La Pauvreté PDF
La Pauvreté PDF
La Pauvreté PDF
;; DOCUMENT DE TRAVAIL N 2 ;;
de la PAUVRETE
en AFRIQUE
Pauvret chronique
au Niger
Perceptions, stratgies et questions mergentes
PAR
BARA GUEYE, BOUREIMA ALPHA GADO
SEYNI HAMA, MOUHAMADOU SALL
CREDIT
: KAMIKAZ PHOTOS
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Rsum
Introduction
I. Prsentation du Niger
6
9
12
15
16
19
20
20
22
24
26
V. Implications politiques
5.1. Une meilleure prise en compte des stratgies locales
dans les politiques nationales
5.2. Amliorer les systmes dalerte prcoce
26
26
30
Conclusion
31
31
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
PAUVRETE
CHRONIQUE AU NIGER
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
'conomie
ouest
africaine
dpend
essentiellement de l'agriculture qui
contribue pour 30 50% du PIB et
reprsente la plus importante source de
revenus pour 70 80% de la population.
Dans la plupart des pays, la part de
l'agriculture dans la structure de l'conomie
n'a cess d'augmenter au cours des 15
dernires annes. Mais l'Afrique de l'Ouest
fait partie des rgions les plus pauvres au
monde o la pauvret est quasi endmique. Le revenu
per capita en 2000 tait infrieur 400 US$ pour 10
des 15 pays qui composent cette rgion.
La
proportion de personnes vivant avec moins d'un dollar
par jour variait de 15% au Sngal plus de 60% au
Burkina Faso, Niger, Sierra Leone et Togo. En outre, le
taux lev d'analphabtisme, la mortalit maternelle et
infantile et l'incidence du VIH/SIDA renseignent
galement sur l'tendue de la pauvret avec une large
proportion de la population tant dans une situation de
pauvret chronique. (Mongbo, R.). Malgr cette
situation de prcarit, la population totale n'a cess
d'accrotre et la rgion a encore aujourd'hui des taux
de fcondit trs levs. En outre, la sous-rgion
sahlienne fait face depuis plus d'un demi sicle, un
dficit pluviomtrique chronique ayant entran une
baisse de 20 30% des prcipitations dans la priode
1930-1990, augmentant ainsi la pression sur les terres
fertiles qui se rarfient de plus en plus. Cette
gographie hostile, conjugue des politiques
agricoles instables et mal adaptes se sont traduites
par une baisse de la performance du secteur agricole,
CREDIT
: KAMIKAZ PHOTOS
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
I. Prsentation du Niger
Le Niger est un pays vaste avec une superficie de
1.267.000 km2 pour une population de 11, 8 millions
d'habitants (Banque Mondiale, 2004). Il est situ en
pleine rgion sahlienne, sans accs direct la mer,
et avec la plus grande partie du territoire occupe par
le dsert. Ainsi les de la population vivent sur 25%
du territoire et les terres cultivables ne reprsentent
que 12% de la superficie totale du pays. Au cours de
la dcennie 1990-2000, le secteur rural a occup plus
de 83 % de la population. Il produit environ 41% du
produit intrieur brut (PIB) dont 27 % proviennent de
l'agriculture, 10 % de l'levage et 4 % de la pche et
des forts. Elle contribue pour 31% aux recettes
d'exploitation, c'est--dire presque autant que le
secteur de l'uranium (32%). Le Niger est un pays o
les systmes de production sont traditionnels et sont
axs sur une association entre l'agriculture
principalement cralire et auto-consomme, et un
systme pastoral variable selon le type de
transhumance.
L'augmentation du poids relatif des activits rurales
dans la formation de la richesse nationale rsulte
essentiellement de l'accroissement de la part des
productions agricoles, qui passe de 20% 27% du
PIB total entre 1990 et 2001, tandis que les parts de
l'levage et de l'ensemble " pche et fort " restent
constantes (Rpublique du Niger, 2003). Les donnes
de la DSCN font tat d'une cration de richesses par
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Pauvret et vulnrabilit
Pauvret et vulnrabilit sont deux concepts qui vont de pair dans l'imaginaire populaire nigrien, car l'tat de
vulnrabilit est souvent peru au Niger comme une passerelle vers la pauvret. Au cours d'enqutes ralises
dans les quartiers pauvres de Niamey, les mnages ont t recenss et classifis par niveaux de vulnrabilit
dfinis par un chantillon de chefs de mnage. Sont considrs comme vulnrables les chefs de mnage qui
n'ont pas leur propre habitation ; et ceux qui ne peuvent pas subvenir aux besoins alimentaires et sanitaires de
leurs familles et qui sont obligs de travailler pour les autres.
