Le Service Public

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LE SERVICE PUBLIC

NOTION ET GESTION

DEFINITION
Un service public est une activité exercée directement par l'autorité
publique (Etat, collectivité territoriale ou locale) ou sous son contrôle,
dans le but de satisfaire un besoin d'intérêt général. Par extension, le
service public désigne aussi l'organisme qui a en charge la réalisation de
ce service.

Le service public est une activité assurée par une personne publique ou
par une personne privée sous le contrôle d'une personne publique en vue
principalement de répondre à un besoin d'intérêt général. C'est une
fonction de prestation.

Le droit du service public est un élément essentiel du droit administratif


français.

On distingue deux grands domaines d'activité dans l'administration


française : la police administrative et l'activité de prestation de service.

La police administrative consiste à prendre les mesures nécessaires au


maintien ou au rétablissement de l'ordre public, c'est-à-dire à la
tranquillité, la sécurité, la salubrité publique, la moralité publique associée
à des circonstances locales particulières (Arrêt CE, 1959, "Société des
films Lutétia"), et au respect de la personne humaine (CE 1995
« commune de Morsang sur Orge » cette jurisprudence n'a jamais été
renouvelée, elle demeure donc une exception).

L'activité de prestation de service comprend les services publics


administratifs (SPA) et les services publics industriels et commerciaux
(SPIC).

Une activité constitue un service public quand elle est assurée ou assumée
par une personne publique, ou par une personne privée, en vue d'un
intérêt public. C'est une activité d'intérêt général gérée par une personne
publique ou sous son contrôle par une personne privée. Le but de l'activité
du service public est l'intérêt général, cette activité doit être rattachée à
une personne publique.
La notion de service public est un des concepts fondamentaux du droit
administratif français. Elle a d'ailleurs contribué, dans la première moitié
du XXe siècle, à construire ce droit. Dans la seconde moitié, il a été
formellement admis que des activités de service public peuvent être
assurées par des personnes privées, ce qui privilégie l'acception
fonctionnelle.

II- Les caractéristiques du service public

1)L'intérêt général

L'intérêt général c'est ce que les autorités légitimes, démocratiques


décident de qualifier comme tel. Dans la réalité le juge administratif peut
être amené à déterminer si une mission est d'intérêt général.

Il peut y avoir un besoin général sans que pour autant un service public
soit créé : il y a alors carence des pouvoirs publics.

L'intérêt général est mal défini : il ne figure pas dans la Constitution de


1958, contrairement à la souveraineté.

D'autre part, la notion d'intérêt général évolue largement dans le cadre du


droit de l'Union européenne. L'essentiel de la réglementation provient
maintenant du droit communautaire (règlements et directives
européennes). On estime la proportion du droit communautaire dans le
droit de chaque État membre aux deux tiers des nouveaux textes
réglementaires.

2)Le rattachement de l'activité à une personne publique

Un service public doit être rattaché d'une manière ou d'une autre à une
personne morale de droit public (État, collectivité territoriale,
établissement public). Ce rattachement peut se manifester de différentes
manières. La plus évidente est la prise en charge directe par une personne
publique.

Il peut aussi s'agir d'une personne privée en gestion ou d'une société


d'économie mixte (SEM) avec majorité du capital détenu par le public,
voire tout simplement d'un contrat de type délégation de service public ou
partenariat public-privé.

Lorsque l'institution responsable d'un service est privée, le service peut


être public si l'institution en cause a été créée par une autorité publique, si
ses dirigeants sont nommés par une autorité publique, s'il existe un
contrôle exercé par une personne publique ou encore si l'organisme se
voit reconnaître des prérogatives de puissance publique.
3) Les types de services publics

Les services publics industriels et commerciaux (SPIC) relèvent du droit


privé et les services publics administratifs (SPA) du droit public. Cette
distinction a réellement émergé après la Seconde Guerre mondiale, mais
elle a connu ses prémices en 1921 par le biais de l'arrêt Société
commerciale de l'ouest africain (arrêt dit du Bac d’Eloka), considérant
qu'une affaire concernant un service public relevait en l'espèce du juge
judiciaire1. En effet on constate à cette époque que de nombreux services
publics peuvent être gérés comme des services industriels. L'État-
providence nécessite dès lors des services publics entrant dans la sphère
privée et soumis aux règles de droit privé. Dès lors un contentieux est né
pour savoir si un service public est un SPA ou un SPIC. La jurisprudence
administrative a dégagé pour ce faire trois critères dans l'arrêt Union
syndicale des industries aéronautiques (1956) :

 l'objet de l'activité en cause


 le mode de financement
 les modalités de fonctionnement.

