CCie - MaladeImaginaire - Guide Pedagogiquepdf
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Molière,
Le Malade imaginaire
(édition Nouveau BAC 1re)
GUIDE PEDAGOGIQUE
établi par Nora Nadifi
L’œuvre : présentation
Le contexte historique et culturel ……………………………………………………………………………………2
Des pistes pour entrer dans l’oeuvre………………………………………………………………………………3
La structure de la pièce ………………………………………………………………………………………………………4
Le comique moliéresque ……………………………………………………………………………………………………6
La satire de la médecine………………………………………………………………………………………………………9
La comédie-ballet : un spectacle total …………………………………………………………………………..11
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Classiques & Cie lycée • Le Malade imaginaire • guide pédagogique
L’ŒUVRE
Présentation
La vie de Molière
• Le contexte biographique a également son importance. Lorsque Molière crée sa dernière
pièce, sa renommée est grande. Il dirige la troupe du roi, pour lequel il a déjà créé de
nombreux spectacles. Mais sa récente brouille avec le compositeur Lully, grand favori de la
cour, l'a fait tomber dans une certaine disgrâce : Lully fit des difficultés pour autoriser la
musique du Malade imaginaire, composée par Marc-Antoine Charpentier. Ainsi, la pièce ne
fut pas, comme prévu, représentée devant le roi à Versailles.
• Par ailleurs, Molière est malade depuis de nombreux mois. Il tousse très souvent, difficulté
qu'il tourne à des fins comiques. Contrairement au cas Argan, son état de santé n'est pas
celui d'un malade imginaire, et il meurt le lendemain de la quatrième représentation, le
17 février 1673 (image 3, le fauteuil de Molière). Dans ce chef-d'œuvre, à la fois comédie de
caractère et comédie-ballet, Molière, au sommet de son art, nous purge de notre peur de la
mort et nous enjoint à vivre.
• En classe, le professeur pourra vérifier si la lecture de l'œuvre a été effectuée avec sérieux
par un questionnement oral sous forme de « qui est-ce ? » (faire deviner un personnage de
la comédie à partir de sa description) ou « qui dit… ? » (faire deviner un personnage en lisant
l'une de ses répliques), puis en proposant à ses élèves de réaliser une galerie des
personnages de la pièce pour mettre en évidence leurs caractéristiques, leurs liens entre eux
et leur rôle dans l’intrigue.
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Pour entrer dans Le Malade imaginaire, on peut consacrer une séance à l’interprétation du
titre de l’œuvre, à l'analyse de la liste des personnages et à la présence des intermèdes et
des ballets au sein de la comédie.
Le titre de la pièce
• Le titre est à la fois synonyme de gravité et de légèreté, car il y est question de maladie et
d'imagination. L'alliance de ces deux mots suscite la curiosité. Le déterminant nous indique
que la pièce porte le nom de son personnage principal, désigné par une périphrase : « le
malade imaginaire ». L'article défini nous le présente comme une sorte d'incarnation de cet
état étrange, un type indépassable, un personnage hors du commun, un « cas 1 ».
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La structure de la pièce 1
• Les premiers repérages ont dû permettre aux élèves de découvrir l'alternance des scènes
jouées et des parties chantées et dansées. Il faut donc maintenant les conduire à s’interroger
plus avant sur la construction de la pièce et la progression de l'intrigue. Le tableau de la
structure de la pièce (fiche 1, pages 194-200) constitue un outil précieux pour les élèves qui
pourront y observer clairement l'enchaînement des scènes et la distribution des intermèdes.
• Le premier acte correspond à l'exposition et à la mise en place des deux intrigues
principales qui sont fortement liées : la maladie imaginaire d'Argan et les amours
d'Angélique. L'acte s'ouvre sur une première scène particulièrement originale : le
personnage éponyme y fait son apparition et se livre à ses comptes d'apothicaire en un
« monologue-spectacle » et un « monologue-action à deux voix 2 » qui accumule et fait varier
les gestes d'Argan ainsi que les tons qu'il emploie. Entrent ensuite en scène les personnages
féminins : Toinette dans la scène 2, de façon assez pétulante, Angélique dans la scène 3 et
Béline dans la scène 6. L'intrigue familiale se met en place : Angélique confie son amour pour
Cléante à Toinette qui promet de l'aider, et Béline manœuvre aidée de son notaire afin de
capter l'héritage d'Argan.
• L'acte II est dominé par les péripéties qui s'attachent aux amours d'Angélique, le thème de
la médecine en est l'arrière-plan logique puisque son père est malade et qu'il lui destine un
jeune médecin, Thomas Diafoirus. Cet acte voit donc les autres personnages masculins
entrer en scène (sauf Monsieur Bonnefoy, le notaire qui fait son unique apparition acte I,
scène 7. L'amoureux Cléante apparaît dans la scène 1, déguisé en maître de chant, et reste
en scène jusqu'à la fin de la scène 5 où il est mis en présence de son rival, Thomas Diafoirus.
Les Diafoirus père et fils sont présents aux scènes 5 et 6, pour ne plus revenir. La fin de l'acte
voit Angélique dans une situation critique : elle a éconduit le fils Diafoirus mais a été trahie
par Béline et, sous la contrainte, par sa jeune sœur, qui disent qu'un jeune homme lui a
rendu visite. La dernière scène fait heureusement intervenir Béralde, qui va se révéler un
adjuvant précieux.
• Le troisième et dernier acte poursuite la satire des médecins avec les entrées en scène
successives de MM. Fleurant et Purgon (scènes 4 et 5) : ceux-ci, définitivement écartés, se
voient comiquement relayés par Toinette, déguisée en médecin (scènes 8 et 10). Les
intrigues s'acheminent vers leur résolution grâce aux stratagèmes de Toinette soutenue par
Béralde. L'intrigue amoureuse obtient son heureux dénouement, l'hypocrite Béline est
démasquée, et Argan, décidément incurable, se trouve délivré des médecins parasites pour
en devenir un lui-même, au cours de la cérémonie-spectacle finale.