Source : Seeda, 2004 :2
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Dans cet tat de manque, trois ressources sont communment cites : les ressources alimentaires, la
main d'uvre travers le nombre d'enfants, et les animaux. Cette perception de la pauvret cadre avec les
dfinitions institutionnelles qui la peroivent sous
l'angle de manque et/ou d'indisponibilit de ressources
indispensables pour satisfaire les besoins essentiels ;
c'est dire, une situation dans laquelle la majorit de
la population vit avec un bas niveau de revenus ne
permettant pas de satisfaire leurs besoins et dans laquelle les ressources disponibles dans l'conomie,
mme si elles sont quitablement distribues, sont
peine suffisantes pour subvenir aux besoins essentiels
de la population, et ce, de faon soutenable.
(UNCTAD in Oduro et Aryee, op. cit.).
Selon le Programme des Nations unies pour le dveloppement (PNUD), la pauvret reprsente une
situation d'incapacit (manque de comptence) de
profiter des divers aspects de la vie, comme vivre
sainement et longtemps, avoir accs l'ducation de
son choix, disposer de ressources conomiques
suffisantes et participer pleinement la vie de la
socit. (PNUD in Seeda, 2005 :1). Dans une
perspective d'enrichissement du concept, la Banque
mondiale a tendu le concept de pauvret pour englober tout ce qui est relatif une situation de risque et
de vulnrabilit et tout ce qui est absence d'expression et de pouvoir (Seeda, 2005 : 2).
Il ressort de ces deux contenus que la pauvret n'est
pas, ou plutt n'est plus seulement un tat de
dnuement matriel, mais elle serait la fois :
CREDIT
: KAMIKAZ PHOTOS
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Talaka
Alfakaru
Signification
Critres
didentification
Typologie
selon la svrit
W Trs pauvre
W Extrme pauvret
W Pauvre parmi les
pauvres
W Pauvret absolue et
chronique
W Pauvre
W Rcolte moins de 50
bottes de mil
W Ne possde aucun
animal
W Paysan sans terre
W Pauvret chronique
avec cependant de
faibles possibilits de
remonter la pente
(aprs une bonne
rcolte, il peut
commencer
reconstituer son capital)
W Relativement
pauvre
W Simple citoyen
W Ni pauvre ni riche
W Pauvret
conjoncturelle ou
transitoire
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
assez souvent une association entre chronicit et
svrit.
Mais il est galement important de distinguer la pauvret d'un certain nombre d'autres termes couramment
utiliss comme la privation, l'exclusion et la vulnrabilit qui renvoient des ralits plus prcises. La privation renvoie la fois une perte de choses ncessaires ou mme d'un droit, alors que la vulnrabilit est
souvent dfinie comme le risque ou la probabilit de
devenir pauvre. Par contre l'exclusion rsulte le plus
souvent d'un rapport de force qui empche un groupe
ou une personne dans la communaut de jouir de certains droits.
CONCLUSION PARTIELLE
On peroit travers les dfinitions conventionnelles et
la perception des populations que la pauvret au Niger
est un phnomne multidimensionnel, illustr par la
diversit des termes utiliss dans le vocabulaire local
pour caractriser les diffrents tats de manque. Il faut
cependant souligner que les diffrentes terminologies
utilises font rarement cas de la pauvret chronique.
Evidemment, l'identification des groupes vivant dans
une situation de pauvret chronique est assez complexe et ncessite un dispositif d'observation longitudinal qui fait actuellement dfaut. La ncessit de ne
pas rduire la pauvret chronique certains indicateurs qui lui sont associs, comme la vulnrabilit, dcoule du fait qu'une bonne comprhension de la dynamique de la pauvret chronique peut permettre la mise
en place de politiques et programmes de lutte contre la
pauvret mieux adapts aux besoins des groupes
vivant dans la pauvret sur une longe priode.
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Population
%
Contribution
Nombre
la pauvret de pauvres
nationale
Indice
de pauvret
P0
P1
P2
Milieu urbain
16,6
0,52
0,181
0,084
13,65
714 00
Niamey
5,94
0,42
0,134
0,06
3,95
207 000
Autres villes
10,65
0,58
0,207
0,098
9,7
507 000
Milieu rural
83,40
0,66
0,225
0,104
86,35
4 514 000
100
0,63
0,217
0,101
100
5 228 000
Niger
P0 : Incidence de la pauvret
P1 : Profondeur de la pauvret
P2 : Degr de gravit de la pauvret
Source : ENBC (1993). In Seyni et Abdoulaye (op. cit.)