Dans cet arrêt, les trois critères doivent être réunis pour qu'un service
public soit un SPIC. Cependant la jurisprudence ultérieure donnera un
caractère alternatif à ces trois critères

4)L'objet de l'activité

En théorie les activités qui relèvent par nature de l'État sont


caractéristiques d'un SPA. Dans la pratique, la jurisprudence est peu
fiable.

5) Le mode de financement

Ce critère est plus objectif et plus discriminant que l'objet de l'activité. Le


SPIC est financé par des redevances qu'il perçoit sur les usagers du
service et qui est calculé en fonction du coût de la prestation fournie. Le
SPA perçoit des subventions publiques ou (et) des recettes fiscales : les
taxes. La taxe ne correspond pas au coût du service (Par exemple, la
redevance audiovisuelle est une taxe). Pour les ordures ménagères, les
communes ont le choix entre taxe et redevance, et donc entre SPA et
SPIC.

6) Les modalités de gestion du service

Ce critère peut être déterminé par la comptabilité utilisée : comptabilité


publique pour un SPA, plan comptable privé pour un SPIC.

Une activité gérée directement en régie par la personne publique est


généralement un SPA. Si l'organisme qui gère l'activité bénéficie d'un
monopole légal, cette activité est généralement qualifiée de SPA. Un
service gratuit n'est jamais industriel et commercial.

Lorsque trois critères convergent, la distinction SPA/SPIC est assez claire,


elle est plus délicate à déterminer lorsque seuls deux critères convergent.
Il n'y a pas de règle quant à la prééminence de tel ou tel critère.

Pour l'Établissement français du sang, cette mission de service public se


rattache par son objet au SPA alors qu'une part importante de ses
ressources provient de la vente des produits de santé et que le décret de
1999 fait application à cette activité de règles généralement appliquées
aux activités industrielles et commerciales. Dans ce cas le critère objet de
l'activité a prévalu.

En dernier lieu, une activité peut recevoir une qualification par des textes.
Si ce texte est une loi le Conseil d'État se soumet, si ce texte est un
règlement (décret) le Conseil d'État peut remettre en cause la
qualification.

III- Création, suppression et organisation des services


publics

1) Compétence du Parlement et des autorités administratives


a) Compétence en matière de création

Traditionnellement, le Parlement disposait exclusivement de la


compétence pour créer des services publics. Avec la Constitution de 1958,
la création de service public ne figure pas dans la liste des matières
réservées au législateur par l'article 34. Cependant, cet article place sous
la compétence de la loi certains services déterminés (défense nationale,
enseignement, sécurité sociale). Indirectement, ce même article confie
également la compétence au législateur si l'institution du service est de
nature à porter atteinte à l'exercice d'une liberté publique. Enfin, le
législateur est compétent pour la création d'une catégorie
d'établissements publics.

La jurisprudence du Conseil d'État considère que les autorités


administratives peuvent subordonner l'autorisation d'exercer une activité
à des obligations de service public. Les autorités administratives
transforment donc indirectement une activité privée en service public. Il
faut que l'activité soit soumise à un régime d'autorisation préalable et
qu'elle présente un caractère d'intérêt général.

b) Compétence en matière de suppression

Le gouvernement est compétent de manière générale pour la suppression


des services publics. C'est seulement dans le cas où le service public a été
créé par une loi que le législateur doit intervenir pour la modifier ou
l'abroger.

c) Compétence en matière d'organisation

Il est admis depuis longtemps que le pouvoir réglementaire est compétent


pour l'organisation des services publics.

d) Compétence des collectivités locales

Les collectivités locales peuvent créer des services publics sous certaines
conditions. Leur domaine d'intervention est déterminé par la loi du 7
janvier 1983 qui le limite quand le domaine relève exclusivement de l'État
ou pour protéger l'initiative privée.

Les collectivités locales ont utilisé très largement cette faculté notamment
dans le domaine économique par la création d'entreprises publiques.

La jurisprudence a limité ces créations en considérant que les


interventions des collectivités locales étaient en principe illégales en ce
qu'elles faussaient la libre concurrence. Cette jurisprudence a été
tempérée par des dérogations accordées par les juges et par le
législateur, notamment :

 Dans les cas de monopole de fait (distribution de l'eau, du gaz, de


l'électricité).
 Si l'activité est rattachable à une attribution légale de la collectivité
locale.
 Si cela est justifié par un intérêt public en raison des circonstances
particulières de temps et de. lieu
 Une interprétation souple des dérogations fait que la plupart des
interventions sont considérées comme légales.