• Argan est presque toujours en scène, le plus souvent assis, comme l'exige son état, dans
son fameux fauteuil – qui sera aussi l'accessoire principal de la comédie de sa fausse mort.
Les rares scènes dans lesquelles il n'apparaît pas – après une sortie précipitée et comique
vers les toilettes où un besoin urgent l'appelle (I, 3 et III, 1) – mettent Toinette, personnage-
clé, à l'honneur dans son rôle d'adjuvant auprès d'Angélique. Elle reçoit les confidences de la
jeune fille et lui promet son aide (I, 4 et 8) ; elle accueille Cléante, déguisé en maître de
chant (II, 1) ; elle s'assure de l'aide de Béralde pour empêcher qu'Angélique n'épouse
Thomas Diafoirus (III, 2). C'est Toinette encore qui assure la transition entre les deux
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premiers actes avec un premier intermède qui voit Polichinelle lui chanter une sérénade,
tandis que c'est le personnage de Béralde qui assure celle qui lie les actes II et III : le
spectacle des Égyptiens du second intermède est un plaisir qu'il offre à son frère.
• La pièce alterne actes de la comédie et intermèdes, scènes de confrontation et scènes de
complicité, scènes à deux personnages et scènes chorales, dialogues vifs et longs passages
(chant de Cléante et d'Angélique, tirade de Diafoirus), conférant à l'ensemble sa variété et la
vivacité du rythme indispensable à l'efficacité comique.
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Le comique moliéresque1
Le comique naît toujours d'un décalage, d'une sorte d'incongruité. Selon Bergson, le
comique est « quelque chose de mécanique dans quelque chose de vivant 2 ». Celui qui se
comporte de façon absurde ou mécanique suscite le rire car son attitude dérange l'ordre
social, régi par des règles, la rationalité ou le réel. Au XVIIe siècle, celui qui ne se comporte
pas en honnête homme risque d'être ridicule et risible : Argan, monomane obsédé par son
état de santé, en est le strict opposé, et le comique gestuel, farcesque, verbal, burlesque, est
tout entier lié à sa manie.
Le comique visuel
• Le comique repose tout d'abord sur des gestes : ceux d'Argan sont ceux d'un malade
imaginaire fébrile et colérique, tandis que ceux des médecins sont sans doute
grandiloquents et caricaturaux (M. Fleurant entre en scène « une seringue à la main ») et
ceux de Béline, exagérés et faussement affectueux.
• Les gestes hérités de la farce sont sources de comique : cavalcades d'Argan après Toinette
et aux toilettes, bastonnades, sont drôles par leur soudaineté et leur violence « pour rire ».
L'art du mime est également exploité : Toinette fait semblant d'avoir mal (II, 2), mime un
geste filial d'affection et l'attitude paternelle attendrie (I, 5). Les fausses morts de Louison
(II, 8) et d'Argan (III, 12) équivalent à une absence totale de gestes et sont en cela comiques.
• Les déguisements, qui créent des quiproquos, suscitent la joie complice du spectateur.
Cléante en maître de chant et Toinette en médecin sont autant de pieds de nez à l'autorité
abusive d'Argan. Le dénouement met lui aussi le déguisement à l'honneur dans la cérémonie
burlesque au cours de laquelle tous sont déguisés en médecins et acclament Argan, devenu
médecin lui-même.
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folie : « Voilà un bras que je me ferais couper tout à l'heure, si j'étais que de vous » (III, 10,
l. 512-513). C'est qu'Argan est incurable et Molière, juste avant de mourir, veut peut-être
nous faire comprendre qu'à défaut de le guérir, on peut toujours en rire.
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La satire de la médecine1
Molière, humaniste et moraliste, fait prendre conscience aux hommes de leurs propres
folies : folie de l'homme qui, comme Argan, est le jouet d'une passion qui lui fait nier tout
bon sens, l'enferme dans l'égocentrisme et l'éloigne de la vie même ; et folie des hommes
qui se fient aux médecins, comme l’énonce Béralde : « rien de plus ridicule qu'un homme qui
se veut mêler d’en guérir un autre » (III, 3, l. 95-96).
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• À l'acte III, MM. Fleurant et Purgon, dont les noms n'ont cessé de hanter la pièce depuis le
début, tant ils font partie intégrante de l'obsession d'Argan, font enfin leur apparition. Mais
ils vont disparaître de scène aussi vite qu'ils y sont entrés, congédiés pour le bien de toute la
famille. Dans la scène 4, très courte, M. Fleurant arrive une seringue à la main pour
administrer un nouveau clystère à Argan, mais Béralde le renvoie vertement : « Allez,
Monsieur, on voit bien que vous n'avez pas accoutumé de parler à des visages. » (l. 239-240)
Dans la scène qui suit (III, 5), c'est M. Purgon, prévenu par M. Fleurant qu'on refusait son
traitement, qui vient demander des comptes : « Voilà une hardiesse bien grande, une
étrange rébellion d'un malade contre son médecin. » (l. 265-266) Le déterminant possessif
est ici plaisant : on a plutôt l'impression qu'il s'agit du médecin et de « son » malade !
