La Nouvelle

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La nouvelle
Introduction

Elle est mal aimée, considérée comme un genre littéraire mineur sans que l'on sache très bien pourquoi.
Ce prétendu rejet de la nouvelle est d'ailleurs un phénomène typiquement francophone. Il est
incontestable que les éditeurs manifestent davantage de réticence à publier un bon recueil de nouvelles
qu'un roman de qualité équivalente. Pourtant, dans notre monde pressé, la nouvelle est une lecture
d'une bonne « distance »: un bref trajet en métro, un repas sur le pouce dans un fast food, quelques
dizaines de minutes le soir avant de s'endormir, la nouvelle est une compagne parfaite; elle va droit au
but, elle passionne d'emblée quand elle est réussie, et son déroulement s'accommode bien d'une
certaine impatience caractéristique de notre XXIème siècle.

Définition: récit court et bref destiné à des lecteurs adultes (par opposition au conte, lequel, quand il
est pour des adultes, lui parle comme à un enfant, simplifiant le monde, voir Candide) à l'origine de la
longueur d'un paragraphe, elle pouvait être publiée aussi bien dans les journaux qu'en recueil apparue
à la fin du Moyen-Agecentrée sur un seul événement (contrairement au roman) données spatio-
temporelles réduites le roman serait le domaine du temps dans sa durée, la nouvelle celui du temps
concentré autour de l'instant personnages peu nombreux et moins développés que dans un roman
tous les fils du récit sont noués à un élément central, à un instant privilégié la fin est souvent
inattendue et prend la forme d'une « chute »,parfois longue de quelques lignes seulement; le
dénouement est souvent surprenant.

Confrontation du roman et de la nouvelle:

PERSONNAGES TEMPS ESPACE INTRIGUE FIN


ROMAN Foisonnants, fouillés sur le plan Long, époques Lieux variés, espace Complexe, péripéties, Bilan général, étalement,
psychologique, appartenant à différentes géographique, rebondissements, épilogue
différentes classes sociales espace social centres d'intérêt variés
NOUVELLE Peu nombreux, personnagestypes, Court, Lieu unique, Action unique, un Effet de surprise, chute,
rapport des personnages figé concentré espaces limités événement majeur rupture

Le recueil de nouvelles peut être structuré et présenter au moyen d'un texte-cadre sa composition
générale ; il peut consister aussi en le rassemblement de récits publiés auparavant dans des journaux
etjuxtaposés sans souci de structure. Les nouvelles appartiennent alors au même type: policier,
fantastique, humoristique, symboliste, réaliste ou de science-fiction.

La naissance du genre: Bâdi-al-Zamâne al-Hamadhani, auteur iranien (de Hamadan, ancienne capitale de
la Perse), du Xème siècle, passe pour être l'inventeur de la nouvelle, ou tout du moins son précurseur, à
travers le «maqâma ».

- En France la nouvelle prend naissance au Moyen Age. Elle vient s'ajouter, et en partie se substituer, à
une multitude de récits brefs: fabliaux, lais, dits, devis, exemple, contes, etc.

