La Méthode Vittoz
La Méthode Vittoz
La Méthode Vittoz
Chapitre
Qu’est-ce que
la méthode Vittoz ?
Roger Vittoz naît en 1863, à Morges, sur les bords du lac Léman. Il
reçoit une éducation protestante, rigoureuse mais très ouverte.
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Son œuvre
Traitement des psychonévroses par la rééducation du contrôle cérébral, son
premier livre publié en 1907, est surtout destiné aux patients. Sa mort en
1925 l’empêche d’achever un second ouvrage visant les scientifiques. Ses
partisans ont publié ses Notes et pensées en 19552, qui témoignent de sa
dimension spirituelle.
L’ouvrage Traitement des psychonévroses par la rééducation du contrôle cérébral
constitue le fondement de la méthode Vittoz. Il garde toute sa justesse
aujourd’hui, bien qu’il puisse sembler un peu « désuet » en raison du
vocabulaire employé et des connotations morales que l’on peut y trouver.
Le mot dressage, par exemple, est utilisé pour évoquer cette nécessité de
répétition qui est la base de tout apprentissage.
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1. VITTOZ R., Traitement des psychonévroses par la rééducation du contrôle cérébral, Pierre
Téqui, 1992.
2. VITTOZ R., Notes et pensées : angoisse et contrôle, édition revue et augmentée, Pierre
Téqui, 1992. L’édition originale est parue aux Éditions du Levain.
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QU’EST-CE QUE LA MÉTHODE VITTOZ ?
L’originalité de ce livre est qu’il est écrit pour le patient avec des mots
simples. Roger Vittoz fait confiance à ses patients : il les croit capables
de mobiliser leur énergie pour se guérir eux-mêmes et de se prendre en
charge grâce aux exercices proposés.
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Ainsi, lorsque notre cerveau conscient reprend les rênes de notre vie,
nous pouvons entendre notre inconscient à travers nos émotions, nos
répétitions… Le docteur Bour3 a appelé la méthode Vittoz psychothérapie
de synthèse et de reconstruction, car elle s’empare du reste de contrôle, même
minime, que nous possédons pour le préserver, le développer et l’affer-
mir.
Par ce « contrôle cérébral », nous reprenons notre vie en main et nous
libérons des conditionnements destructeurs qui nous font tant souffrir.
La première étape consiste donc à accepter que nous n’allons pas bien.
1. La psychasténie, terme qui n’est plus employé aujourd’hui, regroupait les petits
obsessionnels, souvent agités ou abouliques et souffrant d’un complexe d’infé-
riorité. L’aboulie est un « trouble mental caractérisé par l’affaiblissement de la
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La vibration cérébrale
Découverte du « phénomène Vittoz »
Comme de nombreux médecins de son époque, le docteur Vittoz prati-
quait l’hypnose (il abandonnera par la suite cette technique, dans
laquelle le patient reste trop passif à son goût). Sans doute, comme
Freud, posait-il alors la main sur la tête de ses patients. Il a probable-
ment conservé cette pratique par la suite, et finit par percevoir des
« ondulations » qu’il a baptisées vibrations cérébrales :
« Mes expériences personnelles m’ont démontré, à l’encontre des opinions admises,
que la main, avec un certain entraînement, placée sur le front pouvait donner des
indications suffisamment précises sur le travail cérébral. […] Je sais fort bien
avec quel scepticisme sera acceptée cette affirmation, car il est en effet difficile
d’admettre que le mouvement du cerveau puisse être perçu à travers la boîte
osseuse ; mais sans vouloir l’expliquer, tout ce que je puis dire est qu’il a une réper-
cussion extérieure et que cette répercussion peut être sentie par la main ; elle se tra-
duit par une série de chocs répétés, donnant la sensation d’une ondulation ou d’une
vibration particulière1. »
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cœur, pouvait donner des indications sur son activité. Petit à petit, il
constata des variations d’intensité, de régularité, de continuité, de
vitesse et de localisation de ces vibrations selon l’état du patient et le
travail effectué1.
C’est ainsi que le docteur Vittoz structure sa thérapie qui amène le
patient, à partir d’une vibration perturbée (symptôme de la maladie) à
une vibration saine (l’équilibre). Il fait de la reconnaissance de ce phéno-
mène, de son interprétation et de son étude, un outil thérapeutique pour
connaître l’état de ses patients et conduire la cure.
1. Roger Vittoz a suivi une démarche scientifique : parti d’une observation, il a éla-
boré une hypothèse qu’il a vérifiée grâce à l’expérimentation.
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Le dialogue
Comme dans toute thérapie, la parole est un outil primordial dans la
méthode Vittoz, même si les exercices occupent une place essentielle. Le
dialogue développe notre capacité à nommer nos sensations, nos émo-
tions et nos sentiments.
Il est nécessaire de distinguer précisément à ce stade de l’ouvrage :
• la sensation, qui correspond à l’accueil d’une réalité « extérieure » par
les cinq sens et d’une réalité « intérieure » par la somesthésie1 ;
• l’émotion, soit l’émergence soudaine d’un état affectif intense en réac-
tion à un événement (une violente colère par exemple) ;
• le sentiment, qui est un état affectif résultant d’une disposition de l’être
(comme le sentiment d’infériorité).
