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Cartographie des accidents régionaux et identification de leur rôle dans

l'hydrodynamique souterraine en zone de socle. Cas de la région de
Dimbokro-Bongouanou (Côte d'Ivoire)

Article  in  Hydrological Sciences Journal/Journal des Sciences Hydrologiques · July 2010

DOI: 10.1080/02626667.2010.489749

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6 authors, including:

Koita Mahamadou H. Jourde

Institut International d'ingénierie de l'eau et de l'environnement Université de Montpellier
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Denis Ruelland Kouadio Koffi

French National Centre for Scientific Research University of Abobo-Adjamé
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 Hydrological Sciences Journal – Journal des Sciences Hydrologiques, 55(5) 2010 805

Cartographie des accidents régionaux et identification de leur rôle dans

l’hydrodynamique souterraine en zone de socle. Cas de la région de
Dimbokro-Bongouanou (Côte d’Ivoire)

Mahamadou Koita1,3, Herve Jourde1, Denis Ruelland2, Kouadio Koffi3, Severin Pistre1
& Issiaka Savane3
1
Laboratoire HydroSciences, Université Montpellier 2, Place E. Bataillon, F-34095 Montpellier Cedex 5, France
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koita@msem.univ-montp2.fr
2
CNRS–Laboratoire HydroSciences, Université Montpellier 2, Place E. Bataillon, F-34095 Montpellier Cedex 5, France
3
Laboratoire Géosciences et Environnement, Université Abobo-Adjamé, 02 BP 801 Abidjan 02, Côte d’Ivoire

Reçu le 7 Octobre 2008; accepté le 2 Février 2010; la discussion concernant cet article est ouverte jusqu’au 1er Janvier 2011

Citation Koita, M., Jourde, H., Ruelland, D., Koffi, K., Pistre, S. & Savane, I. (2010) Cartographie des accidents régionaux et
identification de leur rôle dans l’hydrodynamique souterraine en zone de socle. Cas de la région de Dimbokro-Bongouanou (Côte
d’Ivoire). Hydrol. Sci. J. 55(5), 805–820.

Résumé Ce travail a pour objectif de proposer une méthodologie de cartographie des accidents régionaux, basée sur
une analyse combinée d’images radar et optique, afin de déterminer leur rôle dans les écoulements souterrains. Cette
méthodologie est mise en œuvre en zone de socle, dans la région de Dimbokro-Bongouanou (Côte d’Ivoire). Dans
un premier temps, cette démarche méthodologique consiste à spatialiser les linéaments régionaux susceptibles
d’être en relation avec la fracturation du socle à partir de l’analyse combinée d’images radar (Radarsat) et optique
(Landsat), puis à valider ces linéaments aux moyens de données géologiques. Dans un second temps, une analyse
permettant d’identifier le rôle de ces linéaments dans les circulations souterraines est proposée. Celle-ci consiste à
étudier les corrélations entre la position des forages et le tracé des linéaments régionaux. Plus précisément, le débit
des forages est analysé en fonction de leur distance au linéament le plus proche, ce qui permet de constater une
augmentation du débit inversement proportionnelle à la distance entre forages ayant un débit supérieur à 5 m3/h à
l’air lift (forages à fort débit) et linéaments majeurs. Aucune corrélation avec le débit des forages ayant un débit
inférieur à 5 m3/h (forages à faible débit) n’est constatée. Cette corrélation négative, entre la productivité des forages
à fort débit et la distance au linéament le plus proche, permet de confirmer que ces linéaments sont les expressions
surfaciques d’accidents majeurs de la région et jouent un rôle primordial dans les écoulements souterrains.
Mots clefs fracturation; images radar; Landsat; linéaments régionaux; productivité de forage; Dimbokro-Bongouanou, Côte
d’Ivoire

Mapping regional discontinuities and identification of their role in underground hydrodynamics in a base
zone: case study of the Dimbokro-Bongouanou region, Ivory Coast
Abstract This study aims to investigate a methodology to map regional discontinuities, based on a combined
analysis of radar and optical images, to assess if they play a noticeable role as groundwater flow paths. This method
is implemented in the region of Dimbokro-Bongouanou (Ivory Coast). In a first step, the methodological approach
consists of spatial analysis of the regional lineaments likely to be related to the fracturing of the basement by means
of combined analysis of radar (Radarsat) and optical (Landsat) images, and then validating these lineaments with the
mean geological data. In the second step, analysis is proposed that enables the role of these lineaments in ground-
water circulation to be identified. This consists of determining the correlation between the major lineament traces
and the location of boreholes. The yield of boreholes is analysed as a function of their distance from the nearest
lineament, which shows that borehole yield decreases proportionally with the distance between the lineament and
high-yield boreholes (discharge greater than 5 m3/h). No correlation between distance to the lineament and low-
yield boreholes (discharge less than 5 m3/h) is noticed. The negative correlation between the productivity of high-
yield boreholes and the distance to the closest lineament confirms that these lineaments are surface traces of regional
discontinuities and act as main groundwater flow paths.
Key words fracturing; radar images; Landsat; regional lineaments; borehole yield; Dimbokro-Bongouanou, Ivory Coast

ISSN 0262-6667 print/ISSN 2150-3435 online

© 2010 IAHS Press
doi: 10.1080/02626667.2010.489749
http://www.informaworld.com
 806 Mahamadou Koita et al.

