre attention s’est portée sur une
question importante qui sera traitée un peu plus loin : où
s’étendaient les nécropoles de la ville ? Les données recueillies sur la répartition des zones funéraires permettront de
proposer un premier plan schématique du site, chose qui n’a
jamais été réalisée.
Notre deuxième objectif consistera à entreprendre une
enquête minutieuse auprès des habitants du village en vue
d’étoffer le dossier épigraphique avec de nouvelles découvertes susceptibles de nous fournir plus d’informations sur
l’histoire de Mizaeotherena et sa population. Je présenterai
ci-après les résultats obtenus de cette investigation.
1.2.1. Considérations générales sur les limites du
centre monumental
Fig. 6 : Le bloc gravé du mot Rhodaniis (cliché A. Chérif).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
conque entreprise professionnelle ou association cultuelle ou
encore à une sodalité inconnue ? On ne saurait le dire pour
le moment.
Je termine ce tableau des données publiées par la mention
de six textes qui ont été signalés par N. Ferchiou mais restés
inédits. Je reprends ici brièvement les informations données
à leur propos par l’éditrice :
– un fragment de frise architravée portant une dédicace
à Origo49 ;
– un « bel autel de marbre portant les lettres NVMINI »50 ;
– deux épitaphes, l’une de C. Aebutius Pacatus, l’autre
d’Aebutius Saturninus, fils de T. Aebutius. Les défunts
étaient tous deux des undecimprimi51 ;
– un autel qui porte sur sa face principale l’épitaphe
d’une certaine Caecilia Ouinia, fille de Saturninus, fils de
Kallippus52.
– l’épitaphe d’un certain Aris, fils d’Aris, esclave de
Candidus53.
66
49. Ferchiou 2000, p. 74. Fragment retrouvé par Hosni Abid (2014, p.
123-124, no 87).
50. Ferchiou 1979a, p. 31, n. 30. Non retrouvé.
51. Ferchiou 2000, p. 69. La stèle de C. Aebutius Pacatus a été
retrouvée par H. Abid (2014, p. 125-126, no 89).
52. Ferchiou 2000, p. 70 : « Sur une des faces latérales subsiste
la silhouette d’une femme drapée, la défunte, évidemment. Sur
l’autre face est représenté un personnage nu, grotesque, dansant et
jouant d’une aula phrygia ». Monument retrouvé par H. Abid (2014,
p. 124-125, no 88).
53. Ferchiou 2000, p. 70. Stèle retrouvée par H. Abid (2014,
p. 131-132, no 95), elle est conservée dans la même maison qui a
récemment livré les deux blocs comportant le nom antique de la ville.
L’image qui nous a été transmise par J. Poinssot sur l’état
des ruines après l’établissement du village de Bou Jlida
diffère de celle donnée par N. Ferchiou il y a près de 40
ans. Les ruines ne cessent d’être menacées par l’extension
du noyau initial de l’habitat moderne constitué vers la fin
du xviiie siècle. Le site archéologique, nous dit N. Ferchiou,
« est aujourd’hui presque entièrement recouvert par un
village moderne, où ne subsistent que quelques souvenirs
épars du passé : restes du bastion byzantin, quelques murs ici
et là, mais il semble difficile de discerner le plan de la ville,
ou même celui d’un monument »54. Le noyau, au temps de J.
Poinssot, s’étend sur une partie de la nécropole de l’Ouest,
mais il n’a pas encore empiété sur la nécropole du Sud. Les
maisons établies sur cet espace ont été construites vers les
années ’60. Actuellement, à part les tronçons de l’enceinte
byzantine et les vestiges très émoussés de quelques structures
encore visibles dans le village même, on peut uniquement
repérer trois zones périphériques non encore bâties, situées
sur les limites orientale et occidentale du village (fig. 7).
Zone A. Elle s’étend à la limite nord-est du village, près
de la rive droite de l’oued Bou Jemaa ; la superficie en est
estimée à 1 ha environ. Aucune trace de construction n’a été
repérée. Présence de céramique antique. Il est impossible en
l’état présent de la recherche de se prononcer sur la vocation
de cette étendue de terre : un secteur de l’agglomération
urbaine ou une partie de la nécropole du Nord-Est ?
Zone B. Elle s’étend selon un axe nord-est– sud-ouest.
La partie orientale est réduite à un étroit ruban long de
220 mètres et ne dépassant pas les 70 mètres de largeur,
54. Ferchiou 1979a, p. 18.
entre la limite est du village et la rive droite de l’oued Bou
Jemaa. La seule structure repérable dans cet espace est une
petite citerne de plan quadrangulaire (2,50 × 1,70 m). Les
murs sont construits en petit appareil et les parois internes
Fig. 8 : La petite citerne, vue prise du sud-est (cliché A. Chérif).
sont revêtues d’un enduit d’étanchéité épais de 3 à 5 cm.
La couverture en berceau a disparu ; il n’en subsiste que
des amorces faisant partie des reins de la voûte (fig. 8).
C’est aussi dans cette partie orientale qu’on a pu ramasser
une bonne quantité de céramique, notamment les tessons
datables de l’époque préromaine.
À l’ouest et au sud-ouest de cette bande, s’étend, sur
1,5 ha, la partie occidentale de cette zone épargnée des
constructions modernes (fig. 9). Nous avons relevé dans ce
terrain, non loin de la route, une autre citerne entièrement
enterrée (fig. 10). La construction, de plan circulaire55, est
réalisée en petit appareil et dotée d’un puisard de forme
absidale de 46 cm d’ouverture ; elle est intérieurement recouverte d’un enduit d’étanchéité épais de 3 cm.
À 80 mètres environ à l’est de cette citerne, on signale
la présence éventuelle d’une huilerie repérée en l’état actuel
par un contrepoids en place à moitié enfoui56, entouré de
quelques alignements en opus africanum.
55. Dimensions : ø 277 cm ; Ép. des parois : 30-45 cm.
56. Dimensions : Long. 92 cm ; l.67 cm ; H. (visible) 24 cm. La rainure
qui relie les deux encoches latérales est large de 3,5 et profonde de
5 cm.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 7 : Les trois zones non bâties autour du village de Bou Jlida (Images satellite de Google earth du 12/03/2020).
67
Fig. 9 : La partie occidentale de la zone B, avec l’emplacement de la
citerne à puisard (indiqué par la flèche), vue prise du sud-est.
En arrière plan le village de Bou Jlida (cliché A. Chérif).
Fig. 11 : Le mur en grand appareil dans la zone C, vue prise du nord
(cliché A. Chérif).
Fig. 12 : Construction en moellons dans la zone C,
vue prise de l’ouest (cliché A. Chérif).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 10 : La citerne à puisard, vue prise du nord-est (cliché A. Chérif).
68
Zone C. C’est une bande qui s’étend le long de la rive
gauche de l’oued el-Aïn, sur une longueur de 200 mètres
environ, dont la largeur étant très réduite, de l’ordre de
40 mètres au maximum. On y a relevé :
– un mur en grand appareil orienté est-ouest, long d’une
douzaine de mètres. Il s’agit probablement d’un tronçon de
l’enceinte byzantine (fig. 11) ;
– les restes d’un monument en petites moellons, situé à
quelques mètres de la rive gauche de l’oued el-Aïn (fig. 12).
S’agit-il d’un édifice à vocation hydraulique, ou faut-il le
considérer comme un autre tronçon de ladite enceinte qui
n’a conservé que son remplissage après disparition des
parements externes ? Le mur qu’on vient d’évoquer est à
15 mètres à l’est de cette construction.
De l’autre côté de l’oued el-Aïn, c’est-à-dire dans l’espace
correspondant à la nécropole de l’Ouest, un fragment de
dalle en calcaire est conservé dans une maison très proche
de l’oued, la même où sont conservées les épitaphes de
Namgede et de Victoria57 (fig. 13). C’est un fragment de
57. Cf. infra, les épitaphes 2.1.n et 2.1.t.
Fig. 13 : Fragment de banc d’une latrine (cliché A. Chérif).
banc d’une latrine, percé de deux trous dont l’un est encore
intact58. Cette latrine devait être aménagée dans une maison
privée ou, plus probablement, à proximité d’un établissement
thermal, comme pour celles de Dougga situées à gauche
de l’entrée des thermes des Cyclopes59. Il est peu probable
qu’une latrine ait été construite dans la nécropole ; le
fragment a sans doute été déplacé au moment des premières
constructions modernes au détriment de cet espace funéraire.
une nécropole »60. De quelles pierres tombales est-il question
ici? De celles qui figurent dans le CIL VIII, ou des épitaphes
publiées par ses soins? Cela est d’autant plus problématique que
N. Ferchiou, dans sa présentation des nouvelles stèles, n’indique
en aucun cas le lieu et les conditions de la découverte61. Quoi
qu’il en soit, l’existence d’une nécropole du Nord-Est est indéniable, car deux stèles au moins de la série inédite proviennent
assurément de ce secteur (textes 2.1.f et 2.1.j).
1.2.2. Les nécropoles
On ne peut aborder la question des nécropoles sans
poser l’épineux problème relatif aux lieux de provenance des
épitaphes. Les éditeurs des inscriptions funéraires découvertes
à l’époque coloniale (J. Poinssot, E. Espérandieu, J. Zeiller et
L. Poinssot) se contentent presque toujours de la même indication : « dans une maison du village » ou « Bou Djelida ». De
fait, toutes ces épitaphes ont été déplacées et certaines d’entre
elles ont été remployées dans des structures modernes, ce qui
rend impossible l’identification de la nécropole dans laquelle
ces défunts ont été enterrés. Une seule exception concerne la
stèle CIL VIII, 12337 (tabl. 1, no 17) à propos de laquelle les
auteurs du Corpus nous disent : « in rivo Bu Djema, haud
procul a vico ». Mais là encore on manque de précision : à
quelle nécropole rattache-t-on cette pierre tombale? À celle
du Nord-Est ou à celle du Sud? Dans les deux cas, le cours de
l’oued Bou Jemaa est tout proche de ces deux espaces funéraires qui, de surcroît, peuvent être considérés comme « non
loin du village », même si le quartier méridional établi sur la
nécropole du Sud est récent par rapport à l’année 1891, date de
l’apparition du premier supplément du CIL VIII. Dans ce même
ordre d’idée, il faut rappeler une remarque de N. Ferchiou à
propos de la nécropole du Nord-Est : « Signalons simplement
qu’un certain nombre de pierres tombales ont été exhumées à
peu de distance vers le nord-est : sans doute y avait-il donc là
58. Dimensions : Long. 110 cm ; l. 54 cm ; H. 14 cm. Le trou intact fait
20,5 cm de diamètre.
59. Aounallah 2006, p. 101.
L’exploration du village de Bou Jlida menée depuis
plusieurs années a contribué à l’augmentation substantielle
du nombre d’épitaphes et à la connaissance des conditions de
leurs découvertes ; il est maintenant possible de reconstituer
la topographie funéraire à Bou Jlida. Trois espaces ont été
dévolus aux morts.
a. La nécropole de l’Ouest : situé le long de la rive droite
de l’oued el-Aïn, cet espace est le plus vaste et peut-être aussi
le plus ancien ; certains témoignages remontaient au iiie siècle
av. J.-C. et peut-être même au ive siècle62. La superficie de
cette nécropole est évaluée à 7 ou 8 ha ; elle est occupée dans
sa partie méridionale par le cimetière actuel. On y voit encore
de nombreux fragments de dalles de couverture de tombes,
parfois déterrés au moment du creusement des nouvelles
fosses. De la série inédite des épitaphes, onze en proviennent
assurément63 et deux lui sont attribuables de façon hypothétique (2.1.v et 2.1.x). Outre les pierres tombales, on a
pu repérer deux fragments de socles brisés, dont chacun
est muni d’une mortaise pour l’encastrement du pédoncule
et la fixation de la stèle64 (fig. 14). Il s’agit là peut-être de
fragments de mensae funéraires.
60. Ferchiou 1979a, p. 18.
61. Ferchiou 1979a, p. 24-25.
62. On verra plus loin les détails de ces données dans la partie
consacrée à la chronologie de l’occupation du site.
63. 2.1.b ; 2.1.d ; 2.1.h ; 2.1.m ; 2.1.n ; 2.1.o ; 2.1.p ; 2.1.q ; 2.1.t ; 2.1.u ;
2.1.y.
64. Socle de forme rectangulaire (fig. 14a) : Long. 30 cm ; l. 55,5 cm ;
H. 28 cm. Dimension de l’encoche : Long. 8 cm ; l. 25,5 cm ; Prof.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 14 : Nécropole de l’Ouest. Socles pour l’encastrement des stèles à pédoncule (clichés A. Chérif).
69
b. La nécropole du Nord-Est : l’état actuel du terrain ne
permet qu’une approche encore approximative de cet espace.
Celui-ci s’étend sans doute de part et d’autre de l’oued Bou
Jemaa comme le prouvent les lieux de découverte de deux
stèles (textes 2.1.f et 2.1.j) et d’un fragment de socle destiné à
l’encastrement d’un pédoncule65 (fig. 15). L’étendue primitive
de cette nécropole a-t-elle englobé tout l’espace laissé tardivement à l’extérieur de l’enceinte byzantine ? Si tel est bien le
cas, on peut estimer que les maisons modernes situées entre
cette enceinte et la limite nord du village sont construites
à l’intérieur de cet espace funéraire. La conséquence de
cette hypothèse est que les sept épitaphes conservées dans
ce secteur66 pourraient avoir été récupérées – toutes ou au
moins quelques-unes – de la nécropole du Nord-Est. Quoi
qu’il en soit, on peut évaluer provisoirement la superficie de
cette nécropole à 6 ou 7 ha environ, sur la base des quelques
trouvailles enregistrées et de la dispersion de la céramique
de surface, d’ailleurs assez rare en raison de l’exploitation
agricole et des travaux de sous-solage.
dessert le village du côté sud. Ces travaux ont détruit de nombreuses tombes, mais ils ont ramené à la surface quelques
nouvelles épitaphes67. Cette nécropole est peut-être la seule
qui a continué à fonctionner durant l’antiquité tardive puisque
c’est elle qui a livré la seule épitaphe d’époque byzantine.
À la lumière des résultats obtenus des nouvelles prospections, il est maintenant possible de proposer un plan
schématique du site archéologique de Bou Jlida sur lequel
sont marquées les limites approximatives de l’agglomération
urbaine et des espaces funéraires (fig. 16). Le centre monumental, qui correspond au noyau civique de la ville, couvre
une surface de 25 ha environ ; l’étendue globale des ruines
avec la prise en considération des nécropoles est estimée à
une quarantaine d’hectares environ (fig. 17). Outre ces précisions d’ordre topographique, les nouvelles investigations
ont largement enrichi le corpus épigraphique de la ville, avec
l’ajout d’un important lot d’inscriptions, essentiellement des
funéraires.
1.3. LES PRINCIPALES SÉQUENCES CHRONOLOGIQUES
DU SITE
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 15 : Nécropole du Nord-Est. Socle pour l’encastrement d’une
stèle à pédoncule (cliché A. Chérif).
70
c. La nécropole du Sud : elle s’étend approximativement
sur 3 ha et est presque entièrement occupée par des maisons
construites à partir des années 1960. Comme le montre le
plan présenté à la figure 16, on a tenté d’individualiser cette
nécropole par rapport à celle de l’Ouest. Actuellement, l’occupation humaine empêche de vérifier si une connexion a
pu exister entre les deux espaces. L’idée qu’il s’agissait tout
simplement d’une extension de la nécropole de l’Ouest reste
tout de même envisageable mais invérifiable en l’état présent
de l’enquête. Une partie de cette nécropole a été touchée par
l’aménagement de la route qui vient de Bou Arada et qui
8 cm. Socle de forme presque carrée (fig. 14b) : Long. 43 cm ; l.
47 cm ; H. 23 cm. Dimension de l’encoche : Long. 11 cm ; l. 19,5 cm ;
Prof. 10 cm.
65. Le fragment gît encore dans un petit affluent de l’oued Bou Jemaa.
Long. 29 cm ; l. 42,5 cm ; H. 22 cm. Dimension de l’encoche : Long.
9 cm ; l. 15 cm ; Prof. 9 cm.
66. 2.1.e ; 2.1.g ; 2.1.k ; 2.1.r ; 2.1.s ; 2.1.w ; 2.2.a.
Les éléments collectés lors des différentes missions
de prospection (l’archéologie), ajoutés au signalement
des pierres inscrites qu’on présentera un peu plus loin
(l’épigraphie), permettent de dessiner à grands traits l’arc
chronologique de l’occupation du site de Bou Jlida. Pour
appréhender cette question on s’appuie essentiellement sur
la céramique rassemblée en surface68. Ce matériel permet
d’aborder la question des origines de l’occupation, c’està-dire l’établissement primitif et la constitution de l’agglomération. Pour des sites très peu documentés comme
ceux de la région de Bou Arada, y compris celui de Bou
Jlida, on se contente presque toujours de signaler les plus
anciens témoignages indiquant une occupation permanente.
L’absence de documents écrits pour la période préromaine
empêche toute tentative de reconstruction de l’histoire des
premiers temps de l’agglomération. On est ainsi réduit à
des constatations d’ordre général et amené à formuler des
hypothèses dont on n’a pas généralement les moyens de
vérifier à travers des sondages ou des fouilles. L’étude de
l’évolution de l’agglomération au temps de la domination
romaine et durant l’Antiquité tardive souffre aussi d’une
déficience documentaire. On se contentera de faire le point
de nos connaissances sur certains aspects touchant la vie
municipale et religieuse, en évoquant notamment le sujet de
l’implantation du christianisme dans la ville et le problème
d’un éventuel abandon du site au viie siècle.
67. Nous devons ces informations à des habitants du quartier
méridional du village. Deux épitaphes au moins ont été déterrées lors
de ces travaux, 2.1.c et 2.1.i.
68. Je me contente d’exploiter dans ce travail la céramique qui
se rapporte aux premiers temps de l’agglomération (céramique
préromaine) et celle qui offre les témoignages les plus tardifs. Je
publierai prochainement avec mon ami Slim Béchrifia une étude
détaillée de ce matériel.
Fig. 17 : Limites approximatives du site de Bou Jlida, recouvert par le village moderne
(A. Chérif et R. Smari).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 16 : Plan schématique du site archéologique de Bou Jlida. Localisation et étendue approximative des trois nécropoles
(A. Chérif et R. Smari).
71
1.3.1. L’établissement primitif
À la lumière des informations jusqu’ici documentées
sur le site, les témoignages les plus anciens, recueillis dans
la zone B, sont constitués par un petit lot de céramiques
formé d’un répertoire comprenant à la fois les amphores
et la vaisselle fine. Les amphores sont représentées par un
fragment de bord de type « Ramón 4.2.1.5 » qui date du ive
siècle ou de la première moitié du iiie siècle av. J.-C.69, et par
deux bords de type Maña D datables entre le iiie et le milieu
du iie siècle av. J-C.70 (fig. 18).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 18 : Fragments d’amphores puniques de type Maña D
(clichés A. Chérif).
72
La vaisselle à vernis noir reflète cette présence préromaine sur le site, notamment dans la même zone B, précisément dans la partie nord-est qui longe la rive droite de l’oued
Bou Jemaa. Le lot ramassé, bien qu’il soit minoritaire, traduit
la présence d’un répertoire varié produit en vernis noir local
et/ou importé. Citons les exemples suivants :
– fragment de bol à bord retroussis type Morel 2626a1
datant de la première moitié du iiie siècle av. J.-C.71 ;
69. Ramon 1995, fig. 44, T. 4.2.1.5, no 8, p. 189.
70. Sabratha I 1989, fig. 6, no 75.
71. Morel 1981, Pl. 61, no 2626a1, p. 192 ; Chelbi 1992, forme 105,
p. 117.
– fragment de bol tripode de céramique de Calès, datable
du milieu iiie siècle– milieu iie siècle av. J.-C. (fig. 19a)72 ;
– des fragments de panses (au nombre de trois) en campanienne A, datables entre la fin du iiie siècle et la première
moitié du iie siècle av. J.-C. (fig. 19b)73 ;
– fragments d’un fond de bol en campanienne C datable
entre la fin du iie siècle et le milieu du ier siècle av. J.-C.
(fig. 19c)74 ;
– fragment amorphe d’un vase à vernis noir local d’imitation (fig. 19d).
En plus des tessons céramiques, une monnaie punique
a été récupérée par l’un des habitants dans le cimetière
musulman, aménagé aux dépens de la partie méridionale
de la nécropole de l’Ouest. C’est une monnaie en bronze en
assez bon état malgré certaines traces de dégradation ; elle
présente un module de 17-18 mm pour un poids de 4,78 g
(fig. 20).
D/ Effigie de Tanit à gauche. Grènetis ?
R/ Buste de cheval à droite. Devant, un globe. Grènetis.
Cette pièce appartient à la série des monnaies frappées au
cours de la période 300-264 av. J.-C., dans des ateliers situés
en Sardaigne, mais aussi à Carthage. J. Alexandropoulos
envisage « pour ces monnaies de bronze, un début d’émission
vers 300 av. J.-C. »75. L’usage de ce monnayage a pu durer,
selon le même auteur, jusqu’au 238 av. J.-C.76. Notre monnaie
provient sans doute d’une sépulture. Serions-nous dans ce cas
en présence d’une tombe du iiie siècle av. J.-C. ? Sur ce point,
un phénomène doit être souligné : la juxtaposition dans une
même tombe de monnaies d’époques différentes (punique,
numide, romaine)77. Il importe d’attirer l’attention sur un
détail important : la plupart des monnaies carthaginoises ou
numides trouvées dans des contextes romains sont très usées
indiquant ainsi une très longue période d’utilisation. Pour
notre pièce, l’assez bon état de conservation suppose que la
durée de circulation n’a pas été longue avant qu’elle ne soit
déposée dans l’une des tombes de la nécropole de l’Ouest78. Il
est à notre avis plus probable d’attribuer la tombe au iiie siècle
72. Sghaïer, Dammak-Latrach 2020, p. 207.
73. Chelbi 2008, p. 236, pl. 1, no 9.
74. Chelbi 2008, p. 237, pl. 1, no 13.
75. Alexandropoulos 2000, p. 73. Nous pouvons rapprocher notre
exemplaire des frappes nº 57 étudiées par J. Alexandropoulos (2000,
p. 375-376 et pl. 2, nº 57). La Banque centrale de Tunisie possède un
grand nombre d’exemplaires du même type. Voir Alexandropoulos
2006, p. 173-192.
76. Alexandropoulos 2000, p. 73.
77. Ce phénomène est attesté dans d’autres nécropoles antiques, à
Hajeb el-Aïoun par exemple (Godin 1905, p. 270) et à Tipasa de
Numidie (Baradez 1962, p. 216-227).
78. Ce même raisonnement est adopté par Godin (1905, p. 276) :
« Encore bien conservées aujourd’hui – nous dit Godin à propos de
trois monnaies trouvées ensemble dans un même tombeau – elles ont
été mises dans la tombe peu de temps après avoir été frappées. Elles
peuvent indiquer, par suite, une époque, et permettent d’assigner à
une partie de la nécropole un âge approximatif. Deux des pièces sont
conservées seulement du côté de la face ; les revers, en contact avec le
sol, ont été détruits par le vert-de-gris. Ces monnaies portent les noms
de Sévère Alexandre ; la troisième, ceux de Gordien ».
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 19 : Céramique à vernis noir de Bou Jlida (clichés Z. Msellem).
