Délibérément, la vendeuse avait franchi le seuil du magasin. Je la suivis dans la rue, un peu fâché qu’elle ose critiquer mon bien.
– Ce n’est pas un très beau cadeau que M. de Kéry vous a fait là, avait-elle osé dire.
– Oh ! répliquai-je, Penroc n’est pas si mal et avec quelques transformations, j’en ferai même une petite merveille.
– Allez-vous l’habiter ? Je veux dire : continuellement ?
– Trois mois sans doute, pour commencer. J’ai grand besoin de repos, Mademoiselle. Mademoiselle comment, au fait ?
– Sandrine Leguérec. Je suis la fille d’Hector Leguérec, le seul médecin de ce petit bled. Nous habitons à l’entrée du village. Il faudra venir nous voir, Maman sera ravie de vous accueillir. Les distractions sont rares à Monbourg. Et elle se plaint de ne pouvoir voisiner, car elle ne comprend rien à la langue que l’on parle ici. Moi non plus, d’ailleurs. Au moment où l’on fait l’Europe, ne trouvez-vous pas ridicule. Monsieur Landasle, cet individualisme qui règne en province ?
Je l’approuvai. Visiblement, nous sympathisions.
– Votre calvaire est-il loin ? questionnai-je avec inquiétude.
Comment faire comprendre à cette jeune fille que je ne tenais pas à m’aventurer dans une promenade longue et pénible. Mes mains moites, la sueur qui perlait déjà à mon front témoignaient de ma faiblesse.
Non, je n’étais pas encore guéri. Et je me blâmais d’avoir goûté à la mayonnaise de Marie Adec. Oh ! seulement sur la pointe d’un couteau, mais c’était encore trop.
Sandrine Leguérec prit-elle conscience de ma mauvaise mine ?
Elle proposa :
– Nous irons demain, en empruntant votre voiture…
– Bonne idée ! À quelle heure ?
– Onze heures, voulez-vous ?
– Je viendrai vous chercher, dis-je. Et merci de me servir de guide. Vous êtes la providence des touristes !
– Je ne vous considère plus comme un touriste, répliqua-t-elle vivement, puisque vous habitez Penroc.
Aurait-elle préféré que je sois un simple passant ou bien m’en voulait-elle de vivre à Penroc ? Je définissais mal ses pensées.
– Eh bien ! au revoir, me dit-elle en me tendant la main. À demain.
Je la