les puits réalisés au cours de ces campagnes ont

INTRODUCTION
pour objectif le captage des fractures productrices.
Les formations de socle se rencontrent dans toutes les Cependant, malgré les moyens mis en œuvre par l’Etat
parties du monde. Lorsque la porosité primaire de ces Ivoirien, ces programmes connaissent un taux d’échec
formations géologiques est faible, l’écoulement des important et bon nombre de ces ouvrages tarissent ou ne
fluides se produit principalement dans les fractures. satisfont pas les besoins des populations dans certaines
Ainsi, l’étude des écoulements et des processus de localités. Cet échec s’explique principalement par le
transport dans les roches fracturées recueille une atten- manque d’études sérieuses prenant en compte la frac-
tion accrue en raison de son importance dans l’exploi- turation avant l’implantation des ouvrages.
tation des ressources naturelles. Les photographies aériennes qui servent de
L’exploitation de ces ressources naturelles, et plus support pour le relevé de la fracturation ne sont pas
particulièrement des ressources en eau contenues dans d’interprétation facile à cause de la végétation et de
les formations géologiques, débute à partir des années l’épaisse couche d’altération qui masque la roche
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1950 en Afrique de l’Ouest francophone (Archambault, saine. Pour remédier à ces problèmes, plusieurs auteurs
1954; Maillary, 1964). A cette époque, l’essentiel des (Savané et al., 1995; Kouamé et al., 1999; Lasm et al.,
équipements hydrauliques (puits, forages) est mis en 2004; Saley et al., 2005) eurent recours à l’utilisation de
place dans les altérites. Les campagnes d’hydraulique la télédétection passive (par utilisation des images
axent leurs efforts sur: (a) le repérage des niveaux Landsat et SPOT) pour le relevé de linéaments en rela-
aquifères ayant les meilleures caractéristiques hydrauli- tion avec la fracturation dans différentes régions de la
ques; (b) le fonctionnement des nappes d’altérites; et (c) Côte d’Ivoire. L’un des inconvénients majeurs de l’uti-
l’utilisation de la géomorphologie pour le repérage des lisation de la télédétection passive est lié à la qualité
structures géologiques favorables (cuirasse noyée, fosse même des images en zones tropicales humides, du fait
d’altération). Ces études se focalisent alors sur les de conditions atmosphériques conduisant à un ennuage-
altérites par méconnaissance ou sous-estimation du ment fréquent qui rend difficile la détection des
rôle hydraulique de la fracturation dans le socle sain, linéaments. Cette limitation conduit à penser que l’uti-
ou encore par manque de moyens adaptés pour la lisation de l’imagerie radar peut être plus adaptée à la
réalisation de forages profonds. Cette première période, détection de linéaments multi-kilométriques en rapport
dominée par l’exploitation des altérites, est suivie d’une avec les grands couloirs de fracturation, sièges de cir-
période de transition marquée par la reconnaissance culations souterraines. En effet, les plus grandes long-
des aquifères de fissures sous les altérites (Faillat, ueurs d’ondes des bandes radar, par rapport à celles du
1985). Selon cet auteur, cette période débute à partir visible et de l’infrarouge des images optiques, confèrent
de 1966 en Côte d’Ivoire, après une étude régionale à ces hyperfréquences (ondes radar) des propriétés
détaillée de la fracturation et l’utilisation de la particulières en télédétection. En effet, ces grandes
géophysique, qui permet d’implanter des forages à longueurs d’onde peuvent traverser les couches nua-
forts débits (de l’ordre de 18 m3/h pour cinq d’entre geuses, la bruine et la pluie fine, ainsi que la poussière
eux) dans le socle schisteux fissuré de la région de puisqu’elles ne sont pas sensibles à la diffusion
Dimbokro-Bongouanou (Delany, 1965). Malgré ces atmosphérique qui affecte les plus courtes longueurs
résultats encourageants sur l’exploitation du socle schis- d’onde. Cette propriété permet la détection d’objets à
teux fissuré, l’exploitation systématique des aquifères de la surface de la terre dans presque toutes les conditions
fissures ne démarre qu’au milieu des années 1970 suite atmosphériques, le jour ou la nuit, dans un brouillard
aux premiers effets de la sécheresse en Afrique de dense ou un nuage épais (Casasent & Shenoy, 1996). De
l’Ouest, qui entraîne le tarissement de bon nombre plus, l’utilisation des systèmes radar donne la possibilité
de puits villageois et de points d’eau de surface de représenter et de différencier les caractéristiques de
pendant la saison sèche. Parallèlement à cela, les certaines surfaces terrestres peu identifiables dans les
gestionnaires prennent conscience des importantes longueurs d’ondes (visible et infrarouge) des capteurs
disparités géographiques existant dans l’accès à la optiques: glace, vagues, humidité du sol, masse
ressource en eau entre le sud et le nord du pays, d’une végétale, structures géologiques (Lowman, 1991). A
part, et les villes et les villages, d’autre part. A partir de priori, le recours à l’imagerie radar se prête bien à la
cette période, plusieurs programmes d’hydraulique vil- région de Dimbokro-Bongouanou, caractérisée par une
lageoise voient le jour sur la totalité du territoire de la humidité faible du sol due essentiellement à une
Côte d’Ivoire, constitué à 97% de socle. Les forages et évapotranspiration élevée: dans ces conditions, le
 Cartographie des accidents régionaux 807

signal radar peut pénétrer les premiers centimètres du Peltre (1977) et Yao et al. (1990, 1995). La mise en
sol relativement desséché sans une atténuation signifi- place des formations granitiques, qui précède celle
cative (Robinson et al., 2006). Le recours à ces images, des formations volcano-sédimentaires, se produit au
non tributaires des conditions atmosphériques, devrait cours de la phase volcano-tectonique Libérienne
donc permettre de caractériser des linéaments, dont la (2900–2400 Ma).
présence n’a jamais été signalée auparavant, et qui Au Protérozoïque Inférieur, le jeu de failles pro-
pourraient avoir une grande importance d’un point de fondes provoqué par la phase volcano-tectonique
vue hydrogéologique. Eburnéenne (environ 2200 Ma) remobilise les granites
Dans ce contexte, l’objectif de cet article est de de la phase Libérienne et ouvre de longs et étroits sillons
proposer et de mettre en œuvre une méthodologie de subsidents dans la plateforme Libérienne. Par les failles
cartographie des accidents régionaux, basée sur une bordières s’épanchent en milieu marin d’abondantes
analyse combinée d’images radar et optique, afin de laves provenant d’un magma basique. Ces laves for-
déterminer leur rôle dans les écoulements souterrains ment des coulées puissantes associées à des sédiments
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dans les aquifères de socle de la région de Dimbokro- fins. Ces sédiments divers, étroitement liés aux laves,
Bongouanou (Côte d’Ivoire). forment le complexe volcano-sédimentaire.
L’article est structuré autour de trois grandes La phase volcano-tectonique Birimienne (2000–
parties qui abordent respectivement: (a) les contextes 1800 Ma) appelée aussi “étape principale de dépôt”,
géographique et géologique du secteur d’étude; (b) les met en place d’épaisses accumulations détritiques
différentes méthodes mises en oeuvre et les données constituées de conglomérats et de grès. Ce stade
utilisées; et (c) la validation des linéaments issus de d’accumulation suppose une mise en relief et une
l’analyse d’image à l’aide de données géologiques et érosion vigoureuse dues à des mouvements tectoni-
l’identification du rôle des linéaments dans les ques intenses. Ce paroxysme tectonique plisse ensuite
écoulements souterrains. violemment les formations du supergroupe de comble-
ment et transforme cet ensemble en schistes. Ces for-
mations schisteuses ayant subi un métamorphisme peu
intense renferment de nombreuses minéralisations et
ZONE D’ETUDE
constituent les terrains les plus tendres, sous forme de
Située au centre-est de la Côte d’Ivoire, la région grandes étendues monotones. Ces faciès très peu
administrative de Dimbokro-Bongouanou se trouve métamorphisés correspondent essentiellement à
entre les longitudes 3.43 et 4.58
O et les latitudes 6.9 des schistes à tendance argileuse, de couleur grise
et 7.29
N (Fig. 1). Elle couvre une superficie de ou verte passant au vert-jaune suivant le degré
10 360 km2 et concerne les localités de Dimbokro, d’altération de la roche (Maillary, 1964). Ces schistes
Bocanda, Bongouanou, Arrah, Tiémélékro, MBatto affleurent très souvent dans les vallées des rivières
et Anoumaba. importantes. Plusieurs affleurements de méta-arénites
La géologie de la région de Dimbokro est peu de plan de schistosité N20 à pendage 60–70
E sont
connue dans le détail. Néanmoins, la mise en place visibles dans la zone de confluence des fleuves Orogo
des formations de la région est attribuée à la phase et Nzi. Un peu plus en amont à une vingtaine de
volcano-tectonique Birimienne (2000–1800 Ma) dont kilomètres au nord de Bocanda, les formations schis-
l’activité a affecté plusieurs parties de l’Afrique de teuses affleurantes dans le lit du Nzi présentent des
l’Ouest (Côte d’Ivoire, Burkina Faso, Ghana, Niger, structures différentes de celles observées en aval (con-
etc.) au Protérozoïque Inférieur. fluence Orogo-Nzi): schistosités plissées de directions
Les formations de la région sont subdivisées en N20–N30, N10–N15 de pendage 50–60
E. Les axes
deux domaines Birimiens ayant subi des évolutions des plis sont généralement orientés N100–N110.
tectono-métamorphiques différentes (Yao et al., 1995): Toujours dans le domaine schisteux, sur l’axe
(a) un domaine volcano-sédimentaire représenté essen- Dimbokro-Bocanda, un affleurement comprenant sol
tiellement par les schistes Birimiens, qui occupent et altérites sur roches altérées de type méta-siltite est
plus de la moitié de la zone, et (b) un domaine granito- observé sur près de 100 m. Au niveau de ces forma-
gneissique, qui prend une grande extension à l’extrême tions, on note la présence de kaolinite dans les plans de
ouest. schistosité, ainsi que de la montmorillonite à la place
La synthèse de l’histoire géologique très ancienne des strates. Les plans de schistosité ont des orienta-
du site d’étude repose sur les travaux de Tagini (1971), tions comprises entre N30 et N75.
 808 Mahamadou Koita et al.
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Fig. 1 Localisation de la zone d’étude et des affleurements où ont été réalisées des mesures de fracturation durant la campagne
de terrain de 2008.

