Thèse Tarek Bellaj Finale

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DYSFONCTIONNEMENTS DE LA MÉMOIRE DE

TRAVAIL DANS LA MALADIE DE PARKINSON


Tarek Bellaj

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Tarek Bellaj. DYSFONCTIONNEMENTS DE LA MÉMOIRE DE TRAVAIL DANS LA MALADIE
DE PARKINSON. Psychologie. Université de Tunis, 1999. Français. �NNT : �. �tel-03133690�

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teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires
abroad, or from public or private research centers. publics ou privés.
Remerciements

Je tiens tout d'abord à remercier le Pr. Moncef Bouaziz, il m'a donné l'opportunité
de réaliser ce travail dans les meilleures conditions. Je lui suis également reconnaissant
pour son aide, ses suggestions constructives et son soutien constant et inconditionnel tout
au long de ces années. Merci pour l'accueil, la patience et la confiance que vous me
faites.

Toute ma reconnaissance va aussi au Pr. Martial Van der Linden pour avoir
toujours accepté de m'accueillir dans son laboratoire, pour m'avoir entouré de ses
conseils et pour avoir passé du temps à la lecture et à l'évaluation de ce travail.

J'exprime ma gratitude au Pr. Zakia Bouaziz pour m'avoir toujours épaulé quand
j'en avais besoin. Son aide m'a été très précieuse.

Le Pr. Mongi Ben Hmida m'a permis de rencontrer les premiers patients et en
acceptant de me recevoir dans son service, a participé à développer ma passion pour la
neuropsychologie.

Je voudrais remercier aussi le Pr. Fayçal Hentati pour m'avoir ouvert son service et
m'avoir permis de rencontrer des patients.

Le Dr Naziha Gouider-Khouja m'a assuré le lien clinique avec les patients et m'a
fait aimablement bénéficier de ses compétences cliniques. Je tiens à l'en remercier. Son
intérêt pour mon travail m’a toujours motivé.

Sonia Ayadi-Touré et Hichem Trabelsi m'ont supporté avec courage et bonne


humeur. Je leur dois toute ma gratitude.

Je suis particulièrement reconnaissant envers le Pr. Jeanine Blanc-Garin pour son


amitié, sa disponibilité, son aide et ses conseils précieux, pour n'avoir jamais refusé de
consacrer de son temps pour revoir avec moi mes textes. Merci Jeanine, cette fois c'est
terminé et c'est pour de vrai.

Mes remerciements s'adressent également au Pr. Michel Poncet pour m'avoir si


souvent et si gentiment accueilli dans son laboratoire, pour ses conseils et la confiance
qu'il me fait. Je remercie en particulier Suzanne et Mustapha du laboratoire de
neuropsychologie du C.H.U de la Timone à Marseille pour leur accueil chaleureux et
leur soutien.

Merci Imed pour ton coup de main au moment opportun et pour toutes les remarques
critiques et enrichissantes.

Je suis reconnaissant envers Pilar Andrés Benito, Martine Poncelet et Thierry


Meulemans pour leur accueil et les riches discussions que nous avons eus ensemble.

Ma gratitude s'adresse à Hamadi, Yousri, Ribh et à toute l'équipe du laboratoire


de neurosciences.

Ce travail a été effectué avec la participation des patients de l'Institut National de


Neurologie. Je ne pourrais manquer de remercier tous les patients et les témoins qui ont
accepté avec patience et gentillesse de se soumettre à l'expérimentation, malgré les
désagréments que cela a pu leur causer.

Enfin, Sonya Merci pour tout. Sans ton apport, ta présence et ta générosité ce
travail serait encore en cours...
À la mémoire de mon père,
À mon épouse Sonya et à notre fils Hakim,
À ma mère, mes frères et sœurs,
À mes beaux-parents.
Résumé de la thèse

L'étude des changements cognitifs consécutifs à la maladie de Parkinson est effectuée dans le
cadre d'un modèle théorique de référence afin de passer de la simple description des troubles à
l'explication des déficits en termes de processus. Le modèle de mémoire de travail Baddeley et
son corollaire celui du Système Attentionnel Superviseur de Norman et Shallice sont utilisés.
L'examen des différentes composantes de la mémoire de travail par des tâches
neuropsychologiques adaptées montre que le déficit ne se manifeste pas au niveau des facteurs
non spécifiques comme l'alerte phasique ou la vitesse de traitement. Il ne se manifeste pas non
plus au niveau de la capacité de stockage temporaire ou de la fonctionnalité des systèmes esclaves
(Boucle Phonologique et Articulatoire et Registre Visuo-Spatial). En revanche, les parkinsoniens
sont déficients dans la fonctionnalité de l'administrateur central dans sa fonction de gestion de
ressources attentionnelles et dans des fonctions de contrôle exécutif de l'action aussi bien au
niveau de la planification de l'action qu'au niveau de l'inhibition des réponses dominantes et de la
flexibilité mentale réactive et spontanée). Les modèles théoriques utilisés se sont avérés
représenter une métaphore utile pour rendre compte des déficits observés. Cependant, ces
modèles manquent encore de spécificité puisque le déficit de l'administrateur central est observé
aussi dans d'autres populations pathologiques. D'autres travaux de remise en question des
modèles sont indispensables. L'examen de l'hétérogénéité dans l'expression des troubles serait en
mesure d'aider à spécifier la nature des déficits de l'administrateur central en dégageant différents
patterns de dysfonctionnement de la mémoire de travail.

Mots-clés ou vedettes-matière :
1 Mémoire de travail
2 Maladie de Parkinson
3 Fonctions exécutives
4 Neuropsychologie
TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ................................................................................................................................................ 1

1 LA MEMOIRE DE TRAVAIL .......................................................................................................................... 3


1.1 ÉMERGENCE DU MODELE DE MEMOIRE DE TRAVAIL .....................................................................................................4
1.1.1 Définition du concept de Mémoire de Travail ......................................................................................................................5
1.1.2 Les différentes utilisations du concept de MT ......................................................................................................................6
1.2 MODULES DE LA MT .............................................................................................................................................................9
1.2.1 La boucle phonologique et articulatoire ...............................................................................................................................9
1.2.1.1 L'effet de similarité phonologique ......................................................................................................................................... 11
1.2.1.2 L'effet d'écoute d'un son non approprié............................................................................................................................... 11
1.2.1.3 L'effet de longueur du mot...................................................................................................................................................... 12
1.2.1.4 L'effet de suppression articulatoire........................................................................................................................................ 13
1.2.2 Le registre visuo-spatial ................................................................................................................................................... 14
1.2.2.1 Individualisation du registre visuo-spatial ............................................................................................................................ 14
1.2.2.2 A propos de l'architecture fonctionnelle du registre visuo-spatial .................................................................................. 15
1.2.3 L'administrateur central .................................................................................................................................................. 16
1.2.3.1 Rôles fonctionnels attribués à l'administrateur central ...................................................................................................... 16
1.2.3.2 Modélisation du fonctionnement de l'administrateur central .................................................................................... 20

2 LE CONTROLE ATTENTIONNEL DE L'ACTION ................................................................................ 22


2.1 MODELE DES "DEUX PROCESSUS".................................................................................................................................... 23
2.2 MODELE DU SYSTEME ATTENTIONNEL SUPERVISEUR................................................................................................ 24
2.2.1 Les sources du modèle ...................................................................................................................................................... 24
2.2.2 Les composantes du modèle .............................................................................................................................................. 25
2.2.2.1 Les schèmes ................................................................................................................................................................................ 26
2.2.2.2 Le gestionnaire des priorités de déroulement (GPD) ........................................................................................................ 27
2.2.2.3 Le Système attentionnel Superviseur ..................................................................................................................................... 27
2.2.3 Structures cérébrales impliquées........................................................................................................................................ 28
2.2.4 Le dysfonctionnement du contrôle de l'action..................................................................................................................... 29
2.2.4.1 Les patterns de dysfonctionnement ...................................................................................................................................... 29
2.2.4.2 Les performances des frontaux dans des tâches impliquant le SAS ............................................................................... 30
2.2.5 Modularité du Système Attentionnel Superviseur ............................................................................................................. 36
2.2.6 Conclusion....................................................................................................................................................................... 37

3 CHANGEMENTS COGNITIFS DANS LA MALADIE DE PARKINSON .............................................. 38


3.1 LA MALADIE DE PARKINSON (MP) ................................................................................................................................... 38
3.1.1 Les ganglions de la base : anatomo-physiologie et pharmacologie ....................................................................................... 38
3.1.2 Anatomopathologie.......................................................................................................................................................... 39
3.1.3 Données épidémiologiques ................................................................................................................................................ 40
3.1.4 Les hypothèses étiologiques ............................................................................................................................................... 41
3.1.5 Présentation clinique ........................................................................................................................................................ 41
3.1.5.1 Le tremblement ......................................................................................................................................................................... 42
3.1.5.2 La rigidité .................................................................................................................................................................................... 42
3.1.5.3 L'akinésie ..................................................................................................................................................................................... 42

i
3.1.5.4 Les autres signes moteurs et neurologiques ......................................................................................................................... 43
3.1.5.5 Les troubles psychiques ........................................................................................................................................................... 44
3.1.5.6 Les troubles cognitifs et la notion de démence sous-corticale ......................................................................................... 45
3.1.6 Les formes cliniques ......................................................................................................................................................... 46
3.1.7 Évolution ........................................................................................................................................................................ 46
3.2 LES CHANGEMENTS COGNITIFS ........................................................................................................................................ 48
3.2.1 La vitesse de traitement ................................................................................................................................................... 49
3.2.1.1 La notion de bradyphrénie ...................................................................................................................................................... 50
3.2.1.2 Vitesse de traitement, dépression et akinésie (lenteur motrice) ....................................................................................... 50
3.2.1.3 Étude de la vitesse de traitement par la chronométrie mentale ....................................................................................... 51
3.2.2 Le langage et les fonctions visuo-spatiales ......................................................................................................................... 53
3.2.2.1 Le langage ................................................................................................................................................................................... 53
3.2.2.2 Les fonctions visuo-spatiales .................................................................................................................................................. 56
3.2.3 Les fonctions exécutives.................................................................................................................................................... 59
3.2.3.1 Planification de l'action ............................................................................................................................................................ 59
3.2.3.2 Inhibition des interférences..................................................................................................................................................... 61
3.2.3.3 Flexibilité cognitive ................................................................................................................................................................... 62
3.2.4 Les fonctions mnésiques ................................................................................................................................................... 65
3.2.4.1 La mémoire procédurale .......................................................................................................................................................... 66
3.2.4.2 L'amorçage d'identification ..................................................................................................................................................... 68
3.2.4.3 La mémoire sémantique ........................................................................................................................................................... 69
3.2.4.4 La mémoire épisodique ............................................................................................................................................................ 72
3.2.4.5 La mémoire de travail ............................................................................................................................................................... 78
3.2.5 Synthèse et conclusion ...................................................................................................................................................... 82

4 METHODE ...................................................................................................................................................... 84
4.1 PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES .................................................................................................................................. 84
4.2 PROBLEMES DE METHODE ................................................................................................................................................ 87
4.2.1 L'hétérogénéité ................................................................................................................................................................. 88
4.2.1.1 La variabilité clinique, symptomatologique et neuropathologique .................................................................................. 88
4.2.1.2 La variabilité des caractéristiques démographiques ................................................................................................... 90
4.2.2 La variabilité des procédures expérimentales .................................................................................................................... 92
4.2.3 Les différences des cadres théoriques ................................................................................................................................. 92
4.3 LES SUJETS ............................................................................................................................................................................ 93
4.3.1 Le groupe expérimental ................................................................................................................................................... 93
4.3.2 Le groupe témoin ............................................................................................................................................................. 95
4.4 LES INSTRUMENTS ............................................................................................................................................................... 97
4.4.1 Le problème de l'adaptation des épreuves ......................................................................................................................... 98
4.4.2 Les épreuves sélectionnées ............................................................................................................................................... 103
4.4.2.1 Épreuves d'évaluation des facteurs généraux.......................................................................................................................... 103
4.4.2.2 Épreuves d'évaluation de l'alerte et de la vitesse de traitement ............................................................................................. 104
4.4.2.3 Épreuves d'évaluation du fonctionnement de la BPA et du RVS ................................................................................. 104
4.4.2.4 Épreuves d'évaluation du fonctionnement de l'administrateur central ........................................................................ 104
4.5 PLAN EXPERIMENTAL ....................................................................................................................................................... 106
4.6 L'EXAMEN NEUROPSYCHOLOGIQUE : PROCEDURE .................................................................................................... 107
4.7 OUTILS DE TRAITEMENT STATISTIQUE ......................................................................................................................... 108

5 NIVEAU D'ALERTE ET VITESSE DE TRAITEMENT .......................................................................... 111


5.1 LE NIVEAU D'ALERTE ....................................................................................................................................................... 111

ii
5.1.1 Matériel ........................................................................................................................................................................ 113
5.1.2 Procédure....................................................................................................................................................................... 113
5.1.3 Indices relevés ................................................................................................................................................................ 114
5.1.4 Résultats ....................................................................................................................................................................... 114
5.1.5 Discussion ..................................................................................................................................................................... 115
5.2 LA VITESSE DE TRAITEMENT DES OPERATIONS COGNITIVES ................................................................................... 116
5.2.1 Matériel ........................................................................................................................................................................ 118
5.2.2 Procédure....................................................................................................................................................................... 119
5.2.3 Indices relevés ................................................................................................................................................................ 120
5.2.4 Résultats ....................................................................................................................................................................... 120
5.2.5 Discussion ..................................................................................................................................................................... 121

6 FONCTIONNEMENT DES SYSTEMES ESCLAVES .............................................................................. 123


6.1 LES CAPACITES DE STOCKAGE TEMPORAIRE SIMPLE .................................................................................................. 123
6.1.1 Matériel ........................................................................................................................................................................ 123
6.1.1.1 L'empan de chiffres ................................................................................................................................................................ 123
6.1.1.2 Le Block Tapping Test de Corsi (Milner, 1971)................................................................................................................ 123
6.1.2 Procédure....................................................................................................................................................................... 124
6.1.3 Indices relevés ................................................................................................................................................................ 124
6.1.4 Résultats ....................................................................................................................................................................... 124
6.1.5 Discussion ..................................................................................................................................................................... 125
6.2 FONCTIONNALITE DE LA BOUCLE PHONOLOGIQUE ET ARTICULATOIRE ............................................................ 126
6.2.1 Matériel ........................................................................................................................................................................ 127
6.2.2 Procédure....................................................................................................................................................................... 127
6.2.3 Indices relevés ................................................................................................................................................................ 128
6.2.4 Résultats ....................................................................................................................................................................... 128
6.2.4.1 Effet de longueur .................................................................................................................................................................... 128
6.2.4.2 Effet de similarité phonologique.......................................................................................................................................... 129
6.2.5 Discussion ..................................................................................................................................................................... 130

7 FONCTIONNALITE DE L'ADMINISTRATEUR CENTRAL ................................................................ 131


7.1 DIVISION DES RESSOURCES ATTENTIONNELLES ......................................................................................................... 131
7.1.1 Matériel ........................................................................................................................................................................ 133
7.1.2 Procédure....................................................................................................................................................................... 134
7.1.3 Indices relevés ................................................................................................................................................................ 135
7.1.4 Résultats ....................................................................................................................................................................... 135
7.1.4.1 Le coût en temps ..................................................................................................................................................................... 135
7.1.4.2 Le coût des tâches secondaires sur la précision ................................................................................................................ 137
7.1.4.3 Le coût sur l'empan en tant que tâche secondaire ............................................................................................................ 139
7.1.5 Discussion ..................................................................................................................................................................... 139