73
Fig. 20 : Monnaie punique (clichés F. Hadded).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
av. J.-C., d’autant plus que nous avons déjà invoqué d’autres
témoignages sur l’occupation des lieux à la même époque.
Toutes les données qu’on vient de présenter montrent qu’il
ne s’agit pas d’une simple fréquentation précoce du lieu. Cet
établissement primitif, qui remontait au moins au iiie siècle
av. J.-C., possédait déjà une nécropole et était sans doute
organisé en habitat permanent79. Quel était alors le statut
juridique de ce premier noyau au cours de cette période
préromaine ? Avons-nous affaire à une cité ou à une agglomération secondaire ? L’idée d’un castellum est envisageable,
aussi bien pour le cas qui nous occupe que pour d’autres
agglomérations de la même région. La question a été posée
par exemple pour Sucuba(-i) – Henchir Brighitha80 ; on a aussi
conjecturé que Thabbora – Henchir Tambra, au voisinage de
Bou Jlida, était un castellum avant de se constituer en cité,
désignée sur une borne territoriale récemment découverte,
datable très probablement de l’époque augustéenne, par
le terme de populus au sens plinien du terme81. Dans une
réflexion récente sur le sens des mots Afri-Africa, Samir
Aounallah admet que les Afri sont « les habitants de l’Africa,
constituée au lendemain de la destruction de Carthage en
146 avant J.-C. C’étaient les vaincus de la troisième guerre
punique soumis au stipendium et organisés en trois pagi de
stipendiaires, le Zeugeus, Muxsus et Gu(n)susus, à l’intérieur
desquels il n’y avait pas de cités mais seulement des castella,
y compris d’anciennes cités désormais sans statut »82. Le
contenu de l’inscription de Formiae (Latium) qui relatait la
carrière de Marcus Caelius Phileros83, paraît approuver cette
74
79. Dans d’autres sites archéologiques de la région de Bou Arada, on a
relevé le même terminus post quem, notamment à Henchir Brighitha,
antique Sucuba(-i). Pour d’autres sites, l’occupation semble remonter
au iie siècle av. J.-C. comme au Fundus Tapphugabensis – Henchir
Chaïeb (Chérif 2019, p. 111).
80. Voir Tahar, Chérif à paraître.
81. Chérif à paraître. Cf. aussi infra, n. 181.
82. Aounallah à paraître.
83. CIL X, 6104 = ILS 1945 : M(arcus) Caelius, M(arci) l(ibertus),
Phileros, accens(us) / T(iti) Sexti imp(eratoris) in Africa, Carthag(ine)
aed(ilis), praef(ectus) / i(ure) dicundo uectig(alibus) quinq(uennalibus)
locand(is) in castell(is) LXXXIII, / aedem Tell(uris) s(ua) p(ecunia)
fec(it), II uir Clupiae bis, Formis / August(talis), aedem Nept(uni)
lapid(ibus) uari(is) s(ua) p(ecunia) ornau(it), Fresidiae, N(umerii)
vision. Ce texte précise que cet affranchi a occupé, à une
date encore discutée entre le gouvernement de l’Africa par
Lépide et 26 av. J.-C.84, la charge de praefectus iure dicundo
uectigalibus quinquennalibus locandis in castellis LXXXIII.
Évidemment, la question des statuts juridiques des communautés de l’Africa avant le Principat ne cessera d’être posée
tant que notre documentation est encore déficiente.
1.3.2. Mizaeotherena au temps de la domination
romaine
La documentation devient un peu plus abondante pour
cette période. Toutes les inscriptions publiées ou nouvellement découvertes sont rédigées en latin ; le site n’a pas
encore livré d’inscriptions puniques (ou néopuniques) ou
libyques. En outre, en l’état actuel de l’enquête, on n’a pas
relevé d’indices préromains dans la nécropole du Sud et
dans l’espace qui correspond grosso modo à la nécropole
du Nord-Est. Faut-il conclure qu’elles sont des aménagements d’époque romaine ? C’est possible, mais la prudence
est requise du moment que notre approche est fondée sur
un constat fait en surface pour un site quasiment enfui sous
l’habitat moderne.
La vie religieuse à Mizaeotherena est encore fort
méconnue. On a recensé dans le bilan des données publiées,
présenté plus haut, les inscriptions qui attestent un certain
nombre de monuments publics. L’épigraphie permet d’inventorier cinq lieux de culte au moins ; les divinités honorées
sont les Cereres, Tellus et Cérès, Saturnus Achaiae, Saturne
et deus inuictus Sol ; la chronologie des documents, constitués d’une épitaphe et de quatre dédicaces, s’échelonne entre
le ier et le iiie siècle. On ajoutera à ce panthéon, l’autel dédié
à Mercure Silvain pour la sauvegarde de l’empereur Hadrien.
Un autre monument de la ville vient d’être révélé
récemment après la découverte, non loin du tronçon de l’enceinte byzantine indiqué par la figure 4, de deux fragments
d’une frise simple (sans décor) gravée d’une inscription
l(ibertae), Florae, uxori uiro opseq(uentissimae), / Q(uinto) Octauio,
(mulieris) l(iberto), Antimacho, karo amico.
84. Sur la chronologie de la carrière de Phileros, on consultera en
dernier lieu Fishwick 2013, p. 211-214 (avec bibliographie antérieure).
Dd(ominis) nn(ostris) Flauiis / Valentiniano et Va/lenti
pii felices uic(toribus) / semper Augg(ustis) / muni(cipium)
Mizaeo/terene[nse]87.
L’autre milliaire, publié par A. Merlin88, est également
conservé dans la même ville, dans un bain près de la Grande
mosquée ; il date du règne de Théodose Ier (379-395). Le
monument étant retrouvé, le réexamen récent a permis
d’améliorer le déchiffrement fait par Merlin. Je propose
la lecture suivante qui identifie surtout le nom de la cité
émettrice de la borne :
[D(omino)] n(ostro) / Caes(ari) / Theudo/[si]o (sic) Pio Feli/
[ci] ac trium/[fat]ori semper / [A]ug(usto), m[un(icipium)
85. Chérif sous presse, p. 527.
86. Ferchiou 1982, p. 855.
87. CIL VIII, 1395. Chérif sous presse, p. 513-516 (avec apparat
critique détaillé).
88. Merlin 1908, p. CCLX = ILAfr 664. Voici le texte tel qu’il a été
copié par Merlin : [Partie enterrée] / Caes(ari) / Theudo/[si]o (sic)
Pio Feli/[ci] ac trium/[fat]ori semper / [A]ug(usto) M[---]eo/[---]na
de(uota ou uotum) / [n(umini) m(aiestati)q(ue)] eius / [---]L (palme).
Miza]eo/[there]na de/[u]o[t(um) n(umini)] eius. / (Millia
passuum) XIIIL (palme) 89.
Nous évoquons maintenant, au terme de cette deuxième
étape, la question de la christianisation de la population, très
peu étudiée pour l’ensemble de la région de Bou Arada–
El-Aroussa. S’il est encore difficile de saisir les circonstances
de l’introduction du christianisme dans la ville, on disposait
néanmoins de quelques témoignages qui confirment l’existence d’une communauté chrétienne à Mizaeotherena : un
sarcophage en marbre décoré d’une croix monogrammatique (fig. 3) et deux épitaphes chrétiennes. L’une, de Pontia
Victoria, est datable du ive siècle ap. J.-C. (texte 2.2.a),
l’autre signale le lieu de l’enterrement du corps de Pascasia
et doit être datée de l’époque byzantine, en raison de la croix
latine placée au début du texte (texte 2.2.b). Les différents
explorateurs du site n’ont jamais mentionné des traces de
monuments chrétiens. Un lieu de culte a dû sans doute
exister, mais la cité a-t-elle été érigée en évêché ? Les sources
ecclésiastiques ne contiennent aucun renseignement sur un
éventuel évêché au nom de Mizaeotherena. Il est possible
que la communauté chrétienne locale ait été placée sous l’autorité de l’évêque d’une cité voisine, Thabbora par exemple.
Une plebs Tabborensis est représentée à la Conférence de
Carthage en 411 par deux évêques, le catholique Marinus et
le donatiste Victor90.
1.3.3. La ville tardive et post-antique
Le siècle vandale n’est documenté par aucun témoignage
épigraphique. Le site de Bou Jlida a par contre conservé
quelques témoins de la période byzantine. L’enceinte mentionnée plus haut montre que la ville a été fortifiée. Il est
difficile d’estimer la superficie délimitée par ce monument à
cause de la disparition de la plus grande partie de ses murs,
et donc l’impossibilité de restituer son tracé, même approximativement. Cette muraille a-t-elle englobé la nécropole
du Sud où a été repérée la seule épitaphe byzantine ? Nous
sommes pour le moment dans l’incapacité de répondre, vu
la rareté des vestiges archéologiques. Afin de pallier cette
insuffisance documentaire, on se tourne, encore une fois,
vers l’apport du matériel céramique.
L’époque tardive est représentée par un faciès céramique
caractérisé par des productions diverses, certainement
guidées par la sigillée africaine D2, et comprenant aussi
la céramique commune et les amphores. De ce groupe de
matériel, je citerai les tessons suivants :
89. Chérif sous presse, p. 519-523 (avec apparat critique détaillé).
La lettre M de municipium peut être interprétée comme étant
l’initiale du nom de la cité, on lira dans ce cas M[iza]eo/[there]na
de/[u]o[t(a) n(umini)] eius.
90. Lancel 1991, p. 1478-1479 ; Desanges et alii 2010, p. 229. Un
prêtre d’une ciuitas Mizeitana est mentionné par Victor De Vita (III,
52), il a été trouvé mort dans une grotte du mont Ziqua. S. Lancel
(2002, p. 329) suppose que cette cité devrait être recherchée non loin
du Jbel Zaghouan. J. Desanges et alii (2010, p. 181) ont rapproché
ce toponyme du nom Mizigi/Aïn Babbouch ou encore du nom de
Bou Jlida.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
monumentale85 ; elle s’insère dans la façade de l’édifice
qui s’étendait sur une dizaine de mètres de longueur. Cette
dimension pourrait éventuellement suggérer la façade d’un
temple, sans que cela n’exclue l’appartenance à tout autre
type de monument.
Nos connaissances sont aussi très lacunaires concernant la vie municipale et le rôle des notables locaux dans
l’évolution de l’équipement monumental de leur ville. Une
seule famille d’évergètes est connue, celle des Aebutii sous
le règne d’Hadrien. Une autre évergésie est l’œuvre d’un
pérégrin, le don d’un terrain privé par l’undecimprimus
Candidus Balsamonis fil(ius), pour la construction du temple
de Saturne de l’Achaïe.
On peut constater que les témoignages afférents à la
vie publique nous manquent encore pour mieux saisir les
influences de la romanité sur la parure monumentale. Ces
lacunes ont été cependant partiellement comblées par l’étude
entreprise par N. Ferchiou d’un nombre de fragments d’architecture remployés dans les maisons du village. L’auteur
a bien noté, à l’issue d’une analyse stylistique minutieuse de
ces éléments architecturaux de Bou Jlida, que « sa romanisation semble, du point de vue architectonique, s’être fait assez
tard : les éléments de style néopunique sont relativement
nombreux, mais ceux de style romain semblent presque tous
se situer au iiie siècle »86.
La documentation relative à la période du Bas-Empire
est encore plus limitée. On n’en compte que deux bornes
milliaires datables du ive siècle, posées par la collectivité sur
la grande artère Carthage-Théveste. Le premier milliaire fut
signalé à Testour par deux voyageurs du xviiie siècle, JeanAndré Peyssonnel et Francisco Ximénez. Le texte, qui date
du règne conjoint de Valentinien Ier et Valens (364-375), doit
se lire comme suit :
75
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
76
– deux bords de plats produits en sigillée africaine D2 de
types Hayes 99A et Hayes104B, datant respectivement entre
510-54091 et de 570 jusqu’à 600 et plus92 ;
– un fragment de mortier en céramique commune
« Bonifay type 13 », datable de la première moitié du ve
siècle apr. J.-C.93 ;
– un plat de type Fulford 5.1, dont la production se situe
du début du vie jusqu’au début du viie siècle et plus94.
Pour les amphores, on note la présence de productions
typiques de l’époque byzantine témoignées par un fragment
de bord d’amphore Bonifay type 49 = Keay LXI, datable de
la fin du vie siècle – première moitié du viie siècle apr. J.-C.95,
ainsi que deux bords de type Bonifay 52 « con orlo a fascia »,
produits dans la seconde moitié du viie siècle apr. J.-C.96.
Qu’en est-il du sort de la ville au-delà du viie siècle ? En
l’absence d’autres témoignages textuels ou archéologiques,
le seul indice permettant d’approcher cette question est
la présence de la céramique islamique médiévale. Il faut
réfléchir en fonction du degré de concentration de cette
céramique. L’abondance traduit assurément une véritable
continuité de l’occupation, comme on a pu le constater pour
Tapphugaba, l’actuel Henchir Sidi Abd en-Nour. À Bou
Jlida, le constat est tout à fait différent. On a affaire à un
tesson isolé de tradition hafside, datable de la période qui
s’échelonne du xiiie au xvie siècle (fig. 21). Faut-il remarquer
que si un noyau médiéval avait effectivement existé, il
aurait dû occuper plus ou moins le même espace délimité
à l’époque byzantine par l’enceinte. Or ce noyau, complètement dissimulé sous les maisons modernes, ne se prête
aujourd’hui à aucune délimitation. Ce seul tesson pourrait
témoigner d’une fréquentation éphémère du site après un
abandon de plusieurs siècles, mais cette conclusion ne saurait
être considérée comme assurée en l’état présent de l’enquête
archéologique97.
91.
92.
93.
94.
95.
96.
97. Voir, sur le problème de la céramique du viiie siècle et du passage
de l’Antiquité à l’époque médiévale, Daoulatli 1994, p. 83-87. Le
tesson, recueilli dans la zone B, est un fragment de bord de plat à marli
court évasé vers l’extérieur, glaçure en blanc stannifère avec décor en
bleu sur la paroi interne (deux bandes). Sur le marli une glaçure en noir
aubergine ; glaçure blanche sans décor sur la paroi externe.
Hayes 1972, fig. 28, no 1-12, p. 152.
Hayes 1972, p. 160, fig. 30-31.
Bonifay 2004, p. 255, fig. 139.
Fulford 1984, p. 191, fig. 71, no 5.1.
Bonifay 2004, p. 140, fig. 75.
Bonifay 2004, p. 141, fig. 76, no 2.
Fig. 21 : Tesson de céramique hafside.
Paroi interne (cliché A. Chérif).
DES INSCRIPTIONS INÉDITES
En plus des vingt-neuf textes publiés98 (dont dix-huit
épitaphes, voir tabl. 1) et six inscriptions signalées99 (dont
quatre épitaphes, voir tabl. 2), le dossier épigraphique de Bou
Jlida est augmenté de trente inscriptions inédites. Le nouveau
lot est composé d’épitaphes complètes ou fragmentaires, d’un
fragment de table de jeu et de deux autres fragments, dont un
appartiendrait peut-être à une constitution impériale. Comme
l’a noté J.-M. Lassère, toute exploitation des épitaphes dans
l’objectif de retracer l’histoire d’une population donnée
dépend tout d’abord du classement chronologique100. Notre
essai de datation des épitaphes ne s’appuiera malheureusement pas sur l’archéologie puisque nos stèles, anciennement
connues ou inédites, sont toutes hors contexte, même si
quelques-unes sont plus ou moins in situ101. Dans certains
contextes, certes très rares, la datation d’une épitaphe mise
au jour dans le cadre d’une fouille ou d’un sondage, bénéficia
des informations fournies par le matériel céramique et
anthropologique associé. C’est le cas de deux épitaphes de
Dougga récemment publiées102. Sans donc l’apport de l’archéologie, la chronologie des épitaphes païennes de Bou
Jlida se fonde essentiellement sur les critères suivants103 :
La nature du support. Pour l’ensemble des épitaphes
(publiées, signalées et inédites), trente-huit supports sont
identifiés avec certitude (les deux épitaphes chrétiennes ne
sont pas comptabilisées) : trente-six stèles, un cippe et un
autel104. Aucun mausolée n’est attesté à ce jour, ni par l’ar98. Dix-sept textes publiés dans le CIL VIII (12331-12340 et 2392223930) ; six dans l’AE (1979, 651-655 et 1986, 718) ; un dans les ILT
(650) ; deux par N. Ferchiou mais non retenus par l’AE (Ferchiou
1979, p. 25, no 4 et 2000, p. 69) ; deux par H. González Bordas (tabl. 1,
no 14-15) ; et un par nos soins (Chérif sous presse, p. 523-528). Un
fragment n’a pas été comptabilisé, celui qui porte les lettres eorum
domus, signalé par N. Ferchiou et qui est peut-être déjà publié dans le
CIL (cf. supra, n. 36-37).
99. Cf. supra, n. 49 à 53.
100. Lassère 1973, p. 7, n. 1.
101. Je renvoie ici aux stèles encore conservées dans les nécropoles
de l’Ouest et du Sud.
102. Étant membre de l’équipe tuniso-française qui travaille
à Dougga, sous la direction de Samir Aounallah et Véronique
Brouquier-Reddé, j’ai eu l’occasion de publier deux épitaphes trouvées
en place dans la nécropole du Nord-Ouest, à proximité de la tour B de
l’enceinte dite numide. Le contexte correspond à un sondage ouvert en
2000 dans le cadre des travaux menés par l’équipe tuniso-allemande.
Ce sont les stèles de Q(uintus) Iulius Zabullus, datable du milieu du
iie siècle d’après le matériel céramique, et de Secundula Fuluia à situer
entre la fin du iie et le début du iiie siècle, également d’après le matériel
céramique. Voir, sur ces deux tombes, Aounallah et alii 2020,
p. 223-236.
103. Lire les précautions d’ordre méthodologique avancées par
J.-M. Lassère (2005, p. 245-246) au sujet de cette chronologie. Sur les
critères de datation, on consultera en dernier lieu MAD, p. 71-74.
104. Neuf stèles identifiées parmi les épitaphes publiées (voir
tabl. 1) + deux stèles portant deux épitaphes signalées par N. Ferchiou
(voir tabl. 2) + vingt-cinq stèles inédites (total : 36 stèles). Le cippe
est déjà connu (tabl. 1, no 17) et il pose problème quant à sa vraie
nature. Le monument, d’après la reproduction du texte dans le CIL,
semble être complet en haut et en bas ; par conséquent, la hauteur de
chéologie ni par l’épigraphie105. Onze stèles au moins sont
munies d’un pédoncule aménagé dans la partie inférieure
pour en assurer la fixation dans une mortaise aménagée
dans une mensa ou dans la dalle de couverture des tombes.
Le pédoncule n’est pas spécifique aux stèles funéraires, des
ex-voto en étaient également pourvus106.
La série des épitaphes païennes comprend une seule stèle
à sommet arrondi (texte 2.1.x), treize à sommet triangulaire
flanqué ou non d’acrotères107, quatre à sommet horizontal108,
six à sommet horizontal avec fronton triangulaire taillé dans
l’épaisseur de la stèle et flanqué d’acrotères109, et dix-huit
dont la forme du sommet est indéterminée110. À Dougga,
les stèles à acrotères ont été classées par L. Poinssot parmi
les pierres tombales les plus anciennes111. À Bou Jlida, par
contre, le fronton triangulaire flanqué d’acrotères est attesté
par des stèles datables de la fin du iie ou du début du iiie siècle
ap. J.-C. (tabl. 1, no 16 et texte 2.1.b).
Ce qui caractérise les monuments funéraires de Bou Jlida
la quasi-absence du décor112 : deux stèles seulement sont
figurées et cinq autres comportaient des motifs décoratifs.
La stèle d’Aemilia Amotmicar, qu’on vient d’évoquer, porte
au-dessus de l’épitaphe « une figure en bas-relief représentant une femme s’appuyant sur un autel »113. L’autre stèle, qui
signale la tombe de Lucius Clodius Prim[---]s et de Valeria
Rogata (tabl. 1, no 17), présente, dans un registre surmontant
les épitaphes, les bustes du couple. Ces deux stèles n’ayant
72 cm convient mieux à une stèle. L’autel est signalé par N. Ferchiou
(cf. supra, n. 52).
105. Un bloc portant une inscription de lecture incertaine pourrait
appartenir, selon N. Ferchiou (1979a, p. 26 et n. 20), à un mausolée.
Aussi l’épitaphe no 11 du tableau 1 semble avoir été gravée sur une
dalle (linteau ?) qui pourrait avoir été apposée à un mausolée.
106. Le plus grand nombre des stèles votives à pédoncule provient
de Lambèse : 21 au moins (dont plusieurs sont brisées en bas) sur un
total de 156 monuments. Cf. Le Glay 1966a, nos 12, 13, 31, 33, 44, 50,
61, 65, 72, 74, 76, 78, 79, 81, 82, 84, 86, 91, 120, 132, 149. Plusieurs
mensae avec trou d’encastrement pour le pédoncule ont été trouvées
près des stèles, cf. par exemple Le Glay 1966a, p. 120, n. 20 et 22 et
p. 121, n. 23.
107. Tabl. 1, nos 3, 6, 16 ; 2.1.a ; 2.1.b ; 2.1.c ; 2.1.d ; 2.1.h ; 2.1.j ; 2.1.m ;
2.1.q ; 2.1.t ; 2.1.v.
108. Tabl. 1, no 15 ; 2.1.g ; 2.1.l ; 2.1.r.
109. 2.1.e ; 2.1.f ; 2.1.i ; 2.1.k ; 2.1.p ; 2.1.s.
110. Sont prises en compte les pierres tombales dont la nature du
support est inconnue : tabl. 1, nos 1, 2, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14,
18 ; 2.1.u ; 2.1.w ; 2.1.y. Il faut ajouter les stèles 2.1.n et 2.1.o enchâssées
dans des murs modernes, il est possible qu’elles aient été retaillées
avant leur encastrement.
111. Poinssot 1922, p. 44, n. 1 et 47, n. 1. Cette ancienneté, liée à la
présence d’acrotères, est aussi en rapport avec l’épaisseur de la stèle.
Lire également les remarques (mais aussi les réserves) formulées dans
MAD, p. 51-53 (et n. 41) et 66-67. Des formes variées d’acrotères
ornaient les frontons de forme pyramidale de certains mausolées
turriformes représentés sur les parois de tombes puniques du Cap Bon,
cf. Longerstay 1993, p. 30 et 31.
112. Le même fait a été constaté dans une autre cité, la ciuitas
A[utipsida ?]–Aïn M’dhoja, cf. Chérif 2015a, p. 54-55. Cette rareté a
été également notée pour les monuments de Dougga, cf. MAD, p. 51,
53 et 57.
113. Poinssot 1882-1883, p. 294.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
2. INVENTAIRE
77
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
pu être retrouvées, aucun complément à la description des
premières éditions n’est possible. Pour ce qui est du décor, on
signalera les éléments suivants :
– fronton orné d’une couronne à lemnisques (tabl. 1,
no 6). Ce type de décor figure sur des monuments aussi bien
païens que chrétiens114 ;
– fronton décoré d’une rosace (texte 2.1.a). Ce motif
est largement représenté dans le répertoire iconographique
phénicien et punique115 ; il est fréquent sur les stèles à
Carthage116 et ailleurs117. Il est également courant sur les
stèles funéraires et votives d’époque romaine118. Déterminer
la signification et la valeur de ce motif n’est pas une chose
aisée. La question a été ainsi résumée par M. Le Glay :
« Sur les monuments funéraires, la rosace apparaît souvent.
