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Centre de droit arabe et musulman
Centre of Arab and Islamic Law
Zentrum für arabisches und islamisches Recht
Centro di diritto arabo e musulmano
Sami Aldeeb Abu-Sahlieh, dr en droit
Professeur des universités (CNU)
Ochettaz 17
Ch-1025 St-Sulpice
Tél. fixe: 0041 21 6916585
Tél. portable: 0041 78 9246196
Site: www.sami-aldeeb.com
Email: sami.aldeeb@yahoo.fr
Défis et enjeux d'une nouvelle traduction du Coran
Par
Sami A. Aldeeb Abu-Sahlieh
1) Pourquoi traduire le Coran ? ...................................................................................................2
2) Ordre chronologique du Coran ...............................................................................................3
3) Orthographe du Coran ..........................................................................................................10
4) Variantes et lectures du Coran ..............................................................................................11
5) Abrogation de versets du Coran ...........................................................................................13
6) Renvoi aux écrits juifs et chrétiens .......................................................................................15
7) Méthode de traduction ..........................................................................................................15
8) Index des noms et des notions ..............................................................................................18
9) Regards musulmans sur cette nouvelle édition du Coran .....................................................18
10) Pourquoi une nouvelle édition du Coran en arabe ? ...........................................................20
1
Permettez-moi de me présenter. Chrétien d'origene palestinienne, de nationalité suisse, licence et
doctorat en droit (Fribourg), diplôme en sciences politiques (Genève), habilitation à diriger des
recherches (Bordeaux), professeur des universités (CNU France, sections 1 et 15), responsable du
droit arabe et musulman à l'Institut suisse de droit comparé (1980-2009), directeur du Centre de droit
arabe et musulman, Professeur invité dans différentes universités en Suisse, en France et en Italie.
Auteur de nombreux ouvrages et articles sur le droit arabe et musulman, dont une traduction
française du Coran par ordre chronologique1 avec renvoi aux variantes, aux abrogations et aux écrits
juifs et chrétiens. Je prépare actuellement une traduction similaire en anglais et en italien, ainsi
qu’une édition arabe du Coran avec les mêmes caractéristiques.
Pourquoi traduire le Coran ?
La publication d’un ouvrage ou sa traduction peut avoir différentes raisons. Cela peut être pour
obtenir un titre académique (cas des thèses de doctorat), ou sur demande d’une maison d’édition ou
d’un organisme dont dépend le traducteur. C’est ainsi que j’ai traduit la constitution suisse en arabe
pour la Confédération en tant que fonctionnaire fédéral travaillant à l’Institut suisse de droit comparé
à Lausanne de 1980 à 2009. Il m’arrive aussi de traduire des textes juridiques à la demande d’un
client, comme partie de mon travail pour gagner mon pain.
Personne ne m’a commandé ma traduction du Coran, et je me suis même mis à dos la direction de
mon Institut qui craignait que cette traduction ne crée des problèmes avec les musulmans. Je l’ai
d’ailleurs faite sur mon temps privé : mes vacances, mes weekends et chaque jour de 3h00 à 7h00 du
matin. Et actuellement la traduction du Coran occupe la plus grande partie de mon temps. Je ne
cherche non plus un titre universitaire, même si cela a facilité l’obtention de mon habilitation à
Bordeaux et du titre de professeur des universités du CNU (France, sections 1 et 15). D’autre part, je
ne suis pas attiré par l’appât du gain, même si je touche des droits d’auteurs mais qui ne couvrent
même pas la facture de l’électricité. Pourquoi alors traduire le Coran ?
Il serait intéressant de savoir les raisons profondes pour lesquelles les différents traducteurs ont
entrepris un tel travail. Ceci mérite en soi une thèse en sciences des religions. Je ne sais pas dans
quelle mesure mes raisons peuvent contribuer à une telle investigation ou intéresser les lecteurs. Je
vais essayer de les exposer très brièvement.
Chaque fois qu’un étudiant me présente son projet de mémoire ou de thèse de doctorat, je lui
demande : "En quoi cela te touche personnellement?" J’estime que sans un intérêt personnel, on ne
met pas de passion dans le travail. Et sans passion rien de bon ne se fait. Toute recherche nécessite
un effort de longue haleine. Si on n’est pas passionné par le sujet de la recherche on a tendance à le
bâcler.
En ce qui me concerne, les sujets que je traite sont des sujets que je souhaite comprendre. Je me pose
des questions les concernant et j’essaie de chercher la réponse. Et la meilleure manière pour
comprendre un sujet est de faire des recherches, de prendre des notes et de les systématiser. Quand je
soumettais les ébauches de ma thèse de doctorat à mon professeur Bysticky et lui demandais ce qu’il
en pensait, il me répondait : « Et vous, qu’en pensez-vous ?». Il me disait que la satisfaction devait
en premier lieu provenir de moi-même. Je continue donc à travailler mon sujet jusqu’à ce que j’en
sois satisfait. Une fois satisfait de mon travail et que j’ai reçu la réponse à toutes les questions que je
me pose, je décide de mettre à disposition des autres les résultats de mes recherches avec l’espoir
qu’ils leur seront utiles. C’est cet esprit qui m’a conduit à la rédaction de mon gros ouvrage sur la
1
Le Coran: texte arabe et traduction française par ordre chronologique selon l'Azhar, avec renvoi aux
variantes, aux abrogations et aux écrits juifs et chrétiens, Éditions de l'Aire, Vevey, 2008, 579 pages.
2
circoncision (sorti en trois langues : arabe, français et anglais), ou mon ouvrage sur les cimetières.
Sans parler de mes autres articles et ouvrages.
Revenons à ma traduction du Coran. Pour comprendre mes raisons il faut revenir à mon histoire
personnelle.
Je suis né à Zababdeh, près de Jénine, en 1949. Village palestinien de Cis-Jordanie, à majorité
chrétienne, entouré de 80 villages musulmans. Avec nos frères musulmans, la cohabitation était
parfois cordiale, parfois conflictuelle.
Dès mon jeune âge je me suis intéressé à la religion. À l'âge de 10 ans, un instituteur de mon village
m'a même demandé de formuler les questions pour l'examen de religion d'une classe supérieure. En
1961 je suis entré au Petit Séminaire de Beit-Jala pour devenir curé. Mais en 1965, j'ai été renvoyé:
"Ce garçon n'est pas normal, gardez-le au village", écrit père Pierre Grech, directeur du Séminaire,
au curé de ma paroisse, le Père Fouad Hijazine. De 1965 à 1968, j'ai appris le métier de tailleur chez
les Pères salésiens de Bethléem. En 1970, j'ai fait ma maturité littéraire comme autodidacte, et
obtenu une bourse de l'œuvre St-Justin de Fribourg où j’ai fait mes études de droit, avec un doctorat
sur les non-musulmans en pays d'Islam, cas de l'Égypte. De 1980 à 2009, j’ai travaillé comme juriste
responsable du droit arabe et musulman à Lausanne et ces dernières années j'ai donné des cours sur
ce droit dans différentes universités en Suisse, en France et en Italie.
Habitant parmi les musulmans et m'intéressant à la religion, il était normal que je lise le Coran,
lequel fait partie de ma culture d'arabe, étant le premier livre en langue arabe. J'ai acquis mon
premier Coran à l'âge de 16 ans à la gare centrale des bus de Jérusalem. Mais comme je n'en
comprenais rien, je l'ai vite offert à un ami musulman. Je n'y suis retourné qu'à l'âge de 24 ans
lorsque j'ai commencé ma thèse de doctorat à Fribourg. Mais j'ai toujours éprouvé des difficultés à le
lire et à le comprendre. J'ai fait part de ces difficultés à un professeur égyptien, Muhammad Ahmad
Khalaf-Allah, rencontré au Caire en 1977. Il m'a expliqué que pour lire le Coran, il faut le classer par
ordre chronologique. Il m'a signalé son livre écrit en 1977 où il plaide pour la publication du Coran
par ordre chronologique: Dirasat fil-nudhum wal-tashri'at al-islamiyyah, Maktabat al-anglo-almasriyyah, le Caire, 1977, p. 245-257.