7.2 INHIBITION DES REPONSES DOMINANTES.................................................................................................................... 143


7.2.1 Matériel ........................................................................................................................................................................ 143
7.2.2 Procédure....................................................................................................................................................................... 144
7.2.3 indices relevés ................................................................................................................................................................. 145
7.2.4 Résultats ....................................................................................................................................................................... 146
7.2.4.1 Analyse des temps de latence................................................................................................................................................ 146
7.2.4.2 Analyse des types de réponse................................................................................................................................................ 147
7.2.4.3 Analyse des temps de latence en fonction des types de réponses ................................................................................. 148

iii
7.2.4.4 Examen des corrélations........................................................................................................................................................ 149
7.2.5 Discussion ..................................................................................................................................................................... 149

7.3 FLEXIBILITE COGNITIVE ................................................................................................................................................... 152


7.3.1 Matériel ......................................................................................................................................................................... 154
7.3.2 Procédure........................................................................................................................................................................ 154
7.3.3 Indices relevés ................................................................................................................................................................. 155
7.3.4 Résultats ........................................................................................................................................................................ 156
7.3.4.1 Analyse de la production ......................................................................................................................................................... 156
7.3.4.2 Processus de contrôle : les réponses non-cibles.................................................................................................................. 157
7.3.4.3 Analyse des stratégies de production .................................................................................................................................... 159
7.3.5 Discussion ...................................................................................................................................................................... 160

7.4 PLANIFICATION DE L'ACTION ......................................................................................................................................... 166


7.4.1 Matériel ........................................................................................................................................................................ 167
7.4.2 Procédure....................................................................................................................................................................... 168
7.4.3 Indices relevés ................................................................................................................................................................ 169
7.4.4 Résultats ....................................................................................................................................................................... 169
7.4.4.1 Problèmes à 3 mouvements .................................................................................................................................................. 169
7.4.4.2 Indices de l'exactitude ............................................................................................................................................................ 170
7.4.4.3 Problèmes à 5 mouvements .................................................................................................................................................. 170
7.4.4.4 Examen des Corrélations....................................................................................................................................................... 174
7.4.5 Discussion ..................................................................................................................................................................... 175

8 ANALYSE DES CORRELATIONS .............................................................................................................. 180


8.4 CORRELATIONS ENTRE LES INDICES DU FONCTIONNEMENT DE L'AC .................................................................. 181
8.5 CORRELATIONS AVEC LES VARIABLES CLINIQUES ...................................................................................................... 182
8.6 DISCUSSION ........................................................................................................................................................................ 183

9 DISCUSSION GENERALE ........................................................................................................................... 187


9.4 DYSFONCTIONNEMENT DE LA MEMOIRE DE TRAVAIL .............................................................................................. 187
9.5 PROBLEMES DE METHODE .............................................................................................................................................. 193
9.6 PERTINENCE DU MODELE ............................................................................................................................................... 195

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES......................................................................................................... 199

ANNEXES .......................................................................................................................................................... 219

iv
INDEX DES FIGURES

Figure 1--1. Modèle simplifié de la mémoire de travail de Baddeley (1994). 6


Figure 1--2. Architecture fonctionnelle de la mémoire de travail : le système de la boucle 10
phonologique (Van der Linden, 1994).
Figure 2--1. Le système attentionnel superviseur de Norman et Shallice (1986) simplifié. 25
Figure 3--1. Principales lésions cérébrales dans la maladie de Parkinson. 40
Figure 5--1. Temps de réaction des Pk et des Té aux différents intervalles de période 115
préparatoire.
Figure 5--2. Exemples d'items du TCP. 118
Figure 5--3. Temps de réaction des Pk et Té aux différents niveaux de difficulté de la TCP. 119
Figure 6--1. Empan verbal et visuo-spatial chez les Pk et les Té. 125
Figure 6--2. Empan des mots courts et des mots longs chez les Pk et les Té. 129
Figure 6--3. Effet de similarité phonologique chez les Pk et les Té. 129
Figure 7--1. Excèdent en temps pour chaque type de tâche double. 136
Figure 7--2. Excès de P(A) dans les deux conditions de la tâche double. 138
Figure 7--3. Nombre moyen d'omissions par tâche. 138
Figure 7--4. Temps de latence moyens dans les deux parties du Hayling. 147
Figure 7--5. Pourcentage de chaque type de réponse dans les deux groupes. 148
Figures 7-6a, b. Nombre moyen (erreur type) de mots produits par les Pk et des Té au cours des 156
quatre périodes de 30 secondes.
Figure 7--7. Moyenne (erreur type) des performances des deux groupes en fluence simple et 157
alternée.
Figure 7--8. Nombre moyen de répétitions et d'intrusions en fluence simple. 157
Figure 7--9a. Histogramme des répétitions chez les Pk et les Té en fluence simple. 158
Figure 7--9b. Histogramme des intrusions chez les Pk et les Té en fluence simple. 158
Figure 7--10a. Histogramme des répétitions chez les Pk et les Té en fluence alternée. 158
Figure 7--10b. Histogramme des persévérations chez les Pk et les Té en fluence alternée. 158
Figure 7--11. Taux de groupement sémantique en fluence sémantique simple pour les 4 159
périodes.
Figure7--12. Exemple de problème à initiateur positif exigeant 5 mouvements. 167
Figure 7--13. Temps total d'exécution (brut) des différents problèmes de la Tour de Londres. 172
Figure 7--14. Nombre moyen (brut) de mouvements (A) et proportion de problèmes résolus 173
(B) avec le nombre minimum de mouvements pour chaque type de problèmes.
Figure 8--1. Diagramme représentant la matrice des corrélations entre les indices du 181
fonctionnement de l’AC..

v
INDEX DES TABLEAUX

Tableau 4--1. Caractéristiques démographiques et cliniques des sujets. 96


Tableau 5--1. Nombre moyen (écart type) de chaque type d'erreur. 115
Tableau 5--2. Nombre moyen d'erreurs (écart type) dans chaque niveau de difficulté. 121
Tableau 6--1. Moyennes (écart types) des empans de mots pour chaque condition. 128
Tableau 7--1. Coefficients et probabilités de corrélation entre l'excédent en temps dans 136
chaque tâche avec l'alerte et la vitesse de traitement.
Tableau 7--2. Moyenne de P(A) et pourcentage moyen des omissions dans les tâches 137
principales des trois conditions.
Tableau 7--3. Coefficients et probabilité des corrélations entre les indices d'exactitude dans les 139
tâches doubles avec l'alerte et la vitesse de traitement.
Tableau 7--4. Critères de cotation des réponses au Hayling selon Burgess et Shallice (1996). 145
Tableau 7--5. Latences moyennes (écart types) au Hayling dans les deux groupes. 146
Tableau 7--6. Pourcentage des types de réponses et moyennes (σ) du score d'erreurs. 147
Tableau 7--7. Temps moyen (sec.) par type de réponse. 148
Tableau 7--8. Coefficients et probabilité des corrélations entre l'alerte et la vitesse de 149
traitement d'une part et les indices de performances au Hayling d'autre part..
Tableau 7--9. Comparaison de nos résultats au Hayling avec ceux de Shallice et Burgess.. 150
Tableau 7--10. Types de problèmes dans la Tour de Londres. 168
Tableau 7--11. Moyennes (écart types) des données temporelles et d'exactitude. 170
Tableau 7--12. Moyennes (écart types) des données temporelles. 171
Tableau 7--13. Moyennes (écart types) des données de l'exactitude. 172
Tableau 7--14. Principales corrélations significatives dans les deux groupes séparément.. 174
Tableau 8--1. Corrélations des facteurs généraux et des données cliniques avec les données 182
aux différentes épreuves neuropsychologiques utilisée.

vi
LISTE DES ABREVIATIONS
AC administrateur central

BPA boucle phonologique et articulatoire

GPD gestionnaire de priorité de déroulement

IP interférence proactive

IR interférence rétroactive

MCT mémoire à court terme

MLT mémoire à long terme

MMS Mini Mental State

mP maladie de Parkinson

MT mémoire de travail

PDQ-39 Parkinsonian’s Disease Questionnaire

Pk parkinsoniens

RVS registre visuo-spatial

SAS système attentionnel superviseur

Té témoins

TCP Temps de comparaison de patterns

TR temps de réaction

TRC temps de réaction de choix

TRS temps de réaction simple

vii
INTRODUCTION

L’un des principaux objectifs de la recherche sur la mémoire humaine est d'analyser la nature des
mécanismes cognitifs qui assurent son fonctionnement dans le cadre d'une théorie scientifique
valide. Les théories et les modèles sont des outils qui nous aident à conceptualiser et à
comprendre les phénomènes observés. Ils sont souvent confrontés à plusieurs types de faits
(effets de la pathologie, manipulations expérimentales, simulations informatiques, imagerie
fonctionnelle etc.). Grâce à cette démarche, les modèles se développent et se modifient ; ils
peuvent s'élargir et évoluer vers des modèles plus complets ou, au contraire, être abandonnés
quand ils ne suscitent plus de nouvelles questions. Le modèle de mémoire de travail de Baddeley
(Baddeley et Hitch, 1974) illustre cette dynamique. La mémoire de travail (MT) réfère à un
système de maintien et de manipulation temporaire de l'information nécessaire pour effectuer des
tâches cognitives complexes. Le modèle de Baddeley et Hitch (1974) constitue une rupture
épistémologique avec le "modèle modal" d'Atkinson et Shiffrin (1968) qui conçoit la mémoire en
général comme un processus linéaire et la mémoire à court terme comme un dispositif unitaire.
Le modèle de Baddeley et Hitch est depuis son apparition l'objet de multiples travaux de
validation et de remaniement. Différentes affections cérébrales constituent des modèles
pathologiques qui servent à le tester et à l'enrichir.
Dans notre travail, nous utilisons la maladie de Parkinson (mP) comme modèle pathologique
pour voir dans quelle mesure le modèle de mémoire de travail rend compte des changements
cognitifs consécutifs à cette maladie. Nous adoptons ce modèle comme cadre conceptuel et
comme instrument d'analyse des déficits observés. C'est ainsi, que nous analysons chez des
parkinsoniens (Pk) et des témoins (Té) les trois sous-systèmes de la MT. Il s'agit de la boucle
phonologique et articulatoire (BPA) responsable du maintien et du rafraîchissement de
l'information basée sur la parole, du registre visuo-spatial (RVS) capable de maintenir et
manipuler les informations visuo-spatiales et de l'administrateur central (AC) qui assure un
contrôle attentionnel superviseur et qui est sensé être largement contrôlé par les lobes frontaux.
La mP est choisie du fait que les déficits cognitifs qui lui sont associés miment dans plusieurs
aspects ceux observés dans les dysfonctionnements frontaux. Ceci rend plus pertinent le recours
au modèle de MT. La maladie de Parkinson est le prototype des atteintes des noyaux sous
corticaux. Elle a été longtemps considérée comme exempte de troubles cognitifs. James
_______________________________________________________________________ Introduction

Parkinson (1817) lui-même affirmait que "le sens et l'intellect sont préservés". Or la pratique
clinique et les travaux récents rapportent la présence d'altérations cognitives spécifiques d'allure
frontale, d'expression variée, observées même chez les parkinsoniens débutants et non traités
(Lees et Smith, 1983; Taylor, Saint-Cyr, et Lang, 1990). L'étude des fonctions cognitives de la mP
peut avoir des implications théoriques et cliniques. Sur le plan théorique, ce trouble neurologique
offre une base naturelle d’expérimentation sur les dysfonctionnements des noyaux de la base. Ceci
permet de faire des inférences sur le rôle des structures sous-corticales dans le fonctionnement de la
MT chez le sujet normal. Sur le plan clinique, l'examen des processus cognitifs en jeu peut clarifier la
nature, l'étendue et l'évolution des déficits neuropsychologiques associés à cette maladie et la sous-
tendant.
Pour ce, nous exposons dans les deux premiers chapitres le modèle de MT et le modèle du
"Système Attentionnel Superviseur" (SAS) de Norman et Shallice (1986) qui a servi à étayer
certains des aspects de la MT. Nous présentons par la suite (§ 3), un aperçu sur la mP du point de
vue anatomoclinique, du rôle des structures sous-corticales dans l'activité cognitive et des déficits
cognitifs rencontrés chez les parkinsoniens.
Dans le chapitre suivant (4), nous discutons des questions générales de méthode puis nous
présentons notre problématique et nos hypothèses qui seront mises à l'épreuve à travers
l'expérimentation. Ce chapitre s'achève par la présentation de la procédure expérimentale
générale que nous adoptons pour mettre à l'épreuve nos hypothèses.
À partir du chapitre 5, nous examinons les résultats relatifs à chaque processus étudié en les
discutant un à un en fonction de la littérature et des différentes hypothèses plausibles et
disponibles.
Enfin, dans la discussion générale, l'ensemble des résultats sera discuté en fonction des
hypothèses de travail puis interprété et confronté aux études antérieures portant directement sur
la MT. À ce niveau, nous discutons de certains problèmes méthodologiques et de la pertinence
du modèle de mémoire de travail.

2
1 LA MEMOIRE DE TRAVAIL

L'apparition des modèles de "Mémoire de Travail" (MT) et du "Système Attentionnel


Superviseur" (SAS) a marqué une étape importante dans l'évolution des idées sur la mémoire et
l'attention. Actuellement, ce sont les modèles les plus couramment utilisés pour rendre compte des
résultats issus des recherches en neuropsychologie clinique et expérimentale.
Le modèle de MT est issu du modèle modal des années 60 dont la conceptualisation la plus
influente est celle d'Atkinson et Shiffrin (1968). Le modèle modal conçoit la mémoire à court
terme (MCT) comme un système unitaire, à capacité limitée impliquée dans un ensemble de
phénomènes (empan mnésique, effet de récence). Elle assure diverses fonctions telles que la mise
en œuvre des stratégies d'encodage et de récupération, l'accès à l'information à partir de la MCT
et l'enregistrement de nouveaux apprentissages en mémoire à long terme (MLT). Le traitement de
l'information en MCT se fait de manière linéaire. Il s'agit d'un processus à trois étapes :

• D'abord, les informations en provenance de l'environnement accèdent à une sorte de


mémoire sensorielle, échoïque et iconique qui reçoit et maintien brièvement les informations
perceptives ;

• Ensuite, les informations sonores et visuo-spatiales alimentent l'unité de stockage à court terme
(CT). Cette unité ne constitue pas seulement un stock passif jouant un rôle de mémoire
tampon (buffer) entre le registre sensoriel et le registre à long terme (LT), mais aussi un
opérateur actif de traitement de l'information. L'un de ces principaux mécanismes de
traitement est l'auto-répétition qui permet de rafraîchir la trace mnésique.

• Enfin, les informations en MCT peuvent être transférées à la MLT. Plus l'information est
auto-répétée en MCT, plus elle a de chances d'être transférée vers la MLT. La relation entre
MCT et MLT est dynamique. La MCT alimente la MLT mais s'alimente aussi d'informations
stockées en MLT.
Le modèle d'Atkinson et Shiffrin (1986) a constitué un point de départ au développement du
modèle de Baddeley et Hitch (1974). Il a l'avantage d'être un modèle non unitaire de la mémoire
et a le mérite d'octroyer à la MCT un rôle actif dans la mémorisation incluant les opérations de
traitement. Or, la linéarité de ce modèle n'a pas fait l'unanimité. Elle postule que sans la MCT
l'information ne peut atteindre la MLT et que la MCT est indispensable à tout apprentissage. En
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

effet, "le postulat que le traitement de l'information par le registre à court terme constitue la voie
royale pour l'entrée dans le registre à long terme ne semble pas justifié." (Baddeley, 1993 ; p 74).