Est-elle alors symbole d’immortalité astrale ? Ou bien n’estelle qu’un motif décoratif ? On ne peut répondre d’une
manière générale. Il importe, croyons-nous, de procéder avec
beaucoup de prudence, de tenir compte de l’ensemble de l’illustration qui crée un contexte archéologique, et aussi de la
place des symboles »119 ;
– fronton orné d’une guirlande à galons au-dessus de
laquelle est figuré un motif constitué d’une base carrée
surmontée d’un triangle (texte 2.1.g). Représentation qui
pourrait suggérer un mausolée stylisé ;
– une palme gravée sur l’encadrement d’une niche (texte
2.1.x). C’est un motif largement répandu à des époques différentes et sur des monuments de type divers120 ;
– un décor architectural assez élaboré, fourni par les
stèles de C. Nunnius Felix et Aebutius Saturninus, contraste
avec la sobriété qui caractérise le reste de la série.
On conclut de l’examen rapide des supports et leur décor,
que ces critères, du moins en ce qui concerne les monuments
de Bou Jlida, ne peuvent constituer des éléments de datation
suffisamment solides.
Le formulaire. Il s’agit surtout de la présence ou l’absence
de l’invocation aux dieux Mânes. Aucune épitaphe ne
comporte cette formule en toutes lettres ou partiellement
abrégée, il s’agit constamment des initiales DMS. On peut
78
114. Une couronne à lemnisques apparaît sur le fronton d’une stèle de
Sucuba(i) datant de la première moitié du ier siècle ap. J.-C. (Chérif
2015b, p. 1384-1385 d’où AE 2015, 1804). Ce même type de couronne
est en usage sur des mosaïques funéraires chrétiennes qu’on s’accorde
à dater de la fin du ive et du début du ve siècle (voir Duval 1975,
no 202, p. 211-214 et fig. 188 ; Kadra 1981, p. 241-244).
115. Dussaud 1923, p. 310. Il s’agit d’une rosace à six pétales qui
décore le centre de la face d’une pendeloque en or recueillie dans
une nécropole royale de Byblos, contemporaine de la XIIe dynastie
égyptienne (début du iie millénaire av. J.-C.).
116. Picard 1978, p. 5-6 et 86-89. Selon l’auteur (p. 5), la rosace
apparaît sur les stèles du tophet de Carthage à la fin du ive siècle
av. J.-C. et sur un ex-voto de la fin du iiie siècle.
117. La rosace est présente sur certaines stèles de Téboursouk
étudiées par M.-H. Fantar (1975).
118. Comme par exemple sur de nombreux ex-voto à Saturne : voir
à titre illustratif, Le Glay 1961, pl. V, nos 4-5 (Thignica) ; pl. VII, no 2
(Tunisie centrale) ; pl. XII, no 5 (Haïdra).
119. Le Glay 1966b, p. 176, n. 1.
120. Ben Abid 2014, p. 115 (à propos des stèles votives d’Althiburos
dédiées à Baal Hammon).
supposer un hasard des découvertes, mais rien n’empêche
que l’apparition de la consécration aux Mânes sur les stèles
de Bou Jlida ait été dès le départ sous sa forme abrégée.
Cela est peut-être dû à une influence directe de Carthage.
L’invocation aux dieux Mânes apparaît dans cette métropole,
sous une forme généralement développée, entre les Flaviens
et le début de l’époque antonine. L’abréviation de cette
formule ne sera généralisée qu’à l’époque sévérienne121. Pour
notre série d’épitaphes païennes, à part la stèle d’Aemilia
Amotmicar sans consécration aux Mânes (tabl. 1, no 1) et
celle de Lollius Valerius (texte 2.1.l) qui devait se situer dans
la période transitoire entre épigraphie païenne et épigraphie
chrétienne, la datation de toutes les autres stèles s’échelonne
entre le iie et la première moitié du iiie siècle ap. J.-C.
J’ajouterai trois autres critères : la formule plus minus,
qui figure dans une seule stèle (texte 2.1.d), les expressions OTBQ et TTLS (ou l’une d’entre elles) et l’adjectif
pius. Selon R. Cagnat, la pratique de placer la formule
plus minus avant l’indication de l’âge, « ne se trouve que
très rarement sur les inscriptions païennes avant le milieu
du iiie siècle »122. Contrairement à cet avis, L. Poinssot,
s’appuyant sur certaines inscriptions funéraires de Dougga
trouvées dans la zone du mausolée libyco-punique, estime
qu’elle est « assez ancienne et assurément antérieure au
iiie siècle »123. Quant aux formules indiquant les souhaits
adressés au défunt, que l’on rencontre très fréquemment dans
nos épitaphes (19 fois), leur usage n’est pas spécifique à une
période bien déterminée, ce qui fait qu’elles n’apportent pas
non plus les précisions voulues à la question de datation124.
Pour ce qui est de l’emploi de pius, cette épithète est aussi
fréquente à Bou Jlida, où on la trouve dans près de la moitié
des épitaphes (23 sur 47, sans compter les textes lacunaires) ;
elle est aussi attestée par exemple à Henchir al-Moussaouer
(12 km au sud de Bou Jlida), dans l’épitaphe de l’affranchi
d’Auguste C. Iulius Felix125, et dans des textes datés des trois
premiers siècles de l’époque impériale126. Ce critère est donc
peu valable pour dater les inscriptions.
Onomastique et dénomination. Pour les citoyens
romains, il y a ceux qui portent les tria nomina (praenomen
– nomen – cognomen) et ceux dont la dénomination est
limitée à deux éléments : soit praenomen – nomen, soit
nomen – cognomen. On considère généralement que le
prénom commence à disparaître à partir du iie siècle ap.
121. Lassère 1973, p. 44 et 54.
122. Cagnat 1914, p. 283. Voir aussi Lassère 1973, p. 21-22 et 127 ;
2005, p. 236.
123. Poinssot 1915, p. 158; MAD, p. 71.
124. Lassère 1973, p. 128.
125. Ferchiou 1979b ; Beschaouch 1979, p. 397 (d’où AE 1979,
656) : C(aius) Iulius Aug(usti) l(ibertus) Felix / Accauonis f(ilius)
pius / uixit annis LXV. H(ic) s(itus) e(st). / C(aius) Iulius C(aii)
l(ibertus) Felix f(ilius) patri / posterisq(ue) eius d(e) s(ua) p(ecunia)
f(ecit). Voir aussi Ferchiou 1987. Le mausolée de cet affranchi
s’élève actuellement au centre de la ville de Bou Arada, après son
déplacement décidé vers 1974.
126. Lassère 1973, p. 126-127 ; MAD, p. 71.
2.1. LES
ÉPITAPHES PAÏENNES
2.1.a Épitaphe d’Aebutia Matidia (27 ans)
(fig. 22)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire
flanqué d’acrotères : celui de droite a disparu. Au milieu
du fronton, une rosace à cinq pétales stylisés inscrite dans
un cercle de 7 cm de diamètre. Une petite perforation est
127. Thylander 1952, p. 77-78 ; MAD, p. 71-74 ; Lassère 2005,
p. 99-100.
128. Ce même constat a été formulé pour Dougga, MAD, p. 72.
129. Sur ce procédé d’expression de la filiation pérégrine, voir
Gascou 1999, p. 296-300 ; Dondin-Payre 2005, p. 162-166.
pratiquée au centre de la rosace, destinée probablement à
recevoir un élément supplémentaire de décoration130.
– Dimensions : H. 70 cm ; l. 39 cm ; Ép. 5 cm.
– Lieu de découverte : nécropole du Sud.
– Lieu de conservation : dans une maison du quartier
méridional du village construite sur la nécropole.
– Texte : distribué sur huit lignes. Lettres en capitales
allongées peu profondes et soigneusement gravées. Ligne 5 :
ligature du F et du I dans FIL. Hl. 3,5-6 cm.
D•M•S•
AEBVTIA•
MATIDIA•
VICTORIS
ETBVCIAEFIL
P•V•ẠX̣
XṾ
̣
̣ II
MVỊỊỊỊ[---]
Ṭ•T•ḶṢ
– Apparat critique : Ligne 6 : après le A nous avons à coup
sûr deux X suivis d’un V nettement plus large que la moitié
supérieure d’un X. Ligne 7 : après le M de mensibus, on lit
un V ensuite on distingue les traces à peine visibles de quatre
hastes verticales et un peu serrées. Le reste de cette ligne est
complètement effrité. Ligne 8 : on peut déchiffrer sans risque
d’erreur les quatre premières lettres TTLS. On n’est pas sûr de
la gravure des formules HSE et OTBQ (fig. 23).
Les parents d’Aebutia Matidia sont-ils des pérégrins ? On
peut le croire vu qu’ils portaient chacun un seul nom. Mais il
me semble, à l’instar de l’exemple d’Aebutius Saturninus
qu’on verra dans un instant, qu’il s’agissait de citoyens
romains. Les Aebutii de Bou Jlida sont les descendants d’immigrants italiens, donc des ciues Romani. Victor, le père de
la défunte, pourrait être un Aebutius Victor, ce qui ne
manque pas de rappeler l’un des deux frères évergètes du
temps d’Hadrien131. Le nom Victor est certes d’une grande
banalité en Afrique, mais il est possible d’omettre ici le
gentilice puisqu’on est dans un milieu familial bien circonscrit. Rappelons en outre que le nomen est héréditaire, donc
transmis par le père à ses enfants (fils et filles). Quant à la
mère d’Aebutia Matidia, elle est sans doute aussi citoyenne
romaine. Le nom Bucius (ou Buccius) – Bucia est aussi
d’origine italique et il est attesté en Afrique à six reprises,
toujours en tant que gentilice132.
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Aebutia / Matidia / (Aebutii?)
Victoris / et Buciae fi(lia) / p(ia) u(ixit) a(nnis) XXVII /
m(ensibus) VIIII[---]. / Ṭ(erra) / t(ibi) ḷ(euis) ṣ(it).
130. Des perforations similaires, mais en nombre parfois très
important, ont été relevées sur certaines stèles votives dites de la
Ghorfa qui proviennent de Maghrawa, antique Macota dans la région
de Makthar. Selon M. Sebaï (2014, p. 194-197), ces perforations,
dont l’emplacement dans les différents registres obéit à des choix
bien étudiés, servaient à la fixation d’objets en métal ou en bois : des
étoiles, des guirlandes, des lettres, des palmes, etc.
131. Voir l’apparat critique de l’épitaphe suivante.
132. Cf. infra, la notice consacrée à ce nom.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
J.-C.127. La stèle d’Aebutius Saturninus (texte 2.1.b), datable
de la fin du iie ou du début du iiie siècle ap. J.-C., illustre bien
cette évolution. Le grand-père du défunt nous semble être le
Titus Aebutius connu par des textes de l’époque d’Hadrien (il
porte un prénom), alors que le défunt ainsi que son père ne
portaient pas de prénoms. Mais une autre épitaphe (tabl. 1,
no 16), qui présente un décor architectural analogue à celui de
la stèle d’Aebutius Saturninus et qui devait lui être à peu près
contemporaine, mentionne C(aius) Nunnius Felix, donc un
porteur des tria nomina. La présence ou l’absence du prénom
n’est donc pas, à elle seule, un critère fiable pour dater les
épitaphes du Haut-Empire128. Également, le port de gentilices
impériaux peut prêter à confusion et risque de nous entraîner
vers des conclusions erronées, surtout en l’absence du prénom
de l’empereur. Un Aelius Ouinianus (texte 2.1.c) n’est pas
forcément un naturalisé d’Hadrien ou d’Antonin le Pieux.
La population de Mizaeotherena est constituée tout
naturellement d’une portion pérégrine. Particulièrement
sur les épitaphes, ces pérégrins portaient un nom unique
suivi de la filiation dite africaine : nom du défunt + nom du
père au génitif + nom du grand-père au génitif – on ajoute
dans certains cas le nom de l’arrière-grand-père au génitif –
(+ filius)129. La chronologie de ces épitaphes ne doit pas normalement dépasser l’année 212, date de l’Édit de Caracalla. On
peut les dater, seulement par convention, du iie siècle ap. J.-C.
À l’ensemble de ces critères, s’ajouteront d’autres détails
qui peuvent réduire la fourchette chronologique : les rapprochements qu’il est possible de faire parfois entre le défunt
et des personnages connus par des inscriptions publiques
(le cas d’Aebutius Saturninus, et peut-être aussi d’Aebutia
Matidia). En somme, les critères internes et la forme du
support n’autorisent qu’une chronologie forcément relative.
Voici maintenant une présentation de la nouvelle documentation épigraphique. Les inscriptions sont réparties en
trois groupes ; pour les deux premiers (épitaphes païennes et
chrétiennes), le classement est fait dans l’ordre alphabétique
des noms (gentilices ou noms uniques).
79
« Consacré aux dieux Mânes. Aebutia Matidia, fille de
(Aebutius ?) Victor et de Bucia, a vécu pieusement 27 ans et
9 mois (au moins). Que la terre te soit légère ».
– Datation : iie siècle ap. J.-C., peut-être vers le milieu du
siècle si le père de la défunte est bel et bien Aebutius Victor.
dans un cercle de 11,5 cm de diamètre ; elle est flanquée de
deux autres rosaces identiques mais plus petites (6,5 cm de
diamètre). Au-dessous, une épitaphe gravée à l’intérieur d’un
cadre flanqué de deux colonnes à chapiteaux stylisés dont
l’abaque est orné d’un motif axial et à fûts torsadés reposant
chacun sur une base composée d’une plinthe surmontée de
deux tores.
– Dimensions : H. 89,5 cm ; l. 47 cm ; Ép. 15 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : transportée dans une maison au
centre du village.
– Texte : distribué sur huit lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure peu profonde et élégante. Signes de
séparation triangulaires et hederae. Ligatures à la l. 4 : les
derniers NI dans Saturnini et les derniers TI dans Titi. Hl.
3,5-6 cm.
D•M•S
AEBVTIVS•
SATVRNINVS
SATVRNINI•TITI•
FIL•EX•XI•PR•
PIVS•VIXIT•
AN•LXXX•
H•S•E•
Fig. 22 : Stèle d’Aebutia Matidia (cliché A. Chérif).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 23 : Stèle d’Aebutia Matidia : détail de la partie inférieure
(cliché A. Chérif).
80
2.1.b Épitaphe d’Aebutius Saturninus (80 ans)
(fig. 24)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire,
flanqué sans doute d’acrotères emportés par des cassures133.
Le fronton, délimité par un large bandeau lisse en bas, est
orné au centre d’une grosse rosace à quatre pétales inscrits
133. Ces acrotères ont peut-être la même forme que ceux de la stèle
de C. Nunnius Felix. Cf. Ferchiou 1979a, fig. 2, p. 32.
– Apparat critique : le nom du défunt, au nominatif,
est suivi de deux noms au génitif. Faut-il comprendre
« Aebutius Saturninus, fils de Saturninus, lui-même fils de
Titus, … », et conclure que le père et le grand-père sont des
pérégrins qui portaient des noms uniques. Une telle lecture
est contredite par l’origine italique des Aebutii qui fait d’eux,
en toute évidence, des citoyens romains134. Cela étant, une
autre lecture me semble s’imposer : Aebutius / Saturninus
/ (Aebutii) Saturnini Titi (Aebutii) / fil. …, soit « Aebutius
Saturninus, fils de (Aebutius) Saturninus, lui-même fils de
Titus (Aebutius), … ». Le gentilice est sous-entendu, donc
intentionnellement omis, car il s’agit de l’élément commun
qui est connu de tous ; on s’est donc contenté d’indiquer
seulement le cognomen pour le père et le prénom pour le
grand-père. La dénomination des deux derniers, gentilice +
surnom pour le premier et prénom + gentilice pour le second,
rappelle parfaitement les dédicants (et leur père) qui, sous le
principat d’Hadrien, ont consacré un autel à Silvain Mercure
et ont aménagé une porte d’entrée pour le temple de Tellus et
Cérès. Au vu de ces rapprochements, je propose le développement suivant :
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Aebutius / Saturninus /
(Aebutii) Saturnini Titi (Aebutii) / fil(ius) ex (undecim)pr(imis) / pius uixit / an(nis) LXXX. / H(ic) s(itus) e(st).
« Consacré aux dieux Mânes. Aebutius Saturninus, fils
de (Aebutius) Saturninus, lui-même fils de Titus (Aebutius),
membre des « Onze Premiers », a vécu pieusement 80 ans.
Il repose ici ».
– Datation : fin iie – début iiie siècle ap. J.-C. Notre
Aebutius Saturninus est décédé à l’âge de 80 ans, mais on
134. Cf. infra, la notice consacrée à ce nom.
ignore s’il est déjà né au moment des deux dédicaces faites
par son père et son oncle. Il est undecimprimatus, son décès
dut se produire peu avant le règne de Caracalla, que nous
tenons comme auteur très probable du municipe. L’épitaphe
serait alors de la période qui va de la fin de l’époque antonine
jusqu’au règne de Caracalla.
Fig. 25 : Stèle d’Aelia Extricata (cliché A. Chérif).
2.1.c Épitaphe d’Aelia Extricata, fille d’Aelius
Ouinianus (80 ans)
(fig. 25)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire.
Un pédoncule est aménagé dans la partie inférieure de la
stèle (H. 9 cm ; l. 12,5 cm).
– Dimensions : H. 66 cm ; l. 36,5 cm ; Ép. 10 cm.
– Lieu de provenance : nécropole du Sud.
– Lieu de conservation : dans une maison du quartier
méridional du village construite à l’emplacement de la
nécropole.
– Texte : distribué sur neuf lignes dont les deux dernières
sont très effacées à cause des éraflures affectant la partie
inférieure du champ épigraphique. Lettres en capitales
allongées de gravure peu profonde et assez soignée. Signes
de séparation en forme de trait. La forme du premier N de
annis (fin ligne 6) est insolite avec l’ajout d’un jambage légèrement en arc de cercle. Hl. 4-5,5 cm.
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Aelia Extr/icata Aeli(i) / Ouiniani
filia pia / uixit an/nịṣ ḶX̣ XX. Ḥ(ic) / ṣ(ita) [e(st)]. Ọ(ssa ṭ(ua)
[b(ene)] q(uiescant).
T(erra) / ṭ(ibi) ḷ(euis) ṣ(it).
̣
« Consacré aux dieux Mânes. Aelia Extricata, fille
d’Aelius Ouinianus, a vécu pieusement 80 ans. Elle repose
ici. Que tes restes reposent en paix, que la terre te soit
légère ».
– Datation : milieu du iie siècle – début du iiie siècle
ap. J.-C. Le père et sa fille portaient le gentilice Aelius
qui pourrait renvoyer à Hadrien ou, dans une moindre
proportion, à Antonin le Pieux. Peut-on envisager que
c’est Hadrien qui a concédé le droit de cité au père de la
défunte ? L’absence du praenomen pour Aelius Ouinianus
incite certes à la prudence, mais ne devrait pas exclure la
possibilité d’une omission ou encore d’un cas de disparition du prénom conformément au phénomène général dont
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 24 : Stèle d’Aebutius Saturninus (cliché A. Chérif).
D•M•S
AELIA•EXTR
ICATA•AELI•
OVINIANI•
FILIA•PIA•
VIXIT AN
NỊṢ ḶX̣ X XḤ
Ṣ[.]ỌṬ[.]Q ̣T
ṬḶṢ
81
on a parlé plus haut. G. Alföldy a noté que « c’est à partir
de Trajan et d’Hadrien que la quasi-totalité des nouveaux
citoyens prennent le prénom de l’empereur régnant »135.
C’est presque vers cette date que le prénom commence
peu à peu à disparaître de la dénomination citoyenne. De
plus, la longévité remarquable d’Aelia Extricata (80 ans)
laisse supposer qu’au moment de la gravure de l’épitaphe,
l’absence du prénom est déjà devenue un fait de plus en plus
fréquent. À vrai dire, sans rejeter l’hypothèse d’un naturalisé
d’Hadrien, Aelius Ouinianus aurait pu choisir librement son
nomen indépendamment de l’empereur qui lui avait donné le
droit de cité136.
cas grammatical utilisé, mais le génitif semble préférable
au datif par comparaison, entre autres, avec les inscriptions
funéraires de Dougga et de Carthage137.
2.1.d Épitaphe d’Aelia (I)anuaria (plus ou moins 35 ans)
(fig. 26)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire
flanqué d’acrotères dont celui de droite a disparu. La pierre
est incomplète à droite à cause de son encastrement dans un
mur, ce qui a fait disparaître une partie des lettres finales.
Éclat à l’angle inférieur droit.
– Dimensions : H. (conservée) 40 cm ; l. (conservée)
27,5 cm ; Ép. 10 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison du village
construite à l’emplacement de la nécropole.
– Texte : distribué sur six lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure peu profonde et peu soignée. Signes de
séparation triangulaires. Hl. 3-4 cm.
D•M•Ṣ
AELIAE•Ạ
NVARIAẸ
PIAE VIX AṆ
NISPMXXXV
TTLS•O•TBQ ̣
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
– Apparat critique : le cognomen de la défunte : Anuaria
pour Ianuaria.
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Aeliae (I)ạ/nuariaẹ / piae
uix(it) aṇ/nis p(lus) m(inus) XXXV. T(erra) / t(ibi) l(euis) s(it).
O(ssa) t(ua) b(ene) q(uiescant).
̣
82
« Consacré aux dieux Mânes d’Aelia Ianuaria, qui a vécu
pieusement environ 35 ans. Que la terre te soit légère, que tes
restes reposent en paix ».
– Datation : milieu du iie siècle – début du iiie siècle ap.
J.-C.
– Remarque : la séquence DMS + nominatif est majoritairement adoptée dans les épitaphes de Bou Jlida ; elle nous
fournit le seul exemple de l’emploi du génitif ou du datif.
La première déclinaison ne permet pas de se décider sur le
135. Alföldy 1966, p. 55, n. 2. Voir aussi Dondin-Payre 1981,
p. 96-97. À Dougga, sauf cas particuliers, les auteurs de MAD, p. 72
admettent que les noms des empereurs et des gouverneurs ne peuvent
être retenus pour dater les inscriptions.
136. Sur cette question, cf. aussi infra, p. 99.
Fig. 26: Stèle d’Aelia (I)anuaria (cliché A. Chérif).
2.1.e Épitaphe d’Atagia Saturni[na]
(fig. 27)
– Support : partie supérieure d’une stèle en pierre calcaire
à sommet horizontal ; un fronton triangulaire flanqué d’acrotères, presque complètement abattus, est taillé dans l’épaisseur du support. Un trou a affecté la fin des deux premières
lignes.
– Dimensions : H. 28 cm ; l. 33 cm ; Ép. 6 cm.
– Lieu de découverte : peut-être la nécropole du Nord-Est.
Déposée dans une maison au nord du village, à proximité
d’un tronçon de l’enceinte byzantine138.
– Lieu de conservation : in situ.
– Texte : trois lignes sont encore conservées. Lettres en
capitales allongées peu profondes et régulières. Hl. 56 cm.
ḌMṢ
ATAGIẠ
SATVRNỊ
[.. ---]
--Ḍ(iis) M(anibus) ṣ(acrum). / Atagiạ / Saturnị/[na ---] / ---.