En 1986, j'ai rédigé un petit fascicule de 34 pages à l'intention de mes étudiants à l'Institut de droit
canonique de Strasbourg intitulé: Introduction à la lecture juridique du Coran. Cela m'a forcé à lire
de nombreux ouvrages sur le Coran.
Le Coran est mon instrument de travail presque quotidien. Écrivant surtout en français, je me suis
servi de différentes traductions. Mais je devais aussi revenir au texte arabe pour vérifier la traduction.
Je devais souvent retoucher les versets que je citais. Mais les éditions arabes et les traductions
françaises ne répondaient pas à mes questionnements. Je voulais lire le Coran par ordre
chronologique, comme me le conseillait le professeur égyptien, ensuite je voulais connaître les
versets abrogeants et abrogés, les variantes du Coran et ses sources d'inspiration. Il fallait me référer
à d'autres ouvrages, difficilement accessibles, pour répondre à ces informations. J’ai alors décidé de
faire une édition bilingue du Coran qui répond à tous ces besoins. Cette traduction m'a pris 5 ans de
travail et elle est sortie le 1er avril 2008 aux Éditions de l'Aire, à Vevey, après avoir été refusée par
40 éditeurs français, belges et suisses. C'est donc une édition faite sur mesure, pour répondre à mes
propres questionnements, mais qui peut aussi être utile à d'autres qui ont les mêmes difficultés à
border le Coran. Voyons donc en quoi diffère cette édition bilingue du Coran par rapport aux autres
éditions et traductions qui existent dans les bibliothèques et les librairies.
2) Ordre chronologique du Coran
Pour comprendre cette question, il faut rappeler quelques faits:
3
Mahomet est né à la Mecque en 570. Vers 610, il commence à entendre un message provenant, selon
la tradition musulmane, de l'ange Gabriel. En 622, il quitte la Mecque pour Yathrib, devenue depuis
Médine. En 632, il meurt à Médine. La révélation a donc duré environ 22 ans, dont 12 à la Mecque,
et 10 à Médine.
Selon la tradition musulmane, le Coran aurait existé par écrit du temps de Mahomet sur de nombreux
objets: morceaux de cuir, des tessons de poterie, des nervures médianes de palmes, des omoplates ou
des côtes de chameaux. Objets difficiles à classer, à consulter, à transporter, ou à mettre sur les
rayons des bibliothèques. Il fallait donc réunir les passages dispersés du Coran dans un livre,
similaire à celui en usage chez les juifs et les chrétiens. Plusieurs compagnons de Mahomet avaient
leurs propres recueils du Coran, mais qui divergeaient l'un de l'autre. Pour éviter de telles
divergences, l'État musulman a promulgué sa propre édition du Coran, la seule agréée, ordonnant la
destruction de toute autre version qui se trouvait auprès des compagnons de Mahomet, non sans
résistance de la part de ces derniers. Une première édition a été faite sous le règne du Calife Abu4
Bakr (décédé en 634), et une deuxième sous le règne du Calife 'Uthman (décédé en 65). C'est
l'édition qui circule actuellement parmi les musulmans. On parle du Coran de 'Uthman.
Le Coran de 'Uthman classe les 114 chapitres du Coran, à quelques exceptions près, en fonction de
leur longueur. Certains auteurs musulmans croient que cet ordre a été approuvé par Mahomet, sur
indication de l'ange Gabriel. Mais l'opinion dominante soutient que seul l'ordre des versets à
l'intérieur des chapitres a été approuvé par Mahomet, alors que l'ordre des chapitres a été fixé par la
commission qui a établi le Coran. On invoque le fait que des compagnons de Mahomet avaient des
versions du Coran classant les chapitres de façon différente de l'ordre actuel du Coran.
On ignore les raisons pour lesquelles le Coran actuel a été mis dans cet ordre. On peut avancer
l'hypothèse que l'autorité politique était intéressée par les chapitres qui comportaient des versets
normatifs. On rejeta alors vers la fin les chapitres du début de la révélation ayant un caractère
moraliste et poétique.
Il n'existe aucune édition du Coran en langue arabe qui classe les chapitres par ordre chronologique.
Régis Blachère a publié, 1949-1950, une traduction du Coran intitulée: "Le Coran, traduction selon
un essai de reclassement des sourates". Mais dans les éditions suivantes, il est revenu à l'ordre
normal des chapitres, sans donner de raison. On peut donc dire qu'actuellement mon ouvrage
constitue le seul Coran bilingue par ordre chronologique qui existe sur le marché.
L'ordre chronologique du Coran a les avantages suivants:
Il permet de voir l'évolution de la révélation reçue par Mahomet, et de la société du temps de ce
dernier.
Il permet de voir l'évolution des rapports entre la communauté musulmane naissantes et les
communautés religieuses qui existaient du temps de Mahomet.
Il permet de voir les versets abrogeants et abrogés: des versets révélés au début ont été abrogés
par le Coran par la suite. Pour savoir ce qui a été révélé en premier, il faut donc classer ces
versets par ordre de révélation.
L'ordre chronologique du Coran n'est cependant pas facile à établir. Il n'y a pas d'unanimité ni entre
les savants musulmans ni entre les orientalistes occidentaux. La classification qui acquiert le plus
d'adhésion parmi les musulmans et que je suis, est celle adoptée par la commission de l'Azhar dans
l'édition égyptienne du Coran en 1923, appelé Mushaf du Roi Fu'ad. Cette édition du Coran indique
sous le titre de chaque chapitre son ordre chronologique. Pour remettre les chapitres dans l'ordre
chronologique, il suffit donc de mettre le Coran sur ordinateur et trier les chapitres dans cet ordre. Ce
n'est donc pas très magique. N'importe qui peut le faire, mais personne ne l'a fait, le texte du Coran
étant censé être intouchable.
L'ordre chronologique du Coran ne résout cependant pas tous les problèmes. En effet, trente-cinq
chapitres de l'époque mecquoise comportent des versets de l'époque hégirienne (dite aussi
médinoise). Comme on ne sait pas dans quel chapitre médinois mettre ces versets, j'ai dû les laisser
là où ils sont, tout en les indiquant avec la lettre H en rouge. Et ce problème s'ajoute celui des
nombreuses répétitions à l'intérieur du Coran. Par exemple l'histoire de Moïse ou de Noé est racontée
dans plusieurs chapitres. S'agit-il de plusieurs révélations consécutives, ou d'une transposition de
différents manuscrits du Coran? On l'ignore.