1.1 Émergence du modèle de mémoire de travail


Tel que conçu par Atkinson et Shiffrin (1968), le modèle modal répondait relativement bien aux
résultats des travaux de laboratoire de l'époque. Toutefois, il s'est trouvé en difficulté devant
certains cas cliniques, essentiellement les doubles dissociations comme celle observée dans le cas
HM (Milner, 1966) par rapport au cas KF (Shallice et Warrington, 1970). En effet, en 1966,
Milner publie le cas HM, un patient devenu amnésique suite à une excision bilatérale, à visée
thérapeutique, d'une grande partie des lobes temporaux et de l'hippocampe. L'amnésie de HM est
caractérisée par une incapacité d'acquérir de nouvelles informations et de les conserver en MLT,
alors qu'il conservait une capacité de MCT normale (empan de chiffres). Quelques années plus
tard, Shallice et Warrington (1970) publient le cas KF qui souffre d'une lésion périsylvienne
gauche et qui présente le syndrome inverse. Il possède une capacité d'apprentissage à LT normale
associée à un empan de 2, des performances très faibles dans la tâche de Brown-Peterson1 et une
absence d'effet de récence. Cette double dissociation constitue un argument puissant mettant en
question la thèse relative à l'existence de deux systèmes linéaires de stockage que sont la MCT et
la MLT2. Ainsi, si l'unité de stockage à CT est essentielle pour acheminer l'information vers l'unité
de stockage à LT et vice versa, alors un dysfonctionnement de l'unité de stockage à CT devrait
entraîner, selon la logique linéaire du modèle, une incapacité de stockage à LT (cas HM). Or, les
faits (cas KF) montrent que ceci n'est pas vrai.
Baddeley et Hitch (1974) ont fait plusieurs expériences au cours desquelles ils simulent des
déficits de la MCT chez des sujets normaux en utilisant la technique de tâche double. Dans cette
technique, on occupe l'unité de stockage à CT par une tâche d'empan, tandis que, sont réalisées en
même temps des tâches cognitives supposées dépendre des capacités de la MCT. Cette méthode a
pour objectif d'étudier l'effet de différents gradients des tâches doubles sur le système de MCT. Si
l'unité de stockage à CT est de capacité limitée et qu'elle est nécessaire pour effectuer la tâche
d'empan, il est donc possible de surcharger le système en demandant au sujet d'effectuer à la fois

1 Le paradigme de Brown-Peterson consiste à présenter à un sujet une petite quantité d'information par exemple trois
items (lettres, chiffres, mots ...) appelé trigramme qu'on demande au sujet de rappeler. Ceci est suivi
immédiatement d'une tâche de comptage à rebours. Dans ce cas on s'aperçoit que le sujet oublie rapidement le
trigramme à mesure que la tâche interférente (comptage à rebours) est longue et à mesure que le matériel des deux
tâches se ressemble. Cet effet est interprété comme dû essentiellement à la compétition des informations sous
traitement (interférence).
2 Pour une discussion plus détaillée des cas de dissociation en relation avec les systèmes mnésiques, voir Shallice
(1988).

4
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

une tâche d'empan et une autre tâche qu'on suppose dépendante du système de MCT. Si
l'hypothèse d'un système de MCT unitaire est vraie, on devrait alors observer une chute remarquable
des performances en situation de tâche double. Baddeley et Hitch (1974) demandent à des sujets
de répéter des séquences de chiffres en effectuant simultanément des tâches de raisonnement, de
compréhension et d'apprentissage. Les séquences de chiffres sont supposées occuper la capacité
de l'unité de stockage à CT : conformément à cette hypothèse, les performances sont affaiblies. Le
degré d'affaiblissement s'amplifie à mesure qu'on augmente la charge de la tâche concurrente. Cet
affaiblissement est évident, mais pas très important. Ce même pattern de résultats est retrouvé
lorsqu'on utilise des effets de charge concurrente comme l'apprentissage à LT de listes de mots.
Dans ce cas, la charge simultanée est amoindrie mais ne supprime pas l'effet de récence.
Ce type de résultat pose des problèmes majeurs au modèle modal. En effet, si on admet
qu'une MCT à capacité limitée fait intervenir une seule unité de stockage, comment expliquer
alors que les sujets pouvaient parvenir à être entièrement absorbés par une tâche (avec un empan
de 7) et effectuer parallèlement une tâche simultanée ? Si une charge de 7 chiffres doit occuper
totalement l'unité de stockage à CT, on comprend mal comment les sujets continuent à raisonner
de façon relativement pertinente et comment l'effet de récence persiste si on utilise
simultanément une tâche d'empan et une tâche de rappel libre ? Pour rendre compte de ces
résultats et d'autres, Baddeley et Hitch (1974) ont proposé un modèle complexe qu'ils désignent
sous le nom de "modèle de Mémoire Travail" (MT).

1.1.1 Définition du concept de Mémoire de Travail


D'après Baddeley (1998), le terme Mémoire de Travail (MT) réfère à la présomption selon
laquelle une quelconque forme de stockage temporaire de l'information est nécessaire pour
réaliser un large éventail d'opérations cognitives incluant la compréhension, l'apprentissage et le
raisonnement. Il serait, par exemple, impossible de raisonner sur un problème si on ne peut pas
garder à l'esprit les éléments du problème, tout comme il est impossible de comprendre une
conversation si on ne peut pas maintenir en mémoire, ne serait ce qu'une petite quantité de
l'information qu'on vient de dire ou d'entendre.

5
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

Boucle
Phonologique Registre
et Articulatoire visuo-spatial

Administrateur
central

Figure 1-1. Modèle simplifié de la mémoire de Travail de Baddeley (1994).

La MT est définie comme un système à capacité limitée, responsable du maintien et de la


manipulation temporaire de l'information nécessaire pour effectuer des tâches cognitives complexes
(Baddeley, 1992b). Il ne s'agit donc plus d'un système de stockage passif de l'information, mais
d'une interface entre la mémoire et la cognition. En effet, le concept de MT est né à partir de
celui de la MCT. Il a été suggéré pour insister sur deux faits : montrer que la MCT peut
fonctionner comme un espace de travail, c’est-à-dire, un système qui peut aussi bien maintenir
l'information que la traiter ; démarquer la MT de la MCT qui a un caractère unitaire impliqué dans
le seul maintien temporaire passif de l'information.

1.1.2 Les différentes utilisations du concept de MT


Notons d'abord qu'actuellement le terme MT est utilisé dans des sens différents dont certains
s'écartent fondamentalement de la signification d'origine. En effet, outre l'utilisation, dans une
acception différente, qu'en fait la littérature animale (Olton et al., 1980), il existe en neuropsychologie
au moins trois usages différents relativement contrastés du terme MT.
Dans la littérature animale, Olton et al. (1980) emploient le concept de MT pour référer à la
capacité de retenir l'information d'un essai à un autre durant une session de testing. Ces auteurs
entraînent des animaux à traverser des labyrinthes complexes, où vers la fin, une cellule contient à
chaque essai de la nourriture. Généralement, l'animal évite de re-visiter une cellule où il a déjà pris
de la nourriture indiquant ainsi, une forme de rétention des essais précédents. Cette mesure est
très sensible à certains médicaments et à certaines lésions cérébrales. Pour Baddeley (1998),
l'utilisation du terme MT pour référer à ce type de mémoire n'est pas compatible avec la notion
de MT tel qu'elle a été conceptualisée à partir des travaux sur la cognition humaine. Les deux
utilisations ne sont pas équivalentes, de plus le paradigme utilisé par Olton et al. (1980)
s'apparente plus à un aspect de la MLT qu'au modèle de MT de Baddeley et Hitch (1974).
Les travaux sur la mémoire humaine donnent à ce concept trois sens différents :

6
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

• Celui des modèles computationnels qui simulent le fonctionnement cognitif humain. Le


modèle de Newell et Simon (1972) est basé sur des systèmes architecturaux de production régi
par des lois où des comportements complexes peuvent être simulés à travers un nombre
relativement simple de "productions". Celles-ci se déclenchent quand les conditions pré-
spécifiées sont remplies. La MT réfère à la partie de l'architecture qui maintient la production
pertinente. Nous pensons avec Baddeley (1994), que la MT dans de tels systèmes, n'est qu'une
présomption qui étaye la modélisation plutôt qu'une tentative de représenter une composante
importante de la cognition humaine. En effet, le modèle "SOAR" (Newell, 1990), conçoit une MT
est avec une capacité illimitée. Cette modélisation n’est pas faite sur la base de résultats empiriques
et n'est pas cohérente avec ce qu'on connaît de la MT humaine (Baddeley, 1998).

• Celui de la neuropsychologie (interprétation) avec Carpenter et Just (1977), Daneman et


Carpenter (1980, 1983) et Just et Carpenter (1980) qui s'intéressent au rôle de la MT dans la
cognition en relation avec les différences individuelles. Daneman et Carpenter (1980) demandent
à des sujets de lire des séries de phrases et de rappeler le dernier mot de chacune. La double
exigence (comprendre et rappeler) rend cette tâche très différente de celle de l'empan de
mots. Les auteurs notent une forte corrélation entre ce type d’empan et la performance dans
des tests standards de compréhension à partir de la lecture. Oakhill (1982, 1984) et Oakhill,
Yuill et Parkin (1988) ont une approche similaire dans l'étude de la MT et du développement
de la compréhension chez l'enfant. Oakhill et al. (1988) s'intéressent aux enfants qui
présentent un trouble de compréhension avec une capacité de lecture de mots isolés normale.
Ils constatent que ces enfants ont des performances pauvres dans les tâches d'empan et des
difficultés dans la capacité d'extraire des inférences à partir des textes lus.
Dans la suite des études sur les différences individuelles, Kyllonen et Christal (1990) essayent
de fournir une alternative à l'approche psychométrique classique. Ils testent des recrus de
l'armée par des tests classiques de QI et des tâches de MT. Ils notent que les mesures du QI
sont corrélées à celles de la MT. Le QI est plus sensible à la scolarité que la MT qui est plus
influencée par la vitesse de traitement. Le concept de MT offre donc des mesures moins
influencées par les facteurs culturels que les tests classiques de raisonnement.
Ces travaux donnent des éclaircissements sur la MT, mais la plupart s'intéresse plus à l'étude de
la compréhension et du raisonnement qu'à la MT per se (Baddeley et Hitch, 1994).

• Celui issu de la proposition originale de Baddeley et Hitch (1974), revue et précisée plus tard
(Baddeley, 1993, 1996a et b, 1998a) où l’idée du fractionnement du système en composantes est
centrale. Il est évident que cette approche ne contredit pas celles basées sur les différences

7
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

individuelles mais elle insiste plus sur le fractionnement de la MT et est plus associée aux
problèmes neuropsychologiques.
Le modèle de MT proposé par Baddeley et Hitch (1974) a joué un rôle important dans les
études fondamentales et neuropsychologiques de la mémoire. Il a réussi à rendre compte et à
expliquer des données complexes issues des expériences de laboratoire sur des sujets normaux. Il
a également prouvé son utilité dans l'étude neuropsychologique des patients cérébrolésés.
L'insight essentiel de leur modèle est que la MT ne doit pas être conçue comme étant unitaire.
Elle est composée d'unités de stockages séparées : deux sous-systèmes esclaves : une boucle
phonologique qui maintient temporairement l'information basée sur la parole et un registre visuo-
spatial capable de maintenir temporairement et de manipuler l'information visuo-spatiale. Elle est
également composée d'un administrateur central (exécutif) jouant essentiellement un rôle de
contrôle attentionnel. La dimension de contrôle attentionnel est capitale dans ce modèle.
Cependant il faut souligner que dans ce modèle, le terme attention ne renvoie pas à la dimension
primaire de l'attention qu'est la vigilance et l'éveil mais à une dimension supérieure qu'est la
capacité de répartir et diriger les ressources attentionnelles et de contrôler l'exécution de l'action.

1.2 Modules de la MT
Le modèle de MT (Baddeley et Hitch, 1974) est une structure hiérarchique tripartite (Cf. figure. 1)
comprenant un administrateur central3 (AC) assisté par deux systèmes esclaves (sous-systèmes) à
modalité spécifique : la boucle phonologique et articulatoire (BPA) et le registre visuo-spatial
(RVS)4.

1.2.1 La boucle phonologique et articulatoire


La BPA serait impliquée dans différents types de traitements verbaux dont la compréhension des
phrases (Vallar et Shallice, 1990), l'acquisition du langage (Papagno et Vallar, 1992) et l'apprentissage
de la syntaxe et de la lecture (Cf. Gathercole, 1994). Cette composante de la MT est probablement la
plus simple à étudier (Baddeley et Hitch, 1974). C'est également celle qui a suscité le plus de

3 "Central executive" en anglais. La traduction "administrateur central", que nous utilisons est celle adoptée par les
auteurs francophones.
4 Deux traductions différentes du terme "Visuo-Spatial Scratch Pad" sont proposées pour ce sous-système. Van der
Linden utilise le terme "Registre Visuo-Spatial" alors que les traducteurs du livre "Working memory" de Baddeley
(1993) utilisent le terme "Calepin Visuo-Spatial". Nous préferons "Registre Visuo-Spatial" qui est utilisé dans le
langage informatique pour désigner "organe de base d'un ordinateur capable de stocker une information
élémentaire pour la mettre en relation directe avec les organes de calcul" (Le petit Larousse, 1996). Il nous paraît
plus adéquat que celui de calepin "petit carnet" qui met plus l'accent sur la temporalité du stockage.

8
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

travaux. Spécialisée dans le stockage temporaire de l'information verbale, elle comporterait deux
composantes :

• Une unité de stockage phonologique à capacité limitée qui reçoit et stocke les informations
verbales sous un code phonologique ;
• Un processus de contrôle articulatoire qui rafraîchit les éléments contenus dans l'unité de
stockage par la répétition subvocale.
Les informations verbales présentées auditivement accèdent directement au stock
phonologique. Les informations visuelles doivent être converties en code phonologique pour
accéder à l'unité de stockage phonologique (Cf. fig. 2). Les traces mnésiques contenues dans le
stock phonologique s'estomperaient au bout de deux secondes environ, sauf si elles sont
rafraîchies par le processus de contrôle articulatoire. Ce processus est aussi capable d'utiliser la
subvocalisation pour dénommer un stimulus visuel et l'enregistrer dans le stock phonologique
(Baddeley et Hitch, 1994). Ce système est supposé soutenir l'empan de chiffres, où le nombre
d'items retenus serait fonction de la vitesse d'effacement de la trace mnésique et la vitesse à
laquelle elle peut être rafraîchie par la répétition subvocale.
Entrée Entrée
Auditive Visuelle

Analyse
Phonologique
Code
Stock phonologique visuel
à court terme

Boucle de récapitulation Recodage


articulatoire phonologique

Figure 1-2. Architecture fonctionnelle de la mémoire de travail : le système de la boucle phonologique (Van
der Linden, 1994).