Sur le plan tectonique, trois grandes phases peu- (failles d’importance régionale) (Yao et al.
vent être distinguées: 1995); et enfin
(c) une phase de compression NO–SE (N130–170).
(a) une phase de compression NNE–SSO (N0–60)
qui explique le rejeu dextre de nombreux acci- D’un point de vue structural, les interprétations
dents N–S comme la faille du Nzi (Adou, 1970; photographiques et géophysiques (cartes aéro
Faillat, 1985); magnétiques), et les études de terrain réalisées par
(b) une phase de compression E–O (N80–100); les Bard (1974) et Yao et al. (1995) ont permis de mettre
accidents correspondant à ce secteur de raccour- en évidence deux accidents majeurs dans les forma-
cissement apparaissent à toutes les échelles tions de la région: (i) l’accident de Dimbokro, et
 Cartographie des accidents régionaux 809

multiphasée, à faible relief d’ensemble et à végétation

peu dense.

DONNEES ET METHODES
Plusieurs types de données ont été utilisées dans cette
étude: une image Radarsat de 2001, une image
Landsat 4 TM du 24 Décembre 1988 (début de la
saison sèche), les caractéristiques des forages (débits,
épaisseur d’altérites, profondeur des forages) réalisés
Fig. 2 Histogramme circulaire de directions en nombre de au cours des campagnes d’hydraulique villageoise
linéaments mesurées sur affleurement pendant la campagne par la direction régionale de l’hydraulique de
de terrain réalisée par Koita en 2008. Yamoussoukro (ville située au centre de la Côte
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d’Ivoire), les cartes géologiques au 1/200 000 des

(ii) l’accident du Nzi. D’autres accidents ont été degrés carrés de Dimbokro (Yao et al., 1995) et de
répertoriés par Delany (1965), Yao et al. (1995) et Mbahiakro (Yao et al., 1990), les données de fractura-
lors de campagnes de terrain réalisées dans la région tion (orientations) mesurées à l’affleurement lors
en 2008. Dans le domaine granitique, les empreintes d’une campagne de terrain réalisée par Koita en 2008
de ces accidents sont plus visibles et se traduisent par et par Delany en 1965. Les principales caractéristiques
de nombreux décrochements sénestres. Dans la partie des images satellitaires utilisées sont présentées dans
ouest du secteur d’étude, plusieurs affleurements d’ex- les Tableaux 1 et 2.
tension importante sur granite sain à biotite révèlent La démarche méthodologique suivie comprend deux
des fractures dont les directions les plus représentées grandes étapes:
(Fig. 2) sont: N–S (N0–10 et N170–180) N40–50,
N90–100, N110–120, N130–140, N150–N170. (a) La première consiste à spatialiser, à partir de
Plusieurs fracturations à pendage subvertical avec l’analyse combinée d’images radar (Radarsat) et
plan de faille illustrant des déplacements sénestres
sont nettement visibles. Les ouvertures varient du
millimètre au centimètre avec des remplissages de Tableau 1 Caractéristiques du système radar.
quartz en certains endroits, surtout au niveau des Système Radarsat
familles de fracturation conjuguées.
Date d’acquisition 2001
En revanche, dans le domaine volcano- Altitude 800 km
sédimentaire, les accidents ne sont pas toujours Bande C
décelables en raison de l’importance de l’épaisseur Longueur d’onde 5.6 cm
Fréquence 5.3 Ghz
des altérites. Dans le nord du site d’étude, les forma- Bande spectrale 3.75–7.5 cm
tions volcaniques affleurantes dans le lit du Nzi Polarisation HH
présentent plusieurs fractures subverticales (Fig. 1). Angle d’incidence 20–46

Résolution spatiale 50 m
D’un point de vue général, cette région est Fauchée 50–500 km
représentative des zones de socle à tectonique

Tableau 2 Caractéristiques des bandes Landsat 4 TM utilisées.

Canal Résolution Domaine Spécificité Résolution
spectrale (mm) spatiale (m)

4 0.73–0.9 Proche infra- Stress de la végétation induit par les phénomènes géologiques, 30
rouge détection d’oxyde de fer
5 1.55–1.75 Moyen infra- Indicateur sur la teneur cartographie en eau des sols et de la végétation, 30
rouge des argiles, indicateur secondaire des altérations hydrothermales
6 10.4–12.5 Infra-rouge Discrimination des roches silicatées et non silicatées contenu en 120
thermique eau des sols, analyse des stress de la végétation
7 2.09–2.35 Moyen infra- Discrimination de certaines roches, telles que l’argile et les micas dans les niveaux 30
rouge silicatés, la kaolinite et la montmorillonite dans les sols
 810 Mahamadou Koita et al.

optique (Landsat), les discontinuités régionales.

