TFE Miraucourt David Final 2

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Stabilisation du matériau terre crue pour

application en brique de terre comprimée au


Burkina Faso

MEMOIRE DE FIN D’ETUDES

Travail de fin d'études réalisé en vue de l'obtention du grade de master Ingénieur Civil
Architecte

David Miraucourt

Université de Liège - Faculté des Sciences Appliquées


Année académique 2016-2017

Prof. Luc Courard, Argenco, ULg Dr. Adamah Messan, LEMC, 2IE

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TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS 4

RESUME 5

ABSTRACT 6

INTRODUCTION 7

A. LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE 8

I. LE MATERIAU TERRE 8
1) AU NIVEAU GEOLOGIQUE 8
2) AU NIVEAU MICROSCOPIQUE 10
3) AU NIVEAU MACROSCOPIQUE 12
II. LA STABILISATION DE LA TERRE 16
1) LES TYPES DE STABILISATION 16
2) LA CHAUX 17
3) LES POUZZOLANES 20
4) LES FIBRES 21
III. L’ARCHITECTURE DE TERRE 25
1) HISTOIRE 25
2) TYPOLOGIES 28
3) VISITES 29

B. CARACTERISATION DES MATERIAUX 36

I. METHODOLOGIE 36
1) GRANULOMETRIE LASER 36
2) PYCNOMETRE A GAZ 37
3) SURFACE SPECIFIQUE 38
4) DIFFRACTION DES RAYONS X 38
5) ANALYSE THERMIQUE GRAVIMETRIQUE 39
6) SPECTROFLUORESCENCE X 39
7) CONDUCTIVITE ELECTRIQUE D’UNE SOLUTION DE CHAUX 40
8) NEUTRALISATION D’ACIDES PAR LA CHAUX 41
9) ACTIVITE POUZZOLANIQUE 42
10) ESSAI DE TRACTION 43
11) ESSAI PULL-OUT 44
12) OBSERVATION MICROSCOPIQUE 45
II. RESULTATS 46
1) ANALYSE PHYSIQUE 46

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2) ANALYSE MINERALOGIQUE 48
3) ANALYSES CHIMIQUES 53
4) ANALYSE MECANIQUE 56
III. SYNTHESE 61
1) TERRE 61
2) CHAUX 61
3) BALLES DE RIZ 63
4) FIBRES VEGETALES 65
5) CHEVEUX 66

C. LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE 67

I. REALISATION DE BTC 67
1) PREPARATION DE MATERIAUX 67
2) FORMULATION 70
3) COMPACTAGE ET STOCKAGE 72
II. ESSAIS SUR BTC 73
1) ESSAI PROCTOR 73
2) PERFORMANCES MECANIQUES 75
3) PERFORMANCES THERMIQUES 80
4) SYNTHESE 83
III. LE MARCHE DES BTC 85
1) RESSOURCES EN MATERIAUX ALTERNATIFS 85
2) PRODUCTION EXISTANTE DE MATERIAUX DE CONSTRUCTION 89

CONCLUSION 93

BIBLIOGRAPHIE 94

ANNEXES 98

Page 3
REMERCIEMENTS

Ce travail a été rendu possible grâce au concours de mon promoteur, le professeur Luc COURARD qui
a encadré, et recadré mon travail. Je souhaite donc le remercier ainsi que le docteur Adamah MESSAN
du laboratoire LEMC de 2IE à Kamboinsé, qui a orienté mes recherches tout au long de mon séjour au
Burkina Faso. Enfin je songe aux autres professeurs qui participent à l’étude de mon travail : Jean Marie
BLEUS et Shady ATTIA.

Dans le cadre de ce travail, j’ai collaboré avec de nombreux étudiants que j’aimerai remercier. Je pense
premièrement à l’équipe des doctorants burkinabè composée de Philbert NSHIMIYIMANA, Césaire
HEMA et Ousmane ZOUNGRANA. Au-delà du travail réalisé ensemble, leur accueil a été très chaleureux
et nous avons partagé des moments inoubliables. Je songe également à Camie DERAMAUX et Romain
WERS qui m’ont accompagné au Burkina et avec qui je réalise le projet construction de l’école de
Wemtenga.

Au cours de mon séjour au Burkina, j’ai passé d’excellents moments avec d’autres doctorants et
étudiants du laboratoire de 2IE. Je remercie l’ensemble d’entre eux pour leurs conseils utiles et le pot
de départ qu’ils nous ont concoctés. Je songe particulièrement à Omar et Cédric qui m’ont beaucoup
aidé à poursuivre la fin de mes essais. Merci également à Yasmine pour toute la musique Burkinabè
transmise. Je remercie le laboratoire LEMC de 2IE à Ouagadougou, l’association Autre Terre et les
entreprises BIG et ZI matériaux qui ont eu la gentillesse de mettre à disposition les moyens nécessaires
à la réalisation de mes expérimentations.

Pour la partie liégeoise, je remercie tout le personnel universitaire qui m’a assisté pour mes essais. Ces
analyses ont été effectuées grâce aux équipements des laboratoires du LMC et du département de
géologie de la faculté des sciences appliquées de l’ULg.

Je souhaite remercier l'Académie de recherche et d'enseignement supérieur de la Fédération


Wallonie-Bruxelles, Belgique car le voyage réalisé dans le cadre du présent travail a été possible grâce
à son soutien financier le cadre de sa politique de Coopération au développement.

Enfin, j’ai une pensée pour mon entourage proche qui m’a soutenu tout au long de mes études.

Page 4
RESUME

Ce mémoire de fin d’études traite de la construction en terre crue au Burkina Faso. Le sujet d’étude se
focalise sur la Brique de Terre Comprimée (BTC) qui constitue une technique très prometteuse parmi
les diverses utilisations possibles du matériau terre. Cependant, utilisée telle quelle avec de l’eau, la
terre compressée présente des caractéristiques et une durabilité faibles. Une étude a donc été menée
dans le but de stabiliser le mélange en y incorporant des matières premières locales naturelles ou
recyclées. Les recherches ont été orientées vers des objectifs de résistances mécaniques des BTC.

Afin de mener au mieux le travail, un déplacement d’un mois a été effectué à Ouagadougou au Burkina
Faso. La majeure partie du séjour sur place s’est déroulée au laboratoire LEMC de 2IE à Kamboinsé.
Plusieurs étapes de préparation ont permis de traiter les divers matériaux alternatifs récoltés : une
chaux recyclée, l’enveloppe de riz décortiqué, une fibre végétale et des cheveux synthétiques.

Les matériaux préparés ont ensuite été compactés dans des BTC à l’aide d’une presse manuelle selon
plusieurs dosages et formulations différentes. Après la cure, des essais sur les BTC ont été opérés.
D’autres briques originaires des environs de Ouagadougou ont été également caractérisées. En outre,
plusieurs visites de bâtiments construits en terre crue ont permis de se rendre compte du contexte
actuel de la construction au Burkina Faso.

De retour en Belgique, les matériaux alternatifs ont été caractérisés plus en détails dans les
laboratoires de la faculté des sciences appliquées de l’université de Liège. Des analyses physiques,
minéralogiques, chimiques et mécaniques ont permis d’évaluer le potentiel de ces matériaux pour
stabiliser la terre crue.

Il apparait que les matériaux alternatifs représentent des produits de choix pour augmenter le
comportement de la terre du Burkina. Ces déchets constituent une ressource qui n’est pas encore
exploitée. Leur incorporation dans les BTC semble un excellent moyen de recyclage. En effet, les BTC
fabriquées à partir de ces résidus contribuent à l’augmentation des performances mécaniques et
thermiques. La proportion de ces constituants lors de leur addition a fait l’objet d’une certaine
optimisation. On remarque que la chaux donne des performances maximales pour un dosage à hauteur
de 10 à 15% de la masse de terre. Lorsque l’on rajoute des balles de riz calcinées, l’optimum est autour
des 30% de masse de chaux. Ensuite, les fibres végétales et synthétiques semblent contribuer à
l’augmentation des performances, sans comporter toutefois un dosage optimal sur la plage de
proportion explorée (0.2 à 1.2% de masse de terre).

Enfin, les BTC formulées sont comparées avec des briques de terre tirées de la production existante au
Burkina Faso. Plusieurs types de briques ont été testées, dont des BTC stabilisées au ciment à 8%. En
prenant les précautions nécessaires pour les comparer, on observe des résistances mécaniques
comparables. Après une longue cure, on peut même constater des meilleures performances pour
certaines BTC avec matériaux recyclés. Il s’agit des stabilisations à la chaux à 10% et 15%.

Ce mémoire s’inscrit dans la continuité de celui de Jehanne PAULUS qui a posé les premiers jalons de
l’état de la construction en terre crue au Burkina. Il est également poursuivi par les travaux de Philbert
NSHIMIYIMANA, doctorant en cotutelle à l’ULg et 2IE, qui a également participé à ce travail.

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ABSTRACT

This end-of-course report deals with the construction from raw earth in Burkina Faso. The subject
focuses on the Compressed Earth Brick (CEB) which is a very promising technique among the various
possible uses of the earth material. However, when used as such with water, compressed earth has
poor characteristics and durability. A study was therefore carried out with the aim of stabilizing the
mixture by incorporating natural or recycled local raw materials. The research has been oriented
towards objectives of mechanical resistances of CEB.

To better carry out the work, a one-month trip was made in Ouagadougou. Most of the stay on site
took place in the LEMC laboratory of 2IE in Kamboinsé. Several stages of preparation have made
possible the treatment of various alternative materials harvested: recycled lime, rice husk ash,
vegetable fiber and synthetic hair.

The prepared materials were then compacted into CEB using a hand press in several formulations.
After curing, tests on CEB were carried out. Other bricks from various surroundings of Ouagadougou
have also been characterized. In addition, several visits to buildings made of raw earth have been
organized to discover the context of construction in Burkina Faso.

Back in Belgium, alternative materials have been characterized in greater detail in the laboratories of
the Faculté des Sciences Sppliquées de l’université de Liège. Physical, mineralogical, chemical and
mechanical analyzes allowed to evaluate the potential of these materials to stabilize raw earth.

It appears that alternative materials represent the ideal products to increase the behavior of Burkina
raw earth. This waste is a resource that has not been exploited. Their incorporation into CEB seems to
be an excellent mean of recycling. Indeed, the CEB manufactured from these residues contribute to
the increase of mechanical and thermal performances. The proportion of these components has been
slightly optimized. It is noted that lime gives maximum performances for a dosage of 10 to 15% of soil
mass. When adding rice husk ash, the optimum is around 30% with respect to lime mass. Then,
vegetable and synthetic fibers appear to contribute to the increase of performance, but do not include
an optimal proportion over the range explored (0.2 to 1.2% of soil mass).

Finally, the CEB produced here are compared with earth bricks taken from existing production in
Burkina Faso. Several types of bricks were tested, including 8% cement stabilized CEB. By taking the
necessary precautions to compare them, comparable mechanical strengths are observed. After a long
curing, we can even see better performances for some CEB with recycled materials. It is the case for
lime stabilizations at 10% and 15%.

This thesis is a continuation of the works of Jehanne PAULUS, who evaluated the construction domain
in Burkina Faso. It will also be continued by the work of Philbert NSHIMIYIMANA, PhD student of ULg
and 2IE, who also participated.

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INTRODUCTION

On considère aujourd’hui qu’environ un tiers de la population mondiale vit dans des bâtiments en terre
crue. Effectivement, il est tout à fait logique de bâtir avec la matière disponible à même le sol.
Cependant, bien qu’adaptée au climat, la construction en terre crue est de moins en moins utilisée au
Burkina Faso et dans les pays limitrophes. Elle est assimilée à un matériau peu résistant qui nécessite
beaucoup d’entretien. A l’inverse, la construction en béton connait un certain essor et est associée à
la réussite sociale. Souvent, les blocs de béton sont apparents, sans enduits.

Matériau de construction majoritairement utilisé depuis des millénaires, la terre est toujours
employée au Burkina Faso, notamment pour les habitations dans les régions rurales. Il est tout à fait
possible de construire avec une terre non stabilisée. C’est une technique écologique, simple et locale,
mais également vulnérable. En effet, lorsque la terre crue est laissée à l’air libre, elle est
particulièrement sensible aux conditions climatiques (pluie, vent, gel…). Il faut alors la protéger via un
enduit par exemple, ce qui implique un entretien plus important. D’autre part, les caractéristiques
mécaniques du matériau terre non stabilisé sont assez faibles et souvent aléatoires dans un contexte
de construction très majoritairement artisanal. Ceci contraint fort les possibilités architecturales.
Aujourd’hui, on cherche donc à combiner les atouts du matériau local qu’est la terre, tout en gommant
ses défauts en renforçant ses caractéristiques par une stabilisation.

Ce travail vise à répondre à la problématique suivante : Comment stabiliser la terre crue pour la
construction au Burkina Faso ? Il traitera donc particulièrement de la typologie que constitue la brique
de terre comprimée (BTC) stabilisée, qui représente l’un des modes de construction en terre crue des
plus rapide, fiable et résistant.

En première partie, un état de l’art de la construction en terre crue est dressé à travers une revue du
matériau terre, de la terre stabilisée et de l’architecture de terre. La terre est décrite dans son
exploitation depuis le sol, jusqu’à l’architecture en passant par la brique.

La seconde partie traite de la caractérisation de résidus naturels ou industriels disponibles au Burkina.


Un ensemble d’essais en laboratoire a été mené pour étudier la potentielle incorporation de ces
additifs dans les briques. Parmi ces matériaux alternatifs on retrouve de la chaux recyclée, des balles
de riz calcinées, des fibres végétales séparées et des cheveux synthétiques. La méthodologie, les
résultats puis les conclusions des essais seront détaillés.

Enfin, la dernière partie concernera la brique de terre comprimée et s’articulera autour de trois sous
parties. La méthode de réalisation de BTC sera d’abord détaillée. Suivront la procédure et les résultats
des essais menés sur les BTC. Finalement, la dernière partie traite du marché des BTC avec la
description des ressources en matériaux alternatifs suivie d’une comparaison de la production
existante avec les BTC formulées.

Dans ce travail sur la Brique de Terre Comprimée (BTC), on ne traitera pas volontairement d’autres
éléments intervenants dans une maçonnerie en BTC comme les mortiers et ou les enduits. En effet, le
cœur de l’étude est le matériau terre lui-même et ses interactions avec des stabilisants. De même, la
prise en compte du dimensionnement, des méthodes de constructions, de la gestion de chantier et
autres considérations techniques ne seront donc pas traités ici.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE I. Le matériau terre

A. LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE

I. LE MATERIAU TERRE

1) Au niveau géologique
La terre est définie comme la couche d’épaisseur variable de matière meuble disponible sur la surface
terrestre. Cette fine couche est issue de la dégradation des roches mères par des procédés d’altération
sur des périodes géologiques. A l’épreuve des années d’érosion causée par le vent, la pluie, le soleil ou
encore le gel, les particules de roches solides se fragmentent progressivement pour former des grains
de plus en plus petits, les sédiments. Les matières organiques présentes dans le sol contribuent
également à sa dégradation. A travers l’eau, la faune et la flore propres au sol, la terre subit une
constante migration verticale des éléments solubles. L’ensemble de ces facteurs engendrent des
transformations importantes des sols, phénomène que l’on appelle pédogénèse.

Les sédiments vont être amenés à se déplacer au gré d’évènements climatiques, géologiques et
naturels pour se rassembler dans un contexte propice à une nouvelle transformation. Les sédiments
vont s’agglomérer pour former des roches sédimentaires après plusieurs milliers d’années. Cette
seconde métamorphose de la matière s’appelle la diagénèse. Le matériau s’inscrit ainsi dans un cycle
géologique naturel.

Cependant, l’homme intervient également dans ce processus. De par ses activités, l’humain a une
grande incidence et modifie très rapidement l’état de surface de la terre. Cela a un impact sur les
écosystèmes naturels et entraine des dérèglements climatiques. Mais on oublie souvent que nous
créons également un cycle artificiel similaire au cycle géologique en produisant des matériaux de
constructions en grand nombre. Le sable, les agrégats et le ciment que nous utilisons pour former du
béton constituent également une sorte de diagénèse, tandis que les intempéries et d’autres causes
viennent ensuite causer la ruine de nos constructions, les réduisant inévitablement en sédiments à
une échelle de temps plus ou moins importante.

Le cas du béton, s’avère peu écologique notamment par le chauffage du clinker à environ 1450°C pour
obtenir le ciment. Le béton fait appel à une énergie considérable pour agréger les sédiments.
Cependant, on observe pour d’autres matériaux un phénomène de solidification naturelle qui n’a pas
d’impact sur le plan environnemental. Il s’agit notamment de la pierre et de la terre. En effet, le calcaire
qui est majoritairement utilisé en construction, est une roche sédimentaire qui se forme au fond des
océans sous des conditions de pression telles que les sédiments se solidifient pour former un matériau
extrêmement solide. Ce phénomène de durcissement est tout à fait naturel et continu. On estime que
chaque année, se forme environ 12 milliards de tonnes de roches sédimentaires, ce qui fait de la pierre
une alternative renouvelable non négligeable (PERRAUDIN, 2013).

Ainsi, la terre présente à la surface de notre planète peut être transformée facilement pour constituer
un matériau de construction idéal. Les grains très fins la constituant peuvent être agglomérés entre
eux lorsqu’on les mélange avec de l’eau et les met en forme. L’excès d’eau va progressivement
s’échapper pour être remplacé par l’air. Le mélange grain, air et eau forme un complexe relativement
solide, permettant de construire. C’est le passage « du grain à l’architecture » (DOAT et al., 1979).
Comme le béton, ou la pierre, le matériau ainsi formé est amené à se dégrader au fil du temps pour
être naturellement retransformé en sédiments. Une fois redevenue poussière, la terre peut être
réutilisée à nouveau pour confectionner des matériaux et bâtir un nouvel édifice. La Terre crue est

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE I. Le matériau terre

donc un élément totalement recyclable et réutilisable. Grâce notamment aux capacités liantes des
argiles qui la constitue, la terre mélangée à l’eau offre des possibilités de réemploi infinies et cette
faculté a contribué fortement à l’utilisation massive de ce matériau par nos ancêtres.

Le sol est composé de plusieurs couches. La première strate est composée de terre végétale, ou humus,
contenant des résidus végétaux. La profondeur de cette couche organique dépasse rarement 1 à 2
mètres. La seconde couche est une terre minérale, sans résidus. C’est cette strate qui est employée
pour construire en terre crue. Ce sol utilisable se trouve rarement à de grandes profondeurs (trop de
pierres, voire de roches solides). La hauteur des couches utilisables varie considérablement, de
quelques centimètres à plusieurs mètres. La Terre est un matériau local, facile à extraire et disponible
en grande quantité. Souvent, elle est le seul matériau disponible, permettant de « construire avec ce
que l’on a sous les pieds » (ANGER & FONTAINE, 2009).

Dans le monde

La terre est utilisée dans des territoires extrêmement différents depuis les plus hautes régions du
monde comme au Tibet ou dans les Andes au Pérou, jusqu’au territoire les plus bas comme au bord
du Nil en Egypte ou dans les vallées fertiles de Chine le long du Huanghe. Elle est utilisée sur tous les
continents comme matériau de construction depuis plus de onze millénaires comme on le peut le voir
sur cette carte réalisée par le CRATerre :

Figure 1 : Carte du monde : utilisation de la terre en architecture

Selon le CRATerre, on considère qu’environ 30% de la population mondiale vit dans un habitat en terre,
pour environ 1.5 milliards d’habitants. Pour les pays en voie de développement, cela représente
environ 50% de la population rurale et 20% pour en région urbaine. En Inde, le recensement de 1971
indiquait un parc immobilier construit à 72% en terre.

Selon l’Auroville Earth Institute, il y a environ 1,7 milliards de terriens qui résident dans un bâtiment
en terre. D’autres études estiment « qu’au minimum 30 % de la population mondiale vit dans des
constructions en terre et 17 % des constructions inscrites sur la Liste du patrimoine mondial de
l’UNESCO sont des œuvres architecturales en terre » (ANGER & FONTAINE, 2009).

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE I. Le matériau terre

En France, l’agence nationale d’amélioration de l’habitat (ANAH) estimait en 1980 que le nombre de
bâtiments construits en terre représente 15% du patrimoine architectural. Cela représente 2 400 000
bâtiments et plus de 8 millions pour l’ensemble de l’Europe.

Quoi qu’il en soit, la terre représente une partie importante des matériaux d’architecture utilisés dans
le monde.

Au Burkina Faso

Les terres disponibles dans les différentes régions du monde présentent des disparités de par les
climats, la végétation, et les phénomènes géologiques dépendants de ces localités. Au Burkina Faso
comme dans d’autres régions africaines et du monde, on retrouve majoritairement de la latérite. Il
s’agit d’un sol ferrugineux, comprenant une couche latéritique indurée de quelques centimètres à
environ 1 mètre et qui recouvre des argiles en dessous (taille inférieure à 63µmm).

Les sols latéritiques se forment dans plusieurs régions du monde à travers des processus d'altération
qui favorisent la formation des oxydes de fer, d'aluminium, de manganèse et de titane. Les minéraux
silicates se dégradent en argile tels que la kaolinite et l'illite. Les oxydes de fer et d’aluminium sont très
nombreux dans les sols latéritiques et avec l’effet de l’eau, ils sont responsables de la couleur brun
rougeâtre propre à la Latérite. Selon MUKERJI et BALHMANN (1978), « le matériau est facile à
découper, et il durcit très vite à l’air, et devient assez résistant aux agents météorologiques ».

La latérite se retrouve sous différentes formes selon son état de dégradation et son origine. On parle
de latérite indurée lorsqu’elle forme des agglomérats très solides, difficilement cassables à la main et
assimilables à des roches. On la trouve aussi sous forme très peu cohérente, s’approchant d’un tas de
petits granulats non liés entre eux. Cependant, le phénomène d’induration est un caractère relatif,
peut aisément quantifiable. On considère qu’un matériau est induré lorsque ses propriétés ne sont pas
influencées par l’état d’humidité. Ses propriétés varient en fonction de sa granulométrie, et de sa
composition minéralogique. On retrouve en généralement des minéraux tels que quartz, kaolinite,
goethite, hématite (BILLONG et al. 2009).

2) Au niveau microscopique
La partie microscopique de la terre est constituée par nature de différentes phases. La première est la
phase liquide, contenant majoritairement de l’eau et quelques corps en solution. La seconde est la
phase gazeuse, qui contient essentiellement de l’air. Enfin, la phase solide comprend des matières
minérales et organiques insolubles dans l’eau.

L’air ne joue pas un rôle prépondérant, et on cherche à réduire son incorporation dans les terres. L’eau
par contre est un facteur important et se présente sous plusieurs formes. L’eau libre est mobile par
gravitation ou capillarité en fonction des paramètres thermohydriques. L’eau interstitielle est
contenue dans les pores fins où la capillarité la retient, et peut être éliminée par séchage en étuve.
L’eau de solution forme un film autour des grains, retenue par les forces polaires, d’hydratation
ioniques et électrostatiques. L’eau absorbée est un film plus fin encore en partie externe et interne de
la surface des grains, que l’on élimine avec des températures supérieures à 100°C. Enfin, l’eau
structurelle, ou groupes hydroxyles intégrés au réseau cristallin, peut être éliminée autour des 600°C.

Les matières organiques sont constituées de débris divers d’origine animale ou végétale qu’ils soient
vivants ou dans un état de décomposition plus ou moins avancé. L’humus constitue la partie la plus
stable des matières organiques. Ces constituants font la richesse de la fine couche arable qui permet

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE I. Le matériau terre

au vivant d’exister sur Terre. Sauf pour des techniques particulières, ce n’est pas cette fraction du sol
de 5 à 35 cm qui est généralement recherchée pour la construction.

Les matières minérales sont issues de l’altération de la roche mère et forment la partie mécanique du
sol. Elles sont des fragments de la roche initiale et des minéraux silicatés ou calcaires. Ce sont celles-ci
qui forment le matériau principal de construction et que l’on nommera terre crue pour la suite. Les
éléments minéraux sont généralement majoritaires dans le sol. Selon leur état, on peut les classer en
deux sous-catégories (HOUBEN et GUILLAUD, 2006) :

- Minéraux non dégradés : semblables à la roche mère, ils sont constitués des graviers,
sables et silts,
- Minéraux dégradés : ils ont été fortement altérés et forment par leur taille réduite (2µm),
une pâte collante en présence d’eau. On les dénomme colloïdes de par la propriété
collante qu’ils confèrent à la terre. Ils sont principalement constitués d’argiles.

Des grains

Les sols sont constitués de différentes proportions de quatre types de matériaux sous forme de grains.
On retrouve dans un ordre granulométrique décroissant les graviers, les sables, les limons et les argiles.
Ces quatre types de grains se comportent de façon différente vis-à-vis de paramètres extérieurs
comme l’hygrométrie. Les graviers et les sables sont stables, tandis que les limons et argiles subissent
des variations liées à leur environnement. Cette notion de stabilité, c'est-à-dire la capacité à résister à
une humidité et à un dessèchement sans changement de propriétés, revêt une importance
fondamentale pour un matériau de construction.

 Les graviers de 2 à 20mm : sont constitués de morceaux de roche originelle de dureté variable.
Ils forment le squelette stable du sol. Leurs propriétés mécaniques ne subissent aucun
changement détectable en présence d'eau et limitent donc retrait et capillarité.
 Les sables de 0,06 et 2 mm : Également des constituants stables composés principalement de
quartz et de silice, ils manquent de cohésion à sec mais présentent une grande friction interne.
Lorsqu'ils sont mouillés, ils présentent une cohésion apparente en raison de la tension
superficielle de l'eau occupant les vides entre les particules. Leur perméabilité et leur structure
ouverte sont caractéristiques.
 Les silts de 0,002 et 0,06 mm : Les fractions silteuses sont assimilables aux sables mais avec un
diamètre moindre et une perméabilité plus élevée. Lorsqu'ils sont exposés à différents niveaux
d'humidité, ils gonflent et se rétrécissent, évoluant sensiblement en volume.
 Les colloïdes inférieurs à 2 µm : cette catégorie comprend majoritairement des argiles mais il
existe dans d’autres colloïdes composés de particules très fines cristallisées ou organiques.

Les graviers, les sables et, dans une moindre mesure, les limons se caractérisent donc par leur stabilité
en présence d'eau. Lorsqu'ils sont secs, ils ont peu ou pas de cohésion et, par conséquent, ils ne
peuvent pas être utilisés seuls comme matériaux principaux d'un bâtiment.

Les argiles

Les argiles font partie des colloïdes et sont extrêmement importants pour la cohésion des sols. Elles
sont des particules minérales microscopiques avec des caractéristiques complètement différentes des
silts, sables et graviers d’un point de vue chimique comme physique. Elles sont composées
d’aluminosilicates hydratés formés suite à la dégradation de minéraux rocheux originaux. Leur
morphologie est de type plat en lamelles ce qui explique leur importante surface spécifique. En
présence d’eau, des forces de tension superficielles se produisent dans le film d'eau entourant les

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE I. Le matériau terre

argiles. De par leur minceur, les forces de volume deviennent faibles par rapport aux forces de surface.
Le film d'eau qui adhère fortement aux couches d'argile, relie les microparticules du sol, conférant à
l'argile une grande cohésion et sa résistance mécanique. L'argile donne de la cohésion au sol, agissant
comme une sorte de liant naturel entre les autres grains qui forment son ossature.

Contrairement aux sables et aux graviers, les argiles sont instables et sont extrêmement sensibles aux
variations d'humidité. Ils sont fortement attirés par l'eau et à mesure que la teneur en eau augmente,
les films d'eau absorbée deviennent plus épais contribuant à l’augmentation du et le volume apparent
total des argiles. À l'inverse, lorsque la teneur en eau diminue, un rétrécissement des argiles se produit
et des fissures peuvent subvenir, réduisant leur résistance. Les fissures forment des canaux par
lesquels l'eau peut alors pénétrer. On cherche à éviter ce phénomène de variations de volume typique
des terres argileuses. Ce système est valable pour des teneurs en humidité en dessous de la limite
liquide pour lesquelles l'argile a une cohésion. Avec une teneur en eau plus élevée, les argiles se
liquéfient et perdent toute cohésion.

Les argiles dérivent de la dégradation de minéraux silicatés (micas, feldspaths, pyroxène, amphibole…).
Elles sont donc constituées de cristaux irréguliers de taille plus ou moins grande qui lient les particules
plus grosses comme le sable ou les limons. Si l’on zoome sur les groupuscules de cristaux d’argiles, on
observe un cristal d’argile. On peut observer qu’il forme une micelle en attirant des ions sur ses charges
négatives. En zoomant encore, on observe une structure en feuillet entre laquelle il existe un espace
interfoliaire. On peut distinguer plusieurs espèces d’argiles, dont trois sont les plus fréquentes :
kaolinite, illite et montmorillonite.