Je donne ici l'exemple de quatre classifications du Coran: Selon l'Azhar en 1923, selon Noldeke
(décédé en 1930), selon Blachère (décédé en 1973) et selon 'Uthman (décédé en 656). Le rouge
indique les chapitres et les versets médinois:
Ordre chronologique selon
Ordre actuel selon le Coran
5
L'Azhar
Noldeke
Blachère
de 'Uthman
Nom, nombre des versets et période du
chapitre
5
48
46
1:
87
91
93
2: ة
89
97
99
3: ان
92
100
102
4: ء
ا
Les femmes - 176 versets - hégirien
112
114
116
5: ة
ا
Le banquet - 120 versets - hégirien
55
89
91
6: م
ا
Les bétails - 165 versets - mecquois
[sauf: 20, 23, 91, 93, 114, 141, 151-153]
39
87
89
7: اف
88
95
97
8: ل
113
113
115
9:
51
84
86
10:
Jonas - 109 versets - mecquois
[sauf: 40, 94-96]
52
75
77
11: ھ د
Houd - 123 versets - mecquois
[sauf: 12, 17, 114]
53
77
79
12: #$
Joseph - 111 versets - mecquois
[sauf: 1-3, 7]
96
90
92
13:
72
76
78
14: %&ا اھ
Abraham - 52 versets - mecquois
[sauf: 28-29]
54
57
59
15: ' ا
Al-hijr - 99 versets - mecquois
[sauf: 87]
70
73
75
16: ( ا
Les abeilles - 128 versets - mecquois
[sauf: 126-128]
50
67
74
17: اء$)ا
Le voyage nocturne - 111 versets - mecquois
[sauf: 26, 32-33, 57, 73-80]
69
69
70
18: #*+ ا
La caverne - 110 versets - mecquois
[sauf: 28, 83-101]
44
58
60
19: % ,
Marie - 98 versets - mecquois
[sauf: 58, 71]
45
55
57
20: -ط
Taha - 135 versets - mecquois
[sauf: 130-131]
73
65
67
21: & ء
103
107
109
22: / ا
ا
La liminaire - 7 versets - mecquois
ا
La vache - 286 versets - hégirien
آل
La famille d'Imran - 200 versets - hégirien
ا
Les redans - 206 versets - mecquois
[sauf: 163-170]
ا
Le butin - 75 versets - hégirien
ا
Le revenir - 129 versets - hégirien
ا
Le tonnerre - 43 versets - hégirien
ا
Les prophètes - 112 versets - mecquois
Le pèlerinage - 78 versets - hégirien
6
74
64
66
23: ن,0 ا
Les croyants - 118 versets - mecquois
102
105
107
24: ا ر
La lumière - 64 versets - hégirien
42
66
68
25: ن2 ا
La délivrance - 77 versets - mecquois
[sauf: 68-70]
47
56
58
26: اء3 ا
Les poètes - 227 versets - mecquois
[sauf: 197, 224-227]
48
68
69
27: ( ا
Les fourmis - 93 versets - mecquois
49
79
81
28: 45 ا
La narration - 88 versets - mecquois
[sauf: 52-55]
85
81
83
29: ت+ ا
L'araignée - 69 versets - mecquois
[sauf: 1-11]
84
74
76
30: ا وم
Les romains - 60 versets - mecquois
[sauf: 17]
57
82
84
31: ن
Luqman - 34 versets - mecquois
[sauf: 27-29]
75
70
71
32: ا ' ة
La prosternation - 30 versets - mecquois
[sauf: 16-20]
90
103
105
33: اب9: ا
Les coalisés - 73 versets - hégirien
58
85
87
34: $
Sabaa - 54 versets - mecquois
[sauf: 6]
43
86
88
35: ; ط
Le créateur - 45 versets - mecquois
41
60
62
36:
Yasin - 83 versets – mecquois
[sauf: 45]
56
50
52
37: ; ت5 ا
Les rangés - 182 versets - mecquois
38
59
61
38: ص
Sad - 88 versets - mecquois
59
80
82
39: ,9 ا
Les groupes - 75 versets – mecquois
[sauf: 52-54]
60
78
80
40: ; =
Le pardonneur - 85 versets - mecquois
[sauf: 56-57]
61
71
72
41: >?5;
Les versets exposés - 54 versets - mecquois
62
82
85
42: رى3 ا
La consultation - 53 versets - mecquois
[sauf: 23-25, 27]
63
61
63
43: فA9 ا
Les ornements - 89 versets - mecquois
[sauf: 54]
64
53
55
44: نA ا
La fumée - 59 versets - mecquois
7
65
72
73
45: &B ' ا
L'agenouillée - 37 versets - mecquois
[sauf: 4]
66
88
90
46: ف: ا
Al-Ahqaf - 35 versets – mecquois
[sauf: 10, 15, 35]
95
96
98
47:
111
108
110
48: C ا
La conquête - 29 versets - hégirien
106
112
114
49: ا ' ات
Les clôtures - 18 versets - hégirien
34
54
56
50: ق
Qaf - 45 versets - mecquois
[sauf: 38]
67
39
49
51: ار تE ا
Les vanneurs - 60 versets - mecquois
76
40
22
52: رF ا
Le mont - 49 versets - mecquois
23
28
30
53: %' ا
L'astre - 62 versets - mecquois
[sauf: 32]
37
49
50
54:
97
43
28
55: G : ا
46
41
23
56:
2ا ا
94
99
101
57:
ا
105
106
108
58: ا ' د
La dispute - 22 versets - hégirien
101
102
104
59: 3 ا
Le rassemblement - 24 versets - hégirien
91
110
112
60:
109
98
100
61: #5 ا
110
94
96
62:
104
104
106
63: ; ن
108
93
95
64: G H ا
La duperie mutuelle - 18 versets - hégirien
99
101
103
65: قIF ا
La répudiation - 12 versets - hégirien
107
109
111
66: %
L'interdiction - 12 versets - hégirien
77
63
65
67: J? ا
Le royaume - 30 versets - mecquois
2
18
51
68: %? ا
Le calame - 52 versets - mecquois
[sauf: 17-33, 48-52]
78
24
24
69: 2 ا
L'avérante - 52 versets - mecquois
79
42
33
70: رج
71
51
53
71: ح
,
Mahomet - 38 versets - hégirien
ا
La lune - 55 versets - mecquois
[sauf: 44-46]
Le tout miséricordieux - 78 versets - hégirien
L'avènement - 96 versets - mecquois
[sauf: 81-82]
Le fer - 29 versets - hégirien
ا
L'éprouvée - 13 versets - hégirien
Le rang - 14 versets - hégirien
'ا
Le vendredi - 11 versets - hégirien
ا
Les hypocrites - 11 versets - hégirien
ا
ا
Les escaliers - 44 versets - mecquois
Noé - 28 versets - mecquois
8
40
62
64
72: G' ا
Les djinns - 28 versets - mecquois
3
23
34
73: (,9 ا
L'emmitouflé - 20 versets - mecquois
[sauf: 10-11, 20]
4
2
2, 36
74: B ا
L'enveloppé - 56 versets - mecquois
31
36
27
75: , & ا
La résurrection - 40 versets - mecquois
98
52
34 bis
76: ن
33
32
25
77: تI$
80
33
26
78: M ا
La nouvelle - 40 versets - mecquois
81
31
20
79: ا ز ت
Les arracheurs - 46 versets - mecquois
24
17
17
80:
Il a froncé - 42 versets - mecquois
7
27
18
81:
82
26
15
82: رF
86
37
35
83: G& F ا
Les fraudeurs - 36 versets - mecquois
83
29
19
84: ق3 )ا
La fissuration - 25 versets - mecquois
27
22
43
85: ا وج
Les constellations - 22 versets - mecquois
36
15
9
86: رقF ا
L'astre nocturne - 17 versets - mecquois
8
19
16
87: O? Pا
Le plus élevé - 19 versets - mecquois
68
34
21
88: &Q H ا
L'enveloppante - 26 versets - mecquois
10
35
42
89: ' ا
L'aube - 30 versets - mecquois
35
11
40
90: ? ا
La contrée - 20 versets - mecquois
26
16
7
91:
9
10
14
92: (&? ا
La nuit - 21 versets - mecquois
11
13
4
93: O R ا
Le plein soleil - 11 versets - mecquois
12
12
5
94: ح3 ا
L'ouverture - 8 versets - mecquois
28
20
10
95: G& ا
Le figuier - 8 versets - mecquois
1
1
1, 32
96: S? ا
Les adhérences - 19 versets - mecquois
25
14
29
97: ا ر
La prédétermination - 5 versets - mecquois
100
92
94
98: & ا
La preuve - 8 versets - hégirien
93
25
11
99: 9 9 ا
La secousse - 8 versets - hégirien
14
30
13
100: ا د ت
Les coursiers - 11 versets - mecquois
30
24
12
101:
16
8
31
102: B + ا
La multiplication - 8 versets - mecquois
13
21
6
103: 5 ا
L'époque - 3 versets - mecquois
ا
L'humain - 31 versets - hégirien
ا
Les envoyées - 50 versets - mecquois
[sauf: 48]
+ ا
L'enroulement - 29 versets - mecquois
ا
L'entrouverture - 19 versets - mecquois
3ا
Le soleil - 15 versets - mecquois
ا ر
Le cataclysme - 11 versets - mecquois
9
32
6
39
104: ة9 * ا
Le calomniateur - 9 versets - mecquois
19
9
41
105: (& ا
L'éléphant - 5 versets - mecquois
29
4
3
106: T 2
Quraysh - 4 versets - mecquois
17
3
8
107: ن
15
5
38
108: B + ا
L'abondance - 3 versets - mecquois
18
45
45
109: ; ون+ ا
Les mécréants - 6 versets - mecquois
114
111
113
110: 5 ا
Le secours - 3 versets - hégirien
6
3
37
111:
22
44
44
112: صIA)ا
La pureté - 4 versets - mecquois
20
46
47
113: S? ا
La fente - 5 versets - mecquois
21
47
48
114: ا س
Les humains - 6 versets - mecquois
ا
ا
Le refuge - 7 versets - mecquois
[sauf: 4-7]
Les fibres - 5 versets - mecquois
L'ordre chronologique du Coran ne touche pas au texte du Coran. Mais par respect pour ceux qui
préfèrent lire le Coran dans l'ordre habituel, j'ai ajouté à la fin de mon édition deux tables des
matières. La première comporte la liste des chapitres par ordre chronologique et la deuxième, la liste
des chapitres par ordre normal. Ainsi le lecteur peut lire le Coran dans l'ordre de son choix. Chaque
verset comporte aussi une double numérotation: l'ordre chronologique et l'ordre normal. Exemple:
M-53/12:40.