137. MAD, p. 71 ; Pietri 1997, p. 1413.
138. Huit autres inscriptions sont aussi conservées dans la même
maison : les épitaphes de L(ucius) Bezius Felix (2.1.g), Q(uintus)
[Hel]uius (2.1.k), Thader (2.1.r), Verneia Rogata (2.1.s), L(ucius) V[---]
(2.1.w), Pontia Victoria (2.2.a) et les fragments 2.3.b et 2.3.c.
SENTIV
SSATVR
NINVS PA
CORIS V[..]
A•LXXXX[---]
Sentiu/s Satur/ninus Pa/coris (filius) u[ix(it)] / a(nnis)
LXXXX….
« Sentius Saturninus, fils de Pacor, a vécu [plus de] 90
ans ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
Fig. 27 : Stèle d’Atagia Saturnina (cliché A. Chérif).
« Consacré aux dieux Mânes. Atagia Saturnina … ».
– Datation : iie siècle– première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
2.1.f Épitaphes de Bebia Namgidenia (79 ans) et de
Sentius Saturninus (plus de 90 ans)
(fig. 28)
BEBIA
NAMGI
DENIA V
IX•A•LXX
VIIII•
H•S•E•T•T•L•S•
Bebia / Namgi/denia u/ix(it) a(nnis) LXX/VIIII. / H(ic)
s(ita) e(st). T(erra) t(ibi) l(euis) s(it).
« Bebia Namgidenia, a vécu 79 ans. Elle repose ici. Que
la terre te soit légère ».
* Canton de droite : épitaphe distribuée sur cinq lignes.
Hl. 3,8-4,5 cm.
Fig. 28 : Stèle de Bebia Namgidenia et de Sentius Saturninus
(cliché A. Chérif).
2.1.g Épitaphe de L. Bezius [Fel]ix
(fig. 29)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet horizontal
présentant plusieurs écorchures sur les côtés et des éraflures
sur la surface. En haut, au centre, est figuré un motif à
base carrée ornée de traits obliques croisés surmontée d’un
triangle orné de hachures en forme de V renversé (H. 9,5 cm ;
l. 6 cm). Il ressemble aux mausolées stylisés ornant les
monuments funéraires puniques et libyques139. Il surmonte
une guirlande à galons, faite de cornets emboîtés de part et
d’autre d’un motif central composé de cercles concentriques.
Elle est suspendue au-dessus de l’épitaphe.
– Dimensions : H. 55 cm ; l. 33,5 cm ; Ép. 15 cm.
139. Ces mausolées, peints ou gravés sur les parois des caveaux
funéraires et des haouanet ou sur des stèles funéraires, sont composés
d’un étage quadrangulaire reposant sur des gradins (souvent deux ou
trois) et d’un faîte pyramidal. Cf. Longerstay 1993, p. 17-51. Notre
motif est toutefois dépourvu de gradins.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
– Support : stèle double en pierre calcaire à sommet horizontal ; un fronton triangulaire flanqué d’acrotères est taillé
dans l’épaisseur du support. Éclat au niveau de l’arête droite
emportant quelques caractères. Un pédoncule est aménagé
dans la partie inférieure de la stèle (H. 7 cm ; l. 12,3 cm).
– Dimensions : H. 56,5 cm ; l. 43 cm ; Ép. 10 cm.
– Lieu de provenance : nécropole du Nord-Est.
– Lieu de conservation : près d’une maison, à la lisière
nord-est du village.
– Textes : deux épitaphes séparées d’un simple sillon,
surmontées de l’invocation aux dieux Mânes (Hl. 6 cm).
La ligne 6 qui s’étale au-dessous des deux textes, concerne
plutôt celui de gauche puisque la formule finale est donnée
au singulier (HSE). Il est possible que l’épitaphe de Bebia
Namgidenia soit gravée avant celle de Sentius Saturninus.
Lettres en capitales allongées de gravure profonde et assez
soignée. Signes de séparation en forme de trait.
DMS
D(iis) M(anibus) s(acrum).
* Canton de gauche : épitaphe distribuée sur six lignes.
Hl. 4-4,8 cm.
83
– Lieu de découverte : peut-être la nécropole du Nord-Est.
Déposée dans une maison au nord du village, à proximité
d’un tronçon de l’enceinte byzantine (supra, n. 138).
– Lieu de conservation : in situ.
– Texte : distribué sur quatre lignes au moins. Lettres en
capitales allongées peu profondes et peu soignées. Double
trait du jambage droit de la partie gauche du M (ligne 1). Hl.
4,5-6 cm.
D•M•S
L•BEZIVS
[---]IX VIXỊ
[.....]Ṣ
---
– Apparat critique : Ligne 2 : la première lettre du
gentilice est sans doute un B. Au début de la ligne 3, l’espace
écaillé ne peut pas loger plus que trois lettres, d’où la restitution évidente de [Fel]ix. Restitution au début de la ligne 4 du
T de uixit et de ANNI. Le S étant encore en partie conservé.
Le reste du texte est perdu en raison de la mutilation de toute
la partie inférieure de la stèle.
D(iis) M(anibus) s(acrum). / L(uicus) Bezius / [Fel]ix uixị/[t
anni]ṣ / ---.
« Consacré aux dieux Mânes. Luicus Bezius Felix, a vécu
(tant d’) années --- ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
matière périssable140. Éclats sur l’arête gauche et en bas. Un
pédoncule est aménagé dans la partie inférieure de la stèle
(H. 10 cm ; l. 21 cm).
– Dimensions : H. 76,5 cm ; l. 37 cm ; Ép. 11 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison du village
construite à l’emplacement de la nécropole141.
– Texte : distribué sur sept lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure très bien soignée. Signes de séparation
en forme de trait. Hl. 3,5-5,7 cm.
D•M•S
Q•CIPIVS•FE
LIX•PIVS•VI
XIT•ANNIS•
LXVII• H•S•E•
O•T•B•Q•T•T•
L S•
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Q(uintus) Cipius Fe/lix pius
ui/xit annis / LXVII. H(ic) s(itus) e(st). / O(ssa) t(ua) b(ene)
q(uiescant). T(erra) t(ibi) / l(euis) s(it).
« Consacré aux dieux Mânes. Quintus Cipius Felix, a
vécu pieusement 67 ans. Il repose ici. Que tes restes reposent
en paix, que la terre te soit légère ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle ap. J.-C.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 30 : Stèle de Q(uintus) Cipius Felix (cliché A. Chérif).
84
Fig. 29 : Stèle de L. Bezius Felix (cliché A. Chérif).
2.1.h Épitaphe de Q(uintus) Cipius Felix (67 ans)
(fig. 30)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire
flanqué d’acrotères dont chacun a reçu une petite perforation,
probablement pour la fixation d’un objet d’ornementation
ou pour faire suspendre entre les deux une guirlande en
2.1.i Épitaphe de Dextrania Rogata (85 ans)
(fig. 31)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet horizontal ;
un fronton triangulaire flanqué d’acrotères grossièrement
exprimés est taillé dans l’épaisseur du support. Un pédoncule
140. Cf. supra, n. 130.
141. Sont aussi conservés dans cette maison l’épitaphe de Mormeia
Rogata (2.1.m) et le fragment de table de jeu.
est aménagé dans la partie inférieure de la stèle (H. 8 cm ; l.
14 cm).
– Dimensions : H. 52 cm ; l. 30 cm ; Ép. 8,5 cm.
– Lieu de provenance : nécropole du Sud.
– Lieu de conservation : dans une maison du quartier
méridional du village construite à l’emplacement de la
nécropole.
– Texte : distribué sur cinq lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure peu profonde et soignée. Points de séparation. Ligne 2 : les traverses du E sont à peine exprimées.
Le A à la fin de cette ligne est de petit corps, haut de 2,5 cm.
Hl. 4,5– 5,5 cm.
D•M•S
DEXTRANIA
ROGATA
PIA•VIX•
A•LXXXV
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Dextrania / Rogata / pia uix(it)
/ a(nnis) LXXXV.
– Lieu de conservation : dans une maison du quartier
méridional du village. Déplacée.
– Texte : distribué sur quatre lignes au moins. Lettres en
capitales allongées de gravure très profonde et irrégulière.
Noter la forme du D gravé en sens inverse (lignes 1 et 2).
La partie inférieure de la surface épigraphique est écaillée,
ce qui a entraîné peut-être la disparition d’autres lignes.
Réglures à double trait. Points triangulaires. Hl. 4-4,5 cm.
D•M•S
FASEDIV
S•FELIX•
V•Ạ•VII
---
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Fasediu/s Felix / u(ixit) ạ(nnis)
VII / ---.
« Consacré aux dieux Mânes. Fasedius Felix, a vécu 7 ans
--- ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
« Consacré aux dieux Mânes. Dextrania Rogata, a vécu pieusement 85 ans ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
Fig. 32 : Stèle de Fasedius Felix (cliché A. Chérif).
Fig. 31 : Stèle de Dextrania Rogata (cliché A. Chérif).
2.1.j Épitaphe de Fasedius Felix (7 ans)
(fig. 32)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire
flanqué d’acrotères ; celui de droite est brisé. Un pédoncule
est aménagé dans la partie inférieure de la stèle (H. 8 cm ; l.
10 cm).
– Dimensions : H. 44 cm ; l. 25,5 cm ; Ép. 7 cm.
– Lieu de provenance : nécropole du Nord-Est.
– Support : partie supérieure d’une stèle en pierre calcaire
à sommet horizontal ; un fronton triangulaire flanqué d’acrotères fort endommagés est taillé dans l’épaisseur du support.
La surface est très altérée.
– Dimensions : H. 23 cm ; l. 34 cm ; Ép. 6 cm.
– Lieu de découverte : peut-être la nécropole du Nord-Est.
Déposée dans une maison au nord du village, à proximité
d’un tronçon de l’enceinte byzantine (supra, n. 138).
– Lieu de conservation : in situ.
– Texte : les deux premières lignes partiellement conservées. Lettres en capitales allongées et irrégulières. Hl.
4,5 cm.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
2.1.k Épitaphe de Q(uintus) [Hel]uius
(fig. 33)
85
[.]MS
Q+++VIVS
---
– Apparat critique : Ligne 2 : la première lettre est un Q
correspondant à l’initiale du praenomen, dont la queue est
encore visible. Après cette lettre, il y a place pour trois autres
avant VIVS. On voit encore les vestiges de deux hastes verticales qui pourraient être interprétées comme un H. Ensuite,
les traces d’une traverse supérieure à peine déchiffrable, d’un
E sans doute. La lettre suivante est une haste qu’il convient
de lire un L en raison des autres restitutions. Nous retenons
donc le nom Quintus [Hel]uius.
[D(iis)] M(anibus) s(acrum). / Q(uintus) [Hel]uius / ---.
« Consacré aux dieux Mânes. Quintus [Hel]uius --- ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle
ap. J.-C.
attestées dans les inscriptions tardives »142. L’emploi de bixit
devient plus fréquent dans les inscriptions chrétiennes143.
L’épitaphe de Lollius Valerius s’inscrit dans la période de
transition de l’épigraphie funéraire païenne à l’épigraphie
funéraire chrétienne.
Fig. 34 : Stèle de Lollius Valerius (cliché A. Chérif).
2.1.m Épitaphe de Morme[i]a Rogata
(fig. 35)
Fig. 33 : Stèle de Q(uintus) [Hel]uius (cliché A. Chérif).
2.1.l Épitaphe de Lollius Valerius (45 ans)
(fig. 34)
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet horizontal
grossièrement taillée.
– Dimensions : H. 51 cm ; l. 32,5 cm ; Ép. 9,5 cm ;
– Lieu de découverte : nécropole du Sud.
– Lieu de conservation : dans une maison du quartier
méridional du village, installée sur la nécropole.
– Texte : distribué sur quatre lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure profonde et irrégulière. Hl. 5-6,5 cm.
86
LOLLIVS
VALERIVS
BIXITAN
NISXLV
Lollius / Valerius / bixit an/nis XLV.
« Lollius Valerius, a vécu 45 ans ».
– Datation : ive siècle ap. J.-C. en raison de l’absence du
praenomen et surtout du bêtacisme (B à la place d’un V dans
le verbe uixit). S. Lancel a noté à propos de ce phénomène
que c’est « en Afrique que les occurrences de B pour V, soit
à l’initiale, soit à l’intervocalique, sont les plus massivement
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire,
brisée le long du côté droit et abîmée dans sa moitié inférieure. Un pédoncule est aménagé dans la partie inférieure
de la stèle (H. 6,5 cm ; l. 14 cm).
– Dimensions : H. 48 cm ; l. (conservée) 25 cm ; Ép.
11 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison du village
construite à l’emplacement de la nécropole.
– Texte : quatre premières lignes partiellement conservées. Lettres en capitales allongées de gravure assez profonde
et soignée. Traces de réglures. Hl. 4,8-6 cm.
DM[·]
MORMẸ[---]
A ROGATẠ [---]
X̣ [---]XX[---]
---
– Apparat critique : la longueur de la partie manquante,
calculée approximativement à partir de la liaison des deux
jambages du M, lettre centrée gravée dans l’axe de la pierre,
peut loger seulement deux lettres. Ligne 2 : après le M, les
traces d’une haste verticale possédant une traverse supé142. Lancel 1981, p. 280.
143. Je renverrai par exemple aux inscriptions chrétiennes de
Mactaris et d’Ammaedara : Prévot 1984, p. 207-208 et carte p. 209.
À Haïdra, 17 cas de cet emploi ont été recensés par N. Duval (1975, p.
467) ; elles sont pour la plupart datables de l’époque byzantine.
rieure, c’est probablement un E. On restituera ensuite le I
pour obtenir la désinence latine des gentilices. Le gentilice
est sans doute Mormeia, un nom en –eia comme Verneia
(texte 2.1.s). Ligne 3 : après le A final du nomen et le
cognomen Rogata, on restitue VI de uixit (le X étant au début
de la ligne suivante). Ligne 4 : après le X, une lacune où sont
gravés deux ou trois caractères, suivie de deux X à moitié
conservés appartenant au chiffre de l’âge.
D(iis) M(anibus) [s(acrum)]. / Mormẹ[i]/a Rogatạ [ui]/x̣(it)
[an(nis)] XX[---] / ---.
« Consacré aux dieux Mânes. Mormeia Rogata, a vécu [plus
de] 20 ans / --- ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
– Apparat critique : les trois dernières lignes sont très
altérées et effacées. À la ligne 5, le A conservé après filia et
après une petite lacune, implique à coup sûr la restitution de
l’adjectif pia. Ligne 6 : après le S de annis, un espace effacé
qui pourrait loger deux lettres. Ensuite un X, suivi d’un
espace écaillé mais qui ne semble pas avoir été gravé. Ligne
7 : un T au début, puis un espace complètement usé de 19 cm
de longueur, ensuite les vestiges d’une lettre indistincte. Au
vu de ces remarques, je restitue hypothétiquement pour les
lignes 6-7 : ANNIṢ[---]X / T[TLS OTBQ]. La présence de la
formule HSE est incertaine.
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Namgede / Aristonis / Dadonis
/ (filii) filia [pi]a uix(it) / anniṣ [---]X. / T(erra) [t(ibi) l(euis)
s(it). O(ssa) t(ua) b(ene) q(uiescant)].
« Consacré aux dieux Mânes. Namgede, fille d’Aristo,
lui-même fils de Dado, a vécu pieusement [plus de] 10 ans.
Que la terre te soit légère, que tes restes reposent en paix ».
– Datation : iie siècle ap. J.-C.
Fig. 35 : Stèle de Morme[i]a Rogata (cliché A. Chérif).
2.1.n Épitaphe de Namgede
(fig. 36)
DMS
NAMGEDE
ARISTONIS
DADONIS
FILIA [..]A VIX
ANNIṢ[---]X
T[---]+
Fig. 36 : Stèle de Namgede (cliché A. Chérif).
2.1.o Épitaphe de Popilius Saturninus (73 ans)
(fig. 37)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet horizontal
encastrée dans un mur (le sommet est peut-être abattu pour
les besoins du remploi). Éclats sur l’arête droite.
– Dimensions : H. 44,5 cm ; l. 36 cm ; Ép. 10,5 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison du village
construite à l’emplacement de la nécropole.
– Texte : distribué sur cinq lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure profonde et très bien soignée. Ligature
du I et du T dans uixit (ligne 4). Signes de séparation en
forme de trait. Réglures à double trait. Hl. 5 cm.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet horizontal
(mais peut-être abattu pour les besoins du remploi) remployée
dans un mur moderne.
– Dimensions : H. 51 cm ; l. 39 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison du village
construite à l’emplacement de la nécropole.
– Texte : distribué sur sept lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure peu profonde et bien soignée. Hl.
3,8-4,7 cm.
87
D•M•S
POPILIVS
SATVRNINV[.]
PIVS VIXIT ANIS
LXXIII•T•T•L•S•
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Popilius / Saturninu[s] / pius
uixit an(n)is / LXXIII. T(erra) t(ibi) l(euis) s(it).
« Consacré aux dieux Mânes. Popilius Saturninus, a vécu
pieusement 73 ans. Que la terre te soit légère ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
Fig. 37 : Stèle de Popilius Saturninus (cliché A. Chérif).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
2.1.p Épitaphe de Sallustius Primus (71 ans)
(fig. 38)
88
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet horizontal
remployée dans un dallage moderne ; un fronton triangulaire
flanqué d’acrotères est taillé dans l’épaisseur de la pierre ;
l’acrotère gauche est emporté par la cassure qui a affecté tout
le côté. Un pédoncule est aménagé dans la partie inférieure
de la stèle (H. 7,5 cm ; l. 16 cm).
– Dimensions : H. 53 cm ; l. 41 cm ; Ép. 7 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison du village
construite à l’emplacement de la nécropole.
– Texte : distribué sur six lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure assez profonde et régulière. Des
éraflures sur la surface ont causé l’effacement total ou partiel
de plusieurs caractères. Hl. 3,5-6,5 cm.
Ḍ•M•S
ṢALLVSTIVS
PRMṾS PIVS (sic)
VIXIT ẠNNIS
LXXI M VII
OT[---]
– Apparat critique : Ligne 3 : omission du I dans Primus.
Ligne 6 : après OT je restitue le reste de la formule à titre
hypothétique. On n’est pas sûr de la gravure de HSE.
Ḍ(iis) M(anibus) s(acrum). / Ṣallustius / Pr(i)mụs pius /
uixit ạnnis / LXXI, m(ensibus) VII. O(ssa) t(ua) [b(ene)
q(uiescant). T(erra) t(ibi) / l(euis) s(it)].
« Consacré aux dieux Mânes. Sallustius Primus, a vécu pieusement 71 ans et 7 mois. Que tes restes reposent en paix, que
la terre te soit légère ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle
ap. J.-C.
Fig. 38 : Stèle de Sallustius Primus (cliché A. Chérif).
2.1.q Épitaphe de Thader, fille de Baliato (63 ans)
(fig. 39)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire
flanqué d’acrotères. Éclats sur les arêtes et à l’angle inférieur
droit. Un pédoncule est aménagé dans la partie inférieure de
la stèle (H. 5 cm ; l. 11 cm).
– Dimensions : H. 50 cm ; l. 24,5 cm ; Ép. 13 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison au centre du
village. Déplacée.
– Texte : distribué sur sept lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure profonde et bien soignée. Ligne 4 :
disparition du second I de Baliatonis. Points de séparation.
Hl. 3,5-5 cm.
D•M•S
THADER•B
ALIATON
[.]S•CELERIS
VA•LXIII•H•
S•E•O•T•B•Q
T•T•L•Ṣ
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Thader B/aliaton/is Celeris
((filii filia) / u(ixit) a(nnis) LXIII. H(ic) / s(ita) e(st). O(ssa)
t(ua) b(ene) q(uiescant). / T(erra) t(ibi) / l(euis) ṣ(it).
« Consacré aux dieux Mânes. Thader, fille de Baliato,
lui-même fils de Celer, a vécu 63 ans. Elle repose ici. Que tes
restes reposent en paix, que la terre te soit légère ».
– Datation : iie siècle ap. J.-C.
– Apparat critique : ligne 5 : les trois lettres au début
indiquent sans doute la filiation, on lit FIL ou FILIA en
toutes lettres. Le X conservé à la fin se rapporte probablement au verbe uixit plutôt qu’au chiffre de l’âge, comme le
laisse supposer le point qui clôt cette ligne. Si l’on retient
FIL, l’économie de cette ligne permet de restituer l’adjectif
pia. Ligne 6 : les vestiges conservés à la fin sont ceux d’une
haste, peut-être d’un I faisant partie du chiffre de l’âge.
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Thader / Aemili / Giddoṇ(is) /
(filii) f ̣ịḷ[ia ui]x(it) / ---.
« Consacré aux dieux Mânes. Thader, fille d’Aemilius,
lui-même fils de Giddo, a vécu --- ».
– Datation : iie siècle ap. J.-C.
– Remarques : cette épitaphe rappelle une question déjà
posée pour les textes funéraires de Dougga : Thader est-elle
la fille d’Aemilius, un pérégrin, ou d’Aemilius Giddo, dans
ce cas citoyen romain ? À Dougga par exemple, l’épitaphe
d’un certain Fortunatus Bebi Victoris a été interprétée
comme l’expression de l’ascendance sur deux générations.
Selon les auteurs de MAD, « malgré la primauté de l’emploi
de Baebius/Bebius comme gentilice, nous nous rallierons
à l’hypothèse d’une « double filiation »144. Aemilius est un
gentilice bien attesté, mais on peut lui conférer ici la fonction
d’un nom unique pérégrin.
Fig. 39 : Stèle de Thader, fille de Baliato (cliché A. Chérif).
2.1.r Épitaphe de Thader, fille d’Aemilius
(fig. 40)
D•M•S
THADER
AEMILI
GIDDOṆ
F ̣ỊḶ+[---]X•
---+
---
40 : Stèle de Thader, fille d’Aemilius (cliché A. Chérif).
2.1.s Épitaphe de Verneia Rogata
(fig. 41)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet horizontal
brisée en bas ; un fronton triangulaire flanqué d’acrotères,
maintenant disparus, est taillé dans l’épaisseur du support.
Éraflures sur la surface.
– Dimensions : H. 46 cm ; l. 31 cm ; Ép. 8 cm.
144. MAD, p. 215. Il faut comprendre ici, comme l’a noté M. DondinPayre (2011b, p. 183, n. 35), « filiation africaine ».
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet horizontal. Éclats à l’angle supérieur gauche et au niveau de l’arête
droite. La surface est très usée, lettres effacées ou complètement disparues.
– Dimensions : H. 52 cm ; l. 35 cm ; Ép. 8 cm.
– Lieu de découverte : peut-être la nécropole du Nord-Est.
Déposée dans une maison au nord du village, à proximité
d’un tronçon de l’enceinte byzantine (supra, n. 138).
– Lieu de conservation : in situ.
– Texte : distribué sur six lignes au moins. Lettres en
capitales généralement carrées, régulières et bien gravées.
Points triangulaires. Hl. 4,5-5 cm.
89
– Lieu de découverte : peut-être la nécropole du Nord-Est.
Remployée dans un dallage dans la cour d’une maison
au nord du village, à proximité d’un tronçon de l’enceinte
byzantine (supra, n. 138).
– Lieu de conservation : in situ.
– Texte : distribué sur quatre lignes au moins. Lettres
en capitales allongées peu profondes et peu soignées. Les
traverses des E sont à peine exprimées (l. 2). Hl. 4-5,2 cm.