1997
1998
1999
2000
IPH
64,31
66,73
62,16
62,61
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
10
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
% pauvret
extrme
(moins
1$US/jour)
Mortalit
infantile
()
Accs
l'eau
potable
Index
Gini
2000
XXX
1990
2000
2000
2000
2000
Bnin
360
380
17.8
17.8
83,8
Burkina Faso
290
230
61,6
61,6
91,8
Cte d'Ivoire
780
660
35,6
84,2
Gambie
320
330
35,6
71,6
119
Mali
270
240
71,6
74,4
124
Niger
310
180
74,4
15,1
130
Sngal
720
500
15,1
66,4
59
Togo
530
66,4
47
78,2
Libria
300
IDH
2000
Rang
0,420
158
55,1 (1998)
0,320
169
36,7 (1995)
0,428
156
160
0,414
164
50,5 (1995)
0,277
172
50,6 (1995)
0,431
154
0,493
141
47
facteurs expliquent cette situation, savoir les constructions socioculturelles (l'cole est perue comme un
facteur acculturant) ; les pratiques traditionnelles nfastes tels que les mariages et grossesses prcoces ;
la division sexuelle du travail qui cantonne la jeune fille
dans les tches domestiques ; l'ingal accs des femmes
aux moyens de production, dont la terre et le crdit
(Niger, Rpublique du, 2003). Mais un facteur encore
plus pernicieux, qui existe dans beaucoup de socits
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
11
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
rurales au Niger et ailleurs en Afrique de l'Ouest, et qui
justifie le faible investissement consenti pour l'ducation des filles, concerne la conception selon laquelle
la femme est une trangre aussi bien chez ses
parents - car elle est appele un jour rejoindre le domicile conjugal - que chez son mari o elle est considre comme quelqu'un venu d'ailleurs.
En outre, lorsque l'on examine les statistiques de la
Banque africaine de dveloppement(5), le taux d'analphabtisme du Niger est le plus lev de l'Afrique de
l'Ouest. En 2000, il tait de 84 % contre 24 % pour le
Cap Vert (le plus faible) et 76,1 % pour le Burkina
Faso (le plus lev derrire le Niger). Lorsque l'on
analyse ce taux par sexe, le Niger dtient aussi le
record d'analphabtisme chez les femmes o il s'levait en 2000 91,6 %, loin devant le Cameroun (30%),
le Nigeria (44 %), le Sngal (72,3 %), le Bnin
(75,3%). C'est aussi, au regard de l'volution du taux
d'analphabtisme, le pays qui a consenti le moins
d'efforts pour rsorber le phnomne. Ainsi, lorsque le
taux d'analphabtisme au Bnin voisin passait de
71,9% en 1990 59,7 % en 2000, celui du Niger
passait pendant la mme priode de 88,4 % 84,1 %.
Enfin, pour ce qui concerne l'accs l'eau potable,
seuls environ 59 % des mnages en bnficiaient en
2000. Comme on le voit, quel que soit l'indicateur de
mesure de la pauvret que l'on choisit (proportion de
la population vivant avec moins de 1 $ US par jour, ou
le nombre d'enfants mal nourris, la mortalit maternelle) la proportion de la population touche au Niger
est trs importante. Malheureusement, l'amlioration
des conditions d'accs aux services sociaux de base
se heurte la faible capacit d'investissement du
pays. En effet, le taux d'investissement public par
rapport au PIB est de 5,7 % en moyenne pour la
priode 1999-2003. Pour atteindre l'objectif de dveloppement du millnaire de rduction de la pauvret
de 50 % l'horizon 2015, des efforts beaucoup plus
importants devront tre dploys par l'Etat nigrien,
mais celui-ci est pris dans un cercle vicieux (cf. fig.1)
assez complexe.
Le cercle vicieux de la pauvret au Niger
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
12
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
13
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
important de la reproduction sociale de la pauvret
(le fait que les enfants de pauvres sont beaucoup plus
souvent pauvres, et le demeurent adultes, enfermant
la pauvret dans un cercle vicieux o la pauvret
produit la pauvret et les perspectives d'en sortir
sont tnues). C'est pourquoi, dans l'analyse de la
transmission trans-gnrationnelle de la pauvret, le
faible contrle ou accs aux ressources foncires et
(petits ruminants). Le salaire n'tant que saisonnier, il ne peut pas faire vivre une famille.
4. Les agro-pasteurs, pasteurs en voie de sdentarisation n'ayant ni suffisamment de produits de btail
vendre, ni suffisamment de terres non encore
productives ou terres marginales pour s'auto-suffire
en crales - on les trouve notamment parmi les
groupes Foulb, Toubou et Touareg.
5. Les femmes-chefs d'exploitation agricole dont le
cumul des tches mnagres, maternelles et productives ne permet pas de consacrer suffisamment
de temps pour la prparation des terres au moment
des pluies.
6. Les familles paysannes nombreuses (10 personnes et plus) ayant trop d'enfants en bas ge qui
ptiront du manque de soins et de nourriture, ainsi
que les familles pauvres qui disposent gnralement
de revenus trop faibles et alatoires.
7. Les individus - gnralement femmes enceintes
allaitantes et les enfants de moins de 5 ans, physiologiquement fragiles, souvent atteints de malnutrition
protique ou de carences en micro nutriments (anmies, avitaminoses) dtects ou non par les dpistages mdicaux.
Source :CILSS (2002)..
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
14
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Quelques donnes
sur la mendicit au Niger
l Environ 100 000 mendiants.
l Dont environ 50% des mendiants invalides s'en
sortent.
l Environ 30 % des mendiants se trouvent dans
une situation irrversible et permanente(donc chronique).
l
Les riches dpenses environ 30 % de leurs
salaires en dons.
l Mais les revenus des mendiants ont diminu de
moiti en 6 ans du fait de la concurrence grandissante conscutive l'afflux continu d'indigents
aux frontires de la capitale.