La subvocalisation peut être enregistrée par l'électromyogramme, mais elle ne nécessite pas
l'intervention réelle de la musculature vocale. Les patients anarthriques (qui ont perdu la capacité
de contrôler la musculature périphérique de la parole) sont néanmoins capables d'utiliser
normalement leur boucle phonologique. Ceci suggère que le système dépend de la
programmation centrale de la parole plutôt que de son exécution (Baddeley et Wilson, 1985).
Bishop et Robson (1989) constatent que la boucle phonologique est fonctionnelle chez les
enfants qui ont une anarthrie congénitale suggérant que le système ne fait pas appel à la parole
explicite pour se développer. En revanche, le trouble de la programmation motrice tel qu'observé

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______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

dans la dyspraxie, altère significativement les performances (Caplan, Rochon et Waters, 1992).
C'est pour cette raison que Baddeley (1993) a proposé l'utilisation du concept de boucle
phonologique plutôt que celui de boucle articulatoire, proposé en premier lieu (1974) et qui
implique une intervention directe de l'articulation.
L'apport nouveau du modèle de Baddeley et Hitch est le "fractionnement" de la MCT et la
modularité de ses composantes. Le maintien et la manipulation des sons sont assurés par la BPA
composée d'une unité de stockage phonologique et d'un processus de contrôle articulatoire. Les
arguments en faveur de ce sous-système proviennent de plusieurs sources : il existe quatre séries
de preuves supportant la notion de boucle phonologique et de ses deux composantes : l'unité de
stockage et le processus de contrôle articulatoire.

1.2.1.1 L'effet de similarité phonologique


Le rappel sériel immédiat de lettres se détériore si les items présentent une similarité sonore
(Conrad et Hull, 1964). L'empan de lettres semblables phonologiquement (P, B, G, V, T, C) est
inférieur à celui de lettres dissemblables (F, W, Y, K, R, H). Ceci montre que l'unité de stockage
phonologique utilise un codage phonologique. Les items semblables phonologiquement ont des
codes relativement semblables. Ceci rend plus difficile leur distinction et leur restitution sérielle
immédiate. Ce phénomène est extrêmement robuste sous des conditions standards. Notons
toutefois, que le codage phonologique est une stratégie optionnelle en présentation visuelle. Par
ailleurs, l'effet de similitude peut être aboli par la suppression articulatoire (Murray, 1968). Il est
particulièrement absent chez les enfants de moins de 8 ans (Halliday et al., 1990) et n'a pas lieu
chez les patients ayant une déficience acquise dans les opérations de la boucle phonologique
(Vallar et Shallice, 1990). La présence d'un effet de similarité phonologique est donc considérée
comme un indice de la normalité du fonctionnement du stock phonologique. Cependant, on ne
sait pas si l'aspect critique de la similitude se situe au niveau des sonorités, des phonèmes ou des
commandes articulatoires. Nous préférons l'adjectif phonologique, c'est un terme plus neutre que
"acoustique" ou "phonémique", qui renvoient à des positions théoriques particulières.

1.2.1.2 L'effet d'écoute d'un son non approprié


Un matériel parlé que le sujet est invité à ignorer peut altérer le rappel sériel verbal (Colle et
Welsh, 1976). Cet effet ne paraît pas être dû à la distraction générale ni dépendre des
caractéristiques lexicales ou sémantiques du matériel non approprié. Les performances sont
affectées de la même manière par les mots que par les syllabes sans signification. Salamé et
Baddeley (1982) interprètent ces résultats en suggérant que ce qui est prononcé accède
obligatoirement à l'unité de stockage phonologique où il affecte la trace mnésique. En revanche le

10
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

bruit blanc n'altère pas les performances, contrairement à la parole ou à la musique (Salamé et
Baddeley, 1989). Les mécanismes sous-tendant cet effet ne sont pas très clairs (Baddeley, 1993).
Salamé et Baddeley (1982) notent légèrement plus de déficit quand le bruit à ignorer (associé à
l'empan de chiffres) consiste en d'autres chiffres ou mots contenant les mêmes phonèmes que les
chiffres. Lorsque les mots à ignorer sont différents phonologiquement, le déficit est moindre. Il
est important de noter qu'il n'y a pas de différence entre l'effet dû au bruit composé de noms de
chiffres et celui composé de mots formés à partir des mêmes phonèmes que les chiffres. Ceci
montre que les mots ne sont pas les seuls à altérer la trace mnésique du stock phonologique. En
effet, l'amplitude de l'effet du discours non approprié ne dépend pas du sens du matériel puisque le
stock phonologique est insensible aux facteurs sémantiques mais vulnérable aux facteurs
phonologiques.

1.2.1.3 L'effet de longueur du mot


L'empan de la mémoire verbale immédiate dépend systématiquement de la longueur du mot :
l'empan des mots longs est inférieur à celui des mots courts. Ceci serait dû au fait que les sujets
répètent en temps réel : les mots longs demandent plus de temps pour être recyclés (Baddeley,
Grant, Wight et Thomson, 1975). Le facteur critique paraît donc être la durée de prononciation
du mot. Les mots monosyllabiques sont généralement prononcés plus vite et sont donc plus
faciles à répéter immédiatement que les mots polysyllabiques. Cependant, c'est plus la durée de
prononciation que le nombre de syllabes qui détermine l'effet de longueur. Les données classiques
concernant le "chiffre magique" 7 + 2 sont à nuancer. Ceci suggère que la capacité de stockage et
la vitesse d'articulation ne sont pas indépendants. Ainsi, dans certaines langues, les noms de
chiffres n'ont pas la même vitesse d'articulation. Par exemple, l'empan en gallois est typiquement
inférieur à celui en anglais. Les chiffres sont dans les deux cas monosyllabiques, mais diffèrent par
la vitesse maximale d'articulation (Ellis et Hennelly, 1980). Naveh-Benjamin et Ayres (1986)
explorent davantage cet effet et constatent une corrélation entre le temps nécessaire à la
prononciation des chiffres et l'empan mnésique avec respectivement dans l'ordre descendant
d'empan : l'anglais, l'espagnol, l'hébreu puis l'arabe où la vitesse d'articulation moyenne des chiffres
et le nombre de syllabes sont plus longs. Hoosein et Salili (1988) notent que la vitesse moyenne
de prononciation des chiffres chinois est de 265 millisecondes par chiffre donnant un empan
moyen de 9,9 contre une vitesse de prononciation de 321 pour l'anglais aboutissant à un empan
moyen de 6,6.
L'interprétation la plus simple de l'effet de longueur de mot est qu'il reflète la rapidité de la
répétition subvocale, qui limite en retour la vitesse avec laquelle la trace mnésique est rafraîchie.
La vitesse de répétition subvocale ou vocale implique l'établissement et l'utilisation de

11
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

programmes moteurs du langage. Ce processus de répétition ne nécessite pas l'intégrité de la


fonctionnalité de la musculature de la parole, puisque les patients qui ont perdu la capacité
d'articulation vocale montrent un fonctionnement normal de la boucle phonologique (Baddeley
et Wilson, 1985 ; Vallar et Cappa, 1987). L'interprétation de tels résultats postule que la répétition
subvocale implique la mise en jeu d'une programmation centrale de la parole mais ne nécessite
pas que son output se manifeste.
La présence d'un effet de longueur peut être considérée comme un indice de normalité du
fonctionnement de la récapitulation articulatoire et son absence refléterait l'existence d'un
dysfonctionnement de ce mécanisme.

1.2.1.4 L'effet de suppression articulatoire


Quand on demande à un sujet de répéter itérativement un son "non approprié" (par exemple
"bla, bla, bla..") durant le rappel sériel immédiat, sa performance se détériore. Cet effet serait dû à
l'annulation de la répétition subvocale qui maintient les items qui ont accédé à l'unité de stockage
phonologique. D'après Baddeley (1993), cet effet n'est pas dû à la baisse de l'attention qu'induit la
présence de la parole auto-générée et non appropriée, et ne dépend pas du type de matériel
répété. La répétition (bla, bla ...) empêche le matériel d'être rafraîchi et interfère avec toute
possibilité d'encoder le matériel présenté visuellement par la subvocalisation. Ceci est dû au fait
que le matériel visuel peut, en cas de non-suppression verbale, être converti par subvocalisation
en code phonologique pouvant être enregistré dans l'unité de stockage. Le pouvoir négatif de la
suppression articulatoire sur le matériel visuel s'observe davantage par l'élimination des effets de
similitude et d'écoute de discours non approprié. De plus, la suppression articulatoire abolit l'effet
de longueur quel que soit le type de matériel (visuel ou auditif) puisque l'effet de longueur repose
lui aussi sur la subvocalisation (Baddeley, Lewis et Vallar, 1984). L'association de tous ces effets
(similarité phonologique, écoute de son non approprié, longueur du mot, suppression
articulatoire) apporte des arguments supplémentaires en faveur de l'existence de la boucle
phonologique telle que conceptualisée par Baddeley et Hitch (1974).
À côté de ces preuves, d'autres illustrations valident l'hypothèse de la boucle phonologique. Parmi
ces illustrations soulignons celles issues de la clinique neuropsychologique. Par exemple, le cas P.V.
(Vallar et Baddeley, 1984) qui présente un déficit pur de la mémoire phonologique à court terme. À
l'examen, cette patiente montre des performances en accord avec l'hypothèse d'un stock
phonologique à court terme défectueux.
Ainsi, sur le plan expérimental et clinique, lorsqu'on veut tester la fonctionnalité de la BPA, on doit chercher
les effets de longueur et de similarité phonologique. Leur existence attesterait, respectivement, du bon fonctionnement du

12
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

stock phonologique et des processus de récapitulation articulatoire. L'examen des autres effets (suppression articulatoire
et écoute de son non approprié) peut apporter d'autres éclairages sur la structure et le fonctionnement de la BPA.

1.2.2 Le registre visuo-spatial


Le registre visuo-spatial est spécialisé dans le stockage temporaire de l'information visuo-spatiale
et dans la génération et la manipulation des images mentales. Cette présomption suggère qu’il
puisse servir à une multitude de fonctions. Hatano et Osawa (1983) pensent qu'il est impliqué
dans l'orientation topographique et dans la planification et l’exécution des tâches spatiales.
L'architecture fonctionnelle du RVS est actuellement moins bien comprise que celle de la boucle
phonologique. La plupart des recherches entreprises se sont intéressées à l'étude de la BPA de la
MT plutôt qu'à celle du RVS (Logie, 1995).
Les preuves soutenant l’existence d’un sous-système séparé responsable du traitement des
informations visuo-spatiales se sont accumulées pour valider l'individualisation du RVS comme
sous-système distinct ayant un statut particulier dans le modèle de MT. Ces preuves proviennent
d'expériences en psychologie cognitive chez les sujets normaux et d'études de cas de patients
cérébrolésés. Les résultats de ces travaux ont permis de :

• Dissocier le sous-système responsable du traitement de l'information visuo-spatiale de celui


responsable du traitement de l'information verbale et d'étudier leurs relations ;
• Dissocier au sein de ce sous-système entre le traitement visuel et le traitement spatial ;
• Et d'avancer dans la compréhension des mécanismes soutenant le fonctionnement de ce
sous-système.
Pour cela, il est très important de revenir aux recherches portant sur l'imagerie mentale et ses
relations avec la perception visuelle afin d'analyser les mécanismes en jeu dans le traitement de
l'information visuo-spatiale et développer les outils de compréhension du RVS.

1.2.2.1 Individualisation du registre visuo-spatial


Sur le plan méthodologique les études portant sur le RVS utilisent les mêmes procédures de
recherche que pour la BPA. Ainsi, les effets de l’interférence spécifique ont été une source de
preuves majeure sur la nature de ce registre. On a par exemple démontré qu’une activité articulatoire
ou verbale concurrente altère préférentiellement le matériel traité dans l'unité de stockage
phonologique, tandis qu’une activité visuelle ou spatiale altère le matériel traité dans le RVS.
Baddeley et Lieberman (1980) montrent que des sujets qui ont appris des listes de mots en utilisant
l’imagerie basée sur la localisation spatiale, ont des performances supérieures à ceux qui utilisent la
répétition verbale. Toutefois, ces différences disparaissent quand on demande aux sujets d’effectuer

13
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

en parallèle une tâche visuo-spatiale de poursuite d’un point lumineux en mouvement (avec un stylet).
Les auteurs concluent que l’imagerie et la perception visuelles partagent des ressources autres que
celles utilisées par le système verbal. Baddeley et al. (1975) utilisent la tâche de "Brooks" sous deux
conditions : visuelle et spatiale, ils constatent qu’une tâche de poursuite visuo-spatiale concurrente ne
perturbe que la condition spatiale tout en maintenant le même niveau de performances dans la
condition verbale équivalente.
Ce type de dissociation est appuyé par des preuves neuropsychologiques. Par exemple, les
patients ayant des lésions postérieures droites ont de faibles performances au test de Corsi
(empan spatial), bien qu’ils aient un empan auditivo-verbal normal (De Renzi et Nichelli, 1975).

1.2.2.2 A propos de l'architecture fonctionnelle du registre visuo-spatial


Actuellement, plusieurs travaux tentent d'établir une architecture fonctionnelle du RVS à l'image de
celle de la BPA, mais ils en sont encore à une étape exploratoire. Cette démarche peut biaiser
sévèrement les recherches en cours et aboutir éventuellement à une impasse. Ceci est logique
puisque la nature de l'encodage des deux sous-systèmes est différente. Si la nature de l'encodage dans
la BPA est actuellement bien établie, celle du RVS reste encore controversée.
On suppose actuellement que le RVS implique une unité de stockage brève de l’information et un
processus de contrôle responsable de l’enregistrement de l’information visuo-spatiale et de son
rafraîchissement par la répétition. Cependant, il y a moins d'arguments quant à la nature de ces
mécanismes d’encodage et de rafraîchissement. De même, rien n’a été établi de manière définitive
quant à l’équivalent de l’effet de longueur. Pourtant, on a noté que le stockage peut être altéré par la
présentation d’items visuels non appropriés comme des plaques de couleurs ou des images (Logie,
1986) ou par le traitement spatial concurrent, rappelant l'équivalent de l’effet de suppression et de l’effet
de matériel non approprié à propos de la boucle phonologique. D'un autre côté, les études sur la
similarité visuelle n'ont pas montré pour le RVS d'effets aussi prononcés que pour la BPA. Ces
effets sont réduits comme le montrent les travaux sur les caractères chinois et les formes non
significatives (Yik, 1978 ; Walker, Hitch et Duroe, 1993). Il paraît aussi que la similarité visuelle
désorganise le rappel quand le recodage verbal n’est pas sûr, comme c’est le cas chez les jeunes
enfants (Hitch et al., 1988 ; Longoni et Scalisi, 1994), ou quand le rappel verbal est empêché par la
suppression articulatoire (Hitch, Halliday, Dodd et Litter 1989 ; Walker et al., 1993). Ainsi, en
l’absence de manipulations de la similarité spatiale au sein du RVS, ces travaux nous renseignent
peu sur l’organisation des informations visuelles et spatiales.

14
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

1.2.3 L'administrateur central


L'AC se situe au cœur du modèle de MT. Il représente la composante hypothétique la plus
complexe et la moins comprise du modèle. Baddeley a intentionnellement évité de l'étudier au
départ pour concentrer les efforts sur l'analyse des sous-systèmes esclaves. Cette situation de
négligence commencerait à devenir embarrassant pour le modèle. C'est alors qu'on a commencé, à
partir de la moitié des années 1980, à redresser la balance (Baddeley, 1996a). Les travaux se sont
ainsi multipliés et on arrive de plus en plus à discerner des sous-composantes de l'AC et à
développer des tâches appropriées pour identifier son fonctionnement.
Pour Logie (1995) l'AC agit comme une sorte de "neuroware" flexible de traitement de
l'information. Il serait capable de gérer une variété de "software" incluant la génération et la
manipulation de l'imagerie visuelle, de la compréhension du langage et des heuristiques de
résolution de problèmes. Il s'agit pour Gathercole (1994) d'un système amodal alimenté par des
ressources de traitement à capacité limitée pouvant être flexiblement déployées pour répondre à
différentes exigences de traitement d'informations. Selon Baddeley (1992), l'AC aurait un rôle
important dans la planification et le contrôle de l'action. Il serait également responsable de
l'intégration des informations provenant des sous-systèmes esclaves (BPA et RVS) et des liens
que ces sous-systèmes entretiennent avec la MLT.