IV) Le régime juridique des services publics

1) Le régime commun à l'ensemble du service public : les lois de


Rolland

Le service public, au-delà de sa variété, doit répondre aux principes


dégagés par Louis Rolland et qui sont donc appelés les "lois de Rolland".

a) Les principes de mutabilité et de continuité

Ces deux principes vont de pair, le principe de mutabilité étant nécessaire


pour assurer le principe de continuité.
b) Continuité

En principe, un service public doit fonctionner de manière continue et


régulière, sans autres interruptions que celles prévues par la
réglementation en vigueur. Ce principe a une valeur constitutionnelle. En
effet, c'est parce que la puissance publique lui reconnaît une importance
particulière, sur le plan social, qu'un service est considéré comme
appartenant à la catégorie des services publics. Il répond à un besoin
essentiel qui doit être satisfait en permanence. Il entre en contradiction
avec le droit de grève, autre principe de valeur constitutionnelle ; cette
situation entraîne des controverses importantes autour du service
minimum.

c) Mutabilité

L’adaptabilité ou mutabilité du service est la condition nécessaire pour


suivre l’évolution des besoins d'intérêt général. Cette condition justifie les
mutations qui interviennent régulièrement dans les services publics, qui
doivent s'adapter tant aux progrès de la technique qu'à l'évolution de la
demande sociale. Ce qui implique qu'aucun obstacle juridique ne doit
s'opposer aux changements à accomplir.

Ainsi, l'administration peut toujours apporter des modifications au contrat


de délégation de service public de manière unilatérale. Les usagers du
service n'ont aucun droit acquis à son maintien, ni à sa modification dès
lors que la nécessité du service n'existe plus. Les personnels des services
publics ne peuvent s'opposer au nom de droits acquis à la mutation du
service. Le contrôle du juge administratif portera sur la réalité de
l'évolution de l'intérêt général (sauf si prévu par une loi).

d)Les principes d'égalité et de neutralité

Ce sont là encore des principes indissociables, à même d'assurer l'égalité


de traitement.

e)Principe d'égalité

Le principe d'égalité implique que les personnes se trouvant dans une


situation identique à l'égard du service public doivent être régies par les
mêmes règles. Il est à relier avec le principe d'égalité des citoyens devant
les charges publiques dégagé par le Conseil d'État dans son arrêt Couitéas
de 1923 et, plus largement, au principe d'égalité devant la loi qui figure
aux articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen
de 1789. En matière de service public, le principe d'égalité est consacré
par l'arrêt du 9 mars 1951 Société des concerts du conservatoire. De ce
principe découle la péréquation qui fait que les secteurs les moins
rentables sont financés par les plus rentables. Exemples : La Poste
pratique les mêmes tarifs sur tout le territoire alors que les zones rurales
induisent un coût supérieur dans la distribution du courrier, un abonné à
l'électricité ou au téléphone paie le même prix quelle que soit sa situation
géographique. La péréquation déconnecte le coût du prix pratiqué, elle
permet à ce titre de poursuivre un objectif d'aménagement du territoire.

Le principe d'égalité n'interdit pas les différences de traitement. Toutefois,


conformément au principe posé par l'arrêt Denoyez et Chorques de 1974,
elles doivent être justifiées soit par une nécessité d'intérêt général, soit
par une différence de situation à l'encontre du service public (Conseil
d'État, 2013, Association SOS racisme : le refus d'accorder la gratuité de
l'accès au musée du Louvre pour les personnes âgées de 18 à 25 ans qui
ne sont pas ressortissantes d'un pays de l'Union européenne ne méconnaît
pas le principe d'égalité car ces personnes n'ont pas vocation à rester
durablement sur le territoire français). Il convient de préciser que cette
possibilité de traiter différemment deux personnes dans des situations
différentes est une simple potentialité et non une obligation (Conseil
d'État, 28 mars 1997, Société Baxte). De même, la différence de
traitement ne doit pas être disproportionnée par rapport aux différences
de situation. Quoi qu'il en soit, la différence de situation fait l'objet
d'interprétations au cas par cas. Ainsi, si l'accès à un service municipal
non obligatoire peut être restreint à une catégorie de personnes, celle-ci
ne peut être définie en fonction de son seul lieu d'habitation. De ce fait,
un service municipal ne peut être réservé aux seuls résidents de la
commune car cela exclut des personnes ayant des liens importants avec la
commune du fait de leur travail ou de la scolarisation de leurs enfants
(Conseil d'État, 13 mai 1994, Commune de Dreux).

Le Conseil constitutionnel a aussi établi que le principe d'égalité ne


s'oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des
situations différentes.

Il ne peut être dérogé au principe d'égalité. Pour des raisons d'intérêt


général et dans le respect de la loi, les différences de traitement sont
possibles, mais elles ne doivent, en aucun cas, être arbitraires ou
discriminatoires. L'instrument de mesure est la proportionnalité entre les
moyens utilisés et les buts visés.

f)Principe de neutralité

.La neutralité stricto sensu

Le service public doit être guidé selon l'intérêt général, sans être influencé
par les intérêts privés, notamment ceux du gérant. Ce principe est surtout
important en matière de communication audiovisuelle ou d'enseignement
afin d'éviter la propagande.

