Jules Fontanez
Jules Fontanez est un peintre et illustrateur genevois ( Genève - Genève).
Biographie
[modifier | modifier le code]Il naît le au 13 de la place du Temple à Genève au cœur du quartier St Gervais. Son père Léon, citoyen français né à Lélex (Ain), est employé de commerce. Sa mère Joséphine Mollard exerce le métier de justifieuse de pièces à musique.
Jules n'a que quatre ans quand son père décède le . Sa mère se remarie et épouse un horloger Louis Frédéric Zurlinden.
Il passe ses vacances à Lélex chez sa grand-mère. Dans Le Courrier français du , où figure son portrait par D.O. Widhopff il écrit « Jusqu'au moment où je vins à Paris, je passai le plus clair de mon temps à pêcher les grenouilles dans le Jura essayant entre-temps de faire de la cartographie et de l'architecture ».
A quinze ans il devient apprenti graveur sur bois à l'Ecole des Arts Industriels. Il a pour condisciple Forestier et Édouard Vallet. Ils ont comme professeur Alfred Martin.
Il s’exerce à la caricature et collabore à divers journaux comme Sapajou, Passe-partout et Papillon, journal humoristique paraissant un mercredi sur deux alternativement avec la Patrie suisse, qui firent la joie des Genevois au tournant du XXe s.
À la même époque, il reçoit ses premières commandes et exécute pour Paris Bazar et Walner Opticien des affiches[1] en couleurs pour la Société Suisse d'Affiches Artistiques de Genève.
En 1898, il se rend à Paris où il va parfaire sa formation notamment avec Antonio de La Gandara (1862-1917) ancien élève de Jean-Léon Gérôme et portraitiste mondain très recherché.
Il effectue plusieurs séjours en Bretagne où il peint des paysages mélancoliques.
Il rencontre Jérôme Doucet, secrétaire de la Revue illustrée qui va faire appel à lui non seulement pour fournir régulièrement des dessins ou caricatures mais aussi pour illustrer des nouvelles humoristiques d'Alphonse Allais ou d'Alfred Capus. Il lui confie également l’illustration de son ouvrage Le livre des Masques publié sous le pseudonyme de Montfrileux où il dépeint les caractéristiques de différentes classes sociales ou métiers (marins, amoureux, chiffonniers, boulangers), personnages de la vie de tous les jours sur le principe des physiologies très en vogue au XIXe siècle.
Il fournit également des dessins au Courrier français, qui caractérisait vers 1900 l'esprit léger et sarcastique du Paris fin de siècle et accueillit l'élite des dessinateurs de l’époque. La mode était aux personnages de la Commedia dell'arte : Pierrot, Pierrette, Arlequin et Polichinelle.
Dès 1902, Fontanez travaille sur les illustrations demandées par Doucet, en tant qu'éditeur de « Le Livre et l’Estampe » pour un nouvel ouvrage, Gaspard de la Nuit : fantaisies à la manière de Jacques Callot et de Rembrandt d'Aloysius Bertrand. Il y montre une maîtrise parfaite du trait digne du premier en pouvant exprimer des clairs-obscurs dignes du second.
Au cours d’un séjour à Genève, son ami Antoine Dufau lui parle de son projet de livre. Dufau (1866-1936), graveur, journaliste devint plus tard conservateur du Musée des Arts Décoratifs de Genève. En 1906, Figâsse et Duranpont paraît sous le pseudonyme de Pierre Duniton avec des croquis où Fontanez exprime toute sa tendresse pour le petit peuple de Genève qu’il connaît bien pour avoir passé sa jeunesse au quartier St Gervais. A Genève il fréquente[2] Henry Spiess, Jean Violette, Elie Moroy,Daniel Baud-Bovy
De nombreux journaux sollicitent Fontanez et lui demandent ses dessins. C’est ainsi qu’il collabora aussi bien à La Libre Parole, journal d'inspiration nationaliste et antisémite d'édouard Drumont qu’à Gil Blas Illustré, supplément hebdomadaire (dirigé par Doucet) de la revue Gil Blas, plus contestataire (1893-1912)..
Fontanez évoluait aussi bien dans ces cercles d’aristocrates décadents comme Jean Lorrain et Robert de Montesquiou, d’artistes gentiment anarchistes comme Raoul Ponchon ou de « l'extrême droite noctambule » avec Paul-Jean Toulet.