Source : Gilliard, Patrick(7)
CONCLUSION PARTIELLE
Comme dj mentionn, l'absence de bonnes donnes
de panel ne permet pas une bonne identification et
une estimation du nombre de pauvres chroniques au
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
15
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
souvent relatif des salaires trop bas ou pour les
activits informelles la marge bnficiaire trop faible.
En outre, l'ingalit entre les mnages recevant moins
de biens que d'autres notamment en raison des droits
que leur confre leur statut au sein de leur
communaut constitue une donne importante
prendre en compte. Enfin, la terre tant le principal
capital conomique en milieu rural, les familles qui
sont dans une situation d'inscurit foncire chronique
figurent parmi les pauvres chroniques.
Dans l'analyse des perceptions de la pauvret au
Niger, les causes suivantes sont gnralement mises
en exergue: l'accroissement de la population en ce
sens qu'il signifiait une augmentation des bouches
nourrir ; les scheresses rcurrentes ; la dpltion de
la capacit productive en relation avec la dgradation
des sols et l'insuffisance de l'accs l'eau ; l'isolement
et l'enclavement qui limitent les opportunits ; le
relchement des rseaux sociaux de solidarit ainsi
que la rduction de l'assistance ceux qui en ont
besoin ; le manque de capitaux et de revenus ;
l'existence de maladies chroniques et incurables
comme le VIH/SIDA ; l'absence d'opportunits pour
subir une formation ou un apprentissage professionnel
(Oduro et Aryee, 2002 : op. cit.). La persistance de ces
problmes est renforce par le fait que l'essentiel des
revenus des groupes les plus pauvres vont dans
l'alimentation (plus de 70% pour le quintile le plus
pauvre) contre 5% pour les services sociaux comme
l'ducation ou la sant. Les causes de la pauvret
peuvent tre structurelles ou conjoncturelles.
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
16
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
La dvaluation du franc CFA intervenue en 1994,
mme si elle a rendu les produits de l'levage plus
comptitifs sur le march international, a dans le
mme temps renchri les prix des intrants et des
produits
alimentaires
imports.
Une
des
consquences a t la rduction de l'appui dont
bnficiait le secteur qui inaugurait ainsi le dbut
d'une longue crise qui s'est manifeste, au cours des
3O dernires annes, par une baisse de la production
agricole par tte et mme si on a pu observer une
croissance moyenne d'environ 1,6% de la production
cralire totale, celle-ci provient essentiellement de l'
augmentation des superficies cultives et par
consquent une pression de plus en plus forte sur les
ressources foncires.
C'est ainsi que certaines pratiques, telles que la
jachre qui ont pendant longtemps contribu
maintenir la productivit des sols sont de plus en plus
abandonnes. Dans certaines zones, les populations
ont su inventer des pratiques novatrices ayant permis
de maintenir la production agricole un niveau
acceptable, mais ces lots de succs attendent encore
d'tre institutionnaliss. Par ailleurs, les politiques
d'ajustement structurel inities par la Banque
Mondiale et le Fonds Montaire International ont
contribu l'affaiblissement des offices craliers.
Ceux-ci avaient pour fonctions essentielles, la
rgulation et l'approvisionnement des marchs en
priode de pnurie. La rcente crise alimentaire a
relanc le dbat sur les structures devant assurer les
fonctions dvolues aux offices craliers savoir la
rgulation et l'approvisionnement des marchs. A titre
d'illustration, l'OPVN qui comptait 600 employs dans
les annes 1990 n'en compte aujourd'hui que 57
(CSAO, 2005), avec comme consquence une
capacit de raction plus rduite.
Le poids de la dette
Durant la priode du boom de l'uranium, le
gouvernement nigrien s'est lanc dans de gros
investissements qui se sont galement traduits par un
endettement trs lev qui constitue un frein au
dveloppement conomique et social. A titre
d'illustration, l'encours total de la dette publique en fin
dcembre 2002 tait estim 1282,1milliards F CFA.
La dette extrieure qui reprsente 85,3% de cet
encours est constitue pour l'essentiel de la dette
multilatrale (78,4%). Le taux d'endettement
s'tablirait 91,4% en 2002 contre 96,3% un an plus
tt. L'encours de la dette extrieure, qui constitue un
poids relativement important pour les finances
publiques, reprsenterait l'quivalent de 4 ans et 7
mois d'exportation. Le service de la dette extrieure
avant rchelonnement se chiffrait 60,1 milliards F
CFA et reprsentait 4,3% du PIB, 31,7% des recettes
budgtaires et 25,9% des exportations (Niger
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
17
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
amoindrir les consquences de telles catastrophes.