Au Moyen Age le récit bref existe déjà en Europe sous la forme du fabliau, de la moralité, du lai, du dit,
de l'exemplum, de la "chantefable" (Aucassin et Nicolette, XIIIe siècle).
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Les nouvelles en reprennent souvent les thèmes. - Les lais (XIIe siècle). Le lai de Marie de France "le
Chèvrefeuille" relatant un épisode des amours de Tristan et Yseult peut être considéré comme une
nouvelle, rédigée bien avant que cette appellation ait existé. Le texte se limite à la donnée d'un épisode
unique et se clôt sur lui-même sans attendre une suite. Il rapporte un événement ordinaire. A
l'économie de moyens mis en œuvre correspond une grande densité de l'effet produit. - Les dits
qualifiés de "nouveaux" apparaissent au XIIIe siècle. Le dit est comme la nouvelle un genre bref (600 vers
en moyenne). La brièveté n'est pas alors une technique littéraire active. Elle est recherchée pour éviter
l'ennui de l'auditoire. Les dits peuvent être nouveaux par leur forme ou par la matière qu'ils traitent.
Certains dits présentent une matière ancienne mais font l'objet d'une "nouvelle" écriture. D'autres
offrent le récit d'une matière que personne ne connaît encore. L'intention de plaire est toujours
présente dans les dits "nouveaux" et elle est liée à la notion de nouveauté. L'auteur déclare souvent
avoir apporté du soin à l'écriture de son œuvre. Ce souci de plaire anime les Cent Nouvelles nouvelles
dont une variante du titre donne : "cent chapitres ou histoires, ou pour mieux dire nouveaux comptes à
plaisance". D'autre part, le dit intervient au XIIIe siècle comme un mode d'écriture où la pensée et les
réactions personnelles de l'auteur, sa sensibilité d'homme dans la société de l'époque trouvent à
s'exprimer de façon privilégiée. Or, pour qu'une œuvre soit considérée comme "nouvelle", il faut que
deux conditions soient remplies : d'abord, l'auteur doit être conscient de son acte littéraire d'écrivain,
ensuite il doit ancrer sa manière dans une réalité très proche. Il apparaît dans les dits une vérité du
présent ou de l'instant qui vient d'être vécu, de l'anecdote présentée comme authentique. Cette vérité
explicitement revendiquée dans les dits qualifiés de "nouveaux" deviendra un élément définitoire de la
nouvelle par la suite. Certains épisodes de l'Odyssée (ex. : "Circé", "le Cyclope" et "la Nekuia") ont été
considérés comme constituant autant d'histoires (de nouvelles) insérées dans une littérature épico-
romanesque.

Le récit selon Platon, Hérodote et Aristote a préparé, voire accompli dès l'Antiquité la nouvelle. - A la fin
du XIIe siècle, en Perse, Nezamé de Grandjé (1140-1202) écrit Haft Païkar (les Sept Idoles), recueil de
sept histoires, encadrées comme celles de Boccace : sept favorites offrant chacune la sienne à un roi -
Vers la même époque (IXe-XIIIe siècle), les Chinois produisaient en grand nombre de xiaoshuo, "récits
mineurs" ou "histoires brèves" et de huaben, "textes à réciter", dont les thèmes étaient modernes, et
dont la durée ne devait pas dépasser une séance.

L'Amour de la renarde de Ling Mongchu et les Contes extraordinaires de Pu Songling proposent des
histoires brèves qui traitent en langue vulgaire des sujets alors contemporains (la misère des
enseignants par exemple) : traits qui, en Europe, distingueront la nouvelle des autres genres narratifs de
l'anecdote présentée comme authentique. Cette vérité explicitement revendiquée dans les dits qualifiés
de "nouveaux" deviendra un élément définitoire de la nouvelle par la suite.

- La nouvelle est encore issue de l'exemplum mais elle est rarement d'inspiration ecclésiastique.

Au XIIe siècle en France, la "nouvelle" est l'annonce d'un événement, généralement récent, à une
personne qui n'en a pas encore connaissance. A la nouveauté de l'événement, à son caractère récent,
s'ajoute une allusion, plus ou moins explicite, à l'intérêt de l'événement relaté, intérêt qui justifie cette
relation.

On passe de l'information donnée sur quelqu'un au récit des faits et gestes de cette personne. La
nouvelle devient une histoire fraîchement arrivée dont la technique de narration est originale. Pour
l'auteur des Cent Nouvelles nouvelles, une "nouvelle" est le récit d'un événement à la fois réel et récent.
Elle doit surtout être le récit bref d'un événement qui mérite d'être rapporté, une "aventure". Il existe
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au Moyen Age un lien sémantique entre l'adjectif novel caractérisant une œuvre originale et le
substantif novele tel qu'il apparaît dans ses premiers emplois pour désigner des textes littéraires. C'est
la notion de nouveauté qui a conditionné l'emploi du mot "nouvelle" jusqu'à ce qu'il devienne un terme
générique et que l'on oublie son origine linguistique.