La neutralité est une composante de la notion plus large qu'est la laïcité


de l'État. Elle s'interprète comme une obligation et elle pèse sur
l'Administration ou sur l'individu. Elle peut ainsi s'analyser comme une
obligation qui s'impose à tous les agents des services publics, qui ont
interdiction d'exprimer leurs opinions politiques ou religieuses dans
l'exercice de leur mission. Mais elle peut aussi être une obligation pour
l'administration, s'agissant par exemple de la nécessaire neutralité de
l'enseignement, qui s'impose sur les programmes et les enseignants. À ce
propos, les enseignants du supérieur, à savoir les universitaires,
bénéficient d'une large liberté d'expression réglementée par certaines
limites comme le négationnisme.

Elle peut enfin être un droit revendiqué par le citoyen ou l'administré


contre son administration. Découle ainsi de la neutralité de l'État et de la
fonction publique le principe de l'égal accès aux emplois publics.

Quant au champ d'application, la neutralité s'impose à tous les bâtiments


publics. Cependant, ce principe n'empêche pas une liberté d'expression
des administrés au sein même des bâtiments publics dont ils sont
usagers, et particulièrement dans l'enseignement public.

.La laïcité

Elle est évoquée à l'Article 1er de la constitution de 1958. Trois éléments la


définissent : liberté de conscience, liberté des cultes, séparation des
Églises et de l'État.

Dans l'affaire dite « du foulard islamique », l'avis du Conseil d'État du 27


novembre 1989 fut sollicité par le Ministre de l'Éducation nationale de
l'époque Lionel Jospin à la suite de l'emballement médiatique autour d'une
affaire d'exclusion d'élèves au motif qu'elles portaient le voile. Le Conseil
d'État livre son interprétation, alors considérée comme libérale, de la
laïcité dans l'enseignement public, il surprend par la liberté de culte
reconnue aux élèves dans le cadre qui la réglemente. La loi du 15 mars
2004 votée après un nouvel emballement médiatique a pour but de casser
cette jurisprudence en légalisant les expulsions fondées sur les règlements
intérieurs des établissements qui interdisent le port du voile. Auparavant,
de telles dispositions étaient censurées au cas par cas par le Conseil
d'État.

La laïcité c'est aussi l'obligation pour le personnel de l'administration en


général de concilier l'expression de sa foi ou de ses opinions politiques
avec l'exercice de sa mission. La jurisprudence est plus sévère pour les
manifestations prosélytes en service que pour les absences pour des
motifs religieux. En ce qui concerne le personnel enseignant des lycées et
collèges, il a l'obligation de ne pas exprimer sa religio ou son incroyance.
Ce comportement est considéré comme une faute personnelle de
l'employé dont la gravité sera appréciée en fonction du caractère plus ou
moins prosélyte.
g)Principe de la valeur ajoutée nulle

Lorsque, en raison des circonstances, d'erreurs, ou de fraude, un citoyen


est privé d'un service auquel il avait droit, le dédommagement auquel il
peut prétendre n'est pas fonction de l'utilité qu'il retirait du service (par
exemple : la valeur d'une fabrication permise par la puissance électrique)
mais seulement du coût de production du service. La gratuité n'est pas un
principe. C'est même une exception rare, même si la subvention du
service par d'autres sources de financement est généralisée : les services
ne sont pas gratuits, mais une partie n'est pas payée directement par le
bénéficiaire, mais par les impôts et taxes. Plus généralement, si le service
est légalement obligatoire, les prestations doivent être gratuites sauf
disposition législative contraire.

Exemples de modes de financement de services publics :

 redevances spécifiques imposées aux usagers (exemple :


audiovisuel) ;
 taxe (exemple : ordures ménagères) ;
 billetterie (exemple : transport en commun).

h)Principe de l'obligation de fonctionnement correct

L'administration est tenue de faire fonctionner correctement les services


publics. Il n'y a pas cependant d'obligation pour l'administration de créer
un service public, à moins que la loi en décide ainsi (ex. : services publics
obligatoires pour les collectivités locales). L'usager a également un droit
d'accès au service public.