Mais, il y a une impression gnrale que, pour
diffrentes
raisons
(politiques,
techniques,
administratives) la capacit de raction de l'Etat est
faible. Il faut ajouter cela, les imperfections propres
aux organismes d'aide en temps de crise et qui se
dclinent en procdures trop longues, manque de
coordination des interventions, faible connaissance du
terrain et de ses ralits. Par ailleurs, certains
observateurs soulignent l'inertie des diffrents
systmes mis en place en priode d'embellie
climatique et de bonne production agricole,
la
prdominance des rponses techniques, la faible
implication des populations rurales dans la dfinition
des mcanismes d'alerte qui n'intgrent pas
suffisamment leurs propres stratgies ; l'absence d'un
systme d'information dcentralis efficace destin
essentiellement aux organisations communautaires de
base, etc.
Tijani (in Seeda, 2005 :1) analyse le phnomne de
famine travers l'organisation de l'espace et la
circulation au sein de cet espace . Son argumentation
repose sur les lments suivants. D'abord, le
caractre alatoire de la pluviomtrie est une donne
que les populations ont toujours intgre. Ensuite,
l'intgration de cette donne a amen les populations
construire un mode de vie adapt permettant de
conjurer au quotidien cette situation. Ce mode de vie
tait articul autour de " stratgies de survie "
comprenant l'agriculture, l'levage, la migration etc.
Ces stratgies taient dveloppes de faon
sectorielle et/ou combine suivant les opportunits et
suivant les priodes. Enfin, ces stratgies de survie
sont dveloppes l'intrieur d'un espace de
circulation dans lequel des solidarits mridiennes
jouent. Par consquent, ce sont les gouvernants qui,
en essayant de remodeler cette organisation politicoadministrative, ont dtruit l'articulation de ces modes
qui possdaient une rsilience certaine.
Manque d'infrastructures
L'absence d'infrastructures pour faciliter la circulation
ou le stockage des produits agricoles, introduit des
distorsions normes dans les mcanismes du march
et contribuent par consquent renforcer la
vulnrabilit et la pauvret des petits producteurs. A
titre d'illustration, l'augmentation sensible des rcoltes
de crales durant la campagne 2002-03 s'est traduite
par une baisse de l'ordre de 23% du prix du mil
Niamey alors qu'une anne plus tard l'augmentation
des prix du mil entre octobre et dcembre 2004 a t
de plus de 200%, car durant cette courte priode, le
prix du kg de mil est pass de 100FCFA 300FCFA
(FEWS Net.2005). Dans les zones vocation
pastorale, cette situation prend les allures d'une
dtrioration intra-annuelle des termes de l'change
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
18
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
16
7
0
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
32
20
2
14
3
0
18
5
0
19
9
0
23
12
1
9
3
0
15
3
0
20
5
0
2
0
0
7
0
0
1
0
0
22
8
0
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
19
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Cette situation se traduit par une dpendance accrue
vis--vis des importations vivrires (28.000 tonnes/an)
et de l'assistance alimentaire internationale. Un bref
aperu historique montre que depuis 1930, le Niger
est frapp d'une grave crise alimentaire tous les 15 ou
20 ans. Ainsi, la mmoire collective nigrienne (Seeda,
2005) reste encore trs marque par les grandes
crises suivantes :
aIze Nere : vente des enfants (1901-1903) ;
aDoa Jire : anne des criquets (1931-1932) ;
aYeda : nom du village (1943-1944) ;
aGari : farine de manioc (1954) ;
aBandabari : tourner le dos (1966)
aDiaba Kuru : traner les boubous (1984-1985).
Si de faon gnrale, c'est la dtresse humaine et
animale qui est le trait commun de toutes les zones
affectes par la crise, il reste que celle-ci se manifeste
avec quelques traits particuliers selon les zones. Ainsi,
au niveau de la commune rurale de Kaou, plusieurs
manifestations de la famine ont t observes : renchrissement des denres alimentaires de base (la
mesure des 2,5 kg de mil tait vendu 1000 F, celle
de sorgho 900 F) ; rduction drastique du nombre de
repas qui de 3, est pass dans la plupart des cas 1 ;
changement des modes alimentaires , les repas se
faisant uniquement base de feuilles d'arbres et de
plantes; alimentation animale base de cartons ;
hausse des taux de malnutrition svre chez les
enfants ; niveaux levs de mortalit animale (prs de
2000 vaches sont mortes Dounbantan, 3000
Sultanazar, 2500 Chilwalki) ; reconversion en agri-
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
20
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
permet de mettre en place des actions visant
prvenir les crises et le cas chant, attnuer leurs
effets. L'office national des produits vivriers du Niger
(ONPVN) est une institution qui joue un rle important
dans la gestion des crises alimentaires. Elle est
charge de maintenir les stocks alimentaires et de
distribuer l'aide alimentaire. Lors de la crise alimentaire
qui a suivi la mauvaise rcolte de 2000, le
Gouvernement a dcid de lancer un programme de
vente de denres alimentaires de base des prix
modrs. L'initiative de promouvoir l'agriculture de
contre-saison par la ralisation de cultures irrigues a
galement t lance.
La Stratgie oprationnelle de scurit alimentaire
2000 (adopte en aot 2000) affirme que la scurit
alimentaire de la population nigrienne constitue un
service public, ce qui signifie qu'elle est considre
comme un objectif national fondamental. Le Plan
national d'action pour la nutrition (1997) constitue
galement un document d'orientation fondamental.