Il s’agit ensuite de valider les discontinuités
identifiées sur les images à partir d’informations
géologiques, en comparant les directions des
grandes familles des discontinuités avec les
directions de fracturation relevées sur carte
géologique et sur affleurements.
(b) La seconde étape consiste à déterminer le rôle
de ces accidents majeurs multi-kilométriques
(discontinuités régionales) dans les écou
lements souterrains sur la base de critères
hydrogéologiques et notamment à identifier si
ces accidents majeurs jouent un rôle primordial
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dans les écoulements souterrains. Pour cela les

corrélations entre le débit des forages et leur
distance aux discontinuités majeures sont Fig. 3 Extrait de l’image Radarsat brute (2001) de la région
analysées. A ce niveau, même si toutes les frac- de Dimbokro.
tures présentes dans les formations géologiques
ne sont pas actives (en moyenne 20% des frac- L’expression du modèle de bruit multiplicatif est
tures participent à l’écoulement global d’un donnée par:
réseau fracturé; Chilès & Marsily, 1993),
de nombreux travaux sur les schistes Birimiens zðk; lÞ ¼ yðk; lÞ  uðk; lÞ (1)
(Guiraud, 1975; Guiraud & Lenck, 1975;
Camerlo et al., 1977) ont montré que, lorsque où z(k,l) est la valeur mesurée (intensité ou amplitude)
les forages sont mis en place sur des accidents du pixel (k,l) d’une image radar RSO, y(k,l) sa
majeurs multi-kilométriques, le taux d’échec valeur radiométrique réelle et u(k,l) le bruit,
observé est inférieur à 10%, et les débits obtenus caractérisé par une distribution de moyenne unité
sont souvent élevés. et d’écart type su.
Les filtres basés sur le modèle multiplicatif du
Pré-traitement de l’image radar bruit développés par Lee (1980), Frost et al. (1982)
et Kuan et al. (1985) ont été utilisés. Ces filtres mod-
Les images radar comportent un bruit appelé chatoie- ifient l’image, pixel par pixel, en se basant sur les
ment, qui correspond à un fort bruit multiplicatif né statistiques locales de l’image dans une fenêtre fixée.
d’un nombre élevé d’interférences de répartition spa- Ils sont appliqués avec des fenêtres de tailles variables
tiale désordonnées des réponses de très nombreuses (3  3; 5  5; 7  7; 9  9, etc.) et utilisés d’abord
micro-cibles. Sa présence dans une image dégrade la individuellement, avec différentes fenêtres, puis
résolution radiométrique, réduisant ainsi la possibilité ensuite de manière combinée. Le niveau de réduction
de discriminer les différentes structures (Fig. 3). Cet de bruit le plus satisfaisant a été obtenu avec la com-
aspect granulaire, qui réduit la capacité d’un observa- binaison Lee9-Frost7-Médian3 (Fig. 4). Ce choix a été
teur humain à résoudre les détails fins, est un bruit qui opéré après validation visuelle des images rehaussées
joue un rôle très important en imagerie radar RSO issues des différentes opérations de filtrage.
(Radar à Synthèse d’Ouverture).
En effet, l’interférence entre les différentes ondes
réfléchies par la surface d’un même pixel est respon-
sable de cette granularité. Parmi les nombreuses
techniques mises en œuvre pour éliminer le bruit
dans les images radar, la technique du filtrage est
la plus utilisée et la plus pratique (Yunhan et al.,
2000). Compte tenu du caractère multiplicatif du cha-
toiement, les techniques de filtrage peuvent choisir Fig. 4 Filtres successifs appliqués à l’image radar pour son
ou non un modèle de chatoiement (Lee, 1980). réhaussement.
 Cartographie des accidents régionaux 811

Pré-traitements de l’image Landsat Combinaison de bandes Les combinaisons de

bandes sont des opérations arithmétiques (addition,
Dans cette étude, le recours à l’image Landsat vient en
soustraction et division) appliquées sur les bandes.
complément des traitements de l’image radar, afin
Plusieurs linéaments ont été mis en évidence par les
d’optimiser la cartographie des linéaments de la
combinaisons additives des canaux (TM7 + TM6),
région. En effet, du fait d’une résolution spatiale un
(TM4 + TM6) et le rapport de bandes (TM6 - TM7)/
peu plus fine (30 m vs 50 m pour l’image radar), les
(TM6 + TM7) (Kouamé et al., 1999). L’utilisation de
images Landsat permettent de relever des linéaments
la bande 6 permet de rehausser les subtiles différences
de taille plus petite. Or, bien que les petites fractures
entre les radiations caractéristiques au niveau des
contribuent généralement peu à l’écoulement global,
roches et des sols en tenant compte de leur inertie
elles assurent une connectivité additionnelle permet-
thermique. La détection des propriétés thermiques des
tant l’échange entre les grandes fractures bien
roches et sol est mise en évidence lorsque l’humidité est
connectées et les blocs matriciels environnants
inférieure à la capacité de rétention (Biémi et al., 1997).
(Wu et al., 2004), ou participent à la fonction d’em-
L’utilisation de l’indice (TM6 - TM7)/(TM6 + TM7)
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magasinement du système (Jourde et al., 2002).

permet l’atténuation de l’effet de relief, d’une part,
Les différentes techniques de rehaussement des
et l’accentuation des données complémentaires
images Landsat (compositions colorées, combinaison
provenant de la bande TM7, d’autre part. Les
de bandes, analyse en composantes principales, fil-
différentes combinaisons n’ont été possibles qu’après
trages directionnels etc.) utilisées dans ce présent tra-
le ré-échantillonnage de la bande TM6 selon la même
vail sont celles qui ont permis la détection du plus
résolution spatiale que les autres bandes.
grand nombre de linéaments. Ces techniques s’appui-
ent sur les travaux de Oberg (1992), Bonn & Rochon
(1992), Yesou et al. (1993), Savané et al. (1995) et Transformée de Hotelling La matrice de
Kouamé et al. (1999). corrélation (Tableau 3) montre une forte corrélation
entre les sept bandes de l’image Landsat. La
Composition colorée La composition colorée est transformée de Hotelling plus connue sous le nom de
une image couleur obtenue à partir de trois bandes en l’analyse en composante principale (ACP) a été réalisée
attribuant à chacune d’elles une des couleurs primaires: à partir de l’image TM brute afin de s’affranchir des
rouge (R), vert (V) et bleu (B). Dans le souci d’optimiser redondances et d’améliorer le contraste dans l’image.
l’analyse visuelle et d’adapter les variations de tonalités Cette technique réduit en outre le nombre de bandes à
au système visuel humain, des compositions colorées traiter en comprimant les informations selon une
ont été réalisées à partir des bandes 4, 5 et 7 de l’image hiérarchie. Le résultat des trois premières composantes
Landsat, soit respectivement les bandes du proche (les néocanaux ACP1, ACP2 et ACP3) synthétise
infrarouge (PIR) et du moyen infrarouge (MIR1 et respectivement 80.1, 10.7 et 5.2% de l’information
MIR2). En effet, chacune de ces bandes intègre des contenue dans l’image multispectrale d’origine en sept
informations complémentaires. Ainsi, la combinaison bandes.
des bandes PIR et MIR2 (sensibilité à la vigueur du
couvert végétal) avec la bande MIR1 (sensibilité à la
teneur en eau du sol) fait apparaître plus nettement les Applications des filtres Les filtres directionnels
discontinuités structurales et texturales entre la de type Sobel ont été utilisés pour mettre en évidence
végétation et les accidents géologiques, facilitant ainsi la majorité des structures linéaires sur les images
la discrimination visuelle des linéaments. ACP. Dans le cadre de cette étude, des filtres selon

Tableau 3 Matrice de corrélation des canaux TM de Landsat.