La sagesse de Molière
• Une fois les charlatans congédiés, le salut d'Argan ne peut venir que de faux médecins :
Toinette joue ce rôle avec conviction et incarne la caricature du médecin itinérant face
auquel, pour une fois, Argan se montre quelque peu dubitatif. Finalement délivré de sa
femme et convaincu de l'amour de sa fille, Argan accepte qu'elle épouse Cléante, à condition
« qu'il se fasse médecin » (III, 14, l. 689). Argan demeure donc incurable. Cependant, à la fin,
dès lors que les parasites ont été éliminés, Béralde a une idée : « mon frère, il me vient une
pensée : faites-vous médecin vous-même » (III, 14, l. 696-697). Le ton se fait à nouveau
satirique : « Vous êtes assez savant ; et il y en a beaucoup parmi eux qui ne sont pas plus
habiles que vous. […] En recevant la robe et le bonnet de médecin, vous apprendrez tout
cela. » (l. 704-709) La proposition de Béralde est la seule solution qui permette à Argan de
vivre et à l'ordre familial d'être rétabli : « ma nièce, ce n'est pas tant le jouer, que
s'accommoder à ses fantaisies. » (l. 742-743)
• Béralde incarne ainsi la voix de la sagesse, celle de Molière qui nous livre sa conception de
la médecine de son temps avec lucidité et sincérité. Béralde-Molière déclare ainsi que les
médecins ne savent qu'un « galimatias », c’est-à-dire « un spécieux babil, qui vous donne des
mots pour des raisons, et des promesses pour des effets. » Molière avait raillé les médecins
bien avant Le Malade imaginaire et d'être lui même malade. Reprenant le thème du
médecin ridicule, déjà présent dans l'Antiquité et dans le théâtre italien et espagnol (d'où
sont tirés les sujets du Médecin malgré lui et du Médecin volant), et héritant la sagesse
humaniste (« Le malade a succombé sous le nombre des médecins » écrivit Montaigne),
Molière fait une satire totale et pénétrante, réaliste et informée, de la médecine de son
temps et, à travers elle, nous parle de sa condition d'homme et de la vie même. Béralde
porte la voix de Molière, sa conception humaniste de l'homme et sa conception hédoniste
de la vie.
• Pour conclure, voici le propos d’Antoine Adam à ce sujet :
« Voilà, à le bien prendre, l'exacte portée du Malade imaginaire et voilà par où il se
rattache au projet d'une comédie dirigée contre la Faculté de théologie. Cette terrible
satire, en effet, ne tombe pas seulement sur le corps médical, sur ses routines, son
respect des formalités, son ignorance prétentieuse. Elle ne tombe pas seulement sur la
médecine. Elle atteint, elle enveloppe la scolastique, la philosophie officielle,
l'aristotélisme des Facultés 1. »
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L’ÉDITION
Classiques & Cie Lycée
À l’occasion de la mise en place du nouveau Bac français, la collection Classiques & Cie a été
entièrement repensée de manière que chaque ouvrage offre aux enseignants une séquence
complète sur l’œuvre et le parcours associé, telle que définie dans les nouveaux
programmes.
Cette édition du Malade imaginaire comprend ainsi le texte de la pièce, associé à une
proposition de parcours « Spectacle et comédie » et à de nombreux autres enrichissements
pédagogiques.
L’avant-texte
Composé des rubriques « Qui est l’auteur ? », « Quel est le contexte ? » et « Pourquoi vous
allez aimer cette pièce », l’avant-texte amène l’élève progressivement à la lecture du texte.
Le bilan de lecture
À travers une dizaine de questions simples, ce bilan permet de vérifier que l’élève a perçu et
mémorisé les caractéristiques clés de l’œuvre.
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2. Quelles sont ses autres comédies dans lesquelles il raille les médecins ?
• Molière s'attaque à la médecine et aux médecins dans d'autres pièces antérieures au
Malade imaginaire : Le Médecin volant (farce en seize scènes inspirée du « medico volante »
de la commedia dell'arte, sans doute représentée en 1659), L'Amour médecin (comédie-
ballet en trois actes, représentée en 1665) et Le Médecin malgré lui (comédie en trois actes,
représentée en 1666, où Molière dénonce encore davantage le charlatanisme et la
crédulité).
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• Elles commencent par une expression qui devient consacrée au fil du monologue : « Plus »
suivi de la mention du jour, longue elle-même (« du vingt-sixième », « du vingt-septième »,
« du vingt-huitième »).
• Suivent la mention du traitement donné – ces mentions, toujours plus précises et
alambiquées (jusqu'à la « potion cordiale et préservative » dont est précisée l'exotique
composition) s'allongent au fil du monologue – et l'effet escompté, introduit par la
préposition « pour » suivie d'un ou plusieurs verbes à l'infinitif.
• Elles s'achèvent par la mention lapidaire du coût du traitement.
4. Quels aspects du personnage ces comptes révèlent-ils ?
• Les énumérations nous montrent qu'Argan semble souffrir de maux particulièrement
variés et persistants (« adoucir, lénifier, tempérer et rafraîchir », « un, deux, trois, […] et
douze lavements ») et que ces médecines lui coûtent beaucoup d'argent (« Soixante et trois
livres, quatre sols, six deniers »). Il se montre très attentif à recalculer le tout avec une
exactitude toute rigide. Les commentaires qu'il fait des effets des remèdes qu'il a pris,
comme « on ne voudra plus être malade » (l. 46) ou « Je ne m'étonne pas si je ne me porte
pas si bien ce mois-ci que l'autre » (l. 53-54) révèlent un rapport névrotique à la maladie et
nous éclairent sur le sens du titre de la pièce. L'exagération, le comportement maniaque
d'Argan contribuent au comique de cette scène d'exposition.
5. Relevez les termes qui relèvent du lexique de la médecine : quel est l'effet produit par
leur emploi et leur accumulation ?
• Les termes relevant du lexique médical sont nombreux et certains sont répétés :
– noms : « clystère » (l. 32 et 34), « médecine » (l. 36, 51 et 53), « humeurs » (l. 37),
« potion » (l. 42), « grains de bézoard » (l. 43), « sirops de limon » (l. 43-44), « grenade »
(l. 44), « ordonnance » (l. 44), « lavements » (l. 52 et 53) ;
– adjectifs et participes passés employés comme tels : « carminatif » (l. 32), « clarifié »
(l. 40), « édulcoré » (l. 40), « cordiale » (l. 42), « préservative » (l. 43) ;
– verbes : « hâter d’aller » (l. 37), « chasser » (l. 33 et 37), « adoucir, lénifier, tempérer et
rafraîchir » (l. 41).
• Leur accumulation donne une impression de pédanterie, de fausse science, étrange, peu
rationnelle, et souligne le nombre exorbitant de remèdes pris par Argan.