2)Les régimes juridiques des SPA et des SPIC

Le service public administratif (SPA) est soumis au droit administratif, le


régime du service public industriel et commercial (SPIC) est mixte droit
privé/droit public. Les critères de la distinction entre SPA et SPIC est
consacré par l'arrêt CE: Union syndicale des industries aéronautiques
(1956). Tandis que la consécration de cette distinction entre SPA et SPIC
a lieu par l'arrêt TC 22 janvier 1921: Bac d'Eloka

3)Le régime juridique des SPA

Il relève globalement du droit administratif. Les personnes publiques ont


cependant recours dans la gestion des SPA à des procédés de droit privé
(contrat de droit privé). Des personnes privées peuvent gérer des SPA.

a)L'usager des SPA

L'usager n'est en principe jamais dans une situation contractuelle avec le


SPA, il est dans une situation légale et réglementaire. L'usager n'a pas de
droit acquis au maintien des conditions de fonctionnement du service
public, en revanche il a un droit d'accès au service public, un droit à un
traitement égalitaire et un droit à un bon fonctionnement du service
public.

b)Les décisions unilatérales des SPA

Si le SPA est géré par une personne publique, les décisions unilatérales
faisant grief peuvent être contestées devant le tribunal administratif par
recours pour excès de pouvoir. Une personne privée gérant un SPA peut
se voir confier un pouvoir de décision unilatérale par la personne qui lui a
délégué la mission et sous son contrôle : le recours éventuel est porté
devant le tribunal administratif.

c)Le régime de responsabilité des SPA

Si le SPA est géré par une personne publique, c'est la responsabilité


administrative qui s'applique, le juge administratif est compétent.

Des exceptions sont prévues :

 loi de 1937, les problèmes de responsabilité dans le cadre de


l'administration de l'enseignement relèvent du juge judiciaire.
 loi de 1957, compétence du juge judiciaire pour tous les accidents
de véhicules.

Si le SPA est géré par une personne privée tous les dommages qui seront
causés relèvent du juge judiciaire sauf si le dommage est lié à l'utilisation
d'une prérogative de puissance publique

d)Les contrats des SPA

Les contrats des SPA sont des contrats administratifs, à condition qu'ils
satisfassent aux critères organique et matériel.

Le critère organique est d'être géré par une personne publique ou pour le
compte et au nom d'une personne publique ou d'une personne privée
explicitement mandatée par la personne publique délégante.

Le critère matériel est de relever de l'intérêt général ou de contenir une


clause exorbitante du droit commun.

e)Le personnel des SPA

Depuis l'arrêt Berkani en 1999, tous les personnels travaillant pour un SPA
géré par une personne morale de droit public sont des agents publics (les
litiges sont de la compétence des tribunaux administratifs), sauf dans les
cas prévus par la loi (certains contrats aidés notamment, et certains
emplois de la Caisse nationale d’assurance-maladie ou de l’Agence
française de sécurité sanitaire des produits de santé par exemple).

4)Le régime juridique des SPIC

La jurisprudence considère depuis le début des années 1920 que les SPIC
sont soumis à un régime mixte, combinant des éléments de droit privé
justifiés par l'activité commerciale et des éléments de droit public justifiés
par le but de service public.

La part de droit public n'est pas négligeable notamment dans


l'organisation du service. Ainsi, les SPIC sont soumis aux principes
généraux des services publics (continuité, adaptabilité, égalité), peuvent
utiliser des procédures de droit public (régime des travaux publics,
expropriation…), peuvent conclure des contrats administratifs.

La part de droit privé est néanmoins la plus importante, notamment pour


le fonctionnement du service.

a)L'usager du SPIC

L'usager d'un SPIC est toujours dans une situation contractuelle avec le
SPIC. Les différends seront donc portés devant le juge judiciaire. La
qualité d'usager n'est pas forcément liée à l'existence d'un contrat. Il suffit
de bénéficier de la prestation du service pour être considéré comme
usager. Le juge judiciaire se reconnaît également compétent pour juger
les litiges qui impliquent des candidats usager.

b)Les tiers et le SPIC

Les tiers sont dans une relation de droit privé avec le SPIC.

Il subsiste une exception si le litige est en raison d'un préjudice causé par
un ouvrage public utilisé par le SPIC. On entend par ouvrage public tous
les biens meubles et immeubles qui servent à un service public.

En effet, la loi du 28 pluviôse an VIII est neutralisée lorsque le dommage


de travaux publics ou lié à un ouvrage public est subi par un usager d’un
SPIC18. Mais cela vaut uniquement dans le cas où la victime est bien
l’usager du service et non pas des seuls ouvrages. Si tel n'est pas le cas,
la victime de l’ouvrage est alors envisagée comme un tiers par rapport au
service et doit s’adresser aux juridictions administrative.

c)Les décisions unilatérales des SPIC

Si le SPIC est géré par une personne publique, il peut prendre des
décisions unilatérales à l'égard des usagers et des agents. Si le SPIC est
géré par une personne privée, cela n'est pas possible à l'égard des
usagers. Mais les décisions unilatérales sont permises en direction des
agents si elles concernent l'organisation du service et si les décisions sont
réglementaires et non à portée individuelle.

