Plaisir Ou Espace D'engagement ?: La Littérature Africaine Pour Le
Plaisir Ou Espace D'engagement ?: La Littérature Africaine Pour Le
Plaisir Ou Espace D'engagement ?: La Littérature Africaine Pour Le
Dr Cécile Dolisane-Ebosse*
Abstract:
Introduction
*
CécileDolisane-Ebossè est Chargée de Cours à l'Ecole normale supérieure de Yaoundé.
Dr Céline Dolisane-Ebosse
1
1ercongrès des écrivains et artistes noirs, Paris, 1956 suivi du colloque « Le critique africain
comme producteur de civilisation », Yaoundé, Actes de colloque, Paris, Présence africaine, 1973.
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Pour Alexandre Biyidi, lorsque Laye parle de totem « il ferme obstinément les yeux sur les
problèmes cruciales… » in Présence africaine « Chronique des écrivains noirs », 1954, p.133.
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La littérature africaine pour le plaisir ou espace…
dire son héritage culturel, racines inamovibles. L’on le décèle aisément dans
Bogam Woup de Pabe Mongo ou dans l’homme Dieu de Bisso d’Etienne Yanou
ou encore dans Quand saigne le palmier de G. Charly Mbock. Cette mise en
exergue de la culture camerounaise sans le respect des canons du roman
classique a valu à ces romans la dénomination d’ethnolittérature ou de la
paralittérature3.
En fait, dans le psychisme africain le griot fait tout et l’écrivain negro-
africain a ce souci de ne point dissocier le signifiant du signifie au sens ou
l’entend le critique ivoirien B. Kotchy, adepte de la socio- critique :
« En Afrique on ne dissocie pas le signifiant du signifié, les divers signes
linguistiques, musicaux, vestimentaires, chorégraphiques, etc, sont en rapport avec
l’histoire, l’écologie ou la vision des groupes sociaux d’origine… » (Kotchy,61).
La parole negro-africain en tant que parole totalisante, peut alors, tour à
tour, être un lieu de distraction et riche d’enseignements à la fois. Entre l’art du
dire et du bien dire, l’orateur négro-africain peut chercher à séduire, à émouvoir
et à railler l’auditoire. Le joueur du Mvet tel que nous le présente S.M. Eno
Belinga évolue entre le sacré et le profane, l’activité ludique et le magico-
religieux étant alors inextricablement liés. Même si le parolier moderne écoute
de moins en moins les salves de la lyre ancestrale, il réside toujours en lui, les
estampilles de cette culture de la magie de la parole.
Cependant si les adultes sont soucieux des problèmes brûlants de
l’Afrique, celles qui se posent avec acuité, les jeunes ont surtout besoin de loisir
et de détente, de se découvrir et de s’ouvrir au monde, d’où le BD africain,
Planètes jeunes dirigé par Kidi Bebey et la montée fulgurante de la littérature de
jeunesse effectuée par Afredit. A l’image du petit prince de Saint- Exupéry,
l’enfant doit enrichir son imaginaire de fables, de ces genres dits mineurs afin
de se doter de créativité. Il doit se mouler dans un monde de rêves, d’extase, de
joie et d’insouciance susceptible d’enrichir son imagination4. Un enfant ne
saurait aborder la vie dans la morbidesse, de peur de s’exposer au trauma
psychique avec les conséquences insoupçonnées. Le livre devient, dans le cas
précis, un lieu d’évasion et de loisir. Ce qui est tout le contraire de l’adulte
camerounais, conscient de la déliquescence son milieu. Ce dernier, en lecteur
plus exigeant, a besoin, d’une manière générale, d’une littérature de la prise de
conscience :
3
La particularité de cette littérature c’est de s’enraciner dans le terroir sans aucun souci ni
mimétisme du roman classique français, ce qui choque parfois les puristes ou les ténors de la
pensée coloniale.
