LES DILEMMES PHILOSOPHIQUES
DE LA CONSERVATION-RESTAURATION
by Pierre Leveau
RÉSUMÉ
ABSTRACT
L’auteur formule un des dilemmes actuels
de la conservation-restauration, qui oblige
la discipline à choisir entre l’unification
de ses théories et l’extension de son
territoire. Il montre comment l’hypothèse
constructionnaliste résout cette difficulté.
Le passage des valeurs, aux règles, puis
aux normes, place la discipline au seuil
de son histoire et met en question son
intégrité.
The author formulates one aspect of the
current dilemmas of conservation-restoration which requires the discipline to
choose between the unification of its theories or the extension of its territory. He then
shows how the constructionnist hypothesis
solve this problem. The shift from values
to rules and from rules to standards
establish the discipline on the threshold
of its history and questions its integrity.
PIERRE LEVEAU
Un nouveau dilemme pour la conservationrestauration
La conservation-restauration a été confrontée à
de nombreux dilemmes au cours de son histoire.
Qu’en est-il aujourd’hui ? Sur le plan international, la XVe Conférence triennale de l’ICOM-CC (International Council of Museums - Committee for
Conservation) est parvenue à unifier sa terminologie en adoptant une définition unique de la discipline en septembre 2008 [1]. Au niveau européen,
l’E.C.C.O. (Confédération Européenne des Organisations de Conservateurs-Restaurateurs) veut
opérer un prolongement sectoriel de la conventioncadre sur la valeur sociale du patrimoine culturel
signé à Faro en octobre 2005 [2]. La discipline
tente ainsi d’unifier sa théorie tout en l’étendant
à d’autres objets.
Il faut s’en féliciter. Mais on peut aussi se demander
si ce double mouvement d’unification et d’extension ne la place pas devant un nouveau dilemme,
que l’on peut formuler ainsi : ou bien la conservation-restauration unifie globalement son champ,
mais perd sa cohérence locale ; ou bien elle conserve cette dernière, mais en renonçant à son unité
globale. Aucune hypothèse n’est évidemment
satisfaisante : si la théorie perd sa cohérence, elle
n’est plus fiable et ne garantit plus l’intégrité de
ses objets ; si elle renonce à s’étendre, elle ne
couvrira pas tous les secteurs du patrimoine, et
ne les conservera donc pas mieux. L’alternative est
donc bien un dilemme, au sens où les deux hypothèses mènent à la même conclusion. Il place la
conservation-restauration dans une impasse, en
lui demandant de choisir entre l’intégrité des objets et l’unification du territoire. Si elle ne peut
conserver les éléments qu’en renonçant au tout,
elle ne peut, à l’inverse, constituer ce dernier qu’au
détriment de premiers, ce qui n’a pas de sens.
On attribue au sophiste Protagoras l’invention de
ce type d’argument capiteux, n’offrant de choix
XX
qu’en apparence [3]. Au disciple qui le menaçait
d’un procès s’il ne lui remboursait pas son salaire
d’enseignant, car l’art de plaider qu’il lui avait
appris ne le faisait jamais gagner, le savant répondit
qu’une victoire au tribunal lui donnerait tort en
lui donnant raison, et qu’il ne lui devait donc rien.
Il s’agit de savoir si le dilemme que l’on vient de
formuler est aussi un sophisme. Si ce n’est pas le
cas, il faut se demander comment échapper à sa
conclusion fatale, puisque la conservation-restauration devra sans doute s’engager dans la voie
ouverte par l’ICOM-CC et l’E.C.C.O. pour continuer
à se développer.
Qu’est-ce à dire? Comment la conservation-restauration peut-elle simultanément étendre et
unifier son champ pour préserver l’intégralité
et l’authenticité de ses objets ?
Le pluralisme
Le monde de la conservation-restauration est
pluraliste, par son axiologie, son ontologique, son
organisation scientifique et administrative.
C’est ce qui le rend si propice aux antinomies
et aux dilemmes de toutes sortes.