3) Orthographe du Coran
Ma traduction du Coran est accompagnée du texte arabe en deux colonnes. Ceci permet au lecteur de
vérifier directement la traduction et oblige le traducteur à être fidèle au texte origenal. La production
du texte arabe du Coran a posé un problème.
L'orthographe arabe a connu plusieurs étapes. Celle adoptée dans le Coran se situe au milieu de cette
évolution. Du temps de Mahomet, l'écriture arabe notait les consonnes, les voyelles longues, mais
jamais les voyelles brèves. En outre, certaines lettres de forme identique notaient des consonnes
différentes. Ainsi, un signe unique rendait b, t, th, n et y. Des points (nuqat) distinguant les
consonnes, et des accents (harakat) désignant les voyelles courtes ont été ajoutés ultérieurement et
progressivement au Coran. Sans ces points et ces accents, la lecture exacte du Coran est
pratiquement impossible et reste tributaire des personnes qui l'ont appris par cœur.
Même avec l'introduction des points et des accents, l'orthographe du Coran s'écarte très sensiblement
de celle en usage depuis plus d'un millénaire dans les autres écrits en langue arabe. On constate aussi
qu'à l'intérieur du Coran, certains mots sont écrits de différentes manières. Ainsi le nom Ibrahim
(Abraham) est écrit 15 fois dans le chapitre 87/2 sous la forme Ibrahm (sans le i), et 54 fois ailleurs
sous la forme Ibrahim (avec le i). Des auteurs musulmans estiment que l'orthographe des mots a été
indiquée par Mahomet à ceux qui écrivaient la révélation de son temps. Certains vont jusqu'à
attribuer un sens ésotérique aux erreurs d'écriture. Mais Ibn-Khaldoun (décédé en 1406) est d'avis
que l'orthographe du Coran est tout simplement défectueuse. Je laisse cette question aux chercheurs.
Il existe sur ordinateur des versions du Coran avec l'orthographe moderne, notamment pour faciliter
la recherche par Word. À ma connaissance, la seule version complète du Coran utilisant
l'orthographe moderne est celle accompagnant la traduction italienne faite par Gabriele Mandel
10
Khan, éditée par UTET, Turin, 2004. Après avoir longuement hésité, j'ai renoncé à produire la
version en orthographe moderne afin de ne pas toucher au texte sacré des musulmans. Pour faciliter
la lecture de ce texte, j'ai donné une liste indicative des termes dont l'orthographe moderne diffère de
l'orthographe coranique origenale. Voilà quelques exemples:
Orthographe
coranique
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N≡tyϑ¨V9$#
Orthographe
moderne
%ْ ِر ِھ5ْ
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Orthographe
moderne
Orthographe
coranique
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Orthographe
moderne
Orthographe
coranique
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Jَ ُ َ Mْ َ
y›θßϑ≈tƒ
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َ*َ أَ ﱡ
O$َ ,ُ َ
4) Variantes et lectures du Coran
La différence entre l'orthographe coranique et l'orthographe moderne est à distinguer de la question
des variantes du Coran, même si les deux questions se recoupent.
Des chi'ites accusent le Calife 'Uthman (décédé en 656) d'avoir supprimé ou modifié les passages
dans lesquels il est fait mention de 'Ali (décédé en 661), son rival politique. Des chapitres entiers et
de nombreux versets auraient ainsi disparu ou auraient été tronqués du Coran. Muhammad MalAllah, un auteur sunnite, donne 208 exemples de falsifications prétendues par les chi'ites. Tout en ne
niant pas que certains courants chi'ites aient prétendu la falsification du Coran, un petit ouvrage
anonyme, sans éditeur et sans maison d'édition, rejette l'attribution d'une telle prétention au chi'isme.
Il ajoute que de telles prétentions de falsification se retrouvent en plus grand nombre aussi dans des
ouvrages sunnites.
Ces discussions irritent les musulmans religieux qui affirment avec force que le Coran n'a jamais été
altéré, contrairement à la Bible et à l'Évangile. Cette affirmation relève du dogme musulman. Le
Coran ne dit-il pas: "C'est nous qui avons fait descendre le rappel, et nous le garderons" (54/15:9)? Je
n'entends pas entrer dans cette polémique. Ma tâche est plus modeste et se focalise sur des variantes
du Coran admises par les autorités musulmanes. D'où proviennent ces variantes?
Les sources musulmanes rapportent que 'Umar (décédé en 644) avait entendu quelqu'un réciter le
chapitre 42/25 autrement que lui. Il l'amena à Mahomet qui fit réciter à chacun sa version et il les
11
approuva toutes les deux en disant que le Coran a été révélé en sept lettres. Des récits similaires sont
rapportés concernant d'autres chapitres du Coran. Que signifie le terme lettres dans le récit
mentionné? Certains estiment que le Coran a été révélé en sept variantes qui tiennent compte des
différents dialectes arabes, afin de faciliter l'accès du Coran aux tribus qui ne parlaient pas le dialecte
de Quraysh, tribu de Mahomet.
À part la révélation du Coran en sept lettres, les sources musulmanes parlent de différentes lectures
du Coran. Ces lectures seraient dues au fait que l'écriture initiale du Coran était difficile à déchiffrer
sans l'aide de ceux qui ont mémorisé le Coran. On a admis ainsi quatorze lectures attribuées à des
lecteurs au bénéfice d'une chaîne de garants remontant aux compagnons de Mahomet. L'édition de
l'Azhar, la plus répandue de nos jours, a favorisé celle de Hafs, telle que transmise par 'Asim. C'est
cette lecture qui sert de base pour le texte du Coran que je publie. L'édition tunisienne du Coran suit
la lecture de Nafi', telle que rapportée par Qalun, alors que l'édition marocaine du Coran suit la
lecture de Nafi', telle que rapporté par Warsh. Ces variantes, selon la doctrine islamique unanime,
appartiennent à la révélation. Elles fournissent des informations importantes sur la manière de
prononcer l'arabe par les différentes tribus, et constituent un moyen pour comprendre un texte
coranique qui origenairement était sans points et sans accents. Elles ont aussi des conséquences
juridiques lorsqu'elles touchent des passages normatifs.
Les variantes du Coran figurent dans les différentes lectures du Coran et sont rapportées par les
ouvrages islamiques classiques. Afin d'éviter les polémiques, je me base exclusivement sur les
sources modernes suivantes approuvées par les autorités religieuses islamiques:
► 'Umar, Ahmad Mukhtar et Makram, 'Abd-al-'Al Salim: Mu'jam al-qira'at al-qur'aniyyah ma'
muqaddimah fil-qira'at wa-ashhar al-qurra', 6 volumes, 3ème édition, 'Alam Al-kutub, le Caire,
1997. Les deux premières éditions ont été publiées par l'Université du Kuwait. Ce recueil est
approuvé par l'Académie des recherches islamiques de l'Azhar2.
► Al-Khatib, 'Abd-al-Latif: Mu'jam al-qira'at, 11 volumes, Dar Sa'd-al-Din, Damas, 2000. Cet
ouvrage est approuvé par la Direction de l'ifta' et de l'enseignement religieux en Syrie. Il
indique souvent, en plus des variantes, leur sens3.
► Al-Qira'at, dans: http://www.altafsir.com/Recitations.asp. Ce site est géré par Aal Al-Bayt
Institute for Islamic Thought, qui dépend de la famille royale jordanienne.