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IV. Conclusion
9. En vous appuyant sur vos réponses précédentes, montrez que cette première scène
annonce une pièce comique qui fera la satire d'un caractère et d'une profession.
• Dans cette scène d'exposition originale, où l'on voit monologuer un personnage faisant ses
comptes, on découvre le caractère d'Argan : pointilleux, un brin avare, colérique, mais
surtout « malade imaginaire ». L'on découvre que le bonhomme prend des médecines
quotidiennement et qu'il s'agit pour lui d'un véritable mode de vie. Quelle est donc sa
maladie ? Avec tant de remèdes et de lavements, Argan semble plus résistant qu'il ne le
croit.
• Il ne supporte pas non plus d'être seul et éprouve le besoin d'être assisté, surveillé en
permanence, d'être l'objet de soins perpétuels et le centre de l'attention de tous, en
« pauvre malade » qu'il est. Les ordonnances lues dans ce monologue ainsi que les noms des
médecins révèlent la visée satirique de la pièce. Le jargon employé est pédant,
incompréhensible pour le patient, les traitements sont répétitifs, quotidiens, éprouvants,
mais surtout lucratifs pour MM. Purgon et Fleurant.
10. GRAMMAIRE. Relevez puis classez les déterminants numéraux et les adjectifs épithètes
du passage afin de montrer leur rôle essentiel dans ce monologue.
• Les déterminants numéraux sont : « vingt-sixième », « vingt-septième », « vingt-
huitième », « un », « deux », « trois », « quatre », « cinq », « six », « sept », « huit », « neuf »,
« dix », « onze », « douze », « vingt » et « trente ». Ils précisent les jours, les sommes
d'argent et le nombre de médecines et de lavements pris.
• Les adjectifs épithètes qualifient les noms des remèdes dont ils précisent les
caractéristiques ou les effets thérapeutiques attendus : « clystère carminatif », « bonne
médecine », « mauvaises humeurs », « petit-lait clarifié et édulcoré » (participes passés),
« potion cordiale et préservative ».
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11. LECTURE EXPRESSIVE ET JEU THEATRAL. Entraînez-vous à lire ce passage de manière expressive.
N'oubliez pas de nuancer le ton lorsqu'Argan semble s'adresser à MM. Purgon et Fleurant,
d'accentuer l'expression de la colère lorsqu'il appelle ses serviteurs, ni de vous munir
d'accessoires (ordonnances, jetons, écharpe et bonnet, clochette pour la fin de la scène).
• Cette activité permet de s'entraîner à lire pour l'épreuve orale du baccalauréat. Le texte
théâtral n'est pas évident à aborder, surtout lorsqu'il s'agit d'un monologue où un
personnage n'interagit avec aucun autre personnage. L'enjeu de cette scène est de faire
connaître Argan au spectateur. On rappellera aux élèves qu'il ne faut pas lire les didascalies
puisqu'il s'agit d’adapter la lecture selon ce qu’elles indiquent.
• L'installation d'un décor minimaliste peut ici être d'une grande aide : posture assise,
présence de feuillets que lit Argan, de simulacres de pièces à compter, d'une bourse, etc. Les
passages entre guillemets pourront être lus sur un ton plus neutre, les réactions d'Argan
(indignation, colère, soulagement) étant lisibles dans ses apostrophes aux personnages
absents. Il s'agira donc, avant de lire ce texte, de bien identifier les changements énonciatifs
et les sentiments exprimés par Argan.
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IV. Conclusion
9. Pourquoi la relation maître-servante est-elle originale dans cette scène ?
• La relation maître-servante est originale car Toinette affronte véritablement Argan, sans
détours, s'opposant fermement à son entêtement et tentant de le raisonner. Elle déclare
refuser son projet de mariage pour sa fille, s'arrogeant quasiment une place de mère qui
n'est certes pas la sienne. Néanmoins, rappelons-nous que Béline n'est pas la véritable mère
d'Angélique : c'est Toinette qui, en quelque sorte, en fait office. D'ailleurs, sa dernière
réplique constitue un apogée : « je la déshériterai, si elle vous obéit » (l. 401). Toinette a
comme oublié son propre statut. Quels biens Angélique pourrait-elle hériter d'elle ? À moins
qu'il ne s'agisse d'un legs symbolique, celui d'une force de caractère certaine. En effet,
Toinette se montre ici particulièrement résolue, elle n'a pas peur d'Argan et n'hésite pas à lui
parler sur un ton qui n'est pas celui d'une subordonnée (« Bagatelles », l. 366).
10. GRAMMAIRE. Relevez une phrase négative et une tournure impersonnelle dans les
répliques de Toinette puis d’Argan, et montrez que leur emploi permet d’exprimer la
volonté de ces personnages.
• Dans ce passage, les phrases négatives sont :
– « Vous ne la mettrez point dans un convent » (Toinette, l. 343) ;
– « Je ne la mettrai point dans un convent ? » (Argan, l. 344) ;
– « Non. » (Toinette, , l. 345) ;
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11. MISE EN SCENE. Par 2 ou 3, rédigez les didascalies qui préciseront les gestes et
déplacements des personnages, et imaginez une illustration sonore.
• La didascalie initiale de la scène donne une précision importante : « ARGAN se met dans sa
chaise » (l. 202). Ainsi, il se trouve assis pendant la majeure partie de la scène. On peut
imaginer qu'il se lève au moment où une didascalie précise qu'il parle « avec emportement »
(l. 370) : c'est sa colère envers Toinette qui le fait se lever de son siège.
• Dans la première partie de l'échange qui se compose de répliques brèves et vives, on
imagine Argan assis et Toinette, lui faisant face pour lui parler. À mesure que le ton monte,
Toinette peut se montrer de plus en plus assurée (se place en face de lui, les poings sur les
hanches, croise les bras lorsqu'elle répète « non »). On peut penser aussi qu'Argan s'agite de
plus en plus sur son siège avant de se lever et de se mettre à courir après Toinette. Les
didascalies pourraient alors préciser son ton et ses gestes (croisant les bras, levant un doigt
menaçant, tapant du poing sur la table, etc.).