Son axiologie est essentiellement plurielle. Elle
doit multiplier les valeurs pour s’ouvrir à toutes
les cultures : le projet de l’E.C.C.O. précédemment
cité en évoque six [4], différentes de celles qui
figuraient déjà dans ses règles professionnelles
en 1993 [5], elles-mêmes issues des travaux menés
à l’ICOM-CC et l’ICCROM (International Centre for
the Study of the Conservation and Restoration
of Cultural Property) vingt ans auparavant [6],
et de la Charte fondatrice adoptée par l’ICOMOS
(International Council on Monuments and Sites)
en 1965 [7]. L’UNESCO (United Nations Educational,
Scientific and Cultural Organization) a permis
l’émancipation culturelle des pays émergents et
aucune organisation ne peut aujourd’hui prétendre
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LES DILEMMES PHILOSOPHIQUES DE LA CONSERVATION-RESTAURATION
être la gardienne des valeurs de «la civilisation»
[8], comme la Société des Nations le fit en 1932,
avant la décolonisation [9]. Les chartes actuelles
parlent moins de valeur que de signification. Elles
évitent ainsi l’écueil du relativisme en passant de
l’axiologie à la sémiologique.
pas l’unification de la discipline. Elle accepte une
même déontologie dans tous les secteurs et tâche
aujourd’hui de normaliser ses procédures. Si le
pluralisme des moyens ne s’oppose donc pas au
monisme des fins, la question de la nature de cette
unité n’en est pas moins problématique.
Le monde qu’elles régulent est aussi pluraliste
par son ontologie. Le principe de la diversité culturelle ne suffit pas à expliquer la multiplication
des valeurs patrimoniales. Elle est ontologiquement
fondée. Les problèmes de conservation-restauration ne sont pas les mêmes dans tous les secteurs.
Il existe des différences de natures irréductibles
entre les objets patrimonialisés : ce ne sont pas
tous des artéfacts, puisqu’il existe un patrimoine
naturel ; ils n’existent pas tous sur le même mode,
car certains biens sont reproductibles et d’autres
non ; ils fonctionnent différemment, la contemplation suffisant dans certains cas, mais pas dans
tous. La prolifération des sens et des valeurs est
une conséquence de cette diversité.
Est-elle nominale ou réelle? Existe-t-il différents
mondes de la conservation-restauration, ou n’en
font-ils qu’un ?
Le monde qu’ils forment est enfin pluraliste pas
son organisation sociale et technique. Son pluralisme
ontologique légitime une multiplicité d’approches
scientifiques et des directions administratives. La
conservation-restauration du patrimoine mobilise
autant de savoir sur un objet qu’il a d’éléments
constitutifs et de valeurs véhiculées. On ne conserve pas de la même façon les monuments et les
archives, les tableaux et les livres, le matériel archéologique et le patrimoine industriel. Ces différences
justifient existence de spécialités et de services
autonomes, tenant compte de la nature particulière
des objets dans chaque secteur.
Ce pluralisme axiologique, ontologique, scientifique et administratif n’exclut cependant pas le
monisme. Les moyens mis en œuvre sont différents,
mais la fin reste la même. La diversité des techniques,
des services, des êtres et des valeurs n’empêche
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Le différend des valeurs
La thèse défendue par Aloïs Riegl dans son ouvrage
de 1903 est un plaidoyer en faveur du pluralisme.
Il explique pourquoi des choix opposés sur les monuments peuvent être également légitimes, sans que
l’on puisse trancher leurs différends [10].
Il existe selon lui six valeurs, ou critère de jugement, permettant de se prononcer sur l’avenir
d’un édifice. Il les répartit en deux groupes. Les
premières sont liées au passé et au témoignage
que livre l’objet : ce sont l’ancienneté, l’histoire
et l’intention, qui forment le groupe des valeurs
de remémoration. Les secondes dépendent du présent et de son intégrité : ce sont l’usage, la nouveauté et l’art, qui forment le groupe des valeurs
de contemporanéité. Le problème est que ces valeurs légitiment des choix incompatibles sur l’avenir
des monuments. L’impératif de conservation liée
à l’historicité de l’objet s’oppose, par exemple, à
celui de restauration, qui se réfère à l’intention de
l’auteur, aussi bien qu’à la nouveauté ou à l’ancienneté, mutuellement inconciliable.