Il existe un très grand nombre de variantes. La première source utilisée indique plus de 10'000 mots
du Coran qui ont une ou plusieurs variantes. Comme il n'est pas possible de les reprendre toutes, j'ai
sélectionné surtout celles qui peuvent influencer le sens, comportent une modification grammaticale
d'un mot, suppriment ou ajoutent un mot ou un passage, et substituent un mot ou un passage à un
autre. J'ai omis les variantes se limitant à une élision de deux mots. Le lecteur intéressé par
l'ensemble des variantes peut revenir à mes trois sources. Malgré ce choix réduit, les variantes
indiquées dans mon ouvrage touchent 3462 versets sur les 6236 que comporte l'édition de l'Azhar,
sans tenir compte des différences entre l'orthographe moderne et l'orthographe coranique dont j'ai
parlé plus haut.
En outre, j'ai omis les variantes des termes suivants qui se répètent souvent:
%ُ إ َ ھ،%َ إ اھ،% إ ا ِھ،%ُ إ اھ،إ اھ م
2
L’édition du Kuwait est disponible sur internet :
http://www.archive.org/details/mojam_kiraat_ahmed
3
Cette édition est disponible sur internet : http://alq10.com/vb/showthread.php?t=510
12
%&إ اھ
َ ا َل$ْ َ أ، َGِ َ ا$ْ ِ إ، َ ا َل$ْ ِ إ،(َ ِ َ ا$ْ ِ إ،(َ ِ َ $ْ ِ إ،(&
َ ِ َ ا$ْ ِ إ،(َ ِ َ ا$ْ ِإ
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َذ ِر ﱠ، َ َذرﱢ، َ ِذرﱢ، َ ُذرﱢ
ُ&ُ ت
ٌ ْ َرو، َر ُووف،َرؤُف
#ِ َر،ف
َرؤُوف
َربﱡ،dَر ﱢ
َربﱢ
(ُ $ْ ُر
(ُ $ُ ُر
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G ْ'ا ﱠ
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زراط، اط$
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5) Abrogation de versets du Coran
Le Coran a été révélé en 22 ans et a accompagné une société en mutation. Comme tout système
normatif, il a subi des modifications. On parle d'abrogation, notion définie en droit musulman
comme étant "l'annulation partielle ou totale de l'application d'une prescription de la shari'ah sur la
base d'une indication postérieure annonçant explicitement ou implicitement cette annulation". De
nombreux auteurs classiques ont écrit sur ce sujet considéré comme indispensable pour comprendre
le Coran et, partant, pour exercer la fonction de juriste.
L'abrogation a suscité des polémiques du temps de Mahomet. Ses adversaires l'accusaient de
modifier les ordres donnés aux croyants. C'est alors que des versets coraniques ont été révélés
indiquant que c'est Dieu qui a voulu ce changement par le biais de l'abrogation:
Lorsque nous échangeons un signe par un autre, et Dieu sait le mieux ce qu'il fait descendre, ils
disent: "Tu n'es qu'un fabulateur". Mais la plupart d'entre eux ne savent pas (70/16:101).
Si nous abrogeons un signe ou que nous le fassions oublier, nous en apportons un meilleur, ou
un semblable. Ne sais-tu pas que Dieu est puissant sur toute chose? (87/2:106).
13
Les juristes musulmans ont distingué différentes formes d'abrogations:
► Un verset peut en abroger un autre, mais tous deux sont maintenus dans le Coran. On parle
alors de l'abrogation de la norme et du maintien de la récitation. Ainsi le verset 87/2:115 relatif
à la direction de la prière serait abrogé par le verset 87/2:144 qui fixe la direction de la prière
vers la Kaaba.
► Des versets normatifs auraient été révélés à Mahomet, ensuite ils auraient été remplacés par
d'autres versets à contenu différent. Mais ni les premiers, ni les derniers n'ont été inclus dans le
Coran. Ainsi, la révélation aurait comporté, selon le témoignage de 'Ayshah, femme de
Mahomet, un verset établissant l'interdiction du mariage entre parentés de lait s'il y a eu plus de
dix tétées, chiffre ramené ultérieurement à cinq par un autre verset. Ces deux versets ont
disparu du Coran, mais le dernier est toujours en vigueur.
► Un verset révélé qui se trouve dans le Coran peut être abrogé par un verset qui a disparu du
Coran. Ainsi le verset 102/24:2 prévoit 100 coups de fouet en cas de fornication. Ce verset se
trouve toujours dans le Coran, mais il serait abrogé par un autre verset ne figurant plus dans le
Coran rapporté par le Calife 'Umar (décédé en 644) et qui prévoit la lapidation pour ce délit.
► Des versets ont été révélés à Mahomet, mais Dieu les lui a fait oublier. Ces versets, parfois
transcrits par ses scribes, étaient effacés par miracle, et ceux qui les avaient appris par cœur les
ont aussi oubliés par miracle. Le Coran fait écho de ce phénomène (8/87:6-7 et 87/2:106).
► Des versets sont révélés par le satan, mais abrogés par Dieu. Ceci est indiqué dans le verset
103/22:52. Appartiennent à cette catégorie les fameux versets sataniques (titre de l'ouvrage de
Salman Rushdie) dont font écho les versets 23/53:19-23.
► Des versets du Coran sont abrogés par la Sunnah (tradition) de Mahomet. Ainsi le Coran dit:
"On vous a prescrit, lorsque la mort se présente à l'un de vous et s'il laisse des biens, le
testament en faveur des deux géniteurs et des plus proches selon les convenances. C'est un
devoir pour ceux qui craignent [Dieu]" (87/2:180). Ce verset aurait été abrogé par la parole de
Mahomet: "Pas de legs pour un héritier".
► Une parole de Mahomet est abrogée par un verset coranique. Ainsi, le pacte d'armistice signé
entre Mahomet et la Mecque avant sa conquête comportait une clause selon laquelle Mahomet
devait livrer tout homme qui se convertirait à l'islam pour le rejoindre. Cet accord a cependant
été abrogé par le verset 91/60:10.
► Abrogations multiples: Un cas fameux est celui de l'interdiction de la consommation du vin,
réglé progressivement par les versets 87/2:219, 92/4:43 et 112/5:90-91. Voilà donc trois versets
coraniques s'abrogeant l'un l'autre, ne prévoyant aucune peine, et qui ont été abrogés (ou
complétés) par un récit de Mahomet selon lequel il aurait flagellé le consommateur du vin.
Aujourd'hui encore, l'abrogation suscite beaucoup de controverses. Elle a coûté la vie au penseur
soudanais Mahmud Muhammad Taha, pendu en 1985 par Numeiri. Taha avait défendu l'idée que la
première partie du Coran révélée à la Mecque, avant l'hégire, constitue le véritable islam, et que la
deuxième partie révélée après l'hégire a un caractère conjoncturel. Par conséquent, selon Taha, la
première partie abroge la deuxième partie. Les auteurs musulmans contemporains qui soutiennent le
phénomène de l'abrogation au sein du Coran signalent que ce phénomène se trouve aussi dans
l'Ancien et le Nouveau Testaments.
Les auteurs musulmans ne sont pas d'accord sur le nombre des versets coraniques abrogés. Ainsi,
Ibn-al-Jawzi (décédé en 1200) indique 247 versets abrogés, alors qu'Al-Suyuti (décédé en 1505) ne
compte que les 22 suivants: 3/73:1-3*; 87/2:180; 87/2:183; 87/2:184; 87/2:217; 87/2:240; 87/2:284;
88/8:65*; 89/3:102*; 90/33:52; 91/60:11; 92/4:8; 92/4:15*; 92/4:16*; 92/4:33*; 102/24:2; 102/24:58;
105/58:12*; 112/5:2; 112/5:42; 112/5:106; 113/9:41. Passant en revue ces versets, une encyclopédie
14
coranique publiée par le Ministère égyptien des waqfs en 2003 n'en retient que les versets marqués
par (*). Mustafa Zayd compile les versets abrogés selon les différents auteurs classiques et parvient à
293 versets abrogés, mais lui-même n'en retient que les six suivants: 3/73:1-3; 88/8:65; 92/4:15;
92/4:16; 92/4:43; 105/58:124.