• Pendant cet affrontement, Angélique se trouve tout le temps sur scène mais demeure très
discrète. Les élèves doivent imaginer ce qu'elle peut faire (déplacements, gestes) pendant
cet échange. Assise près de son père, dans une posture sage, on peut lui attribuer quelques
mouvements incontrôlés ou d'humeur, en réaction aux paroles prononcées par son père et
Toinette (levant les yeux au ciel, plaquant la main sur sa bouche, etc.).
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• Cependant, l'emploi de l'adverbe « aveuglément » (l. 242), qui fait suite aux indices
péjoratifs jalonnant la tirade (« peines », « tardifs », « lenteur », « pesanteur »), met en
évidence l'obscurantisme et la vanité des Diafoirus père et fils.
IV. Conclusion
9. En quoi cette tirade constitue-t-elle une satire de médecins tels que les Diafoirus ?
• La satire se fait d'une part à travers l'éloge paradoxal du fils Diafoirus : on a vu que son
père lui reconnaissait certaines qualités, notamment celles qui, selon lui, feront de Thomas
un bon médecin. Cependant ce portrait est essentiellement fait de façon négative, comme
l'attestent les nombreuses négations employées, et Diafoirus dit en creux ce que son fils
n'est pas : ni vif d'esprit ni enjoué dans l'enfance, gardant stupidement le silence, il apprend
à lire avec un grand retard et poursuit des études laborieuses. Une fois licencié, il se fait
remarquer par un esprit obtus et une rigidité que son père approuve et loue puisqu'ils le
caractérisent également.
• Le père, en faisant l'éloge de son fils, est lui-même caricatural. Il pontifie et recourt à des
métaphores pédantes. À travers le duo Diafoirus, ce sont tous les médecins qui sont
moqués. Étroits d'esprit, pratiquant leur art par le discours et la parole plutôt que par la
pratique, orgueilleux et pédants font partie de leurs traits distinctifs.
• Enfin, l'originalité de cette satire réside dans le fait qu’elle est ici faite par celui qui en est la
cible.
10. GRAMMAIRE. Relevez les négations employées dans cette tirade ainsi que l’adverbe
utilisé par certaines d’entre elles et montrez leur efficacité au sein de cet éloge atypique.
• Les négations sont nombreuses et constituent un outil essentiel de cet éloge paradoxal :
« ce n'est pas parce que je suis son père » (l. 210-211), « il n'a jamais eu l'imagination bien
vive, ni ce feu d'esprit » (l. 113-114), « il n'a jamais été ce qu'on appelle mièvre et éveillé »
(l. 217-218), « ne disant jamais mot » (l. 219), « ne jouant jamais » (l. 219), « il ne connaissait
pas encore ses lettres » (l. 222), « ne démord jamais » (l. 238), « jamais il n'a voulu
comprendre ni écouter » (l. 243), etc.
• L'adverbe « jamais », répété à plusieurs reprises, renvoie à la nullité du fils Diafoirus.
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• Caricature Les Poires, d’Honoré Daumier (1808-1879), parue dans le journal La Caricature,
le 24 novembre 1831.
Cette caricature d’Honoré Daumier reflète la
détérioration de la popularité de Louis-Philippe.
Daumier transforme la figure du roi en poire qui
représente la bêtise et la complaisance. Les traits du
visage, déjà bien empâté, s'affaissent et
s'estompent, le visage s'amollit pour prendre la
forme d'une poire, créant un effet drôle et
grotesque.
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Clés 4. Argan face au sceptique Béralde. Acte III, scène 3 (p. 122-124)
Béralde est le frère d'Argan, qui apparaît au troisième acte. Il tente de raisonner son frère
quant au sort qu'il réserve à sa fille et à son propre état de santé.
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IV. Conclusion
9. Montrez que l’attitude face à la médecine telle que la dénonce Béralde relève de la
croyance, voire de la superstition.
• Béralde veut démontrer que c'est la crédulité des hommes et leur désir d'échapper à la
souffrance et à la mort qui les poussent à se fier aux médecins. Cette attitude relève de la
croyance, comme l’illustre le lexique qu’il emploie : « pures idées » (l. 152), « [se] repaître »
(l. 153), « imaginations » (l. 154), « flattent » (l. 155), « roman de la médecine » (l. 164-165),
« fortune » (l. 180), « croire » (l. 181), « erreur » (l. 183), « ridicule de la médecine » (l. 189).
• Ces mots et expressions montrent que, pour Béralde, l'art des médecins relève moins
d'une science rationnelle que d’un discours mensonger, qui est pourtant cru et respecté
parce qu'il est d'autorité.
10. Quelle est l’importance d’un personnage tel que Béralde au sein de la comédie
Le Malade imaginaire ?
• Comme souvent dans les comédies de Molière, un personnage raisonnable et tolérant,
sachant argumenter, tient tête à celui qui incarne la manie, la folie, et essaie de lui faire
entendre raison. Béralde argumente solidement, sans animosité et avec calme ; il incarne la
modération, ne juge pas autrui, qu'il laisse libre de ses choix, et une attitude saine face à la
vie et ses aléas, se fiant à la nature, à la vérité et à l'expérience.
• Béralde et d'autres personnages de ce type, comme Chrysalde face à Arnolphe dans L'École
des femmes, portent la parole de Molière qui exprime à travers eux sa propre vision de
l'homme et du monde.
11. GRAMMAIRE. Relevez les tournures emphatiques dans ce passage. Quel est leur rôle ?
• Les tournure emphatiques sont les suivantes :
– « C'est que vous avez, mon frère, une dent de lait contre lui » (Argan, l. 139-140) ;
– « C'est notre inquiétude, c'est notre impatience qui gâte tout » (Béralde, l. 146-147) ;
– « ce sont pures idées, dont nous aimons à nous repaître » (Béralde, l. 152-153) ;
– « ce sont deux sortes de personnes que vos grands médecins » (Béralde, l. 172-173) ;
– « C'est un bon impertinent que votre Molière » (Argan, l. 185) ;
– « Ce ne sont point les médecins qu'il joue » (Béralde, l. 188).