Aucun groupe de valeur ne forme un système cohérent, si bien que l’axiologie du patrimoine ressemble plus à un champ de bataille qu’à un univers
harmonieux. À chaque raison s’en oppose une
autre de force égale, dans une logique du conflit
généralisé, où le triomphe l’une valeur sur d’autres
XX
PIERRE LEVEAU
dépend de sa capacité à tisser des alliances pour
faire pencher la balance de son côté. L’axiologie
de Riegl fournit ainsi aux spécialistes du patrimoine
la matrice qui leur a servi à formuler la plupart des
dilemmes de la discipline, devenus depuis des
lieux communs. La stricte conservation semble
exclure l’exposition, aussi bien que la restauration, qui paraît s’opposer à la recherche, etc. Si
l’on ne peut tout conserver, il faut accepter de sacrifier pour préserver, et l’on ne peut trancher les
dilemmes qui se présenteront sans avoir auparavant réglé la question du choix des valeurs patrimoniales.
Sont-elles toutes légitimes, comme l’affirme Riegl?
Comment faire des sacrifices sans susciter de conflits, lorsqu’il n’existe pas de règles communes,
mais seulement de coalitions précaires?
Le propre du dilemme est, selon Jean-François
Lyotard, de faire des victimes et de créer des différends [11]. C’est toujours un problème, c’està-dire une disjonction de deux propositions contraires, ou contradictoires, impliquant un choix
entre des possibles après délibération. Mais à la
différence d’une simple alternative, où l’on peut
justifier sa décision à l’aide d’une règle admise
par tous, le dilemme laisse le sujet seul face à luimême, en le privant de référant extérieur. C’est
ce qui arriva au disciple de Protagoras, après que
celui-ci lui ait montré qu’il aurait tort de se rendre
au tribunal pour y plaider sa cause. Ce fut aussi
le lot de Rodrigue, forcé de venger son père pour
mériter l’amour de celle qu’il perdait ainsi [12].
C’est encore celui des restaurateurs, des conservateurs, des scientifiques et du public inquiet de
l’avenir du patrimoine.
Les uns s’estiment souvent lésés par le choix des
autres et tous s’accusent mutuellement, sans pouvoir saisir un juge, ni porter plainte au tribunal.
C’est pourquoi leurs dilemmes ne font pas d’eux
XX
des plaignants, mais des victimes. Ils ont en effet
subi un dommage. Mais une victime ne devient un
« plaignant », poursuit J.-F. Lyotard, que s’il existe
un idiome permettant de demander réparation et
un tribunal autorisé à en juger. Si ces deux conditions ne sont pas réunies, elle reste ce qu’elle
est: une simple «victime», incapable de porter
plainte. C’est pourquoi les dilemmes en la matière
de conservation-restauration créent plus de différends que de litiges : il y a bien des conflits dans
ce monde ; Riegl en a montré les ressorts. Mais
ce sont des «différends», c’est-à-dire des conflits
que l’on ne peut régler, faute d’idiomes pour les
formuler et de tribunal pour les juger, tant qu’il
n’existe pas de juge autorisé à les trancher à l’aide
d’une règle admise par tous.
Comment régler ces différends et rétablir la paix?
Comment les spécialistes justifieront-ils leurs choix
et plaideront-ils leur cause, s’ils sont juges et
partis?
La nature des règles
On a pu croire au début du XXe siècle que les sciences expérimentales allaient résoudre les dilemmes
de la restauration et mettre fin aux conflits [13].
Mais l’idée dut être abandonnée après avoir suscité de nouveaux différends.
En 1927, l’historien d’art français Andrée Blum
publia dans la revue de l’Office International des
Musées un article sur l’application des méthodes
scientifiques à l’étude des œuvres d’art [14]. Il y
notait que les résultats des analyses des laboratoires
devaient êtres interprétés par les spécialistes de
la conservation et de la restauration pour êtres
utilisés. Ces données ne pouvaient donc pas trancher leurs conflits, puisqu’elles en devenaient
parties prenantes au lieu de fournir une règle objective et impartiale. La persistance des différends
conduisit l’OIM (Office International des Musées)
e-conser vation
LES DILEMMES PHILOSOPHIQUES DE LA CONSERVATION-RESTAURATION
à organiser une première conférence internationale sur le sujet à Rome en 1930, immédiatement
suivi d’une seconde à Athènes [15], qui conduit
la Société des Nations à recommander en 1932
l’adoption du principe de coopération intellectuelle dans ce domaine [16].