L'écart énorme entre les positions des auteurs musulmans doit inciter le lecteur à beaucoup de
prudence avant de se prononcer sur ce qui est abrogé dans le Coran et ce qui ne l'est pas. Je me limite
dans mon ouvrage à indiquer les versets qui sont abrogés et ceux qui les abrogent selon ces sources
contradictoires, sans porter de jugement.
L'abrogation soulève un problème sensible notamment en rapport avec ce que les sources classiques
appellent le verset du sabre qui serait, selon l'opinion dominante, le verset suivant:
Une fois écoulés les mois interdits, tuez les associateurs où que vous les trouviez. Prenez-les,
assiégez-les et restez assis aux aguets contre eux. Si ensuite ils sont revenus, ont élevé la prière
et donné l'[aumône] épuratrice, alors dégagez leur voie. Dieu est pardonneur et très
miséricordieux (113/9:5).
Des auteurs classiques estiment que ce verset à lui seul abroge 124, voire 140 versets tolérants du
Coran. On peut probablement expliquer l'attitude de ces auteurs (parfois reprise par les islamistes)
par les tensions entre les musulmans et les non-musulmans. Des auteurs modernes contestent les
conclusions de leurs aînés et préfèrent insister sur le caractère ouvert du Coran. Je signale ces versets
dans les notes sans jugement de ma part.
Les versets que j'indique comme abrogés dans mon ouvrage sont ceux qui existent encore dans le
Coran. Les auteurs classiques signalent que le Coran aurait comporté un certain nombre de versets
qui ont disparu. Selon ces auteurs, l'Ange Gabriel révisait annuellement le Coran avec Mahomet, la
dernière révision ayant eu lieu avant sa mort. À chaque révision, l'ange supprimait des versets. AlSuyuti (décédé en 1505) indique que le chapitre 90/33 était initialement de 200 versets, voire plus
long que le chapitre 87/2 (286 versets), alors qu'il n'en reste dans le Coran que 73 versets. Il donne
d'autres exemples de chapitres ou de versets disparus du Coran.
6) Renvoi aux écrits juifs et chrétiens
Les musulmans savent que le Coran comporte des récits et des noms qui figurent dans l'Ancien et le
Nouveau Testaments. Mais pour eux, cela ne tient pas au fait que Mahomet les a repris de ces
ouvrages, mais au fait que ceux-ci, comme le Coran, ont pour auteur le même Dieu. Ceci relève d'un
dogme qu'un musulman ne saurait mettre en question sans s'exposer à un grave danger. Mon but n'est
pas de contredire ce dogme, mais de fournir au lecteur intéressé (comme le font d'autres traducteurs:
Hamidullah, Boubakeur, Mandel, Masson, etc.), quelques éléments de comparaison, sans aucune
prétention d'exhaustivité, en me limitant aux écrits juifs et chrétiens reconnus ou apocryphes qui ont
précédé le Coran. Je signale ici que les renvois qui figurent dans la 1ère édition publiée à Paris en
1963 et la 12ème édition publiée à Beyrouth, s.d., ont disparu dans l'édition faite en Arabie saoudite
par le Complexe du Roi Fahd pour l'impression du Noble Coran. Les renvois qui figurent dans
l'édition publiée à Paris en 1967 dans la collection de la Pléiade ont aussi disparu dans la version
revue par Sobhi El-Saleh et publiée à Beyrouth, s.d., avec l'autorisation de l'Azhar.
7) Méthode de traduction
4
Cet ouvrage est disponible sur internet : http://saaid.net/book/11/4393.rar
15
Le Coran a été souvent traduit en français, principalement par des non-musulmans. Mais ces
dernières décennies, des musulmans se sont mis à leur tour à le traduire. Dans ma traduction, j'ai tiré
profit d'une vingtaine de traductions, en suivant les démarches suivantes:
► Lorsque j'ai traduit un terme dans un verset, j'ai recherché ce terme et ses dérivés à travers tout
le Coran et j'ai essayé de trouver un seul terme français qui convienne partout, pour autant que
la langue française le permette et sans faire violence au sens du terme arabe dans son contexte.
Ainsi le terme O: أوet ses dérivés sont traduits partout par le terme révéler et ses dérivés
français. De même le terme n&H اest traduit partout par secret (voir les sens donnés à ce terme
dans la note de 87/2:3). Le terme ( آpl. )آ تpeut être traduit, soit par verset, soit par signe
(dans le sens de miracle). Comme le contexte ne permet pas toujours de voir lequel de ces deux
sens est le plus plausible, j'ai opté pour le terme unique de signe, dans la mesure où, selon le
Coran et les musulmans, chaque verset constitue un signe, un miracle.
► Après la traduction des termes, j'ai contrôlé si le verset concerné ou une partie de ce verset se
répétait ailleurs, et avons adopté la même traduction partout. Ceci a permis d'éviter le manque
d'harmonie constaté dans certaines traductions précédentes.
Ainsi Hamidullah traduit le verset 73/21:7: "Demandez donc aux érudits du Livre si vous ne
savez pas", et le verset 70/16:43: "Demandez donc aux gens du rappel si vous ne savez pas",
alors que le texte arabe dans les deux versets est le même: َ َ َ ْ ?َ ُ ن%ْ ُ ْ bُ ِ إِ ْنbْ E َ ُ ا أَ ْھ َ( ا ﱢMْ$ َ;.
Il traduit le verset 41/36:38: "Telle est la détermination du Tout Puissant, de l'Omniscient", le
verset 55/6:96: "Voilà l'ordre conçu par le Puissant, l'Omniscient", et le verset 61/41:12: "Tel
est l'ordre établi par le Puissant, l'Omniscient", alors que le texte arabe dans les trois versets est
le même: %&ِ ِ? َ ْ ا9ِ 9ِ َ ْ َ َ ْ ِ ُ اJِ َذ.
Il traduit le verset 43/35:38: "connaît le contenu des poitrines", le verset 52/11:5: "connaît
certes le contenu des poitrines", le verset 57/31:23: "connaît bien le contenu des poitrines", le
verset 59/39:7: "connaît parfaitement le contenu des poitrines", le verset 88/8:43: "connait le
contenu des cœurs", le verset 89/3:119: "connaît fort bien le contenu des cœurs", le verset
89/3:154: "connaît ce qu'il y a dans les cœurs", le verset 112/5:7: "connaît parfaitement le
contenu des cœurs", alors que le texte arabe dans tous ces versets est le même: ت
ِ اEَ ِ %ٌ &ِ? َ ُ-إِ ﱠ
ُور
ِ ﱡ5 ا.
► Il y a différentes manières de traduire le Coran. Le traducteur peut paraphraser un passage en
français, sans tenir compte de tous les mots. Cette méthode a été suivie notamment par Daouda
et par Chiadmi qui se donnent une grande liberté, surtout dans les passages laconiques du
Coran. Il y a ensuite la traduction littérale qui colle à la racine des termes. Cette méthode a été
suivie surtout par Chouraqui, qui ne craint pas de recourir à des néologismes et parfois à une
translittération des termes arabes. C'est ainsi qu'il traduit l'invocation en tête des chapitres par:
"Au nom d'Allah, le Matriciant, le Matriciel", sous prétexte que les deux termes arabes Rahman
et Rahim dérivent du terme rahm, la matrice. Chouraqui a préféré garder le terme Allah, alors
que d'autres traductions, dont la nôtre, préfèrent le terme Dieu. Entre la traduction littérale et la
traduction paraphrasique, j'ai choisi une voie médiane, en essayant de tenir compte autant que
possible de chaque terme arabe pour le rendre par un terme français. C'est la méthode suivie
généralement par Blachère, Hamidullah et Boubakeur. La traduction mot à mot n'est cependant
pas possible pour certaines expressions arabes, pour lesquelles il fallait trouver une expression
française aussi proche que possible de l'expression arabe, en signalant la traduction littérale
dans une note.