À partir de 1907, Fontanez collabore au journal humoristique Le Rire. Fontanez fait aussi partie des artistes maison de Delagrave, éditeur de livres pour enfants aux superbes cartonnages de percaline polychromes. Il illustra ainsi successivement les ouvrages de Jules Chancel, auteur de romans d'aventures pour enfants, Le petit Fauconnier de Louis XIII ou Petit Marmiton, grand Musicien. En 1909, Daniel Baud-Bovy demande à Jules Fontanez de participer avec d’autres artistes suisses à l’illustration de son livre Vacances d’artistes.
En , lorsque la Première Guerre mondiale éclate, Fontanez retourne à Genève. Il réalise la couverture de La Fête de juin pour la célébration du centenaire de l’entrée de Genève dans la Confédération (1814-1914) Les photos sont de Frédéric Boissonnas, ami de Baud-Bovy.
En France, les auteurs et illustrateurs sont mis à contribution pour exalter l'ardeur patriotique. Fontanez continue sa collaboration avec Delagrave et illustre alors Le petit Bé et le vilain Boche puis La Classe 1925. Cette même année, Fontanez frappé par la maladie, cesse de peindre et va vivre chez sa mère aux Paquis. Malade, aveugle, paralysé, il passe ses journées dans un fauteuil roulant « dépendant comme un enfant de ceux qui veillent sur lui ».
Le fut inaugurée à l'Athénée une exposition vente organisée par des amis de l'artiste cherchant à lui venir en aide. Soixante-cinq toiles y sont présentées. La presse genevoise y consacra de nombreux articles. La même année, le Musée des Arts décoratifs de Genève publia un portefeuille d'eaux fortes.
Jules Fontanez meurt le à l'âge de 43 ans et fut inhumé au cimetière St Georges.
Œuvre
[modifier | modifier le code]C’est par la caricature qu’il débuta. Croquant rapidement toutes les scènes et personnages qui l’entourent, tout est prétexte à dessiner. Sa caricature est pleine d'esprit. Toutefois Fontanez, contrairement aux autres caricaturistes, ne semble pas avoir réalisé de dessins d'actualité. La politique ne semble guère le concerner. Ses thèmes préférés sont la fête mettant souvent en scène de gentils pochards et des ivrognes sympathiques à la gaieté titubante. Très rarement, ses dessins portent sur la tentation de la chair. Ils n’ont pas le côté racoleur des dessins de certains de ses confrères notamment du « Courrier ». Il pratique ses dons d'observation sur le petit peuple dans un style bon enfant pour lequel, du fait de ses origenes modestes, il garda toujours une tendresse particulière et compréhensive.
Il y a l’illustrateur d’œuvres magistrales comme Gaspard de la Nuit ou Le Livre des masques mais aussi celui de livres pour enfants. Fontanez montre ainsi pleinement son art en passant des thèmes les plus difficiles aux plus légers, toujours en les traitant dans son style bien personnel.
Le peintre
On peut distinguer deux périodes bien que les toiles ne soient pas datées, ce qui est une constante chez Fontanez.
La période sombre, la première, constituée pour l'essentiel par des paysages, vues mélancoliques de Bretagne ou de Paris mais comprenant également des personnages comme Pierre et l'Amour ou Évocation de Gilles.
Pendant une période que l’on peut qualifier de transition, Fontanez va commencer à peindre son thème favori qu’il n’abandonnera plus. Ce sont des scènes dans le style d' Antoine Watteau, à la fantaisie alerte, représentant des fêtes champêtres dans des jardins à la Le Nôtre où apparaissent des marquises, Pierrot, Polonais et Turcs de Carnaval mais dont la technique de peinture reste très traditionnelle.
Progressivement, les personnages deviennent plus lumineux avec l’apparition de marquises ou Pierrot aux couleurs claires, blanc, rose mais les prés et certains costumes demeurent foncés. Enfin la technique va évoluer pour devenir plus moderne et aboutir à la période claire. Les personnages sont animés par un mouvement léger, l’air est transparent et on croit entendre les rires et la musique.