1.2.3.1 Rôles fonctionnels attribués à l'administrateur central


Tous les travaux s'accordent sur la fonction de contrôle attentionnel de l'AC, sans qu'il y ait
toutefois unanimité sur la spécificité des rôles qu'il joue. Il constitue pourtant la composante la plus
importante en ce qui concerne son impact sur la cognition. Son manque de spécificité est en
contraste total avec celui des sous-systèmes esclaves. Ceci l'a transformé en une "zone
d'ignorance résiduelle" à laquelle on risque de coller tout ce qu'on ne comprend pas (Baddeley,
1992 ; 1996a). Par ailleurs, dans l'étude du contrôle attentionnel, il faut être attentif au fait qu'il y a
au moins deux dimensions que peu de travaux essayent de distinguer explicitement : les
ressources de l'AC, à savoir sa capacité de traitement et ses fonctions de contrôle et de
planification, donc son rôle exécutif.

1.2.3.1.1 Notion de ressources attentionnelles


La notion de ressources est aussi ancienne que celle de psychologie cognitive de l'attention. L'idée
que le système cognitif a une capacité limitée est omniprésente dans tous les modèles
attentionnels. Les travaux sur l'attention sélective mettent en évidence l'importance de protéger le
système cognitif de la surcharge du flot d'informations non pertinentes. Il s'agit du filtrage de
l'information qui s'effectue à un niveau précoce pour Broadbent (1958), tardif pour Treisman

15
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

(1960, citée par Camus, 1996) et Deutsh et Deutsh (1963) ou "as soon as possible" pour Navon
(1989). Quel que soit le niveau où s'effectue le filtrage, l'attention sélective prévient de la
surcharge et permet de focaliser les ressources sur une opération, optimisant ainsi le niveau de
performance.
L'apport le plus influent est celui des travaux sur l'attention divisée (Kahnemann, 1973 ;
Norman et Bobrow, 1975) qui supposent que le système cognitif est doté d'un quantum limité de
ressources attentionnelles et que chaque tâche puise une quantité de ces ressources. Lorsque le
coût (en ressources attentionnelles) d'exécution d'une ou de plusieurs tâches ne dépasse pas les
ressources disponibles, les performances ne sont pas altérées. Toutefois, lorsqu'on combine deux
tâches exigeantes en ressources attentionnelles et que le coût de leur exécution dépasse les
ressources disponibles, l'efficience des performances ne resterait plus au même niveau. La nature
de ces ressources est "attentionnelle" pour Posner et Snyder (1975), "cognitive" pour Posner et
al. (1989, cités par Siérof, 1992) ou "mentale" pour Siérof (1992). Quel que soit "l'étiquette"
retenue, la limitation des ressources déterminerait la qualité et l'efficience du traitement de
l'information en cours.
Dans ce contexte, la MT consiste en un "réservoir" limité de ressources qui peut servir au
stockage et au traitement. Les travaux de Daneman et Carpenter (1980), de Baddeley et al. (1991) et de
Just et Carpenter (1992) insistent sur cet aspect. Il existerait ainsi un "trade-off" entre traitement
et stockage lorsque le sujet effectue une tâche qui dépasse les ressources limitées du système.
Le cas AM, examiné par Van der Linden Coyette et Seron (1992), témoigne d'un trouble de la
MT qui peut être attribué à un déficit des ressources de l'AC. AM est un traumatisé crânien et n'a
pas de déficit important de fonctionnement intellectuel général, de MLT ou des fonctions
exécutives en contraste avec de faibles empans verbaux et visuo-spatiaux. Ce déficit n'est pas
associé à un dysfonctionnement du stock phonologique et de la récapitulation articulatoire.
Cependant, l'examen montre que le déficit le plus important s'observe dans la tâche de Brown-
Peterson. Ce déficit s'amplifie avec l'augmentation de la charge dans cette tâche. Ceci suggère que
le patient dispose de peu de ressources pour affronter les demandes de la tâche double de Brown-
Peterson qui implique à la fois un stockage et un traitement. Lorsque la tâche double n'implique
pas de stockage, les performances du patient sont normales. Il s'avère d'après ce cas, que le déficit
de la MT peut se résumer à une réduction pathologique des capacités de l'AC.
Il convient d'insister par ailleurs sur le fait que la quantité de ressources disponibles n'est pas le
seul facteur décisif. Plusieurs autres facteurs sont impliqués. Le premier est celui des différences
individuelles. Le coût d'une tâche dépend des niveaux de compétences de chacun et de sa
motivation. De plus, la nature des processus perceptifs de traitement ou de réponse qu'ils

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______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

impliquent est aussi très importante. La jonction de deux tâches ayant une interférence "structurale"
(Kahnemann, 1973), c’est-à-dire, employant le même processus perceptif, de traitement ou de
réponse, peut induire une chute des performances qui ne serait pas nécessairement le résultat d'une
limitation des ressources attentionnelles. Une attention particulière doit être déployée lors du choix
des tâches à utiliser dans un paradigme de double tâche. De plus, la capacité de diviser l'attention
n'est pas seulement déterminée par la capacité des ressources de traitement et par le type de
tâches combinées, mais aussi par les stratégies d'allocation de l'attention. En cas de risque de
saturation des ressources, le sujet peut choisir des priorités de traitement. Lorsqu'il s'agit d'une
tâche impliquant des critères de vitesse et de précision, il peut investir son effort dans la précision
en sacrifiant la vitesse ou vice-versa. Ce point est critique puisqu'il induit des risques de biais de
partage parallèle de l'attention et implique des problèmes d'interprétation. Il est d'une grande
importance puisqu'il montre que la dimension exécutive stratégique est aussi un facteur
déterminant inséparable de la question de ressources.

1.2.3.1.2 Notion de contrôle exécutif


Cette notion n'est pas innovatrice dans le modèle de Baddeley. Le modèle d'Atkinson et Shiffrin
(1968) l'avait postulé bien avant. Néanmoins, en se référant au modèle de Norman et Shallice
(1986), Baddeley a sensiblement étayé la fonction de rétention temporaire des informations aux
fonctions exécutives qui contrôlent l'activité cognitive. D'ailleurs, en constatant que les fonctions
présumées de l'AC sont comparables aux fonctions altérées chez les patients ayant des lésions
frontales, Baddeley a proposé de remplacer le terme syndrome frontal par syndrome de
dysfonctionnement de l'administrateur central ou syndrome dysexécutif (Baddeley et Wilson,
1988). Le but étant d'utiliser un terme fonctionnel permettant l'analyse des processus exécutifs
indépendamment de la question relevant des localisations cérébrales. Les deux problèmes sont
intéressants, mais les neuropsychologues sont plus concernés par l'analyse de la nature des
processus exécutifs que par la connaissance de leurs bases anatomiques qu'on postule, à tort ou à
raison, exclusivement localisés dans les lobes frontaux.
Les fonctions exécutives englobent plusieurs formes de processus cognitifs et réfèrent
généralement aux mécanismes par lesquels un individu optimise sa performance. D'après Lezak
(1995), les fonctions exécutives peuvent ainsi inclure la volition (initiative et formulation des
projets, de conscience de soi et de l'environnement), la planification, l'action dirigée vers un but
et l'efficacité des actes qui vient du contrôle de la qualité des réponses. Pour Robbins et al.
(1994), les fonctions exécutives peuvent inclure des capacités comme la génération de réponses
flexibles et appropriées dans des circonstances alternantes, la formulation de nouveaux plans

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______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

d'action, l'optimisation et l'organisation (scheduling) d'un comportement tout en supprimant les


réponses non appropriées, et l'utilisation de stratégies pour améliorer les fonctions mnémoniques.
D'autres découpages des fonctions exécutives figurent dans la littérature (Dubois et al., 1994 etc.).
Or, comme le signalent Lezak et al. (1994) "toutes les schématisations entretiennent des relations
étroites, décrivent les mêmes observations et s'organisent autour des mêmes notions".
En examinant l'interdépendance entre la capacité de la MT et les fonctions exécutives, Lehto
(1996) remarque que parmi les trois tests de fonctions exécutives utilisées (WCST, Tour de
Hanoi, tâche de recherche d'un but), seul le WCST est fortement corrélé aux tâches de MT. Les
deux autres tâches (la Tour de Hanoi et la tâche de recherche de but) ne sont corrélées avec
aucune tâche de MT et ne sont pas intercorrélées. Selon l'auteur, ceci montre qu'il existe des
fonctions exécutives séparées et qu'il n'y a pas lieu de considérer un AC unitaire à capacité limitée.
Ceci soulève la problématique de l'unité ou du fractionnement de l'AC ; s'agit t-il d'un système
unifié avec des fonctions multiples ou d'un ensemble de processus de contrôle indépendants. Ce
problème sera discuté plus loin.
Le modèle de MT de Baddeley intègre donc les deux dimensions du contrôle attentionnel : les
ressources et le contrôle exécutif. En effet, pour Baddeley (1993) l'AC aurait deux rôles :
• Coordonner des activités qui se déroulent simultanément : attention divisée dans des
tâches doubles ;
• Empêcher les stimuli non pertinents d'interférer avec la réalisation d'une tâche en cours :
inhibition des informations non pertinentes.
En 1996, Baddeley a rajouté deux autres fonctions :
• La capacité d'alterner les stratégies de récupération de l'information comme ceci peut être
reflété dans la tâche de génération de séquences aléatoires ;
• La capacité de maintenir et de manipuler les informations en MLT.
D'autres auteurs attribuent d'autres rôles à l'AC. Il serait, d'après Morris et Jones (1990) impliqué
dans les processus de mise à jour de la mémoire, c'est-à-dire dans la modification du statut d'une
représentation en mémoire en fonction d'un nouvel input. Il aurait également des fonctions de
stockage propre dont la nature n'est cependant pas clairement spécifiée (Van der Linden, 1994). De
même il aurait un rôle dans l'intégration des informations provenant des sous-systèmes esclaves (BP
et RVS) et des liens que ces sous-systèmes entretiennent avec la MLT. De plus, l'AC serait en
mesure de soutenir les systèmes esclaves dans le maintien temporaire de l'information (Van der
Linden, 1994).

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______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

La spécificité des rôles de l'AC reste encore peu précise. Cependant, on peut retenir suite aux
travaux de Gathercole (1994), Van der Linden (1994) et Baddeley (1993, 1996a) les deux catégories
de fonctions suivantes comme pouvant rendre compte des fonctions de l'AC :
 L'une relative à la capacité de traitement et de stockage en termes de gestion des ressources
pouvant être déployées pour répondre aux exigences du traitement.
 L'autre relative aux fonctions de contrôle exécutif des activités incluant :
• L'inhibition des réponses dominantes non pertinentes par rapport au contexte ;
• La planification efficiente (par opposition aux routines surapprises et aux informations
cristallisées) ;
• La régulation et l'alternance de programmes d'action en fonction des exigences de
l'environnement (en opposition aux réponses stéréotypées et rigides) ;
• Le déploiement de stratégies efficaces de maintien et de manipulation des informations en
MLT.
Afin de rendre la compréhension de l'AC moins vague, une modélisation de son architecture
et de son fonctionnement se sont avérées indispensables.

1.2.3.2 Modélisation du fonctionnement de l'administrateur central


Étant considéré comme un système de contrôle attentionnel de l'action, Baddeley a cherché, au
départ, à conceptualiser l'AC à partir de la littérature disponible sur l'attention. Or, il a constaté,
que la revue de la littérature de Broadbent (1982) est très large et ne répond pas à ses besoins car
elle n'est pas axée sur la question du contrôle attentionnel. En revanche, les travaux de Norman
et Shallice correspondait bien à la conceptualisation voulue. C'est ainsi que pour Baddeley (1993),
la proposition de Norman et Shallice (1986) relative au système Attentionnel Superviseur (SAS)
constitue une base théorique indispensable pour conceptualiser l'AC. Il s'agit d'un modèle développé
à partir des travaux de Norman (1981) sur les actes manqués et de Shallice (1991) sur les patients
présentant un syndrome frontal. Le modèle de Norman et Shallice (1986), qu'on présentera avec
plus de détails au chapitre suivant, postule que la plupart des actions en cours dépendent de routines
(schémas d'action) surapprises. Lorsque différentes routines entrent en compétition, il se produit un
conflit dont la résolution peut s'effectuer à deux niveaux du contrôle de l'action :
 Un niveau semi-automatique de résolution de conflits, appelé "Gestionnaire des Priorités de
Déroulement" (GPD), comprenant un ensemble de règles élémentaires qui se déclenchent en
réaction aux stimuli environnementaux ordinaires pour le sujet.
 Un niveau de contrôle volontaire, appelé SAS, qui intervient lorsque le GPD ne suffit pas à
résoudre le conflit. Comme lorsque le sujet est devant une situation nouvelle ou quand la
réaction exige la planification, la sélection et le contrôle des réponses.
En adoptant le modèle de Norman et Shallice, Baddeley a obtenu "un bonus inattendu" puisque
ce modèle lui a permis d'expliquer d'anciennes données qu'il avait recueillies sur la capacité limitée

19
______________________________________________________________ La Mémoire de Travail

de la tâche de génération de séquences aléatoires (Baddeley, 1966). Dans cette tâche on invite le
sujet à produire des séquences aléatoires d'une série d'items (les chiffres de 1 à 20, les lettres de
l'alphabet...) comme s'il avait devant lui un panier à partir duquel il retirait des chiffres ou des lettres
au hasard. Cette tâche paraît assez simple si on l'effectue lentement, mais dès qu'on demande aux
sujets de l'effectuer rapidement, la quantité de production chute et un biais de randomisation
apparaît très clairement. Ce biais se manifeste par la production de séquences successives de
l'alphabet comme PQR et RST, et des abréviations comme USA et SNT. La redondance et la
stéréotypie augmentent linéairement avec le logarithme de la vitesse de génération (Baddeley, 1966).
Ces résultats consistants et clairs étaient difficiles à interpréter pour Baddeley sans le secours du
modèle de Norman et Shallice (Baddeley, 1992b). D'après ce modèle, il existe déjà un programme
surappris (schéma d'action) très fort qui consiste à réciter l'alphabet. Or, la simple récitation de
l'alphabet transgresse la consigne de randomisation. La tâche de production de séquences de lettres
dans un ordre aléatoire placerait le sujet dans une situation conflictuelle. Le sujet doit donc
interrompre le programme surappris et essayer de développer continuellement de nouvelles
stratégies de production en évitant les stéréotypes alphabétiques existant sans qu'une nouvelle
stratégie devienne automatique. C'est la capacité du SAS qui est mise en jeu pour intervenir
continuellement et permettre la randomisation souhaitée.