- En Italie, le mot "novella" signifie à la même époque la nouveauté, l'histoire distrayante qui, telle une
nouvelle politique, court de bouche en bouche, de ville en ville. Pour que le mot "nouvelle" en français,
novela en espagnol, novella en russe et nouvela en polonais s'impose dans notre aire culturelle, il faudra
néanmoins Boccace, Cervantès, Marguerite de Navarre. Avec le Décaméron et l'Heptaméron s'organise
un ensemble de nouvelles "encadrées", ainsi dénommées parce qu'elles sont insérées dans une fiction
(la peste de Florence par exemple) qui justifie leur rassemblement. Les récits sont présentés comme un
ensemble, mis dans la bouche de narrateurs pourvus d'un nom et d'une personnalité propres.
Imprégnée de l'esprit humaniste, la nouvelle rejette la simplicité parfois grossière du fabliau, genre dont
elle prend la place mais dans les milieux urbains aisés. Elle cherche à mettre en relief ce qui est unique
dans le personnage et son destin. Les auteurs de cette époque publient d'ordinaire leurs nouvelles en
cycles, unis par l'artifice d'un jeu de société : une petite compagnie passe son temps en écoutant des
histoires qui, pour être proches de la vie quotidienne, n'en contiennent pas moins quelque élément
singulier, ce qui leur vaut d'être racontées. Cohérentes et condensées, elles se terminent généralement
sur un effet surprenant, souvent rehaussé par une pointe.

Mis à part ces quelques traits, la production de l'époque montre la plus grande diversité. Des
amourettes libertines aux graves tournants du sort, les conteurs touchent à tout sujet qui s'offre à eux.
Boccace amuse son public avec le Décaméron et confronte souvent des vérités individuelles aux lois
morales en vigueur; dans l'Heptaméron, c'est l'intention didactique qui prédomine. Marguerite de
Navarre a introduit avec l'Heptaméron dans la nouvelle française le sentiment vrai, la psychologie
nuancée des passions, le tragique même et aussi le décor et l'atmosphère d'un monde qui commençait à
se régler selon les lois de la civilité.

La réussite du Décaméron de Boccace suscite des recueils analogues : ceux de G. Fiorentino, de F.


Saccheti, de Masuccio Salernitano, etc. C'est alors l'âge d'or de la nouvelle italienne qui se caractérise
généralement par son réalisme satirique et par son immoralité licencieuse (sauf chez Brandello au XVI e
siècle).

Mais dès le XIVe siècle d'autres chefs d'œuvre de la nouvelle ont vu le jour en Europe : en Angleterre les
Contes de Canterbury (1387), où s'épanouit la veine bourgeoise des fabliaux; en Espagne le Comte
Lucanor (v. 1337), recueil de nouvelles morales de Manuel, infant de Castille. - Au XV e siècle, la cour de
Bourgogne raffole des nouvelles où l'inspiration chevaleresque et bourgeoise se mêle à l'ironie cynique,
au scepticisme moral et à l'obscénité, comme en témoignent les deux plus célèbres recueils de l'époque,
les Cent Nouvelles nouvelles et les Quinze Joyes de mariage (antérieur à 1450, anonyme).