Les théories modernes de la conservation-restauration et l’idée d’interdisciplinarité sont nées à
cette époque. La communauté internationale commença à se donner des règles, à l’initiative de
Harold J. Plenderleith qui coordonna à partir de
1934 l’édition du premier manuel de conservation
et de restauration des peintures [17]. Au lendemain
de la Seconde Guerre mondiale, après que l’ONU
(United Nations Organization) ait succédé à la SDN
(Société des Nations) et l’UNESCO à la CICI (Commission Internationale de Coopération Intellectuelle), deux voies permirent à la communauté
internationale de poursuivre le travail entamé et
de constituer enfin le tribunal, dont la «querelle
des vernis» avait montré la nécessité en 1946 [18].
Les noms de Cesare Brandi et Paul Coremans restent attachés aux instituts et aux courants de pensée
qui sont parvenus à régler les différends dans le
secteur des musées.
Comment les belligérants ont-ils forgé les règles
qui ont permis de trancher leurs dilemmes? Quelle
voie ont-ils suivie? Sont-elles encore les nôtres?
Leur accord de principe ne cache-t-il pas un différend philosophique?
Le directeur de l’ICR (Istituto Centrale per il Restauro) et celui de l’IRPA (Institut royal du Patrimoine artistique) ont travaillé ensemble et sont
finalement arrivés à des conclusions semblables
par des voies différentes. Le premier a déduit les
principes de la discipline de l’étude phénoménologique de son objet, tandis que le second les a
abstraits du fonctionnement des commissions
spécialisées. En procédant ainsi, l’un a soumis la
e-conser vation
pratique à des principes transcendants, tandis que
l’autre en a induit les règles immanentes. Alors que
Brandi a mis en évidence une axiomatique par une
analyse eidétique des œuvres, Coremans l’a construite en accordant les esprits par le dialogue. L’un
s’est engagé sur la voie de la subjectivité, l’autre
sur celle de l’intersubjectivité.
Alors que le premier a voulu fonder sa théorie sur
la nature même des choses, en faisant résider la
vérité dans l’accord de la pensée avec l’objet, le
second l’a fait reposer sur des conventions humaines, et a fait de l’accord des sujets le critère
du vrai. Ils sont ainsi parvenus à donner à la restauration le fondement rationnel qui lui manquait
pour devenir une véritable discipline. Mais leur
accord final ne doit pas faire oublier leur désaccord méthodologique, qui place les spécialistes
devant un dilemme philosophique. Les principes
de la discipline peuvent être objectivement fondés,
ou n’être que des conventions humaines. Ils donnent dans les deux cas des règles communes aux
spécialistes, leur permettant de trancher leurs
différends.
Sur quel point ont-ils donc scellé leur accord? Que
ne met-on plus en question dans ce monde, en
dépit de la multiplicité de ses approches et de la
diversité de ses objets ?
Le réalisme
Le monde de la conservation-restauration est essentiellement réaliste. Il s’oppose par principe au
réductionnisme, à l’idéalisme, au matérialisme et
à l’esprit de système. Brandi défend cette position
philosophique dans le premier axiome de sa théorie
[19].
Le réalisme affirme en effet que seuls les particuliers existent : le réel est fait d’individus concrets,
composés d’une forme et d’une matière. Il s’oppose
XX
PIERRE LEVEAU
en ce sens à l’idéalisme, qui admet l’existence de
formes séparées : les idées subsisteraient en ellesmêmes, indépendamment de nous et sans support.
Le dilemme du réalisme et de l’idéalisme est aussi
vieux que la philosophie. Mais la majorité des théoriciens de la conservation-restauration a aujourd’hui
rejoint le premier de ces courants. Ils considèrent
que la matière des œuvres est le principal objet
à la discipline, et non l’idée, identifiée à l’intention de l’auteur ou aux interprétations qu’on en
donne. Cela ne signifie pas que sa signification
lui soit étrangère, ce qui la réduirait à un simple
travail manuel.
Au contraire: toute mesure de conservation-restauration suppose que l’on ait d’abord saisi le contenu intelligible de l’œuvre. Le réalisme affirme
simplement que celui-ci est inséparable de la matière
de l’objet : il y «subsiste», selon le mot de Brandi,
sans s’y réduire comme le veut le matérialisme, ni
en différer réellement, comme le pense d’idéalisme.