• Ces tournures sont surtout le fait de Béralde qui les emploient pour mettre en valeur ses
convictions. Elles ont alors une véritable efficacité rhétorique. En revanche, les deux phrases
d'Argan qui les emploient ne font qu'émettre des jugements de valeur négatifs, non des
arguments.
12. RECHERCHE DOCUMENTAIRE. Cherchez quelles pièces de Molière portent le nom de leur
personnage principal. Constituez ensuite une galerie de portraits de ces personnages en
proie à leur manie, leur folie.
Molière s'est rendu célèbre par de grandes comédies de caractère dont le succès tient
notamment à la force du personnage qu'elles mettent en scène comme le protagoniste
principal. De nombreuses comédies sont centrées sur un personnage masculin, souvent un
barbon, qui incarne une manie. Nous ne retiendrons ici que les titres qui nomment
explicitement leur protagoniste – et non les pièces telles que L'École des femmes (1662), par
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Le comédien Didier Sandre (né en 1946), qui joue Dom Juan dans la mise en scène de Bernard
Sobel en 1973 (et qui a incarné Louis XIV dans L’Allée du Roi, téléfilm en deux parties réalisé
en 1995 et adapté du roman de Françoise Chandernagor), raconte sa réaction lorsqu’on lui
offre le rôle.
« Lorsque que Bernard Sobel m’a demandé de jouer Dom Juan, la proposition m’a paru
totalement incongrue ! J’avais 25 ans, à mes yeux c’était un rôle de vieux : l’image véhiculée
par les interprétations de Vilar, Jouvet, Piccoli, c’était celle d’un quinquagénaire tourmenté
par le démon de midi 1… Immédiatement, Sobel m’a rappelé que, dans la troupe de Molière,
c’était un jeune comédien, Lagrange, qui incarnait le personnage, lequel n’avait rien à voir
avec le séducteur revu et corrigé par les XVIIIe siècle, XIXe siècle et… Mozart. »
Entretien avec Didier Sandre dans Théâtre Aujourd’hui : Dom Juan de Molière, Métamorphoses d’une
pièce, CNDP, 1995 (source : lelivrescolaire.fr).
1. Allusion au Psaume 91 de l’Ancien Testament : démon qui pousserait l’homme au vice, à la débauche au
milieu de sa vie.
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Clés 5. Quand Toinette se fait médecin. Acte III, scène 10 (p. 138-140)
Argan vient d'être abandonné par ses médecins, M. Fleurant et M. Purgon, pour n'avoir pas
suivi leurs prescriptions. Dans cette scène, Toinette, déguisée en médecin, prend le relais.
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IV. Conclusion
8. Quels types de comique cette scène exploite-t-elle ?
• La situation – Toinette déguisée en médecin – crée un quiproquo car Argan croit avoir
véritablement à faire à un médecin. Le comique de mots, on l'a vu, est largement exploité :
Toinette imite la parlure des médecins, leurs questions incessantes et orientées, leurs avis
péremptoires et leur emploi pédant du latin.
• S'y ajoute le comique de caractère : la crédulité d'Argan est ici évidente, et il se soumet aux
avis… de sa servante, qui n'a aucune compétence médicale. Cette scène prouve les propos
tenus précédemment par Béralde qui soutenait que les médecins sont surtout d'habiles
parleurs.
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• Ainsi, à travers la comédie donnée par Toinette, comédie dans la comédie, la visée
satirique est assurée. La servante n'a aucun mal à contrefaire le médecin ni à duper son
maître, alors qu'elle n'a aucune compétence médicale et n'a aucun scrupule à conclure :
« Votre médecin est une bête » (l. 506-507).
9. Quelles hypothèses cette scène permet-elle de formuler quant au dénouement ?
• Cette scène 10 de l'acte III précède immédiatement le dénouement de la pièce. Argan s'est
vu abandonner par ses médecins attitrés et se trouve ici pris en charge par un faux médecin
qui n'est autre que sa servante. On peut imaginer qu'Argan restera victime de cette nouvelle
illusion, plus bénigne que celle dont il était auparavant épris. Va-t-il se soumettre à ce
nouveau médecin ? Toinette continuera-t-elle à jouer ce rôle auprès de lui ?
• En réalité, le dénouement que nous lirons apparaîtra comme le seul possible : Argan
deviendra, par une cérémonie burlesque, médecin lui-même – et c'est là la sagesse que nous
enseigne Molière à travers son exemple.
11. LECTURE ET REFLEXION D’ENSEMBLE. À plusieurs, faites une recherche sur le déguisement au
théâtre. L’objectif est d’expliquer en quoi l’art du déguisement contribue au comique
d’une pièce et à son caractère spectaculaire.
• Le déguisement au théâtre est une source inépuisable de quiproquo et constitue donc un
ressort comique. Depuis l'Amphitryon de Plaute (187 av. J.-C.) – qui inspira à Molière une
pièce du même nom (1668) – le travestissement nourrit l'intrigue théâtrale et plaît au
spectateur, qui, lui, sait qu'il y a déguisement ou travestissement. Nombre de dramaturges
ont exploité ce type de situation qui suscite souvent le rire complice du spectateur.
• Dans Les Fourberies de Scapin (1671) de Molière, ce dernier invente un type de valet
original, audacieux et sûr de lui. Scapin, héritier de la commedia dell'arte, semble toujours
jouer la comédie au sein même de la comédie. Il est l'auteur et l'acteur de ses propres
machinations, au sein desquelles, véritable metteur en scène, il fait jouer son complice
Sylvestre. Il les mène de main de maître pour servir les intérêts de ceux qui l'émeuvent et les
siens propres ; il tente de paraître honnête aux yeux de son jeune maître alors même qu'il lui
ment ; il contrefait des brigands et leurs accents provinciaux afin de rosser son maître.