Bandes 1 (Bleu) 2 (Vert) 3 (Rouge) 4 (PIR) 5 (Moyen infrarouge 1) 6 (Infrarouge thermique) 7 (Moyen-infrarouge 2)

Bleu 1 0.95 0.91 0.70 0.82 0.75 0.85

Vert 1 0.92 0.76 0.88 0.78 0.89
Rouge 1 0.54 0.86 0.81 0.91
PIR 1 0.70 0.55 0.61
Moyen infrarouge 1 1 0.79 0.94
Infrarouge thermique 1 0.88
Moyen infrarouge 2 1
 812 Mahamadou Koita et al.

Fig. 5 Synthèse sur les traitements des images radar et Landsat.

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des fenêtres glissantes 3  3 et 11  11 ont été repérés sur l’image radar sont en accord avec la
successivement appliqués aux néocanaux ACP pour fracturation (relevée à l’affleurement et sur carte
accentuer les discontinuités lithologiques et structurales, géologique) des formations géologiques du site
et faciliter la discrimination des linéaments. d’étude. Cette validation est basée sur la comparaison
L’ensemble de ces pré-traitements sur les images des directions des grandes familles de linéaments
radar (filtrage adaptatifs) et Landsat (composition (issus du traitement de l’image radar) avec les
colorée, combinaisons arithmétiques de bandes spec- directions de fracturation relevées (a) sur carte
trales, et néocanaux ACP transformés par des filtres géologique et (b) à l’affleurement (campagnes 1965
directionnels), a permis de fournir des supports visuels et 2008).
complémentaires sur lesquels le travail de photo- L’obtention d’éléments de validation pour les
interprétation des linéaments s’est appuyé (Fig. 5). linéaments est difficile. En effet, toutes les fractures
ne sont pas nécessairement visibles à l’affleurement,
ou sont masquées par un couvert végétal parfois
Extraction manuelle des linéaments par
dense en milieu tropical. A cela, il faut également
photo-interprétation
ajouter le problème d’accessibilité aux affleurements
Avant l’extraction des linéaments, le réseau routier et (pistes d’accès inexistantes). Malgré ces différentes
les fils électriques de haute tension ont été vectorisés à limitations, la validation des linéaments est réalisée
partir de plusieurs cartes administratives calées dans le sur la base de données de fracturations mesurées
même système de coordonnées que les images satelli- à l’affleurement sur différents sites (cf. Fig. 1),
taires. Ensuite, ces différents éléments linéaires d’or- et de données de fracturation relevées sur carte
igine anthropique (routes, pistes, fils électriques et géologique.
téléphoniques) ont été superposés aux différentes L’une des difficultés majeures relatives aux
images photo-interprétées de manière à éviter de les mesures sur affleurement est d’obtenir la longueur
prendre en compte lors de l’extraction des linéaments. complète des traces de fractures, du fait des conditions
La photo-interprétation des linéaments a été réalisée d’affleurement parfois incomplètes et de l’extension
à partir de l’image radar rehaussée issue du filtrage Lee9- de la formation explorée. Si la mesure de la fractura-
Frost7-Médian3 et à partir des combinaisons de canaux tion dans les régions où la roche affleure largement
bruts et des néocanaux complémentaires dérivés de ne présente pas de problème particulier en zones
l’image Landsat. Les discontinuités et les changements tempérées, il en est tout autrement en zone tropicale
brusques de tonalité observés sur les images rehaussées humide où une épaisse couche d’altérite masque sou-
sont représentés par des segments de droite. vent la roche saine. Par ailleurs, il faut noter que la
collecte des données de fracturation sur le terrain
repose sur une démarche d’échantillonnage et d’esti-
Techniques de validation de la carte de linéaments mations statistiques. Se pose donc le problème de la
Une fois la carte de linéaments réalisée, il faut la qualité des informations collectées et de la
valider et donc montrer que les linéaments majeurs représentativité de chaque échantillon.
 Cartographie des accidents régionaux 813

RESULTATS ET DISCUSSION due à la différence de résolution entre les deux types

d’image (50 m pour l’image radar et 30 m pour l’image
Cartographie des linéaments majeurs de la région
Landsat). Cette différence de résolution entraîne la
de Dimbokro-Bongouanou
détection de nombreuses structures de taille relative-
La Fig. 6(a) et (b) présente l’image radar après pré- ment faible sur l’image Landsat contrairement à l’image
traitement par les filtres de rehaussement, et la carte radar. Ainsi, des aspects différenciés du réseau hydro-
des linéaments régionaux issue de ce pré-traitement. graphique particulièrement observables sur l’image
L’image issue de l’application de la combinaison Landsat augmentent la densité des linéaments décelés
des filtres Lee9-Frost7-Médian3 a été retenue après au niveau de cette image. L’analyse de la carte des
validation visuelle parmi plusieurs images issues linéaments issue du traitement des images radar et
d’une multitude de combinaisons de filtres selon Landsat permet la mise en évidence d’un réseau de
différentes fenêtres. linéaments dense dans le secteur d’étude. Cette densité
L’image rehaussée présente plusieurs structures des linéaments est due au faciès très peu
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linéaires de taille et d’orientation variables. Compte métamorphique des roches de la région, propice à la
tenu de la spécificité des images radar (longueur fracturation sous l’effet des contraintes (N’zi, 1964;
d’onde centimétrique, résolution, pénétration dans Berger et al., 1980). Les parties centre-est, est et sud
le sol desséché, etc.), seuls les linéaments multi- de la zone d’étude présentent des densités relativement
kilométriques ont été détectés. Certaines structures fortes par rapport au nord et à l’ouest.
telles que la faille de Dimbokro et l’accident du Nzi
(Fig. 6(a)) y sont nettement visibles. L’accident de
Validation de la carte de linéaments avec les
Dimbokro est un grand accident décrochant orienté
données de fracturation relevées sur affleurement
N20, et lié à la phase de compression cassante,
et sur carte géologique
séparant le bassin métasédimentaire à l’est des forma-
tions granito-gneissique à l’ouest (Yao et al., 1990). La validation du réseau de linéaments cartographiés dans
La carte des linéaments majeurs, obtenue à partir cette étude, avec les données de fracturation relevées à
de l’image radar, est modifiée afin d’y intégrer les l’affleurement et sur carte géologique, est basée sur la
linéaments de moins grande taille issus du traitement comparaison des directions des grandes familles de
de l’image Landsat (Fig. 7). La densité des linéaments linéaments issus du traitement d’images avec: (a) les
repérés à partir de l’image Landsat est nettement données de fracturation relevées sur carte géologique
supérieure à celle des linéaments issus de l’image (Yao et al., 1990, 1995); et (b) les données de fracturation
radar. Cette différence de densité est essentiellement relevées à l’affleurement (campagnes de 1965 et 2008).