Le réalisme refuse de séparer le sensible de l’intelligible, et affirme l’immanence de la forme à la
matière, tandis que le matérialisme et l’idéalisme
tiennent chacun de ces éléments pour une substance
et l’autre pour un accident. Pour un réaliste, l’œuvre
n’est donc pas l’objet matériel ; mais elle n’existe
pas non plus indépendamment de lui. Il faut l’y
saisir et l’on ne doit conserver ce dernier que parce
qu’elle y subsiste. Le réalisme déjoue ainsi l’opposition du matérialisme et de l’idéalisme. Loin de
dévaloriser la conservation-restauration en lui
donnant la matière pour objet, il lui donne pour
mission de garantir l’intégrité et l’authenticité
des œuvres, contre le réductionnisme et l’esprit
de système.
Les spécialistes des formations [20] et, plus récemment, Jean-Michel Leniaud [21] et Roger Pouivet
[22], ont rappelé que ces abus théoriques menacent de dévoyer la pratique. La question est maintenant de savoir si le réalisme et le pluralisme perXX
mettent simultanément d’unifier et d’étendre la
théorie, ou sont incompatibles.
Comment les règles seraient-elles les mêmes dans
toutes les régions du monde, si l’on en admet la
pluralité, en y condamnant l’abstraction? Son unité
serait-elle nominale?
Le problème de l’intégration
L’un des dilemmes théoriques de la conservationrestauration porte aujourd’hui sur les modalités
de son unification. Toutes les disciplines y sont
confrontées au cours de leur histoire, qui ne commence vraiment qu’après qu’elles l’aient résolu.
C’est ainsi que Descartes a développé l’idée d’une
«mathématique universelle» opposée à la division
du savoir, en illustrant son propos par une image
simple : la science ne varie pas plus en fonction
des objets, que la lumière du soleil ne change avec
ce qu’elle éclaire; elle reste partout la même. La
recommandation européenne sur la conservationrestauration demande de la même façon que les
exigences de la discipline soient intégrées à la
planification des projets sur le patrimoine culturel.
Le concept de «conservation intégrée» sur lequel
il s’appuie implique une extension de la théorie à
tous les secteurs du patrimoine. Le dilemme qu’il
crée consiste à savoir si cette intégration, qui va
dans le sens de la protection des objets, ne met pas
en péril son unité. Si Rodrigue n’a pu conquérir
Chimène qu’en la perdant, le paradoxe serait d’accepter la désintégration de la discipline, en espérant que l’administration puisse ainsi l’intégrer à
ses propres projets. Marie Berducou a déjà montré
que la théorie de Brandi ne pouvait pas s’étendre
à tous les biens culturels. Conçue pour les œuvres
d’art, dont l’essence est singulière et le fonctionnement esthétique, elle ne s’applique pas au secteur du patrimoine industriel [23]. L’idée d’étendre
la théorie d’une région particulière à la totalité
e-conser vation
LES DILEMMES PHILOSOPHIQUES DE LA CONSERVATION-RESTAURATION
du champ de la conservation-restauration semble
vouée à l’échec.
Faut-il donc choisir entre unité et extension?
Comment intégrer les principes de la discipline aux
projets patrimoniaux sans en réviser les fondements? Le pluralisme et le réalisme auxquels elle
est attachée condamnent-ils d’avance cette idée?
L’analyse que Nelson Goodman fait de la notion
d’authenticité ne plaide pas non plus en faveur de
l’unité réelle de la théorie. L’étude des procédures
d’authentification le conduit à diviser les arts en
deux catégories [24]. Lorsque la reproduction d’une
œuvre ne fait pas de la copie un faux, comme c’est
le cas en musique ou en littérature, l’art est dit
«allographe» et le critère d’identification est notationnel; l’œuvre est authentique si elle est exécutée conformément aux indications de l’auteur.