Les phénomènes infinitésimaux qui régissent le comportement des argiles sont très complexes. On ne
peut simplifier l’ensemble des interactions qui ont lieu au sein des argiles en une seule force.
Cependant, on observe une prépondérance des forces électrostatiques, suivies par d’autres forces :

- Force électrostatique : les micelles d’argile peuvent porter des charges négatives ou, plus
rarement, positives. Les charges positives ont pour origine des substitutions d’atomes ou
des valences non satisfaites qui engendrent des charges négatives, attirant donc les
cations présents dans l’eau.
- Force de cimentation : due à des précipitation et dissolution créant des ponts liants entre
particules grâce à des agents comme la calcite, la silice, l’oxyde ferrique etc.
- Force capillaire : similaire mais plus faible que la cimentation, elle est réversible et
concerne surtout les grains inertes possédant des canaux capillaires.
- Force électromagnétique : il s’agit des forces de Van der Waals qui, bien que moins
importantes, influent sur la liaison entre micelle et grains inertes en augmentant la friction.
- Force de friction : due aux aspérités de surface de l’échelle atomique à moléculaire

3) Au niveau macroscopique
Les réactions complexes, ayant lieu au niveau microscopique, déterminent le fonctionnement d’une
terre. Au niveau macroscopique, elle présente des propriétés tangibles et observables par l’homme. Il
existe toute une série de techniques d’identification manuelle pour caractériser une terre.

Caractéristiques des terres

Les propriétés de la terre changent d'un sol à l'autre en fonction de la nature des fractions de particules
qui la compose. En général, c'est la fraction dominante d'un sol qui caractérise ses propriétés
fondamentales et dicte son comportement. On peut distinguer d'une part les propriétés chimiques qui

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE I. Le matériau terre

sont liées à la présence de sels, d'oxydes et de sulfates, et d'autre part entre les propriétés physiques,
nombreuses et qui incluent la couleur, la stabilité structurelle, l'adhérence, la densité apparente sèche,
la teneur en humidité, la porosité, la capacité d'absorption, la perméabilité, le retrait linéaire, la
résistance à la sécheresse etc. La compréhension de ses propriétés chimiques et physiques permet de
définir la qualité et la performance d'un sol à des fins constructives. Parmi toutes ces caractéristiques,
on distingue 3 caractéristiques fondamentales qui permettent à elles seules d’avoir une bonne
compréhension du type de terre (RIGASSI, 1985) :

- La texture : la distribution granulométrique du sol, c'est-à-dire la quantité de graviers, de


sables, de limons et d'argiles proportion massique,
- La plasticité : la facilité avec laquelle il peut être façonné,
- La compressibilité : ou l’aptitude à réduire les vides, et donc sa porosité.

La répartition granulométrique est mesurée en deux temps en fonction de la taille des particules qui
ont des rôles différents. Les graviers, sables et limons sont étudiés par granulométrie et les argiles (et
colloïdes) par analyse de sédimentométrie. Les premiers, plus gros, donnent au matériel sa force,
tandis que les seconds, très fins, lient l’ensemble. En fonction des manques observés, on essaie
d’optimiser la proportion de chacun de ces éléments pour obtenir une courbe optimale et continue.

100
90
80
Volume cumulé (%)

70
Kossodo
60
50 Kamboinsé
40
30
20
10
0
100 10 1 0,1
Taille des particules (µm)

Figure 2 : Granulométrie laser réalisée pour deux carrières proches de Ouagadougou (Burkina)

La plasticité traduit l’aptitude d’une terre à se déformer sans qu’une réaction élastique significative ne
se produise. Les limites d’Atterberg définissent les limites entre différents états de cohérence d’une
terre. Celle-ci sont évaluées en quantité d’eau sur la fraction fine du sol (moins de 0,4 mm) :

- Limite liquide (LL) : de l’état liquide à l’état plastique, la terre commence à manifester une
résistance au cisaillement,
- Limite plastique (LP) : passage de l’état plastique à un état solide, la terre devient friable.

L'indice de plasticité, LL-PL détermine le domaine de comportement plastique de la terre. La


combinaison de LL et PL définit la sensibilité du sol aux variations d'humidité. Les propriétés plastiques
d'un sol peuvent être représentées sur un diagramme de plasticité :

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE I. Le matériau terre

Figure 3 : Fuseau du diagramme plastique des terres (AFNOR XP P13-901:2001-10)

La compressibilité d'un sol définit sa capacité maximale à se comprimer pour une énergie de
compactage donnée à une teneur en eau optimale (TEO). Lorsqu'une force est appliquée à une terre,
le matériau est comprimé et la proportion de vides diminue. Plus la densité d'un sol peut être
augmentée, plus sa porosité diminue, ainsi il est difficile pour l'eau de pénétrer. Cette propriété résulte
du réarrangement des particules qui réduit le risque de modification de la structure en présence d'eau.
La teneur en eau doit être suffisamment élevée pour lubrifier les particules et leur permettre de se
déplacer de manière à occuper le moins d'espace possible. En même temps, la teneur en eau ne doit
pas être trop élevée, car si les vides sont pleins d'eau, le matériau devient incompressible. La
compressibilité d'un sol est mesurée par l’essai Proctor (cf. page 73).

Convenance des terres

La texture d’une terre est fonction de la structure de ses particules. Ainsi une terre peut être :

- Organique : fibreuse et odeur d’humus


- Graveleuse : apparence d’un béton
- Sableuse : apparence d’un mortier
- Silteuse : peu cohésive
- Argileuse : collante et cohésive

Les matériaux inertes du sol (graviers à limons) agissent comme un squelette et les colloïdes (argiles)
agissent comme un agent liant, assimilable à un ciment léger. La structure d'une terre est donc
comparable à celle du béton avec un liant différent. La proportion dans laquelle chaque type de
matériau y est présent détermine le comportement des terres. La courbe suivante donne une
indication approximative des types de sols qui sont recommandés pour la fabrication de blocs de terre
comprimés (BTC). Comme on peut le voir, les proportions de chaque type de grains peuvent varier
considérablement en fonction des qualités et surtout des argiles. On peut également intervenir sur
cette répartition granulométrique en corrigeant les granulométries par des mélanges de sol par
exemple.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE I. Le matériau terre

Figure 4 : Fuseau du diagramme des terres recommandé (AFNOR XP P13-901:2001-10)

Selon le type de technique utilisée, on choisira des terres avec des proportions variables d’argile, de
sable et de graviers. Mais une même terre peut être utilisée pour plusieurs techniques selon son état
hydrique, c’est-à-dire sa teneur en eau.

Graviers Sables Silts Argiles


Proportion 0 à 40 % 25 à 80 % 10 à 25% 8 à 30 %

Tableau 1 : Proportion typique des grains

Les propriétés mécaniques finales des matériaux de construction sont influencées par la présence de
composants minéraux, organiques ou inertes dans la terre. Un résumé de l’influence de ces
constituants sont disponibles dans le traité de la construction en terre (2006) :

Tableau 2 : Propriétés mécaniques en fonction des constituants de la terre crue

Selon HOUBEN et GUILLAUD (1989), toute terre qui possède une bonne cohésion est utilisable pour
bâtir. Certaines précautions doivent cependant être prises quant à la teneur en eau, la granulométrie.
Il conviendra d’adopter une technique de construction adaptée à la terre choisie. Il est également
possible de changer de terre pour convenir à une technique choisie par avance. Enfin, la stabilisation
permet également de s’écarter des conditions optimums de convenance.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

II. LA STABILISATION DE LA TERRE

Afin de remédier aux principaux problèmes rencontrés avec l’utilisation de la terre crue dans le
domaine de la construction, plusieurs techniques de stabilisations sont utilisées. Les caractéristiques
d’un mélange terre-eau sont ainsi améliorées : résistance mécanique, résistance à l’eau de pluie ou
diminution de la fissuration lors du séchage.

Des travaux récents montrent que des traces très anciennes de stabilisation remontent à l’époque de
la construction de la Grande Muraille de chine, il y a plus de 1500 ans. Celle-ci est composée de
plusieurs matériaux en fonction des tronçons, notamment par de la terre crue renforcée à l’aide de lits
de roseaux. Tandis que sur d’autres parties de la muraille, des chercheurs ont identifié des traces de
riz gluant dans le mortier. Le liant serait ainsi formé d’un mélange organique-inorganique composé
d’amylopectin, un hydrate de carbone complexe et de chaux. Selon YANG, ZHANG & MA (2009), le riz
gluant jouerait le rôle d’inhibiteur pour contrôler la croissance des cristaux de carbonate de calcium,
menant à une microstructure plus compacte. Les études montrent des bonnes performances et une
excellente compatibilité pour ces types de mortiers.

Des investigations archéologiques récentes ont mis au jour des traces de bitume utilisé pour le mortier
de la mythique tour de Babel. De même, l’enceinte du monument était constituée d’une enveloppe de
terre cuite protégeant la terre crue située derrière. Les procédés visant à stabiliser la terre ont donc
débuté il y a très longtemps mais ce n’est qu’à partir de 1920, puis de 1940 à 1960 que les recherches
se sont accélérées sur ce procédé. Plus récemment, les techniques de stabilisation ont progressé mais
ne parviennent toujours pas à démocratiser suffisamment le matériau terre pour qu’il retrouve la
confiance qu’on lui accordait auparavant.

La stabilisation est une affaire complexe étant donné qu’elle inclut un grand nombre de paramètres à
intégrer dès la conception. Il existe plusieurs techniques de stabilisation qui doivent être choisies en
fonction de paramètres tels que le type de terre utilisé, le type de construction, les moyens disponibles,
la durée du chantier… Selon HOUBEN et GUILLAUD (2006), il existe plus d’une centaine de produits
employés pour la stabilisation des terres. Il faut distinguer l’usage des stabilisants dans la masse ou
dans la peau de la terre (cas des enduits). On ne traitera dans la suite que de la stabilisation dans la
masse du matériau, dans le but de l’appliquer au cas des briques de terre. On propose ici de décrire
les grands principes de la stabilisation de la terre crue.

1) Les types de stabilisation

Le terme stabiliser signifie intervenir sur les caractéristiques d’un mélange terre-eau-air afin de lui
conférer des propriétés particulières permanentes et supérieures à l’état initial. On veut en général
augmenter les résistances mécaniques, réduire la porosité, réduire la sensibilité à l’eau et aux
agressions extérieures et obtenir une meilleure cohésion. Il n’est possible d’agir que sur deux
critères de la terre, sa texture et sa structure selon les 3 procédés suivants :

- Résistance mécanique : augmenter les forces de liaisons internes,


- Porosité : diminuer le volume des vides entre les grains,
- Perméabilité : combler les vides impossibles à éliminer.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

Il existe plusieurs moyens de stabiliser la terre crue, que l’on classe en fonction de leur nature
mécanique, physique et chimique.

La stabilisation mécanique est largement utilisée dans la plupart des usages de la terre crue. Elle
consiste à apporter une énergie de compactage à la matière à bâtir. Cette première action de
compression apportée au matériau va permettre un réarrangement des grains. L’effort appliqué
contraint l’air contenu dans les vides laissés entre les grains à s’échapper, contribuant ainsi à
augmenter la densité du sol. La distribution granulométrique n’est pas affectée mais la structure
interne du matériel change car les particules sont redistribuées. La stabilisation mécanique apporte
une augmentation de la résistance mécanique, la masse volumique, la porosité ainsi que de la
perméabilité. Néanmoins, elle nécessite des essais visant à évaluer la teneur en eau optimale, elle
même fonction du type de terre utilisée et de l’effort appliqué (cf. essai Proctor page 73).

La stabilisation physique consiste à agir sur la texture du matériau en vue de modifier ses propriétés.
Parmi celles- ci nous distinguerons deux premiers traitements physiques faisant intervenir des
procédés complexes et consommant beaucoup d’énergie, et un troisième, plus simple et peu
énergivore :

- Traitement thermique : augmentation (déshydratation) ou diminution de température (gel),


- Traitement électrique : électro-osmose favorisant le drainage de la terre, et lui procurant des
caractéristiques structurales,
- Traitement de texture : comblement des pénuries granulométriques dans le but d’obtenir une
granulométrie la plus continue possible ou apport de renforts à l’aide d’armatures (fibres).

Enfin, le dernier moyen de stabilisation agit au niveau des interactions chimiques entre le matériau
d’autres particules. Il s’agit soit d’une réaction physico-chimique, soit de la création d’une matrice qui
lie ou enrobe les particules. Les stabilisateurs agissant au niveau chimique généralement utilisés sont
le ciment, la chaux, la bitume ou encore les résines. Néanmoins, on trouve également d’autres types
d’additifs naturels d’origines géologique, animale ou végétale. D’autres produits synthétiques peuvent
également être mélangés à la terre (comme les sels, acides, soudes etc.).

De ces trois types de traitements, nous étudierons plus en détails la partie chimique en détaillant
l’action de la chaux et de pouzzolane. La stabilisation physique au niveau de la texture sera également
étudiée à travers l’ajout de fibres.

2) La chaux

La chaux ou hydroxyde de calcium (CH), est un produit chimique très utilisé dans la construction mais
aussi dans la sidérurgie, la chimie ou encore l’agriculture. Il est surnommé à juste titre, « versatile
chemical », ou produit chimique polyvalent à la vue de ses nombreuses applications industrielles. Une
de ses applications sans doute des plus connues est la stabilisation des sols pour les routes. L’aéroport
de Dallas datant de 1974 en est un bel exemple avec ses 70 km² nécessitant 300 000 tonnes de chaux.

Il s’agit probablement d’une des premières espèces chimiques utilisées par l’homme. On retrouve une
première trace d’utilisation de la chaux 4000 ans avant JC. Les égyptiens en faisaient usage pour le
plâtre et la fabrication des enduits et de mortiers. Mais on sait aujourd’hui que les Grecs, les Romains
et les Chinois l’ont également utilisée très tôt pour le blanchiment, le tannage, l’agriculture et la
construction.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

L’architecte Vitruve proposait déjà d’utiliser la chaux à l’état de pâte après l’avoir laissée reposer 3
mois dans une fosse. On l’associait souvent à un matériau pouzzolanique. Le Colysée de Rome ou les
vestiges de Pompéi offrent une excellente illustration des capacités de durabilité de la chaux.

La chaux a été très largement utilisée en construction jusqu’en 1890, date de la découverte du ciment
Portland. Son usage s’est tourné ensuite vers la sidérurgie où il rentrait dans la fabrication de l’acier à
hauteur de 150 kg par tonne d’acier. La production mondiale de chaux est d’environ 120 à 150 millions
de tonnes par an (BECHOUX, 1999).

Types de chaux

La chaux est un réactif basique peu couteux très utilisé dans plusieurs domaines. On la retrouve à l’état
liquide dans un lait de chaux, ou à l’état solide sous forme pulvérulente (poudre) ou d’agglomérats
(cailloux). Elle se décompose en plusieurs catégories en fonction de sa composition et de ses usages :

- Chaux aérienne : produite à partir de calcaires très purs, utilisée préférentiellement pour
stabiliser,
- Chaux hydraulique : semblable au ciment, peu recommandée pour la stabilisation même si les
naturelles ont un pouvoir stabilisant plus important que les artificielles,
- Chaux agricole : utile pour fertiliser les terres, elle ne présente pas d’effet stabilisant,
- Chaux dolomitique : contient du magnésium utilisable en stabilisation mais avec une réaction
très lente.

La chaux aérienne est celle qui intéresse le plus dans le domaine de la construction. Elle se décompose
en deux catégories selon son état d’hydratation :

- Chaux vive (CaO) : produit par la cuisson de la pierre à chaux. Elle réagit directement avec l’eau
par une réaction exothermique jusqu’à 150°C pour former de la chaux éteinte, ce qui exige un
stockage particulier. A masse égale, elle est plus efficace que la chaux éteinte,
- Chaux éteinte (Ca(OH)2) ou portlandite : plus simple d’utilisation que la chaux vive, elle est le
plus couramment utilisée en stabilisation.

Fabrication

La chaux est fabriquée à partir de calcaires et dolomites, composées à plus de 50% en masse de
carbonates de calcium et de magnésium. Ces roches sont principalement d’origine sédimentaire. Elles
ont été constituées au fond des océans. Ces sédiments carbonatés se sont souvent rapidement
transformés selon le phénomène de la diagénèse.

Dans notre monde industrialisé, la chaux est un produit très largement fabriqué en usine de manière
très analogue. Pour former de la chaux à partir du calcaire, il faut mener préalablement les étapes
d’extraction, de concassage, de lavage et de criblage. Ensuite vient la calcination dans différents fours
spéciaux à une température dépassant les 950 à 1250°C. La réaction mise en jeu est la suivante :

CaCO3 + chaleur -> CaO + CO2

100% 56% 44%

On obtient alors de la chaux vive qui peut être utilisée telle quelle ou que l’on peut transformer en
chaux éteinte avec de l’eau (réaction exothermique 15 500 cal/mol) :

CaO + H2O -> Qcal + Ca(OH)2

56% 18% 74%

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

Une fois la chaux formée, il est encore nécessaire de lui faire subir un traitement, non pas des
moindres. Il faut réduire la granulométrie de la chaux au minimum afin d’augmenter sa surface
spécifique, et donc son efficacité. On procède d’abord à un tamisage pour répartir les grains en
fonction des usages prévus pour chaque domaine d’application, puis la chaux est broyée très finement
pour atteindre des granulométries très fines. La chaux est alors mise en sac et prête à l’emploi.

Mécanismes d’action

L’ajout de la chaux contribue à l’action de 4 mécanismes de bases en lien avec les particules les plus
fines du mélange, les argiles (MILLOGO, 2007)

- Echange cationique : avec l’ajout d’eau au mélange terre-chaux, les ions calcium Ca2+ contenus
initialement dans la chaux passent en solution. Ils peuvent alors se substituer à d’autres ions
appartenant à la terre (sodium, potassium, magnésium et hydrogène). C’est le phénomène
d’échange cationique qui dépend de chaque type de terre.
- Floculation et agglomération : les particules échangées contribuent à modifier la configuration
de l’eau interstitielle entre particules et augmentent les charges en présence. Les particules
vont alors avoir tendance à s’agglutiner pour former des ensembles plus gros, modifiant ainsi
la granulométrie et la texture de la terre.
- Carbonatation : une fraction de la chaux réagit avec le gaz carboniques (CO2) pour former du
carbonate de calcium (calcite CaCO3) selon la réaction suivante :
Ca(OH)2 + CO2 → CaCO3 ↓+ H2O
- Réaction pouzzolanique : phénomène majoritaire contribuant à l’augmentation de résistance
créé par l’addition de chaux. Le pH basique de l’hydroxyde de calcium permet une dissolution
des argiles qui contribue au réarrangement de la silice et de l’alumine pour former des silicates
de calcium et d’aluminium complexes (cf. équation pouzzolanique page 20)

Notons que l’ajout de chaux contribue également à une absorption d’eau non négligeable, d’autant
plus s’il s’agit de chaux vive.

Pouvoir stabilisant

La chaux est un excellent stabilisant pour la terre crue et ce mode de stabilisation se prête très bien au
procédé de moulage par compression. Néanmoins, avec la chaux, il existe un dosage idéal pour chaque
type de terre. Tout comme pour la teneur en eau, des essais doivent être menés pour trouver la
proportion optimum de chaux. Les résistances mécaniques générales s’améliorent significativement
avec l’augmentation de la proportion de chaux. Cette amélioration du comportement mécanique est
due à l’augmentation du potentiel de cations échangeables du calcium apporté par la chaux ainsi qu’au
pH élevé maintenu plus longtemps dans le milieu. Au-delà de la teneur optimum en chaux, on observe
une décroissance des résistances avec des concentrations de chaux trop importantes (IZEMOURREN
et al., 2013).

La terre stabilisée par la chaux verra une partie de ses propriétés modifiées. Pour une compression
identique, sa masse volumique sèche sera légèrement plus faible, du fait de la floculation. Les
résistances mécaniques augmenteront, et ce progressivement avec le temps. Enfin, les variations
dimensionnelles seront réduites dès l’ajout d’un faible pourcentage de stabilisant, diminuant
fortement le retrait.

Bien sûr, il est évident que les qualités propres à la chaux utilisée rentrent en jeu. On fera notamment
attention aux paramètres de pureté, réactivité, finesses des particules, état hydrique, ségrégation des
particules etc.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

La principale condition d’utilisation de la chaux, est que la terre à stabiliser présente une grande
proportion d’argiles. En effet, c’est avec ces fins minéraux altérés que la chaux va pouvoir réagir selon
la réaction pouzzolanique. Si ce n’est pas le cas, la terre sera avantageusement stabilisée à la chaux.
Par contre, dans le cas où la proportion d’argiles est très élevée, la chaux peut présenter un pouvoir
stabilisant plus important. La résistance en traction est d’ailleurs fortement influencée par le type
d’argiles présents, bien plus que la résistance en compression.

Un deuxième paramètre important est la teneur en matière organique lorsque celle-ci est très élevée
(supérieure à 20%). En effet, ces matières peuvent bloquer les échanges ioniques tout en laissant agir
la réaction pouzzolanique. Mais plus il y en aura, plus il faudra y prêter attention. De même, la teneur
en sulfates est importante car ils s’avèrent également nuisibles à l’état humide (HOUBEN et GUILLAUD,
2006).

3) Les pouzzolanes

Selon la norme américaine ASTM C125-07, les pouzzolanes représentent une catégorie de matériaux
siliceux et alumineux dépourvus de propriétés hydrauliques propres mais qui peuvent réagir en
présence d’eau avec l'hydroxyde de calcium pour former des composés possédant des propriétés
liantes. Si une matière est capable de faire prise en présence de chaux, on dit qu’elle possède des
propriétés pouzzolaniques.

Etymologiquement, le nom pouzzolane provient de la ville Pouzzoles située à proximité du Vésuve, qui
bénéficiait d’un gisement de cendres volcaniques aux propriétés de liant hydraulique mélangé avec de
la chaux. La généralisation de ce terme générique s’est étendue à l’ensemble des pyroclastes ayant
des capacités liantes en présence de chaux. Ce type de matériaux a démontré sa durabilité à travers
des constructions qui ont traversées les siècles (SEGUI, 2011) :

- Le réservoir d‘eau de la ville de Caminos en -700 av. JC,


- Le panthéon de Rome au deuxième siècle av. JC,
- Le pont du Gard au premier siècle ap. JC.

L’usage de la pouzzolane s’est fortement réduit à partir du 19ème siècle en raison de la découverte du
ciment portland. Mais les additions de pouzzolanes montrent des atouts qui ont contribué au
développement de ciments pouzzolaniques régis par des normes (NF EN 197-1, ASTM-C-618).

Les pouzzolanes sont constituées minéraux riches en silice SiO2, en alumine Al2O3 et en oxyde de fer
Fe2O3. Les matériaux pouzzolaniques peuvent être naturels ou artificiels et provenir de scories
volcaniques mais aussi d’autres sources comme les végétaux (TCHAKOUTE, 2013).

Réaction pouzzolanique

La chaux, qu’on appelle aussi portlandite ou hydroxyde de calcium, de formule Ca(OH)2 (abréviation
CH) est à la base de la réaction pouzzolanique. On qualifie de pouzzolanique, la réaction d’une
pouzzolane qui, associée à l’hydroxyde de calcium (CH), forme un silicate de calcium hydraté (CSH)
selon l’équation suivante :

Pouzzolane + CH -> CSH

Le silicate de calcium hydraté, ou tobermorite, est connu comme le produit principal de l’hydratation
du ciment, responsable de la résistance des bétons (COLLEPARDI et al., 1976). Il est formé à partir de

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

silicates bicalciques(C2S) et tricalciques(C3S) et contribue à la synthèse d’hydroxyde de calcium selon


l’équation suivante :

C2S + H2O -> CSH + CH

C3S + H2O -> CSH + CH

L'ajout de chaux à la terre argileuse induit principalement deux réactions : à court terme (échange
cationique et floculation) et à long terme (réaction pouzzolanique) entraînant une solidification du
matériau. Cette réaction produisant les silicates de calcium hydratés a déjà lieu avec les argiles, qui
apportent une certaine quantité d’alumines et de silice.

Cependant, les effets du traitement de la chaux peuvent être améliorés dans une large mesure grâce
aux pouzzolanes. En effet, comme la terre est une bonne source d'alumine, la pénurie apparente de
silice peut être complétée par l'ajout de pouzzolane contenant une forte teneur en silice réactive
(HARICHANE et al. 2012). Une production plus importante de silicates de calcium hydratés pourrait
être observée, rendant le matériau plus résistant.

Taux amorphe des Pouzzolanes

Selon PICHON (1996), la réactivité des matériaux pouzzolaniques dépend de la nature et de la


proportion des phases le composant. La pouzzolanicité d’un corps est corrélée à son taux de phase
amorphe silicatée, ou sa silice sous phase vitreuse.

Il existe des matériaux pouzzolaniques divers mais parmi eux, la balle de riz s’avère très intéressante.
La balle est l’enveloppe du grain de riz qui constitue, après calcination et broyage, un matériau avec
une composition quasiment exclusive d’oxyde de silice. De même, la réactivité des pouzzolanes
constituées de balles de riz calcinées, est fonction de sa phase amorphe. La méthode de calcination
(température et temps) influence fortement la part de cette phase vitreuse. Ce paramètre conditionne
les propriétés mécaniques et la durabilité des matériaux de construction réalisés avec ces cendres
végétales (LE ANH-TUAN et al. 2011).

4) Les fibres

Pour renforcer les briques de terre crue, il existe une autre technique faisant usage d’armatures
fibreuses qui convient bien à la pratique de briques comprimées. La résistance apportée par des fibres
permet de résoudre d’autres problèmes rencontrés sur les briques de terre crue, que la stabilisation
avec addition ne peut pas forcément solutionner (SAADI et BELOUETTAR, 2011).

Les fibres agissent sur les résistances mécaniques, les performances thermiques et encore d’autres
aspects :

- Augmentation importante de la résistance en traction, et souvent des résistances en flexion et


compression,
- Réduction de la fissuration et réduction des variations dimensionnelles dues au séchage des
argiles grâce à l’effort distribué dans tous les sens par les fibres,
- Accélération du séchage, par l’effet drainant des canaux de fibres,
- Allègement des blocs, et amélioration de la conductivité thermique par l’introduction d’une
plus grande quantité d’air grâce aux fibres.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

Les caractéristiques sont améliorées grâce au renfort des fibres qui présentent des propriétés
mécaniques bien meilleures que la matrice. Celle-ci joue des rôles secondaires mais non moins
essentiels (GAY, 1989) :

- Maintien des renforts fibreux les uns par rapport aux autres,
- Transmission d’efforts entre les fibres,
- Protection des fibres vis-à-vis des agressions extérieures.

Le comportement des blocs renforcés par des fibres est différent. A la rupture, les blocs armés restent
en un seul morceau. Ils peuvent absorber une énergie plus importante grâce à la capacité de
déformation des renforts. On observe en général une augmentation de la résistance en compression
de l’ordre de 15% avec l’ajout de fibres (HOUBEN et GUILLAUD, 1989).

Paramètres

Une série de paramètres agissent sur l’effet du renforcement, en commençant par les dimensions des
fibres. POILANE (2009) remarque que le module d'Young des fibres est proportionnel à leur diamètre
moyen. De même la déformation à la rupture est fonction de la section moyenne. La longueur des
brins est également importante et dépend du type de fibre utilisée.

La quantité de fibres joue également sur les performances du renforcement. Il existe une quantité à
ne pas dépasser, qui augmente trop la masse volumique, réduisant dans une large mesure les points
de contacts de la matrice. Si l’on mesure en volume, un dosage à 4% du volume donne généralement
des résultats mesurables. La distribution des fibres au moment du malaxage, puis du compactage est
également importante. L’idéal est d’avoir un mélange le plus hétérogène possible avec des fibres dans
tous les sens. Il faut absolument éviter la formation de boules ou de nœuds entre fibres, qui
concentrent les renforts seulement à certains endroits, créant des points faibles (HOUBEN et
GUILLAUD, 1989).

La friction interne entre les fibres et la matrice de terre au niveau de l’interface est un élément
essentiel pour que l’effet des fibres puissent se manifester. Selon NGUYEN (2016), l’adhérence entre
matrice et fibre est caractérisée à l’aide de 6 théories complexes et intervient à travers plusieurs types
de liaisons intermoléculaires :

- Liaisons de Van der Walls,


- Liaisons de type acido-basique,
- Liasion chimique covalente.