D•M•Ṣ•
VERNEIA•
RO[.]ATA•
VỊ[---]+
---
– Apparat critique : Ligne 4 : un V et un I en partie
emporté par l’éraillure ; on doit s’attendre par la suite au
X de uixit, mais les traces conservées apparaissent comme
ceux d’une boucle d’un P ou d’un R. Il faut toutefois reconnaître que la partie inférieure de la stèle est très usée et que
certaines formes sont le résultat des altérations subies par
la surface épigraphique. Ensuite, après un espace effacé, les
traces d’une haste, peut-être le T de uixit. Le reste est érodé.
D(iis) M(anibus) ṣ(acrum). / Verneia / Ro[g]ata / uị[xi]ṭ /
[annis] ---.
« Consacré aux dieux Mânes. Verneia Rogata, a vécu (tant
d’) années --- ».
– Texte : distribué sur six lignes. Lettres en capitales
allongées de gravure assez profonde et soignée. Points.
Traces de réglures. Hl. 2,5-5,5 cm.
D•M•[·]
VICTORỊ[.]
SATVRNI[..]
LITEI FIḶIA
VIXITANIṢ
XXI
– Apparat critique : la défunte est soit une pérégrine
dont le nom est suivi de ceux de son père Saturninus et de
son grand-père Liteus, soit une citoyenne romaine, Victoria
Saturnina, fille de Liteus. La première lecture est celle qu’on
doit retenir, car le nom Victoria est employé constamment
comme nom unique ou comme cognomen. On connaît
par contre le gentilice Victorius, assez rare à l’échelle de
l’Empire145 ; il est porté en Afrique par quatre personnes146.
Ligne 4 : après filia, il est possible que l’adjectif pia soit
gravé en toutes lettres ou abrégé en P.
D(iis) M(anibus) [s(acrum)]. / Victorị[a] Saturni[ni] Litei
(filii) fiḷia / uixit an(n)iṣ XXI.
« Consacré aux dieux Mânes. Victoria, fille de Saturninus,
lui-même fils de Liteus, a vécu 21 ans ».
– Datation : iie siècle ap. J.-C.
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle
ap. J.-C.
Fig. 42 : Stèle de Victoria (cliché A. Chérif).
Fig. 41 : Stèle de Verneia Rogata (cliché A. Chérif).
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
2.1.t Épitaphe de Victoria, fille de Saturninus (21 ans)
(fig. 42)
90
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire
flanqué d’acrotères. Toute la partie surmontée de l’acrotère
droit a disparu. Un pédoncule est aménagé dans la partie
inférieure de la stèle (H. 8 cm ; l. 12 cm).
– Dimensions : H. 46,5 cm ; l. (conservée) 24 cm ; Ép.
7 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison du village
construite à l’emplacement de la nécropole.
2.1.u Épitaphes de Volussenius Felix (77 ans) et d’un(e)
inconnu(e)
(fig. 43)
– Support : stèle en pierre calcaire composée de deux
cantons sans séparation, dont celui de droite a presque
complètement disparu ; éclats en haut et à l’angle supérieur
gauche. La forme du sommet reste indéterminée.
– Dimensions : H. 58 cm ; l. 36 cm ; Ép. 8 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
145. Schulze 1966, p. 260 et 333 ; Solin, Salomies 1994, p. 208.
146. ILT 1109, 85 (Carthage) ; CIL VIII, 27264 = MAD, no 1291
(Dougga) ; MAD, no 1290 (Dougga) ; Benzina Ben Abdallah 2013,
p. 138-139, no 132 = AE 2013, 1928 (Haïdra).
– Lieu de conservation : dans une maison du village
construite à l’emplacement de la nécropole.
– Texte : (canton de gauche) distribué sur sept lignes. La
première et la dernière s’étalent sur les deux épitaphes. Les
chiffres indiquant l’âge de chaque défunt sont intercalés entre
les initiales de la formule finale, à restituer sans doute au
pluriel (HSS). Lettres en capitales allongées de gravure peu
profonde et bien soignée. Signes de séparation : hedera et
points de forme triangulaire. Hl. 2,5-4,5 cm.
De l’épitaphe de droite ne subsistent que les vestiges de
quelques lettres au commencement des lignes : on déchiffre
à la ligne 2, après l’hedera qui suit Volussenius, un A ou un
M dont seule une partie du jambage gauche est conservée ; à
la ligne 3 un V ; à la ligne 4 un R ou plus probablement un P,
et à la ligne 5 le jambage gauche d’un A (peut-être de annis)
ou d’un M.
Nous reproduisons l’épitaphe de gauche avec la formule
finale HSS.
D uac. Ṃ uac. [.]
ṾOLVSSENIVS •
FELIX•EXTRICA
TI•FIL•NIGELIO
NIS•PIVS
VIXIT•ANNIS
H LXXVII S [-–– .]
D(iis) Ṃ(anibus) [s(acrum)]. Ṿolussenius / Felix Extrica/ti
fil(ius) Nigelio/nis (filii) pius / uixit annis / LXXVII.
(Épitaphe de droite) H(ic) s(iti) [s(unt)].
2.1.v Épitaphe de Volussenia Saturnina (86 ans)
(fig. 44)
– Support : stèle en pierre calcaire à sommet triangulaire
flanqué d’acrotères (celui de gauche a disparu). Un pédoncule
presque complètement abattu a été aménagé dans la partie
inférieure de la stèle.
– Dimensions : H. 55 cm ; l. 42 cm ; Ép. 6 cm.
– Lieu de provenance : peut-être la nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : déposée devant une maison
au centre du village, située à 160 mètres à l’est de cette
nécropole.
– Texte : distribué sur cinq lignes ; lettres en capitales
allongées de gravure peu profonde et soignée. Hl. 3,5-5,5 cm.
DMS
VOLVSSENIA
SATVRNINA
VIXIT ANNIS
LXXXVI
D(iis) M(anibus) s(acrum). / Volussenia / Saturnina / uixit
annis / LXXXVI.
« Consacré aux dieux Mânes. Volussenia Saturnina, a vécu
86 ans ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
« Consacré aux dieux Mânes. Volussenius Felix, fils d’Extricatus, lui-même fils de Nigelio, a vécu pieusement 77 ans ».
(Épitaphe de droite) « Ils reposent ici ».
– Datation : iie siècle– début du iiie siècle ap. J.-C, probablement avant 212 car le défunt semble être le premier à
avoir obtenu la qualité de citoyen romain dans sa famille,
puisqu’il a tenu à indiquer les noms uniques de son père et
de son grand-père147.
Fig. 44 : Stèle de Volussenia Saturnina (cliché A. Chérif).
Fig. 43 : Stèle de Volussenius Felix et d’un(e) inconnu(e)
(cliché A. Chérif).
147. Sur cette interprétation, cf. Lassère 2005, p. 174.
– Support : stèle en pierre calcaire brisée en haut et en
bas. La surface est très érodée.
– Dimensions : H. 42 cm ; l. 28 cm ; Ép. 10 cm.
– Lieu de découverte : peut-être la nécropole du Nord-Est.
Déposée dans une maison au nord du village, à proximité
d’un tronçon de l’enceinte byzantine (supra, n. 138).
– Lieu de conservation : in situ.
– Texte : trois lignes très partiellement conservées. Lettres
en capitales allongées et régulières. Points triangulaires. Hl.
4,5-5 cm.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
2.1.w Épitaphe de L(ucius) V[---]
(fig. 45)
91
D•M•Ṣ
L•V[---]
I[---]
---
– Apparat critique : Ligne 2 : après le V, les vestiges très
effacés d’une lettre ou plutôt des traces accidentelles subies
par la surface épigraphique.
D(iis) M(anibus) ṣ(acrum). / L(ucius) V[---] / I[---] / ---.
« Consacré aux dieux Mânes. Lucius V[---] … ».
– Datation : iie siècle – début du iiie siècle ap. J.-C.
Fig. 46 : Stèle fragmentaire (cliché A. Chérif).
2.1.y Épitaphe fragmentaire
(fig. 47)
Fig. 45 : Stèle de L(ucius) V[---] (cliché A. Chérif).
2.1.x Épitaphe fragmentaire
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
(fig. 46)
92
– Support : partie supérieure d’une stèle en pierre calcaire
à sommet arrondi. Une niche profonde de 4 cm est aménagée
au-dessus du champ épigraphique, encadrée à gauche par une
palme.
– Dimensions : H. 34 cm ; l. 36 cm ; Ép. 15 cm.
– Lieu de provenance : peut-être la nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : dans une maison au centre du
village, située à 170 mètres à l’est de cette nécropole.
– Texte : sont conservées une seule lettre à la première
ligne (allongée et régulière haute de 6,5 cm) et la boucle
d’une lettre au début de la ligne 2 : un O, Q ou S. L’invocation
aux dieux Mânes est sans doute limitée à la formule DM, car
aucune trace de lettre n’apparaît au milieu de cette ligne.
– Support : partie inférieure d’une stèle en pierre calcaire,
brisée en haut et à gauche. Un pédoncule est aménagé dans la
partie inférieure (H. 10,5 cm ; l. conservée 14 cm).
– Dimensions : H. (conservée) 40,5 cm ; l. (conservée)
29 cm ; Ép. 13 cm.
– Lieu de provenance : nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : in situ, dans le cimetière
musulman.
– Texte : les deux dernières lignes sont partiellement
conservées ; la première est réduite à des bribes de lettres
indistinctes. Lettres en capitales allongées régulières de
gravure peu profonde et soignée. Hl. 4,7 cm (dernière ligne).
--[---]+++++
[---]•T•T•L•S•
--- / [---]+++++ / [---]. T(erra) / t(ibi) l(euis) s(it).
« ---. Que la terre te soit légère ».
– Datation : iie siècle– première moitié du iiie siècle ap.
J.-C.
D uac. [.]
+[---]
--D(iis) [M(anibus)]. / --« Aux dieux Mânes. --- ».
– Datation : iie siècle – première moitié du iiie siècle
ap. J.-C.
Fig. 47 : Stèle fragmentaire (cliché A. Chérif).
2.2. LES
ÉPITAPHES CHRÉTIENNES
2.2.a Épitaphe de Pontia Victoria
(fig. 48)
– Support : petite stèle en pierre calcaire à sommet horizontal, grossièrement taillée sur le côté droit et en bas.
– Dimensions : H. 24 cm ; l. 27 cm ; Ép. 6 cm.
– Lieu de découverte : peut-être la nécropole du Nord-Est.
Déposée dans une maison au nord du village, à proximité
d’un tronçon de l’enceinte byzantine (supra, n. 138).
– Lieu de conservation : in situ.
– Texte : distribué sur trois lignes. Lettres en capitales
allongées profondément gravées et assez soignées. Hl.
4,5-6 cm.
PONTIA
VICTORIA
IN PACE
Pontia / Victoria / in pace.
« Pontia Victoria en paix ! ».
– Datation : ive siècle ap. J.-C. La défunte porte les duo
nomina au nominatif, conformément au formulaire traditionnel du Haut-Empire, ce qui constitue déjà un indice d’ancienneté. L’affichage de la foi chrétienne à travers l’emploi
de l’acclamation in pace, nous situe à une date postérieure
au triomphe du christianisme marqué par deux grands événements : l’édit de Milan de 313 qui établissait la liberté
religieuse et la paix de l’église, et le concile de Nicée de 325
qui assurait l’unité religieuse de l’empire148.
– Dimensions : H. 59 cm ; l. 41 cm ; Ép. 8,5 cm.
– Lieu de découverte : nécropole du Sud.
– Lieu de conservation : dans une rue du quartier méridional du village, aménagée aux dépens de la nécropole.
– Texte : court sur une seule ligne gravée sur la tranche de
la dalle (fig. 50). Lettres irrégulières. Hl. 2,5-6 cm. Au début
de la ligne, croix latine simple (H. 4,5 cm ; l. 3 cm).
(Croix latine) IHC CORPVS PASCASIE
– Apparat critique : s’agit-il pour les trois premières
lettres d’une abréviation : I(acet) H(i)C par exemple ? Mais
une telle abréviation ne se rencontre pas, d’après les recensions de l’EDCS149. Une autre solution est possible : les lettres
IH ont été interverties et il faudrait peut-être les corriger en
HI et lire HIC.
(Croix latine) hic corpus Pascasi(a)e.
(Croix latine) « Ici le corps de Pascasia ».
– Datation : vie-viie siècle ap. J.-C. L’écriture et la
forme de la croix conviennent à une inscription d’époque
byzantine150.
Fig. 49 : Dalle funéraire de Pascasia (cliché A. Chérif).
Fig. 50 : Détail de l’épitaphe de Pascasia (cliché A. Chérif).
2.2.b Épitaphe de Pascasia
(fig. 49)
– Support : dalle en pierre calcaire réutilisée depuis
quelque temps comme couvercle d’un égout.
148. On consultera sur la formule in pace, Pietri 1997, p. 1442-1444 ;
Lassère 2005, p. 290.
149. Est très fréquente dans des épitaphes païennes la formule hic
iacet sepultus. L’abréviation h(i)c est, à ma connaissance, inconnue.
150. Sur la chronologie et les différentes formes des croix latines, voir
Duval 1975, p. 341-342.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Fig. 48 : Stèle de Pontia Victoria (cliché A. Chérif).
93
2.3. AUTRES
INSCRIPTIONS
2.3.a Fragment de table de jeu151
(fig. 51)
– Support : dalle moulurée en pierre calcaire brisée de
deux côtés. Une entaille au bord de la pierre, ce qui dénote
peut-être un remploi.
– Dimensions : Long. (conservée) 49,5 cm ; l. (conservée)
34 cm ; H. 10 cm.
– Lieu de découverte : dans une maison construite à l’emplacement de la nécropole de l’Ouest.
– Lieu de conservation : in situ.
– Textes : deux lignes espacées de 5 cm, composée
chacune de six lettres (capitales allongées et régulières hautes
de 2,5 à 3,3 cm) gravées dans des rectangles (fig. 52-53).
[trois] moments du temps. C’est pour cette raison également,
disent-ils, que la table de jeu est divisée en trois bandes »154.
De nombreux plateaux, taillés dans différents types de
supports (marbre, calcaire, bois), ont été mis au jour dans
plusieurs agglomérations du monde romain. En Afrique, je
cite à titre d’exemples ceux découverts à Dougga155, à Ksar
Toual Zouamel, antique Vicus Maracitanus156, et à Thuburbo
Maius157. Les inscriptions gravées sur ces plateaux se rapportent généralement à des scènes de la vie quotidienne, mais
elles évoquent dans bien des cas des événements historiques.
Je donnerai comme illustration à cette deuxième catégorie
les mots gravés sur un plateau provenant de Rome158 :
[. . . . . .] / [. . . . . .]
N O L I T E / [. . . . . .]
P O N I T E / [. . . . . .]
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
– Remarque : ce fragment de table de jeu appartient au
type des duodecim scripta (XII Scripta) : « jeu des douze
points », jeu pratiqué sur un plateau composé de trois lignes
parallèles, chacune formée de deux fois six cases inscrites.
Pour notre table, le premier mot du groupe de gauche et
tout le groupe de droite ont disparu. Ces jeux font partie des
loisirs quotidiens à propos desquels on disposait de quelques
informations éparses dans des sources gréco-latines152.
Isidore de Séville, entre autres, nous a transmis certains
détails sur le jeu de type Alea qui est une autre version des
XII Scripta153 : « Le sens figuré du jeu d’Alea. Certains
joueurs d’Alea croient qu’ils pratiquent cette activité de façon
savante, en recourant à des allégories, et imaginent qu’ils le
font en se fondant sur une forme de similitude avec les phénomènes de la nature. Ils affirment en effet jouer avec trois
dés à cause des trois moments du temps, le présent, le passé
et l’avenir, parce que ces moments ne restent pas immobiles
mais roulent rapidement. Ils avancent aussi comme argument
le fait que les pistes sont réparties en six cases à cause des
[six] âges de la vie humaine, et en trois lignes à cause des
94
151. Je remercie mes collègues Mme Véronique Dasen et M. Ulrich
Schädler pour toutes les informations qu’ils m’ont amicalement
transmises au sujet des jeux dans l’Antiquité, qu’ils trouvent
ici l’expression de ma profonde gratitude.
152. Voir par exemple, sur ces sources, May 1995, p. 51-61. Il faut
supposer que notre table de jeu a été déplacée vers la nécropole pour
un éventuel remploi. La bibliographie relative à la question des jeux et
jouets est de plus en plus importante. Des projets ont été mis en place ;
je citerai le projet financé par l’European Research Council Locus
Ludi. The Cultural Fabric of Play and Games in Classical Antiquity,
implanté à l’université de Fribourg (Suisse) et dirigé par Véronique
Dasen. Je renverrai aussi aux travaux suivants : Dasen 2018, p. 23-50 ;
Daniaux 2019, p. 88-89 ; Ludique 2019 ; Schädler 2019b, p. 127-129.
153. L’alea est une « version plus tardive du XII Scripta. Il s’agit d’un
jeu du type backgammon. Joué à deux sur un plateau composé de trois
rangées de deux fois six cases. Parmi les principales nouveautés par
rapport au XII Scripta : trois dés à la place de deux » (Vespa 2019,
p. 124). On consultera aussi sur les définitions des XII Scripta et de
l’alea, Schädler 1995, p. 83-89.
Fig. 51 : Fragment de table de jeu (cliché A. Chérif).
Fig. 52 : Détail de la ligne 1 conservée (clichés A. Chérif).
Fig. 53 : Détail de la ligne 2 conservée (clichés A. Chérif).
154. Orig., XVIII, 64 (traduction de Ph. Moreau, citée par Schädler
2019a, p. 22) : « De figuris Aleae. Quidam autem aleatores sibi
videntur physiologice per allegoriam hanc artem exercere, et sub
quadam rerum similitudine fingere. Nam tribus tesseris ludere
perhibent propter tria saeculi tempora : praesentia, praeterita,
futura ; quia non stant, sed decurrunt. Sed et ipsas vias senariis locis
distinctas propter aetates hominum ternariis lineis propter tempora
argumentantur. Inde et tabulam ternis discriptam dicunt lineis ».
155. CIL VIII, 26659 = ILAfr 543 ; Poinssot 1914, p. 278-279,
no 1267 ; Ferrua 2001, p. 100, no 73.
156. Saumagne 1941, p. 244, d’où AE 1942-1943, 107 = ILT 576 ;
Ferrua 2001, p. 71, no 97.
157. Le plateau est aménagé à l’angle sud du portique des Petronii,
dans un entre-colonnement : Poinssot 1917, p. 124, d’où AE 19171918, 24 = ILAfr 290 ; Ferrua 2001, p. 151, no 120.
158. AE 1904, 197 = ILS 8626a ; Ferrua 2001, p. 23, no 2.
PARTHI * OCCISI
BR[I]TTO * VICTVS
LVDIT[E] * [R]OMANI
Ces devises font allusion à des victoires remportées
contre les Bretons et les Parthes.
2.3.b Fragment d’une constitution impériale ?159
(fig. 54)
– Support : fragment de dalle en pierre calcaire brisé de
tous côtés.
– Dimensions : H. (conservée) 16,5 cm ; l. (conservée)
27 cm ; Ép. 9 cm.
– Lieu de découverte : dans une maison au nord du
village, à proximité d’un tronçon de l’enceinte byzantine
(supra, n. 138).
– Lieu de conservation : in situ.
– Textes : trois lignes inégalement conservées ; la
troisième correspond aux amorces de quatre lettres dont un A
et un T. Lettres en capitales allongées profondes et soignées.
Hl. 6,5-7 cm.
des autres pièces du dossier, à l’Orient, placé sous l’autorité de
Galère162.
Pour attribuer le présent fragment à cette constitution du
début de la seconde tétrarchie, il faudrait peut-être restituer à
la ligne 1 conservée [et]iam {P} pr[aedationum] et à la ligne
2 [sti]rp(itus) amputat[i]163. Cette attribution, si elle est valable,
entraîne une conséquence de grande portée : l’affichage de cette
constitution n’est pas exclusif au domaine de Galère (l’Orient)
comme le pense S. Corcoran164, et la copie de « Padoue »
pourrait bel et bien être réattribuée à son contexte « occidental ».
Évidemment, le rattachement de notre fragment à une nouvelle
copie de la constitution de 305-306 est une simple conjecture
appelée à être vérifiée et confirmée par la découverte d’autres
fragments qui permettront d’établir ce lien de manière assurée.
La prudence est d’autant plus nécessaire que le verbe amputare,
--[---]+ẠṂPPR[---]
[---]RPAMPVṬẠṬ[---]
[---]+ẠṬ+[---]
---
159. Le développement consacré à ce fragment a bénéficié des
remarques tout à fait éclairantes de M. Denis Feissel qui a eu en outre
l’amabilité de me transmettre certains travaux indispensables pour notre
commentaire. Qu’il trouve ici l’expression de ma profonde gratitude.
160. Delmaire 1989, p. 215. Voir aussi Feissel 1996, p. 286 [= 2010,
p. 178] ; Corcoran 2007 ; 2012, p. 267-270.
161. Feissel 1995, p. 51-53 (les quatre fragments d’Éphèse, d’où AE
1995, 1498 a-d [= 2010, p. 150-153] ; Feissel 1996, p. 273-287, d’où
AE 1996, 1403 (copie d’Athènes) et 1498 (copie de Tlos) [= 2010,
p. 155-179].
Fig. 54 : Le fragment 2.3.b (cliché A. Chérif).
comme me le fait remarquer M. Denis Feissel, est employé dans
d’autres constitutions impériales du Bas-Empire. De plus, les
lettres RP au début de la partie conservée de la ligne 2, peuvent
être lues r(es) p(ublica). Par conséquent, le fragment de Bou
Jlida pourrait éventuellement appartenir à un autre document
juridique encore inconnu de nous.
2.3.c Fragment indéterminé
(fig. 55)
– Support : fragment de dalle en pierre calcaire brisé de
tous côtés sauf à droite. La partie inférieure est très écaillée.
– Dimensions : H. (conservée) 23 cm ; l. (conservée)
20,5 cm ; Ép. 7 cm.
– Lieu de découverte : dans une maison au nord du
village, à proximité d’un tronçon de l’enceinte byzantine
(supra, n. 138).
– Lieu de conservation : in situ.
– Textes : trois lignes inégalement conservées. Lettres en
capitales allongées peu profondes et bien soignées. Points
triangulaires. Hl. 8 cm.
--[---]+
[---] R• P•
[---]ṾỊỊ
162. Sur l’origine incertaine de cette pierre « dite de Padoue », cf.
Feissel 1995, p. 49 [= 2010, p. 146, n. 88].
163. Feissel 1996, p. 284 [= 2010, p. 174].
164. Corcoran 2007 ; 2012, p. 275-277.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
– Remarque : ce fragment pourrait appartenir à une constitution impériale. Le vocabulaire employé, principalement ici le
mot lacunaire AMPVTAT, et les quelques lettres conservées,
permettent de conjecturer un premier rapprochement : notre
document correspondrait à un nouvel exemplaire d’un édit
tétrarchique, celui décrété par Constance Chlore et Galère, entre
le 1er mai 305 et le 25 juillet 306, contre les abus des Caesariani.
Ces derniers sont des employés du procurator rei priuatae,
« leur réputation est particulièrement détestable : rapines, extorsions, vols, détournements, accusations mensongères pour
provoquer les confiscations, précipitation mise à occuper et
inventorier avant la sentence »160. Cet édit, qui a fait l’objet d’une
nouvelle édition de la part de Denis Feissel161, est connu par
quatre exemplaires, trois découverts en Orient : à Éphèse, à Tlos
(en Lycie) et à Athènes (version grecque de l’original latin), et un
quatrième à Padoue, en Italie (donc en Occident, qui correspond
au domaine de Constance Chlore). L’origine « occidentale » de
ce dernier témoin épigraphique est contestée; il est considéré
comme une pierre errante qu’il faudrait attribuer, à l’instar
95
– Apparat critique : Ligne 1 conservée : on voit encore
les traces d’une barre horizontale, très probablement d’un E.