20
2 LE CONTROLE ATTENTIONNEL DE L'ACTION

La notion de contrôle attentionnel de l'action n'est pas indépendante de celle de la limitation de


capacité de traitement central. Cependant, l'accent est essentiellement mis sur la dimension
exécutive, c'est à dire, les stratégies mises en œuvre pour réaliser efficacement une action. La
performance résulterait de la mise en œuvre d'une variété de processus ayant deux extrêmes : d'un
côté les processus automatiques peu exigeants en ressources attentionnelles et de l'autre les
processus contrôlés très exigeants en ressources attentionnelles. Ces derniers processus assurent
le contrôle supérieur de l'action et sont dits "conscients" (Posner et Synder, 1975), "contrôlés"
(Shiffrin et Schneider, 1977) ou "mobilisateurs d'effort" effortful (Hasher et Zacks, 1979).
L'opposition entre des processus dits "automatiques" et d'autres dits "volontaires", contrôlés
ou "effortful" est l'un des postulats de base des modèles de contrôle attentionnel de l'action.
Cette distinction remonte aux travaux de Jackson (1882, 1884, 1887 ; cité par Gagnon et Goulet,
1992) qui a développé une conception neurophysiologique hiérarchique de l'organisation du
système nerveux. Jackson désigne par fonctionnement propositionnel les fonctions contrôlées et
complexes adaptatives aux situations nouvelles.
Les conceptions des processus automatico-volontaires se sont développées parallèlement à
l'essor de la psychologie cognitive, et donc dans une perspective plus psychologique. Plusieurs
conceptualisations contemporaines ont été mises à jour (Shiffrin et Schneider, 1977 ; Hasher et
Zacks, 1988 ; Norman et Shallice, 1986). Nous présentons ici celles de Shiffrin et Schneider
(1977) et Norman et Shallice (1986) qui sont les plus discutées dans la littérature actuelle.

2.1 Modèle des "deux processus"


Shiffrin et Schneider (1977) utilisent différentes tâches d'attention sélective et fournissent des
arguments manifestes d'une différence radicale dans la performance entre deux conditions
d'expérience. Les auteurs présentent au sujet des items à mémoriser (charge de 1 à 4 items) qu'il
doit identifier parmi un dispositif visuel comportant de 1 à 4 items distracteurs. Les auteurs visent
surtout à manipuler la nature de la relation entre les cibles et les réponses proposées. Deux
conditions sont planifiées :
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

♦ Une condition de congruence appelée "mapping cohérent" où les cibles (exemple chiffres)
sont de nature différente des distracteurs (exemple lettres) ;

♦ Une autre condition de non-congruence dite "mapping varié" où les cibles et les distracteurs
sont de même nature (des lettres par exemples).
Les résultats notent que les performances sont meilleures en temps et en précision dans la
condition de congruence, puisque le sujet n'a pas à mémoriser le contenu des cibles pour réussir
la tâche. Une distinction sur la base de l'appartenance à une catégorie suffit. De plus, il n'y a pas
d'effet de la charge à mémoriser ni du nombre de distracteurs. En revanche, dans la condition de
non-congruence, les performances sont faibles. Les items qui servent de cibles peuvent devenir
des distracteurs. Une opération de mémorisation est donc indispensable pour comparer un à un
les items mémorisés à ceux du dispositif visuel d'identification. Shiffrin et Schneider (1977)
notent un effet de charge et de nombre de distracteurs. Ils concluent qu'il existe deux processus
engagés dans la tâche d'attention sélective : un processus de traitement automatique qualifié de
"détection automatique" et un autre de traitement contrôlé qualifié de "recherche contrôlée".
Le processus automatique serait rapide, parallèle, facile à mettre en œuvre, non limité par la
capacité de la MCT et ne requiert pas de ressources attentionnelles. Il est surappris, cristallisé,
difficilement changeable et indépendant du contrôle du sujet.
Le processus contrôlé serait au contraire, lent, sériel, limité par la capacité de la MCT et
exige beaucoup de ressources attentionnelles. Il est mis en œuvre lors de situations nouvelles ou
difficiles. Il est flexible et dépendant du contrôle et de l'effort du sujet.
Le modèle des deux processus (automatiques vs contrôlés) développé par Shiffrin et Schneider
(1977) a été très utile pour rendre compte de certains déficits du contrôle de l'action. Sur cette
base, les auteurs distinguent les déficits d'attention focalisée (Focused Attention Deficit) D.A.F-
des déficits d'attention divisée D.A.D- (Divided Attention Deficit). Une erreur de type D.A.F
survient lorsqu'une réponse automatique interfère avec une nouvelle tâche exigeant un traitement
contrôlé. Une erreur de type D.A.D se produit lorsque les exigences attentionnelles d'une tâche
dépassent la capacité ou la vitesse de traitement des processus contrôlés.
Ce modèle a déclenché une masse importante de travaux sur l'automaticité et le contrôle de
l'action. Cependant, il a été l'objet de nombreuses critiques.
Pour Allport (1980), le modèle de Shiffrin et Schneider (1977) présente plusieurs insuffisances.
Il est hermétique sur la question de la nature des processus en jeu et sur les mécanismes qui les
sous-tendent. Outre la distinction traitement automatique vs contrôlé et la référence à un
processeur central à utilité générale et à capacité limitée, le modèle de Shiffrin et Schneider (1977)

23
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

ne fournit aucune précision processuelle. Il se résume en fait à une théorie homonculus qui
fournit des concepts passe-partout.
Pour Hasher et Zacks (1979), le modèle des deux processus de Shiffrin et Schneider (1977) est
dichotomisant (automatique ou contrôlé) alors que l'action devrait être mieux nuancée et placée
sur un continuum selon son degré de mobilisation d'effort. La conception du contrôle de l'action
en termes de continuum (dont les deux extrémités correspondent aux pôles automatique et
contrôlé) relativise l'opposition automatique vs contrôlé. Ce relativisme prend un statut particulier
dans le modèle de Norman et Shallice (1986) qui lui confèrent un niveau particulier de traitement.

2.2 Modèle du Système Attentionnel Superviseur


Alors que le modèle de Shiffrin et Schneider (1977) ne réfère qu'à deux systèmes séparés de
contrôle, le modèle de Norman et Shallice (1986) conçoit un processus semi-automatique,
comme niveau intermédiaire entre les processus automatiques et contrôlés. Ce dernier présente
l'avantage d'être issu non pas des travaux de laboratoires, mais d'observations cliniques de
patients frontaux (Shallice) et d'observations des actes manqués en milieu naturel (Norman).

2.2.1 Les sources du modèle


Le modèle de Norman et Shallice (1986) est plus complexe et plus étayé que celui de Shiffrin et
Schneider (1977). Il est né de la convergence des champs d'études de ces deux auteurs. Norman
essayait de comprendre comment certains signaux de la vie quotidienne pouvaient nous induire
en erreur. Il publia en 1981, suite aux travaux de Reason (1979), le modèle ATS (Activation-
Trigger-Schema) qui rend compte des erreurs qu'il appelle "capture errors" et qui seraient
associées à la capture des systèmes effecteurs par différents signaux capteurs. Parallèlement,
Shallice cherchait à analyser le dysfonctionnement de l'attention et de la programmation de
l'action chez des patients frontaux. Par ailleurs, dans la conceptualisation de leur modèle, les
auteurs se sont fondés sur deux types de travaux théoriquement et techniquement disparates.

♦ La théorie de Luria qui est une référence de base sur le dysfonctionnement frontal. Elle assigne
aux lobes frontaux un rôle de programmation, de régulation et de vérification de l'action.

♦ Les programmes computationnels de résolution de problèmes issus des travaux de l'intelligence


artificielle de type SOAR de Newell (1990) et ACT* d'Anderson (1993).
L'influence des modèles computationnels transparaît dans l'aspect architectural du modèle.
L'imprégnation par la théorie de Luria sur les lobes frontaux est évidente dans l'analyse de l'aspect
fonctionnel du modèle et de ses différentes composantes ainsi que dans la discussion de sa validité.

24
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

2.2.2 Les composantes du modèle


Le modèle de contrôle attentionnel de l'action de Norman et Shallice (1986) et Shallice (1982 ;
1988) repose essentiellement sur l'interaction entre les éléments de base des actions (Schèmes) et
deux niveaux de contrôle des actions. Cette interaction sous-tend trois niveaux de fonctionnement :
1. Un fonctionnement totalement automatique assuré par des schèmes "Schemata" d'action ou
de pensée ;
2. Un fonctionnement semi-automatique impliquant le Gestionnaire des Priorités de Déroulement
(GPD) "Contention Scheduling" qui résout horizontalement les conflits inter-schèmes sans
contrôle conscient délibéré ;
3. Un fonctionnement totalement contrôlé par le Système Attentionnel Superviseur (SAS)
"Supervisor Attentional System" qui intervient verticalement pour moduler la sélection
horizontale des schèmes par le GPD.

Système
Attentionnel
Superviseur

Activateur Unité de Système


Système
de la base contrôle des
perceptif opérations effecteur
de données

Gestionnaire des
priorités de
déroulement

Figure 2-1. Le système attentionnel superviseur de Norman et Shallice (1986) simplifié.

Supposer que les ressources attentionnelles sont limitées donne un sens fonctionnel à la
conception de systèmes séparés pour le contrôle de l'action. De ce fait, les activités surapprises
seront déléguées au système automatique laissant plus de liberté au SAS pour effectuer des tâches
plus exigeantes cognitivement. Ainsi, si on essaye de fuir un danger, le système attentionnel peut
planifier un chemin de fuite alors que le système automatique contrôle l'action de courir.

25
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

2.2.2.1 Les schèmes


Les schèmes assurent le fonctionnement entièrement automatique. Les schèmes, d'action ou de
pensée, sont des unités de base correspondant à des actions surapprises spécifiques (Shallice,
1982). Ils relèvent de processus plus "supérieurs" et ne doivent pas être assimilés aux schèmes
réflexes, au sens Piagétien du terme (Piaget, 1970). Ce sont des programmes de routine hautement
spécialisés en mesure de produire un output spécifique pour un certain nombre d'inputs. Shallice
(1982) cite comme exemple d'habilité surapprise : faire de longues divisions, préparer le petit
déjeuner ou trouver son chemin de retour. Ces schèmes peuvent être activés de deux façons :

♦ Soit par déclenchement à partir d'inputs perceptifs ;

♦ Soit par l'output d'autres schèmes.


Un schème fonctionne quand l'activation atteint un certain seuil. Le niveau d'activation d'un
schème est déterminé par des "activateurs de base de données" (triggers data base). Lorsqu'une
situation contient un aspect prégnant, celui-ci induit une forte activation d'un "activateur de base
de données" qui active à son tour un schème particulier. Chaque schème a un seuil spécifique qui
peut diminuer lorsqu'il est fréquemment utilisé. Une fois un schème est activé, il ne s'arrête que :
- S'il est activement désactivé ;
- Dés que le but est accompli ;
- Quand il est bloqué par l'activation d'un autre schème.
Les schèmes sont organisés hiérarchiquement. Burgess et Alderman, (1990) utilisent l'exemple
de conduite d'une voiture pour illustrer l'organisation hiérarchique de séries de schèmes. Un
schème de bas niveau peut constituer une routine comportementale très basique. Par exemple, le
contrôle du mouvement des yeux et de la tête pour regarder dans le miroir. Un niveau plus élevé
peut consister en une routine complexe d'actions ; comme ce que l'on fait en s'approchant d'un
feu rouge : diminuer la vitesse, freiner etc. Un exemple de schème déclenché par un autre peut
être ce qu'on fait quand le feu passe au vert : changer de vitesse, regarder le rétroviseur... Ces
actions totalement automatiques, ont lieu sans conscience des processus mis en jeu. Elles ont un
rôle adaptatif, car dans la vie réelle les situations sont généralement beaucoup plus complexes.
Les signaux sont multiples et ne se présentent pas de manière successive. Si les schèmes
fonctionnent sans contrôle supérieur, le comportement devient perturbé. Ainsi, un mécanisme de
contrôle supérieur est nécessaire pour résoudre les conflits inter-schèmes et sélectionner le
schème approprié. Puisque les schèmes peuvent être activés indépendamment l'un de l'autre par
différents aspects d'une situation, il est important que certains schèmes compétitifs soient
désactivés. L'apport nouveau du modèle de Norman et Shallice réside dans la conceptualisation
de deux systèmes qualitativement distincts qui assurent le processus critique de sélection des

26
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

schèmes : le GPD impliqué dans la sélection des actions de routine et le SAS engagé dans les
situations non routinières.

2.2.2.2 Le gestionnaire des priorités de déroulement (GPD)


Le GPD est le premier système de contrôle. Il agit horizontalement en sélectionnant la série de
schèmes la plus efficiente pour répondre aux demandes de la tâche en fonction des informations
provenant de l'environnement et des priorités courantes. C'est un processus semi-automatique
chargé de traiter les situations familières en utilisant au mieux les ressources limitées du système.
Le GPD agit en sélectionnant un nombre limité de schèmes compatibles. Il assure le contrôle
approprié des ressources disponibles jusqu'à la réalisation de l'objectif ou alternativement jusqu'à
ce qu'un schème plus prioritaire soit activé. C'est le cas des situations où, alors que quelqu'un est
entrain de faire une action routinière, un événement nécessitant une attention immédiate a lieu.
Le GPD sélectionne les schèmes en concurrence. Il se déclenche rapidement lors des situations
familières dont les lois et le plan sont clairs. Une fois plusieurs schèmes activés, la sélection est
assurée par inhibition latérale entre les schèmes selon leur compatibilité. Après la sélection, l'effet
de l'inhibition a besoin d'être maintenu jusqu'à l'accomplissement du but de l'action, même si
certains de ces déclencheurs perceptifs, maintenus en mémoire de travail, ne sont plus présents.
Or, les procédures de routine ne sont pas toujours suffisantes. En effet, le GPD n'a pas de
solution prête à être appliquée lors des situations non familières. Un système superviseur est donc
conceptualisé pour répondre à de telles situations.