La durabilité des composites créés est fonction de paramètres comme la température, l’humidité,
l’exposition aux UV etc. Ceux-ci agissent à la fois sur la matrice, mais aussi sur le renfort et l’interface
entre les deux.

On distingue plusieurs types de renforts pouvant être utilisés dans des matrices comme la brique de
terre crue. Une fibre naturelle peut-être d’origine végétale (chanvre), animale (soie) ou minérale
(amiante) :

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

Figure 5 : Type de renforts fibreux dans des matrices (LIANG, 2012)

Fibre végétale

Les fibres végétales proviennent de nombreuses plantes dans de nombreuses régions à travers le
monde. A titre d’exemple, la France est le premier producteur de lin, une fibre naturelle très résistante.
Les fibres végétales présentent une grande variabilité selon leur position initiale sur la plante.

La fibre végétale possède de nombreux atouts. D’un point de vue écologique, elle représente un
matériau local, durable, renouvelable, facile à cultiver avec peu de moyens. Les fibres végétales sont
plus économiques d’un facteur 9 par rapport aux fibres de verre d’un facteur 150 pour les fibres de
carbone tout en nécessitant 6 fois moins d’énergie pour leur fabrication. D’autres points négatifs sont
dus principalement à l’origine végétale des fibres. Entre autres, elles sont sensibles à l’environnement
extérieur. La teneur en cellulose, composant principal de la fibre, dépend de l’âge du végétal
(DUJARDIN, 2017).

Le traitement des fibres végétales exploitées de nos jours se fait en une série d’étapes successives :

- Récolte à maturité,
- Séparation des tiges, feuilles et graines,
- Rouissage (macération) dans les champs,
- Extraction des faisceaux de fibres.

Au terme de ce processus, le faisceau est séparé des tiges via le teillage. Enfin, le peignage permet de
de diviser le faisceau en multiples fibres unitaires d’une section d’environ 20 à 50 µm de large
(NGUYEN, 2016) :

Figure 6 : Fibres unitaires et faisceaux

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE II. La stabilisation de la terre

Les compositions des fibres végétales sont majoritairement identiques mais leur proportion en
fonction des espèces :

Tableau 3 : Composition de différents types de fibres végétales (MOHANTY et al., 2005)

On retrouve les éléments suivants :

- La cellulose : élément majoritaire conférant les propriétés mécaniques aux fibres grâce à sa
structure en longue chaines linéaires (C6H10O5)n, elle est plus sensible aux solutions acides
qu’aux alcalins et oxydants,
- L’hémicellulose : formée de chaînes plus courtes, elle est fortement sensible à l’eau et d’autres
facteurs externes,
- La lignine : composant la matrice liant les micro fibrilles entre elles, elle contribue à la
résistance de la fibre à l’eau mais possède des capacités mécaniques moindres que la cellulose,
- Les pectines : partie la plus externe et hydrophile des constituants de la fibre.

Tableau 4 : Comportement élastique des fibres en traction longitudinale (El) et transversale (Et) (BONNAFOUS, 2010)

Fibre synthétique

Il existe aussi des fibres synthétiques qui sont utilisées pour divers composites. Il est très rare de
constater l’emploi de fibres plastiques recyclées dans les briques de terre crue et peu de recherches
ont été fournies. Cependant selon SIMENSON (2013), les fibres synthétiques modernes, constituées
de matériaux plastiques tels que du polypropylène, ont une résistance à la traction élevée, sont
durables, et peuvent être incorporés dans des matrices de terre crue. Ces renforcements synthétiques
sont compatibles avec la terre et peuvent augmenter la résistance en compression, en flexion et le
cisaillement. Les dimensions du matériau restent stables même après l’essai.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

III. L’ARCHITECTURE DE TERRE

1) Histoire

Il existe de nombreuses références de bâtiments en terre à travers le monde, qui témoignent de l’usage
de la terre dans la construction depuis des temps ancestraux. La subsistance de matériaux de
constructions composés de terre est fort sujette à l’exposition aux intempéries mais on sait qu’une
multitude de civilisations très anciennes ont fait largement usage de la terre sous différentes formes.
Au mésolithique par exemple (10000-5000 av. JC), les peuples de chasseurs-cueilleurs nomades
n’avaient vraisemblablement que des constructions semi-fixes, « des huttes de branchages recouverts
de terre argileuse » (HOUBEN et GUILLAUD, 1989). Les premières traces de construction en terre
remontraient donc à environ 11 millénaires tandis que les plus anciens bâtiments qui nous sont
parvenus datent du début de l’antiquité.

Les origines du bloc de terre comprimé remontent à des milliers d'années où la terre était moulée en
briques séchées au soleil. Cette technique nouvelle qu’on nomme adobe, marque une étape historique
dans l'évolution de l’habitat humain. Grâce à cette invention, une tradition architecturale est née
menant à l’établissement de centres urbains bâtis avec une même matière homogène. En effet, toute
une organisation sociale et économique s’est construite avec la production de matériaux et leur
utilisation pour la construction. Cette industrie de fabrication de matière à construire, nous a libéré
des matériaux basiques et des techniques au potentiel architectural restreint. L’espoir d’une
architecture riche s’est « développé dans les principaux foyers connus de la civilisation : dans les
vallées inférieures du Tigre et de l’Euphrate, le long du Nil, sur les rives de l’Indus et du Huanghe. »
(HOUBEN et GUILLAUD, 1989). Ces régions fertiles furent propices au développement de l’agriculture.
La paille des cultures céréalières mélangée aux terres sableuses et argileuses de ces vallées ont permis
de constituer le premier matériau de construction pour les civilisations sédentarisées : la brique de
terre crue.

Antiquité

Selon l’Auroville Earth Institute, le bâtiment de terre le plus ancien encore debout aujourd’hui daterait
d’environ 3300 ans. Il s’agit du Ramesseum en Egypte construit à Thèbes en face de Louxor, de l’autre
côté du Nil. Actuellement en cours de rénovation, ses voutes en berceau font partie des plus
anciennes. Les briques constituants les voutes et les murs sont de taille différente. Des matières
comme du limon, sable, paille, tessons de céramique et petits galets entrent dans la composition de
ces briques, mortiers et enduits, qui ont permis de traverser les âges. En effet, les ressources de la
vallée du Nil sont plurielles : le Nil apporte le limon argileux et l’eau, les céréales fournissent la paille
et le désert contient le sable. D’autres mastabas funéraires royaux ont été construits en briques
moulées. La technique évolue ensuite vers des construits en briques de terre recouvertes par de la
pierre, matériau plus noble et d’éternité. L’architecture de terre est alors plutôt utilisée pour les
bâtiments civils, de la maison populaire aux cités des grands rois.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Figure 7 : Ruines du Ramasseum, Egypte

En Mésopotamie, des constructions à nombreux étages appelés ziggourats ont été construits. La tour
de Babel, appelée également ziggourat Etemenanki (maison du ciel et de la Terre) a été construite vers
-600 avant JC. Elle s’étale sur une base carrée de 90 mètres de côté et culmine à une altitude
vertigineuse de 90 mètres sur 7 niveaux. Pour monter si haut avec de la terre crue, les babyloniens ont
inventé la technique de la terre armée selon laquelle des roseaux torsadés sont insérés dans les parties
centrales de briques de terre crue perforées. De l’asphalte et du bitume rentrent parfois dans la
composition de ces constructions hors norme. Enfin, l’enceinte extérieure de la tour est protégée par
une enveloppe de brique de terre cuite qui protège la terre crue des intempéries.

Figure 8 : Ziggourat de Babylone, ou tour de Babel (image réelle et virtuelle)

D’autres techniques plus ou moins avancées se développent également en parallèle dans d’autres
régions du monde comme en Extrême-Orient, en Europe ainsi qu’en Amérique.

Moyen-âge

Même si les romains diffusent la technique de cuisson des briques et le blocage, les constructions
rudimentaires faites de long bois fendus et torchis sont couramment employées au moyen-âge. Le
torchis est un mélange de terre et de paille qu’on applique sur une armature de branches. La
construction à pans de bois associée au torchis apparait donc progressivement et se développe avec
l’art de la charpenterie qui permet de bâtir plus haut. Durant cette période, la terre crue est donc
majoritaire, car elle est moins gourmande en énergie que la terre cuite et quatre fois moins onéreuse
que la pierre pour une meilleure isolation.

A partir du XIème siècle, de somptueux édifices ont vu le jour avec l’influence de l’Islam. Le savoir-faire
propre à l’architecture des mosquées a su traverser les siècles pour nous parvenir et a permis de
construire relativement récemment des édifices religieux remarquables, comme la grande mosquée
de Bobo-Dioulasso construite en 1882 au Burkina Faso.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Figure 9 : Mosquée de Bobo-Dioulasso au Burkina Faso (gauche) et Remparts massifs de l’Alhambra à Grenade (droite)

Il faudra attendre le XIIIème siècle pour voir réapparaitre l’emploi de la terre crue massive que ce soit
en bauge, en pisé ou en briques, comme à Grenade en Andalousie, avec les remparts massifs en terre
crue de l’Alhambra, classés patrimoine mondial de l’UNESCO.

La renaissance

Au XVIème siècle, apparaissent les premiers gratte-ciels en briques de terre crue. Le but de ces cités-
états est de densifier l’habitat en bâtissant sur plusieurs niveaux pour former des cités entières en
terre massive, protégées ainsi des assaillants. Pour alléger les immeubles, les murs sont plus épais en
bas qu’en haut et les ouvertures sont plus importantes en haut qu’en bas. Au Yémen, la cité Shibam
compte des ensembles de huit étages jusqu’à 30 mètres, également classés patrimoine mondial de
l’UNESCO.

Figure 10 : Le Manhattan du désert, à Shibam au Yémen

L’ère contemporaine

La construction en terre crue perdure alors jusqu’au milieu du XXème siècle grâce à la simplicité et au
faible cout de ce matériau local. Durant cette période, la technique de compactage fait son apparition
suite à la nécessité d'améliorer la qualité des matériaux et la durabilité des bâtiments voulues par tout
un chacun. La progression récente vers le bloc de terre comprimé (BTC) est une extension logique du
développement de la brique de terre cuite suite à la révolutuion industrielle. En effet, la technique de
compression de la BTC vient directement des industries des tuiles et briques de terre cuite. Après la
deuxième guerre mondiale et plus tard pendant la crise du pétrole, la volonté d'économiser de
l'énergie, cumulée aux problèmes d’apprivoisement en cas de pénurie d’énergie, ont été deux facteurs
catalyseur du développement de la BTC encourageant même l'élargissement de son application
architecturale dans des régions confrontées à des coûts énergétiques élevés.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Cependant, l’usage du béton, acier et verre vient largement concurrencer la construction en terre pour
la rendre minoritaire dans les pays les plus développés. Plus récemment, les matériaux naturels
retrouvent un regain d’intérêt dans la construction, grâce à la prise de conscience environnementale.
La terre crue intéresse à nouveau car elle présente de nombreux avantages que ne présentent pas nos
matériaux de constructions modernes (recyclable, locale, non polluante, saine, naturelle, sans déchets,
réparable, inertie et hygrométrie…)

2) Typologies

Il existe plusieurs possibilités de constructions en terre. On dénombre 12 techniques radicalement


différentes mais il existerait plus d’une centaine de variantes employées en fonction de paramètres
comme le type de terre disponible, l’usage voulu, le climat etc. Toutes ces techniques n’ont pas connu
le même succès et ne sont pas toutes utilisées dans la même mesure (ANGER et FONTAINE, 2009) :

Figure 11 : Schéma différentes utilisations de la terre

Parmi celles-ci, on distingue le pisé, l’adobe et les briques comprimées (BTC) qui sont majoritaires. Au
Burkina Faso, on retrouve principalement l’adobe, les blocs de latérite taillés (BLT) et la BTC.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Dans le monde, le principal type d’architecture en terre crue est la construction sous forme de briques.
Dans une recherche de matériaux de construction à faible coût respectueux de l'environnement, la
brique de terre crue retrouve un gain d’intérêt vis-à-vis de la brique de terre cuite. Parmi les briques
de terre crue, les blocs comprimés présentent des avantages comme la fiabilité, l’uniformité ou la
durabilité. D’autre part, cette technique tend à se démocratiser, rendant l’usage de matériaux locaux
plus courants et pour des bâtiments où l’utilisation de la terre n’est pas forcément prédestinée
(DEBOUCHA et HASHIM, 2010).

La brique de terre comprimée est la version moderne de l’adobe que nos ancêtres ont utilisée depuis
des millénaires. L’invention des presses mécaniques a largement contribué au développement de la
BTC depuis la révolution industrielle, comme François COINTERAUX qui a créé l’une des premières
machines de compression de la terre. La force de compression appliquée est ce qui donne de la
cohérence à la BTC. Il existe plusieurs modes de compression : statique et dynamiques par impact ou
par vibration. Pour les BTC, on fait généralement appel à la méthode statique à l’aide d’une presse
manuelle ou mécanique.

Aujourd’hui, la BTC fait figure de favori en tant matériau de construction fabriqué à partir de terre.
Effectivement, dans certaines conditions, elle peut rivaliser avec les briques cuites ou des blocs de
béton. Parce qu’elle fait intervenir plusieurs secteurs, la BTC est en outre un véritable vecteur de
développement social et durable au niveau local. Mais elle présente également de nombreux
avantages par rapport à d’autres techniques :

- Résistance : performances mécaniques améliorées grâce à l’effort de compression appliqué,


- Flexibilité : la BTC peut être fabriquée selon des procédés très simples (de façon artisanale ou
industrielle, avec un traitement mécanique ou manuel, avec des moyens très sommaires ou
dans de grosses installations, dans des milieux urbains comme ruraux etc.),
- Standardisation : Les dimensions sont standardisées et les exigences de qualités sont élevées,
- Adaptabilité : Utilisée en murs porteurs ou remplissage, en paroi plane, courbe ou voutes, la
BTC est polyvalente,
- Finition : La BTC est propice à une architecture de grande finesse, laissant la matière s’exprimer
à travers sa texture et sa couleur. Elle peut être utilisée pour des projets modestes comme
pour les plus somptueux,
- Ressource locale : Une excellente alternative à l’importation.

La terre sous forme de briques est l’objet d’étude de ce travail. Les autres modes de construction ne
sont donc pas étudiés plus en détails. En outre, parmi les types de construction à base de briques, seule
la technique des blocs de terre comprimée (BTC) sera étudiée pour la stabilisation. Il s’agit de la
méthode qui dispose actuellement du plus grand nombre d’études et des plus grandes perspectives
de développement dans un avenir proche.

3) Visites

Outre l’intérêt architectural, les visites effectuées ont pour but de mieux comprendre les problèmes
techniques liés à l’utilisation de la terre crue en construction. Les bâtiments visités sont donc en BTC
et/ou en BLT. Ces types de bâtiments ne reflètent pas fidèlement le paysage architectural burkinabè,
dont les modes de constructions actuellement majoritaires sont l’adobe et le béton. Ces techniques
n’ont pas fait l’objet de visites étant donné qu’ils sortent du cadre de l’étude de la BTC.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Ecoles de Loumbila (BLT)

Figure 12 : Ecole de Nabdogo

Il s’agit d’une école primaire construite en 2003. Elle est constituée de 6 classes, dont 5 bâties et 1
paillote. Les classes sont toutes alignées en enfilade avec le côté Nord protégé par une coursive. Un
bureau et un local stockage s’inscrivent dans leur prolongement. Les latrines sèches sont à l’extérieur,
ainsi que l’unique point d’eau. Cette école possède une structure poteaux poutres en béton. La brique
ne sert ici qu’au remplissage des murs. Il s’agit de briques de latérite taillés (BLT). Un soubassement
béton rehausse le bâtiment. La toiture en tôle est fixée à des petits profilés métalliques.

Figure 13 : Ecole de Poushin

De même conception que la précédente, elle diffère dans son architecture par sa double coursive et le
nombre de classes. Il est à noter que cette école est aujourd’hui fermée car elle fonctionnait en
mooré/français. Peu à peu, la fréquentation a diminué devant la réticence des familles, préférant des
écoles dont le mooré n’est plus étudié.

Figure 14 : Lycée de Loumbila

Ce lycée multilingue date de 2003 et accueille 501 élèves répartis en 10 classes. La structure est
entièrement en béton : soubassement, les poteaux et dalles sur deux étages. Le remplissage est en
BLT. On notera les armatures en attente pour un futur agrandissement du lycée.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Orphelinat Noomdo

L’orphelinat de Noomdo est l’un des derniers bâtiments construits par Francis Kéré, dont la
construction aura duré 1 an et demi. Le complexe accueille actuellement 53 enfants (capacité de 136
places) de 6 à 15 ans. Les chambres de 6 lits superposés, les sanitaires et l’administration forment un
ensemble cohérent, séparé par plusieurs patios végétalisés, apportant de la fraîcheur. L’eau en surplus
est collectée via des caniveaux qui entourent les bâtiments et contribuent au rafraîchissement.

Figure 15 : Structure vue de l’extérieur et de l’intérieur avec plafond BTC

Les murs sont constitués de BLT d’une épaisseur de 30 cm (2x15cm) sur lesquelles repose le chaînage
en béton. Ensuite une structure métallique complexe, faite de fers d’armatures soudés les uns aux
autres, vient supporter les poutrelles sur lesquelles les tôles sont fixées. Les plafonds sont constitués
de voûtes en petites BTC stabilisées au ciment. Le format de ces briques est réduit (22*11*5cm), ce
qui permet une courbure suffisante afin que le poids du plafond puisse être transmis latéralement
entre les voûtes et le chaînage. 3 échantillons de ces BTC ont été collectés afin d’obtenir les
caractéristiques mécaniques ci-après au laboratoire. Celles-ci s’avèrent très correctes, étant donnée la
faible charge que le plafond doit supporter (poids propre) :

R (Mpa)
Traction 1.68
Compression 9.01

Tableau 5 : Résistances BTC de Noombo

Les baies se prolongent astucieusement du sol jusqu’au chaînage qui sert de linteau. Le percement des
murs sur toute la hauteur permet de simplifier la construction et les descentes de charge. En partie
basse, le seuil est composé d’un bloc béton percé pour créer une aération avec des moustiquaires.

Lycée Schorge

Figure 16 : Lycée Schorge

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Autre bâtiment réalisé récemment par Francis Kéré (2015), le lycée privé Schorge est un établissement
remarquable. Il accueille 542 élèves et est composé de 7 classes, 1 bibliothèque et des bureaux
s’articulant autour d’une cour extérieure aménagée pour des évènements ponctuels et les récréations.
Autour des locaux, les coursives abritent un second espace extérieur protégé par des rangées de troncs
d’eucalyptus en oblique qui créent une première façade et apportent une certaine originalité. Au
niveau constructif, on retrouve les mêmes structures que l’orphelinat avec des murs BLT supportant
un chaînage en béton. Un enchevêtrement complexe de barres d’aciers supporte la toiture en tôle.

L’espace intérieur est séparé de la tôle par un plafond recouvert de plâtre et percé d’ouvertures pour
l’aération. De grandes cheminées en béton ponctuent la monotonie de l’ensemble et apportent de
l’air dans les locaux en redirigeant les vents dominants vers l’intérieur. A l’extérieur, notons que le site
abrite de nombreux végétaux et plantations qui sont utilisés dans la cuisine de l’école le midi. Le
directeur forme les enfants à l’agroécologie 1h par semaine. Au départ seulement 100m² étaient
plantés mais avec le succès, 3000m² sont exploités aujourd’hui.

Opéra village

Construit récemment par Francis Kéré (2013), l’Opéra village de Laongo n’est pas totalement terminé.
Il s’agit d’un complexe de bâtiments en BTC abritant actuellement une école, des studios et une
maternité. Les salles de classes, studios d’enregistrement et les bureaux, sont des espaces de différents
formats espacés les uns des autres pour favoriser les courants d’air entre les bâtiments. De même, les
toitures débordantes permettent de s’affranchir du rayonnement solaire direct.

Au niveau structurel, les murs sont en BTC stabilisées au ciment de dimensions standards 30*14*9cm,
pressées mécaniquement. A priori, la terre utilisée pour les BTC provient du site, qui a été excavé en
son centre. Lors de la visite, 3 échantillons de BTC ont été collectés pour un essai mécanique. :

R (Mpa)
Traction 0.43
Compression 2.34

Tableau 6 : Résistance des BTC récoltées à l’opéra village

Les murs en BTC reprennent la charge du plancher béton ou du chaînage en fonction des morphologies.
Certains locaux se prolongent avec un étage extérieur abritant un balcon agréable, protégé du soleil
mais exposé au vent. De même, les baies se prolongent jusqu’au chaînage qui joue le rôle de linteau.
La partie basse de la baie est isolée mécaniquement du reste de la maçonnerie via des traits de scies.
Cela évite l’apparition de fissures au bas des fenêtres, dues à une mauvaise descente de charges. Le
plancher béton présente en face inférieure une rangée de bois d’eucalyptus servant de coffrage perdu.

La toiture en tôle est supportée par une structure métallique plus sommaire que pour les autres
bâtiments de Kéré. En effet, il s’agit d’un système de treillis et poutrelles en T et I plus classique.
L’ensemble est moins esthétique que la structure en barres d’armatures soudées. D’ailleurs
l’architecte a voulu cacher la structure en positionnant des bois d’eucalyptus entre les briques et la
tôle. Seulement un bâtiment a été achevé, sûrement en raison de contraintes budgétaires.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Figure 17 : Vue extérieure des bâtiments isolés et détail baie

L’opéra village abrite également le centre médical, dont l’architecture tranche avec le style des autres
bâtiments de Francis Kéré. A l’extérieur, on retrouve un soubassement en pierre sur lequel repose une
façade enduite percée de nombreuses baies de bétons parsemées aléatoirement. A l’intérieur, on
retrouve le même système constructif propre à l’architecte avec les mêmes percements de bétons
qu’à l’extérieur. Les nombreuses ouvertures apportent beaucoup de lumière naturelle à l’intérieur des
locaux. Les BTC sont apparentes au niveau des cours intérieures. Elles alternent avec les blocs de béton
mais l’ensemble participe à la reprise des charges du chaînage et du toit. Il s’agit des mêmes BTC que
pour les autres bâtiments isolés du complexe.

La forme extérieure du bâtiment est un rectangle mais à l’intérieur de la muraille, on observe une
alternance d’espaces bâtis et non bâtis. En effet, de nombreux patios apportent lumière, fraîcheur et
végétation. La charpente métallique est cachée par des rangées de bois.

Figure 18 : Centre médical en BTC

Marché de Koudougou

Le marché central de Koudougou a été réalisé entièrement en BTC par l’architecte suisse Séchaud. Il
est composé de deux parties, la première est en excellent état alors que la seconde présente de
nombreux défauts.

La première partie est un grand hall continu qui abrite le cœur du marché, construit entièrement en
BTC, avec des piliers supportant de grandes voûtes sur une dizaine de mètres. L’ensemble forme une
immense toiture recouvrant un espace très aéré et fluide grâce à la faible emprise au sol des piliers.
Les dômes sont parfois percés et sont peints en blanc pour avoir une lumière suffisante sur les étals.
De fins contreforts en BTC ainsi qu’un chaînage en béton stabilisent l’ensemble du bâtiment. La toiture
en tôle est supportée par des poutrelles reposant sur les murs.

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LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Figure 19 : Structure BTC du marché vu de l’extérieur et de l’intérieur

La seconde partie du marché est constituée d’un ensemble de hangars autonomes en BTC regroupés
et alignés par 4 dans une maille rectangulaire. De conception proche, mais de taille plus modeste, ils
présentent pour autant de nombreux défauts. Des petites voûtes répartissent les efforts du plafond
sur les murs latéraux des boutiques. La portée est faible mais le dimensionnement de la structure
semble adapté à l’architecture.

Figure 20 : Deuxième partie du marché avec fissurations sur voutes

On observe de nombreuses fissures sur les faces extérieures des murs, au niveau de certaines voûtes,
aux angles ou encore au milieu du mur. Par ailleurs, des briques perdent une partie de leur intégrité
par endroit en s’effritant sur les faces extérieures. Cela montre que la cohésion de la matière n’est pas
suffisante sur certaines briques, le matériau s’écroulant sous son propre poids. Au vu du
comportement, on peut s’interroger sur la technique de stabilisation employée.

Figure 21 : Défauts récurrents des BTC du marché

Page 34
LA TERRE, UNE MATIERE ET UNE ARCHITECTURE III. L’architecture de terre

Synthèse des visites

Ces visites m’ont permis d’avoir un bon aperçu de bâtiments publics réalisés en terre crue.

Les premiers sont réalisés majoritairement en BLT (appelée aussi pierre au Burkina), matériau
écologique et durable face aux intempéries. Cependant, sa principale faiblesse est son manque
d’homogénéité due à sa nature même. La conséquence est sa faible résistance en compression, lui
obligeant une combinaison inévitable avec le béton. Le béton constitue alors la structure porteuse et
la BLT est relayée à un simple rôle de remplissage. Actuellement, l’absence de certification sur la BLT
du Burkina bloque le développement de bâtiments entièrement construits avec ce matériau naturel,
sans béton.

Par ailleurs, des bâtiments notables en BTC ont été visités. Le recours à la BTC n’est parfois réservé que
pour certaines parties (plafonds) ou ses capacités sont requises. Mais dans des établissements
remarquables, la BTC apparente constitue l’ensemble la matière utilisée pour la structure.
Parfaitement adaptée, elle joue son rôle porteur. Ainsi, c’est la structure qui fait l’architecture.

Cependant, certains problèmes ont pu être identifiés, dès lors que la BTC est mal confectionnée sur
certains chantiers. Il s’agit d’un produit qui requiert une certaine attention lors de la fabrication pour
obtenir un résultat homogène sur toutes les briques.

La terre crue sous forme de BTC apparaît donc comme une solution très rationnelle. Cependant, elle
reste aujourd’hui cantonnée à une utilisation combinée avec le ciment qui n’est pas écologique et peut
s’avérer inadaptée. On conclura qu’il y a un certain intérêt à valoriser la typologie BTC en intervenant
sur la stabilisation du matériau.

Page 35
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

B. CARACTERISATION DES MATERIAUX

La première partie du présent document a mis en évidence la nécessité de stabiliser la terre crue qui
présente certaines faiblesses lorsqu’elle est utilisée telle quelle avec simplement de l’eau. Certains
additifs peuvent être ajoutés à la terre pour renforcer ses caractéristiques. Des matériaux alternatifs
originaires du Burkina sont étudiés dans cette partie en vue de constituer des briques de terre crue
stabilisées. L’objectif est de caractériser les différents stabilisants pour quantifier leur compatibilité et
leur efficacité dès lors qu’on les introduira dans la brique. Ces analyses permettront également de
comprendre le comportement macroscopique des briques formulées dans la dernière partie de ce
mémoire.

I. METHODOLOGIE

Les expérimentations menées traitent d’abord des caractéristiques physiques, minéralogiques,


chimiques et enfin mécaniques des matières étudiées. Les résultats, puis les analyses sont disponibles
dans les parties suivantes.

Les équipements utilisés appartiennent au laboratoires de la faculté des sciences appliquées de


l’Université de Liège.

1) Granulométrie laser
Une première analyse permet de mesurer la répartition granulométrique des matériaux pulvérulents
étudiés. Cette information est essentielle pour avoir une idée la taille des particules, et donc de la
capacité des poudres à réagir avec d’autres matières. Le granulométre laser est une machine ayant
recours à la diffraction et la diffusion d’un faisceau laser par les fines poudres. On peut ainsi obtenir la
taille de particules allant jusqu’au micromètre. La machine utilisée est de marque Mastersizer 2000,
disponible au laboratoire du LMC de l’ULg.

Procédure

Préalablement à toute mesure avec le granulomètre, il faut procéder à une inspection de la cellule
optique et la nettoyer si elle ne s’avère pas totalement propre. Après avoir mis en marche la machine
et l’ordinateur avec le logiciel, on peut dès lors procéder au remplissage de la cuve de façon manuelle
en mettant en marche la pompe. On fait varier la puissance de la pompe et des ultrasons pour nettoyer
le système, conformément aux prescriptions du manuel pour chaque produit testé. On règle ensuite
la pompe sur 2800 et les ultrasons à 50%.