Pour faire face aux scheresses frquentes et climats
arides, les initiatives gouvernementales relatives
l'eau comprennent la politique et les stratgies pour
l'eau et l'assainissement; un programme complet de
lutte contre la dsertification et la scheresse a t mis
en place. En outre, plusieurs ONG s'intressent la
scurit alimentaire sous des angles diffrents. Mais,
malgr ce dispositif institutionnel toff, et le fait que
les systmes d'alerte prcoce au niveau national et
sous-rgional avaient signal plusieurs mois
l'avance la trs forte probabilit de la crise alimentaire,
les effets dramatiques de cette dernire n'ont pas pu
tre vits. Cette situation pose la question de
l'exploitation adquate, par les dcideurs et les
partenaires au dveloppement, des donnes fournies
par les mcanismes d'alerte prcoce.
Cadre de lutte contre la pauvret
A ct de ce dispositif, le gouvernement a mis en
place depuis 2001, dans le cadre de l'initiative PPTE,
un cadre stratgique de rduction de la pauvret
travers l 'laboration d'un DSRP. La SRP du Niger a
pour objectif majeur de rduire l'incidence de la
pauvret de 63% moins de 50% en 2015. Les
principaux axes stratgiques de cette stratgie portent
sur : (1) la cration d'un cadre macroconomique
stable avec un gain net de revenu par tte de 0,7%
soit une rduction de 2 points de la pauvret, (2) le
dveloppement des infrastructures routires et le
tourisme, (3) l'amlioration de l'accs aux services
sociaux de base pour les pauvres et (4) la promotion
de la bonne gouvernance. Mais le DSRP prcise
cependant que la ralisation des ces objectifs dpend
essentiellement d'une reprise du secteur agricole dont
dpend essentiellement l'conomie du Niger.
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
21
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Adoptes en zone
Hausa
Adoptes
en zone Zarma
Vente d'animaux
Autres activits
commerciales
Consommation de plantes
sauvages
Recours la solidarit
Liquidation de biens
personnels
Exode
Aide de l'Etat
Consommation des
famille
Vente d'animaux
Salariat agricole
Autres activits
commerciales
Consommation de plantes
sauvages
Recours la solidarit
Aide de l'Etat et des ONG
Liquidation de biens
personnels
Petit commerce
Vente d'animaux
Vente d'animaux
Jardinage
Petit commerce
Salariat agricole
Vente de biens
personnels
Aide et solidarit
Aide et solidarit
Jardinage
Consommation des
dernires rserves
alimentaires
dernires rserves
alimentaires
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
22
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Baro et Buterbury in Wisner et al (2005) dcrivent
parfaitement comment de telles stratgies sont mises
en application Fandou Bari, petit village zarma situ
55 km l'Est de Niamey. L'agriculture pluviale
pratique dans le village est domine par le mil. La
possession de btail est une pratique courante chez
les Zarma qui co-habitent avec quelques hameaux
Peulh. Comme dans la plupart des zones arides en
Afrique de l'Ouest, le contexte de vulnrabilit
chronique a toujours impos aux populations d'tre
inventives et dotes de bonnes capacits d'adaptation.
A Fandou Bri, ces aptitudes se dclinent en plus de
mobilit, et un changement continu dans le mode
d'allocation et d'utilisation des ressources des
mnages. Dans les annes 1950 par exemple, la
migration tait un phnomne rare et les populations
pouvaient vivre correctement de leur production. Mais
depuis les scheresses des annes 1960 et 1970,
l'adoption de stratgies de diversification s'est
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
23
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Il ressort de ces extraits de rcits, quelques
considrations :
adans l'imaginaire des populations, la situation de
manque est permanente et face cette situation, les
populations ont dvelopp une certaine rsilience,
c'est--dire une capacit d'adaptation ;
acette adaptation est constitue d'une combinaison
de stratgies alliant des activits diverses touchant
l'agriculture, l'levage, les activits commerciales, les
activits de services (boys),
aces activits sont sexuellement orientes : si
l'agriculture concerne aussi bien les hommes que les
femmes qui peuvent aussi disposer de champs,
certains mtiers sont pratiqus par les hommes
(coupes de bois, commerce ambulant de vtements)
alors que d'autres activits sont pratiques par les
femmes (coiffure, meunerie, vente de mil),
aCes activits varient en fonction de la priode. Ainsi,
pendant la saison des pluies, les populations sont au
village pour cultiver, et en priode de saison sche,
elles vont dans les villes pour se consacrer d'autres
activits commerciales. Il y a donc un ajustement des
activits par rapport au temps ;
aLes stratgies sont articules autour de solidarits
familiales fonctionnelles. Donc, ces stratgies ne sont
opratoires que lorsqu'elles s'appuient sur des
rseaux de solidarits ;
aCertaines stratgies sont forte utilisation de main
d'uvre familiale et supposent une mobilit des
populations, donc l'existence d'un espace de
circulation.