d)Le régime de responsabilité des SPIC

Lorsqu'un préjudice est causé à un usager quelle que soit la personne


gestionnaire, il relève du droit privé et donc de la responsabilité civile
même si le dommage a été causé par un ouvrage public utilisé par le
service. Le juge fait la distinction entre usager du SPIC (droit privé) et
usager de l'ouvrage public (TA).

e)Les contrats des SPIC

Le Conseil d’État retient dans son arrêt Stein en 1950 que la


notion de SPIC est seulement une présomption d’application de droit
privé. Une clause exorbitante rend le contrat administratif.
Revirement en 1961 avec l'arrêt Établissement Compagnon Rey. Le
Conseil d'État décide qu'un contrat passé entre un SPIC et ses
usagers est toujours un contrat de droit privé, et ce même s'il
contient des clauses exorbitantes.

f)Le personnel des SPIC

Ce sont des agents privés soumis au droit du travail. Exceptions :

 Le directeur du SPIC est toujours un agent public.


 Le comptable du SPIC peut avoir la qualité de comptable public.
 Par exception, les agents de l'ONF, et certains employés de La Poste
et de France Télécom sont des agents publics.

V)Usage de la langue française

Le décret du 3 juillet 1996 relatif à l'enrichissement de la langue française,


en application de la loi Toubon, a rendu obligatoire l'usage des termes en
français, publiés au Journal officiel de la République française, dans les
services publics de l'État en France (articles 11 et 12 du décret).

VI)Les modes de gestion des services publics

1)Gestion directe ou régie

Dans le cas de la régie, la personne publique qui a créé le service l'assure


elle-même directement. L'État ou la collectivité territoriale assure le
service avec budget, personnel, équipement propres. La gestion directe
est le mode traditionnel de gestion des services publics surtout pour les
SPA, notamment en ce qui concerne la justice, la police, la défense.
2)Gestion déléguée

La gestion du service est déléguée lorsqu'elle est assurée par une autre
personne publique que celle qui l'a créé (établissement public notamment)
ou par une personne privée. L'association des personnes privées aux
missions de service public s'est beaucoup développée dans la deuxième
moitié du XXe siècle. Ainsi l'État s'est déchargé financièrement de certains
services publics auparavant financés par l'impôt en les remettant à une
personne privée. La gestion privée est également plus souple. En
associant le privé, l'État évite le reproche d'être tentaculaire et de porter
atteinte à la liberté. La délégation peut s'opérer de deux façons :

 contractuelle
 unilatérale.

Dans le cas d'une délégation unilatérale, une loi, un décret, un arrêté, une
lettre notifie la délégation d'une mission de service public à une
association par exemple. Le mode de délégation unilatéral vient souvent
reconnaître une situation de fait ou intervient à la suite d'une négociation
préalable à la décision. Ce mode d'attribution des services publics aux
personnes privées est reconnu par le Conseil d'État. Sont déléguées sur ce
mode les missions de service public confiées aux ordres professionnels,
aux fédérations sportives…

3)L'établissement public

L'État ou une collectivité territoriale confie la gestion d'une mission de


service public à un établissement autonome créé spécifiquement à cette
fin. L'établissement public est doté de la personnalité juridique : il peut
contracter, acquérir des biens, ester en justice, se voir reconnaître des
droits et des obligations, il dispose d'un budget propre, personnel propre,
d'une autonomie de gestion, liberté de décision. La tutelle est exercée par
la personne publique créatrice.

De même que pour les services, il existe une distinction entre


établissements publics à caractère administratif (EPA) et établissements
publics à caractère industriel et commercial (EPIC).

Un établissement public à caractère administratif est entièrement soumis


aux règles du droit public (actes administratifs, statut des fonctionnaires,
biens du domaine public, comptabilité publique, prérogatives de puissance
publique). L'EPA gère un SPA, par exemple : administration de
l'Université, hôpitaux publics.

Un établissement public à caractère industriel et commercial a pour objet


une activité industrielle et commerciale que la puissance publique
considère comme un service public industriel et commercial. Par
exemple : cité des sciences, SNCF, EDF-GDF ou de plus en plus d'offices
de tourisme (statut obligatoire pour les offices de tourisme des
communautés de communes). Son régime juridique est mixte, avec
coexistence de règles de droit public et de droit privé. En général le statut
d'un EPIC (création, suppression, organisation, contrôle, puissance
publique) relève du droit public, son activité (personnel, rapports aux
fournisseurs, aux clients) relève du droit privé.

Le texte qui instaure un établissement public peut le qualifier d'EPIC alors


qu'il s'avère être un EPA. Le juge administratif requalifie l'établissement si
le texte est réglementaire et s'incline s'il s'agit d'une loi.