Pour modéliser l’influence des poudres sur les propriétés optiques de la cellule, il existe la théorie de
Fraunhofer, qui prédit l’effet produit par le passage d’un disque d’un diamètre connu à travers un
faisceau lumineux laser. Les particules sont assimilées à des sphères au diamètre correspondant.
Cependant, peu de particules se retrouvent sous une forme sphérique, et nombreuses sont
transparentes. Pour gagner en précision, il existe la théorie de Mie qui est utilisée ici avec le matériel
disponible. Cependant, ce modèle nécessite de connaître des informations plus spécifiques à propos
des échantillons testés : l’indice de réfraction et l’adsorption. Les indices de réfraction sont disponibles

Page 36
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

dans le manuel du Mastersizer 2000 (MALVERN INTRUMENT, 2007) visible en Annexe 5. Ces valeurs
influencent grandement les résultats comme on peut le voir en Annexe 2.

A l’aide du logiciel, on rentre les paramètres de l’échantillon et on lance la procédure qui va évaluer le
fond (background). Une fois prêt, on introduit progressivement la poudre à étudier jusqu’à ce que
l’obscuration du laser se stabilise entre 10 et 20%, domaine d’utilisation recommandé par le
constructeur. Il faut attendre plus ou moins longtemps en raison de la faible solubilité de certaines
matières. Le système est alors prêt pour une première mesure de l’échantillon. On répétera trois fois
la manipulation pour plus de précision en créant une moyenne. Les données peuvent alors être
exportées pour analyse.

Figure 22 : Mastersizer 2000 avec la cellule visible

2) Pycnomètre à gaz
Le pycnomètre à gaz est un dispositif permettant de connaître la masse
volumique réelle d’un matériau. Cette dernière se distingue de la masse
volumique apparente car elle ne prend en compte que le volume
réellement occupé par tous les grains de matière, et non les volumes de
vides (ou de gaz) entre les grains. En outre, la densité est nécessaire pour
mesurer la surface spécifique dans l’essai suivant.

Procédure

Après un étalonnage de la machine, on introduit une certaine masse


(environ 2g) de matériau dont la densité est à mesurer. Un gaz sous
pression est alors introduit dans la chambre contenant la poudre. Le gaz
occupe tous les vides et on ferme le robinet. La pression est ensuite
relâchée et à l’aide de la différence de pression observée, on calcule la
valeur de la densité de la poudre étudiée. Le pycnomètre utilisé est celui
du laboratoire de géosciences (Micromeritics multivolume pycnometer
1305). Figure 23 : Pycnomètre à gaz

Page 37
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

3) Surface spécifique
La surface spécifique est définie comme la surface totale réelle d’une
matière par unité de masse. Elle est généralement exprimée en m²/kg ou
m²/g. C’est une mesure physique importante influençant les propriétés
d’un matériau, particulièrement pour l’adsorption et les réactions de
surface. En effet, la réactivité d’une poudre est fortement corrélée avec la
finesse de ses particules car plus un matériau présente une grande surface
de contact, plus il pourra agir avec d’autres composés. On peut déterminer
la surface spécifique à l’aide d’un perméamètre de Blaine, comme par la
méthode BET (Breunauer, Emmet et Teller).

La méthode Blaine normalisée (NFP 196-6) a été créée pour mesurer la


finesse du ciment, mais convient aussi à d’autres types de poudres. La
perméabilité d’une couche de poudre est calculée via la loi de Poiseuille et
l’expression du débit de Darcy. Le principe est basé sur le fait que le temps
mis par une quantité d’air fixé pour traverser une couche de poudre, est
Figure 24 : perméamètre Blaine fonction de la surface totale de ces poudres (ASTM, 1993).

Procédure

L’utilisation du perméamètre Blaine commence par une étape préalable où l’on cherche le poids exact
de poudre nécessaire à l’expérience. On remplit le cylindre pour obtenir une hauteur de couche de
poudre fixée (au 100ème de millimètre près). Cette phase préliminaire prend un certain temps pour que
la quantité soit exacte pour chaque type de poudre testé.

Dès lors, on place la cellule sur le porte cellule, étanchéifié par de la graisse. Dans le circuit prévu à cet
effet, on aspire un fluide visqueux (dibutyle phtalate) jusqu’au trait. On mesure ensuite le temps mis
par le liquide pour descendre d’une certain hauteur, aspirant donc à travers l’échantillon une quantité
d’air fixée. Les données de l’expérience (masse poudre, hauteur cylindre, temps, température,
pression, humidité…) sont alors encodées dans un tableau donnant les valeurs de surface spécifique.

4) Diffraction des rayons X


La diffraction des rayons X est une méthode d’identification des phases minérales cristallines présentes
dans des échantillons. Elle peut permettre la mise en évidence de phases amorphes et la semi-
quantification des minéraux identifiés.

Procédure

Pour réaliser l’essai, on doit préalablement préparer les échantillons


préalablement séchés, broyés et tamisés. Le matériau sous forme de
poudre est introduit dans un petit réceptacle PVC prévu à cet effet. On
compresse la poudre sans tourner pour éviter une orientation
préférentielle, on enfonce une bague sur la pastille PVC et on préserve
la surface de poudre qui sera utilisée pour l’analyse (MOORE et
REYNOLDS, 1989) Figure 25 : Echantillons de poudres

Ensuite, la pastille est introduite dans la machine où la poudre va recevoir un faisceau de rayons X
monochromatique. Le rayon provient d’une anode métallique et est orienté selon un angle Ɵ. Les
cristaux contenus dans l’échantillon engendrent des diffractions en fonction des distances inter

Page 38
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

planaires propres à chaque minéral. En faisant varier les angles de 2 à 70°2Ɵ pendant 20 minutes, on
obtient un diffractogramme, où le phénomène de diffraction est traduit en pics d’intensité variable en
fonction des angles (WETSHONDO, 2012). Le diffractomètre utilisé est un Bruker D8-Advance avec un
tube à rayons X doté d’une anticathode de Cu et détecteur linéaire LYNXEYE.

Pour repérer les espèces minéralogiques à partir du diffractogramme, on utilise le logiciel EVA 3.2
contenant une base de données d’une multitude de minéraux. Il faut alors rechercher manuellement
la correspondance entre les pics des cristaux dont la présence dans l’échantillon est supposée. Un
exemple est donné en Annexe 3 avec l’identification de la portlandite dans la chaux.

5) Analyse thermique gravimétrique


L’analyse Thermique Gravimétrique (ATG) permet d’identifier les constituants d’un matériau.
L’appareil fait subir aux échantillons un gradient thermique progressif contribuant à la décomposition
de certains minéraux. Les différences de masse en fonction de la température traduisent la présence
d’éléments particuliers dans le matériau.

Procédure
Figure 26 : Dispositif ATG
Les matériaux sont préparés sous forme de poudre broyée et
tamisée. Un échantillon de l’ordre du gramme est prélevé et
placé dans un des 14 réceptacles dont dispose la machine. Le
dispositif est ensuite programmé pour une montée en
température de 5 degrés par minute, ce qui est la vitesse
minimum pour être plus précis. Une pesée toutes les 2 minutes
est effectuée pour mesurer la perte de poids au fur et à
mesure. Les variations de masse peuvent être liées à des
liaisons chimiques ou des départs de constituants volatils (H2O pour les hydroxydes et hydrates et de
CO2 pour les carbonates). L’appareil disponible en Géologie peut monter jusqu’à 1000°C maximum.
L’ordinateur enregistre les données montrant l’évolution de la masse en fonction de la température.

6) Spectrofluorescence X
La Spectrofluorescence X permet de connaître la composition chimique élémentaire de la matière. Les
majeurs s’expriment en oxydes et dénote de la présence de certains éléments du tableau périodique
plus lourds que le fluor (SiO2, TiO2, Al2O3, Fe2O3, MnO, MgO, CaO, Na2O, K2O et P2O5). La machine
appartient au département de Géologie de l’ULg.

Figure 27 : Coulage de la pastille à 900°C (gauche) et dispositif de fluorescence X utilisé (droite

Page 39
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

Procédure

Il existe deux types d’utilisation pour la Spectrofluorescence X, celle des poudres pour les éléments
mineurs (semi-quantification et recherche de traces) et celle des perles pour les éléments majeurs
(quantification). La méthode choisie est celle du dosage en éléments majeurs.

La poudre préalablement préparée (chauffage une nuit à 1000°C, dessiccation, broyage, pesage) est
dissoute avec du lithium méta borate (fondant) et du bromure de lithium (démoulant). Le mélange va
ainsi former un verre au boraté après une fusion à 900°C puis un coulage sous forme d’une pastille à
l’aide de creuset en platine. On n’utilise pas du verre siliceux car la silice du verre perturberait la
mesure pour cet élément dans l’échantillon, alors que le bore et lithium sont deux éléments invisibles
par la machine.

L’échantillon est ensuite inséré dans la machine et soumis à un rayonnement X. L’échantillon


bombardé va alors réémettre un rayonnement propre qui va être analysé. Le traitement informatique
donnera la composition chimique.

7) Conductivité électrique d’une solution de chaux


Le but de l’essai réalisé est d’évaluer activité chimique de la chaux issue de l’industrie de BIG au
Burkina. On la comparera à une chaux classique de référence, achetée dans le commerce et dont la
qualité n’est plus à démontrer. La chaux utilisée comme comparaison est la supercalco 90 de
Carmeuse. Notons que cette chaux hydratée a des caractéristiques granulométriques et chimiques
comparables avec la chaux à évaluer (cf. partie résultats). La fiche technique de la chaux Carmeuse est
fournie en Annexe 1. La réactivité chimique de la chaux sera quantifiée via une mesure de conductivité
qui reflète l’efficacité de son action de stabilisation lorsqu’on l’ajoute à des matériaux de construction.

Procédure

On va mesurer la vitesse de dissolution de l’hydroxyde de calcium en solution saturée dans de l’eau


déminéralisée. On prépare une solution de chaux en plaçant les mêmes quantités de poudres pour les
deux chaux solides dans des quantités d’eau identiques. Pour ce faire, j’ai préparé des solutions
saturées avec 1.5g de chaux dans 100ml d’eau. La solubilité de la chaux étant d’environ 1.65g/L. Une
fois saturées, les solutions sont filtrées via du papier filtre pour retenir les particules solides de chaux.
On obtient une solution saturée sans poudre. On mesure ensuite la conductivité après avoir ajouté
1ml de solution d’hydroxyde de calcium filtré dans des béchers de 200ml d’eau déminéralisée sous
agitation.

Figure 28 : Montage expérimental

Page 40
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

Pour déterminer le temps que met la chaux solide à se dissoudre, on mesure la conductivité électrique
initiale d’une solution d’eau déminéralisée sur un agitateur magnétique. On prend note ensuite des
valeurs du conductimètre en µS/cm. Vu l’évolution très rapide, j’ai utilisé une caméra vidéo pour être
plus précis dans le traitement des données.

8) Neutralisation d’acides par la chaux


Dans la même optique que l’essai précédent, l’expérience suivante vise à qualifier la chaux de BIG vis-
à-vis d’une chaux classique achetée dans le commerce. Le test permet de connaître l’activité chimique
de la chaux via une mesure de pH. On quantifie le temps que met la chaux étudiée pour neutraliser
une solution acide jusqu’à pH=7. On notera l’évolution du pH en fonction du temps, permettant de
classer l’activité chimique des chaux étudiées. Le temps mis est ensuite comparé aux valeurs trouvées
par BECHOUX (1993) qui a proposé cet essai.

Tableau 7 : Mesures réalisées par BECHOUX (1993)

Procédure détaillée

On fera l’expérience avec de l’acide chlorhydrique et puis avec de l’acide sulfurique. On utilise deux
solutions de 100mL d’acide à 0.1N, c’est-à-dire que la normalité est identique bien que l’acide
sulfurique soit un diacide (la molécule peut libérer deux ions H+). On réalise les solutions grâce à des
pipettes jaugées pour plus de précision. Les solutions sont placées dans un bécher avec un agitateur
magnétique. On place alors le pH-mètre dans la solution et on mesure le pH initial. On introduit alors
une certaine quantité de poudre de la première chaux à tester dans le bécher et on surveille le pH tout
en chronométrant le temps mis pour passer du pH initial (autour de 1) à un pH 4. La même chaux est
alors testée avec l’autre acide. De la même façon, la seconde chaux à comparer est également
caractérisée de façon analogue.

La quantité de chaux à introduire dans le bécher a fait l’objet d’expérimentations préalables. En effet,
le but ici n’est pas d’introduire une trop grande quantité de chaux (en excès), ce qui ferait alors passer
le pH extrêmement rapidement jusqu’à la valeur d’une solution saturée de chaux. On cherche en fait
l’exacte quantité de chaux nécessaire à la neutralisation de l’acide pour atteindre un pH neutre. Ne
connaissant pas la pureté de la chaux, il faut faire plusieurs essais pour trouver le bon dosage en chaux.
Le dosage est valable pour les deux acides étant donné qu’ils ont la même normalité. Cependant, les
dosages sont à ajuster entre les différents types de chaux, car elles possèdent des caractéristiques et
des qualité légèrement différentes. Dans notre cas, il a fallu mettre environ 0.445g (chaux BIG) et
0.405g (chaux Carmeuse) de chaux dans les solutions d’acide de 100ml.

Un autre essai à l’acide a été effectué par un Calcimètre pour évaluer le dosage en calcite (cf. page 55).

Page 41
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

9) Activité pouzzolanique
Cet essai vise à classer la pouzzolane selon son degré d’activité à travers des mesures de conductivité
et de pH. Il est aujourd’hui largement admis que l’évolution de conductivité de solutions contenant
des additions de chaux et de pouzzolanes est fortement corrélée avec une activité pouzzolanique qui
a lieu lors de la formation des briques (MCCARTER & TRAN, 1995). Pour quantifier l’activité de la
pouzzolane, on va mesurer son action combinée avec la chaux. Si les réactifs ont réagi et qu’il ne reste
plus de chaux sous forme solide, la conductivité et le pH chutent (cas b et c sur le graphique ci-dessous).
Les ions Ca2+ et OH- dissous ont alors réagi avec des particules de pouzzolane pour former des produits
stables et insolubles.

Figure 29 : Schéma Ph en fonction de la température et du temps

Des essais de LUXAN et al. (1989) ont permis de classer les pouzzolanes en fonction de leur réactivité
avec la chaux. Une procédure analogue mais plus récente et complète est proposée ici, il s’agit de celle
proposée par TASHIMA et al. (2014).

Procédure

On va mesurer l’évolution de plusieurs mélanges avec des rapports de masse pouzzolane/chaux


variables (2 /8, 2.5/7.5, 3/7, 3.5/6.5, 4/6, 4.5/5.5) à des températures différentes (40, 50 et 60°). Les
rapports expriment (respectivement) la quantité massique de chaux relativement à la pouzzolane
sachant que la quantité totale de réactifs solides introduite est toujours constante. Chaque flacon
plastique contient donc au total 2g de poudres dissoutes dans 100 mL d’eau déminéralisée.

Au départ, l’eau déminéralisée seule est introduite dans les récipients fermés puis entreposés dans
l’étuve. Une fois à température, la chaux solide est ajoutée et commence à saturer la solution. Les
suspensions sont alors saturées et des particules solides sont encore visibles à l’œil nu (solubilité de
l’hydroxyde de calcium = 0.165g/100mL à 25 degrés Celsius). Après 15 minutes d’agitation, la
conductivité et le pH initiaux ont été mesurés et on observe des valeurs identiques pour chaque
température testée puisque la solution est saturée. La pouzzolane peut alors être ajoutée en quantité
variable pour chaque dosage et on mesure la conductivité pendant une semaine.

Parallèlement, la conductivité de la pouzzolane ajoutée est également mesurée pour quantifier son
influence sur la mesure. Les valeurs, très faibles par rapport à celle des solutions avec la chaux
(quelques dizaines de µS/cm seulement) ont permis de négliger leur effet sur la conductivité.

Page 42
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

10) Essai de traction


Les fibres et cheveux utilisés ont été testés en traction à l’aide d’une machine de traction-compression
INSTRON 5585. Le but est de calculer leur résistance afin d’avoir une idée de leur potentiel addition
dans des BTC. Les fibres utilisées sont de deux types mais ne sont actuellement pas réutilisées ou
recyclées. D’une part les fibres végétales, extraites du gombo, dont la tige comporte des fibres très
résistantes. D’autre part, des cheveux synthétiques que les femmes africaines utilisent comme rajouts.

Procédure

Avant l’essai de traction, les fibres sont sélectionnées,


nettoyées et séparées. Pour les cheveux, c’est assez simple
car chaque cheveu n’est lié aux autres que par de potentiels
nœuds. Pour les fibres végétales, c’est plus complexe. Il faut
séparer au maximum les fibres afin d’isoler des filaments
unitaires. La manipulation n’est pas aisée car on ne peut pas
savoir lorsque l’on atteint une séparation maximale, en
obtenant un brin unitaire de la plus petite dimension
possible. Après plusieurs essais et techniques différentes, il
semblerait que l’on n’arrive pas à obtenir de filaments plus
fins qu’un certain diamètre minimal, correspondant à une
fibre unitaire séparée du faisceau de fibre initial.

Les diamètres des fibres ont été mesurés avec un pied à


coulisse pour une plus grande précision. Les fibres végétales
mesurent environ 0.05mm tandis que les cheveux 0.06mm.
Cette information est nécessaire pour encoder la machine
afin de déterminer une contrainte de traction. Les tests ont
été réalisés sur plusieurs échantillons, que ce soit sur des
filaments uniques ou sur des mèches de plusieurs filaments.
Des essais à différente échelle permettent de visualiser
l’effet de glissement entre fibres, mais aussi de pallier aux
imprécisions de la mesure, dues à la faible section des
échantillons. Figure 30 : Fibres en traction

La section a été considérée comme étant ronde, étant donné que la machine demande un diamètre
pour son calcul. Pour mesurer le diamètre, les fibres ont été mesurées à plusieurs reprises en les faisant
tourner. Lorsqu’il s’agissait de mèches comprenant un lot de fibres unitaires, une légère torsion a été
appliquée afin de retrouver une section compacte de forme extérieure ronde. La mesure du diamètre
a alors pu être effectuée. Le comptage manuel des fibres a été proscrit dans un souci de simplification.

Les fibres sont coincées entre deux mordaches aux deux extrémités. Des petites plaques en
polyéthylène ont été intercalées pour protéger les fibres, tout en assurant le contact avec les
mordaches métalliques. Les paramètres rentrés dans la machine ont été de 2mm/min pour la vitesse,
avec un espacement initial d’environ 2cm entre les mordaches, pour éviter de tirer sur une longueur
trop grande, réduisant les effets de glissement entre fibres. Une fois les tests terminés, les modules
d’Young sont calculés manuellement.

Page 43
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

11) Essai pull-out


La technique du pull-out est une bonne méthode pour caractériser les interfaces entre des fibres et
une matrice. Il consiste à enchâsser une ou plusieurs fibres dans une matrice en laissant une partie à
l’extérieur pour une traction ultérieure. Il existe d’autres techniques pour étudier l’interface avec les
fibres mais celles-ci ne sont pas utilisables avec des BTC (microgoutte, indentation, fragmentation…).
L’objectif de l’essai est de quantifier l’adhésion des fibres à la matrice faite de terre crue stabilisée
(MUMM & FADER, 95).

Procédure

Pour réaliser le test du pull-out, la première étape consiste à insérer les fibres (végétales et cheveux)
dans une matrice adéquate. La matrice choisie a une constitution analogue aux briques de terre
comprimée réalisées par la suite du travail (cf. partie C). L’idée est de simuler l’adhésion des fibres au
contact des BTC utilisant la terre, la chaux et la pouzzolane étudiées dans ce travail.

Pour ce faire, des éprouvettes cylindriques en terre crue stabilisée ont été confectionnées.
Conformément aux essais effectués dans la dernière partie, la formulation la plus performante a été
utilisée. Ainsi, les éprouvettes sont constituées de la terre de Kamboinsé additionnée de 10 et 3% (en
rapport à la masse de terre) respectivement de chaux et de pouzzolane. Dans la même logique, la
teneur en eau est de 17.4% du mélange sec.

Les fibres ont été préparées (nettoyées, séparées et attachées) de sorte que plusieurs faisceaux de
fibres soient testées. Ainsi, des filaments unitaires, comme des mèches de plusieurs dizaines de fibres
ont été utilisées. Pour noyer les fibres au cœur de l’éprouvette et sur toute sa hauteur, des cercles en
carton ont été découpés. Après avoir perforé les cartons, elles ont été enfilées à l’intérieur des trous.
Les cercles servaient à positionner les filaments, facilitant la mise en œuvre des blocs. Au vu des
grandes dimensions de la presse utilisée, des moules ont été spécialement fabriqués à l’aide de tuyaux
en polyéthylène coupés à bonne longueur, afin que les éprouvettes soient d’une épaisseur de 3cm.

Une fois le dispositif préparé et le mélange de terre crue stabilisée homogénéisé, les moules ont été
remplis. La terre a été répartie manuellement en plusieurs couches tout autour des fibres en veillant
à ce que celles-ci restent tendues. Dès lors, les blocs comprenant les fibres ont pu être compactés via
une presse hydraulique manuelle.

Afin de simuler les caractéristiques mécaniques d’une BTC arrivée au terme de sa cure et prête à être
utilisée sur chantier, j’ai réalisé une cure humide haute température de 24h. Cette technique permet
de simuler une cure de plusieurs mois, moyennant un séjour dans une enceinte climatique à 100%
d’humidité relative et 80°C. Les blocs ont ensuite été séchés pour obtenir une masse constante.
(VENKATARAMA & HUBLI, 2001 ; IZEMMOUREN et al., 2013 ; IZEMMOUREN et al., 2015).

Enfin, les éprouvettes ont pu être testées à l’aide de la même machine que l’essai précédent avec
une mordache protégée tenant les fibres. L’éprouvette est quant à elle posée sur une pièce
métallique spéciale permettant de laisser libre la partie supérieure des fibres, évitant de les bloquer
si elles doivent bouger. L’essai a été mené avec des fibres noyées sur une profondeur d’ancrage de
3cm. On considère la longueur d’interface égale à l’épaisseur de l’éprouvette en terre, étant donné
que la fibre a été tendue lors de la formulation de l’éprouvette. Les essais de traction ont été réalisés
avec une vitesse de 2 à 10 mm/min en fonction du type de fibres. La force exercée et le déplacement
sont mesurés. Le test s’arrête lorsque les fibres cassent ou se déchaussent de la matrice (ce qui n’est
pas arrivé ici). Le dispositif a été capturé via un appareil photo.

Page 44
CARACTERISATION DES MATERIAUX I. Méthodologie

Figure 31 : Préparations fibres, compactage et essai pull-out

12) Observation microscopique


La dernière des expérimentations menées sur les matériaux alternatifs à introduire dans les briques
est l’observation microscopique. Elle a été réalisée au LMC de l’ULg à l’aide d’un microscope
binoculaire Olympus sz-pt pour examiner les fibres. Afin de les observer de manière idéale, il a été
décidé de les placer dans une matrice pour les tenir de façon verticale.

Figure 32 : Résines coulées et poncées observées au microscope Olympus

Procédure

Les fibres ont donc été noyées dans une résine autopolymérisante verte composée d’une poudre et
d’un liquide (méthacrylate de méthyle). Pour le petit volume des moules utilisés, 5g de poudre et 10g
de liquide ont été mélangés. La résine doit être coulée très rapidement en raison de son temps de
durcissement court. Le dispositif devait donc être prêt à l’avance avec un système de maintien pendant
le coulage. Afin que les fibres soient bien orientées et que l’on puisse observer leur section, j’ai utilisé
des pinces à linge sur l’extrémité supérieure, l’autre bout étant coincé au fond du moule. Ainsi, les
éléments étaient tendus et positionnés de façon verticale pendant la prise de la résine.

Par la suite, les moules ont été retirés et la résine polie pour obtenir une surface nette en vue de
l’observation. Des papiers à poncer ont été utilisés avec une taille de grain de plus en plus faible.

Page 45
CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

II. RESULTATS

Les matériaux alternatifs caractérisés ici sont la chaux, les balles de riz calcinées, les fibres végétales et
les cheveux. Ceux-ci sont décrits plus en détails dans la partie C.III.11) (page 85). Ici sont donnés les
résultats de chaque analyse menée au laboratoire. Les résultats sont ensuite discutés de façon globale
pour chaque type de matériaux. Des liens entre les essais sont ensuite formulés pour conclure sur la
caractérisation des différents matériaux alternatifs étudiés.

1) Analyse physique

Granulométrie laser

Figure 33 : Répartition granulométrique des différents matériaux

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

La répartition granulométrique des différentes matériaux alternatifs est affichée sur les graphiques ci-
dessus. Il s’agit d’un paramètre important car elle conditionne la réactivité des poudres étudiées. La
Terre de Kamboinsé donne une granulométrie où la majeure partie des particules est comprise entre
0.4 et 300µm. Le tamisage à 80µm enlève une partie des grains par rapport à la terre tamisée à 1 mm.

La chaux issue de l’usine d’acétylène BIG a été analysée. Les échantillons ont été tamisés à 125µm mais
le broyage était différent selon qu’il était réalisé dans un concasseur à boulets ou dans un broyeur à
billes. Dans les deux cas, le résultat est sensiblement identique au niveau de la répartition
granulométrique. On observe sur la répartition cumulée une courbe continue dont le diamètre médian
d50 vaut 8.2 et 8.5µm. La majeure partie des particules (environ 85%) est inférieure à 125µm. La
présence d’éléments plus grands peut s’expliquer par des phénomènes d’agglomération favorisés par
l’humidité, ou par des maladresses lors du tamisage. On pourra considérer comme identiques les
répartitions granulométriques de ces deux chaux.

Lorsque l’on compare la chaux BIG avec celle de Carmeuse, on observe certaines variations.
L’hydroxyde de calcium vendu par Carmeuse présente une plus grande proportion de particules entre
6 et 400 µm. Cela peut être dû à une agglomération des particules notamment à cause de l’humidité.
A partir de 5µm, les poudres ont une granulométrie similaire.

Enfin, la balle de riz calcinée puis broyée au broyeur à billes présente une belle courbe. L’entièreté de
l’échantillon est composée de particules inférieures à 80 µm. Cependant, quasiment toutes les
particules sont plus grosses que 1µm. On a ici une répartition granulométrique bien plus serrée.

Comme il est d’usage en granulométrie, les résultats en termes de diamètre correspondant à 10 (d10),
50 (d50) et 90% (d90) sont rassemblés ci-après :

(µm) d10 d50 d90


Chaux BIG billes 1.1 8.2 268
Chaux BIG boulets 1.2 8.4 299
Chaux Carmeuse 1.2 11.2 414
Pouzzolane 3.0 15.4 49.4
Terre Kamboinsé 1.8 15.9 54.4

Tableau 8 : Diamètres caractéristiques

Pycnomètre à air

La mesure de la masse volumique donne des valeurs quasiment identiques entre les différentes chaux :

Masse volumique (g/cm3)


Chaux BIG billes 2.3485
Chaux BIG boulets 2.3625
Chaux Carmeuse 2.3830
Pouzzolane 3.0769

Tableau 9 : Masses volumiques

Surface spécifique

Tout comme la granulométrie, la surface spécifique d’un corps et une grandeur physique qui a une
grande incidence sur ses propriétés réactives. Le perméamètre de Blaine m’a permis de trouver les
valeurs de surface spécifique ci-dessous tandis que les mesures ont aussi été déterminées par la
méthode BET :

Page 47
CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

Surface spécifique (m²/g)


Blaine BET
Chaux BIG 0.512 13.588
Chaux Carmeuse 1.420 20
Pouzzolane 1.842 114.642

Tableau 10 : Surfaces spécifiques

On peut observer une grande disparité entre les valeurs trouvées par les deux méthodes. Cependant,
cela est tout à fait normal car il s’agit de deux techniques comparatives tout à fait différentes. La
surface spécifique mesurée par la procédure Blaine ne prend en compte que les volumes des
interstices entre les grains de matière. Avec BET, on mesure également toute la porosité accessible à
l’intérieur des pores du matériau, on trouve donc une valeur bien plus élevée. Toutefois, malgré cette
différence, on note une bonne corrélation entre les deux mesures, où les relations de grandeur sont
conservées. Ainsi, la pouzzolane présente la plus grande surface spécifique et la chaux BIG la plus
petite, quelle que soit la méthode choisie.

2) Analyse minéralogique

Diffraction rayons X

La diffraction des rayons X (DRX) est une analyse minéralogique indiquant la nature des phases
cristallines et amorphes présentes dans les échantillons.