Fig. 6 Carte des linéaments majeurs issus du traitement de l’image radar rehaussée.
 814 Mahamadou Koita et al.
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Fig. 7 Carte des linéaments issus du traitement des images radar et Landsat.

Le critère qui a été retenu pour la discrimination (en m) respectives des extrémités du linéament, a la
des familles est l’orientation des fractures et des mesure de l’angle exprimée en radian puis convertie en
linéaments. Afin de prendre en compte chaque degré et notée .
linéament dans la détermination des familles de direc- La Fig. 8 présente les histogrammes circulaires,
tion, l’angle des linéaments a été déterminé automati- en nombre et en longueur, des linéaments issus du
quement sous SIG à partir des coordonnées des traitement d’images et de la fracturation relevée sur
extrémités des linéaments selon l’équation (2): carte géologique. Les directions principales de
linéaments identifiées par traitement d’images sont:
jXEnd  XStart j nord–sud (mise en évidence par les directions N0–10
tan a ¼ (2)
jYEnd  YStart j et N170–180), N30–40, N40–50 et N90–100.
L’analyse de l’histogramme de la fracturation issue
avec XEnd et XStart les longitudes (en m) respectives des de la carte géologique montre que les directions
extrémités du linéament, YEnd et YStart les latitudes nord–sud, N30–40, N40–50 et N120–130 sont aussi

Fig. 8 Histogrammes circulaires en nombre et en longueur: (a) des linéaments issus du traitement d’image et (b) de la
fracturation relevée sur carte géologique.
 Cartographie des accidents régionaux 815

les plus représentées. Les principales directions en outre de valider la méthodologie de cartographie
présentes sur les histogrammes circulaires des des accidents régionaux, basée sur une analyse
linéaments et de la fracturation issue de la carte combinée d’images radar et optique.
géologique sont donc presque identiques. Une
différence apparaît néanmoins au niveau des classes
N90–100 (histogramme des linéaments issus du traite- Rôle des linéaments majeurs dans les circulations
ment d’image) et N120–130 (histogramme de la frac- souterraines
turation relevée sur carte géologique). En effet, la L’identification des fractures contribuant aux
classe N90–100 présente sur l’histogramme issu du écoulements peut se faire sur la base de techniques
traitement d’image est inexistante sur celui issu de la utilisant les directions des paléo-contraintes, des
carte géologique. La classe N120–130 qu’on retrouve données gravimétriques et sismiques (Gaviglio, 1985;
sur l’histogramme issu de la carte géologique est fai- Delaney et al., 1986; Chorowicz & Deffontaines, 1993;
blement représentée sur celui issu du traitement Lacombe et al., 1996). Ces techniques ont été utilisées
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d’image. avec succès dans le fossé du Rhin et ont permis d’iden-

Les principales familles directionnelles de tifier les grandes fractures participant à l’écoulement
linéaments ont été comparées aux principales familles (Chorowicz & Deffontaines, 1993). Dans cette étude,
directionnelles mesurées sur affleurement. Les princi- une fois réalisée la validation des linéaments, nous
pales directions de fracturation sur affleurements proposons d’identifier le rôle des linéaments dans les
(mesurées par Delany en 1965 et par Koita en 2008) circulations souterraines à partir des données de
dans la région de Dimbokro-Bongouanou sont: différents forages. En effet, Andersson et al. (1992)
nord–sud; N45–60; N90–100; N125–140 et N160–170. stipulent qu’en plus de la cartographie linéamentaire,
Parmi les familles de fractures identifiées sur l’histo- il est nécessaire de faire une analyse hydrogéologique
gramme issu du traitement d’image, seule la famille de en vue de l’identification et l’étude d’un certain nombre
direction N125–140 est faiblement représentée. Cette d’indices révélateurs de l’occurrence de l’eau, notam-
faible représentation peut être liée à: (a) un biais statis- ment les phénomènes associés aux zones de recharge: la
tique associé à la mesure de fracturation sur le terrain, persistance du sol humide pendant la saison sèche, la
puisque les fractures affleurent très rarement et de nature lithologique des roches et la densité du réseau de
façon très localisée; et (b) un effet d’échelle lié aux drainage. Dans le cas des fracturations ouvertes, l’oc-
types d’objets considérés pour la détermination des currence de l’eau souterraine devient plus perceptible
familles directionnelles: les grands linéaments (failles) à travers les linéaments visibles associés au
cartographiés à l’échelle régionale peuvent avoir des développement de la végétation (alignement d’arbres)
directions sensiblement différentes de celles des qui devient un indicateur indirect.
linéaments cartographiés à l’échelle locale (fractures) La technique proposée consiste à analyser les
du fait de la perturbation du champ de contraintes corrélations entre le débit des forages et leur distance
associées à la déformation de part et d’autre des failles. au linéament le plus proche. Les forages sont
De plus, des effets de site peuvent exacerber ces dis- discriminés suivant deux classes de débit, la première
semblances: le nombre et la longueur cumulée de correspondant aux 123 forages ayant un débit
certaines familles de fractures mesurées à l’affleure- supérieur à 5 m3/h à l’air lift (forages à fort débit)
ment (échelle locale) peuvent être plus élevés (en et la seconde correspondant aux 215 forages ayant un
pourcentage relatif) que le nombre et la longueur débit à l’air lift inférieur à 5 m3/h (forages à faible
cumulée des linéaments de la même famille, débit). Cette classification (forages à fort débit et à
identifiés à partir du traitement d’images (échelle faible débit) correspond à celle adoptée par le Comité
régionale). Inter-Etats d’Hydraulique (CIEH) en Afrique de
L’adéquation entre les directions principales de l’Ouest (Savané et al., 1995).
linéaments identifiées par traitement d’images et les
directions de fracturation issues de la carte géologique, Corrélations entre le débit des forages et leur
ainsi qu’entre les directions principales de linéaments distance aux linéaments majeurs Les débits des
identifiées par traitement d’images et les directions forages sont généralement faibles. Ils varient entre
principales de fracturation relevées à l’affleurement, 0.1 et 45 m3/h (débit à l’air lift durant la foration).
confirme que les linéaments identifiés sont très vrai- Plus de 50% des forages ont un débit inférieur à
semblablement associés à la fracturation. Ceci permet 2 m3/h. Sur près de 800 forages réalisés dans la
 816 Mahamadou Koita et al.
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Fig. 9 Positions des linéaments majeurs ainsi que des forages à fort débit et à faible débit.