2.2.2.3 Le Système attentionnel Superviseur


Le SAS interviendrait dans les situations suivantes :
♦ Lorsque les schèmes de sélection des routines, gérés par le GPD, ne suffisent pas pour
répondre aux demandes de la tâche et échouent ;
♦ Lorsque des routines appropriées de comportement sont absentes,
♦ Lorsque les schèmes sont faiblement activés, c'est-à-dire insuffisants pour déclencher d'autres
schèmes.
Ces cas de figure correspondent aux situations nouvelles et non familières. L'intervention du
SAS consiste à biaiser verticalement l'action du GPD en modulant le processus de sélection. Le
SAS ne remplace pas le GPD mais fournit un contrôle additionnel (modulation) sur les schèmes
en appliquant une inhibition et/ou activation supplémentaire. Le SAS ne sélectionne pas
directement les schèmes mais contrôle les niveaux d'activation et d'inhibition. Le contrôle des
schèmes n'est pas affecté par le degré de capture des signaux externes ou internes. Ce contrôle
s'effectue en programmant et contrôlant délibérément les schèmes. Ceci rend le fonctionnement
du SAS flexible, lent et pouvant s'appliquer à tous les domaines, alors que le GPD fonctionne de

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______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

façon fixe, rapide et limitée aux situations routinières. Le SAS n'est pas concerné par l'exécution
des actions routinières surapprises, celles-ci n'ayant pas besoin de contrôle laborieux. Le SAS est
mis en route dans les actions impliquant les opérations suivantes (Shallice, 1988) :

♦ La planification de l'action ;
♦ La correction d'erreurs ;
♦ Les réponses aux situations nouvelles ;
♦ Les réponses aux situations difficiles ou dangereuses ;
♦ L'inhibition des réponses dominantes.
Ces rôles peuvent être regroupés en deux classes (Burgess et Shallice, 1991) :
♦ Les situations de correction des erreurs produites par le GPD en l'absence du SAS ;
♦ Les situations nouvelles où il n'existe pas de procédure de routine pour produire un
comportement approprié

2.2.3 Structures cérébrales impliquées


En postulant l'existence de deux systèmes de contrôle de l'action, le modèle de Norman et
Shallice constitue un outil pertinent pour analyser et comprendre une large gamme de données
neuropsychologiques. Le fonctionnement du SAS est modélisé sur la base du cadre théorique des
travaux de Luria sur le rôle des lobes frontaux dans la programmation, la régulation et la
vérification de l'activité. Les auteurs font la prévision que l'altération du SAS entraîne des déficits
des fonctions exécutives similaires à ceux observés chez des patients frontaux. Ces postulats ont
été validés par les études portant sur l'homme et sur l'animal. L'apport des études de cas est très
révélateur. Lhermitte et al. (1972) rapportent une étude de cas de 4 patients ayant une lésion
frontale unilatérale, qui présentent un déficit dans la capacité d'établir et de suivre un programme.
Par exemple, lorsqu'on demande à "L" (un des patients) de reproduire la figure complexe de Rey,
on constate que le dessin n'est pas structuré et que les détails sont mal placés. Or, si l'examinateur
l'aide à analyser les composantes de la figure et à établir un plan (présenter les différents éléments
de la figure en 6 étapes successives), la copie et la reproduction de mémoire s'améliorent nettement.
Ce déficit de programmation s'observe aussi chez les autres patients présentés par Lhermitte (1972)
au test des cubes de Kohs et dans la résolution écrite de problèmes arithmétiques. Cependant, les
performances se normalisent aux tests exigeant moins de programmation.
Le cas "EVR", publié par Eslinger et Damasio (1985), a été opéré d'un large méningiome orbito-
frontal. Examiné 6 ans plus tard, il avait un QI supérieur à 130 et de bonnes performances à plusieurs
tests dont certains sensibles aux lésions frontales. Paradoxalement, ce patient a d'importantes
difficultés à organiser sa vie quotidienne. Il change souvent d'emploi et ses employeurs se plaignent
de sa désorganisation et de son manque d'assiduité. Il divorce, se remarie et divorce à nouveau peu

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______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

de temps après. Il ne peut se décider rapidement et efficacement. Ainsi, en dépit de ses


performances satisfaisantes dans des tests quantitatifs, l'aspect "supervision" dans l'organisation
de ses activités quotidiennes paraissait très déficient.

2.2.4 Le dysfonctionnement du contrôle de l'action


Lorsqu'il s'agit de la discussion du dysfonctionnement du contrôle attentionnel de l'action
Norman et Shallice (1986) et Shallice (1994) se placent discrètement dans une perspective
hiérarchique Jacksonnienne. Ils analysent les dysfonctionnements du contrôle de l'action par deux
voies : l'une "positive", analyse les performances des sujets lorsque le SAS est défectueux ; l'autre
"négative", examine le comportement des patients frontaux devant des tâches impliquant le SAS.

2.2.4.1 Les patterns de dysfonctionnement


Lorsque le SAS est déficient, l'organisme opérerait sous l'unique contrôle du GPD. Grâce aux
propriétés dont il est doté, le GPD peut conserver un contrôle rigoureux des actions de routine.
En parallèle, le comportement peut présenter l'un de ces deux types de dysfonctionnement
(Shallice, 1988 ; Shallice et Burgess, 1991) :
1. La persévération et la rigidité : étant spécialisé dans la gestion des situations de routine, il
devient difficile au GPD de changer de schème surtout s'il est fortement activé. Ainsi, tant
que des déclencheurs saillants sont présents, les actions seraient redondantes et la
persévération caractériserait le comportement. Ce type de comportement est observé chez les
patients frontaux (Milner, 1963 ; Drewe, 1974 ; Nelson, 1976).
2. La distraction et la sensibilité à l'interférence : étant privé de l'apport du SAS qui module
le niveau d'activation des schèmes, le GPD est facilement attiré par les signaux saillants
surtout si le niveau d'activation des schèmes existant est faible. Ainsi, des schèmes non
appropriés se déclencheraient sans contrôle. Ceci se traduit par des actions non appropriées
dues à l'activation d'un schème par un signal capturant. Le comportement est alors caractérisé
par une "adhérence à l'environnement" et un déficit des mécanismes inhibiteurs. La psychologie
animale fournit plusieurs preuves sur la distractibilité manifestée par les animaux frontaux
face à un stimulus nouveau (Fuster, 1980). L'échec dans une tâche de réponse différée (MCT)
observé chez ces animaux paraît essentiellement être dû à un déficit attentionnel. En mettant
l'animal dans l'obscurité, on diminue les distractions et on réduit ainsi le déficit (Pribram,
1973 ; Cf. Shallice, 1982). En clinique neuropsychologique, la distractibilité et la sensibilité à
l'interférence ont été démontrées chez des patients frontaux dans plusieurs travaux (Salmaso et
Denes, 1982 ; Lhermitte, 1983 ; Van der Linden et Bruyer, 1992). Une forme pathognomonique

29
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

de ce type de déficit est décrite par Lhermitte (1983) sous le nom de "comportement
d'utilisation" et observée par Shallice et al. (1989) chez un patient qui a une lésion frontale
bilatérale inféro-médiane. Ce trouble s'observe chez nombre de sujets frontaux qui montrent
une tendance quasi-automatique à utiliser les objets se trouvant à leur portée. Le comportement
d'utilisation montre comment le patient devient capturé par les stimuli environnementaux et
incapable d'inhiber un comportement non pertinent.

2.2.4.2 Les performances des frontaux dans des tâches impliquant le SAS
Un sujet ayant un SAS déficient présenterait des troubles des fonctions attribuées au SAS, à
savoir, la planification, l'inhibition des réponses dominantes, la correction des erreurs, et la
réponse aux situations nouvelles, dangereuses ou difficiles.

2.2.4.2.1 La planification
La planification est l'identification et l'organisation des étapes et éléments nécessaires pour
accomplir une intention ou un but (Lezak, 1995). Elle est considérée comme la capacité de
formuler des buts et de générer les moyens de les accomplir. C'est une fonction exécutive très
peu cernée par les tests classiques. Ce sont surtout les travaux de Luria sur les lobes frontaux qui
lui ont donné le plus d'importance. Harlow (1848 ; cité par Damasio, 1994) était probablement le
premier à l'identifier chez le cas "Phineas Gage". On peut même dire que le trouble de
planification est le symptôme de dysfonctionnement du cortex préfrontal le plus spécifique
(Fuster, 1980) et le plus fréquemment décrit dans la littérature. Le déficit de planification peut
être mis en évidence par plusieurs tests neuropsychologiques qui exigent une programmation
interne de l'action en l'absence d'indices externes. Parmi ces tests, on note les labyrinthes de
Porteus, les cubes de Kohs, etc. La "Tour de Londres" est l'épreuve la plus directe pour examiner
cette fonction (Shallice, 1982). C'est une tâche non routinière analogue à la "Tour de Hanoi" qui a
été très largement utilisée dans les études d'intelligence artificielle5.. Le sujet doit donc anticiper
non seulement les buts mais aussi les étapes et la séquence appropriée. Les niveaux de difficulté
des items du test dépendent du nombre et de la complexité des sous-buts exigés pour achever
l'arrangement. Ainsi, les processus de contrôle exécutif impliqués dans la planification dépendent
plus de la capacité à évaluer et à sélectionner une action ou un but parmi une série d'actions ou de
buts, que des ressources de stockage ou de traitement général.

5 La tâche de la Tour de Londres (Shallice, 1982) consiste à arranger trois boules coloriées sur trois tiges verticales de longueurs
différentes. Elle doit être réalisée en un minimum de temps et en faisant le minimum de mouvements. La solution exige des
étapes intermédiaires dans lesquelles une boule peut être placée temporairement sur une tige en vue d'être déplacée vers sa
position finale.

30
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

L'examen de patients cérébrolésés à l'aide de la Tour de Londres montre que les sujets
porteurs d'une lésion focale frontale gauche ont de faibles performances (McCarthy et Shallice ;
cités par Shallice, 1982). Ces résultats sont confirmés par les études d'imagerie cérébrale. Morris
et al. (1993) étudient, chez 6 sujets normaux, les variations du débit sanguin cérébral (rCBF) en
fonction des performances à la Tour de Londres. Ils notent que le niveau de rCBF augmente
significativement dans le lobe préfrontal gauche durant la résolution des problèmes. De plus, les
sujets qui mettent plus de temps pour planifier leurs mouvements et moins de mouvements pour
compléter un problème ont une augmentation plus significative du rCBF au niveau du cortex
préfrontal gauche.
Si l'effet de la lésion frontale sur la planification est communément admis, celui de la latéralité
de la lésion (gauche) l'est moins. Owen et al (1990) comparent les performances de sujets frontaux
à celles de normaux à la Tour de Londres. Ils constatent que les frontaux sont déficitaires mais
n'observent pas d'effet de latéralisation de la lésion. D'ailleurs, Shallice non plus n'a pas pu
répliquer ses observations relatives à l'effet de la latéralisation (Shallice, 1988).

2.2.4.2.2 L'inhibition
Pour Clark (1992), "l'inhibition implique tout mécanisme psychologique, mental ou physiologique
qui supprime d'autres représentations ou activités de traitement". C'est un concept que la
psychologie cognitive a emprunté à la neurophysiologie et qui a dépassé le cadre des câblages
physiologiques pour contenir des aspects divers de l'activité cognitive humaine. À l'encontre des
modèles théoriques classiques (Broadbent, cité par Tipper, 1991) qui négligent le rôle des
mécanismes inhibiteurs dans la cognition, les modèles actuels allouent une importance considérable
à l'inhibition grâce à l'apport notable de plusieurs travaux sur les processus attentionnels (Posner,
1980 ; Tipper, 1985) et mnésiques (Hasher et Zacks, 1988 ; Anderson et Spellman, 1995).
Cependant, à l'opposé de l'inhibition neurophysiologique, l'inhibition cognitive réfère à un
construct hypothétique dont les effets sont inférés à partir du comportement observable (Klein et
Taylor, 1994). Il faut souligner, par ailleurs, que la relation entre inhibition neuronale et inhibition
cognitive n'est ni topique ni directe. L'inhibition cognitive n'est pas nécessairement une
manifestation de l'inhibition neurale (Cf. Cohen, 1993). Les deux processus sont relativement
indépendants.
L'inhibition cognitive peut être inférée à partir des performances à des tâches telles le priming
négatif (Tipper, 1985), la récupération à partir de la MLT (Neill et Westberry, 1987) ou la
compréhension du discours (Hasher et Zacks, 1988). Le développement de certains paradigmes
expérimentaux à été très utile dans le l'évolution de nos connaissances sur l'implication des
mécanismes inhibiteurs dans diverses activités cognitives. C'est le cas de la perception (Hicks et

31
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

al., 1985 ; cités par Clark, 1992), de l'attention sélective (Tipper, 1985 ; Neill et Westberry, 1987),
de la récupération à partir de la mémoire épisodique et sémantique (Bjork, 1989 ; Carr et
Dagenbach, 1990) ou encore des habilités motrices (Jensen, 1987). L'affaiblissement du contrôle
inhibiteur, par l'avancement en âge par exemple, serait responsable, au moins en partie, de deux
phénomènes :
 "L'enrichissement" du contenu de la mémoire de travail par des informations non pertinentes
(internes ou externes) telles que les rêveries diurnes, les interprétations contextuelles ou les
détails environnementaux non pertinents etc. Ces "intrusions" recevraient une activation
disproportionnée par rapport à leur pertinence. Elles occuperaient de l'espace et épuiseraient
des ressources cognitives.
 L'augmentation de la quantité d'informations compétitives au niveau de la récupération, qui
influe négativement sur la capacité de rappel ;
Ainsi, l'implication des mécanismes inhibiteurs dans différents aspects de la cognition paraît
plausible et nécessaire (Anderson et Spellman, 1995).
 Plausible, car le siège de ces opérations cognitives (le cerveau) utilise aussi des mécanismes
inhibiteurs ;
 Nécessaire, puisqu'on ne peut maintenir une stabilité du réseau neural dans des analyses
computationnelles sans recourir à l'inhibition (Anderson et Spellman, 1995).
Par ailleurs, le concept d'inhibition cognitive est polysémique. Il réfère à plusieurs
phénomènes cognitifs telles que l'inhibition des interférences pro ou rétroactives et l'inhibition
des réponses dominantes coactives.
Les concepts d'interférence rétroactive (IR) et proactive (IP) désignent respectivement l'effet
négatif de l'interaction d'une information postérieure ou antérieure sur une autre lors de
l'accomplissement d'une tâche donnée (exemple le rappel). L'interférence est mise en évidence
par la diminution de la performance et l'augmentation des intrusions. La présentation répétitive
de listes de mots appartenant à la même catégorie sémantique entraîne généralement
l'augmentation de l'IP. La présentation, d'une liste de mots appartenant à une catégorie
sémantique, autre que celles déjà présentées, entraînerait le relâchement de l'IP (Wickens, 1970).
Les anomalies dans le relâchement de l'IP ou IR ont été attribuées à un déficit de contrôle
inhibiteur lié à un dysfonctionnement frontal. En effet, les patients frontaux montrent une
sensibilité accrue à l'interférence et une absence de relâchement de l'IP (Moscovitch, 1982).

32
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

L'inhibition des réponses dominantes coactives est examinée par plusieurs tâches telles que le
"Stroop Word Color test" (Stroop, 1935), le "Hayling sentence completion test"6 (Burgess et
Shallice, 1996), les réponses différées ou la procédure "Go/No Go".

♦ Les frontaux, surtout gauches, ont les performances les plus basses au Stroop, en comparaison
à des patients ayant des lésions temporales ou postérieures (Peret, 1974). Richer et al. (1993)
ne notent pas d'effet de latéralité mais constatent que les frontaux ont des capacités inhibitrices
moins efficientes que les sujets normaux. Larrue et al. (1994) examinent les variations du
débit sanguin (rCBF) lors de la réalisation du Stroop et notent que la planche d'inhibition
implique surtout les régions droites (gyrus cingulaire antérieur) et orbito-frontales droites.

♦ Burgess et Shallice (1996) ont construit une épreuve de complètement de phrases : le


"Hayling", pour examiner les capacités de contrôle inhibiteur d'une réponse dominante chez
les frontaux. Cette tâche est composée de deux parties : initiation et inhibition. L'examen de
patients cérébrolésés montre que les sujets frontaux diffèrent significativement des sujets
ayant une lésion postérieure. Ils présentent une augmentation du temps de latence dans la
première partie du test et une augmentation du score d'erreurs dans la deuxième partie.

♦ L'examen des mécanismes inhibiteurs peut être aussi effectué par la procédure "Go/No Go".
Dans cette procédure le sujet est invité à émettre une réponse motrice simple à un stimulus
particulier et inhiber la réponse en présence d'un autre ; exemple, lever la main lorsqu'on
entend un bip sonore et ne pas la lever lorsqu'on entend deux bips. Les animaux ayant des
lésions frontales ont des performances faibles car ils ne peuvent inhiber les réponses aux
stimuli "No Go" (Iversen et Mishkin, 1970). Le déficit dans la procédure "Go/No Go" a été
aussi observé chez les sujets humains. Leimkuhler et Mesulam (1985) examinent le cas d'une
patiente chez qui ils ont découvert, après 3 ans de suivie en psychiatrie, un large méningiome
touchant bilatéralement les lobes frontaux médians. L'examen neuropsychologique montre
qu'elle a des performances satisfaisantes à des épreuves de mémoire, de calcul, de construction
et de langage, associées à un déficit dans les tâches d'attention complexe. Sa performance
dans la procédure de "Go/No Go" est marquée par un nombre excessif d'erreurs. Après
l'intervention chirurgicale, la performance dans la procédure "Go/No Go" est devenue
normale (tout comme d'autres aspects de son comportement désinhibé et non approprié).