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Saint-Exupéry, A. Le petit Prince, Paris,
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Dr Céline Dolisane-Ebosse
II-1 La dénonciation
II-2 La revendication
Face à une Afrique qui a perdu son code, paupérisée, laminée par les
nations hégémoniques et qui se cherche, le lecteur négro-africain a besoin
d’ancrage. L’écriture doit rétablir l’ordre, restaurer les bases brouillées par
l’occident mercantile afin de se bâtir un projet de société. Pour cela Werewere
Liking prône l’enracinement. Ce recours à la tradition comme plan de sauvetage
pour l’Afrique ne signifie guère une tentative de fossilisation mais est
déterminant pour sa survie en ce sens que le continent recèle des trésors cachés
que les Africains eux- mêmes ignorent ou feignent d’ignorer. Il faut alors
pouvoir puiser à la source, l’énergie re dynamisante. Car « les grands arbres
enfoncent profondément leurs racines au sol avant de s’élever majestueusement
au ciel » (L’amour,59). Ceci dit, les valeurs primordiales cultivent en l’Africain,
l’endurance, le courage et l’assurance de soi au point que les Camerounais
s’accordent avec cette assertion d’Alexandre Dumas fils lorsqu’il s’accorde à
croire que «toute littérature qui n’a pas en vue la moralisation, l’idéal, l’utile
en mot, est une littérature rachitique et malsaine…née morte.» (Dumas,216).
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Dr Céline Dolisane-Ebosse
Conclusion
6
Cathérine Ndiaye dans Gens de sable, Paris : P.O.L., 1984. P. 64. et Toni Morrison,
“Rootedness. The ancestors as fondation”, Black women writers, ed. Marie Evans, 1984.
7
François Mauriac, Le romancier et ses personnages, Paris, Gallimard, 1970, p. 9.
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La littérature africaine pour le plaisir ou espace…
significative que lorsqu’elle requiert un sens, c’est- à-dire un référent social sans
lequel, il resterait sans objet si l’on l’ampute de tout contenu ou dimension
humaine. Le roman ainsi devenu signe de l’histoire et résistance à la fois en vue
de vaincre le destin, nous clorons notre propos avec le tunisien Albert Memmi
en ces termes : « Le refus du colonisé ne peut être qu’absolu, c’est- à- dire non
seulement révolte, mais un dépassement de la révolte, c’est- à- dire
révolution»8.
Bibliographie sommaire
I- Oeuvres de référence
Beti Mongo, Ville cruelle, Paris, Présence africaine, 1954, (sous le pseudonyme Eza
Boto).
• Perpétue ou l’habitude du malheur, Paris, Buchet/Chastel, 1974.
• Ruine presque cocasse d’un polichinelle, (Remember Ruben II), Paris, Ed.
des Peuples Noirs, 1979.
• Trop de soleil tue l’amour, Paris, Julliard, 1999.
• Branle-bas en noir et blanc, Paris, Julliard, 2000.
Beyala, C., C’est le soleil qui m’a brûlée, Paris, Stock, 1987.
• Tu t’appelleras Tanga, Paris, Stock, 1988.
• Seul le diable le savait, Paris, Pré aux Clercs, 1990.
• Liking, Werewere, Orphée Dafric, Paris, Presence Africaine,1979.,
• Elle sera de jaspe et de corail, (journal d’une misovire…), Paris, l’Harmattan,
1983.
• L’amour- cent- vies, Paris, Publisud, 1988.
Biyidi, A., « l’enfant noir » in Présence africaine, n°16 (série de n°spéciaux) Chronique
des écrivains noirs, 1954.
Colloque «Le critique africain comme producteur de civilisation», Yaoundé, Actes de
Colloque, Paris, Présence africaine, 1973.
Congrès des Ecrivains et Artistes Noirs, Paris, 1956.
Eno Belinga, S. M., Comprendre la littérature orale africaine, Les classiques africains,
Issy- les-Moulineaux, 1978.
Kane, Mohamadou, Roman africain et tradition, Dakar, NEA, 1983.
B. Kotchy, « Socio-critique : littérature et contexte culturel », REVUE D’ETHNOLOGIE,
n°2-3, 1980, pp. 61-65.
Memmi, A., Portrait du colonisé, Paris, Payot, 1973.
Ndiaye, C., Gens de sable, Paris : P.O.L., 1984.
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Albert Memmi, Portrait du colonisé, Paris, Payot, 1973, p. 174.
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Toni Morrison, “Rootedness. The ancestors as fondation”, Black women writers, ed.
Marie Evans, 1984.
III- Autres ouvrages ayant une relation directe avec notre recherche
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