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
24
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
: KAMIKAZ PHOTOS
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
25
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
V. Implications politiques
5.1. UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE
DES STRATEGIES LOCALES DANS
LES POLITIQUES NATIONALES
Les transformations dans les comportements
mentionns prcdemment ne doivent pas cacher les
bonnes pratiques durables qui montrent la capacit
d'innovation des populations lorsque la pjoration des
conditions cologiques remet en cause leur propre
survie. La prise en compte de ces stratgies contribue
rendre les rponses plus adaptes. Mais cela passe
par la reconnaissance que les populations disposent
des
capacits
d'anticipation
et
d'adaptation
contrairement cette ide rcurrente dans les
discours officiels et selon laquelle les mentalits
seraient rives sur l'immdiat et ne se projetteraient
pas sur l'avenir, ce qui entrane une gestion
irrationnelle des ressources .
Comme le souligne Mortimore et al (2001), on devrait
accorder une importance gale au savoir et
l'exprience des paysans qu' celle des chercheurs et
des vulgarisateurs ; les systmes de vulgarisation
devraient se mettre au service des paysans plutt que
d'essayer de corriger ou d'orienter diffremment les
pratiques. Les zones rurales du Niger sont riches
d'exemples qui montrent le caractre souvent
ingnieux, novateur et durable des rponses
communautaires et individuelles face aux difficults de
la nature. Dans ce cadre, une tude mene dans le
dpartement de Maradi et couvrant la priode 19602000 (Mortimore et al, opcit) a produit des rsultats fort
loquents. Dans cette zone, beaucoup d'auteurs
avaient avanc depuis les annes 1970, que les
systmes de production taient en pleine crise en
raison de la combinaison de certains facteurs volutifs,
notamment : la pjoration pluviomtrique, une
comptition accrue pour les ressources foncires en
raison de la croissance dmographique, des dficits
en fumure animale et en rsidus des cultures
(ncessaires au maintien de la fertilit des sols) de
plus en plus importants, et une pnurie de maind'oeuvre attribue la rapide extension des zones
cultives. Pourtant malgr ces contraintes, les
agriculteurs du dpartement de Maradi ont
globalement russi maintenir pendant la priode
considre la production cralire moyenne (par
habitant, mme si on inclut la population urbaine)
environ 260kg/hab, niveau bien suprieur au taux
minimum requis habituellement de 200 kg/hab aprs
le battage et les pertes dues aux stockage. Ces
rsultats ont t atteints parce que les populations ont
su dvelopper des technologies adaptes.
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
26
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
27
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
dcentralisation, il est important d'analyser le rle que
les gouvernements locaux pourraient jouer.
Valoriser le potentiel de protection sociale qu'offre
le secteur informel.
L'tat doit galement prter plus d'attention au rle du
secteur informel, car c'est lui qui absorbe l'essentiel
des migrants qui arrivent en ville en temps de crise. Ce
secteur qui contribuait en 1995 pour 28% du PIB a sa
part augmenter constamment et il vient aprs le
secteur agricole pour le nombre d'emplois crs. Il
joue un rle important car il offre plus d'emplois que le
secteur dit formel et constitue une des voies de sortie.
Cependant, dans un contexte de pauvret chronique
et de vulnrabilit extrmes, le secteur informel ne doit
pas tre uniquement peru sous son angle
conomique mais plutt comme un espace de
solidarit dont le rle principal est de fournir une
protection sociale aux personnes les plus pauvres.
L'entre dans ce secteur se fait gnralement
travers des rseaux socio-familiaux sur la base d'un
mcanisme de redistribution permettant aux nouveaux
arrivants souvent sans ressources d'accder assez
facilement un fonds de dpart, certes faible, mais qui
permet d'tre oprationnel assez rapidement.
Tableau 8 : Contribution du secteur informel dans le
PIB (en millions de FCFA)
Anne
1998
1999
2000
2001
PIB total
1 086 730
1 075 155
1 134 712
1 278 104
% PIB
Secteur informel
74,68 %
76,06 %
75,32 %
77,46 %
Principales caractristiques
du secteur informel
aFacilit d'entre
aConcurrence non rglemente
aTaille rduite des entreprises gnralement de
type familial
aUne formation traditionnelle acquise en dehors du
systme formel d'ducation
aUtilisation de techniques haute intensit de
main-d'uvre
aNon prise en compte des normes juridiques,
administratives et fiscales
aAbsence de comptabilit formelle
Source : Seeda : numro spcial PAC-REP 2006.
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
28
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
En milieu rural, la terre constitue le capital le plus
prcieux que peuvent possder les mnages en
situation de pauvret chronique. L'exprience montre
qu'il y a une relation troite entre le non accs scuris
la terre et la pauvret. Dans ce contexte, les femmes
occupent une position particulirement vulnrable. En
effet, comme le montrent Doka et Monimart (2004)(13)
le processus d'exclusion des femmes correspond dans
les faits une ncessit de rajuster ou de rechercher
un quilibre social entre la ressource et les
bnficiaires potentiels. Leur tude mene dans le
Dpartement de Maradi montre que lorsque la
ressource foncire est abondante, les femmes
accdent la terre et jouissent de leur hritage foncier.