• Dans Le Jeu de l'amour et du hasard (1730), Marivaux fait du déguisement une des
conditions majeures de l'intrigue théâtrale. Silvia et Dorante doivent se marier mais sont
désireux de se connaître auparavant. Ils ont la même idée : se déguiser afin de se sonder
mutuellement. Silvia se fait passer pour Lisette, sa servante, et Dorante se déguise en un
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valet nommé Bourguignon tandis que son valet Arlequin se fait passer pour lui. Dialogues et
quiproquos amoureux s'enchaînent à la faveur de cette inversion du rapport maître-valet.
• Dans Le Mariage de Figaro (1784) de Beaumarchais, le travestissement constitue encore
un stratagème. Il va permettre à Rosine de démasquer son époux le comte Almaviva qui fait
des avances à sa suivante Suzanne, pourtant promise à Figaro, le valet du comte. Par ailleurs,
c'est aussi par le déguisement que Chérubin, jeune page au charme duquel la comtesse n'est
pas insensible, tente de revenir au château dont il a été éloigné. Travesti en jeune paysanne,
il est néanmoins reconnu. À nouveau, le déguisement questionne les rapports maître-valet
et la vérité du sentiment amoureux.
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3. Molière est ici représenté dans le rôle d’Arnolphe, personnage de L’École des femmes.
Identifiez-le sur le tableau et décrivez-le. Quelle impression émane de son portrait ?
Molière se trouve à l'extrémité gauche du tableau, au second plan, en retrait derrière
Poisson et devant Jodelet. Il est vêtu comme un riche bourgeois, porte un chapeau noir, un
col blanc et un habit brun. En appui sur sa jambe gauche, il semble désigner quelqu'un de la
main droite ou souligner un propos. Une impression tranquille et investie émane de son
portrait : il semble sourire à son interlocuteur qu'il ne quitte pas des yeux.
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se trouve parmi les brigands – évoque une intrigue romanesque et amoureuse ainsi que le
thème de la fête.
2. Analysez la composition de l’affiche et ses couleurs : que cherche-t-elle à mettre en
valeur afin de susciter l’intérêt des spectateurs ?
La composition triangulaire de l'affiche est soulignée par les couleurs noire, blanche, bleu-
gris, brune et rouge. Les personnages se détachent sur un fond bleu-gris par la blancheur de
leurs costumes, ou leur couleur sombre pour les brigands. Certains éléments de leurs habits
sont rouges, couleur employée pour le titre de l'opéra-bouffe et le nom de son compositeur,
attirant l'œil d'une part sur les fonctions que représentent leurs habits et qui vont les
amener à s'affronter, d'autre part sur le groupe sensuel de femmes dansant.
3. À quoi voit-on qu’il s’agit d’un spectacle ?
Les personnages sont hauts en couleur et leurs postures particulièrement théâtrales : les
deux ennemis dressés l'un en face de l'autre, prêts à l'affrontement, les brigands au corps
replié et le visage tendu en bas à gauche de l'affiche. Le groupe des danseuses renforce cette
impression de mouvement et d'action surprise in medias res.
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Introduction
Dans cette citation, le dramaturge lui-même, Molière, qui est aussi comédien et metteur en
scène, emploie une phrase déclarative à valeur de vérité générale. La tournure restrictive
« ne… que » renforce son propos : le théâtre a pour unique raison d'être et unique but d'être
vu par un public. Il affirme ainsi que le genre théâtral relève avant tout de l'art vivant, ce qui
laisse entendre que le texte d'une comédie ne s'accomplit que par sa mise en scène sous
forme de spectacle 1.
1. La comédie, un art vivant et visuel
• Le texte de la comédie est dit, joué devant un public dans un espace particulier. Les
spectateurs n'ont donc pas affaire à un texte mais à un spectacle : on leur joue une histoire
en leur faisant croire à ce qu'on a appelé l'illusion théâtrale. Les décors, les costumes, la
succession de personnages, de dialogues et de péripéties les plongent dans un univers qui ne
disparaîtra qu'avec la retombée du rideau.
• L'illusion fonctionne grâce à la vraisemblance. La comédie met en scène des personnages
contemporains, des situations familiales, des intrigues amoureuses. Et même lorsque les
personnages sont mythologiques et nobles, que les milieux représentés sont rêvés (Le Songe
d'une nuit d'été), l'émerveillement suscité chez le spectateur garantit à son tour l'illusion.
• La majeure partie des procédés qu'exploite la comédie sont visuels : réalisme ou féérie des
décors et des costumes, déplacements et gestes des personnages qui créent l'illusion de la
vie sur la scène de théâtre.
• Les formes les plus immédiates du comique sont également visuelles : cavalcades,
bastonnades, personnages qui se précipitent ou se dissimulent, se déguisent, chutent ou se
jettent à genoux sont autant d’éléments qui suscitent le rire.
2. La dimension spectaculaire de la comédie
• La variété des décors et des costumes que fait défiler sous les yeux du spectateur
l'enchaînement des scènes contribue à la dimension spectaculaire de la pièce. C'est d'autant
plus vrai des comédies-ballets telles que Le Malade imaginaire qui y déploient une plus
grande variété encore : personnages mythologiques des entrées de ballet, Polichinelle et
Archers dans le premier intermède, troupe de bohémiens dans le second, ballet de médecins
dans le dernier.
1. Pour s’inscrire dans le cadre de l’œuvre et du parcours, nous nous attacherons à analyser le sujet à la lumière
de la comédie.
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Introduction
Par cette affirmation, Molière assigne un but moral à la comédie, a priori peu évident eu
égard à l'essence comique de ce genre théâtral. « Corriger les hommes en les divertissant »
est même selon lui un véritable « devoir », son but essentiel. Le spectacle des défauts et des
vices de l'homme dont rit le spectateur l'amène à adhérer aux valeurs morales qui s'y
dessinent en creux.