Intéressons-nous tout d’abord à la chaux BIG où l’on s’attend à identifier surtout de la portlandite et
calcite. D’après VASCHALDE, BROMBLET & BÜTTNER (2016) qui ont menés des recherches récentes
sur les différents types de chaux utilisés depuis l’antiquité jusqu’à nos jours, on peut trouver plusieurs
types de minéraux dans les chaux dont voici la liste :

Calcite Quartz Portlandite Aragonite Ettringite Thaumasite Cristobalite Brucite Huntite

Figure 34 : Diffractogramme de la chaux BIG

Page 48
CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

Parmi ces minéraux probables, les phases minérales identifiées correspondant aux principaux pics sont
de la portlandite Ca(OH)2, de la Calcite CaCO3 et de l’aragonite CaCO3 . L’aragonite est une autre forme
de CaCO3 qui se différencie de la calcite, de même formule, par l’arrangement de ses molécules qui
n’est pas rhomboédrique mais ortho-rhomboédrique. On identifie également (Figure 34) du quartz
SiO2, de la kaolinite Al2Si2O5(OH)4, du gypse CaSO4⋅2H2O et de la rapidcreekite Ca2(SO4)(CO3)·4H2O, un
dérivé carbonaté du gypse. Le diffractogramme complètement analysé est affiché ci-après :

L’analyse DRX de la chaux a été poursuivie par une étude semi-quantitative réalisée à l’aide du logiciel
Topas. Il permet de former un diffractogramme théorique en fonction des minéraux identifiés. L’outil
fait varier les différents pourcentages afin de faire correspondre au mieux le diffractogramme
théorique du diffractogramme réel de l’échantillon. Après une série d’itérations, le logiciel trouve une
correspondance de 17%, valeur inférieure aux 20% maximum généralement acceptés.

Figure 35 : Diffractogrammes théorique (rouge) et réel (bleu)

Les courbes ci-dessus montrent le chevauchement des courbes réelle et théorique. On retrouve les
valeurs de proportions calculées suivantes :

Proportions calculées (%)


Portlandite 43,0
Aragonite 20,7
Calcite 15,9
Rapidcreekite 13,3
Kaolinite 4,1
Quartz 2,6
Gypse 0,5
TOTAL 100,0

Tableau 11 : Proportions minéraux chaux BIG calculées via topas

La balle de riz calcinée doit logiquement ne contenir que du quartz SiO2 mais on s’attend également à
ce que son diffractogramme révèle des phases amorphes. C’est ce que l’on observe ici où les pics
identifiés correspondent au Quartz (voir Annexe 4 pour l’identification du Quartz). Le diffractogramme
de la balle de riz calcinée dénote la présence de phases amorphes à travers l’identification d’un net
décollement des pics entre 3 et 6 d (TCHAKOUTE KOUAMO, 2013). Sur le même diffractogramme, j’ai
affiché également un verre amorphe analysé via DRX, le phénomène dôme est également constaté.

Page 49
CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

Figure 36 : Balle de riz calcinée (noir) et verre amorphe (orange)

La calcination de la balle de riz a fait l’enjeu d’une série d’essais à des températures et des temps
différents. L’objectif est d’identifier quelle pouzzolane aurait une phase amorphe plus importante en
fonction du mode de calcination qu’elle a subi. Sur le graphique suivant, j’ai rassemblé tous les
échantillons testés :

Figure 37 : Balles de riz calcinées à des T différentes

On observe une série de dômes qui s’étendent tous de la même façon. Cependant les décollements
sont plus ou moins importants en fonction des échantillons. L’intensité du dôme traduit une plus
grande présence de phases amorphes (TCHAKOUTE KOUAMO, 2013). La pouzzolane étudiée dans les
autres analyses est un mélange de tous les échantillons analysés ici. Elle est tracée en noir sur le
graphique et se place au milieu des autres courbes, ce qui est logique étant donné qu’elle en est la
moyenne. Les autres échantillons peuvent être classés comme suit en fonction de l’importance de leur
phase amorphe :

R3 < R4 < mélange < R1 < R8 <= R2

Analyse thermique gravimétrique

L’analyse thermique gravimétrique permet de valider quelques informations quant à la présence de


certains constituants particuliers dans les échantillons. La courbe rouge indique le poids tandis que la

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

bleue, qui représente la variation massique, met en évidence les évolutions importantes. Des minéraux
peuvent être identifiés avec leurs variations brusques de masse à partir d’un registre contenant les
températures caractéristiques du changement de masse (FÖLDVARI, 2011).

La terre de Kamboinsé présente une seule perte massique notable autour de 530°C. Selon MILLOGO
(2008), cette perte de masse s’expliquerait par la transformation de la Kaolinite en méta kaolinite,
provoquant une perte d’eau :

Figure 38 : Terre de Kamboinsé

La chaux BIG montre deux pertes de masse importantes faisant passer l’échantillon de 0.85 à 0.6g. Une
première variation se situe autour de 500°C, démontrant la présence de portlandite. La deuxième
perte de masse autour de 800°C marque la décarbonatation de la calcite.

Figure 39 : Chaux BIG

La pouzzolane ne présente quasiment pas de variation de masse, elle passe de 1.2 à 1.1g. Ce constat
est tout à fait normal car la pouzzolane est constituée de balles de riz calcinées, donc elle a déjà subi
un traitement thermique. On observe une légère diminution autour des 100°C, due à la perte d’une
petite quantité d’eau qui s’est stockée dans les grains. Si l’on regarde les balles de riz non calcinées, on
observe une diminution de masse de l’ordre de 60%, surtout due à la combustion de matière
organique :

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

Figure 40 : Balles de riz calcinées (haut) et pas encore calcinées (bas)

La fibre végétale donne des résultats analogues à la balle de riz non calcinée. La perte massique est
quasiment totale, et due à la décomposition de l’hémicellulose de 200 à 260°C, de la cellulose de 240
à 300°C, puis de la lignine après 280°C (FATEH, 2011) :

Figure 41 : Fibres végétales (haut) et Cheveux synthétiques (bas)

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

Les cheveux admettent également une perte de masse quasiment totale. Une forte diminution de la
masse autour de 260°C est perceptible et montre la présence d’une espèce majoritaire dans la
composition de la fibre de cheveux. Selon FORREST (2002), cette perte de masse pourrait être la
signature du PVC (polychlorure de vinyle) qui à une température de 260°C, se retrouve décomposé à
50% :

Tableau 12 : Température de décomposition de plastiques courants (FORREST, 2002)

3) Analyses chimiques

Spectrofluorescence X

La Spectrofluorescence X nous indique les compositions chimiques des échantillons suivantes :

SiO2 TiO2 Al2O3 Fe2O3 Mn0 MgO CaO Na2O K2O P2O5 LOI Somme
Terre Kamboinsé 50 0,9 24 13 0,1 0,1 0,2 0 0,3 0,1 10 99,4
Chaux BIG billes 4,8 0 1,7 0,7 0 0,3 67 0 0,1 0 27 102
Chaux BIG boulets 7,3 0 1,7 0,4 0 0,2 66 0 0 0 27 103
Chaux Carmeuse 0,1 0 0,1 0,1 0 0,4 72 0 0 0 28 100
Balles de riz calcinées 91 0 1,6 0,6 0,2 0,2 0,8 0 1,8 0,6 2,9 99,5

Tableau 13 : Composition chimique par Spectrofluorescence X

La Terre de Kamboinsé comprend majoritairement des oxydes de silice SiO2, d’aluminium Al2O3 ainsi
que de fer Fe2O3. La somme Fe2O3+ Al2O3 fait 36.65%. Le rapport molaire SiO2/Al2O3 vaut 3.61 et le
rapport massique vaut 2.13. La perte au feu est importante et sûrement due à la matière organique
présente dans les échantillons de terre.

Les 3 chaux étudiées présentent des compositions chimiques très similaires. On note très peu de
différence entre les deux chaux BIG en fonction de leur type de broyage, ce qui est logique. On
remarque que la chaux Carmeuse possède une pureté en CaO légèrement supérieure aux chaux BIG.
La présence de calcite (CaCO3) détectée via DRX explique la forte valeur de la perte au feu pour les
chaux (AYECHE, 2013). En effet, lorsque l’on compare la composition donnée par la fiche technique de
la chaux Carmeuse (Annexe 1) où il n’y a pas eu de chauffage, on observe une pureté en CaO de l’ordre
de 95%. Le passage à haute température nécessaire à la Spectrofluorescence X explique la diminution
de la valeur de CaO au profit de la perte au feu.

Les balles de riz offrent une très grande proportion de SiO2 autour de 91%. Elles comprennent aussi
des traces de K2O dont la présence pourrait s’expliquer par les pesticides et fertilisants utilisés sur les
cultures de riz (MEHTA, 1994). Notons que la perte au feu est faible car le matériau a déjà subi une
calcination. On retrouve des valeurs similaires au niveau de la composition de balles de riz dans des
études récentes :

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

Tableau 14 : Composition chimique de balles de riz calcinées (AMITKUMAR et al., 2015)

Conductivité électrique d’une solution de chaux

Une solution de chaux saturée est introduite dans l’eau déminéralisée et l’évolution de la conductivité
électrique est reprise ci-après :

30

25

20

15

BIG
10
Carmeuse
5

0
0 5 10 15 20 25

Figure 42 : Evolution de la conductivité (µS/cm) en fonction du temps(s)

On observe un comportement similaire entre les deux courbes. La conductivité électrique initiale est
identique étant donné qu’il s’agit de la même eau déminéralisée au départ. Ensuite, la conductivité
pour la chaux Carmeuse augmente plus rapidement que celle de BIG. La valeur finale atteinte par la
solution est plus grande pour la chaux commerciale. Or on sait que la conductivité électrique finale est
corrélée très étroitement avec la pureté de la chaux (AYECHE, 2013) :
C solution saturée
C finale (µS /cm) OT 90 (s)
(mS /cm)
Chaux BIG 7.29 26.9 7.5
Chaux Carmeuse 8.55 20.2 6.5
Tableau 15 : Résultats essai de conductivité chaux

On retrouve également un temps de réaction OT90 plus long pour l’hydroxyde de calcium BIG. Les
résultats sont analogues aux travaux menés par AYECHE (2013) sur une chaux recyclée comparée à
une chaux commerciale. La chaux issue de la production d’acétylène présente un OT90 de 8.7s contre
7s pour la chaux commerciale.

La solution saturée avant filtration présente également une conductivité plus élevée pour Carmeuse.
On retrouve aussi un temps de réaction OT90 plus long pour l’hydroxyde de calcium BIG. Les résultats
sont analogues aux travaux menés par AYECHE (2013) sur une chaux recyclée comparée à une chaux

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

commerciale. La chaux issue de la production d’acétylène présente un OT90 de 8.7s contre 7s pour la
chaux commerciale.

Neutralisation d’acides par la chaux

Les résultats de l’essai aux acides pour caractériser l’activité chimique sont les suivants :

Quantité de poudre
HCL 0.1 N H2SO4 0.1 N
ajoutée
Chaux BIG 8’ 24’’ 10’ 03’’ 0.445g

Chaux Carmeuse 6’ 09 ‘’ 8’ 32’’ 0.405g

Tableau 16 : Résultats temps de neutralisation d’acides

Les durées indiquées représentent le temps mis pour les chaux à réagir avec les acides, faisant passer
le pH initial d’environ 1 à pH 4. L’action de la chaux continuera jusqu’à un pH final de 7.

On remarque tout d’abord que la chaux BIG met plus de temps à neutraliser les acides, qu’il s’agisse
du sulfurique, comme du chlorhydrique. Cela traduit une activité chimique plus faible lorsque l’on
compare celle de la chaux BIG avec celle de Carmeuse. Par ailleurs, les valeurs trouvées par BECHOUX
(1993) correspondent relativement bien aux résultats obtenus ici même si on note que la chaux de
Carmeuse parait plus active vis-à-vis des deux acides. Celle de BIG semble moins active pour l’acide
chlorhydrique mais plus active pour le sulfurique. Enfin, lorsque l’on s’intéresse à la masse d’hydroxyde
de calcium nécessaire à la neutralisation, on observe que la chaux BIG nécessite environ 10% de plus
de matière. Ce constat dénote sûrement que la poudre BIG est moins pure que celle de Carmeuse.

Calcimètre

Outre le test concernant l’activité chimique des chaux, la teneur en CaCO3 a été calculée. Le Calcimètre
de Bernard permet de mesurer le volume de CO2 dégagé par la réaction d’une chaux avec un acide :

CaCO3 + 2 HCl ---> CaCl2 + H2O + CO2

Cette information permet de déterminer la teneur en carbonate de calcium dans l’échantillon mesuré.
Lorsque l’acide est en excès, une mole de CaCO3 (de masse molaire 100g/mol) produit une mole de
CO2 (de masse molaire 44g/mol). Les valeurs trouvées sont donc les suivants :

% de CaCO3

Chaux BIG 25.4 %

Chaux Carmeuse 34.8 %

Tableau 17 : Dosage par Calcimètre de Bernard

Activité pouzzolanique

Les valeurs de conductivité sont exprimées en perte de conductivité pour plus de clarté :
C0 − Ct
PC (%) = 100 ∗ C0

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

100,0
90,0
80,0
70,0
60,0
50,0
40,0
30,0
PC 40° (t) PC 60° (t)
20,0
10,0
0,0
0 2 4 6 8 0 2 4 6 8

Figure 43 : Graphiques de perte de conductivité

Au terme des 7 jours d’expérience, on regarde quels mélanges ont atteint une perte de conductivité
d’au moins 30%. La grille ci-après proposée par TASHIMA et al. (2010) est alors remplie.

Zone Réactivité
1 Faible
2 Moyenne
3 Forte

Figure 44 : Classification proposée par TASHIMA

En l’occurrence, on voit nettement sur le graphique que les tous mélanges testés atteignent 30% de
pertes de conductivité dès le deuxième jour. Les matériaux valident le critère à 7 jours et même
avant quels que soit les dosages et les températures. En accord avec cette classification, on peut
donc considérer qu’il s’agit d’une pouzzolane à haut pouvoir réactif. On ajoutera également que la
chaux est fortement compatible avec cette pouzzolane, ce qui n’était pas gagné avec une chaux qui
constitue un déchet industriel. On aurait pu faire l’expérience avec une autre chaux d’une plus
grande pureté, mais on a pris ici le cas le plus défavorable et l’essai s’est tout de même montré très
concluant. Les résultats complets sont disponibles en Annexe 9.

4) Analyse mécanique

Essai de traction

Les essais de traction sur les fibres ont été menés sur différents nombres de filaments. Tout d’abord
des filaments unitaires de fibres végétales et de cheveux ont subi une traction (résultats en Annexe 7).

Pour les fibres végétales unitaires, on observe une certaine divergence entre les résultats. Il est admis
(POILANE et al., 2009) que les fibres végétales admettent de fortes dispersions dont les causes sont
intrinsèques (espèce, croissance, position de la fibre…) ou extrinsèques (due à l’environnement ou aux
conditions d’essais). Néanmoins, le comportement reste tout de même semblable pour les différentes

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

fibres testées. Les brins présentent une déformation et cassent rapidement autour de 0.5 à 2 N. Les
diamètres varient entre 0.02 et 0.05mm. Concernant les cheveux unitaires testés, les ruptures
s’effectuent autour de 0.5 N avec des diamètres de 0.06 mm environ.

Au vu de la faible section considérée, les valeurs de contrainte maximale et de module d’Young


trouvées paraissent élevées. La précision de ces chiffres est à relativiser car la cellule utilisée pour la
mesure est une 10kN, et s’avère très peu sensible aux valeurs de l’ordre du N. Pour pallier au manque
de précision, des essais ont alors été menés sur des mèches de fibres comprenant plusieurs brins. De
même, le diamètre a été utilisé pour identifier les essais plutôt que le comptage des filaments un à un,
plus compliqué. Pour mesurer ce diamètre, les fibres ont été légèrement torsadées sans forcer afin
d’obtenir une section globalement ronde. Les graphiques des essais sont les suivants :

d=0.33mm
σmax=323MPa
Ɛmax=3.3%
d=0.27mm
σmax=398MPa
Ɛmax=2.2%

d=0.26mm
σmax=332MPa
Ɛmax=3.0%

Figure 45 : Diagramme charge déformation de plusieurs fibres végétales

d=0.34mm
σmax=364MPa d=0.32mm
Ɛmax=52% σmax=425MPa
d=0.35mm
Ɛmax=52%
σmax=354MPa
Ɛmax=57%

Figure 46 : Diagramme charge-déplacement de mèches de cheveux

Les fibres montrent clairement un comportement fragile, avec une rupture brutale. Après avoir
commencé à mettre en tension les fibres, on observe une évolution quasiment linéaire de la courbe
charge-déformation. On reste dans le domaine élastique avec un module d’Young d’environ 54GPa, ce
qui est plutôt performant. Mais la précision de cette valeur est faible au vu des faibles variations
mesurées. Il n’y a pas de comportement plastique car il y a un écrêtage dès qu’une rupture de brins se
produit. C’est alors d’autres filaments qui reprennent la charge jusqu’à ce qu’ils cassent à leur tour,

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fibres entières. Les échantillons admettent une contrainte à la rupture
de l’ordre de 350 MPa en moyenne. Les diamètres considérés ici sont en moyenne de 0.29mm.

Sur le graphique concernant les cheveux, on observe un comportement totalement différent par
rapport aux fibres végétales. Il s’agit d’un matériau synthétique très ductile, qui se déforme dans une
plus large mesure. Au départ, on observe un comportement élastique lorsque les cheveux sont mis à
l’épreuve d’une faible traction. Mais lorsque l’on augmente la charge, le comportement devient
clairement plastique avec un déplacement bien plus grand. Dans le cas des fibres végétales, la traverse
ne s’était pas déplacée de l’ordre d’1 mm alors qu’ici le déplacement est dix fois plus grand aux
alentours de 10 mm. Les échantillons présentent une contrainte maximale de l’ordre de 400 MPa, avec
des diamètres d’environ 0.33 mm. Le module d’Young calculé est de l’ordre de 12GPa, ce qui est
environ 4 fois plus faible que pour les fibres végétales.

Essai pull-out

Le but de l’essai est de caractériser la réaction des fibres vis-à-vis de la matrice lorsque l’on applique
un effort de traction sur l’ensemble. Quatre possibilités ont été identifiées pour l’issue du test :

- Les fibres cassent en traction avant l’interface, ce qui traduit une forte adhésion (liaison
chimique ou mécanique) avec la matrice,
- Les fibres cassent dans la mordache, ce qui reflète un problème de fixation fragilisant les fibres
- Les fibres glissent les unes contre les autres, montrant que seules les fibres placées sur les
extérieures de la mèche accrochent la matrice,
- Les fibres se déchaussent (partiellement ou totalement) et on observe un glissement le long
de la matrice.

Pour un test pull-out, on s’attend à une courbe de ce genre (NGUYEN, 2016) :

Figure 47 : courbe typique essai pull-out

La charge maximale est atteinte au moment où toute l’interface se décolle, juste avant que la valeur
de force ne chute brutalement. On observe alors une dernière phase de frottement de la partie encore
enchâssée. On peut alors mesurer la contrainte de décollement inter-faciale mais aussi la contrainte
relative au frottement matrice/filament. Dans ce cas, l’effet de Poison devra être pris en compte car il
participe au décollement de la fibre en induisant une contrainte radiale.

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

d=0.5mm
σmax=37MPa
d=0.12mm Ɛmax=5.2%
σmax=431MPa
Ɛmax=3.9% d=0.38mm
d=0.15mm σmax=60MPa
σmax=228MPa Ɛmax=6.8%
Ɛmax=3.3%
d=0.19mm
σmax=22MPa
Ɛmax=2.1%

Figure 48 : Courbe charge-déformation pull-out de fibres végétales

Pour les fibres végétales, le comportement ressemble à l’essai de traction antérieur avec un
comportement quasi-linéaire suivi d’une cascade de ruptures fragiles de plusieurs fibres élémentaires.
Le début de l’expérience est marqué par une plus longue phase d’évolution lente de la charge. Celle-
ci provient à la fois de la mise en tension progressive des filaments mais aussi de l’augmentation
progressive de la surface de contact qui contribue réellement à la transmission de la force, au fur et à
mesure que la fibre se tend sur toute sa longueur (KAFLOU, 2006). Mis à part cela, on observe donc un
comportement très analogue à l’essai en traction qui corrobore l’observation visuelle montrant une
rupture de la fibre à l’extérieur de la matrice. On n’observe ici pas de phénomène de déchaussement
des brins par rapport à la brique en terre crue. La force exercée n’est pas suffisante pour déloger les
filaments enchâssés. Rappelons que la longueur d’ancrage des fibres à l’intérieur des éprouvettes est
de 3cm, longueur qui a été retenue pour la fabrication ultérieure de BTC avec fibres. Toutefois, notons
un léger décalage avec l’essai en traction où les valeurs de charge maximales (et de contrainte à la
rupture) étaient environ 4 fois plus élevées pour un diamètre équivalent. Cette différence de résistance
en traction s’explique probablement par le traitement thermique humide. En effet, les fibres de l’essai
pull out ont sûrement été fragilisées par l’humidité ou la chaleur lors de la cure des éprouvettes.

d=0.44mm
σmax=182MPa
Ɛmax=32% d=0.35mm
σmax=179MPa
Ɛmax=26%

d=0.26mm
σmax=195MPa
Ɛmax=22%

Figure 49 : Courbe charge-déformation pull-out de mèches de cheveux

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CARACTERISATION DES MATERIAUX II. Résultats

De façon analogue, on observe une forte similitude entre le test pull-out et l’essai en traction pour les
cheveux. Contrairement aux fibres végétales, les valeurs de charge maximale et de contrainte à la
rupture ne diffèrent pas beaucoup. Composés d’une matière synthétique, les cheveux ne seraient donc
pas sensibles aux conditions de cure. Pour la plus résistante mèche, une charge maximale d’environ
25N a pu être transmise avant que les cheveux ne se brisent un à un hors de la matrice. Les cheveux
ne se sont donc pas déchaussés de la brique. Un papier adhésif collé sur les cheveux à la base de la
brique a mis en évidence un certain allongement des mèches, qui se retrouve également sur le
graphique (environ 10% d’élongation). Ce faible allongement traduirait un certain décollement de la
fibre dans sa partie la plus proche du bord de l’éprouvette. Ce décollement se limiterait à une certaine
profondeur et serait due au gradient de force qui est plus important dans la partie la plus externe.

Microscope

L’observation microscopique a permis de caractériser les dimensions des fibres utilisées. Tout d’abord,
les fibres noyées dans la résine ont été observées et photographiées.

Figure 50 : Photo des fibres noyées dans la résine (cheveux à gauche et gombo à droite)

Les sections des cheveux semblent toutes globalement circulaires et de même dimension ce qui parait
cohérent pour des fibres fabriquées industriellement. Les fibres végétales sont quant à elles plus
irrégulières. On retrouve des formes et des dimensions différentes avec des brins unitaires parfois
encore assemblés entre eux. La section s’avère le plus souvent de forme carrée ou rectangle car les
brins proviennent de la tige qui est initialement composée de bandes fibreuses larges et fines.

Figure 51 : Photo mesure fibres sur papier millimétré

Par ailleurs, les fibres ont été placées sur du papier millimétré afin d’en observer leur dimension (photo
ci-dessus). On mesure un diamètre de l’ordre de 0.07 mm pour les cheveux et 0.05 mm pour les fibres
unitaires. Ces mesures sont cohérentes avec les dimensions trouvées à l’aide du pied à coulisse.

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CARACTERISATION DES MATERIAUX III. Synthèse

III. SYNTHESE

1) Terre

Bien qu’elle n’ait pas fait l’objet d’une attention particulière dans ce travail plutôt centré sur les
matériaux alternatifs, la terre du Burkina est d’une grande importance car il s’agit du premier
constituant des BTC. Des travaux en cours menés par Romain WERS et Philbert NSHIMIYIMANA
permettront de fournir plusieurs éléments quant au matériau brut se trouvant sur le sol Burkinabé.

En attendant ces résultats, quelques conclusions rapides peuvent être données sur ce matériau. Au vu
de la courbe granulométrique, la terre utilisée pour les BTC provenant de la carrière de Kamboinsé et
tamisée à 5mm, ne présente pas de pénurie granulométrique. On pourra donc l’utiliser telle qu’elle
sans avoir recours à une action sur sa texture. Selon sa courbe granulométrique, sa forte proportion
en fines (environ 60% de silts et 20% d’argile) la destine à une stabilisation à la chaux plutôt qu’au
ciment.

Au niveau de sa composition chimique, la terre de Kamboinsé comprend majoritairement des oxydes


de silice SiO2, d’aluminium Al2O3 ainsi que de fer Fe2O3. La somme Fe2O3+ Al2O3 fait 36.65%, ce qui
classe cette terre de latéritique selon ALEXANDER et CADY (1962). Le rapport molaire SiO2/ Al2O3 vaut
3.61 et le rapport massique vaut 2.13. Or pour qu’une terre réagisse convenablement avec un élément
alcalin comme la chaux, la fraction SiO2/ Al2O3 doit être inférieure à 4 (TCHAKOUTE KOUAMO, 2013),
ce qui est le cas de la terre de Kamboinsé. La perte au feu est sûrement due à la matière organique
présente. Cependant elle reste assez faible (de 10%), en tout cas inférieure à la valeur de 20%
conseillée par HOUBEN et GUILLAUD (2006) pour une stabilisation à la chaux. Les mêmes auteurs
indiquent que la prédominance de Kaolinite au niveau minéralogique confère à cette terre des
propriétés mécaniques plutôt dans la moyenne, notamment avec une bonne cohésion.

2) Chaux

La chaux est le premier matériau alternatif étudié en vue de son incorporation dans les BTC. Il peut
être utilisé seul ou en complément de la pouzzolane ou d’autres stabilisants comme le ciment.
Cependant, les expérimentations menées sur la chaux ont pour but d’étudier le pouvoir stabilisant
potentiel de ce matériau.

Si l’on commence par la caractérisation physique, la chaux étudiée présente des caractéristiques
satisfaisantes. Sa répartition granulométrique montre une grande finesse de ces particules, meilleure
que la chaux commercialisée. Le diamètre d50 est le plus petit des matériaux étudiés tout comme pour
de d10. C’est-à-dire qu’une bonne proportion de ces particules sont de petite taille. Or on sait que la
finesse des particules influence fortement la réactivité des poudres. La surface spécifique s’avère plus
faible en comparaison avec les autres matériaux examinés. Néanmoins, la valeur reste relativement
proche de la chaux commerciale. Les analyses physiques montrent peu de différence entre les deux
modes de broyage. Cependant, le mode de préparation évalué ici (concassage dans les machines du
LMC de 2IE), est amené à évoluer et ne constitue pas une caractéristique intrinsèque et propre à la
chaux sortant de l’usine BIG. Toutefois, ce mode de préparation est classique et il est probable qu’après
développement d’une production à grande échelle, les caractéristiques physiques soient équivalentes

Page 61
CARACTERISATION DES MATERIAUX III. Synthèse

voire supérieures. Quoi qu’il en soit, la chaux utilisée pour la caractérisation et la confection des BTC
dans la partie suivante a subi le même traitement.

Du point de vue minéralogique, la DRX montre la présence dans la chaux BIG de calcite et d’aragonite
CaCO3, de portlandite Ca(OH)2, constituants essentiels de l’hydroxyde de calcium. On retrouve aussi la
présence de quartz SiO2, de rapidcreekite Ca2(SO4)(CO3)·4H2O, de kaolinite Al2Si2O5(OH)4 et de gypse
CaSO4⋅2H2O. Les pics correspondant à CaCO3 et Ca(OH)2 paraissent les plus importants, et le calcul des
proportions le donne comme constituant majoritaire. L’analyse thermique gravimétrique affiche deux
principales variations de masse autour de 530 et 800°C, correspondant respectivement à la portlandite
et à l’ensemble calcite et aragonite. On n’observe pas d’autre variation massique significative
correspondant aux autres minéraux susmentionnés. Cela confirme que les constituants
minéralogiques principaux sont la portlandite, la calcite et l’aragonite. Leur proportion peut être
mesurée via ATG (SAILLIO, 2012 ; FÖLDVARI, 2013). Le calcul de la chaux donne 53.6% de Ca(OH)2 et
30.9% pour CaCO3. Or la portlandite Ca(OH)2 constitue le réactif essentiel de l’hydroxyde de calcium.
Le dosage par Calcimètre donne une teneur en calcite de 25.4%, ce qui est proche des autres essais et
confirme les résultats. On dénote aussi l’absence de magnésite ou dolomite. On classera la chaux BIG
comme étant de la chaux aérienne calcique grasse (VASCHALDE, BROMBLET & BÜTTNER, 2016).