Nommer sans immédiatement penser, juger ou critiquer, et trouver le
mot juste qui fait dire « oui, c’est exactement cela » est souvent un long
« réapprentissage ». En restaurant les fonctions sensorielles, le théra-
peute vittozien se met dans une position proche de celle de la mère qui
apprend à son enfant à nommer ses sensations et ses sentiments. Nous
savons que le ciel est bleu parce que quelqu’un a, un jour devant nous,
nommé cette couleur. Nous savons que nous sommes tristes parce que
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L’observation
Enfin, l’observation d’une personne (son aspect physique, son habille-
ment, ses attitudes, son regard, l’expression de ses émotions, sa respira-
tion, ses tics…) apporte de nombreux renseignements sur son état.
le détendre une relaxation, qu’il accepte pour me faire plaisir. Tout au long
de l’exercice, je l’observe et reçois sa vibration.
Sentant que Bernard se détend un peu, je lui demande alors d’« accueillir »
le contact de son visage avec sa main droite puis sa main gauche. Il reste un
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certain moment sur son visage puis nous poursuivons et terminons la relaxa-
tion. À l’observation, je ne remarque rien de particulier.
Nous échangeons ensuite sur l’exercice et essayons de mettre des mots sur
les sensations physiques vécues par Bernard. C’est très difficile, car Bernard
reste au niveau émotionnel. Il me dit toutefois qu’il a bien fait la relaxation et
qu’il se sent un peu mieux. Pourtant, lorsqu’il a touché son visage, la vibration
que j’ai reçue a été très forte, comme une décharge.
Nous poursuivons notre discussion. Il me parle de ses recherches avec enthou-
siasme, puis finit par évoquer sa femme qui ne le comprend pas et lui reproche
de ne jamais être là, de ne pas être affectueux. Je lui demande alors :
« Qu’avez-vous éprouvé en passant vos mains sur votre visage ? » Après un
temps de silence assez long, Bernard éclate en pleurs et me dit d’une voix
sanglotante : « Ma mère ne m’a jamais caressé la joue, elle était très dure
avec mon frère et moi. » Lors de la relaxation, je n’avais rien observé de signi-
ficatif, car Bernard, se sentant plus détendu, avait bien vécu l’exercice. Seule
la réception de la vibration m’avait alertée sur une émotion révélant un vécu
douloureux.
De ce jour, nous avons pu travailler les exercices et commencer véritablement
la thérapie. Bernard a eu besoin de plusieurs séances pour que la confiance
s’installe et qu’il puisse laisser émerger sa souffrance.
La relation thérapeutique
Une relation est un lien qui s’installe entre deux ou plusieurs personnes,
les entraînant à tenir compte l’une de l’autre et engendrant ainsi des
comportements et des attitudes. Quelle que soit leur nature (familiale,
amicale, professionnelle, associative…), les relations ont en commun
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Du côté du thérapeute
Les sentiments du thérapeute pour le patient sont réunis sous le terme
de contre-transfert. Dans la méthode Vittoz, ils ont une coloration parti-
culière, dans la mesure où le thérapeute applique sa méthode à lui-même
en se demandant : que me fait cette personne ? Qu’est-ce que cela touche
en moi ? Où est ma souffrance ? Où en suis-je de ma confiance en moi ?...
Le thérapeute vittozien a appris une technique spécifique qui demande
une formation approfondie. Celle-ci repose sur des cours de psychologie,
de psychiatrie et de neurologie, base indispensable d’une culture générale
qui mène à approfondir sa compréhension de l’existence et de l’autre. Par
ailleurs, des qualités humaines sont bien sûr indispensables.
L’attitude d’empathie du thérapeute se manifeste :
• par son accueil, qui montre au patient que sa personne est prise en
considération. Dans la pièce où ce dernier va travailler, il est en partie
« chez lui » ;
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Prisonnier de la peur
La crainte est une autre prison que nous connaissons tous. Elle peut
porter sur différents éléments, nous pouvons ainsi avoir peur :
• de ne pas être capable, ne pas être à la hauteur ;
• de l’insécurité ;
• du monde, du jugement de l’autre ;
• de perdre, de manquer, de mourir.
Cela peut nous entraîner soit dans une course éperdue à la consomma-
tion, aux divertissements, soit au contraire dans l’immobilisme.
Prisonnier de la douleur
Il y a encore peu de temps, la douleur physique n’était entendue que
comme le signe d’un désordre biologique. À ce jour, la problématique
de la douleur est considérée dans son intrication entre le corps et l’esprit,
elle est devenue un symptôme à part entière. La douleur envahit tout
l’organisme, elle modifie l’attitude d’ensemble de celui qui la vit et
transforme sa manière d’être face au monde, entraînant violence, stress,
désorganisation…
Trois sortes de douleur peuvent être différenciées :
• la douleur vitale, protectrice, qui constitue un signal d’alarme ;
• la douleur réparatrice, qui accompagne un processus de guérison après
une lésion, un traumatisme ;
• la douleur chronique, qui peut être considérée comme une véritable
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