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Situation de l’extrait
Dans cette scène, Silvia et Dorante, tous deux déguisés – l'une en servante et l'autre en
valet –, se donnent la comédie l'un à l'autre. Sous ce déguisement qui dissimule leur
véritable identité, chacun veut connaître l'autre avant de l'épouser. Mais à la faveur de ce
double quiproquo se révèlent l'amour mais aussi la crainte d'aimer un subalterne.
1. Un dialogue amoureux
• Dorante est tombé amoureux de celle qu'il croit être Lisette : le champ lexical de l'amour
imprègne ses discours enflammés (« sensible » l. 9, « aimer » l. 12, « cœur » l. 12, « passion »
l. 24). Mais il voit bien que Silvia le repousse. Des termes péjoratifs révèlent sa crainte de lui
déplaire (« faute » l. 1, « reprocher » l. 8, « espérer » l. 11, « hais » l. 16, « affreux » l. 19,
« désespère » l. 24, « dangereuse » l. 25, « sauve-moi » l. 25, « accable » l. 26, « secours »
l. 27). Les phrases exclamatives et interrogatives qu'il emploie trahissent cette crainte et son
impatience de connaître les véritables sentiments de Silvia à son égard.
• Silvia est troublée, les didascalies signalent des apartés qui mettent en évidence l'amour
naissant qu'elle éprouve pour Dorante mais dont elle se défend, le croyant Bourguignon :
« J'ai besoin à tout moment d'oublier que je l'écoute » (l. 3-4) ou « Il ne faudrait pas s'y fier »
(l. 10). Le vocabulaire amoureux est absent de ses répliques, très courtes, destinées à
dissimuler ses sentiments, mais la première personne du singulier et les tournures
impersonnelles y abondent.
2. Un jeu de dupes
• Dorante, censé épouser Silvia, tombe amoureux de Lisette… qui est en fait Silvia. La
condition de celle qu'il aime ne le retient pas et c'est une déclaration désespérée qu'il fait ici
(« hélas ! » l. 12). Il ne comprend pas son rejet (« Que peux-tu me reprocher ? » l. 8).
Comment le pourrait-il ? Pourquoi une servante repousserait-elle un valet qui ne lui déplaît
pas ? Il interroge Silvia avec insistance : « Il est donc bien vrai que tu ne me hais, ni ne
m'aimes, ni ne m'aimeras ? » (l. 16-17). Il ne peut savoir que seule la véritable condition de
Silvia l'empêche de répondre favorablement au sentiment de Dorante. Celui-ci lui demande
de confirmer ses sentiments, dont l'hyperbole nous montre qu'il n'arrive pas à la croire :
« dis-le moi cent fois, que tu ne m'aimeras point » (l. 21-22).
• Silvia répond aux demandes insistantes de Dorante par des propos sibyllins : « il n'est pas si
curieux à savoir que le mien » (l. 6), « quand tu l'aurais, tu ne le saurais pas » (l. 13-14), « ce
n'est pas là ce qui te nuit » (l. 20). Ses réponses se font de plus en plus lapidaires : « Sans
difficulté » (l. 18), « Assurément » (l. 42). Ces deux répliques s'opposent : entre-temps, le
père et le frère de Silvia sont entrés en scène et la crainte d'être reconnue lui fait dire
précipitamment ce que Dorante attendait : « je ne te hais point, lève-toi, je t'aimerais si je
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pouvais, tu ne me déplais point » (l. 36-37). L'aveu est difficile comme le manifestent les
négations qu'elle emploie.
3. Le double plaisir du spectateur
• Le spectateur assiste à un double quiproquo qui donne lieu à un dialogue amoureux. Le
marivaudage met ici en lumière le caractère irrésistible du sentiment amoureux et sa
complexité. La confusion s'empare de Silvia et de Dorante : il ne peut s'empêcher de l'aimer
et, elle, le doit malgré ce qu'elle ressent. L'emploi du conditionnel et de la conjonction de
subordination « si » hésitent à envisager un amour réciproque : « que pourrais-je espérer »
(l. 11), « quand tu l'aurais, tu ne le saurais pas, et je ferais si bien que je ne le saurais pas moi-
même » (l. 13-15), « si je n’étais pas ce que je suis, si j’étais riche, d’une condition honnête, et
que je t’aimasse autant que je t’aime, ton cœur n’aurait point de répugnance pour moi ? »
(l. 38-41). À cette ultime question qui évoque la problématique condition de Bourguignon-
Dorante, la réponse de Silvia révèle enfin clairement ce qu'elle ressent, de façon laconique :
« Assurément » (l. 42).
• Le spectateur en sait plus que les deux personnages, amants qui s'ignorent, et se régale de
les voir ainsi se fuir et se chercher alors qu'ils sont promis l'un à l'autre. Orgon et Mario
surgissant sur scène assistent à cette comédie dans la comédie comme le spectateur, qu'ils
renvoient à son propre statut et à cette connaissance supérieure de ce qui se joue sur scène.
Il sait bien que Dorante et Silvia ont envie de s'aimer et se pose cette délicieuse question :
comment vont-ils y parvenir ?
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Pridamant incarne ici le spectateur, jouet de l'illusion théâtrale. Avec Corneille, elle se fait
comique puisque la tragédie jouée par Clindor n'était qu'une pièce de théâtre et que toutes
les épreuves qu'il a traversées et dont Pridamant pensait qu'elles l'avaient mené à sa perte
n'étaient « en réalité » que les péripéties d'une pièce de théâtre. Le spectateur se voit
expliquer les rouages presque magiques de l'art, les arcanes de l'illusion théâtrale.
QUESTION DE GRAMMAIRE > Analysez la nature et la fonction des propositions subordonnées
des vers 32 et 36.
Les propositions des vers 32 et 36 sont des propositions subordonnées relatives :
– « Qu'il expose aujourd'hui sur la place publique » : le pronom relatif « qu' » a pour
antécédent « une pièce tragique » (fonction du pronom : COD de « expose ») ;
– « Dont je vous ai fait voir le superbe étalage » : le pronom relatif « dont » a pour
antécédent « ce grand équipage » (fonction du pronom : complément du nom « étalage »).
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