Ligne 3 : les traces assez effacées d’un V, ensuite les sommets
de deux hastes verticales. On a donc affaire à un chiffre. On
peut restituer à la ligne 2 la formule r(ei) p(ublicae) suivie,
après une lacune de longueur indéterminée, de l’indication de la somme honoraire versée165. Une autre restitution
est peut-être aussi possible. Dans certaines épitaphes sont
indiquées les différentes étapes de la carrière municipale du
défunt, y compris la charge de [curator] r(ei) p(ublicae). Le
chiffre correspondrait alors à une partie de l’âge vécu. Les
parallèles ne manquent pas166, mais la hauteur des lettres
et l’espacement laissé entre elles font plutôt penser à une
inscription publique.
Fig. 55 : Le fragment 2.3.c (cliché A. Chérif).
3. ONOMASTIQUE
3.1. L’ONOMASTIQUE
ET ROMANISATION
DES
MIZAEOTHERENENSES
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Après la présentation des textes inédits, il convient de
rappeler, avant de passer à l’étude du matériel onomastique,
les épitaphes publiées et celles signalées par N. Ferchiou
mais restées encore inédites (classement chronologique)167.
Le corpus épigraphique de Bou Jlida compte maintenant 65 inscriptions (entre signalées, publiées et inédites)
96
faisant connaître 89 individus : 85 ont les noms complets
ou un peu lacunaires et 4 restent des inconnus à cause de la
fragmentation des stèles (les stèles 2.1.u [épitaphe de droite] ;
2.1.x ; 2.1.y et tabl. 1, no 14). Le matériel onomastique dégagé
de cette documentation paraît largement réduit si on le
compare avec le nombre d’inscriptions et d’individus connus
dans d’autres villes à l’instar de Dougga168, Lambèse169,
Mactaris170, etc. Mais cette moisson peut être considérée
comme un spécimen relativement significatif pour une petite
localité telle que Mizaeotherena où le nombre des individus
recensés correspond à peu près au un tiers de ceux calculés
par Y. Thébert pour Bulla la Royale171.
Les 85 individus connus se composent de 59 hommes et
26 femmes. Ils peuvent être répartis en cinq groupes définis
sur la base de la datation assignée aux documents172 (tabl. 3.
Le nom suivi d’un astérisque est mentionné dans la filiation).
Cette répartition, si elle s’appuie sur une chronologie
relative, qui devrait être de ce fait utilisée avec prudence,
permet tout de même de formuler certaines remarques sur
l’évolution de la dénomination des habitants de la ville et
d’apprécier le processus de leur intégration dans la romanité.
Je commencerai par quelques statistiques d’ordre général.
Sans compter les trois individus des groupes 4 et 5 qui ont
vécu postérieurement à la constitutio Antoniniana, donc
au phénomène de la romanisation, les listes qu’on vient de
dresser dans le tabl. 3 révèlent au total 44 citoyens romains
(24 hommes et 20 femmes), 35 pérégrins (31 hommes et 4
femmes) et un cas douteux, celui de Saturninus, le mari de
Caecilia Ho[norata]173 (voir tabl. 1, no 11). On ajoutera, en
bas de l’échelle sociale, l’attestation de deux esclaves privés :
Aris, fils d’Aris, Candidi uern(a)e, c’est-à-dire né dans la
maison du maître174. Le père du défunt ne peut être aussi
qu’esclave et il est, comme son fils, propriété d’un certain
Candidus que N. Ferchiou propose d’identifier, avec vraisem-
165. C’est une formulation fréquente dans les inscriptions. Par
exemple dans une inscription d’Vchi Maius (CIL VIII, 26239 = AE
1907, 91 = ILS 9398 : Ibba 2006, nº 5), où on lit au début : Karthagini
Aug(ustae) sac(rum) / ex testamento Q(uinti) Aproni Q(uinti) f(ilii)
/ Arn(ensi) Vitalis honestae memoriae uir(i) / qui rei p(ublicae)
Vchitanorum Maiorum at sta/tuam [deae ponendam promiserat (?)
HS –– -] mil(ia) …
166. CIL VIII, 25470 (El-Monchar, en Afrique proconsulaire) : D(iis)
M(anibus) s(acrum). / Maecius / Felix fl(amen) p(er)p(etuus) et / IIII
cur(ator) r(ei) p(ublicae) uixit / ann(is) LXIII m(ensibus) XI…
167. Les épitaphes de Bou Jlida ont été publiées par Poinssot 18821883, p. 294-295, no 145-148 (tabl. 1, no 1, 9 et 11) ; Espérandieu 1892,
p. 156, no 2 (tabl. 1, no 2) ; Zeiller 1903, p. 195-196, no 1 et 3-5 (tabl. 1,
no 4, 5, 12 et 13) ; Poinssot 1938-1940, p. 151 (tabl. 1, no 6) ; Ferchiou
1979a, p. 24-25 (tabl. 1, no 3, 7, 8, 10 et 16) ; González Bordas à
paraître (tabl. 1, no 14 et 15). Pour les no 17 et 18 du tabl. 1, on se réfère
seulement au Corpus.
168. MAD ; Dondin-Payre 2002 ; 2004.
169. Voir Lassère 1971-1974 ; 1973 ; Groslambert 2003.
170. Les 304 inscriptions latines recensées par A. M’Charek ont fourni
« un total de 1130 noms conservés appartenant à 573 personnages »
(M’Charek 1982, p. 143).
171. Thébert 1973, p. 252 où on lit : « au total, ce sont donc
290 individus, dont 241 porteurs de gentilices et 242 porteurs de
cognomina, qu’il est actuellement possible d’étudier à Bulla Regia ».
172. La fourchette chronologique retenue pour chaque groupe
(essentiellement pour les trois premiers) est une sorte de récapitulation
des datations proposées pour les documents insérés dans tel ou tel
ensemble. On constate pour les deux premiers groupes un grand
nombre de personnes mentionnées dans la filiation. Leur attribution
à un groupe spécifique prend en considération l’emplacement dans la
filiation (père, grand-père ou arrière-grand-père) et l’âge du défunt s’il
est encore conservé sur la pierre.
173. Il est impossible de déterminer le statut juridique de Saturninus :
pérégrin ou citoyen romain. Ce nom peut être pris pour un idionyme,
mais on sait que pour un citoyen romain « il n’est pas obligatoire
d’énoncer, même dans des documents publics, toute sa nomenclature ;
un ou plusieurs éléments peuvent être choisis, d’autres omis, pour
toutes sortes de raisons » (Dondin-Payre 2011b, p. 21).
174. L’esclave est normalement dépourvu de filiation aux yeux
du droit romain, mais en pratique plusieurs cas sont attestés par
l’épigraphie : cf. Lassère 2005, p. 147.
N°
Référence
Nom du (ou des) défunt(s) et
filiation
Support
Formulaire
Datation
1
CIL VIII, 12335 ;
ILS 4465 ; ILT 649
Aemilia Amotmicar*
Stèle
Absence de
DMS et HSE
ier s.
2
CIL VIII, 23926
Aris Clementis Cullube fil.
Non indiqué.
Probablement une stèle
DMS, HSE
iie s.
3
AE 1979, 653
Aris Victoris Senti fil.
Stèle à fronton triang. flanqué
d’acrotères
DMS, HSE, [T]TLS
iie s.
4
CIL VIII, 23927
Babit Siluani
Ateri fil.
Non indiqué,
probablement une stèle
DMS, HSE, TLS
iie s.
5
CIL VIII, 23928
Celer
Celeris Galli Celeris f.**
Non indiqué,
probablement une stèle
DMS
iie s.
6
ILT 650***
Aufidia Rogata Rogati fil.
Stèle à fronton triang. flanqué
d’acrotères
DMS, HSE, TTLS
iie – ire moitié
du iiie s.
7
AE 1979, 652
Antia Secur(a)
Stèle
DMS, HSE
iie – ire moitié
du iiie s.
8
AE 1979, 654
L. Arrius Rogatus
Stèle
DMS, HSE
iie – ire moitié
du iiie s.
9
CIL VIII, 12339
Modius Victor Quietus et
Iulia Sedata****
Non indiqué
DMS
iie – ire moitié
du iiie s.
10
Ferchiou 1979, p. 25,
no 4.
Pontia Tertulla
Stèle
DMS, OTBQ
iie – ire moitié
du iiie s.
11
CIL VIII, 12336
[C]aecilia Ho[norata]*****
Peut-être une dalle
plaquée à un mausolée******
–
iie – iiie s.
12
CIL VIII, 23929
(Registre de gauche)
M. Fabius Fuscus et
Antonia Galla [---]ri Sammi
fi.*******
(Registre de droite)
M. Fabius Fuscus Valerianus
Non indiqué
DMS, HSE,
O[TBQ]
iie moitié du
iie – iiie s.
13
CIL VIII, 23930
L. Pontius Felix Pompeianus
Non indiqué
DMS, TTLS, OTBQ
iie moitié du
iie – iiie s.
14
GonzÁlez Bordas à
paraître
Clodia Tertia et un(e) inconnu(ue).
Stèle incomplète
en haut et en bas.
HSE – HOTBQ
iie – ire moitié
du iiie s.
15
GonzÁlez Bordas à
paraître
M. Summesius Ianuarius
Stèle à sommet horizontal
DMS
iie – ire moitié
du iiie s.
16
AE 1979, 655********
C. Nunnius Felix
Stèle à fronton triang.
flanqué d’acrotères.
Décor architectural
DMS, HSE, TTLS
iie moitié du iie – ire
moitié du iiie s.
17
CIL VIII, 12337
L. Clodius Prim[---]s
et Valeria Rogata
Cippe
DMS – HSE
iie moitié du iie – ire
moitié du iiie s.
18
CIL VIII, 12338
[D]ecimiu[s]*********
Fragment indéterminé
–
–
* La défunte est sacerdos Cererum. Le monument a été qualifié de stèle par tous les commentateurs sauf J. Toutain (1907, p. 349) qui le désigne comme un cippe. Il
s’agit à ce qui semble d’une stèle massive (ou épaisse), comparable peut-être à certains monuments de Dougga (MAD, p. 68). On ignore l’épaisseur de la pierre, mais
la comparaison avec Dougga est d’autant plus probable que sur l’une des faces latérales est « sculptée une figurine qui lève les bras et tient sur la tête une gerbe de
blé » (Doublet 1892, p. 129). Un registre surmontant l’épitaphe représente en bas-relief une femme sacrifiant sur un autel. En voici le texte : Aemilia Amot/micar,
sacerdos / Cererum p(ublica ou– ia), uix(it) an(nis) LXXV, / consacrauit an(nis) XXV / X. Voir Cadotte 2007, p. 495, no 123 ; Ladjimi Sebaï 2011, p. 61, no 123.
** L’épitaphe donne trois noms au génitif après celui du défunt au nominatif ; le premier est celui du père, ensuite on lit Galli Celeris qu’on peut interpréter comme
les noms du grand-père et de l’arrière-grand-père ou du grand-père qui portait deux noms, donc un pérégrin à double idionyme : Gallus Celer. La mention de trois
générations dans la filiation est attestée dans la région de Bou Arada (Cf. Dondin-Payre 2011a, p. 28-29, à propos des exemples de Baracho et de Nabor. Également
Chérif 2015b, p. 1384-1385, d’où AE 2015, 1804). Je retiens Gallus et Celer comme renvoyant à deux personnes différentes sans que l’autre alternative ne soit
complètement exclue.
*** Poinssot 1938-1940, p. 151 ; Benzina Ben Abdallah 1986, p. 83, no 212.
**** J. Poinssot (1882-1883, p. 295, nos 147 et 148) attribue à chaque épitaphe un numéro à part ce qui veut dire qu’on a affaire à deux supports différents. Mais dans
le manuscrit du même auteur, consulté par R. Cagnat et J. Schmidt, les deux textes apparaissaient comme gravés sur un seul support. Il s’agit donc probablement
de deux registres d’un support unique.
***** L’épitaphe mentionne aussi le dédicant, Saturninus uxori. Cf. supra, no 173.
****** C’est un fragment haut de 55 cm et long de 115 cm. Hl. 6-10 cm.
******* J. Zeiller (1903, p. 195), en reproduisant les deux épitaphes gravées dans les deux cantons, a précisé à propos de celle de gauche : « La ligne 6 de la colonne
de gauche a sans doute été mal gravée ou mal copiée ». Le nom de la défunte, Antonia Galla, devrait être suivi de deux noms au génitif, celui du père (un nom
en– rus à la fin, comme Verus, Severus …) et celui du grand-père Sammus.
******** Ferchiou 1979a, p. 25 et fig. 2, p. 32.
********* Le support étant incomplet de tous côtés, la lecture du texte est donc très incertaine. Seul le nom Decimius est semble-t-il assuré.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Tabl. 1 : Les épitaphes publiées de Bou Jlida.
97
Nº
Référence
Nom du (ou des) défunt(s) et filiation
Support
Datation
1
Ferchiou 2000, p. 70
Cf. supra, n. 53.
Aris fils d’Aris, esclave de Candidus
Stèle
iie s.
2
Ferchiou 2000, p. 69
Cf. supra, n. 51
C. Aebutius Pacatus
Stèle
iie s.
3
Ferchiou 2000, p. 69
Cf. supra, n. 51
Aebutius Saturninus, fils de Titus
Aebutius
Indéterminé
iie s.
4
Ferchiou 2000, p. 70
Cf. supra, n. 52
Caecilia Ouinia, fille de Saturninus, fils
de Kallippus
Autel
iie moitié du iie –
ire moitié du iiie s.
Tabl. 2 : Les épitaphes de Bou Jlida signalées par N. Ferchiou mais non publiées.
1er groupe
(Ier s. ap. J.-C.)
2e groupe
(ii s. ap. J.-C.)
e
3e groupe
(iie – iiie s.)
4e groupe
(ive s.)
Titus Aebutius*, Aemilia Amotmicar, Aterius*, Balsamo*, Celer* (grand-père de Thader), Celer* (arrièregrand-père de Celer), Cullube*, Dado*, Gallus*, Giddo*, Liteus*, Sentius*
Aebutia Matidia, C. Aebutius Pacatus, Aebutius Saturninus, Aebutius Victor (identifié à Victor, père
d’Aebutia Matidia), Aelius Ouinianus*, Aemilius*, Aris, Aris, Aris, Aris*, Aristo*, Babit, Baliato*, Bucia*,
Candidus, Celer* (père de Celer), Celer, Clemens, Extricatus*, Kallippus* (grand-père de Caecilia Ouinia),
Namgede, Nigelio*, Pacor*, Rogatus* (père d’Aufidia Rogata), Sammus*, Saturninus* (père de Caecilia
Ouinia), Saturninus* (père de Victoria), Siluanus*, Thader, Thader, Victor*, Victoria, [---]rus* (père
d’Antonia Galla)
Aebutius Saturninus, Aelia Extricata, Aelia Ianuaria, Antia Secura, Antonia Galla, L. Arrius Rogatus,
Atagia Saturnina, Aufidia Rogata, Bebia Namgidenia, L. Bezius Felix, Caecilia Ho[norata], Caecilia Ouinia,
Q. Cipius Felix, Clodia Tertia, L. Clodius Prim[---]s, [D]ecimiu[s], Dextrania Rogata, M. Fabius Fuscus,
M. Fabius Fuscus Valerianus, Fasedius Felix, Q. [Hel]uius, Iulia Sedata, Modius Victor Quietus, Mormeia
Rogata, C. Nunnius Felix, Pontia Tertulla, L. Pontius Felix Pompeianus, Popilius Saturninus, Sallustius
Primus, Sentius Saturninus, Saturninus (époux de Caecilia Ho[norata]), M. Summesius Ianuarius, Valeria
Rogata, Verneia Rogata, Volussenia Saturnina, Volussenius Felix, L. V[---]
Lollius Valerius, Pontia Victoria
5e groupe
(Période byzantine) Pascasia
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Tabl. 3 : Répartition des individus connus à Mizaeotherena sur les différentes périodes.
98
blance, avec le donateur du terrain sur lequel fut construit le
temple de Saturnus Achaiae (voir tabl. 2, no 1)175.
Pour ce qui est des citoyens romains, l’épigraphie de Bou
Jlida n’a pas encore révélé de personnes désignées par tous les
éléments de l’onomastique quiritaire officielle : le prénom, le
gentilice, la filiation, la tribu et le surnom. Aucune inscription ne mentionne la tribu dans laquelle sont inscrits les ciues
Romani de Mizaeotherena, ni un texte qui donne la filiation
citoyenne, c’est-à-dire par le prénom paternel. La filiation est
toujours exprimée par le nom du père au génitif.
Dans le groupe des 44 citoyens romains on relève la
présence de 8 porteurs de tria nomina, tous des hommes,
et 30 de duo nomina (10 hommes et 20 femmes) constitués tous de gentilice + surnom à l’exception de Titus
Aebutius (prénom + gentilice)176. On compte aussi parmi ces
citoyens romains trois cas de polyonymie (multiplication des
cognomina) : M. Fabius Fuscus Valerianus, Modius Victor
Quietus et L. Pontius Felix Pompeianus. Enfin, dans trois
cas le système nominal reste indéterminé à cause de l’état
fragmentaire du support : [D]ecimiu[s], Q(uintus) [Hel]uius
et L(ucius) V[---]. Les citoyens romains et les pérégrins se
répartissent très inégalement sur les trois premières périodes.
L’examen de cette répartition permettra de suivre les étapes
de la transformation de la nomenclature pérégrine vers le
système onomastique romain, et d’en préciser les grands
traits de la romanisation juridique de la population.
– Premier groupe (ier s. ap. J.-C.). Il compte 12 individus
dont seulement deux sont citoyens romains : Titus Aebutius
et Aemilia Amotmicar, prêtresse des Cereres. Celle-ci est
d’extraction locale contrairement au premier, membre d’une
famille romaine qui a émigré en Afrique sous le principat
d’Auguste177. Ces deux citoyens portaient les duo nomina :
175. Dans nos statistiques, nous tenons les deux différentes mentions
comme faisant référence au même personnage, sans que la possibilité
d’une homonymie soit exclue.
176. On a inclus dants ce sous-groupe des porteurs des duo nomina
Bucia, la mère d’Aebutia Matidia. Bucia est une citoyenne romaine qui
portait sans doute une nomenclature composée de gentilice + surnom.
Ce dernier élément a été omis dans l’inscription.
177. Cf. infra, la notice consacrée au nom Aebutius. Une colonisation
datant de l’époque augustéenne et julio-claudienne est bien attestée
dans la région où se trouve Mizaeotherena. Voir en dernier lieu sur
cette colonisation, Ferchiou 1980 ; 1986. On consultera aussi Lassère
1977, p. 218-219 ; Dondin-Payre 2011a, p. 35. Ces déplacements vers
l’Afrique sont motivés par diverses raisons, notamment la mise en
valeur et l’exploitation des terres agricoles.
178. M. Coltelloni Trannoy (2021, p. 183) interprète le chiffre XXXV
(voir le texte donné supra) comme indiquant l’année de l’ère des
Cereres, et date par conséquent l’épitaphe entre 9 et 2 av. J.-C. Or le
texte contient à la ligne 4 consecrauit an(nis) XXV et un X à la fin
de la ligne 5. Indépendamment du chiffre, le verbe consecrauit n’a
jamais été utilisé dans les inscriptions pour indiquer l’année de l’ère
des Cereres, il précise plutôt qu’Aemilia Amotmicar s’est consacrée à
la déesse pendant 25 ans. Cf. Ladjimi Sebaï 2011, p. 61, no 123.
notables locaux, deux sont des dédicaces faites par deux
frères Aebutii179, la troisième atteste la générosité du pérégrin
Candidus Balsamonis fil(ius) ex (undecim)pr(imis), qui a
fait don d’un terrain pour la construction du temple dédié
à Saturnus Achaiae sous le règne d’Antonin le Pieux. Nous
retenons que jusqu’au milieu du iie s. ap. J.-C. au moins, la
romanisation de la population de Mizaeotherena ne se fait
sentir que très superficiellement et que la plupart des familles
sont encore ancrées dans leur culture punico-libyque.
– Troisième groupe (iie-iiie s. ap. J.-C.). La liste retenue
pour ce dernier groupe compte 37 individus, 20 hommes et 17
femmes. Excepté Saturninus, l’époux de Caecilia Ho[norata],
dont le statut ne peut être déterminé avec certitude (supra, n.
173), tous les autres sont des citoyens romains ; dix d’entre
eux portaient des prénoms. Contrairement à la lenteur qui a
marqué le passage des habitants de la ville du statut pérégrin
au statut quiritaire durant une bonne partie du iie siècle
ap. J.-C., il est à constater qu’à partir de la deuxième moitié
de ce siècle, la naturalisation connaît un rythme de plus en
plus intense aboutissant à un basculement remarquable de
la population locale vers la nomenclature citoyenne, ce qui
traduit bien évidemment un changement du statut juridique.
Le retard enregistré dans la romanisation des habitants a été
aussi, on l’avait déjà dit, constaté par N. Ferchiou dans le
domaine de l’architecture, restée plutôt influencée par l’héritage punique jusqu’à une date très avancée dans le iie siècle
et que les éléments de style romain sont presque tous datés du
iiie siècle180. À la charnière du iie et du iiie siècle, la part prédominante des pérégrins est supplantée par une composante
citoyenne écrasante. L’échantillonnage étudié, aussi limité
soit-il, nous donne l’opportunité de suivre la courbe de l’évolution de la nomenclature des Mizaeotherenenses. En effet,
on est passé de 16,66 % de citoyens romains et 83,33 % de
pérégrins au ier siècle ap. J.-C. à 97,29 % au moins de citoyens
romains à la fin du iie siècle et au début du iiie siècle.
Cette nouvelle situation n’est pas sans conséquence sur le
statut juridique de l’agglomération.
Mizaeotherena, avant d’accéder au statut de municipe,
était sans doute une cité pérégrine, même si le mot ciuitas
n’est pas encore attesté par l’épigraphie. On a évoqué au
début de ce travail les deux principales hypothèses relatives
à l’interprétation de la gens Bacchuiana, mentionnée dans la
dédicace à Saturnus Achaiae. On est d’avis que le terme gens
recouvre ici le sens d’association cultuelle vouée au culte de
Bacchus. Cette idée une fois admise, on peut reconstituer avec
beaucoup de vraisemblance les étapes de l’évolution juridique
de notre agglomération. Au ier siècle, Mizaeotherena était
une ciuitas peregrina dont le peuplement fut amplifié après
l’implantation de colons italiens, les Aebutii. Ces colons ne
sauraient s’installer dans un contexte tribal ; nous ne connaissons aucun exemple dans cette région de la Proconsulaire
qui puisse témoigner d’une pareille situation. Les expatriés
s’installaient plutôt dans des agglomérations secondaires
(des castella par exemple) et dans des villes, comme c’est le
cas à Thabbora où des citoyens romains, venus sans doute
179. Cf. supra, n. 31 et 42.
180. Cf. supra, n. 86.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
prénom + gentilice pour le premier, gentilice + surnom
pour la seconde. On ignore les circonstances qui ont présidé
à l’accession particulièrement précoce de cette femme à
la citoyenneté romaine. S’agit-il d’une descendante d’un
Aemilius qui aurait reçu ce bienfait du triumvir M. Aemilius
Lepidus lorsqu’il prit possession de l’Afrique entre 40 et
36 av. J.-C. ? Un tel rapport est possible, mais ce n’est qu’une
simple conjecture178.