région, seuls 123 ont un débit supérieur ou égal à (Neves & Morales, 2007) et à Sunnfjord à l’ouest de
5m3/h. L’analyse des corrélations entre linéaments Norvège (Henriksen & Braathen, 2005).
majeurs et forages consiste dans un premier temps à Les distances (ligne droite la plus courte perpendi-
localiser tous les forages (forages à fort débit et à faible culaire au linéament) de chacun de ces forages (forages
débit). Dans un second temps, la carte contenant ces à fort débit et forages à faible débit) au linéament le plus
forages a été superposée à celle des linéaments proche ont été calculées afin d’apprécier l’évolution du
majeurs (Fig. 9). Cette superposition montre que la débit en fonction de la distance entre forage et
plupart des forages à fort débit sont sur ces linéaments linéament. D’autres paramètres jugés comme étant des
majeurs ou à proximité de ceux-ci. En revanche, les indices de productivité ont également été pris en compte
forages à faible débit ne présentent pas d’organisation dans l’analyse du débit: la profondeur du forage (Pf) et
particulière par rapport aux linéaments (Fig. 9). Il est à l’épaisseur des altérites (Ep).
noter que dans certaines zones où sont identifiés des La matrice de corrélation déterminée pour
forages à fort débit, sont également présents des différentes caractéristiques des forages à fort débit
forages à faible débit, ce qui tend à démontrer que la (Tableau 4(a)) montre qu’il existe une corrélation posi-
productivité des forages est localisée et non associée à tive relativement significative entre le débit et le
une zone de socle étendue, dans laquelle les circula- paramètre épaisseur d’altérites (0.36). La corrélation
tions souterraines et la productivité seraient quasi- entre débit et distance est négative (–0.24). Le débit
généralisées. Des cas similaires (forages à faible évolue de façon inversement proportionnelle à la dis-
débit à proximité de forages à fort débit) sont connus tance, et de manière non linéaire, ce qui a également
dans le bassin de la Rivière Jundiaí au sud-est du Brésil été identifié sur d’autres massifs granitiques du sud de
 Cartographie des accidents régionaux 817

Tableau 4 Corrélation entre position et caractéristiques des stoppée dès que le débit de succès est obtenu en
forages: (a) forages à fort débit (débit > 5 m3/h) et négligeant d’éventuelles venues d’eau plus profonde;
(b) forages à faible débit (débit < 5 m3/h). plus la zone d’implantation est favorable, moins la
Variables Distance Pf Ep Débit profondeur du forage risque donc d’être importante.
Dès lors, d’éventuels apports d’eaux plus profondes
(a)
Distance 1 qui pourraient contribuer à un débit plus important ne
Pf 0.1 1 sont pas exploités. De même, la recherche du débit de
Ep 0.2 0.51 1 succès dans une zone peu favorable peut conduire à la
Débit -0.24 0.11 0.36 1
prolongation du forage jusqu’à la profondeur d’arrêt,
(b) et même au delà, sous diverses considérations telles
Distance 1 que la nature lithologique, d’éventuelles faibles
Pf -0.04 1
Ep -0.06 0.36 1 venues d’eau, l’expérience acquise, une impression
Débit 0.06 -0.03 0.02 1 favorable, auxquelles on pourrait ajouter les “press-
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ions et encouragements” des villageois (Faillat, 1985).

La matrice de corrélation déterminée pour
différentes caractéristiques des forages à faible débit
la France (Pistre et al., 1995). Cette corrélation (Tableau 4(b)) révèle une corrélation non significative
négative entre débit et distance permet d’affirmer (0.06) entre le débit et la distance. Cette absence de
que ces accidents majeurs d’échelle régionale sont le corrélation entre distance et débit pourrait être liée
siège de circulations souterraines importantes. Ces au fait que ces forages à faible débit captent des
accidents verticaux ou subverticaux du socle ont une systèmes de joints mineurs qui ont une liaison hydrau-
influence sur le comportement hydrodynamique des lique faible ou quasi-inexistante avec les linéaments
aquifères de la région de Dimbokro-Bongouanou. majeurs. En outre, cette corrélation confirme le fait
D’autres auteurs (Wyns et al., 1999, 2004; Dewandel que les circulations souterraines et la productivité du
et al., 2006; Durand et al., 2006) ont, en revanche, socle fracturé ne sont pas généralisées et sont vraisem-
montré que sur les formations granitiques, la fractura- blablement liées aux discontinuités majeures. La
tion du socle est verticale et très localisée. corrélation entre débit et épaisseur d’altération est
Contrairement au résultat obtenu dans la région de très faible (0.02), ce qui traduit le fait que les forages
Dimbokro-Bongouanou, ces auteurs ont observé que à faible débit sont situés dans des zones où l’épaisseur
l’essentiel de l’écoulement dans ces formations grani- d’altération est limitée ou nulle.
tiques est assuré par les fissures horizontales de la Les forages à fort débit ont des profondeurs
couche fissurée au dessus du socle fracturé et dont la généralement situées dans les classes [40 m; 70 m] et
genèse serait liée à l’altération de la biotite. >70 m et des épaisseurs d’altérite situées dans les
La corrélation entre débit et épaisseur d’altérites classes [0 m; 10 m[ et >25 m. Près de 51% des forages
traduit le fait qu’une couche d’altération épaisse est à fort débit ont une épaisseur d’altération supérieure à
généralement présente dans les localités où les forages 25 m (Tableau 5).
à fort débit sont implantés. L’épaisseur importante des Afin de mieux caractériser l’évolution du débit
altérites aura un effet favorable sur la fonction capaci- des forages à fort débit en fonction de la distance aux
tive de l’aquifère d’altérites (et donc la pérennité du
débit) ainsi que sur la fonction drainante de l’aquifère
de fissure en relation avec les linéaments majeurs
(ce qui conditionne le débit maximum instantané). La Tableau 5 Fréquence (%) des forages à fort débit par classe
de profondeur et d’altération.
corrélation entre débit et profondeur est faible (0.11),
ce qui semble montrer que la profondeur totale du Profondeur [0; 20[ [20; 30[ [30; 40[ [40; 70[ >70
forage influe peu sur la productivité. L’absence de totale (m)
corrélation significative entre débit et profondeur des Epaisseur
forages pourrait être liée à la stratégie de foration et d’altérite (m)
[0; 10[ 0.0 1.7 0.9 17.0 4.2
d’implantation. En effet, pour tout programme d’hy- [10; 15[ 0.0 0.9 0.9 5.9 3.4
draulique, il est généralement fixé un débit de succès [15; 20[ 0.0 0.0 1.7 2.5 0.9
et une profondeur d’arrêt en fonction du financement [20; 25[ 0.0 1.7 7.6 0.0
et des besoins à satisfaire. Ainsi, la foration peut être >25 0.0 0.0 38.1 12.7
 818 Mahamadou Koita et al.