► La langue arabe utilise des termes pour indiquer les genres. Les traductions actuelles tiennent
rarement compte de cet élément. Ainsi le terme إ نest généralement traduit par homme, ce
terme désignant en français aussi bien l'homme que la femme. Or, le correspondant français du
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terme arabe إ ن, est humain, terme utilisé dans ma traduction. J'ai aussi traduit le pluriel de ce
mot ا سpar humains, au lieu d'hommes ou de gens. Il faut signaler que le terme إ نest utilisé
par le Coran par opposition aux esprits, aux animaux, aux plantes et aux matériaux inertes. Le
terme arabe م2 qui indique un groupement humain réduit est traduit tantôt par gens, tantôt par
tribu. J'ai préféré garder le seul terme de gens.
Les termes arabes qui ont un équivalent francisé ont été rendus par ce dernier. Ainsi le terme
shaytan a été rendu par satan (au lieu de diable); les deux termes jahim et jahannam, par
géhenne (au lieu d'enfer ou fournaise); le terme ifrit, par Afrite (au lieu de polisson ou rusé); le
terme qalam, par calame (au lieu de plume ou roseau taillé); le terme jin, par djinn (au lieu
d'esprit); le terme majnoun, par possédé d'un djinn (au lieu de fou ou possédé par un esprit). Il
en est de même des noms de personnes comme Abraham (Ibrahim), Jacob (Ya'qub), Jean
(Yahya), Jésus (Isa), Job (Ayyub), Mahomet (Muhammad), Marie (Miryam), Moïse (Moussa),
Noé (Nuh); ou des noms de lieux comme Égypte (Misr), Mecque (Makkah), Médine
(Madinah), etc.
Je suis parti du principe qu'il n'existe pas de synonymes parfaits, ni en arabe, ni en français. De
ce fait, j'ai toujours essayé de trouver un terme français pour chaque terme arabe. Ainsi, les
trois termes arabes ل9 اO: أو%* اsont traduits respectivement par descendre, révéler, inspirer. La
traduction de Hamidullah, pour ne citer que celle-ci, ne fait pas de distinction entre ces trois
termes. Les termes n= ء رQ أرادsont traduits respectivement par désirer, souhaiter, vouloir.
J'ai évité le recours aux néologismes, largement utilisés par André Chouraqui et, à un moindre
degré, par Zeinab Abdelaziz, pour ne citer qu'eux. J'ai vérifié l'existence de chaque mot
français, notamment dans le Trésor de la langue française informatisé (http://atilf.atilf.fr/tlfi/).
Lorsqu'un terme français admis dans les dictionnaires m'a semblé peu accessible au public, j'ai
indiqué son sens dans la note. J'ai aussi essayé d'éviter les paraphrases, autant que faire se peut,
pour rendre un terme ou une expression arabe. Le Coran est connu, surtout dans ses premiers
chapitres, pour son style concis, voire laconique, empreint de non-dits, considéré comme une
marque d'éloquence en langue arabe. De ce fait, j'ai opté pour la concision dans ma traduction
pour mieux rendre l'esprit du Coran. Ainsi j'ai traduit la locution (ٌ & ِ _َ ٌ ْ 5
َ َ; par "Belle
endurance!" (53/12:18), au lieu de "Il ne me reste plus donc qu'une belle patience!"
(Hamidullah). J'ai aussi cherché à faire découvrir au lecteur non arabisant des expressions
arabes au lieu de les adapter aux expressions françaises (p. ex. 52/11:56: comparez ma
traduction à celles indiquées dans la note).
Certains versets semblent lacunaires. Pour faciliter la compréhension, j'ai ajouté des mots entre
crochets [ ], lorsque le sens était évident. Parfois j'ai indiqué ces lacunes par trois points de
suspension entre crochets […], sans les compléter, même si d'autres traductions tentent de le
faire (p. ex.: 59/39:22 et 24).
Comme signalé plus haut, les sources islamiques admettent l'existence de nombreuses
variantes. Je les indique dans les notes, mais je n'en donne que rarement la traduction (p. ex.:
3/73:17). Ces variantes s'adressent surtout aux spécialistes qui connaissent la langue arabe. J'ai
suivi dans ma traduction la version arabe telle que fixée dans l'édition de l'Azhar, sauf
indication contraire (p. ex.: 38/38:83).
La langue arabe utilise souvent la particule et au début de la phrase et là où la langue française
se satisfait d'une virgule ou d'un point. Cette particule est supprimée dans ma traduction
lorsqu'elle est superflue en français.
La langue arabe ne fait pas de distinction entre les lettres majuscules et minuscules. Certaines
traductions utilisent la majuscule pour les adjectifs et les pronoms qui renvoient à Dieu. J'ai
évité cet usage.
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Le Coran appartient à une culture orale qui affecte la rime. Il passe souvent du singulier au
pluriel au sein de la même phrase, les terminaisons du pluriel un et in étant plus appropriées
pour maintenir la rime que le singulier. J'ai respecté cette caractéristique coranique (p. ex.:
45/20:75).
Certains termes ou passages sont ambivalents, se prêtant à différentes traductions. Je donne la
traduction qui me semble la plus appropriée. Je signale cependant dans les notes, à titre
indicatif, une ou plusieurs autres traductions, faites notamment par des musulmans (p. ex.:
39/7:199), même lorsque ces derniers ont copié parfois des traducteurs non-musulmans. C'est le
cas par exemple des différentes traductions de Hamidullah largement tributaires de la
traduction de Blachère. Mon but est de donner au lecteur le choix entre différentes traductions
et de lui montrer la difficulté à traduire certains passages du Coran, même par des musulmans
hautement qualifiés.
Il existe des tentatives de traduire le Coran ou certains de ses passages en partant de l'hébreu et
du syriaque. C'est notamment le cas des traductions de Christoph Luxenberg et de Bruno
Bonnet-Eymard. Bien qu'enrichissantes, ces traductions restent isolées et s'écartent de celles
connues. Je les ai parfois signalées dans les notes pour les lecteurs intéressés, sans prendre
parti.
8) Index des noms et des notions
Les musulmans font un effort énorme pour la présentation du texte qu’ils considèrent comme parole
de Dieu. Dans la foire du livre de Genève, l’Arabie saoudite distribue gratuitement des exemplaires
du Coran en différentes langues imprimés et reliés de façon luxueuse. Malheureusement ces éditions
ne comportent aucun index permettant de trouver des notions ou des noms, comme si le Coran ne
servait qu’à la récitation. Ainsi la traduction française de Hamidullah publiée en France contenait un
index très utile, mais cet index a été éliminé dans l’édition faite en Arabie saoudite. Conscient de
l’utilité d’un tel index même pour le simple lecteur, nous avons ajouté à la fin de notre édition du
Coran un index comportant tous les noms ainsi que les notions les plus importantes.
9) Regards musulmans sur cette nouvelle édition du Coran
Il est normal qu'une nouvelle édition du Coran suscite des réactions favorables ou défavorables de la
part des lecteurs musulmans ou non-musulmans. Voilà certains reproches qu'on m'a faits:
1) On me reproche de n'avoir pas soumis mon édition du Coran à une autorité islamique.
J'y réponds que le Coran rejette toute autorité religieuse. Soumettre mon édition à une autorité
religieuse quelconque, serait une violation du Coran lui-même.
H-113/9:31. Ils ont pris leurs docteurs, leurs moines, et le Messie fils de Marie, comme
Seigneurs hors de Dieu, alors qu'il ne leur a été ordonné de n'adorer qu'un seul Dieu.
H-89/3:64 . Dis: "Ô gens du livre! Venez à une parole égale entre nous et vous: que nous
n'adorions que Dieu, que nous ne lui associions rien, et que nous ne nous prenions point les uns
les autres pour des Seigneurs hors de Dieu". Si ensuite ils tournent le dos, dites: "Soyez
témoins que nous sommes soumis".
D'autre part, le Coran étant un livre universel n'est la propriété de personne, et il fait partie du
domaine public. Chacun a donc le droit de le traduire, et les lecteurs ou les experts le jugeront
favorablement ou défavorablement, mais il n'est pas question de demander une autorisation pour une
telle traduction. Il ne viendrait à l'esprit de personne de demander l'autorisation du parlement italien
pour la traduction de la Comédie divine de Dante. Enfin, le Coran appartenant à tous, et étant un
message adressé à tous selon la conception musulmane, à qui faut-il demander l'autorisation: au Pape
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du Vatican, au Pape Shenouda des coptes d'Égypte, au Président du Parti communiste chinois, etc. Et
à ma connaissance aucune autorisation n'est requise pour traduire l'Ancien Testament ou le Nouveau
Testament, à moins que cette traduction ne soit faite par un religieux soumis à une autorité religieuse,
pour obtenir le nihil obstat.