Les 10 autres individus, tous mentionnés dans la filiation,
portaient des noms uniques puisés dans différents registres
linguistiques. Cet échantillon montre qu’au cours du ier s.
ap. J.-C. la population est composée d’une majorité écrasante
de pérégrins, ce qui correspond d’ailleurs à la situation de
la plupart des cités pérégrines au temps des Julio-Claudiens
et des Flaviens. Cependant, rédiger une inscription en latin
et porter un nom latin constituent en soi une marque d’acculturation et une étape essentielle du processus de romanisation. L’élément allogène, représenté en l’état actuel de nos
connaissances par la seule gens Aebutia, ne manquait pas
d’exercer une certaine influence, à moyen ou à long terme,
sur ces pérégrins et faciliter leur adoption du mode de vie
des Romains.
– Deuxième groupe (iie s. ap. J.-C.). On dénombre 33
individus : hormis les deux esclaves (Aris, fils d’Aris), 6
citoyens romains sont identifiés (4 hommes et 2 femmes).
La structure citoyenne est majoritairement binaire (gentilice
+ surnom) avec un seul cas de tria nomina (C. Aebutius
Pacatus). On relève aussi au sein de ce groupe la seule
occurrence de double filiation fournie par l’ensemble de la
documentation épigraphique de Bou Jlida, celle d’Aebutia
Matidia. La filiation de la défunte renvoie à la fois à son père
(Aebutius ?) Victor et à sa mère Bucia. Quant aux pérégrins,
ils sont au nombre de 25 (21 hommes et 4 femmes), reconnus
par le port d’un idionyme. La liste des noms uniques est
essentiellement composée de noms latins et libyco-puniques, avec une présence très limitée – mais significative
– de noms grecs et d’un celtique. Par comparaison avec le
premier groupe, une remarque capitale se dégage : la proportion pérégrine n’a pas encore été contrebalancée par le
nombre de ceux dotés de la citoyenneté romaine. De plus, les
quelques citoyens romains attestés ne sont pas des africains
romanisés mais des descendants d’expatriés qui appartenaient tous à la même famille, la gens Aebutia, à l’exception
d’Aelius Ouinianus, Bucia étant aussi une citoyenne romaine
apparentée aux Aebutii. D’ailleurs, des trois inscriptions
publiques jusqu’ici connues témoignant des libéralités de
99
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
aussi d’Italie, ont été introduits dans le corps civique de la
cité, probablement à l’époque augustéenne181. On les trouve
également sur des domaines impériaux182 ou comme des propriétaires privés183. Cette remarque est un argument supplémentaire en faveur de l’idée que sous le principat d’Antonin
le Pieux, Bou Jlida s’appelait Mizaeotherena et non gens
Bacchuiana. Le statut pérégrin a été conservé par la cité
jusqu’au milieu du iie siècle au moins. C’est au temps de la
ciuitas – et non de la supposée tribu Bacchuiana – qu’une
dédicace et trois épitaphes font connaître une institution qui
n’a pas cessé de susciter des controverses entres spécialistes,
l’undécimprimat. Sans revenir sur les détails de ce débat184,
nous nous limiterons à mentionner les quatre notables qui
ont fait partie des « onze premiers » : le pérégrin Candidus
et les trois citoyens romains, membres de la même famille,
C. Aebutius Pacatus (tabl. 2, no 2), Aebutius Saturninus, fils
de T. Aebutius (tabl. 2, no 3) et Aebutius Saturninus, fils
d’Aebutius Saturninus (texte 2.1.b).
Après une longue période d’assimilation, la ville parvint
à la dignité municipale. L’importante portion des habitants
naturalisés vers la fin de l’époque antonine va sans doute
motiver une promotion juridique recherchée par l’élite locale.
Les textes mentionnant le municipe se situent au iiie et au
ive siècle185, mais l’étude de l’évolution de l’onomastique
montre que l’obtention de ce statut devrait dater de la fin du
iie siècle ou du début du iiie, pour ainsi couronner le long
parcours d’intégration. A. Beschaouch attribue l’élévation
de Mizaeotherena au rang de municipe à Caracalla186 ; N.
Ferchiou est du même avis187. Pour ma part, j’ai proposé
100
181. Le nouveau document qui concerne la composition interne de la
cité est une borne-limite dont voici le texte : Populus Thab/borensis
ciues / Romani et Afri. Le Populus de Thabbora, au sens plinien du
terme (populus = ciuitas), est constitué de deux parties, une population
locale et un groupement d’expatriés. Ce binôme rappelle-t-il une
expression bien connue révélée par l’épigraphie de Thignica : utraque
pars ciuitatis (CIL VIII, 1419 = 15212 = ILS 6822 ; CIL VIII, 1415 =
15207) ? Notons toutefois que Thignica est dans l’Africa Noua, alors
que les Afri sont exclusivement mentionnés dans l’ancien territoire
carthaginois. Pour une présentation préliminaire de la nouvelle borne
de Thabbora, cf. Chérif à paraître.
182. Je pense particulièrement ici à la borne de Phileros, plantée
quelque part autour d’Vchi Maius : « castellum diuisit inter colonos et
Vchitanos » (CIL VIII, 26274 = ILT 1370 = AE 1908, 269 = AE 2006,
1691). Ces colons pourraient être non pas les habitants d’un pagus ou
d’une cité, mais les exploitants d’un domaine impérial. Une partie du
castellum a été donc organisée en domaine impérial et occupée par ces
colons. Or, tout près d’Vchi Maius, s’étendaient les terres impériales
attestées par des inscriptions agraires (Aïn Ouassel, Lella Drebblia) et
par la seule copie connue de la lex Hadriana (Henchir Hnich). Voir la
carte publiée dans Chérif et alii 2021, p. 457-486 et fig. 1.
183. À l’instar de l’affranchi d’Auguste C(aius) Iulius Aug(usti)
l(ibertus) Felix Accauonis f(ilius) …, dont le mausolée fut construit
à Henchir al-Moussaouer. Pour toutes les références sur ce domaine,
voir Chérif 2019, nos 7-9.
184. Je renverrai en dernier lieu à Sebaï 2017, p. 83-105. Voir aussi
Chérif sous presse, p. 511-512.
185. Cf. supra, p. 63.
186. Beschaouch 1985, p. 967, nº 2.
187. Ferchiou 1982, p. 856 où on peut lire : « Ainsi que nous l’avons
dit ailleurs, il est possible que la localité soit devenue municipe dans
de restituer de la manière suivante la ligne 2 de l’inscription de Bou Jlida publiée par Ferchiou188 : municipium
[Aur(elium) Ant(oninianum)], et considérer que Caracalla est
l’auteur du municipe. Malheureusement, la documentation
épigraphique est extrêmement indigente au sujet de cette
évolution juridique, mais on peut néanmoins affirmer que
Mizaeotherena n’a jamais été promue colonie, puisqu’on
continue à la qualifier de municipium au temps du règne
conjoint de Valentinien Ier et Valens (364-375).
3.2. LE
RÉPERTOIRE ONOMASTIQUE LOCAL
Les nouvelles épitaphes ont fourni à elles seules les noms
de 39 individus (22 hommes et 17 femmes). En laissant de
côté les noms incomplets189 et sans compter Pascasia qui
a vécu à l’époque byzantine et les deux esclaves Aris, fils
d’Aris, on connaît au total 32 gentilices, 25 surnoms et 28
noms uniques.
3.2.1. Les gentilices
La méthode généralement adoptée tend à classer les
gentilices en trois catégories : gentilices impériaux, gentilices de gouverneurs et autres gentilices190. Pour la première
catégorie, cette approche est surtout valable pour les cités
où l’action des empereurs est bien documentée comme par
exemple à Lambèse à propos d’un nombre important de
Iulii, de Flauii et d’Aelii191. Dans notre petite localité, il est
difficile – voire impossible – d’établir un quelconque rapport
entre le choix de porter tel ou tel gentilice impérial et l’empereur concerné. Deux raisons expliquent cet état de fait en
ce qui concerne Mizaeotherena : l’insuffisance des témoignages sur les interventions des empereurs dans la vie de la
cité et l’absence des noms impériaux dans l’onomastique des
individus. Ainsi, il est indémontrable qu’une Iulia Sedata ait
réçu, elle ou l’un de ses ascendants, la citoyenneté de César
ou d’Auguste. Il est également aléatoire de supposer que
nos trois Aelii ont été naturalisés par Hadrien ou Antonin le
Pieux, même si le lien n’est pas totalement exclu. G. Alföldy
a justement remarqué qu’un nouveau citoyen ne portait pas
obligatoirement le nom de l’empereur qui lui avait accordé le
droit de cité, car il avait aussi le droit de prendre le nom d’un
gouverneur qui aurait pu jouer le rôle d’intermédiaire entre le
bénéficiaire et l’administration impériale192.
le courant du IIIe siècle et, peut-être, sous Caracalla ».
188. Cf. supra, n. 15.
189. Il s’agit soit d’un gentilice incomplet – L(ucius) V[---], texte
2.1.w –, soit d’un surnom incomplet – L(ucius) Clodius Prim[---]s,
tabl. 1, no 17.
190. C’est la méthode instaurée par H.-G. Pflaum et adoptée dans de
nombreuses études onomastiques. Voir par exemple Groslambert
2003, p. 179-188.
191. Groslambert 2003, p. 180.
192. Alföldy 1966, p. 37-57, où on peut lire (p. 38) : « les nouveaux
citoyens n’ont pas choisi nécessairement le nom de l’empereur qui
leur a donné le droit de cité : ils pouvaient porter par exemple aussi le
reste hypothétique. Nous ne pouvons pas en outre insérer
C. Aebutius Pacatus dans cette reconstitution.
Voici maintenant les 16 autres gentilices révélés par
la nouvelle documentation. Je me contente de présenter
nom d’un gouverneur de province, médiateur de la collation du droit
de cité ».
193. Lassère 1977, p. 459 ; Beschaouch 1985, p. 971.
194. MAD, p. 647.
195. Voir tabl. 2, nos 2 et 3. Il est regrettable que N. Ferchiou,
qui avait annoncé la découverte de cette épitaphe, n’ait donné
aucune information sur le support, le formulaire (absence ou non
de l’invocation et, en cas de présence, sous quelle forme) et l’âge du
défunt, détails qui auraient pu aider à mieux cerner la chronologie de
la formule DMS.
ceux qui sont peu répandus ou inédits, laissant de côté les
nomina déjà bien attestés par l’épigraphie africaine à savoir
Aelius, -a196, Fabius197, [Hel]uius198, Lollius199, Popilius200,
Sallustius201 et Volussenius, -a202.
Atagia : ce nomen est un hapax, il est uniquement porté
par Atagia Saturnina. D’extraction locale, il est sans doute
un gentilice de type patronymique formé sur un idionyme
non encore attesté. On connaît à Dougga le nom unique
Catagus203 qui pourrait suggérer l’existence de la forme
Atagus.
Bebia : gentilice peu fréquent en Afrique avec cette
graphie : 9 occurrences (3 hommes et 6 femmes)204. La
forme Baebius est beaucoup plus fréquente205. Ce nomen
est d’origine italique, il a été toutefois inséré par G. Camps
dans sa liste onomastique libyque206. Le surnom Namgidenia
trahit l’origine locale de la défunte.
Bezius : nom inédit, peut-être d’origine libyque. Il s’agit
sans doute d’un gentilice de type patronymique issu d’un
nom unique local. Le préfixe Bez- se retrouve d’ailleurs
dans le nom Bezina porté par un chef maure mentionné par
Corippe207.
Bucia : gentilice très peu courant en Afrique, sous les
deux formes Bucius ou Buccius (duplication du c) ; on en
compte seulement six occurrences208. On signale aussi
l’unique attestation du surnom Bucianus, connu par une
épitaphe d’Ammaedara209.
196. Dondin-Payre 1981 ; Benzina Ben Abdallah 2013, p. 38.
197. Lassère 1977, p. 81 ; Benzina Ben Abdallah 2013, p. 89.
198. Benzina Ben Abdallah 2013, p. 106.
199. Lassère 1977, p. 153, 182 et 343.
200. MAD, p. 663 ; Benzina Ben Abdallah 2013, p. 158.
201. Kolendo 1977 ; MAD, p. 664 ; Ibba 2006, p. 463-464 ; DondinPayre 2011b, p. 191-193 ; Benzina Ben Abdallah 2013, p. 175.
202. Benzina Ben Abdallah 2013, p. 186-187.
203. CIL VIII, 26778 = MAD, nº 209 et p. 678 : D(iis) M(anibus)
s(acrum). / Castus Cata/gi [f(ilius) p]ius uixit / annis LXXXV.
204. L. Bebius Coronus (ILT 1519 = MAD, nº 134. Dougga) ; Bebia
Secura (ILT 1519 = MAD, nº 135. Dougga) ; Bebia Victoria (CIL
VIII, 27712. Lalla Dahlia) ; Bebia Victoria (ILAfr 197, 3. Thala) ; C.
Bebius Iulianus (CIL VIII, 4307. Kesur el-Ghennaia, en Numidie) ;
Bebia Nampula (ILAlg II, 2, 4237. Ksar Mahjiba) ; Bebia Ispes (CIL
VIII, 19876. Skikda) ; Bebia Ispes (ILAlg II, 1, 380. Environs de
Rusicade) ; Bebius Cecilius (CIL VIII, 21718. Sidi Ali Ben Youb). Ce
nom est attesté aussi comme cognomen : Cesonia Bebia (CIL VIII,
9779. Portus Magnus, en Maurétanie Césarienne). À Dougga, Bebius
est également employé comme nom unique : ILAfr 588, 104 = MAD,
nº 395.
205. Ailleurs, il est surtout fréquent en Campanie. Cf. Lassère 1977,
p. 172 ; MAD, p. 650 ; Benzina Ben Abdallah 2013, p. 57.
206. Camps 2002-2003, p. 222.
207. Camps 2002-2003, p. 222.
208. P. Bucius Celer (ILAfr 430 ; Benzina Ben Abdallah 1986, p.
197, no 451. Utique) ; M. Bucius Victor Silicianus (ILT 1213a. Auedda) ;
Buccius Antoninus (CIL VIII, 2811. Lambèse) ; Buccius Montanus
(CIL VIII, 18065 = ILS 2452 ; Le Bohec 1989, p. 169. Lambèse) ;
Bucia Extricata (CIL VIII, 26307 ; Ibba 2006, nº 171. Vchi Maius) ;
Bucia Saturnina (CIL VIII, 4027. Lambèse).
209. CIL VIII, 11592 = ILT 439 = AE 1977, 852 = AE 2006, 1677 ;
Benzina Ben Abdallah 1986, p. 30, no 65 ; 2011, p. 101, no 127 :
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Les gentilices des gouverneurs peuvent aussi nous
entrainer vers des rapprochements abusifs, surtout lorsque
nous n’avons pas leurs praenomina. On a évoqué plus haut
le lien possible entre Aemilia Amotimcar et Lépide, mais ce
n’est qu’une hypothèse favorisée par la date haute de l’obtention de la citoyenneté par cette femme.
La moitié des gentilices recensés sont livrés par la
nouvelle documentation : 16 sur 32. Voici la liste des gentilices déjà attestés : Aebutius, -a, Aemilia, Antia, Antonia,
Arrius, Aufidia, Caecilia, Clodius, -a, [D]ecimiu[s],
Iulia, Modius, Nunnius, Pontius, -a, Summesius, Valeria.
J’insisterai seulement sur le nom Aebutius, le plus représenté
à Bou Jlida.
Aebutius, -a : l’origine italienne de ce nom est assurée, il
est très ancien puisqu’il est porté par le consul de l’année 499
av. J.-C., Titus Aebutius T. f. Helua. Des Aebutii immigrants
sont attestés à Carthage sous Auguste, sans doute au moment
de la fondation de la colonie193. D’autres ont dû s’installer
dans son territoire, c’est le cas des Aebutii de Bou Jlida.
D’autres aussi sont connus à Dougga194. La gens Aebutia est
la mieux représentée dans notre ville et sans doute parmi les
familles les plus huppés. Elle est connue par quatre inscriptions publiées, deux publiques et deux funéraires (épitaphes
d’Aebutius Saturninus et d’Aebutia Matidia), en plus de
deux autres épitaphes découvertes par N. Ferchiou mais
restées inédites195. En tout, six membres sont connus : Titus
Aebutius, Aebutia Matidia, C. Aebutius Pacatus, Aebutius
Saturninus, Aebutius Saturninus, Aebutius Victor (identifié
à Victor, père d’Aebutia Matidia).
Le stemma de cette famille peut s’établir ainsi, tout
en rappelant que le rapport supposé entre Victor, père
d’Aebutia Matidia, et Aebutius Victor, fils de Titus Aebutius,
101
Cipius : c’est la première attestation de ce nomen en
Afrique ; il est assez fréquent dans les provinces européennes
avec une nette concentration en Italie et surtout à Ostie210.
Pourrait-on suggérer une origine italienne pour Q. Cipius
Felix ? L’absence de ce nom dans les provinces africaines
milite peut-être en faveur de cette hypothèse.
Dextrania : l’attestation de ce gentilice à Bou Jlida
est pour le moment un unicum dans l’ensemble du monde
romain. On connaît plutôt les noms Dexter et Dextra
employés comme surnoms ou noms uniques ; le second est
attesté onze fois à l’échelle de tout l’empire, avec une concentration en Italie et particulièrement à Rome211. Une seule
occurrence en Afrique212.
Fasedius : c’est la première attestation de ce gentilice
dans le monde romain. C’est probablement une graphie différente du nom Fassidius, attesté à trois reprises en Italie213.
Mormeia : le gentilice porté par Mormeia Rogata est un
hapax. La désinence –eius, –eia est empruntée au grec214.
Ce siffixe, selon W. Thieling, est ancien dans l’onomastique
latine, il caractérise aussi certains cognomina, tels que
Mateius, Tonneius, Hospeia, Sterceia, etc.215. L’épigraphie de
Bou Jlida a livré aussi le gentilice Verneia (infra).
Sentius : c’est la première attestation de ce gentilice à
Bou Jlida ; il est fréquent en Afrique216 et ailleurs, notamment
en Campanie et dans le Latium217.
Verneia : nomen inédit ; aucune occurrence à l’échelle
de tout l’empire. Ce nom est par contre attesté à Salona
en Dalmatie, à travers une unique mention, en tant que
cognomen218. Il appartient à la catégorie des gentilices
se terminant par le suffixe -eia (voir supra, le gentilice
Mormeia). Le surnom Rogata porté par la défunte indique
très probablement une origine locale de cette femme.
3.2.2. Les cognomina
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
25 surnoms ont été recensés, dont 5 apparaissent pour
la première fois à Bou Jlida grâce aux épitaphes nouvellement découvertes : Extricata, Matidia, Ouinianus, Primus
102
[tige de millet] Barasi X / D(iis) M(anibus) s(acrum). / Q(uintus) Iulius
Bucia/nus uixi / interim / annis / LXVII / de / bonis / X.
210. Voir les recensions de l’EDCS.
211. Sallustia Dextra (CIL IX, 1062. Regio II) ; Dextra (AE 1951, 202.
Regio III) ; Visuluia Dextra (CIL XI, 2624. Regio VII) ; Latinia Dextra
(CIL V, 7512. Regio IX) ; Popilia Dextra (CIL VI, 14857. Rome) ;
Tettiena Dextra (CIL VI, 16828 = 27299. Rome) ; Ulpia Dextra (CIL
VI, 39066 = AE 2002, 197. Rome) ; Aur(elia) Dex[tra] (AE 1995, 203.
Rome) ; Dextra (CIL VI, 34590. Rome) ; Dextra (CIL III, 9532 = ILCV,
328a. Salona).
212. [---]ila Dextra (CIL VIII, 21670. Albulae).
213. C. Fassidius Vitalis et Fassidia Ursa (CIL XI, 2765. Regio
VII) ; A(ulus) Fassidius Iustus (CIL XI, 2679. Regio VII). Cf. Solin,
Salomies 1994, p. 77.
214. Thieling 1964, p. 142.
215. Thieling 1964, p. 143. Voir aussi Schulze 1966, p. 385-386.
216. Benzina Ben Abdallah 2013, p. 200.
217. Schulze 1966, p. 228-229 ; Lassère 1977, p. 189 ; Solin,
Salomies 1994, p. 167.
218. Lutatia Verneia (CIL III, 8739).
et Valerius. Ces cognomina sont portés par 41 individus219.
Les trois surnoms les plus répandus en Afrique sont ceux les
plus représentés dans l’onomastique de Mizaeotherena : 17
porteurs des noms Felix, Rogatus, -a et Saturninus, -a sur 41,
soit 41,46 % du total220.
Voici la liste des 22 autres surnoms, avec indications
des nombres d’occurrences : Amotmicar (1), Extricata (1),
Fuscus (2), Galla (1), Ho[norata] (1), Ianuarius, -a (2), Matidia
(1), Namgidenia (1), Ouinia (1), Ouinianus (1), Pacatus (1),
Pompeianus (1), Primus (1), Quietus (1), Secura (1), Sedata
(1), Tertia (1), Tertulla (1), Valerius (1), Valerianus (1), Victor
(2), Victoria (1).
La plupart de ces cognomina sont des plus fréquents,
auxquels on ajoutera le nom Valerius, gentilice largement
diffusé dans toutes les provinces, mais utilisé ici comme
surnom. Considérons uniquement les 4 surnoms les moins
fréquents.
Amotmicar : c’est l’unique attestation latinisée du nom
’MTMLQRT, bien attesté par l’épigraphie punique et signifiant « servante de Milqart »221. Le nom Amot est attesté
seul à Henchir Brighitha222 ; il entre, avec la forme Amat,
dans la construction d’autres noms théophores comme
Amatallat « servante de la Déesse »223 et Amotbal « servante
de Baal »224.
Matidia : surnom extrêmement rare en Afrique ; on
n’en compte que deux occurrences, une à Sicca Veneria225,
l’autre à Kherbet Mharas, en Numidie226. Il est aussi très
peu attesté ailleurs227. Ce nom rappelle C. Salonius Matidius
Patruinus, père de Matidie l’Aînée (Salonina Matidia),
la nièce de Trajan, et grand-père de Matidie la Jeune228.
Une curia Matidia est attestée par deux inscriptions de
Lepcis Magna229.
Ouinia : ce surnom est en fait un gentilice suffisamment
connu ; il est « moyennement fréquent au Latium, chez les
Volsques et en Campanie »230. Une gens Ouinia appartenant
à l’ordre sénatorial est bien attestée, en Italie et en Afrique
219. Il faut rappeler que six surnoms sont portés par trois individus,
ce sont les trois cas de polyonymie. Cf. tabl. 3, groupe 3.
220. Le cas de Saturninus, l’époux de Caecilia Ho[norata] (tabl. 1,
nº 11) n’est pas pris en compte ici. Cf. supra, n. 173.
221. Toutain 1896, p. 177 ; Halff 1963-1964, p. 92 ; Benz 1972,
p. 270 ; Vattioni 1979a, p. 162, nº 28 et p. 163, nº 36 ; Jongeling
1994, p. 8 ; Bron 2013, p. 180 (Amatmilqart).