Mais ds que la ressource commence manquer le
rajustement se fait leur dtriment car dans la
plupart des cas elles perdent le droit de jouir de
l'hritage foncier. Ce phnomne s'est accentu
depuis la scheresse de 1984, avec la dislocation de
l'unit d'exploitation et de consommation pour partager
les risques lis la production, o les femmes ont
progressivement perdu l'accs l'hritage avec
l'application des coutumes (ou coutumes islamises).
Aujourd'hui ce processus d'exclusion a atteint un tel
niveau que les auteurs se demandent si l'agriculture
n'est pas en train de se dfminiser avec toutes les
consquences sur le renforcement de la pauprisation
des femmes du fait de la perte progressive de moyens
conomiques propres.
C'est pourquoi, pour lutter effectivement contre la
pauvret, le gouvernement nigrien doit renforcer les
mcanismes de protection des groupes les plus
vulnrables. Des efforts importants ont t mis en
uvre dans le cadre du Code Rural en crant les
conditions pour une reconnaissance lgale des droits.
Toutefois, il est important de veiller ce que l'essentiel
des ressources foncires ne soient accapares par les
aristocraties foncires locales et les nouveaux intrts
privs. Au Niger, tant donn le rle que joue l'levage
dans l'conomie du pays, et la prcarit des droits
fonciers des leveurs, il est important que la
scurisation des droits de ces groupes soit au centre
de tout programme de lutte contre la pauvret. On doit
surtout tre attentif aux risques que les discours
actuels en Afrique de l'Ouest sur la modernisation de
l'agriculture et les ncessaires rformes des rgimes
fonciers qui doivent l'accompagner, peuvent avoir sur
les petits producteurs pauvres. Ces discours btis sur
la conception selon laquelle c'est travers la
promotion de l'agrobusiness que l'on pourra rsoudre
les problmes d'autosuffisance alimentaire s'accompagnent souvent de mesures consistant en l'installation
de nouveaux acteurs.
C'est ce qui arriv en 1984 avec l'opration Ainoma
(retour la terre en Haoussa). Une valuation
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
29
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
Indicateurs
Existence de terres
libres
Droit de hache et
hritage
Droit de hache et
hritage avec jouissance
Hritage
Hritage
Dislocation de lexploitation
familiale avec un partage
intra-mnage des risques
lis la production
Moins de jachre, et
recours aux prts
Hritage et prts
Partage de responsabilit
alimentaire/saison
Gamana seulement et
dbut de rclamation de
lhritage selon lislam
Gestion commune de la
pnurie
Hritage, location et
gage (rares et plus
scurisants) et
claustration de champ
Pas de gamana et
seulement rclamation
de lhritage selon lislam
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
30
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
diffrents acteurs ont eu des ramifications mme sur la
manire dont la pauvret est perue au Niger de sorte
que aujourd'hui, le discours officiel prfre l'usage du
terme " groupes vulnrables " la place de " groupes
pauvres ". Or, s'accorder sur le sens des lments qui
structurent le travail de recherche est un pralable
pour crer les conditions d'un dialogue entre les
chercheurs et les dcideurs. C'est pourquoi, dans le
cadre de la suite donner au programme au Niger la
priorit devrait tre donne aux axes suivants :
Conclusion
Cette revue a montr le caractre multidimensionnel
de la pauvret au Niger mais galement et surtout la
diversit des stratgies dveloppes par les
populations pour faire face. De faon gnrale, les
dfinitions conventionnelles et la perception des
populations font rarement rfrence la notion de
pauvret chronique, mais renvoient davantage au
degr de svrit de la pauvret. Cependant la
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
31
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
ncessite un dispositif d'observation longitudinal qui
fait actuellement dfaut. Combien de personnes sont
sorties de la pauvret chronique et combien de
personnes se sont appauvries ? A quelles catgories
socioprofessionnelles
ou
quelles
zones
gographiques appartiennent-elles ? Au Niger, comme
la plupart des autres pays de la sous-rgion, les
donnes disponibles ne permettent pas d'avoir une
vision claire de la dynamique de la pauvret. Or mieux
comprendre la dynamique de la pauvret au Niger
peut beaucoup renseigner sur l'efficacit des politiques
et des stratgies dveloppes par les populations pour
faire face la pauvret chronique
D'ailleurs les faiblesses notes dans le ciblage des
groupes chroniquement pauvres dans les DSRP et
autres programmes de lutte contre la pauvret dcoule
en grande partie de ce vide et conduit plusieurs
acteurs utiliser des critres relatifs la vulnrabilit
pour btir leurs programmes d'intervention mme si
dans un pays comme le Niger, il est trs difficile de
dissocier la vulnrabilit et la pauvret car la plupart
des communauts considres comme vulnrables
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
32
DE LA PAUVRET EN AFRIQUE
; DOCUMENT DE TRAVAIL No 2 ;
33