La composition chimique de la chaux éteinte BIG est tout à fait proche de la chaux commerciale
Carmeuse et traduit un produit largement constitué de d’hydroxyde de calcium. Si l’on compare la
chaux BIG avec une chaux résiduaire provenant d’une autre industrie d’acétylène, on trouve des
caractéristiques tout à fait semblables d’un point de vue de la composition et de l’activité chimique :

Tableau 18 : Comparaison avec la chaux recyclée de la fabrique acétylène ENGI (AYECHE, 2013)

L’activité chimique de la chaux BIG montre des performances légèrement en deçà mais restant
comparables à la chaux commerciale, que ce soit à travers l’essai de conductivité électrique comme
pour la neutralisation d’acide. Possédant les mêmes configurations physiques et compositions
chimiques, on pourra conclure que la légère différence provient sûrement de la teneur en chaux libre.
Elle est un paramètre important qui traduit la quantité d’oxyde de calcium disponible pour réagir
chimiquement. On l’oppose à la teneur totale d’oxyde de calcium, comprenant aussi les silicates,
carbonates, aluminates et ferrites.

Synthèse

A l’issue de ces tests, la chaux éteinte BIG présente a priori un fort pouvoir potentiel de stabilisation.
Son composant majoritaire est la portlandite Ca(OH)2, qui est l’élément réactif principal. La chaux BIG
présente une pureté légèrement moindre qu’une chaux achetée dans le commerce et qu’a masse égale
introduite dans les briques, son efficacité sera légèrement plus faible. Néanmoins, il s’agit d’un résidu
industriel qui n’est actuellement pas utilisé. Dès lors que l’on considère ce produit comme un déchet
que l’on cherche à valoriser, on voit les choses autrement. Ainsi, on peut considérer que pour une
même résistance en compression, on doit augmenter légèrement la quantité de chaux par rapport à
une chaux achetée. Cela n’est pas un problème puisqu’elle sera alors recyclée et ne constituera plus
un déchet.

Page 62
CARACTERISATION DES MATERIAUX III. Synthèse

D’autre part, la chaux BIG présente une certaine facilité d’utilisation par rapport aux autres matériaux
alternatifs qu’il faut transformer de façon plus intense. Lorsqu’il sort de l’usine, l’hydroxyde de calcium
est plus ou moins sec après étendage. En fonction de l’humidité résiduelle, il faudra réaliser une
dessiccation avant d’opérer un broyage pour pouvoir l’utiliser en tant que stabilisant pour les briques.

Perspectives

L’évaluation de la réactivité de la chaux avec la pouzzolane a été opérée grâce à l’essai d’activité
pouzzolanique. Toutefois, des essais sur un mélange terre + chaux pourraient être menés moyennant
plus de quantité de matériau. Il existe des essais réalisables sur de très longues périodes en utilisant la
conductivité électrique comme indicateur (AL-MUKHTAR et al., 2010).

Quoi qu’il en soit, des essais vont être menés avec la terre du Burkina pour former des BTC. L’évaluation
de la capacité de stabilisation dans les BTC sera donc étudiée dans la suite de ce travail.

3) Balles de riz

La pouzzolane issue des balles de riz calcinées est un autre type de stabilisant fort intéressant pour la
terre crue. Elle vient en complément de la chaux renforçant l’effet stabilisant grâce à la réaction
pouzzolanique. Notons qu’elle peut également venir en substitution d’une partie de la chaux.

Figure 52 : Photographie d’une pouzzolane très poreuse et amorphe obtenue par MEB (ROSARIO MADRID et al., 2012)

Les caractéristiques physiques montrent un matériau à la granulométrie plutôt fine et très serrée.
Toutes les particules sont contenues dans l’intervalle 1-100µm. Bien que le d90 soit faible, le d50 et le
d10 sont élevés du fait que quasiment aucune particule n’est plus fine que 1µm. Encore une fois, cette
granulométrie provient du type de broyage réalisé dans les conditions du laboratoire. On évalue donc
les spécifiés physiques de la balle de riz qui sera utilisée dans les BTC, même si celle-ci sera différente
si le processus venait à se développer hors de la recherche. La surface spécifique des balles de riz
calcinées est très élevée, autour de 114.6 m²/g selon l’essai BET (cf. porosité sur photo ci-dessus). C’est
encore plus vrai en comparaison avec d’autres pouzzolanes comme des scories volcaniques
camerounaise 2.3 et 15.7 m²/g (TCHAKOUTE, 2013) ou des cendres volantes de papeterie 0.41 et 0.87
m²/g (SEGUI, 2011). Cependant, il ne s’agit pas du même type de pouzzolane et il faut savoir que la
technique BET prend en compte toute la porosité accessible à l’intérieur même des grains. Les surfaces

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CARACTERISATION DES MATERIAUX III. Synthèse

en question peuvent donc être bien plus grandes. La morphologie des particules de balle de riz calcinée
s’avère donc être très propice à la réaction avec d’autres composés.

Du coté minéralogique, on ne retrouve pratiquement que du quartz d’après la DRX. Mais ce qui nous
intéresse est surtout la phase amorphe car c’est elle qui est responsable la pouzzolanicité. La phase
cristalline ne présente pas d’intérêt, seule la phase vitreuse est réactive (ANH-TUAN BUI et al., 2011 ;
SEGUI, 2011). La présence de l’amorphicité a été mise en évidence grâce au décollement des pics de
la DRX. Les balles de riz calcinées à différentes températures présentent des dômes plus ou moins
grands, reflétant l’importance de la phase vitreuse. Un classement des balles de riz calcinées a été fait
et peut être comparé aux taux amorphes mesurés par réaction avec l’acide fluorhydrique pour chaque
mode de calcination. Le type de calcination à 600° pendant 6h par refroidissement rapide semble le
meilleur.

Mesure taux
Classement relatif
Calcination Refroidissement amorphe
(DRX)
(acide fluo)
R1 2h à 600° lent fermé 3 40.71%
R2 4.5h à 550° lent fermé 2 37.50%
R3 4h à 400° lent fermé 6 49.2%
R4 4h à 400° rapide ouvert 5 21.37%
R8 6h à 600° rapide ouvert 1 45.19%
Mélange moyenne 4 moyenne

Tableau 19: Synthèse de l’amorphicité en fonction de la calcination

Enfin le volet chimique montre une forte concentration en SiO2de 90.76% suivi de K2O pour 1.78% et
enfin Al2O3 à 1.58%. En accord avec l’ASTM C618, la balle de riz peut être rangée dans la classe N au
niveau chimique, qui est la plus exigeante. La somme (SiO2 + Al2O3 + Fe2O3) = 92.98% est bien supérieure
au 70% exigés par cette classe. L’essai d’activité pouzzolanique atteste d’une forte pouzzolanicité. En
2 jours, quasiment toutes les conductivités ont atteint leur valeur finale, ce qui est remarquable. En
outre, le test montre que la chaux BIG s’avère être également un élément très réactif car le résultat
est la contribution des deux réactifs pour former des produits stables et insolubles.

Synthèse

Selon ces résultats, la pouzzolane formée par une calcination de balles de riz de la région de Bagré
présente un fort pouvoir pouzzolanique. Sa préparation depuis son extraction jusqu’à son
incorporation dans les briques joue un rôle important, que ce soit au niveau du broyage, ou de la
calcination dans un four. Ses propriétés en sont affectées. La pouzzolane étudiée est le mélange de
plusieurs échantillons. Avec les moyens disponibles au laboratoire, il s’avère que la pouzzolane
confectionnée est un matériau de choix pour la stabilisation. Son incorporation dans les BTC sera
étudiée avec de la chaux par la suite.

La ressource est relativement importante et située dans le centre du Burkina. Néanmoins les
enveloppes de grains de riz nécessitent un traitement en deux étapes. Après les avoir calcinées autour
de 500°C, les balles doivent être finement broyées jusqu’à atteindre une finesse satisfaisante. Il s’agit
de phases à ne pas négliger car elles sont plus importantes que pour la chaux. L’effet stabilisant des
pouzzolanes doit être assez élevé pour compenser ce coût de préparation plus important.

Perspectives

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CARACTERISATION DES MATERIAUX III. Synthèse

Dans une perspective de production à grande échelle, d’autres tests pourraient être menés sur
différentes techniques plus complètes de calcination afin d’optimiser cette étape. Les différents
résidus après calcination pourraient faire l’objet de mesure de taux amorphe (mesure avec corindon)
et d’activité pouzzolanique pour compléter ces données.

4) Fibres végétales

Les fibres végétales de gombo étudiées ici sont une alternative intéressante en tant que matériau
naturel pour renforcer les briques. Leur résistance en traction est tout à fait remarquable et
comparable à d’autres fibres naturelles performantes. Les résultats trouvés sont comparés avec les
expérimentations menées avec d’autres fibres :

Diamètre Contrainte maximale Module d’Young


VERRE
- 2000 à 2400 MPa 72 GPa
(GUILLON, 1995)
CHANVRE
(BOURMAUD & BALEY, - 788 MPa 44 GPa
2009)
LIN
0.0225 mm 663 MPa 65.4 GPa
(POILANE et al., 2009)
Fibre végétale étudiée
0.03 à 0.05 mm 300 à 1000 MPa 135 GPa
Unitaire
Fibre végétale étudiée
0.26 à 0.33 mm 300 à 400 MPa 53.8 GPa
Mèche

Tableau 20 : Comparaison des résultats en traction

Le test pull-out réalisé s’assimile à une rupture en traction d’un faisceau de fibres. En effet, en réponse
à un effort de traction, l’interface et la fibre sont toutes deux sollicitées (couplage série). Si
déchaussement il y a, il est le fruit de deux contributions : la charge de traction appliquée à la fibre et
l’effort de cisaillement à l’interface. Etant donné l’absence de déchaussement, on peut considérer que
la résistance en cisaillement est plus forte que la résistance en traction. Cela montre une bonne
compatibilité entre la fibre étudiée et la matrice choisie, c’est-à-dire de la terre crue stabilisée à la
chaux et aux balles de riz calcinées. Cependant on ignore si la force d’adhésion est due à des liaisons
chimiques, ou à des phénomènes mécaniques et dans quelles proportions. L’important est que la fibre
adhère suffisamment à la matrice pour pouvoir transmettre le maximum d’effort à travers sa section.
Pour approfondir les résultats, d’autres essais pull-out pourraient être réalisés avec des profondeurs
d’ancrages différentes et sur des briques sans cure humide à haute température.

Synthèse

La fibre végétale possède les deux caractéristiques essentielles pour être un matériau fibreux
renforçant les briques : une forte résistance en traction couplée à une bonne compatibilité avec la
matrice. Vu le potentiel de la fibre végétale de gombo, elle sera donc étudiée plus en détails dans la
troisième partie. Des BTC seront formulées avec celle-ci en divers proportions. Reste à déterminer si
les propriétés macroscopiques seront améliorées grâce aux fibres.

Perspectives

En intégrant massivement des fibres dans les briques, de nouvelles problématiques voient le jour.

Page 65
CARACTERISATION DES MATERIAUX III. Synthèse

Les étapes de transformation (rouissage, teillage, peignage…) pour l’application particulière de fibres
dans des BTC doivent être caractérisées.

Avec les matériaux naturels comme le gombo, on peut s’interroger sur la durabilité des fibres dans le
temps. Une évaluation à long terme des performances des fibres en tant que renforts dans les briques
serait utile. Pour protéger les fibres ou pour augmenter encore leur compatibilité avec la terre, il serait
opportun d’envisager l’incorporation d’agents, comme un additif de liage faisant le lien entre matrice
et fibre. Un traitement de surface des fibres est également envisageable pour améliorer l’adhésion
mécanique des fibres.

5) Cheveux

Comme pour les fibres végétales, les cheveux présentent de bonnes performances. Bien qu’ils aient
un comportement différent (ductile ou fragile), les deux types de fibres présentent des caractéristiques
similaires au niveau de la contrainte maximale de rupture.

Diamètre Contrainte maximale Module d’Young


Cheveu étudié
0.06 mm 200 MPa 5 GPa
Unitaire
Cheveux étudiés
0.32 – 0.35 mm 350 à 400 MPa 17 GPa
Mèche

Tableau 21 : Comparaison des résultats en traction

Les essais pull-out ont mis en évidence une rupture des cheveux en dehors de l’éprouvette traduisant
une bonne compatibilité de la matrice. L’adhésion est suffisante pour l’effort de résistance en traction.

La matière des cheveux semble être principalement du PVC selon l’ATG. Un essai de spectroscopie
infrarouge a été réalisé sur les mèches (cf. Annexe 10) et semble également confirmer cette hypothèse.

Synthèse

Les cheveux synthétiques présentent des qualités adaptées à leur incorporation en tant que fibres
dans des briques de terre crue stabilisée. Etant déjà séparées en filaments unitaires, leur utilisation
s’avère plus simple que pour les fibres végétales. Autre point de divergence, le comportement
plastique des cheveux apportera sûrement une différence sur les propriétés macroscopiques des
briques. Des BTC seront donc réalisées avec les cheveux dans la dernière partie de ce travail.

Perspectives

On peut se demander quelle est la durabilité de ce type de déchets incorporé dans les briques. La
durabilité au sens de la durée de vie : est-ce que le cheveu est sensible aux conditions climatiques
comme les UV ?

Néanmoins, après quelques utilisations par les femmes africaines, les cheveux synthétiques
constituent actuellement un déchet. Une incorporation dans les BTC offre des perspectives de
recyclage intéressantes.

Les analyses semblent indiquer que les cheveux synthétiques sont fabriqués en PVC. Des investigations
supplémentaires devront être menées pour confirmer cette hypothèse.

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE I. Réalisation de BTC

C. LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE

Dans cette partie, la terre crue est abordée non plus à une échelle microscopique mais à une échelle
macroscopique, celle de la brique. On considérera donc les caractéristiques de Briques de Terre
Comprimée (BTC). Les détails constructifs comme le mortier et ou les enduits ne sont pas compris dans
ce travail qui traite du matériau terre lui-même et ses interactions avec les stabilisants.

I. REALISATION DE BTC

La réalisation de BTC s’est déroulée au Burkina Faso afin de tester différentes formulations. L’idée de
cette opération était de démontrer l’utilité des matériaux stabilisants alternatifs, et l’adéquation avec
la terre disponible au Burkina Faso. Dans un second but, ces essais ont été menés pour déterminer
approximativement les dosages idéaux pour chaque stabilisant ajouté. La performance principalement
étudiée a été la résistance en compression. Le niveau des caractéristiques minimales à atteindre est
d’environ 4 MPa, qui sont les normes minimales pour les BTC (CDE, 1998).

Au Burkina Faso, le campus de 2IE est doté d’un laboratoire de recherche sur les matériaux de
construction (LEMC). Il dispose de nombreux équipements et matériels permettant la réalisation de
BTC ainsi que les essais. Afin d’étudier au mieux les BTC, de nombreuses formulations différentes ont
été effectuées. Ces différents tests de compositions nécessitent l’emploi de grandes quantités de
matériaux, dont la terre qui en est le constituant principal. Cependant, l’envoi de terre vers la Belgique
était limité. Le but était donc de réaliser puis de compresser un maximum de briques de composition
différente au Burkina, là où le matériau était disponible.

Durant le séjour au Burkina, le planning était chargé. Outre la fabrication de BTC, et les essais sur les
briques, d’autres tâches étaient programme : la préparation de matériaux, relevés en carrière, essais
sur les matériaux, visites d’entreprises et de bâtiments en terre etc. La priorité était de réaliser les BTC
au plus vite pour pouvoir exploiter les résultats des essais rapidement. Cependant, avant de pouvoir
constituer les BTC pour les compresser, il a fallu préparer les matériaux qui n’étaient pas utilisables à
l’état brut. En effet, il s’agit de ressources naturelles ou recyclées qu’il faut conditionner afin que leur
utilisation dans des BTC et leur interaction à l’intérieur de la brique avec les autres éléments soit
optimale.

1) Préparation de matériaux

Les matériaux alternatifs disponibles au Burkina et étudiés dans le cadre de ce TFE ont subi un
traitement particulier avant d’être introduits dans les briques. Il s’agit d’un processus à l’échelle du
laboratoire, qui serait différent si la production de BTC était lancée à un niveau plus important.

Commençons tout d’abord par la terre, qui est le constituant de base majoritaire des briques. La terre
utilisée est celle de la carrière de Kamboinsé, située à proximité du site de 2IE. Notons que toutes les
BTC formulées à Ouagadougou sont constituées de la même terre afin de limiter le nombre d’essais et
de comparer uniquement l’influence des matériaux alternatifs indépendamment du type de terre
utilisé. Cette terre a été stockée au soleil puis tamisée en ne gardant que le passant de 5 mm.

Page 67
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE I. Réalisation de BTC

Figure 53 : Chaux séchée, broyée puis tamisée

La chaux, deuxième composant des BTC fabriquées, est issue de l’industrie de l’acétylène du fabricant
BIG (cf. page 85). A la sortie de l’usine, on obtient une boue très humide qui est entreposée dehors
après les bassins de séparation de l’acétylène. Une fois la matière brute récupérée, elle a été étalée au
soleil quelques jours afin de la sécher. Certains morceaux sont encore gros et nécessitent d’être brisés
à l’aide d’une pelle. Afin de finir le séchage, on entrepose la chaux 24h à l’étuve pour que le maximum
d’eau soit parti. Une fois bien séchée, on l’introduit dans le concasseur qui va effectuer de nombreux
tours pour la concasser en fins grains par l’intermédiaire de boulets de plomb. Une fois la chaux réduite
en poudre, elle est passée au tamis de 125 micromètres, pour ne garder que la fraction granulaire la
plus fine, et donc la plus réactive. Toutes ces opérations prennent un certain temps au vu des quantités
nécessaires (plus de 100kg de chaux tamisée) et du matériel disponible au laboratoire.

Figure 54 : Balles de riz calcinées

Ensuite, viennent les balles de riz. A l’état brut, leurs propriétés pouzzolaniques ne se manifestent pas
et leur calcination est donc nécessaire. Pour ce faire, on introduit 1kg de balle de riz dans un four
programmable. Des tests ont été réalisés préalablement pour identifier le profil de température idéal.
Sur ce four, la montée en température est donc programmée à 300° pendant 1h, puis 400° en 30min.
La température de 400° est alors maintenue pendant 4h. Au terme de la calcination, la chaleur et
l’oxygène ont transformé la balle en cendres. Le poids obtenu est d’environ 200g sur les 1000g initiaux.
En périphérie et en dessous du bac, on observe des particules noires brûlées à trop forte température
et/ou en absence d’oxygène. Fort de ce constat, un nouveau mode de cuisson a été imaginé à l’aide
d’un tamis positionné à mi-hauteur du four, sur les rebords du bac en terre cuite. Ainsi, les balles de
riz d’en dessous ont également accès à l’oxygène. Il est préférable d’entreposer les enveloppes de
céréales en forme de pyramide dans le tamis, pour réduire le contact avec les bords métalliques du
tamis (forte effusivité thermique). En utilisant cette technique, le résultat est bien meilleur avec une
proportion moindre de cendres noires. Une fois ces cendres extraites du four, on les passe au
concasseur à billes en céramique pour réduire leur granulométrie et ainsi augmenter leur réactivité.
La poudre obtenue passe entièrement au tamis de 80 µm. La production atteint 200g par jour environ,
ce qui est faible mais peut largement être amélioré (taille réduite du four).

Page 68
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE I. Réalisation de BTC

A la différence de la chaux et des balles de riz, l’introduction de fibres dans les BTC nécessite non pas
une granulométrie fine mais une bonne séparation des fibres et une longueur de fibres précise.

Figure 55 : Cheveux récoltés, démêlés et coupés

Les cheveux synthétiques ont été préparés en premier car ils avaient l’avantage d’être déjà
naturellement séparés, à l’exception de certaines tresses et nattes. La technique retenue consiste
premièrement à retirer les déchets divers présents dans les cheveux. Effectivement, ces faux-cheveux
proviennent directement de la rue où ils ont été ramassés par terre. Notons que cette étape pourrait
être évitée avec une collecte plus propre directement auprès des coiffeurs dans le cas où le recyclage
de cheveux dans les briques serait jugé intéressant. Ensuite, les cheveux sont assemblés en tresse
grossière d’environ deux centimètres de diamètre, puis étirés pour obtenir un maximum de fibres
parallèles. Dès lors, on peut couper les cheveux alignés à intervalles réguliers pour obtenir des fibres
de même longueur. La longueur de taille a fait l’objet de plusieurs essais préliminaires dans des
premières briques. L’idée de départ était de tester plusieurs longueurs de cheveux pour un dosage
identique, afin d’évaluer l’influence de la dimension des fibres. Cependant, des tests préliminaires ont
montré qu’une bonne homogénéisation des cheveux était impossible au-delà d’une taille d’1 cm,
longueur retenue pour les formulations suivantes. Trop longs, les cheveux s’agglomèrent en touffes et
ne se mélangent pas au reste des matériaux, ce qui donne des résultats médiocres. Les recherches
bibliographiques coïncident avec nos expérimentations, sur une longueur de l’ordre du centimètre
pour des fibres plastiques (JIANG et al., 2010 ; KUMAR et al., 2011).

Figure 56 : fibres récoltées, séparées, et coupées

Les fibres végétales sont issues de tiges de gombo. Une fois coupées, elles sont récoltées, enroulées
et stockées dans de grands sacs laissant passer l’air. Ainsi, elles vont doucement sécher et passer d’une
texture souple (couleur verte) à une texture plus dure (couleur brune-grise). Des tests ont été effectués
pour évaluer laquelle des deux fibres était la plus facile à exploiter. De même, nous avons tenté de
tremper à la fois les fibres jeunes et les fibres séchées dans l’eau pour voir si elles étaient plus
facilement exploitables. Différentes durées de trempe ont été opérées afin de faire varier l’état de
pourrissement mais les résultats n’étaient pas meilleurs. Le problème réside dans la séparation
parfaite des fibres, les unes par rapport aux autres, mais aussi dans la possibilité de coupe à une
longueur donnée contrôlée. Pour satisfaire ces deux conditions, il s’avère que la fibre séchée
naturellement est plus facile à utiliser. Il suffit d’en former des liasses d’une dizaine de tiges et de les
frotter assez fortement sur le rebord d’un support rigide anguleux comme le rebord d’une table par
exemple. En appliquant une tension aux fibres tout en les frottant avec une légère pression contre la
table, on voit les fibres se décoller les uns des autres. Plusieurs allers-retours sont nécessaires en

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE I. Réalisation de BTC

changeant la prise à chaque fois. Elles cassent par moment mais l’opération se déroule assez bien, et
a l’avantage d’être simple et rapide. Une fois les fibres séparées sur toute la longueur des tiges, il suffit
de reformer une tresse compacte et de la couper à la distance voulue. Tout comme pour les cheveux,
la longueur de coupe intervient dans le comportement de la BTC, mais aussi dans le malaxage. Là aussi,
plusieurs tests ont été exécutés et la littérature scientifique indique des fibres naturelles de 1 à 5cm
de longueur (BOCK-HYENG et al. 2016 ; MOSTAFA & UDDIN 2015). Nous avons donc choisi ici une
longueur de 3 cm. On observe alors moins de touffes de fibres que dans le cas des cheveux pour une
même longueur. Cela s’explique sûrement par la moindre adhérence des fibres végétales entre elles
ou encore l’électricité statique provoquée par la friction des cheveux en plastique.

2) Formulation

Au vu des difficultés de préparation de matériaux mentionnées ci-dessus, on comprend que les


formulations ont été réalisées au fur et à mesure de l’avancement des quantités préparées. Dès que
les matériaux étaient prêts, nous commencions les formulations.

Pour évaluer la quantité nécessaire pour fabriquer une brique, nous avons réalisé des tests avec la
presse manuelle à disposition. Celle-ci possède plusieurs moules. Nous avons utilisé celui qui permet
de former deux demi-briques, d’environ 7 à 8 kg. La masse totale des briques est variable car elle
dépend de la quantité de matière introduite directement dans le moule. De par sa conception, la
presse possède une capacité de compression dépendant de la quantité introduite. Plus on met de
matériau, plus l’effort nécessaire à la compression sera important, et meilleur sera le compactage. Au
terme de nos essais, nous avons retenu une masse totale de matériaux de 7 kg, donc deux demi-
briques de 3.5 kg.

Le matériau de base des BTC est la terre crue. Cependant, elle n’est pas utilisable telle qu’elle. Il faut
lui ajouter de l’eau, qui est l’élément essentiel permettant d’offrir la mobilité nécessaire pour un bon
réarrangement des particules à l’intérieur de la brique. En effet, lorsque celle-ci est comprimée dans
son moule, la pression infligée chasse l’air et force les plus fines particules à combler les vides entre
les plus grosses. Pour caractériser cette faculté, on mesure la teneur en eau optimale (TEO) qui est
fonction du compactage et de la terre utilisée. Afin de déterminer la TEO, on réalise l’essai Proctor
décrit au paragraphe suivant. La TEO trouvée est 17.4 % massique de matériaux secs.

Ensuite, l’élément suivant ajouté au mélange est la chaux. Les dosages en chaux pour ces premiers
tests ont été centrés autour de la valeur médiane de 10%. En effet, selon la littérature scientifique, la
quantité de chaux optimum se trouve généralement dans ces environs (MILLOGO 2008, IZEMMOUREN
2013). Ainsi, les dosages suivants ont été réalisés :

L0P0 L5P0 L8P0 L10P0 L12P0 L15P0 L20P0


Teneur en chaux
0% 5% 8% 10% 12% 15% 20%
(% massique de terre)

Tableau 22 : Formulations avec chaux

La balle de riz, une fois calcinée possède des propriétés pouzzolaniques en présence de chaux. Ce
stabilisant a donc été ajouté à notre chaux recyclée pour mesurer l’efficacité de leur interaction. Pour
faciliter les expérimentations, la teneur en chaux a été fixée à 10% massique de terre, valeur de
référence citée dans le paragraphe précédent. Selon les articles scientifiques consultés, la teneur en
pouzzolane optimale se trouve autour de 30% massique de terre (IZEMMOUREN et al., 2015). Ces

Page 70
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE I. Réalisation de BTC

formulations préliminaires visant à identifier grossièrement les pourcentages, nous avons opté pour
couvrir un intervalle de valeur assez large. Voici les 4 formulations avec des balles de riz :

L10P10 L10P20 L10P30 L10P40


Teneur en chaux
10% 10% 10% 10%
(% massique de terre)
Teneur en balles de riz
10% 20% 30% 40%
(% massique de chaux)
Teneur en balles de riz
1% 2% 3% 4%
(% massique de terre)

Tableau 23 : Formulations avec chaux et balles de riz à 10%

D’autres formulations du même type ont été effectuées mais avec une technique différente de
substitution et un taux de chaux-pouzzolane constant de 15%. Les formulations sont les suivantes :

L15P10 L15P20 L15P30 L15P40


Teneur en chaux + pouzzolane
15% 15% 15% 15%
(% massique de terre)
Teneur en balles de riz
10% 20% 30% 40%
(% massique de chaux)
Teneur en balles de riz
1.36% 2.50% 3.45% 4.28%
(% massique de terre)

Tableau 24 : Formulations avec chaux et balles de riz à 15%

Les fibres végétales ont été introduites en quantité variable dans les briques. Selon les recherches
menées dans la littérature scientifique à ce sujet, des essais ont été réalisés dans un dosage entre 0%
et 1% massique de matériaux secs. Selon, les sources un optimum se trouve aux alentours de 0.25%
(GALAN-MARIN et al. 2010), 0.3% (JIANG et al. 2010), 0.4% (DONKOR & OBONYO 2015), ou encore
moins de 0.8% du poids de matériaux secs (MILLOGO et al., 2015) :

Figure 57 : Résistance mécanique moyenne en fonction du dosage en fibres (DONKOR & OBONYO 2015)

Le dosage retenu est de 0.4% comme valeur médiane en adéquation avec le graphique ci-dessus.
Cependant, un dernier dosage, plus grand, à 1.2% a été ajouté avec les fibres restantes. La longueur
des fibres est également un paramètre important. En accord avec MILLOGO (2015), les fibres ont été
coupées à une longueur de 3 cm. Les cheveux ont-eux aussi suivi le même type de formulation.

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE I. Réalisation de BTC

Cependant, au moment du malaxage, la longueur de 3cm provoquait de nombreux nœuds, formant


des boules de cheveux. Pour éviter ce phénomène, la longueur retenue a été de 1cm.

FIBRES VEGETALES L10V0.2 L10V0.4 L10V0.6 L10V1.2


CHEVEUX L10H0.2 L10H0.4 L10H0.6 L10H1.2
Teneur en chaux
10% 10% 10% 10%
(% massique de terre)
Teneur en fibres
0.2% 0.4% 0.6% 1.2%
(% massique de terre°

Tableau 25 : Formulation avec chaux et fibres

Ainsi, les formulations sont effectuées à partir des essais réalisés et de la littérature consultée.

