Réflexions Sur Le Polythéisme Romain Au Prisme05
Réflexions Sur Le Polythéisme Romain Au Prisme05
Réflexions Sur Le Polythéisme Romain Au Prisme05
polythéisme romain au
prisme d’une petite divinité :
Rumina, la déesse de la
mamelle allaitante
Francesca Prescendi
p. 153-164
Le nom
• 2 Perfigli 2004, 95-96.
• 8 Sur cette gens et sur Romulus comme nom propre, voir aussi de
Simone 2006.
• 9 Schultze 1991.
5Une autre piste explicative pourrait être celle qui conduit vers le
toponyme du Tibre, Rumon, attesté par Servius (Commentaire à
l’Énéide, 8.63 et 90). Rumina serait ainsi une divinité portant le
nom d’un lieu, phénomène connu pour d’autres divinités
romaines (voir par exemple Palatua qui tire son nom du Palatin12)
et certainement dans d’autres régions de la Méditerranée antique
(Grèce, Proche-Orient13). Dans le cas de Rumina, cependant, cette
hypothèse n’est pas suggérée par les documents antiques.
• 14 Lors de mes recherches linguistiques sur ce terme, je me suis
aperçue cependant d’une aporie : la (...)
Lieu de culte
• 15 Plut., quaest. Rom., 57 (trad. J. Boulogne, Paris, 2002,
modifiée).
Les offrandes
• 21 Varro, rust., 2.11.5 (trad. C. Guiraud, Paris, 1985).
La potestas de la déesse
• 30 Cf. Perfigli 2004, passim.
• 55 Bettini 2017.
Conclusion
• 56 À commencer par Usener 1948.
33En premier lieu, nous nous rendons compte que Rumina, une
des divinités que nous appelons “divinités fonctionnelles”,
ou Augensblickgötter (“dieux de la durée d’un clin d’œil”) ne
consistent pas seulement en un “nom parlant”, comme nous
pourrions le penser si nous ne connaissions que les passages des
Pères de l’Église. En effet, des auteurs comme Varron et Plutarque
montrent qu’un sanctuaire lui est dédié, où se déroule une activité
cultuelle impliquant des sacrifices sanglants. En sus, le sanctuaire
de cette “divinité fonctionnelle” n’était pas si exclusif que nous
pourrions l’imaginer. Il était en effet fréquenté par des acteurs
sociaux variés, comme les femmes et les bergers. Tout en
exerçant une fonction précise, les divinités mineures peuvent
donc aussi intervenir dans des secteurs différents de la société.
Enfin, des divinités comme Rumina, dont le culte ne représente
peut-être pas une priorité à la fin de la République et au début de
l’époque impériale (Sénèque, cité par Augustin, affirme que “ce
culte repose plus sur la coutume que sur une réelle nécessité”57),
sont cependant récupérées dans le patrimoine mythique de la
fondation de Rome. Cela démontre l’importance qu’elles exercent
dans l’imaginaire des Romains, importance qui ne s’estompe pas
non plus chez les Pères de l’Église, pour lesquels ces divinités
mineures sont des pierres angulaires pour déconstruire le
système polythéiste. C’est en effet en se basant sur celles-ci que
des auteurs comme Augustin critiquent la dispersion du pouvoir
divin en plusieurs puissances divines et le jeu entre l’un et le
multiple.
NOTES
1 Je remercie M. Bettini et les doctorant·e·s du centre d’Anthropologie
du monde Antique (AMA) de Sienne pour nos échanges à propos de cet
article.
5 Varro, rust., 2.1.20 : tertia res est, <in> nutricatu quae obseruari
oporteat, in quo quot diebus matris sugant mammam et id quo
tempore et ubi ; et si parum habet lactis mater, ut subiciat sub alterius
mammam, qui appellantur sub[g]rumi, id est sub mamma. antiquo
enim uocabulo mamma rumis, ut opinor (“le troisième point concerne
les préceptes à observer en matière de nourrissage, entre autres
pendant combien de jours ils tèteront le pis de leur mère et ce, à quel
moment et où ; et si la mère a trop peu de lait, qu’on mette les petits
sous le pis d’une autre ; on les appelle subrumi, c’est-à-dire ‘sous le
pis’. Car rumis est, à mon avis (ut opinor), la mamelle selon un ancien
mot” (trad. C. Guiraud, Paris, 1985, modifiée).
8 Sur cette gens et sur Romulus comme nom propre, voir aussi de
Simone 2006.
9 Schultze 1991.
22 Keil 1884.
36 Aug., civ., 4.21 (trad. personnelle). Voir Aug., civ. 4.34. Augustin
critique l’efficacité des divinités fonctionnelles et à propos de Rumina,
il affirme que les fils des Juifs ont pu bien téter même sans connaître la
déesse.
37 Ce passage est cité par Bettini 2017, auquel je renvoie pour cet
aspect.
39 Jupiter Victor avait un temple qui lui avait été dédié par Q. Fabius
Maximus en 295 a.C. pendant la guerre contre les Samnites. Cette
appellation apparaît dans une inscription archaïque sur le Quirinal (CIL,
VI, 438) qui semble indiquer que le siège du temple devait se trouver
là-bas (cf. Wissowa 1912, 123). L’épithète est présente aussi dans
les Fastes d’Ovide à l’occasion du 13 avril (Iuppiter Victor).
50 Scheid 1999.
54 Loraux 1991.
55 Bettini 2017.
AUTEUR
Francesca Prescendi