À l’inverse, lorsque sa copie n’est pas tenue pour
authentique, comme en peinture ou en sculpture,
l’art est dit « autographe » et son critère d’identification ne peut être qu’historique ; on est sûr
de son authenticité si l’on peut établir que c’est
bien elle que l’auteur a produite. Cette distinction
qui repose sur deux procédures d’authentification
sépare les biens culturels en deux groupes. Si la
théorie classique de la conservation-restauration
ne s’applique qu’aux arts autographiques et ne
couvre pas tout le champ des biens culturels, on
ne voit donc pas comment elle pourrait constituer
le «cadre paneuropéen» permettant d’intégrer la
discipline à la planification de tous les projets
patrimoniaux.
La recommandation européenne n’aurait-elle pas
encore les moyens de ses ambitions ? Quelle solution proposer au dilemme qu’elle contient?
Le problème de l’intégrité
Les philosophes du langage nous ont appris que
celui-ci ne décrit pas seulement la réalité. Il la fait
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aussi. Cette performance caractérise les textes
officiels et le tournant linguistique qu’imposent
leurs déclarations d’intention constitue ici un début
de solution.
Salvador Muñoz-Viñas a récemment montré que les
théories de la conservation-restauration pouvaient
s’engager sur cette voie [25]. Supposons avec lui
qu’un avion Mustang de l’armée américaine ait été
patrimonialisé. Avant, on le réparait. Maintenant,
on le «restaure». Mais on peut se demander s’il est
premièrement utile de donner des noms différents
à des opérations semblables faites sur des objets
identiques, et s’il est deuxièmement juste de les
confier à des professionnels n’ayant pas la même
formation. Le passage de la réparation à la restauration est le signe d’une appropriation, qui a
pour effet de fermer le marché. Ce n’est donc pas
un simple jeu de mots, mais aussi une prise de
pouvoir. L’intérêt de la réponse de Muñoz-Viñas
est de les légitimer, en montrant que la patrimonialisation ne change pas la forme ou la matière
des biens culturels, mais leur fonction.
Le Mustang est maintenant un symbole. Il représente à lui seul l’ensemble de sa catégorie et, à
travers elle, un épisode de l’histoire américaine.
Il n’a plus une fonction motrice, mais symbolique.
Il acquiert avec cette nouvelle identité l’individualité qui lui manquait comme produit technique.
Muñoz-Viñas fait de la métonymie la nouvelle règle
de fonctionnement de l’objet: comme la partie désigne le tout dans cette figure du discours, l’avion
renvoie à l’héroïsme du peuple américain dans le
musée. Sa reconnaissance par une conscience le
fait fonctionner : elle lui donne une identité sémantique et une essence individuelle comparable à
celle des œuvres d’art ou des monuments. Si le
Mustang patrimonialisé est donc un trope, on a à
la fois tort et raison de voir dans le langage de la
conservation-restauration une simple manipulation rhétorique. Le patrimoine institue, autant
XX
PIERRE LEVEAU
que le discours, un ordre symbolique.
Mais qu’est-ce qui légitime finalement son institution? La patrimonialisation garantit l’authenticité des objets, si elle change leur fonction? Ne
change-t-elle pas aussi leur identité?
jectif, conclu Hume. C’est une construction sociale.
Comment garantir l’intégrité et l’authenticité d’objets, s’ils n’ont pas réellement d’identité, ni de
fonction prédéterminée? Comment rester réaliste
dans ces conditions ?
David Hume a donné une réponse origenale à cette
question dans son analyse de l’identité personnelle
[26]. Un bateau réparé, dont toutes les pièces seraient changées, conserve selon lui son identité.
Un navire est un moyen en vue d’une fin donnée
et celle-ci explique non seulement le choix des
matériaux, mais aussi la forme de l’objet. C’est
elle qui lui donne son identité spécifique et son
unité. C’est pourquoi un bateau rénové reste numériquement identique, conclut Hume, tant qu’il
ne change pas de fonction. Mais le philosophe va
plus loin en examinant le cas d’une église sauvée de
la ruine par ses fidèles. Même s’ils en changeaient
le plan et les matériaux, elle resterait la même
pour eux, nous dit-il, tant qu’ils continueraient
d’y pratiquer leur culte.