3) Compactage et stockage

Une fois la conception des formulations terminée, il faut rassembler les matériaux et les malaxer. Pour
cela, une bétonnière a été utilisée. Le malaxage de matériaux secs a duré deux minutes, suivis de cinq
autres minutes une fois l’eau introduite. A l’issue de ces sept minutes, le mélange n’est pas encore
homogène. De nombreuses boules de matériaux renferment surtout l’argile, l’eau et les matériaux
alternatifs, tandis que les plus gros grains de la terre se retrouvent en dehors de la matrice. Il faut alors
recourir à un malaxage manuel complet afin de briser les mottes d’argile humides et brasser au mieux
l’ensemble. Au bout d’une dizaine de minutes, le mélange est devenu relativement homogène.

On peut alors peser deux fois 3.5 kg de mélange que l’on introduit en plusieurs couches dans les moules
de la presse manuelle Terstaram. Chaque couche est tassée à la main, pour réussir à tout faire rentrer
dans les moules. Ensuite, le couvercle est renfermé et on presse sur les leviers pour comprimer la terre
crue. On peut alors extraire les deux demi-briques achevées. Le graissage antérieur du moule permet
de lubrifier les parois, ce qui facilite le démoulage.

Figure 58 : Presse manuelle Terstaram et stockage

Les BTC ainsi formées sont stockées minutieusement en rang et étiquetées. Un bâche étanche vient
alors les recouvrir pour éviter au maximum la déshydratation trop rapide. Le contour de la bâche est
donc recouvert d’objets lourds pour éviter que l’humidité ne s’échappe. Certaines BTC ont été stockées
en atmosphère humide à 65°C pendant 24 heures. Ce mode de cure humide à haute température
permet de simuler une cure classique de plusieurs mois (VENKATARAMA & HUBLI, 2001 ;
IZEMMOUREN et al., 2013 ; IZEMMOUREN et al., 2015).

Page 72
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

II. ESSAIS SUR BTC

D’un point de vue logistique, les essais menés sur les briques ont dû être limités en nombre au vu des
quantités de matériaux mis en jeux pour réaliser davantage de BTC.

Figure 59 : Dispositifs expérimentaux pour essais mécaniques et thermiques

1) Essai Proctor

L’essai Proctor, du nom de son inventeur américain, est une analyse normalisée permettant de trouver
la teneur en eau optimale (TEO) pour un mélange de matériaux secs donné. Il est le premier essai
réalisé avant d’avoir constitué les BTC. Il réside sur le principe de lubrification du mélange favorisant
le réarrangement des grains. En effet, pour un effort de compactage donné, il existe une TEO qui
permet aux particules de se déplacer suffisamment pour atteindre une densité maximale.

Procédure

L’opération consiste en un compactage de plusieurs échantillons de matériaux dont le dosage en eau


varie de façon croissante (6%, 8%, 10%, 12 %, 14%...). Pour les premiers tests, le poids du mélange
après compactage augmente avec l’augmentation du pourcentage d’eau. Cela traduit une hausse de
la densité de l’échantillon compacté, due à un accroissement de la mobilité des grains avec l’ajout
d’eau. Cependant, à partir d’un certain dosage en eau, on observe que la densité de l’échantillon
compacté diminue. A ce moment-là, il y a de l’eau en excès qui n’intervient plus dans le réarrangement
granulaire ce qui contribue à diminuer la masse volumique de l’échantillon (l’eau a une densité plus
faible que celle du matériau). On dit que la TEO est dépassée. On pourra tracer la courbe représentant
la masse volumique en fonction de la teneur en eau à l’aide des mesures réalisées. La TEO correspond
au point dont la densité est maximale.

Pour chaque dosage en eau, mesuré en % massique de matériaux secs, le mélange humide est introduit
dans le moule Proctor en une première couche. L’effort de compactage est assuré par une dame
normalisée, dont la masse et la hauteur de chute sont fixées. Le nombre de coups donnés ainsi que le
nombre de couches est également calibré. Une fois le compactage réalisé, chaque échantillon est arasé
à la hauteur du moule puis pesé afin d’obtenir la masse volumique. Les matériaux stockés n’étant
jamais totalement secs, une partie de l’échantillon est prélevée et mise à l’étuve pour mesurer la
teneur en eau réelle du mélange.

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

Figure 60 : Teneur en eau optimale pour Kamboinsé

Ce test est mené pour une certaine force de compactage résultant des caractéristiques de la dame.
L’énergie reçue par le mélange influence fortement la TEO trouvée. C’est pourquoi il existe deux types :
l’essai Proctor normal et le modifié. Ce dernier a été choisi car il induit un effort plus important
correspondant mieux aux résistances mécaniques exigées pour les briques (WETSHONDO, 2012).

Nous avons également songé à la possibilité de déterminer la TEO directement via la presse manuelle
utilisée pour les briques que nous fabriquons. Cette technique alternative aurait été possible mais elle
nécessitait trop de matériaux et de temps dont nous ne disposions pas. Cependant, elle s’avère être
une meilleure option dans une étude à plus grande échelle car elle donne la TEO exacte correspondant
à la presse utilisée.

Résultats

Les essais Proctor ont été menés pour divers mélanges. Un premier essai a été réalisé pour trouver la
TEO de la terre utilisée pour l’ensemble des BTC réalisées au Burkina Faso (terre de Kamboinsé tamisée
à 5 mm). D’autres essais ont été réalisés sur différents mélanges de terre et de chaux en diverses
quantités. Le but étant de voir l’influence de la concentration en chaux sur la TEO. On voit qu’en
augmentant la quantité de chaux, la TEO augmente également passant de 17.4% (massique de
matériaux secs) à 17.7% pour 5% de chaux et 18.6% pour 20% de chaux.

Figure 61 : TEO exprimées en % massique de matériaux secs pour 5 (gauche) et 20% massique de terre (droite) de chaux

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

Perspectives

Avec cette TEO de 17.4%, nous avons pu réaliser rapidement les premières BTC dès mon arrivée à
Ouagadougou. L’idéal aurait été de réaliser l’essai Proctor pour chacune des formulations effectuées,
et ainsi adapter la TEO mais le temps et les matériaux nécessaire auraient été trop importants.

D’autre part, selon VENKATARAMA et JAGADISH (1993), la teneur en eau optimale (TEO) des BTC ne
doit pas être déterminée par l’essai Proctor. L’avis des auteurs part du constat que la TEO est fonction
de l’effort de compression appliqué. Or celui exercé par la presse sera différent de celui exercé dans le
cas de l’essai Proctor. Le CDE et CRATerre proposaient en 2000 une autre technique de mesure de la
TEO qui ne sera pas détaillée ici mais qui pourrait faire l’objet d’une attention particulière.

2) Performances mécaniques

La résistance mécanique est un paramètre des plus importants pour des matériaux de construction.
C’est encore plus vrai pour les BTC qui sont perçues comme peu résistantes. Tout l’enjeu est donc de
montrer que des blocs stabilisés présentent des caractéristiques suffisantes. Pour des raisons
logistiques, seule la résistance en compression a été mesurée dans cette section. Concernant les BTC,
on s’attend généralement à des résistances en compression minimales de 4MPa (CDE, 1998).

Procédure

Le protocole suivi s’inspire du mode opératoire proposé par le RILEM (OLIVIER et al., 1997) sur les
essais de résistance de blocs de terre comprimée. L’essai s’est déroulé à sec après la période de cure
de 45 jours sous bâches. Les moules utilisés pour compacter les BTC sont formés de 2 compartiments,
menant ainsi à la formation de 2 demi-briques de 3.5kg. Ces deux parties sont alors mises l’une sur
l’autre sur la machine de compression pour simuler un élément maçonné. L’élongation de l’ensemble
est de 2, ce qui influence les résultats par rapport à d’autres procédures. L’équipe du LMC de 2IE a
conseillé de ne pas placer de mortier entre les deux éléments. On a tendance à croire que le mortier
vient répartir les charges entre les deux demi-briques mais il rompt la continuité du matériau. D’autre
part, sa composition et sa mise en place ont une influence sur les résultats. L’ensemble est centré et
maintenu par 2 plaques en haut et en bas pour que la charge porte sur tout le bloc.

Les 2 plateaux de la machine de compression sont alors rapprochés pour mettre tout juste en contact
les éprouvettes. Le logiciel est paramétré avec une vitesse de 0.02 mm/min jusqu’à la rupture
complète de l’échantillon. On calcule la surface de contact S (cm²) entre les demi-briques et la
résistance est calculée à partir de la charge maximale F (kN) par la formule Rc = 10 * F/S. Les résultats
sont répartis dans des classes de performance indiquées dans le traité de construction en terre (1989) :

Résistances mécaniques
A B C D
à sec (MPa)
Rc à 28 jours > 12 5 à 12 2à5 ±2
Rc à 1 an (+40%) > 16.8 7 à 16.8 2.8 à 7 ± 2.8
Rc à 2 ans (+50%) > 18 7.5 à 18 3 à 7.5 ±3
Rt à 28 jours >2 1à2 0.5 à 1 0 à 0.5
Rt à 1 an (+40%) > 2.8 1.4 à 2.8 0.7 à 1.4 0 à 0.7
Rt à 2 ans (+50%) >3 1.5 à 3 0.75 à 1.5 0 à 0.75

Tableau 26: classement des résistances mécaniques des matériaux de construction en terre

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

On considèrera la résistance à 45 jours comme correspondant à celle à 28 jours. Pour le séchage en


cure humide, les valeurs prises seront celles à un an.

Résultats

Pour chaque formulation, on a 6 demi-briques permettant de faire 3 essais. Ces 3 mesures donnent
une moyenne pour la formulation considérée. Des premiers essais ont été faits sur les BTC stabilisées
à la chaux dans une proportion variable :

4,00

3,50

3,00

2,50
Rc (MPa)

2,00

1,50

1,00

0,50

0,00
0 5 8 10 12 15 20
Proportion de chaux (%)

Figure 62 : Rc à 45 jours pour la stabilisation à la chaux de 0 à 20% massique de terre

La stabilisation à la chaux montre des résistances relativement faibles à 45jours car on atteint
difficilement les 3.5MPa pour une valeur initiale de 2MPa. L’addition de chaux permet de passer d’une
classe D à une classe C. Ce constant s’explique par la durée de la cure qui est relativement faible. Or la
chaux nécessite plus de temps de prise que le ciment. Les valeurs trouvées à 90 ou 180 jours auraient
été bien meilleures.

Cela dit, ce qui nous importe ici est de décrire la tendance générale afin de savoir d’une part, si la chaux
contribue bien au renforcement des capacités portantes des BTC. D’autre part, si c’est le cas, on
s’intéresse à identifier la teneur en chaux idéale dans un intervalle plus précis. Malgré le faible temps
de réaction laissé à la chaux, les deux objectifs sont atteints à travers cet essai. On remarque que la
présence de chaux contribue bel et bien à l’augmentation de la résistance. En outre, la courbe de
tendance semble attester d’une forme de dôme indiquant que la proportion idéale de chaux avec cette
terre crue se situerait quelque part entre 10 et 15% en rapport massique de terre. Cette remarque est
compatible avec la majeure partie des travaux menés sur des BTC stabilisés à la chaux où les valeurs
oscillent autour des 12%. Ces résultats seraient plus nets si la cure était plus longue.

Par ailleurs, un essai de compression a été réalisé sur d’autres BTC à la chaux ayant subies une cure
humide haute température pendant 24H simulant les conditions de cure de plusieurs mois
(IZOMMOUREN et al., 2015). Pour une teneur en chaux de 5%, la résistance obtenue est de 7.1MPa et
de 10.0MPA pour 10%. Ces valeurs très performantes, se positionnent en classe B.

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

D’autres BTC ont été stabilisées avec de la pouzzolane dans des proportions allant de 10 à 40% en
masse de chaux. Sachant que la teneur optimale en chaux tournerait autour de 12% (massique de
terre), les pouzzolanes ont été ajoutées dans deux dosages en chaux différents de 10 à 15% et ont
donnés les graphes suivants :

Figure 63 : Rc à 45 jours BTC stabilisées à 10% (gris) et 15% (noir)

Lorsque l’on combine l’action de la chaux avec la pouzzolane, on obtient des résistances nettement
supérieures. Ainsi, la pouzzolane a largement catalysé la réaction au sein des blocs, et ce même à 45
jours alors que la réaction pouzzolanique est connue pour être très longue.

Si on s’intéresse à la courbe bleue où la teneur en eau de 10% est la même que sur le graphique
précédent, on obtient des valeurs environ deux fois plus élevées. La résistance passe de 2.5 à une
moyenne de 5MPa pour les différentes proportions, et ce en ajoutant seulement 1 à 4% de pouzzolane
en masse de terre. On passe là aussi de la classe D à la classe C. Les valeurs sont peu espacées mais on
sent un léger pic autour des 30% de pouzzolane dans la chaux.

Il en va de même pour les BTC stabilisées à 15% (courbe orange). Un dôme est clairement visible
montrant qu’il y a bien une teneur optimale en stabilisant. On voit que les BTC à 15% sont plus
résistantes que celles à 10%. Les valeurs obtenues jusqu’à 6.5MPa sont très encourageantes. La forme
de la courbe varie légèrement car la technique de formulation est différente (addition ou substitution
de pouzzolane).

Par ailleurs, un essai en compression a été réalisé sur d’autres BTC après une cure humide haute
température simulant les conditions de cure de plusieurs mois. La formulation utilisée est une chaux à
15% avec des taux de pouzzolanes de 10 à 40 % massique de chaux :

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

Figure 64 : Rc de BTC stabilisées à 15% après cure humide HT de 24h (gris) ou classique de 45j (noir)

Lorsque l’on observe le cas précédent d’une cure classique de 45jours (courbe orange), on note de
bien meilleures résistances avec une cure humide à haute température de 24h (courbe grise). Les BTC
ayant la même composition, on voit ici comment évolueraient les résistances en cure classique au
terme de plusieurs de mois d’attente. Graphiquement, on peut noter que le dosage optimum en
pouzzolane a tendance à évoluer à la baisse, passant de 30% à 20%. Cependant, ce phénomène est
léger au vu de la faible différence entre les résultats. De plus, il faut faire attention car les phénomènes
intervenant dans la cure humide haute température, ne sont sûrement pas les mêmes que dans une
cure classique. Néanmoins, on observe tout de même une vraie augmentation des performances allant
d’environ 6 à 11MPa, appartenant à la classe B.

L’ajout de fibres en proportions variables a été également évalué dans des BTC stabilisées avec 10%
de chaux. On observe tout d’abord que quasiment toutes les résistances trouvées dépassent la valeur
de 2.5MPa correspondant aux BTC ne contenant que la chaux à 10% (trait noir). Cela montre que les 2
types de fibres apportent une solidité supplémentaire même si les valeurs restent dans la classe C.

A l’allure des courbes, les deux fibres semblent confirmer un même comportement où il n’existe pas
de teneur en fibre optimale sur la plage de proportion évaluée. Cela peut être dû à des imprécisions
car les valeurs obtenues sont très similaires. C’est d’ailleurs le cas pour les différents pourcentages
testés qui sont très proches. Il est également fort probable que les propositions de dosages centrées
sur une valeur idéale de 0.4% soit erronées. Cette thèse prend du sens lorsque l’on regarde la partie
droite de la courbe, où l’on peut extrapoler une possible augmentation de la résistance avec une
teneur en fibres plus grande. Pour solutionner la question, il conviendrait de faire d’autres essais à plus
long terme sur des plages de proportions plus grandes.

Page 78
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

Figure 65 : Rc à 45 jours avec cheveux (noir) et fibres végétales (gris) et 10% de chaux (ligne continue)

Enfin, lorsque l’on compare les fibres végétales et les cheveux, on remarque que ces derniers
apparaissent légèrement moins efficaces. Cela pourrait s’expliquer par longueur des fibres utilisées : 3
cm pour les fibres végétales et 1cm pour les cheveux. En effet, il a été choisi d’introduire des cheveux
de 1 cm car plus longs, ils rendaient le mélange peu homogène. Un bloc avait tout de même été réalisé
avec des cheveux de 3cm pour le dosage à 0.4% et la valeur était nettement supérieure. La résistance
passe de 2.38 à 2.91MPa (18% de plus). La longueur peut donc être à l’origine de la différence observée
entre les fibres végétales et les cheveux. On peut également s’interroger sur le comportement plus
plastique du cheveu qui pourrait rentrer en jeu. Mais cela pourrait provenir aussi d’une adhésion moins
bonne à l’interface. Pour trancher la question, d’autres tests devraient être menés.

Perspectives

Encore une fois, ces résultats ne sont valables que sur une durée de cure relativement courte pour la
chaux et la pouzzolane. Des temps de cure plus longs auraient été appréciables pour l’obtention de
résultats plus avancés. Le dispositif de cure avec des BTC sous bâche aurait également pu être
amélioré. En effet la faible hygrométrie du Burkina, requiert une excellente étanchéité des bâches pour
éviter une perte rapide d’humidité, propice au bon fonctionnement des phénomènes réactifs.

La résistance en traction des blocs examinés aurait pu être évaluée avant l’essai en compression grâce
à l’essai brésilien (OLIVIER et al., 1997) comme cela a été fait sur d’autres briques dans la partie III de
ce chapitre. Cependant de crainte d’abîmer les BTC réalisées avec l’essai en traction, nous avons
préféré ne réaliser que l’essai en compression. A posteriori, on conclut qu’il aurait été opportun de les
réaliser pour quantifier notamment l’effet des fibres sur la résistance en traction. Il aurait été
également utile d’évaluer la formulation avec des fibres sans chaux. De même, des BTC avec fibres,
chaux et pouzzolane en même temps auraient été intéressantes mais l’étendue des essais aurait été
trop vaste.

Page 79
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

3) Performances thermiques

Outre les résistances mécaniques, les performances thermiques des BTC sont importantes pour le
confort intérieur de la construction. Si l’ajout de matériaux alternatifs stabilisants permet d’améliorer
aussi les capacités thermiques, le défi est gagné. On évalue ici la conductivité thermique, la diffusivité
thermique et la chaleur spécifique. La densité sèche des briques a également été mesurée pour
permettre de comparer les résultats vis-à-vis de ce paramètre.

Les mesures se font à l’aide de l’appareil KD2 pro qui est simple et rapide d’utilisation. Il s’agit d’un
boîtier prolongé d’un capteur composé d’aiguilles inox que l’on plonge dans le matériau à analyser.
Les BTC doivent être préalablement percées pour éviter de briser les aiguilles. On peut réaliser un trou
pour chaque aiguille à l’aide d’une pointe, et y insérer le capteur. L’appareil met alors un certain temps
à réaliser les mesures et les affichent sur l’écran du boîtier. Sur 3 BTC confectionnées pour chaque
formulation, un seul élément des 3 éléments a été évalué.

Les résultats de performances thermiques sont répartis dans des classes de performance indiquées
dans le traité de construction en terre (1989). On retrouve le classement suivant :

A B C D

Conductivité thermique W/m/K 0.23 à 0.46 0.46 à 0.81 0.81 à 0.93 0.93 à 1.04
Chaleur spécifique kJ/kg 0.85 à 1 ± 0.85 0.65 à 0.85 < 0.65

Tableau 27: classement des performances thermiques des matériaux de construction en terre

Résultats

Regardons tout d’abord la conductivité thermique donnée en W/m/K. L’objectif est d’atteindre une
conductivité la plus faible qui caractérise le pouvoir d’isolant thermique du matériau. Pour la chaux,
les résultats sont trop disparates, sûrement du fait que le temps laissé aux BTC n’est pas suffisant pour
que toutes les réactions se soient déroulées. Voici les résultats avec les stabilisations de chaux et
pouzzolanes représentées en % de pouzzolane ou en densité sèche :

1,2
1
Lambda (W/m/K)

0,8
0,6
0,4
0,2
0
0 10 20 30 40 50 1,70 1,75 1,80 1,85 1,90
Proportion massique pouzzolane (%) densité sèche

Figure 66 : Conductivité thermique des BTC stabilisées à 10%(gris) et 15%(noir)

On voit sur le graphique de gauche que la conductivité semble maximale autour d’une proportion
pouzzolanique de l’ordre de 20 à 30% de chaux. Cela est logique car ces dosages correspondent aux
meilleures résistances en compression observées auparavant. La porosité devient alors plus faible, ce
qui fait augmenter la conductivité thermique. On comprend que les performances mécaniques et

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

thermiques s’opposent, on obtient de bonnes caractéristiques pour l’une au détriment de l’autre. De


même, on s’attend logiquement à ce que la conductivité thermique augmente avec la densité sèche.
C’est le cas ici sur le graphique de droite, en cohérence avec les travaux de LAURENT (1987) ci-après :

Figure 67 : Augmentation de la conductivité avec la densité sèche

Lorsque l’on compare les deux dosages de stabilisants à 10% et à 15%, on remarque que le deuxième
présente une densité plus faible. De même, et par voie de conséquence, la conductivité thermique est
également plus faible, gage de meilleure isolation thermique. La stabilisation à 10% s’inscrit dans les
classes C à D tandis que celle à 15% est clairement en classe B. Un dosage en chaux plus important
semblerait contribuer positivement à la baisse de conductivité thermique tout comme l’augmentation
des résistances mécaniques.

Concernant les fibres, on observe les mêmes allures de courbes que l’essai de compression :

1,4
1,2
Lambda (W/m/K)

1
0,8
0,6
0,4
0,2
0
0 0,5 1 1,5
Proportion massique fibres (%)

Figure 68 : Conductivité thermique des fibres végétales (gris) et cheveux (noir)

Cela montre que les proportions les plus performantes d’un point de vue mécanique, sont les moins
bonnes sur le plan thermique. Si la valeur tend à diminuer avec l’ajout de fibre, la dernière valeur pour
les cheveux semble étrange. La précision de la mesure peut être en jeu. Il est aussi possible que la
conductivité augmente lorsque la proportion de fibres est trop grande. A en croire les mesures, l’ajout
de cheveux permet d’obtenir une classe B à C tandis que les fibres végétales ne permettraient pas un
changement de classe. Cependant, il ne faut pas trop accorder de valeurs à ces chiffres qui semblent
assez irréguliers.

Page 81
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

La diffusivité thermique, exprimée en mm²/s, relate l’inertie thermique en exprimant la vitesse à


laquelle la chaleur se répand dans la matière. Elle caractérise la capacité d’un matériau à transmettre
une variation de température et est fonction de la conductivité et de la chaleur spécifique. Plus la
diffusivité est faible, plus le temps mis par l’onde calorique pour traverser le matériau est long, c’est
le déphasage thermique. La terre est réputée pour avoir un bon déphasage thermique qui en fait un
de ses principaux avantages.

0,3

0,25

0,2
D (mm²/s)

0,15

0,1

0,05

0
1,65 1,70 1,75 1,80 1,85 1,90 1,95
densité sèche

Figure 69 : Diffusivité de BTC avec fibres végétales (-), cheveux(Δ), stabilisées à 0% (ligne), 10% (o) et 15% (+)

On note que la diffusivité thermique est meilleure pour les BTC contenant des fibres végétales. L’ajout
de cheveux ne semble pas contribuer positivement à une amélioration de la conductivité par rapport
à la terre non stabilisée. Quant aux stabilisations, elles semblent améliorer légèrement ce paramètre,
notamment celle à 15%. Néanmoins, la faible précision des mesures ne permet pas de faire des
conclusions suffisamment nettes.

Enfin, la chaleur spécifique, donnée en kJ/m3/K exprime la quantité de chaleur absorbée par un corps
de 1 kg quand sa température augmente de 1°K. Elle est définie par l’équation calorimétrique :
Q=mC(T2-T1). Le produit mC traduit la capacité d’une masse de matériau à stocker la chaleur.

8
7
6
C (MJ/m3/K)

5
4
3
2
1
0
0 10 20 30 40 50
Proportion massique pouzzolane (%)

Figure 70 : Chaleur spécifique volumique pour les stabilisations à 10% (gris) et 15% (noir)

La stabilisation à 10% semble montrer des valeurs de chaleur spécifique plus importantes que celle à
15%. Les valeurs paraissent relativement élevées et s’expliquent sûrement par la présence d’eau libre
ou interstitielle qui doit être plus grande à 45jours dans les échantillons à 10%. En effet, l’eau est un

Page 82
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

corps qui a une grande capacité thermique (4.18MJ/kg/K). Il est probable qu’elle n’ait pas été autant
consommée que dans les briques stabilisées à 15%. Les autres BTC présentent des résultats trop
irréguliers pour pouvoir en tirer des conclusions. La chaleur massique ne sera donc pas un paramètre
pris en compte.

Perspectives

Les précisions des mesures semblent relativement peu fiables. Cela peut s’expliquer par l’appareillage
utilisé qui n’est pas très adapté à l’étude de composites, hétérogènes par nature. En effet, la présence
de fibres à l’intérieur perturbe localement la mesure. Une alternative aurait été de travailler avec un
appareil de type plat chaud qui mesure les performances thermiques sur l’ensemble de la masse du
bloc. Ainsi, les disparités s’équilibrent et les valeurs sont plus justes.

Les précisions données dans les spécifications de l’appareil sont assez larges (DECAGON, 2016) :
Conductivité : 5 à 10%, Diffusivité : 7% et Chaleur Spécifique 7%. Mais ces imprécisions n’expliquent
pas à elles-seules les résultats trouvés.

La forte divergence des résultats pour certaines grandeurs thermiques provient surement du fait que
les mesures thermiques sont fortement influencées par la teneur en eau effective dans les BTC. Otis
(2009) a observé que ces paramètres thermiques sont fonction de la densité du matériau et de
l'humidité. Il conviendrait donc de mener des essais après une période de cure plus longue, pour plus
d’hétérogénéité dans les mesures.

4) Synthèse

Ce travail s’inscrit dans le cadre d’un partenariat avec Philbert NSHIMIYIMANA qui réalise une thèse
sur la BTC en terre crue. Les essais de laboratoire ont donné des premières conclusions sur le potentiel
des matériaux alternatifs pour stabiliser la terre crue du Burkina. Malgré les faibles durées de cure, les
essais mécaniques et thermiques réalisés sur les briques formulées, sont venus confirmer en partie ces
premiers résultats. Dans un deuxième temps, ils permettent également de dégager une tendance
générale sur les dosages les plus performants. Enfin, dans une troisième partie, l’objectif est de
confronter les résultats obtenus sur les BTC formulées avec d’autres briques existantes au Burkina.

Terre seule

L’essai Proctor a permis de trouver la teneur en eau optimum (TEO) pour la terre de Kamboinsé, utilisée
pour les BTC. Cette valeur est de 17.4% (en masse de matériaux secs). Cependant, la TEO est fonction
du compactage appliqué, et il serait opportun de la mesurer à l’aide de la machine de compactage
directement (CDE, 2000). De plus, la TEO trouvée n’est valable que pour des BTC ne contenant que de
la terre crue. D’autres essais Proctor ont été menés pour montrer que la TEO évolue légèrement en
fonction de l’ajout de stabilisants. Avec 20% de chaux, la TEO atteint 18.6%. Néanmoins au vu de la
faible variation, il a été choisi de garder une TEO constante pour les BTC formées dans ce travail. Pour
des essais futurs, une correction en ce sens pourrait être appliquée.

Il semble que la terre crue étudiée possède de bonnes caractéristiques pour la stabiliser avec de la
chaux. Sa teneur en eau optimal devra être adaptée en fonction de la stabilisation choisie.

Chaux

Tout d’abord, l’ajout de chaux BIG à la terre contribue à augmenter ses capacités portantes.

Page 83
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE II. Essais sur BTC

Les résistances passent d’environ 2.5MPa jusqu’à 3.4MPa à 45 jours. Le dosage idéal se situerait aux
alentours de 10 à 15% en masse de terre. Lorsqu’on simule une cure de plusieurs mois, on obtient des
résistances de 7.1 et 10.0Mpa pour des stabilisations respectives de 5% et 10%.

Une proportion de chaux supérieure à 10% massique de terre permettrait de diminuer la densité. Par
la même, elle engendre une baisse de la conductivité thermique, tout en augmentant les résistances
mécaniques. Ce qui est doublement apprécié. La diffusivité thermique semblerait aussi être améliorée
avec un dosage supérieur à 10%.

L’ajout de la chaux BIG semble être une excellente technique de stabilisation de la terre étudiée. Les
performances thermiques et mécaniques sont fortement améliorées avec un pourcentage de chaux
légèrement supérieur à 10%. Le potentiel de recyclage de ce déchet industriel au sein de BTC est donc
très grand. D’autant qu’il ne nécessite que peu de manipulations pour être incorporé aux briques.