On parle parfois d’« établissement public à visage inversé » pour un


établissement public qualifié par le texte qui l'instaure d'EPIC et qui se
révèle être un EPA, ou inversement.

Mais si le texte fondateur est une loi le Tribunal des conflits ne peut
requalifier.

Certains établissements cumulent activités administratives et activités


industrielles et commerciales. On parle alors d’« établissement public à
double visage » : établissement public qui prend les caractéristiques d'EPA
ou d'EPIC selon ses différentes activités. Les litiges concernant l'activité
industrielle et commerciale relèvent du droit privé, les litiges concernant
l'activité administrative relèvent du droit public. Exemples : chambres de
commerce et d'industrie, Office national des forêts.

VII-L'habilitation contractuelle à gérer un service public

1)Convention de délégation de service public

La notion de convention de délégation de service public (DSP) a été


formalisée par le législateur pour identifier le régime juridique applicable à
la procédure d'attribution par la voie du contrat à des personnes publiques
ou privées de missions de service public. C'est la « loi Sapin », du nom du
ministre de l'économie de l'époque qui avait déposé le projet de loi au
Parlement, qui a institué ce régime juridique et la notion de délégation de
service public. Pendant plusieurs années, en l'absence de définition légale
de la notion de délégation de service public, le juge administratif a tenté
de définir cette notion afin d'identifier le régime applicable au contrat
passé par une personne publique.

Simplement, il existait une alternative dans le choix de la qualification du


contrat. Cette alternative était :

 soit le contrat est une DSP : dans ce cas, son régime de passation
(règles d'attribution, de transparence et de mise en concurrence)
est celui de la loi du 29 janvier 1993 [archive] ;
 soit le contrat n'est pas une DSP : dans ce cas, son régime de
passation est celui du code des marchés publics.

Le risque couru par une personne publique qui choisissait à tort l'une de
ces procédures au lieu de l'autre était l'annulation de la procédure
d'attribution du contrat, voire la nullité du contrat et, le cas échéant, des
conséquences indemnitaires liées à la mise en jeu de la responsabilité
contractuelle de la personne publique. Ces derniers risques ont été un peu
réduits en raison de l'institution d'une procédure de référé précontractuel
devant le juge administratif par la loi du 8 février 1995 [archive] : « En
cas de manquement aux obligations légales de publicité et de mise en
concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics et
des conventions de délégation de service public, le juge des référés peut
être saisi avant la conclusion du contrat par les candidats à l’attribution du
contrat ou le préfet. Il peut ordonner à l’auteur du manquement de se
conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou
l’exécution de toute décision qui s’y rapporte. Il peut également annuler
ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer
dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. Il peut faire
injonction à l’administration contractante de différer la signature du
contrat. »

L'incertitude de choix de la qualification du contrat a été résolue par le


Conseil d'État dans un arrêt du 15 avril 1996, « Préfet des Bouches-du-
Rhône contre Commune de Lambesc » . Au sens de cette décision, une
délégation de service public est une convention dans laquelle la
rémunération du cocontractant est substantiellement assurée par les
résultats de l’exploitation. Dans le cas contraire, le contrat est soumis au
code des marchés publics.

Le législateur a confirmé cette définition. L’article 3 de la « loi MURCEF »


(pour Mesures urgentes à caractère économique et financier) du 11
décembre 2001 modifie l’article 38 de la loi du 29 janvier 1993 et l’article
L. 1411-1 du Code général des collectivités territoriales en insérant avant
le premier aliéna de ces dispositions l’alinéa suivant : « Une délégation de
service public est un contrat par lequel une personne morale de droit
public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à
un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement
liée aux résultats de l’exploitation du service. Le délégataire peut être
chargé de construire des ouvrages ou d’acquérir des biens nécessaires au
service. »

Pour autant, l'alternative préalable dans le choix de la qualification du


contrat n'a pas disparu. La loi donne une indication. Les juridictions ont
une interprétation large de cette définition. Elles considèrent en effet que
même si 10 % seulement de la rémunération du délégataire provient des
résultats de l'exploitation, le contrat est une DSP compte tenu de
l'existence du risque d'exploitation propre à l'activité exploitée par le
partenaire contractuel de la personne publique. En d'autres termes,
l'adverbe retenu par le Conseil d'État en 1996 et le législateur en 2001 est
« substantiellement », or, substantiellement, ce n'est pas
majoritairement.

2)Contrat de concession de service public

concession de service public.