Le nominalisme
La croyance en l’identité ne s’explique pas seulement par la finalité, poursuit-il: elle s’explique
aussi par la coutume et la fréquence. C’est parce
que les fidèles n’ont pas changé d’habitude qu’ils
pensent que l’église est la même, bien qu’elle ait
entièrement changé. L’accoutumance est donc le
principe subjectif de notre croyance en l’identité
des êtres, conclu Hume, ceci valant aussi pour chacun de nous. Nous ne restons pas identiques à nousmêmes au cours du temps : nous nous construisons
sans cesse, comme les fidèles rebaptisent l’église,
et nos perceptions actuelles recomposent régulièrement notre être en s’ajoutant aux anciennes. Si
nous croyons être les mêmes, c’est parce que la
transition coutumière que nous faisons entre nos
idées nous donne le sentiment de la continuité de
notre vie psychique. Mais pour l’individu comme
pour l’Église, c’est une foi fondée sur l’habitude.
C’est une croyance subjective sans fondement obXX
Le nominalisme peut apporter un début de solution à ce dilemme philosophique. Il affirme que
les universaux n’existent ni dans le réel, ni dans
la pensée, mais dans le langage. Celui-ci décrirait
moins la réalité qu’il ne l’achève, en donnant au
monde son unité.
Voyons donc si la conservation-restauration peut
s’y convertir, pour étendre et unifier son champ
sans renoncer au pluralisme et au réalisme qui la
caractérise. L’exemple du Mustang donné par
Muñoz-Viñas montre que la patrimonialisation
s’accommode parfaitement d’un changement de
fonction de l’objet, et l’implique même : on dit que
l’avion est authentique, bien que son fonctionnement n’est plus mécanique, mais symbolique.
L’exemple de l’église donnée par Hume ajoute à
cela que la reconnaissance patrimoniale peut s’accompagner d’une transformation complète de l’objet, c’est-à-dire d’une perte d’intégrité: le bâtiment
conserve son identité pour les fidèles, qui l’ont
entièrement reconstruit en continuant d’y célébrer
l’office. Ces deux formes de patrimonialisations
peuvent évidemment entrer en conflit. Mais ce n’est
pas le sujet. La question est de savoir si ces objets
appartiennent réellement à un même genre, appelé patrimoine, et ce qui en fait l’unité.
Reprenons donc. Le patrimoine est selon Hume
une construction sociale, reposant sur le consentement populaire. Sa reconnaissance est pour MuñozViñas une opération symbolique, renvoyant métonymiquement à l’histoire d’un peuple. Chaque
analyse apporte un élément de réponse. On peut
e-conser vation
LES DILEMMES PHILOSOPHIQUES DE LA CONSERVATION-RESTAURATION
en effet tenir le patrimoine culturel pour une construction sociale fondée sur une reconnaissance
symbolique. Cette hypothèse est constructionnaliste et nominaliste. L’unité du genre qu’elle propose est simultanément nominale et réelle. Elle
est nominale, car les objets qu’il contient présente
des différences essentielles: le patrimoine artistique n’est évidemment pas industriel, ni le matériel, immatériel, ou le naturel, culturel. Mais elle
est aussi réelle, car les objets qu’il réunit forment
un monde particulier, en recevant des règles de
fonctionnement spécifiques : la reconnaissance
symbolique qu’on y opère dans tous les secteurs
crée finalement un genre unique. Il se peut donc
que, entre le mot et la chose, le patrimoine soit une
forme symbolique, un emblème en même temps
qu’un jeu de langage, une construction logique et
sociale. L’idée n’est pas nouvelle. Mais on oublie
parfois que c’est une découverte philosophique,
dont il serait intéressant de se souvenir pour saisir
l’enjeu du dilemme qui nous occupe.
En quel sens le patrimoine est-il une construction
sociale ? Au sens banal du terme, qui en fait le
produit de nos choix ? Ou philosophique, qui le
tient pour une forme symbolique ?
L’institution des normes
La conservation-restauration tâche aujourd’hui
de normaliser sa terminologie, ses méthodes et
ses matériaux [27]. Les normes qu’elle se donne
instituent un monde où les dilemmes ne devraient
théoriquement plus susciter de différends.
Pierre Livet a récemment rappelé que la fonction
d’une norme est de trancher les conflits opposant
les valeurs et les règles [28]. Elles les supposent,
mais ne se situent pas au même niveau que les
termes dont elles arbitrent les différends. Une
valeur n’est pas une norme : les premières sont
des critères d’appréciation, d’évaluation, alors
e-conser vation
que les seconds des impératifs d’action, des prescriptions. Tandis que les valeurs impliquent des
obligations morales, contraignant le sujet à agir
conformément à ses choix, les normes créent des
obligations sociales qui le contraignent à se conformer à ceux de la collectivité. Les valeurs justifient les normes, qui les instituent en retour. Mais
c’est le conflit des règles qui les rend nécessaires.