Balles de riz

Ensuite, les balles de riz calcinées ajoutées ou substituées à la chaux contribuent largement à
l’augmentation des résistances à 45jours, allant jusqu’à 6.6MPa. Les proportions idéales sont de l’ordre
de 2 à 4% en masse de terre ou 20 à 40% en masse de chaux. Lorsqu’on simule une cure de plusieurs
mois, on obtient des résistances jusqu’à 11.2MPa, ce qui est très encourageant.

Si l’on choisit les dosages optimums en pouzzolane au niveau de la résistance mécanique, la


conductivité thermique parait un petit peu moins bonne. Cependant, il apparait qu’elle tend à
s’améliorer lorsque l’on augmente plus fortement la proportion de pouzzolane.

Il apparait donc que la pouzzolane contribue à augmenter légèrement les performances mécaniques
des BTC au terme de plusieurs mois de cure. Cependant, la légère augmentation de résistance parait
négligeable au vu des contraintes engendrées par l’ajout de balles de riz (transport, broyage,
calcination…). Son utilisation conviendrait pour des BTC nécessitant une résistance en compression
plus importantes (parties soumises à fortes charges ou agressions extérieures). La balle de riz joue
également un rôle catalyseur au sein des BTC, permettant d’atteindre de bonnes résistances plus
rapidement, ce qui peut être utile pour certains chantiers.

Fibres végétales

L’ajout de fibres de 3 cm de longueur présente également un certain renforcement de la résistance en


compression. Il en va de même pour les résistances en traction et flexion mais l’essai n’a pas pu être
mené ici. Les fibres végétales augmentent la résistance en compression à 45 jours de 2.5 jusqu’à
4.5MPa avec seulement 1.2% de fibres ajoutées au poids de terre. Il s’agit de la teneur optimale sur la
plage de concentrations étudiée, mais des recherches sur des domaines plus larges doivent être
menées.

La conductivité thermique semble très légèrement réduite par l’ajout de fibre végétale. Cependant la
diffusivité est augmentée grâce aux fibres.

Des points de vue mécanique et thermique, l’ajout de fibres de gombo dans les BTC stabilisées à la
chaux BIG s’avère être une option prometteuse. D’autres paramètres comme le retrait ou la fissuration
seraient certainement également améliorés par l’ajout des fibres. Il reste des questions techniques
comme les problématiques liées à une production à grande échelle (récolte, séparation, découpage,
malaxage, dosage…). En outre, la durabilité tout comme les performances après cure complète ne sont
pas étudiées dans ce travail.

Page 84
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE III. Le marché des BTC

Cheveux

Avec les cheveux d’1 cm de longueur, on constate une plus faible augmentation de résistance mais
néanmoins notable de 2.5MPa à 3MPa à 45 jours. Toutefois, on ne peut comparer avec les fibres
végétales car la longueur de fibre utilisée est différente. Une BTC réalisée avec des cheveux de 3cm
montre d’ailleurs des résultats meilleurs. Une technique de malaxage différente pourrait donc
permettre d’ajouter des cheveux de 3 cm de longueur. Le constat à propos du dosage optimal est le
même que pour les fibres végétales. Il en va de même pour les essais en traction et flexion.

Selon les mesures, les BTC avec cheveux présentent de meilleures conductivités thermiques.

De même que pour les fibres végétales, les cheveux synthétiques constituent une alternative
potentielle pour renforcer les BTC stabilisées à la chaux. Ils semblent contribuer à des performances
mécaniques et thermiques légèrement supérieures. De plus, les cheveux constituent un déchet non
recyclé qui s’avère moins fastidieux à traiter que les fibres végétales. Toutefois, d’autres essais à long
terme évaluant également la durabilité sont nécessaires pour confronter les avantages aux
inconvénients de l’ajout des cheveux dans les BTC.

III. LE MARCHE DES BTC

Au Burkina, la construction en terre crue fait l’objet de nombreux débats. La concurrence avec les
matériaux modernes comme le béton ou l’acier est rude. Plusieurs paramètres rentrent en jeu,
notamment depuis l’ouverture récente de plusieurs cimenteries au Burkina. L’avenir de la construction
en terre se joue au niveau sociologique, mais également au niveau scientifique. En effet, au-delà de ce
que dégage la terre dans l’esprit des burkinabè, il faut trouver de nouvelles méthodes pour la
renforcer.

Ainsi, la ressource en matériaux alternatifs est d’abord détaillée dans cette partie. Ensuite, un
inventaire des matériaux de construction actuellement disponibles au Burkina est réalisé, avec une
comparaison des leurs performances vis-à-vis des BTC formulées dans ce travail.

1) Ressources en matériaux alternatifs

Outre la terre, les matériaux choisis pour étude dans ce travail sont des produits recyclés qui
proviennent exclusivement du Burkina Faso. Ils constituent des ressources économiques et des
gisements potentiels encore peu sous-exploités. Ils présentent un fort potentiel stabilisant pour la
terre crue disponible au Burkina.

Terre

Au Burkina, on retrouve généralement une couche latéritique indurée d’une épaisseur d’1m maximum
sous laquelle on retrouve de la terre comprenant un fort pourcentage d’argiles. Ce matériau possède
d’excellentes aptitudes pour la construction et constitue depuis des millénaires la principale ressource.

Les travaux de Philbert NSHIMIYIMANA et Romain WERS visent à donner de plus amples informations
à propos de la ressource en terre disponible au Burkina Faso à travers l’étude de plusieurs carrières.

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE III. Le marché des BTC

Figure 71 : Terre du Burkina : latérite indurée (gauche) et argiles (droite)

La terre utilisée dans ce travail provient de la carrière de Kamboinsé, située à la sortie Nord de
Ouagadougou. Elle n’a subi aucun traitement à part une extraction suivie d’un tamisage à 5mm et d’un
stockage dans des grands sacs de 100kg.

Avantages Inconvénients
Grande disponibilité Sensible à l’eau
Faible coût
Facilité d’exploitation Faible résistance des briques non
Main d’œuvre peu qualifiée stabilisées
Chaux

La chaux utilisée dans ce travail provient de l’industrie BIG située aux environs de Ouagadougou. Cette
entreprise produit de l’acétylène, un gaz à l’odeur particulière très utilisé pour la soudure, notamment
grâce à sa température de combustion extrêmement élevée. Le déchet principal produit est une boue
contenant en grande partie de la chaux. L’acétylène s’obtient par réaction de carbure de calcium selon
la réaction exothermique suivante :

CaC2 + 2H2O -> C2H2 + Ca(OH)2 + 31 kcal

On génère environ 300L d’acétylène brut avec 1 kg de carbure de calcium à l’aide de générateurs avec
excès d’eau (10 L/kgCaC2 nécessaire). La production de BIG est de 25 mètres cube d’acétylène par heure.
La boue qui nous intéresse est composée principalement de chaux et d’eau. Elle est produite par
l’entreprise à hauteur d’environ 600L/jour. En effet, 6 barriques de 200L sont vidées tous les 2 jours
du bassin de décantation. Les boues sont alors épandues et sèchent à l’air libre et au soleil, formant
un matériau facile à briser à la main, d’une couleur gris-bleu.

Figure 72 : Chaux BIG à la sortie de la chaine de production

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE III. Le marché des BTC

La chaux de BIG utilisée dans ce TFE a subi deux types de traitement. Avant d’être tamisée à 125µm,
elle a été broyée de 2 façons différentes : dans un concasseur à boulets ou dans un broyeur à billes. La
chaux BIG présente de nombreux avantages :

Avantages Inconvénients
Production non négligeable
Déchet pas encore valorisé
Chaux de seconde main
Peu de traitements nécessaires
BIG proche de Ouagadougou

La chaux Supercalco 90 provenant de l’entreprise Carmeuse a été utilisée à titre de comparaison avec
la chaux BIG. Celle-ci est fabriquée industriellement en Belgique à Seilles et aux Pays bas. Elle est donc
d’une plus grande pureté et sa couleur est plus blanche que celle de BIG, qui est grise. Elle a fait l’objet
de certains essais, sa fiche technique est disponible en Annexe 1.

Balles de riz

Les balles de riz sont les enveloppes récupérées pendant le décorticage du riz paddy (grain brut
entouré de sa balle). Chaque tonne de riz paddy peut produire environ 200 kg de balles, ce qui, lors de
la combustion, produit environ 40 kg de cendres. La production mondiale annuelle de riz était
d'environ 500 millions de tonnes en 1994, ce qui donne environ 100 millions de tonnes de balles de riz
récupérables (BOUZOUBAA et FOURNIER, 2001).

On sait que les balles de riz calcinées possèdent des propriétés pouzzolaniques, qui en font un matériau
stabilisant de choix lorsqu’il est associé avec la chaux. On sait depuis 1970, que les cendres de balles
de riz ont un pouvoir pouzzolanique étroitement lié à son taux de phase amorphe. L’amorphicité des
de balles de riz calcinées est fonction de la durée et de la température de calcination (MEHTA, 1994).

Les balles de riz utilisées dans ce travail proviennent de Bagré au


Burkina Faso. Cette région se situe dans la région centre-est, à 230
kilomètres de Ouagadougou. Il s’agit d’une plaine comprenant 16
villages. 3400ha sont actuellement exploités par 3000 agriculteurs,
mais la coopération contribue à l’aménagement de nouvelles
surfaces pour les prochaines années. D’autres localités produisent
également du riz au Burkina, comme Bama par exemple. On évaluait
en 2011 la production de riz burkinabè à 240 865 tonnes (DGPER,
2011 ; COMMODAFRICA, 2017).

Le procédé utilisé au laboratoire pour traiter les balles de riz brutes


nécessite une étape de calcination suivie d’un broyage au broyeur à
billes. Les balles de riz calcinées sont également appelées
Figure 73 : Riz cultivé à Bagré (BF)
pouzzolanes dans les essais. Les avantages de l’exploitation des balles
de riz dans des BTC sont les suivants :

Avantages Inconvénients

Production importante
Déchet peu valorisé Etape de calcination
Contribution agriculture locale

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE III. Le marché des BTC

Fibres végétales

Les fibres végétales proviennent de la tige du gombo (Abelmoschus esculentus), une plante tropicale
à fleurs appelée aussi okra. Il s’agit d’un légume consommé au Burkina Faso et en Afrique pour ses
qualités nutritionnelles. Il fait partie de la famille botanique des Malvacées comme trois espèces très
représentées au Burkina : le cotonnier, l’oseille et le gombo.

Figure 74 : Le Gombo

Le buisson peut monter jusqu’à 2.5m. La fibre de sa tige présente une excellente résistance. Elle est
utilisée sous forme de tresses pour confectionner des cordes et des sacs. On produit également de la
pâte à papier avec les fibres. Le volume de production de ce légume est difficile à évaluer.

Les fibres de gombo utilisées proviennent de la région de Kaya au Burkina Faso. Elles ont été séchées
et entreposées dans des sacs après récolte. Avant de les couper en petites fibres de 3 cm, elles ont été
séparées en les frottant manuellement au laboratoire.

Avantages Inconvénients
Fibre naturelle résistante
Etape difficile de défibrage
Déchet peu valorisé
Sensibilité à l’eau ?
Contribution agriculture locale
Sensibilité à la température ?
Faible énergie grise
Cheveux

Les cheveux synthétiques sont très utilisés par les femmes africaines. Il
s’agit de rajouts que les burkinabè peuvent changer relativement souvent.
Après usage, de nombreuses mèches se retrouvent dans les rues et
constituent un déchet qui bouche les tuyauteries des égouts. Leur matière
plastique se dégrade difficilement et de façon lente, ce qui contribue à
l’effet polluant.

L’intégration de ces anciennes mèches au sein de briques permet de lutter


contre ce type de pollution, tout en renforçant les BTC ainsi fabriquées.
D’autres fibres synthétiques peuvent constituer un renforcement potentiel
et pourraient être étudiées (sacs d’eau potable).
Figure 75 : Cheveux jetés dans la rue
En tant que renforts, les cheveux présentent certains atouts :

Avantages Inconvénients

Production non négligeable


Sensibilité aux UV ?
Déchet non valorisé
Recyclage de BTC avec cheveux ?
Fibres déjà séparées

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE III. Le marché des BTC

2) Production existante de matériaux de construction

Types de briques utilisées

Au Burkina Faso, la majeure partie des bâtiments en terre crue sont constitués de briques. Néanmoins,
il existe 3 variantes présentant des propriétés très différentes :

- Adobe : brique de terre moulée et séchée au soleil. Elle peut être fabriquée de façon manuelle
ou mécanique. Elle présente des résistances très variables en fonction de la teneur en eau, du
type de terre ou encore des additifs intégrés dans la masse comme des fibres. De par sa faible
résistance, la diversité des formes possibles est assez réduite. Elle peut être formée avec une
terre à l’état plastique ou liquide. Elle résiste très mal à l’exposition aux précipitations et
nécessite une protection ou un entretien. Sa couleur va du gris au rouge en passant par l’ocre
en fonction des argiles présents et de la teneur en matière organique. On peut la produire à
hauteur de 400 à 600 briques/homme par jour,

- BLT : brique de la latérite taillée, plinthite ou pierre. Il s’agit d’une roche latéritique indurée
qui est découpée en carrière. Au départ, elle est très friable mais au contact de l’air pendant
quelques mois, son comportement mécanique s’améliore. La résistance est très variable, elle
peut être très fragile et s’effrite plus ou moins en fonction du gisement considéré. Sa faible
résistance implique une forme massive. Malgré sa porosité, elle résiste très bien à l’eau. Son
aspect est irrégulier avec des tons rouges et des aspérités de couleurs diverses. Une extraction
manuelle traditionnelle permet d’en extraire environ 50 blocs/homme par jour,

- BTC : brique de terre comprimée, la plus résistante. Plus solide, elle peut être modelée selon
des formes assez variées. Dans certaines conditions, elle peut atteindre des valeurs
comparables à des matériaux de construction modernes. La couleur obtenue dépend de la
terre et des stabilisants ajoutés. Selon la technique utilisée, on peut en fabriquer de 300 à
20 000 briques par jour.

Outre ces briques, on retrouve de plus en plus de constructions à base de blocs de béton. C’est un
phénomène qui touche surtout les centres urbains et qui tend à s’amplifier.

La production des briques en Afrique et au Burkina se fait de façon industrielle, mais aussi de façon
artisanale. Dans les régions rurales, il y a majoritairement une production manuelle artisanale,
principalement d’adobe. Dans les régions urbaines, on peut également observer des artisans qui
fabriquent des briques d’adobe comme des blocs de béton au cœur de la ville. La qualité de ces
produits est alors très variable. Des blocs façonnés de façon artisanale ont été récupérées à
Ouagadougou pour réaliser des essais mécaniques.

En parallèle, il existe des usines de production de briques de terre crue. La production y est plus
contrôlée et d’une qualité constante. Une visite a été effectuée à la fabrique ZI Matériaux située à la
sortie de Ouagadougou. L’usine est spécialisée dans la production de BTC, de tuiles ou de pavés. Sur
une surface de 25 000 m², elle est capable de produire 6000 BTC /jour. Plusieurs échantillons ont été
collectés sur site pour évaluer les performances de ces briques industrialisées.

Les briques ainsi collectées ont fait l’objet d’expérimentations. Les différentes typologies sont
entreposées sur la photo suivante :

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE III. Le marché des BTC

Figure 76 : Echantillons collectés au Burkina Faso pour essai

Procédure d’essai

Les échantillons récoltés ont subi 2 essais mécaniques selon la procédure du RILEM pour évaluer leurs
résistances en compression et en traction. Un essai brésilien a été réalisé tout d’abord pour séparer
les blocs en deux tout en déterminant la résistance en traction. En effet, un effort appliqué de façon
verticale sur des cales induit une compression centrale simulant une traction dans le sens horizontal.
Le bloc se brise alors en son milieu comme sur la photo suivante (OLIVIER et al., 1997) :

Figure 77 : Essai brésilien

Les blocs ainsi séparés en demi-briques ont pu ensuite être caractérisés par un essai en compression
classique. La procédure est analogue aux essais sur les BTC fabriquées (partie C. II Essais sur BTC).

Caractéristiques des BTC existantes

Selon HOUBEN et GUILLAUD (2006), les blocs peuvent se classer dans différentes catégories, allant de
A à D pour Rc et Rt (cf. Tableau 26 page 75). Bien que le temps de cure des blocs de terre crue testés
ne soient pas connus, on assimilera la période de cure différemment selon l’origine. Pour les blocs
originaires de ZI Matériaux, la cure est d’au moins 21 jours sous bâche arrosée avant utilisation.
Comme le stock est relativement limité, le temps de cure retenu est donc de 28 jours. Les blocs

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LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE III. Le marché des BTC

provenant de visites de chantier ou d’autres sources ont une période bien supérieure, qui est
considérée ici de 1 an. Les résultats sont ainsi rangés dans ces catégories, afin de qualifier leurs
performances :

Taille (cm) Traction Compression


Type Détails l L H Classe Rt (MPa) Classe Rc (MPa)
ZI Mat 8% Ciment 14 14 9
arrosage sous bâche
14 14 9 - - B 5,97
+ de 21j presse
MANUELLE 14 14 9
ZI Mat 8% Ciment 14 30 9
arrosage sous bâche
14 30 9 D 0,43 C 2,88
+ de 21j presse
mécanique 14 30 9
ZI Mat 8% Ciment 14 30 6
arrosage sous bâche 14 30 6 B 1,04 C 4,83
+ de 21j presse
mécanique 14 30 6
ZI Mat 8% Ciment 11 22 9
BTC arrosage sous bâche 11 22 9 B 1,06 B 8,59
+ de 21j presse
MANUELLE 11 22 9
ZI Mat 8% Ciment 11 22 5
arrosage sous bâche
11 22 5 B 1,28 B 10,35
+ de 21j presse
MANUELLE 11 22 5
Briques de plafond, 11 22 5
Francis Kéré, 11 22 5 B 1,68 B 9,01
stabilisées au ciment 11 22 5
Briques de 14 30 9
construction, village
14 30 9 D 0,43 D 2,34
opéra, Francis Kéré,
stabilisées au ciment 14 30 9
16 32 13
Récupérée sur le site
BLT 16 32 13 D 0,21 D 0,98
de 2IE Kamboinsé
16 32 15
Terre + ciment pour 24 17 8
Angle angles (coupé)
D 0,20 D 1,17
ciment logements sociaux à
24 17 8
Boansa tiemtoré
Adobes pour 15 31 8
Adobe Logements sociaux à 16 32 8 D 0,27 D 0,21
Boansa tiemtoré 15 32 8

Figure 78 : Performances mécaniques des briques existantes (cure de 1 an en gris)

L’exigence minimale est généralement fixée à une résistance en compression minimale de 4MPa (CDE,
1998). On voit ici que la majeure partie des BTC valident ce critère en compression. Toutefois, deux

Page 91
LA BRIQUE DE TERRE COMPRIMEE III. Le marché des BTC

d’entre elles s’avèrent peu performantes, ce qui montre la grande variabilité de la construction en
terre. Les autres types de briques affichent des résistances en compression plus basses que les BTC.

On comprend donc l’avantage de recourir au compactage et à la stabilisation pour des meilleures


résistances. Notons qu’ici les BTC récoltées sont stabilisées au ciment. Il est possible que pour les terres
utilisées, ce stabilisant ne soit pas le plus adéquat en comparaison avec la chaux.

On peut difficilement comparer les valeurs trouvées ici avec les BTC formulées dans ce travail.
Certaines précautions s’appliquent car les blocs évalués dans cette partie n’ont pas eu le même temps
de cure. D’autre part, on sait que la stabilisation au ciment demande moins de temps de cure que celle
à la chaux.

Néanmoins, si l’on considère uniquement les blocs avec une cure assez longue, on peut voir que les
résistances sont relativement médiocres, sauf pour les BTC de plafond sur le chantier de Francis Kéré
(Rc de 9 Mpa). Cette résistance en compression est comparable aux meilleures performances obtenues
dans ce travail, pour les stabilisations à 10% et 15% (10 et 11 Mpa).

Impact environnemental de la stabilisation

Bien qu’il soit possible de construire en terre sans traitement, la stabilisation semble une étape
essentielle pour la plupart des constructions en terre crue. La stabilisation apporte toute une série
d’avantages mais elle requiert plusieurs étapes énergivores.

D’une part, la production de chaux nécessite une cuisson haute température (900 à 1200°C) qui est
très énergivore (950 à 1650 Kcal/kg de CaO). Les combustibles utilisés pour atteindre ces températures
sont le gaz naturel, le fuel lourd, le charbon, le coke de pétrole ou encore le lignite, tous des modes de
combustion très polluants. La consommation de chaux de 64 kg/an/habitant dans les pays
industrialisés et ou 29 kg/an/habitant dans les pays où les données sont connues. Avec ses 175
kg/habitant, la Belgique est le premier producteur de chaux par habitant. (BECHOUX, 1999).

D’autre part, les pouzzolanes fabriquées à partir de balles de riz nécessitent une calcination à 500°C.
Cependant, cette étape ne concerne que la fraction d’environ 3% de la masse totale des briques (pour
15% de balles de riz initialement). Tandis que pour les briques de terre cuite, l’entièreté du matériau
(100%) est chauffé à au moins 900°C. De ce point de vue, la BTC stabilisée avec des balles de riz a un
impact environnemental relativement faible, même en prenant en compte le broyage nécessaire.

Si l’on compare la BTC stabilisée à d’autres matériaux de constructions très utilisés de nos jours, on
observe une grande différence sur le plan écologique. L’impact environnemental se traduit par
l’énergie nécessaire et les émissions de gaz à effet de serre lors de la fabrication. RAHMAN & RIZA
(2010) donnent les valeurs suivantes pour la seule production des matériaux :

- La BTC stabilisée représente 22kg de CO2/tonne,


- Le bloc de béton entraine un rejet de 143 kg de CO2/tonne,
- La briques de terre cuite dégage 200 kg de CO2/tonne,
- Le bloc de béton cellulaire est responsable de 280 à 375 kg de CO2/tonne.

En moyenne, ils constatent que les BTC stabilisées au ciment nécessitent moins de 10% de l’énergie
nécessaire à la fabrication de produits équivalents constitués de terre cuite ou de blocs de béton. Selon
DEBOUCHA & HARSHIM (2010), la fabrication et le traitement d'un mètre cube de sol nécessite environ
36 MJ (10 kWh) d’énergie. Si l’on souhaite confectionner un même volume constitué de béton, cette
énergie est d'environ 3000 MJ (833 kWh). On comprend que la stabilisation a un impact modéré au vu
des avantages qu’elle procure.

Page 92
CONCLUSION

Le travail réalisé vise à trouver des matériaux alternatifs locaux permettant d’améliorer les
performances des briques de terre comprimée (BTC) au Burkina Faso. D’une part, les matériaux étudiés
ont été caractérisés individuellement par une série d’expérimentations. D’autre part, leur
incorporation dans des BTC a également été étudiée pour évaluer leurs effets sur les performances.

Les tests montrent que les matériaux alternatifs choisis présentent un fort potentiel de stabilisation.
Ces résidus présentent des caractéristiques relativement similaires à des produits généralement
utilisés pour renforcer les performances des BTC.

Les essais réalisés dans un deuxième temps sur les BTC indiquent que l’ajout des matériaux alternatifs
sélectionnés contribue à une réelle augmentation des performances. On constate de meilleures
caractéristiques tant sur le plan mécanique que thermique, bien que les mesures thermiques
manquaient de précisions. Les améliorations sont constatées sur des BTC après une cure de 45 jours
et, sont bien plus importants, pour une cure de plusieurs mois. Les résultats sont fonction du type de
matériaux alternatif intégré et du dosage en question.

Au vu de ces analyses, il apparait donc que la terre étudiée dans ce travail est compatible avec les
différents matériaux alternatifs proposés. C’est notamment le cas pour la chaux recyclée de l’industrie
BIG qui constitue le stabilisant avec la meilleure efficacité. Sa facilité d’utilisation et sa résistance très
satisfaisante (10Mpa à terme pour 10%), la classeront au premier rang des matériaux résiduels étudiés.

Les balles de riz calcinées contribuent au renforcement de la stabilisation à la chaux en augmentant


légèrement la résistance à long terme. Mais leur addition contribue surtout à doper la réaction
pouzzolanique ayant lieu entre les argiles et la chaux. La BTC aura donc une meilleure tenue, plus
rapidement, ce qui peut être utile sur certains chantiers. Néanmoins, le traitement plus complexe des
balles de riz (calcination) les contraindra à une utilisation pour des constructions plus particulières.

Les fibres végétales de gombo et les cheveux synthétiques constituent une alternative pour renforcer
les BTC par un moyen physique. Ces deux fibres peuvent être utilisées dans la terre seule, en
complément de la chaux, ou avec une stabilisation chaux-pouzzolane. Les essais ont montré une bonne
compatibilité avec les stabilisants chimiques. Les BTC formulées présentent des caractéristiques
améliorées mais des essais à long terme doivent être menés.

Quoi qu’il en soit, tous les matériaux analysés présentent des propriétés intéressantes. Bien que les
durées de cure soient assez courtes, l’effet des additions est perceptible. Les dosages idéaux ont été
identifiés avec une certaine marge. D’autres tests de plus grande envergure devraient être réalisés
pour évaluer avec plus de précisions l’avenir de l’utilisation de ces matériaux résiduels dans les BTC.

L’adéquation des matériaux découle de leurs caractéristiques physiques, elles-mêmes fonction des
moyens disponibles au laboratoire. Cette préparation ne sera pas la même si l’exploitation devient
industrielle. Une évaluation de ces traitements pourra également faire l’objet d’une étude particulière.

Enfin, même si la compatibilité des matériaux alternatifs s’avère plus faible que pour d’autres
stabilisants connus, notons que ces résidus constituent des déchets. Ils ne sont actuellement pas
encore recyclés, et leur addition dans les BTC constituerait une excellente valorisation même si
l’efficacité reste limitée.
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Page 97
ANNEXES
Annexe 1 : Fiche technique CH Supercalco 90 de Carmeuse

Page 98
Annexe 2 : Courbe granulométrique de la même chaux BIG avec des indices de réfraction différents

Annexe 3: identification de la portlandite dans la chaux BIG par DRX

Page 99
Annexe 4 : identification du quartz dans balles de riz calcinées par DRX

Annexe 5 : Refractive index pour chaque matériau (MALVERN INTRUMENT, 2007)

Page 100
Annexe 6 : Essai de traction de fibres unitaires

Annexe 7 : Résultats essai de traction des mèches pour les fibres (haut) et les cheveux (bas)

Page 101
Annexe 8 : Résultats détaillés pull-out

Annexe 9 : Résultats complets perte de conductivité (activité pouzzolanique)

Temp Pouzzo/ 08-mai 08-mai 09-mai 10-mai 11-mai 12-mai 15-mai


°C chaux
40 28 5500 4400 1070 608 565 557 551
2,5 7,5 5700 4800 1510 714 599 561 556
37 5900 5000 2030 860 649 578 564
3,5 6,5 6400 5500 2520 1140 709 600 557
46 6200 5800 3060 1839 1040 712 585
4,5 5,5 6300 6000 3340 2430 1760 1430 894
60 28 5000 4100 881 565 566 566 572
2,5 7,5 5150 4400 1040 564 543 564 545
37 5100 4700 1260 605 564 560 553
3,5 6,5 5600 4500 1533 713 606 567 565
46 5400 4800 1740 708 591 565 564
4,5 5,5 5820 5100 1950 931 658 590 535
40 28 20,0 80,5 88,9 89,7 89,9 90,0
2,5 7,5 15,8 73,5 87,5 89,5 90,2 90,2
37 15,3 65,6 85,4 89,0 90,2 90,4
3,5 6,5 14,1 60,6 82,2 88,9 90,6 91,3
46 6,5 50,6 70,3 83,2 88,5 90,6
4,5 5,5 4,8 47,0 61,4 72,1 77,3 85,8
60 28 18,0 82,4 88,7 88,7 88,7 88,6
2,5 7,5 14,6 79,8 89,0 89,5 89,0 89,4

Page 102
37 7,8 75,3 88,1 88,9 89,0 89,2
3,5 6,5 19,6 72,6 87,3 89,2 89,9 89,9
46 11,1 67,8 86,9 89,1 89,5 89,6
4,5 5,5 12,4 66,5 84,0 88,7 89,9 90,8

Annexe 10 : Spectre infrarouge des cheveux synthétiques (identification à 80% de polyethylen chlorinated 36% chlorine)

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