linéaments, nous avons considéré tous les linéaments Tableau 6 Données forage–linéament–débit–distance utilisées
ayant au moins deux forages à fort débit à proximité. pour l’analyse productivité–distance.
Une analyse détaillée de l’évolution du débit en fonc- Linéament Forage Distance (km) Débit (m3/h)
tion de la distance (Tableau 6) a donc été effectuée
pour chaque linéament comprenant au moins deux A A1 0.46 14
A2 0.83 11
forages à fort débit dans son voisinage (Fig. 10). B B1 0.06 7.7
Cette analyse détaillée ne concerne que les forages à B2 0.90 5.6
fort débit situés à une distance inférieure à 1 km des C1 0.23 6
C C2 0.36 5
linéaments. Onze linéaments de taille et d’orientation C3 0.36 5
variables ayant au moins deux forages à fort débit dans D D1 0.87 7
leur voisinage répondent à ce critère de distance D2 0.40 6
E1 0.09 10.8
(1 km). Les forages à faible débit ne sont pas retenus E E2 0.24 6.2
pour cette analyse en raison de l’absence de corrélation E3 0.66 6
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entre distance au linéament et débit. F F1 0.08 13.5

F2 0.42 6
Le Tableau 6 montre que, pour ces forages à fort
G G1 0.11 6.4
débit, plus le forage est proche d’un linéament et plus G2 0.25 5.4
son débit est important. Le calcul du coefficient de H1 0.22 20
corrélation considère implicitement que tous les acci- H H2 0.30 7.4
H3 0.78 7
dents majeurs ont le même rôle dans les circulations I I1 0.44 6.4
souterraines. I2 0.76 6.2
Les forages à fort débit situés à proximité des J1 0.50 11
J J2 0.60 7.2
accidents majeurs captent ces derniers par l’inter J3 0.94 5.4
médiaire d’accidents secondaires situés dans leur envir- K1 0.03 11.5
onnement immédiat. Même si ces fractures secondaires K K2 0.10 8
K3 0.13 5.4
ne participent pas à l’écoulement global de l’aquifère,

Fig. 10 Cartographie des forages à fort débit (débit >5 m3/h) et des linéaments utilisés pour l’analyse productivité–distance.
 Cartographie des accidents régionaux 819

elles permettent une certaine connectivité entre les proche, a montré que les linéaments détectés à l’aide
forages et les accidents majeurs (Wu et al., 2004). Plus de la méthodologie cartographique proposée sont les
ces fractures secondaires seront nombreuses au voisi- expressions surfaciques des accidents majeurs de la
nage du forage, plus la connectivité hydraulique entre région et que ceux ci jouent un rôle primordial dans les
forage et accident majeur sera importante, ce qui peut se écoulements souterrains de la région de Dimbokro.
traduire par une augmentation du débit. En revanche, la Compte tenu de sa rapidité de mise en œuvre, cette
diminution du débit avec la distance peut se traduire par méthode appliquée avec succès à la région de
une diminution de la densité de fractures secondaires, et Dimbokro-Bongouanou (Côte d’Ivoire) pourrait être
donc de la connectivité entre le forage et l’accident employée sur d’autres sites en zone de socle où des
majeur. données sur les programmes d’hydraulique villageoise
sont disponibles. Pour les futurs programmes d’hy-
draulique villageoise, la cartographie de ces accidents
CONCLUSION
régionaux et le positionnement des nouveaux forages à
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L’utilisation d’une image Radarsat dans la région de proximité de ces accidents permettront d’obtenir
Dimbokro a permis de développer une méthodologie d’avantage de puits à productivité élevée.
de cartographie de plusieurs accidents majeurs et de
mettre en évidence leur rôle primordial dans les circu- Remerciements Les auteurs souhaitent remercier
lations souterraines, sur la base de critères les relecteurs R. Caloz, G. de Marsily et
hydrogéologiques et géologiques (données des B. Deffontaines dont les commentaires pertinents ont
forages). La combinaison de trois filtres (Lee9- largement contribué à la finalisation de cet article. Les
Frost7-Médian3) a été retenue après validation remerciements vont également à la Direction de
visuelle pour rehausser l’image et permettre d’identi- l’Hydraulique Villageoise de Yamoussoukro et au
fier les linéaments principaux par photo-interprétation. Centre de Cartographie et de Télédétection (CCT) à
Cette analyse a été complétée par la détermination des Abidjan qui ont fourni les données des différents
linéaments secondaires identifiés à partir d’imagerie forages réalisés sur le site d’étude ainsi que les
optique Landsat. Les différentes familles direction- images satellitaires.
nelles issues de l’analyse des histogrammes sont en
accord avec le schéma de fracturation de la région. Ces
familles s’inscrivent également dans la gamme des
REFERENCES
familles directionnelles de fracturation observées sur
affleurements et figurant sur la carte géologique. Ce Adou, A. (1970) Reconnaissance hydrogéologique dans la Région de
résultat a permis de valider la méthodologie de carto- Dimbokro. Projet Mammouth, Mémoire de la Société de
Développement des Mines en Côte d’Ivoire, n
9, Abidjan,
graphie des accidents régionaux, basée sur une analyse Côte d’Ivoire.
combinée d’images radar et optique. Andersson, C. (1992) Remote sensing as a tool in groundwater assess-
L’identification du rôle des linéaments identifiés ment. Hydrogéologie 1–2, 93–99.
Archambault, J. (1954) Données et problèmes d’hydrogéologie en
dans les circulations souterraines a consisté en la Côte d’Ivoire. Rapport de mission, BURGEAP, n
R174 F,
représentation des linéaments détectés et des Direction de l’Hydraulique, Abidjan, Côte d’Ivoire.
différents forages sur une même carte. Cette carte Bard, J. P. (1974) Les grands accidents du craton ouest-Africain en
Côte d’ivoire, des décrochements post-éburnéens. C.R. Acad.
résultante a montré que la quasi-totalité des forages à Sci. Paris 278, 2609–2611.
fort débit est située à proximité (moins d’un kilomètre) Berger, J. (1980) Etude des ressources en eaux souterraines dans une
des linéaments identifiés par l’analyse combinée région de socle cristallin: “la Boucle de cacao” en Côte d’Ivoire.
d’images radar et optique. Bull. BRGM. Sér. II. Sect. III. 4, 335–338.
Biémi, J. (1997) Positionnement, productivité et gestion des forages en
L’étude détaillée des corrélations spatiales, entre milieu fissuré de Côte d’Ivoire par télédétection et système d’infor-
forages à fort débit et linéaments pris individuelle- mation géographique. Atelier de la FAO sur Télédétection et
ment, a permis de constater que plus un forage à fort ressources en eau, Montpellier. Séries Water Report 16. Available
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