La technique s’apparente au pointillisme. Par petites touches de tons pastel suaves, des bleus et des roses tendres, des verts liquides affrontent des blancs éclatants donnant ainsi aux scènes un aspect allègre et printanier
Jules Fontanez fut sollicité pour décorer plusieurs lieux publics à Genève. Cette décoration consistait essentiellement en longues fresques peintes sur toile. C'est ainsi qu'il décora le « Maxim's », un bar genevois de musiciens avenue du Mail. Il décora également la Brasserie Landolt, fondée en 1885, située 2, rue de Candolle à côté de l'Université de Genève. La décoration comprenait quatre tableaux : trois tableaux faisant référence à la vie estudiantine : la Ronde des étudiants, le Carnaval des étudiants aujourd'hui disparu et un portrait d'un "Bellettrien" (étudiant en Lettres) et l’Escalade de 1602 représentant un Genevois avec une lanterne. En 1999, la Brasserie sera transformée en pizzeria et le seul tableau qui y figurait encore (La Ronde) disparaîtra ainsi que la table où Lénine avait l’habitude de s’asseoir, sans que l’on sache ce qu’ils sont devenus
Artiste aux multiples talents, capable aussi bien de caricaturer un ivrogne, que d’illustrer des livres pour enfants, montrant une grande maîtrise dans les traits Fontanez nous surprendra toujours par l’étendue de son art.
Livres illustrés par Fontanez
[modifier | modifier le code]- Maurice Barrès : Du sang, de la volupté, de la mort Modern Bibliothèque Arthème Fayard 1910
- Aloysius Bertrand : Gaspard de la Nuit Le livre et l’Estampe 1903 (lire en ligne sur Gallica)
- Jérôme Doucet, sous le pseudonyme de Montfrileux : Le livre des Masques Le livre et l’Estampe 1903
- Georges Verdène :La torture, les supplices et les peines corporelles infamantes et afflictives dans la justice allemande : étude historique R. Dorn (Paris) 1906 (lire en ligne sur Gallica)
Sur Genève et la Suisse :
- Daniel Baud-Bovy : Vacances d'artistes. Tessin, Valais, Vaud,Genève Genève Soc. Ed Sonor, 1909, in-4°. Illustrations de Auguste Bastard, E. Baud, Plinio Colombi, Louis Dunki, J. Fontanez, Giovanni Giacometti, Henri van Muyden, Édouard Vallet
- Daniel Baud-Bovy, Malsch, Albert: La fête de juin. Spectacle patriotique. Centenaire de l'entrée de Genève dans la confédération Suisse. 1814 - 1914. Genève,
- Pierre Duniton :Figâsse et Duranpont Genève début du XXe siècle
- Gorgibus [3] Les cafés de tante Julie Genève, Ch. Eggimann, sans date vers 1900.
Livres pour enfants
- Jérôme Doucet : Les contes merveilleux- Félix Juven 1904
- Juana Richard Lesclide : Un voyage dans le vent - Juven 1906
- Henriette Bezançon : Tache d’encre et goutte de lait - Delagrave 1903
- Jules Chancel : Le petit courrier de Louis XIII - Delagrave 1909 ; Petit marmiton, grand musicien- Delagrave 1902
- Emilio Salgari : Au Pôle Sud à bicyclette- Delagrave 1910
Chez Delagrave au format à l'italienne :
- Tony D’Ulmès[4] :La pension des oiseaux - Delagrave 1910 lire en ligne sur Gallica
- Marthe Serrié-Heim : Le petit Bé et le vilain Boche- Delagrave 1915
- Georges Le Cordier : La Classe 1925 - Delagrave
Jules Fontanez : Onze Eaux-Fortes. Compositions et croquis. Genève, Musée des Arts Décoratifs, 1917. 20 exemplaires
Expositions
[modifier | modifier le code]- 1903 : Société nationale des beaux-arts Paris
- 1915 : Exposition de la section de Genève des peintres et sculpteurs
- 1917 : Exposition Fontanez à l’Athénée
Notes et références
[modifier | modifier le code]- H. CROMWEL ET SON ELECTRIC THEATRE,
- [http://w3public.ville-ge.ch/bge/odyssee.nsf/fshome BGE Manuscrit dossier
- pseudonyme de Georges Pfeiffer, rédacteur en chef du Journal de Vevey
- pseudonyme de Berthe Rey, morte en mars 1918. Avec sa sœur Renée morte en juin 1918, elles écrivirent de nombreux ouvrages féministes
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Pierre Duniton Jules Fontanez Pages d’Art-
- P. Seignemartin Jules Fontanez, peintre genevois. 1875-1918 Paris 2000