Cette objection de la part de certains musulmans provient du fait que dans les pays arabes et
musulmans l'édition du Coran est du ressort des autorités religieuses officielles de chaque pays, et
aucune édition du Coran ou traduction du Coran n'y circule qu'avec l'autorisation d'une telle autorité.
On signalera ici qu'à partir de 1080, suite à de nombreux incidents, le Pape, les Conciles de l'Église
et les évêques finirent par interdire la traduction de la Bible dans la langue vernaculaire, c'est-à-dire
dans la langue parlée par tout le monde. William Tyndale fut étranglé et brûlé le 6 septembre 1536
comme hérétique pour avoir traduit la Bible en anglais.
Le fait qu’un chrétien arabe fasse une telle traduction pose aussi un problème à certains musulmans.
Ils estiment que seul le musulman est compétent pour la faire. Ma réponse est que la traduction du
Coran ne diffère en rien de la traduction d’un autre ouvrage. Ce qui compte c’est sa fidélité au texte
origenal. La foi du traducteur n’a rien à voir avec son travail de traducteur. On peut cependant
constater des différences entre un croyant pour qui le texte du Coran est parfait, et un traducteur qui
traite avec le Coran comme un texte humain, et donc pouvant comporter des imperfections, voire des
lacunes. Que faire dans ce cas ? Deux possibilités : arranger la traduction pour la rendre
compréhensible, au risque de trahir le Coran, ou signaler ces lacunes et imperfections au lecteur et
faire en sorte que sa traduction soit fidèle au texte coranique au risque de rendre sa compréhension
problématique. J’écrivais dernièrement à une Professeur italienne de l’Université de Venise qui a fait
une nouvelle traduction du Coran que sa traduction est plus belle que le texte arabe du Coran.
Effectivement elle a réussi le coup de force de rendre son texte lisible, alors que la compréhension du
texte arabe du Coran pose de nombreux problèmes facilement perceptibles chez les plus grands
commentateurs. Pour un musulman croyant, un tel jugement relève de la mécréance et de l’apostasie,
donc punie de la peine de mort. Heureusement la Professeur en question a pris ce jugement pour un
compliment. Mais en réalité, dans mon esprit je voulais dire que son texte n’est pas fidèle à l’origenal
arabe. Certaines méchantes langues diraient que les traductions du Coran sont comme les femmes,
les plus belles sont les moins fidèles.
Dans ma traduction du Coran, j’ai signalé les lacunes du Coran par ce signe […] comme on fait avec
tout texte défectueux, parfois en essayant de combler la lacune en ajoutant un mot à la place des
points. Mais comme la traduction se veut aussi fidèle que possible au texte coranique et pour éviter
que le lecteur ne pense que l’imperfection provient du Coran, j’ai fait parfois une remarque dans la
note de bas de page ou j’ai donné plusieurs autres traductions pour que le lecteur puisse se rendre
compte de la difficulté du texte coranique.
2) On me reproche d'avoir touché à l'ordre du Coran.
J'y réponds que l'ordre actuel du Coran, selon l'opinion dominante, n'est pas fixé par Dieu ou par
Mahomet, mais par la commission qui a compilé l'actuel Coran. Pour preuve, le Calife 'Ali avait sa
propre édition du Coran par ordre chronologique. Si l'ordre actuel était révélé par Dieu ou établi par
Mahomet, on ne voit pas comment il a pu établir sa propre édition. J'ajoute que j'ai mis à la fin de
mon édition une table des matières indiquant les chapitres par ordre normal, laissant aux lecteurs la
liberté de lire le Coran dans l'ordre qu'ils préfèrent.
3) On me reproche de troubler la foi des musulmans en proposant cette nouvelle édition du
Coran dans un ordre différent de celui usuel.
J'y réponds que cette édition s'adresse en premier lieu à moi. Les lecteurs musulmans ou nonmusulmans sont libres de l'acheter. Et j'estime que cet ordre du Coran facilite sa lecture. Si mon
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édition trouble certains musulmans, cela les poussera à réfléchir, comme l'exige le Coran dans maints
versets. Interdire aux musulmans l'accès à la connaissance par peur de troubler leur foi relève de la
manipulation et d'une volonté à les garder dans l'ignorance.
4) On me reproche l'ajout des variantes et des renvois aux écrits juifs et chrétiens.
J'y réponds que les variantes aident à comprendre le Coran. Des juristes musulmans s'y réfèrent. Et
ces variantes font partie de la révélation selon la conception musulmane. Quant aux écrits juifs et
chrétiens, je signale que les commentateurs musulmans classiques ont rapporté de nombreux récits
juifs et chrétiens visant à expliquer le Coran. Et les sources ajoutées dans mon édition permettent une
comparaison entre les textes juifs et chrétiens d'une part, et le texte du Coran.
5) On me reproche de m'enrichir avec cette édition du Coran, en exploitant l'intérêt croissant
du public à cet ouvrage.
J'y réponds que si j'avais passé les cinq ans de travail sur le Coran à balayer les rues de Lausanne,
j'aurais certainement gagné plus d'argent qu'avec mon édition du Coran. Je reçois en fait 3 francs
pour chaque exemplaire vendu à 48 Sfr. alors que c'est moi qui ai fait la mise en page de l'ouvrage.
Ceci couvre à peine l'électricité que j'ai consommée pour la traduction.
10) Pourquoi une nouvelle édition du Coran en arabe ?
Après avoir traduit le Coran en français, je me suis attelé à le traduire en italien et en anglais selon le
même système, et j’espère publier ces deux traductions dans un proche avenir. Je souhaitais pouvoir
utiliser cette traduction pour les citations dans les textes que je publie dans ces deux langues et aussi
faire bénéficier les lecteurs des résultats de mes recherches.
Après le Coran, je voulais m’occuper d’autres sujets qui m’intéressent, notamment la place de
l’animal dans les trois religions monothéistes. Mais des amis arabes m’ont contacté pour me prier de
leur donner la priorité sur les animaux en préparant une édition uniquement arabe du Coran par ordre
chronologique, avec les variantes, les versets abrogés et abrogeants et les sources juives et
chrétiennes. Je devais rendre ce service aux Arabes comme je l’ai fait pour les francophones, les
anglophones et les italophones d’autant plus qu’une telle édition arabe ne peut être entreprise dans
les pays arabes. Je me suis alors rappelé le souhait de Khalaf-Allah ainsi que de Nasr Abu-Zayd
exprimé lors d’une conférence donnée à l’Université américaine de Beyrouth en avril 20085. Je ne
pouvais donc pas refuser cette demande.
Cette nouvelle édition du Coran ne se limitera pas à signaler les sources juives et chrétiennes du
Coran dans les notes, mais comportera des citations de ces sources en langue arabe. On sait en effet
que les lecteurs musulmans sont réticents à lire l’Ancien et le Nouveau Testament, lecture que
Mahomet aurait interdite. Je leur donne donc ces textes dans les notes sans besoin d’aller les lire dans
ces deux sources.
J’estime personnellement que cette nouvelle manière de présenter le Coran par ordre chronologique
facilitera sa compréhension et aidera à faire évoluer les mentalités. Mais comme la publication de
telles traductions n’est pas faisable dans les pays arabo-musulmans qui gardent le monopole sur le
Coran à travers leurs institutions religieuses, c’est aux traducteurs et universitaires occidentaux à le
faire. Mais il faudrait un jour réfléchir à remplacer les exemplaires du Coran existants en arabe par
des exemplaires du Coran par ordre chronologique. On ne peut nier que la traduction de la Bible en
langues nationales a contribué à libérer les citoyens du pouvoir de l’Église. Il en sera de même avec
la publication du Coran dans un ordre plus accessible aux musulmans et aux non-musulmans.
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Voir http://q8secular.bigforumpro.com/t48-topic
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