Dans les Cent Nouvelles nouvelles, le ton est résolument grivois, les détails grossiers et scatologiques
abondent. Le recueil continue la tradition des fabliaux du Moyen Age. - Japon XVe -XVIe siècle. Le
monogatari. Récit en vers ou en prose. C'est aux alentours des années 900 que fut inaugurée le
monogatari comme genre littéraire. Le chef d'oeuvre du genre : Genji Monogatari (début du XIe siècle). -
XVIe siècle. Peregrinaggio di tre giovanni figluoli del re di serendippo (1557). Recueil de huit nouvelles
qui fut réédité 5 fois au XVIe siècle en Italie, traduit en allemand en 1583, en français en 1610, en anglais
en 1722, en danois en 1729, en hollandais en 1766. Recueil d'origine persane. - Le recueil de nouvelles.
Les recueils français du XVIe siècle portent la marque des traités italiens débattant de questions
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d'amour, de civilité ou de philosophie, dont la structure est venue enrichir le modèle boccacien. - En
Espagne, où le mot novela désigne toute œuvre d'imagination en prose, c'est à Cervantès que revient le
mérite d'avoir créé le genre, avec ses Nouvelles exemplaires où se rencontrent le romanesque, le
picaresque et le lyrisme sentimental. Il n'y a pas de récit qui relie les histoires et celles-ci sont parfois
très étendues. L'action y suit un chemin sinueux. Mais ce sera, en partie, grâce à leur côté romanesque
que certaines d'entre elles serviront de modèles aux nouvelles des XVIIe et XVIIIe siècles. Les deux
dernières nouvelles, emboîtées l'une dans l'autre, esquissent in fine une forme d'encadrement
comparable à celle des grandes collections (le Décaméron, les Contes de Canterbury), comme si l'auteur
avait voulu suggérer rétrospectivement une mise en perspective. - Dans son prologue, Cervantès dit
avoir été le premier en Espagne à mettre en chantier des nouvelles qui ne soient pas le simple
démarquage des modèles italiens. Il fixe tout à la fois l'usage du vocable (novela) et les lois non écrites
du genre : brièveté, prédominance de l'action et du dialogue, fonction récréative autant qu'exemplaire.
Il fait acte fondateur. Les nouvelles étaient d'abord de petites histoires anonymes distribuées
gratuitement dans la rue, et qui se distinguaient en deux groupes : les "exemplums", qui étaient des
récits religieux prêchant la morale et les dons à l'église, et les "canards", racontant des faits divers
comme des vols, des tromperies, ou des meurtres. Ces derniers ont donné aujourd'hui le mot
argotique désignant le journal, qui lui-même rapporte des faits divers. Directement inspiré du
Décaméron (1349-1353) de Boccace, le premier recueil de nouvelles françaises, anonyme, les Cent
Nouvelles nouvelles, est probablement paru entre 1430 et 1470. 4. Son évolution: Mais c’est le XVIe
siècle qui voit le véritable essor du genre. En 1558, avec L'Heptaméron, Marguerite de Navarre donne au
genre ses premières lettres de noblesse : dans ce recueil inachevé de 72 récits, voisinant avec les récits
licencieux hérités des fabliaux, on trouve des histoires plus graves, où l’anecdote laisse en partie la place
à l’analyse psychologique. Publiées en 1613 et traduites en français deux ans plus tard, les Nouvelles
exemplaires de Miguel de Cervantès, l’auteur de Don Quichotte, connaissent un succès considérable et
constituent pour longtemps la référence. Sous leur influence, le genre subit une évolution double,
déterminée par ses relations avec le roman. Dans un premier temps, on voit la nouvelle se rapprocher
de celui-ci par ses sujets et sa composition : ainsi, La Princesse de Clèves de Madame de Lafayette est
considérée, au moment de sa parution, comme une nouvelle. Les romans contemporains intègrent
d'ailleurs souvent en leur sein des nouvelles, sous la forme de digressions à l'intérieur du récit principal,
ou d'histoires racontées par des personnages à d'autres. Mais la nouvelle se distingue cependant des
romans de l’époque, extrêmement longs et touffus, par son action plus resserrée. C’est cette conception
qui, dans les dernières décennies du XVIIIe siècle, l’emporte finalement sur la nouvelle « petit roman »,
et qui se développe au cours du siècle suivant. On s’accorde à considérer le XIXe siècle comme l’âge de
l'essor de la nouvelle. D'Honoré de Balzac (Contes drolatiques) à Gustave Flaubert (Trois contes), de
Victor Hugo (Claude Gueux) à Stendhal (Chroniques italiennes), d'Alfred de Musset à Barbey d’Aurevilly
(Les Diaboliques), de George Sand (Nouvelles) à Zola (Contes à Ninon), il n’est guère de romancier
d’importance qui n’ait écrit de nouvelles, et même de recueil de nouvelles. Certains, comme Prosper
Mérimée, Jean de La Varende, Guy de Maupassant qui en a écrit plus de trois cent dans dix-huit recueils
publiés de son vivant, Anton Tchekhov qui a écrit six cent vingt nouvelles. La nouvelle moderne est née
avec la grande presse, et les nouvelles étaient en général écrites (au XIXe siècle et au début du XXe
siècle) pour le journal. Le journal impose une longueur, un lectorat et partant une thématique au texte.
La règle est l'exotisme. Il faut noter l'absence d'identité entre le lectorat et les personnages mis en
scène. Maupassant par exemple écrit sur des Normands, et ce sont principalement des Parisiens qui le
lisent. Le thème de nombreuses nouvelles est l'étranger et cet étranger est souvent reculé dans le passé
(exotisme historique). La distance qui sépare le lecteur du sujet traité n'est pas atténuée par le texte,
elle est au contraire cultivée. Dans un roman, aussi étrange que soit le sujet, l'auteur tâche de nous faire
pénétrer dans l'univers de ses personnages, aussi bizarres que soient les héros, nous allons acquérir
avec eux une familiarité qui nous les fera comprendre de l'intérieur. Le roman est essentiellement
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polyphonique et accorde à chaque personnage une voix à part entière. Rien de cela dans la nouvelle. Le
spectacle présenté reste bizarre. Les débuts in medias res sont très courants, ce qui constitue un moyen
de nous imposer avec force et vivacité une vision du monde unique. De là le très grand nombre de
nouvelles fantastiques : le fantastique est une représentation de l'étrange aux frontières même du
monde normal; la nouvelle, dans une présentation très concrète, très réaliste, va peu à peu rendre
bizarre le spectacle habituel du monde. Elle fait vaciller les certitudes. Elle est particulièrement apte à ce
rôle : elle garde au spectateur un regard extérieur, regard qui ne crée pas de familiarité. Si la nouvelle
exploite alors en France surtout les deux veines apparemment opposées du réalisme et du fantastique, il
n’est guère de thèmes qu’elle n’aborde, guère de tons qu’elle n’emprunte. Au reste, son prestige ne se
limite pas à la France : en témoignent, entre autres, Hoffmann, Edgar Poe, Henry James, Herman
Melville, Pouchkine, Gogol, Tchekhov, et bien d’autres. Il convient enfin de rappeler que c’est au cours
du XIXe siècle que sont proposées les théories les plus élaborées du genre, d’abord en Allemagne
(Goethe, qui fonde avec la Nouvelle le modèle du genre et Schlegel), puis aux États-Unis (Poe et James).
Alphonse Allais, fondateur du rire moderne, introduit la folie dans ses nouvelles, comme Les templiers.
Le XXe siècle a vu de nombreux écrivains choisir la forme courte. En France, Sartre, bien sûr, et son
recueil Le Mur, mais aussi, parmi les contemporains, Alain Robbe-Grillet, inventeur du nouveau roman
(Instantanés, éditions de Minuit), Nathalie Sarraute, (Tropismes, même éditeur) Dominique Mainard,
Hubert Haddad, Nadine Ribault pour n'en citer que quelques-uns, connus ou moins connus. Certains ont
choisi de ne s'exprimer (presque) que par la nouvelle, parfois très courte : Jacques Sternberg, écrivain
belge dont presque tout l'œuvre emprunte cette forme (188 contes à régler, 300 contes pour solde de
tout compte, Contes griffus, etc.) C'est ensuite le cas, plus récemment, du belge Thomas Gunzig, de
Georges Kolebka, d'Hervé Le Tellier et surtout d'Annie Saumont.