Une personne publique (autorité concédante) confie par contrat et pour


une durée déterminée (souvent longue) l'exécution d'un service public à
un tiers souvent personne privée ou personne publique (le
concessionnaire). Le concessionnaire doit mettre en place l'ensemble des
installations, des équipements nécessaires à l'exploitation du service
public (par ex. réseau de distribution d'eau). Le concessionnaire se
rémunère par une redevance auprès des usagers, il assume les pertes
liées à l'activité. À la fin du contrat de concession, tout revient à la
personne publique (ex. autoroutes, tunnels).

3)Contrat d'affermage

Le fermier ne construit pas les installations du service qui sont mises à


disposition par la personne publique qui afferme. Le fermier reverse une
partie de la redevance à la personne publique, par exemple au titre de la
location des installations, (cf. distribution d'eau).

4)Convention de régie intéressée

Le régisseur est rémunéré par la personne publique en fonction des


résultats du service. Le régisseur gère le service pour le compte de la
personne publique délégante dont il est, en quelque sorte, le mandataire.

5)Convention de gérance

Le principe est le même que la régie intéressée sauf que la rémunération


du gérant est forfaitaire.

Ce type de contrats est aujourd'hui considéré comme un marché public


depuis un arrêt du Conseil d'État de 1998.

6)Les contrats innommés

Les contrats innommés sont tous les contrats qui n'entrent pas dans les
catégories précédentes.
VIII-L'objet des conventions de délégation de service public[

Peut-on tout déléguer ? La circulaire du 7 août 1987, après l'avis du


Conseil d'État du 7 octobre 1986 délimite le champ d'application de la
gestion déléguée. Tous les SPIC peuvent être délégués. Les SPA peuvent
être délégués, sauf ceux qui par nature ne peuvent pas l'être : police,
justice, défense ou qui ne peuvent pas l'être au regard d'un texte (loi ou
règlement).

1)Différence entre délégation de service public et marché public

La délégation de service public est définie par la loi MURCEF (2001)


comme étant : une convention par laquelle une personne publique
délégante confie la gestion d'un service public dont il a la responsabilité à
un délégataire privé ou public dont la rémunération est substantiellement
liée au résultat d'exploitation du service.

Le marché public, pour sa part, est défini par l'art. 1er du code des
marchés publics : un contrat passé entre une personne publique
(adjudicateur) et une personne privée ou publique pour la réalisation de
travaux, de fournitures ou de services moyennant le paiement d'un prix.
En somme, la différence la plus frappante réside dans le mode de
rémunération du cocontractant de l'administration. Pour le marché public,
le cocontractant reçoit un prix qui équivaut à la prestation fournie, alors
que la rémunération du délégataire est « substantiellement liée au résultat
d'exploitation du service ».

2)La conclusion des conventions de délégation de service public

La loi du 29 janvier 1993 dite loi Sapin modifie le régime juridique de


passation des contrats de délégation de service public, soumet la
procédure contractuelle à des mesures de publicité préalable. Les objectifs
sont de mettre la législation française en conformité avec la législation
communautaire sur la concurrence et de lutter contre la corruption.

3)Offre de candidature

La publication d'un avis affirme l’intention de déléguer. Les candidats sont


sélectionnés en fonction de leur garantie professionnelle et financière, de
leur aptitude à assurer la continuité du service public et l'égalité des
citoyens devant le service public.

4)Offre de prestation

La personne publique envoie aux candidats retenus un document qui


comporte les caractéristiques de la prestation attendue du délégataire.

À partir de ce moment l'administration choisit et négocie librement.


5)Les procédures dérogatoires

Les délégations dont le montant n'excède pas 106 714 euros ou une durée
de 3 ans à raison de 68 602 euros par an, bénéficient d'une procédure
simplifiée : simple publication et délai de 15 jours.

Les délégations qui atteignent le seuil de 5 milliards d'euros défini par le


droit communautaire sont à une condition supplémentaire : publication du
projet dans le Journal officiel de l'Union européenne, série S.

En raison de la qualité du délégataire qui dispose soit du monopole légal


soit est un établissement public, la publicité du projet de délégation n'est
pas exigée.

L'administration reste libre de contracter avec qui elle veut.

6)La durée des conventions de service public

La durée doit être déterminée par la personne publique délégante en


fonction des prestations demandées au délégataire. Pour les concessions
la convention de délégation tient compte, en ce qui concerne sa durée, de
la nature et du montant des investissements à réaliser (eau,
assainissement, déchets), la durée maximale est de 20 ans sauf
dérogation autorisée par le trésorier-payeur général (TPG).

7)Le renouvellement des conventions

Les reconductions tacites sont interdites et une nouvelle délibération est


nécessaire.

La loi limite aussi les possibilités de renouvellement, un renouvellement


est possible pour des raisons d'intérêt général (1 an) ou à raison de
l'exécution d'investissements supplémentaires (ce type de renouvellement
est soumis à 4 conditions).

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