222. Chérif 2015b, p. 1384-1385 et 1407-1408 (d’où AE 2015, 1804).
223. CIL VIII, 9802 = 21683 (Aïn Temouchent). Voir Gsell 1920,
p. 235-236 ; Le Glay 1961, p. 387, nº 2 ; Jongeling 1994, p. 8.
224. CIL VIII, 16923 = ILAlg I, 583 (Guelaa Bou Atfane). Voir Benz
1972, p. 270 ; Vattioni 1979a, p. 163, nº 35.
225. CIL VIII, 1680 : D(iis) M(anibus) s(acrum). / Auiani/a Matidi/a
pia uixit / annis L. / H(ic) s(ita) e(st) // D(iis) M(anibus) s(acrum). /
T(itus) Auianius / Hilaria/nus uixit / annis XIII. / H(ic) s(itus) e(st).
226. Gsell 1893, p. 129 : D(iis) M(anibus) s(acrum). / Liuia [M]a/
tidia ui[x(it)] / annis X[---.
227. Voir les recensions de l’EDCS.
228. Voir Kienast, Eck, Heil 2017, p. 121.
229. IRT 411 = AE 1950, 160 et IRT 436.
230. Lassère 1977, p. 185.
Rogatus, -a
Saturninus, -a
– L. Arrius Rogatus
– Dextrania Rogata
– Mormeia Rogata
– Valeria Rogata
– Verneia Rogata
– Aebutius Saturninus
– Aebutius Saturninus
– Popilius Saturninus
– Sentius Saturninus
– Atagia Saturnina
– Volussenia Saturnina
Tabl. 4 : Les trois cognomina les plus diffusés à Bou Jlida.
essentiellement231. Dans les provinces africaines, ce nom
apparaît 33 fois en guise de nomen232 avec une concentration
de 8 occurrences à Thignica233. En tant que cognomen, il
n’est attesté qu’une seule fois en Numidie234.
Ouinianus : cognomen très peu usité dans l’ensemble du
monde romain235 : ne sont connues que trois attestations, une
provenant de Campona-Budapest en Pannonie Inférieure236 et
deux de la ville de Tarraco en Espagne237. Mizaeotherena en
a donc l’exclusivité en Afrique. Plus fréquent est le surnom
Iouinianus attesté tardivement par des inscriptions chrétiennes de Rome avec la graphie Iobinianus.
3.2.3 Les noms uniques
L’ensemble de la documentation épigraphique de Bou
Jlida permet de recenser 35 pérégrins qui portaient 28 noms
uniques (+ un idionyme incomplet : [---]rus). En voici la liste
avec indication du nombre d’occurrences :
Aemilius (1), Aris (2), Aristo (1), Aterius (1), Babit (1),
Baliato (1), Balsamo (1), Candidus (1), Celer (4), Clemens (1),
Cullube (1), Dado (1), Extricatus (1), Gallus (1), Giddo (1),
Kallippus (1), Liteus (1), Namgede (1), Nigelio (1), Pacor (1),
231. Sur les Ouinii sénatoriaux et la question de leur origine
(africaine ou espagnole), voir Chausson 1996, p. 345-351.
232. Je renvoie, pour les détails, aux recensions de l’EDCS.
233. CIL VIII, 14996-14999, 15119 et 24959 ; Le Glay 1961,
p. 177-179, nos 194-199.
234. Iulia Ouinia : CIL VIII, 19408 = ILAlg II, 3, 10312 d (près
d’Aïn el-Kerma).
235. Kajanto 1965, p. 152.
236. CIL III, 3389 : T. Iulius Ouini[a]nus.
237. Le clarissime M. Licinius Ouinianus Aemilianus : CIL II,
4123 et L. Numisius Ouinianus, prêtre provincial de Tarraconnaise :
CIL II, 4232.
Rogatus (1), Sammus (1), Saturninus (2), Sentius (1), Siluanus
(1), Thader (2), Victor (1), Victoria (1).
On note tout d’abord l’emploi de trois gentilices
italiens, bien attestés dans l’empire, en tant que noms
uniques : Aemilius, Aterius et Sentius. On constate en
outre l’importance des noms typiquement africains d’origine
libyco-punique : Aris, Baliato, Balsamo, Cullube, Giddo,
Namgede, Thader. Le port de ces noms indique généralement
une origine locale de la personne. Certains de ces idionymes
sont également attestés par des inscriptions néopuniques.
Il est aussi intéressant de remarquer que cette liste contient
deux noms grecs : Aristo et Kallippus et un nom d’origine
probablement celtique (Nigelio). C’est sans doute par
snobisme que certains parents ont donné à leurs enfants des
noms étrangers très peu usités dans les milieux africains238.
Relativement à la question de l’origine des individus déduite
de nombre de noms qui peuvent nous orienter vers des
régions géographiques particulières, M. Dondin-Payre, dans
son introduction à l’ouvrage collectif consacré aux noms
de personnes dans l’empire romain, a attiré l’attention sur
les risques de la surinterprétation de la signification de ces
noms, en partant notamment de l’exemple de Gallus239. Ce
nom peut effectivement indiquer un rapport direct avec la
Gaule, donc renvoyer à une réelle origo, mais dans plusieurs
cas il s’agit bel et bien d’un africain. « Gallus en Afrique
est, alors, une transcription latinisée des noms libyque GL
et punique GLSN, translittérés en gullussa »240. Les deux
habitants portant ce nom (Antonia Galla et Gallus) sont donc
à notre avis des africains.
Il est inutile d’insister sur tous les noms répertoriés, dont
plusieurs sont bien documentés ; je me contente de présenter
les moins fréquents ou ceux qui posent un problème d’interprétation.
Aristo : c’est la forme latine du nom grec Aristôn, il
est porté par le père de Namgede (nom libyco-punique) ;
fréquent en Afrique en tant que nom unique ou cognomen.
Contrairement à F. Vattioni et K. Jongeling241, qui le rapprochent du nom Aris (génitif Arinis) bien connu par des
238. Voir le cas de Romulus, nom romain par excellence, connu par
une colonne votive publiée par N. Ferchiou (2004, p. 1325-1330 =
AE 2004, 1815), provenant de la région de Bou Arada. Le dédicant
est Baracho / Metthumba(l)is / Addibalis Romu/li f(ilius)… L’éditrice
a interprété le nom de l’arrière-grand-père comme étant celui d’un
citoyen romain originaire de l’Italie, et que la famille a été en quelque
sorte « punicisée » après son installation en Afrique. Revenant sur
ce document, M. Dondin-Payre a démontré qu’il n’y a rien de cela ;
« Baracho n’est pas le descendant pérégrin d’un citoyen immigré
italien appelé Romulus qui aurait été ébloui par la civilisation africaine
au point de se “puniciser” et d’abandonner sa citoyenneté. Il fait
partie d’une famille indigène pérégrine qui a, sous une influence
culturelle italienne, choisi à une génération le nom italien Romulus,
dont elle connaissait ou non la signification, peu importe ; ensuite elle
a privilégié des noms indigènes, Addibal, Metthumbal et Baracho,
sans qu’il y ait primauté d’une civilisation sur une autre, reniement ou
retour en arrière » (Dondin-Payre 2011a, p. 35-36).
239. Dondin-Payre 2011a, p. 21-22.
240. Dondin-Payre 2011a, p. 22. La question a été posée pour les
attestations de Gallus (ou Galus) à Dougga, voir MAD, p. 685.
241. Vattioni 1979a, p. 164, no 43 ; Jongeling 1994, p. 11-12.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Felix
– L. Bezius Felix
– Q. Cipius Felix
– Fasedius Felix
– C. Nunnius Felix
– L. Pontius Felix Pompeianus
– Volussenius Felix
103
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
inscriptions puniques et latines242, W. Thieling et H. Solin
le considèrent, à juste titre, comme un nom grec243. AristoAristonis a donné probablement le gentilice patronymique
Aristonius, porté par deux sœurs originaires de Thrace
attestées à Lyon244.
Babit : cet idionyme est un unicum, d’où la difficulté
de déterminer, d’une part, son origine245 et, d’autre part, s’il
désigne un homme ou une femme ; je l’ai tenu comme un
nom masculin mais ce n’est qu’une hypothèse. La terminaison –it est attestée par exemple dans la Liste de G. Camps
pour deux noms masculins et deux autres féminins246. Le
préfixe Bab- est de même employé dans certains gentilices
tels que Babius-Babbius247 et Babidius248, sans que l’on
puisse établir un quelconque lien avec le nom unique Babit.
Cullube : Bou Jlida a l’exclusivité de ce nom unique. Il
est mentionné dans la filiation du défunt : Aris Clementis
Cullube fil. (tabl. 1, no 2). Nous avons conservé le génitif car
la forme nominative est inconnue. C’est fort probablement un
nom masculin malgré les doutes de G. Camps249. F. Vattioni
rattache ce nom à la racine sémitique klb qui signifie
« chien »250, une dérivation contestée par K. Jongeling251.
Dado : ce nom est un hapax, il est mentionné dans la
filiation de Namgede : Namgede Aristonis Dadonis (filii)
filia. On connaît plutôt les noms Dida-Didda, répertoriés par
Camps comme étant libyque252, et Dido253.
104
242. Benz 1972, p. 276 ; Jongeling 2008, p. 318.
243. Thieling 1964, p. 100 ; Solin 2012, p. 330.
244. AE 1991, 1227 : Aristonia Maxsimina et Aristonia Valen<t>ina.
Voir Dana 2011, p. 53. Est connu aussi le gentilice Aristorius à travers
une épitaphe d’Albulae, en Maurétanie césarienne, mentionnant
C. Iul(ius) Aristorius (CIL VIII, 21687). C’est la seule occurrence de
ce gentilice enregistrée dans tout le monde romain.
245. Non répertorié ni par K. Jongeling dans ses North-African
Names ni par G. Camps dans sa Liste onomastique libyque.
246. Un homme du Jbel Taya nommé Masnit (ILAlg II, 2, 4585a ;
Camps 2002-2003, p. 239) ; un homme de l’Oued el-Amud, en
Tripolitaine, au nom de Gatit (IPT, 79 ; Camps 2002-2003, p. 221) ;
une femme de Thibilis nommée Chubudit (CIL VIII, 19012 = ILAlg II,
2, 5449 ; Camps 2002-2003, p. 225) ; et une femme de Volubilis (ILM
612 ; Camps 2002-2003, p. 257) au nom de Zinit.
247. Fustius Babius (CIL VIII, 8062 = ILAlg II, 1, 182. Rusicade) ;
Cn. Babbius Philinus (AE 1919, 4. Corinthus).
248. C. Badius C(aii) l(ibertus) Niger (CIL IX, 1431. Aequum
Tuticum, Regio II).
249. Camps 2002-2003, p. 226 « femme ? ».
250. Vattioni 1979a, p. 171, no 91 ; Vattioni 1979b, p. 69. Voir sur
cette racine, Halff 1963-1964, p. 117.
251. Jongeling 1994, p. 39.
252. Trois occurrences en Afrique : Déroche 1948, p. 67, no 4
(Vicus Maracitanus) ; CIL VIII, 811 (Auitta Bibba) ; ILAlg II, 2,
4733 (Thibilis). Camps 2002-2003, p. 227. Voir aussi Toutain 1896,
p. 178-179.
253. Deux occurrences en Afrique, une à Rusicade (CIL VIII, 8044 =
ILAlg II, 1, 157), l’autre à Bou Njem (Marichal 1992, p. 144).
Giddo : cette forme est inédite mais elle appartient à la
même famille des transcriptions latinisées du nom libyque
GDD254, translittéré en Giddin255, Gudud, Gududus, etc.256.
Kallippus : ce nom est porté par le grand-père de Caecilia
Ouinia (tabl. 2, no 4). C’est la seule attestation avec un K au
lieu d’un C257. Kallippus-Callippus (ou Callipus) est un nom
grec258 attesté 6 fois en Afrique en tant que cognomen ou
nom unique259. Il est relativement fréquent en Italie et surtout
à Rome, particulièrement parmi les esclaves et les affranchis.
Liteus : nom attesté une seule fois dans tout l’empire
à travers une marque d’atelier de production céramique
provenant de la ville de Gueugnon, en Gaule Lyonnaise260.
Il est mentionné à Bou Jlida dans la filiation de Victoria :
Victoria Saturnini Litei (filii) filia (texte 2.1.t). L’origine de
cet idionyme nous est inconnue, mais la famille est sans
doute d’extraction locale.
Nigelio : l’Afrique n’a livré jusqu’ici que deux attestations de l’idionyme Nigelio-Nigellio (avec duplication
du l) provenant de Guelaa Bou Atfane261 et de Thibilis262.
On en compte 36 occurrences dans les provinces européennes263, avec une importante concentration dans les
régions celtiques264. Avons-nous ici un cas de déplacement
d’individus de ces régions vers la Proconsulaire ? Nous
pensons plutôt à un africain qui a choisi de porter un nom
étranger à l’Afrique, peut-être en imitant d’autres personnes
d’origine celtique établies dans la région de Bou Arada et
254. RIL 269, 270 (Région de la Cheffia). Voir aussi Rebuffat 2018,
p. 29.
255. Ce nom est mentionné dans une épitaphe provenant de la cité
voisine de Thabbora, CIL VIII, 23903.
256. Voir Jongeling 1994, p. XXIV, 50 et 52-54 ; MAD, p. 686.
257. Je donne comme illustration les noms Calemerus (AE 1894, 114.
Vienne) – Kalemerus (CIL VIII, 2929. Lambèse) et Callistus (CIL
VIII, 12998. Carthage) – Kallistus (ICVR 8580. Rome).
258. Thieling 1964, p. 101.
259. M. Hos[t]ilius Callipus (ILAlg II, 3, 7568 = AE 1972, 699. Aziz
Ben Tellis) ; Iulius Callippus (AE 1985, 904. Caesarea) ; Callip[pus]
(AE 1980, 962. Caesarea) ; Callippus (ILAlg II, 2, 4791. Thibilis) ;
Callippus (ILAlg II, 2, 4793. Thibilis) ; Callippus (CIL VIII, 2071
= ILAlg I, 3732 et CIL VIII, 2077 = ILAlg I, 3733. Henchir el-Ma
el-Abiodh).
260. CAG, 71-3, p. 258 : Of(f)icin(a) / Adbuci Liteu(s) / fecit.
261. CIL VIII, 16982 = ILAlg I, 664 : D(iis) M(anibus) s(acrum). /
Iulia Nina / Nigelion/is fil(ia) p(ia) u(ixit) a(nnis) / LXXX. H(ic)
s(ita) e(st).
262. CIL VIII, 18953 = ILAlg II, 2, 4968 : Memoriae / C(---)
So/roniba / Nigellioni(s) / fil[ia] Me/llita u(ixit) a(nnis) XVII. / H(ic)
s(ita) e(st).
263. Sans compter quelques cas incertains. Je renvoie, pour les
détails, aux recensions de l’EDCS.
264. Alföldy 1969, p. 253 ; Barruol, Gascou 1982, p. 301.
265. On consultera Beschaouch 1979. Lire aussi les remarques de
M. Dondin-Payre (2011b, p. 32-33) à propos du nom Accauo. Même
si l’origine de ce nom doit être recherchée dans l’Italie centrale et non
dans l’aire celtique, des « éléments celtiques » ont existé dans cette
région. On peut penser, à l’instar de P. Ennius Paccianus, fils de Titus,
petit-fils d’Eppillus (CIL VIII, 12241), ancien soldat de la troisième
légion Auguste originaire de la Gaule, qui a choisi de s’installer à
Henchir Brighitha, que d’autres militaires ont aussi préféré de s’établir
dans la même contrée, et c’est par l’intermédiaire de cette présence que
des noms comme Nigellio ont passé dans l’onomastique autochtone.
266. 68 attestations environ dans tout l’Occident romain dont une
seule en Afrique (Grania Nigela : CIL VIII, 7393 = 19464 =
ILAlg II, 1, 1199. Cirta).
267. Nigellius Firmus : CIL V, 4702. Brixia, Regio X.
268. Audollent 1904, p. 218 (Carthage) ; IRT 241 (Oea).
269. On trouvera les détails dans les recensions de l’EDCS.
270. Vattioni 1979b, p. 107 ; Jongeling 1994, p. 126.
271. Je renverrai aux recensions de l’EDCS.
272. Sammia Emerita (CIL VIII, 8553) ; Sammia Aemerita (Albertini
1930-1931, p. 133).
273. Halff 1963-1964, p. 115 ; Vattioni 1979a, p. 177, no 13 et
p. 189, no 259. En dernier lieu Jongeling 2008, p. 336.
274. RIL 260. Rebuffat 2018, p. 33.
275. Vattioni 1979a, p. 189, no 259 ; 1979b, p. 116 ; Jongeling 1994,
p. 141 ; Camps 2002-2003, p. 252 (l’auteur considère Thader comme
un nom masculin) ; Benzina Ben Abdallah 2013, p. 381.
276. Otacilia Quartilla Thader : Benzina Ben Abdallah 2013,
no 143 (d’où AE 2013, 1939).
277. Thader, Baliathonis (filia) : ILAlg I, 1000.
278. Thadir, Namphamonis fil(ius) : ILAlg I, 1616 (Khamissa). Cf.
Vattioni 1979a, p. 189, no 259 ; Jongeling 1994, p. 141.
279. AE 1940, 16 = ILT 732. Thuburbo Maius. Benzina Ben
Abdallah 1986, p. 139, no 362.
280. Iulia Thadea : CIL VIII, 186 = ILT 311. Henchir Chaffaï, région
de Thelepte.
CONCLUSION
Les résultats issus des travaux menés à Bou Jlida durant
la dernière décennie ont manifestement accru la masse documentaire archéologique et surtout épigraphique. Les compléments apportés à l’état de nos connaissances concernent à la
fois la topographie du site et l’histoire de l’agglomération. En
dépit de la dissimulation de la plus grande partie des ruines
par l’habitat moderne, il a été tout de même possible de
repérer et de collecter un certain nombre de données permettant de bien connaître l’étendue globale du site et de mieux
comprendre l’organisation des différentes nécropoles autour
du centre monumental. On est en effet parvenu à identifier
avec plus de clarté les trois espaces funéraires aménagés
au nord-est, à l’ouest et au sud. Le manque d’indices sur le
terrain interdit d’exclure une possible connexion entre ces
deux derniers. La chronologie des épitaphes montre que
ces trois nécropoles fonctionnaient en même temps pendant
le Haut-Empire, mais les témoignages recueillis dans ces
espaces semblent indiquer que la nécropole de l’Ouest est
peut-être la plus ancienne et celle du Sud la plus tardive.
L’exploration du village nous a donné aussi l’occasion de
rassembler un matériel céramique, certes relativement limité
en nombre de tessons mais assez diversifié, permettant
d’éclairer les séquences chronologiques du site. On est ainsi
parvenu à préciser, pour la première fois, la fourchette de
cette occupation qui s’étend entre le iiie siècle av. J.-C. et le
viie siècle ap. J.-C. Nous devons toutefois rappeler qu’une
présence très éphémère au cours du bas Moyen-Âge a été
détectée, sans que l’on puisse deviner pour le moment les
circonstances de cette existence.
Quant à l’histoire de la ville, on doit d’emblée insister
sur l’apport indéniable de la nouvelle série d’épitaphes,
notamment en ce qui concerne l’évolution de la dénomination des habitants. Ce petit corpus ne couvre pas uniformément toutes les périodes car le plus grand lot est datable du
Haut-Empire, avec très peu de textes du Bas-Empire et de
l’Antiquité tardive. Après avoir déterminé la forme exacte du
toponyme antique de l’agglomération – Mizaeotherena – et
après avoir traité la question de la gens Bacchuiana, qui ne
peut revêtir un sens tribal281, nous avons tenté dans ce travail
d’exploiter la documentation épigraphique – ancienne et
nouvelle – en vue d’appréhender deux questions essentielles :
la romanisation de la population et la date de la promotion
municipale. Au terme du commentaire réservé aux différents
documents, nous pouvons retenir les conclusions suivantes :
1. Mizaeotherena est une cité pérégrine au ier siècle
ap. J.-C. Vers la fin de ce siècle, ou un peu plus tôt, des
membres de la gens Aebutia se sont établis dans la ville.
La population, comme le montre son onomastique étudiée
d’après un échantillon en apparence réduit mais suffisamment représentatif, est presque entièrement pérégrine.
2. Le statut juridique des individus est resté pratiquement
inchangé jusqu’au milieu du iie siècle. On constate ensuite
une accélération des promotions individuelles à partir de la
deuxième moitié de ce siècle. L’époque antonine a connu en
281. Chérif sous presse, p. 501-538.
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
d’El-Aroussa265. On connaît également le surnom Nigellus,
-a266 et le gentilice Nigellius267.
Pacor : nom inédit. Il est porté par le père d’un citoyen
romain, Sentius Saturninus (texte 2.1.f). Est attesté, mais
assez rarement, le surnom Pacorus, -a ; on n’en compte que
deux occurrences en Afrique268 et six autres à Rome269.
Sammus : Bou Jlida offrait la seule occurrence de ce
nom unique en Afrique, construit avec le préfixe Sam- 270 ;
quelques exemples sont connus ailleurs271. À Sétif est attesté
à deux reprises le gentilice Sammius, probablement de
formation patronymique272.
Thader : nom libyco-punique porté par deux femmes
de Bou Jlida : Thader, fille de Baliato et Thader, fille
d’Aemilius ; c’est le féminin des noms Iadar-Iader-Iadir,
construits peut-être sur la racine sémitique ’dr (ou y’dr)273.
Une inscription libyque de la région de la Cheffia donne le
nom IDR274. Thader est très rare en Afrique275 : seulement
deux attestations, une à Ammaedara276, l’autre à Oued Chouk
en Algérie277. Sont aussi connues les formes Thadir (nom
masculin)278, Thaddac279 et Thadea (surnom)280.
105
Antiquités africaines, 58, 2022, p. 61-110
Afrique et ailleurs une intégration massive des populations
autochtones.
3. L’apogée de la romanisation est atteint au début du iiie
siècle. La majorité des habitants ont obtenu la citoyenneté
romaine.
C’est au cours de cette dernière étape que la transformation juridique eut lieu. La cité pérégrine obtint, de
Caracalla très probablement, le statut de municipe qu’elle
conserva encore au ive siècle.
Les nouvelles données qu’on vient d’exposer ont sans
doute offert une vision plus claire sur la ville africo-romaine
de Mizaeotherena. Il faut toutefois reconnaître que plusieurs
aspects de l’histoire de cette agglomération restent inconnus.
La principale aporie est la rareté des inscriptions. Bou Jlida
est encore l’une des cités les moins loties en documents épi-
106
graphiques relatifs à la vie publique. On est encore très mal
renseigné sur la vie municipale et l’activité évergétique des
notables, sur l’équipement monumental, sur la ville du BasEmpire et de l’Antiquité tardive. Un problème est difficile
à éluder en l’état actuel de la documentation : celui de
l’occupation post-antique du site. Il s’agit là d’un problème
irritant qu’on rencontre dans chaque investigation archéologique menée dans la région de Bou Arada. Sur ce point
on doit nécessairement être précautionneux car les résultats
obtenus seulement d’une exploration en surface sont toujours
lacunaires et provisoires en l’absence de fouilles.
Nos prochaines missions dans le village même et dans
la région qui l’entoure apporteront, souhaitons-le, des
réponses et des éclaircissements aux incertitudes qui subsistent et aux questions qui restent encore indécidables.
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