Différenciations Dans les pays anglo-saxons (et aux États-Unis en particulier), on considère que la
nouvelle peut se classifier en trois catégories suivant sa longueur. L'organisation Science Fiction and
Fantasy Writers of America en a donné une définition : l’histoire courte (short story) compte moins de 7
500 mots, la novelette comprend les histoires entre 7 500 et 17 499 mots, et la novella, presque un
roman, comprend les histoires entre 17 500 et 40 000 mots. La micronouvelle, récit suggestif souvent
caustique caractérisé par une brièveté extrême (moins de 300 signes), est, quant à elle, de plus en plus
considérée par les critiques littéraires comme un genre à part entière. Il y aurait aussi la « short-short
story », récit extrêmement bref, réduit au compte-rendu neutre et laconique d'une scène.

Conclusion: Baudelaire, traducteur de Poe, a proposé cette analyse de la nouvelle : « Elle a sur le roman
à vastes proportions cet immense avantage que sa brièveté ajoute à l’intensité de l’effet. Cette lecture,
qui peut être accomplie tout d’une haleine, laisse dans l’esprit un souvenir bien plus puissant qu’une
lecture brisée, interrompue souvent par le tracas des affaires et le soin des intérêts mondains. L’unité
d’impression, la totalité d’effet est un avantage immense qui peut donner à ce genre de composition
une supériorité tout à fait particulière, à ce point qu’une nouvelle trop courte (c’est sans doute un
défaut) vaut encore mieux qu’une nouvelle trop longue. L’artiste, s’il est habile, n’accommodera pas ses
pensées aux incidents, mais, ayant conçu délibérément, à loisir, un effet à produire, inventera les
incidents, combinera les événements les plus propres à amener l’effet voulu. Si la première phrase n’est
pas écrite en vue de préparer cette impression finale, l’œuvre est manquée dès le début. Dans la
composition tout entière il ne doit pas se glisser un seul mot qui ne soit une intention, qui ne tende,
directement ou indirectement, à parfaire le dessein prémédité. »

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