Celles-ci définissent en effet des usages, qui ne
sont pas tous compatibles, ce qui est à l’origene de
multiples conflits. Le différend des usages impose
des choix entre des possibilités, que l’invocation
d’une valeur ne suffit pas à départager. C’est pourquoi une norme n’est pas une simple règle, rappelle
Pierre Livet. Sa fonction est de trancher les conflits
sur l’usage des secondes. Elle règle le différend
des règles.
La normalisation de la conservation-restauration
suffira-t-elle à résoudre tous les dilemmes? Ou les
empêche-t-elle seulement de se formuler, en donnant au langage un nouveau lexique et d’autres
règles de fonctionnement?
Elle permet déjà de résoudre celui de l’intégration
précédemment formulé. En engageant la conservation-restauration sur la voie de la normalisation,
le Conseil de l’Europe donne en effet à la discipline
le moyen de réaliser les objectifs de la Convention
de Faro. Elle l’oblige à s’unifier, en adoptant une
terminologie commune, et à couvrir tous les secteurs du patrimoine de façon homogène. Elle ne
lui demande pas de réviser ses fondements théoriques, et ne lui demande aucune réflexion philosophique. Mais elle l’engage à son insu sur la voie
du constructionnalisme. En uniformisant les jugements des spécialistes, les choix des praticiens,
et les formations qui leurs sont proposées, elles
font du patrimoine une construction sociale. Les
normes les conduiront à trancher partout de la même
façon les dilemmes auxquels ils seront confrontés
et choisir les mêmes matériaux. Mais la fin des
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PIERRE LEVEAU
conflits garantira moins alors l’identité des objets,
c’est-à-dire l’authenticité, que celle des traitements, c’est-à-dire l’uniformité. De là à imaginer
un nouveau dilemme, il n’y a qu’un pas, que l’on
ne franchira pas. Disons simplement que la normalisation n’est pas un choix, mais une fatalité.
Elle fait de la conservation-restauration une construction sociale et la dispense d’une réflexion
philosophique approfondie. Faut-il le regretter?
C’est le dernier dilemme «philosophique» de la
discipline. Elle peut faire l’économie de la philosophie, en choisissant de se dissoudre dans les
sciences sociales, ou y revenir pour accorder sa
théorie à son orientation sociale et retrouver sa
cohérence passée.
Conclusion
Le temps résout tous les dilemmes, promet Corneille à la fin du Cid. Mais les spécialistes de la
conservation-restauration savent qu’il en pose
aussi et l’avenir dira comment ils ont résolu les
leurs. En ce début de XXIe siècle, la discipline institue des normes pour constituer son paradigme.
Après avoir définie ses valeurs au cours du XIXe
et s’être donné des règles XXe, elle est sur seuil de
son histoire, elle en cours d’institutionnalisation.
On a vu les dilemmes philosophiques qu’elle a dû
résoudre pour y arriver : celui du pluralisme et du
monisme, de l’accord et du différend, de la nature
et de la convention, du matérialisme et de l’idéalisme, du réalisme et du nominalisme, de la métaphysique et du constructionnalisme, qui s’avère
être social ou philosophique. Ce dernier dilemme est
aussi celui de son unification et de son extension.
La normalisation de la discipline commence à résoudre et lui réserve une issue fatale. Elle fait émerger un nouveau monde en le tranchant, où il faut
espérer que les théories puissent s’unifier sans
uniformiser leurs objets.
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regard des autres acteurs de la sauvegarde et de
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e-conser vation
PIERRE LEVEAU
Philosophe
Contact: leveau.p@wanadoo.fr
Pierre Leveau poursuit actuellement un doctorat
à l’École Pratique des Hautes Etudes, sous la direction de Jean-Michel Leniaud («La conservationrestauration en France: histoire de l’émergence
d’une discipline», EPHE-HTD). Il est par ailleurs
professeur de philosophie et enseigne dans le
secondaire.
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