6 Le "Hayling Sentence Completion Test" (Burgess et Shallice, 1993, 1996) est composé de deux conditions expérimentales.
- La première repose sur l'activation rapide de réponses surapprises, exemple : compléter, par le mot approprié, une phrase
appartenant au champ collocatif à laquelle manque le dernier mot, exemple : la poule pond des .....;
- La deuxième porte sur la suppression active d'une réponse dominante et l'activation d'une réponse non routinière, exemple
compléter une phrase appartement au champ collocatif auquel le dernier mot est supprimé, par un mot qui n'a aucune relation
avec le sens de la phrase, exemple : la poule pond des ......

33
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

Les lobes frontaux et les corps striés ont été presque toujours considérés comme impliqués
principalement dans l'inhibition. Phylogénétiquement et ontogénétiquement, les structures cérébrales
dites supérieures dont le cortex cérébral et surtout les lobes frontaux sont les derniers à se
développer (Dempster, 1993) et les premiers à de détériorer (Fuster, 1989). Selon la conception
Jacksonienne, ces structures sont présumées effectuer un contrôle inhibiteur sur les structures
sous-jacentes. Les mécanismes inhibiteurs s'affaiblissent suite à l'avancement dans l'âge ou à des
affections cérébrales frontales. Dans la maladie d'Alzheimer, des réflexes primitifs peuvent
réapparaître comme le réflexe de succion ou le réflexe palpébral.

2.2.4.2.3 La correction des erreurs


Toutes les tâches cognitives exigent une vérification et un contrôle continu des erreurs. La
correction des erreurs est une fonction "rétro-régulatrice" du comportement attribuée aux lobes
frontaux (Seron, 1978). L'étude de la capacité de correction des erreurs peut être inférée à partir
de l'analyse des différents types d'erreurs en fonction des différents moments de l'activité en
cours. L'apparition d'erreurs dans les tâches cognitives montre une défaillance des mécanismes de
contrôle de l'action. Cependant, toutes les erreurs n'ont ni la même signification et ni le même
poids. Parmi les erreurs dans les tâches de rappel ou d'évocation de mots on distingue les
répétitions, les intrusions, les persévérations et les confabulations.

 Les répétitions sont des redites d'items corrects. C'est un phénomène qu'on observe souvent,
même chez les sujets normaux.
 Les intrusions sont une sorte de glissement non intentionnel d'items inappropriés parmi les
réponses correctes du sujet.
 Les persévérations sont des répétitions immédiates d'une réponse précédente non appropriée.
 Les confabulations sont des réponses fabriquées par le sujet qui est, dans la plupart des cas,
inconscient de rapporter des informations inventées.
L'occurrence de quelques répétitions et de rares intrusions serait fréquente chez les sujets
normaux surtout avec l'avancement dans l'âge. Toutefois, l'augmentation de leur nombre et
l'apparition de persévérations ou de confabulations font soupçonner un processus pathologique.
En effet, il a été largement démontré que les dysfonctionnements frontaux mènent à des erreurs
caractéristiques dans des tâches cognitives comme les persévérations et les confabulations
(Grafman, 1992). L'analyse des erreurs et des échecs est très instructive : elle donne une idée sur
l'efficience des mécanismes de contrôle.
Un contrôle des erreurs est indispensable dans l'exécution des tâches évaluant le SAS. Par
exemple, la résolution des problèmes difficiles et moyennement difficiles dans la Tour de
Londres exige une correction spontanée et continue des erreurs (Shallice, 1982). De même, la

34
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

génération d'exemplaires appartenant à une catégorie sémantique implique le maintien temporaire


des items qu'on vient d'énoncer, conjointement à l'évitement des redites et des intrusions.
Les stimuli similaires sont plus difficiles à différencier que les stimuli non similaires. Plus les
stimuli ont d'attributs communs, plus les informations entrent en conflit.

2.2.4.2.4 La réponse aux situations nouvelles, difficiles ou dangereuses


Sur le plan expérimental, il est difficile de concevoir des tâches nouvelles (Karnath et al., 1991). Qu'est
ce qu'une situation nouvelle ? Jusqu'à quel moment de l'examen, la situation reste t-elle nouvelle ?
En dépit des difficultés méthodologiques, Shallice et Evans (1978) mettent au point une épreuve
"nouvelle" d'évaluation des capacités cognitives générales appelée "Tâche d'estimation cognitive".
Dans cette tâche on demande au sujet de répondre à 15 questions qui ne font pas référence aux
connaissances antérieures (exemple : "combien pèse un chat ?"). Les auteurs constatent que les
frontaux ont des difficultés pour faire des estimations pertinentes puisque cette tâche exige la
génération de réponses non routinières, non basées sur des connaissances antérieures. Ces résultats
sont indépendants du niveau intellectuel (tel que mesuré par les tests classiques de QI (PM de
Raven) ou des capacités arithmétiques. En revanche, Taylor et O'Carrol (1995) ne notent pas de
différence entre les performances des frontaux et celles de patients ayant des atteintes postérieures.
Lorsqu'un sujet normal détecte la présence d'un stimulus sensoriel ordinaire, une onde P300 à
modalité non spécifique est générée au niveau du lobe pariétal précédée par une onde N200 à
modalité spécifique. Cependant, les stimuli visuels ou auditifs nouveaux et inattendus génèrent un
complexe N200-P300 distribué plutôt au niveau du lobe frontal. On pense que ce complexe
reflète la composante du système nerveux central impliquée dans le réflexe d'orientation à la
nouveauté (Courchesne et al., 1975). En examinant la participation du cortex préfrontal dans la
genèse et la modulation des ondes cérébrales N200-P300, Knight (1984) constate que les patients
avec une lésion préfrontale unilatérale génèrent les mêmes réponses cérébrales que les normaux
lors de la présentation de stimuli ordinaires (détecter certains bips sonores de faible intensité
parmi d'autres bips de faible intensité). Cependant, les lésions préfrontales entraînent un déficit
spécifique de l'onde P300 à des stimuli nouveaux et inattendus (détecter des bips sonores de
faible intensité parmi des bips d'intensité moyenne mêlés à des aboiements de chien apparaissant
de façon aléatoire). Ces stimuli n'entraînent pas chez les patients avec lésion préfrontale la
réponse P300 de distribution fronto-centrale, relevée chez les normaux. Ceci montre l'importance
des régions préfrontales dans la réponse à la nouveauté.

35
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

2.2.5 Modularité du Système Attentionnel Superviseur


Au sens de Marr (1976), le principe de modularité postule l'indépendance fonctionnelle de sous-
systèmes cognitifs hypothétiques (modules) mis en jeu lors de l'accomplissement d'une tâche.
Selon ce principe, une lésion cérébrale donnée peut altérer un sous-système isolé sans forcément
perturber le fonctionnement des autres sous-systèmes impliqués dans ce même comportement.
La question du fractionnement du SAS nous importe beaucoup. C'est un postulat de base qui
justifie l'analyse séparée des différentes fonctions du SAS. Sinon, l'évaluation d'une seule fonction
suffiraitt pour apprécier sa fonctionnalité.
En examinant la question de modularité du SAS, Shallice (1988) se demande s'il est un système
unitaire et équipotentiel (au sens de Fodor, 1983) ou modulaire et fractionné (au sens de Marr,
1976). La possibilité d'un SAS unitaire est soutenue par le fait qu'il a accès à tous les schèmes
d'action. Or, en consultant les théories de l'intelligence artificielle et les données de la
neuropsychologie, on se rend compte la notion d'unitarité du SAS n'est pas plausible. Les
modèles d'intelligence artificielle tel celui de planification de Sussman (1975 ; cité par Shallice,
1988) sont conçus comme modulaires et ayant différents processus et différents types de contenus.
Les études de patients cérébrolésés frontaux montrent des dissociations inter-hémisphériques et
intra-hémisphériques (revue de littérature : Seron, 1978). Les lésions touchant le lobe frontal
gauche n'occasionnent pas les mêmes déficits que les lésions frontales droites (Teuber, 1955 ; cité
par Seron, 1978). De même, les lésions dorsolatérales n'engendrent pas les mêmes déficits
cognitifs que les lésions orbito-frontales. Ceci a été démontré avec l'expérimentation animale où
les lésions peuvent être beaucoup plus ponctuelles. Les tâches exigeant l'inhibition des réponses
dominantes sont altérées par les lésions orbitofrontales. Les opérations cognitives impliquées
dans les réponses différées sont perturbées suite aux lésions frontales dorsolatérales (Stuss et
Benson, 1984). Le fractionnement du SAS est confirmé par les études de cas (Eslinger et
Damasio, 1985 ; Burgess et Shallice, 1994) et par les études d'imagerie cérébrale PET Scan.
Différentes tâches exécutives activent des circuits frontaux différents. En effet, Frith, Friston,
Liddle et Frackowiak (1991) notent que les tâches de fluence sont associées à une activation du
cortex préfrontal dorsolatéral et de la circonvolution parahippocampique (aires 9, 46 et 30 de
Broadmann). Par ailleurs, la réalisation de tâches d'auto-régulation met en jeu la participation du
cortex préfrontal dorsolatéral (aires 6 et 49 de Broadmann), du cortex cingulaire antérieur ainsi
que du cortex prémoteur et pariétal postérieur (Petrides, Alisivatos, Evans et Meyer, 1993).

36
______________________________________________________ Le contrôle attentionnel de l'action

2.2.6 Conclusion
L'approche théorique de Norman et Shallice implique donc l'utilisation de deux systèmes de
contrôle séparés : le GPD et le SAS. Ceci contraste avec le point de vue de Shiffrin et Schneider
(1977) et d'autres théoriciens qui postulent plutôt l'existence d'un seul système de contrôle. Les
fonctions du SAS sont la planification, l'inhibition, la correction des erreurs et les réponses aux
situations nouvelles. Les travaux s'accordent pour montrer que ces fonctions de contrôle de
l'action sont particulièrement sensibles aux lésions frontales. Le SAS est postulé comme
modulaire et différentes études le confirment. L'intérêt de ce fractionnement du SAS est la
possibilité d'observer des déficits sélectifs du SAS chez les patients.

37
3 CHANGEMENTS COGNITIFS DANS LA MALADIE
DE PARKINSON

3.1 La maladie de Parkinson (mP)


La maladie de Parkinson (mP) réfère à une forme étiologique spécifique du syndrome général de
parkinsonisme caractérisé par des troubles moteurs associant un tremblement, une rigidité et une
akinésie. La mP est la plus fréquente et la plus anciennement connue des maladies dégénératives
du système nerveux. C'est une pathologie du sujet âgé qui débute généralement après la
cinquantaine et progresse en parallèle avec l'avancement en âge et les altérations cérébrales qui
peuvent s'y associer (Gauthier, 1985). Cette maladie est consécutive à l'atteinte du locus niger et
du complexe striatal avec une altération associée des voies dopaminergiques. Le progrès décisif
dans l'histoire de la mP a été réalisé lorsque Hornykiewicz (1963, cité par Gauthier, 1985) a
montré que le déficit dopaminergique du locus niger est l'altération neurochimique caractéristique
de cette affection. Le traitement par L-Dopa (lévodopa) et ses agonistes améliore la
symptomatologie et augmente par conséquent l'espérance de vie des parkinsoniens. Ceci a
également permis indirectement de mieux explorer les troubles cognitifs associés à la mP.

3.1.1 Les ganglions de la base : anatomo-physiologie et pharmacologie


La maladie de Parkinson (mP) est le modèle type de l'atteinte des corps striés et des noyaux gris
de la base. Ces noyaux comportent respectivement :
♦ D'une part le striatum (putamen et noyau caudé) et le pallidum ;
♦ D'autre part, la substance noire (locus niger) et le corps de Luys.
Les corps striés et les noyaux gris de la base sont les plus anciens des centres moteurs. Ces
noyaux agissent en interaction complète et possèdent des connexions afférentes avec toutes les
régions du cortex cérébral. Ils possèdent également des connexions efférentes avec le cortex
moteur. Le complexe striato-pallidal agit en conjonction avec le locus niger (pars compacta et
pars réticulata) et le noyau sous-thalamique interconnecté avec le striatum et le thalamus
(Graybiel, 1990b). Ces connections complexes correspondent aux circuits cortico-striato-pallido-
thalamo-corticaux. On distingue actuellement au moins cinq circuits empruntant des voies
parallèles, distinctes anatomiquement et fonctionnellement :
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

• Un circuit moteur, focalisé sur les aires motrices ;


• Un circuit oculomoteur, focalisé sur les aires oculaires frontales et supplémentaires ;
• Deux circuits préfrontaux, focalisés sur le cortex préfrontal dorsolatéral et orbitofrontal latéral ;
• Et un circuit limbique, focalisé sur le cingulum antérieur et le cortex orbitofrontal médian.
Les corps striés et les noyaux gris centraux semblent donc, de part leurs connexions, capables
d'intervenir aussi bien dans des fonctions motrices (motricité squelettique et oculaire) que
cognitives et motivo-émotionnelles (Graybiel, 1990 b).
Malgré la complexité de ces connexions, il est à remarquer que le striatum représente la
principale structure réceptrice des noyaux gris centraux. Alors que le pallidum interne et la pars
reticulata du locus niger constituent les principales structures émettrices (Albin et al., 1989).
S'agissant des afférences corticales vers le striatum par exemple, le putamen reçoit les
afférences du cortex frontal sensitivo-moteur, le noyau caudé reçoit celles des cortex associatifs
(préfrontal, temporal, pariétal et cingulaire). Le striatum ventral reçoit les afférences du cortex
limbique et hippocampique (Parent, 1990). Le striatum constitue donc un relais des afférences
corticales et nigriques et des efférences vers le globus pallidus et le thalamus. Les efférences du
striatum sont gaba-ergiques et comportent pour la plupart un deuxième médiateur, soit met-
enképhaline soit la substance P. D'autres médiateurs chimiques ont été mis en évidence au sein
du striatum : la sérotonine et des aminés excitateurs (aspartate et glutamate) ou inhibiteurs (taurine).
Le modèle de fonctionnement des noyaux gris centraux proposé par Albin et al. (1989) et
actuellement admis par la majorité des auteurs, préconise l'existence de deux voies parallèles :

♦ Une voie directe liant directement le striatum au complexe pallidum - pars reticulata chargés de
faciliter les programmes moteurs volontaires en cours ;
♦ Et une voie indirecte liant le striatum au complexe pallidum - pars reticulata via des structures de
relais (le pallidum externe puis le noyau sous-thalamique) qui empêcherait l'apparition de
programmes moteurs indésirables risquant de parasiter l'exécution d'un programme moteur en
cours (Goldman-Rakic et Selemon, 1990).

3.1.2 Anatomopathologie
L'atteinte du locus niger dans la mP est constante. Cette atteinte touche essentiellement la partie
pigmentée riche en cellules dopaminergiques dite pars compacta (noire) du locus niger et préserve
l'autre partie : pars reticulata (rouge).
Sur le plan macroscopique, la décoloration de la pars compacta du locus niger dénote de sa
dégénérescence. L'analyse histologique montre très souvent une prolifération des corps de Lewy
dans le locus niger. Ceci constitue un pré-requis du diagnostic histologique de la mP. La
dégénérescence du locus niger et la raréfaction de neurones nigro-striés ne sont pas sans

39
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

conséquences sur les autres structures cérébrales. Le locus niger a de nombreuses connexions
avec d'autres structures cérébrales comme le cortex cérébral (frontal essentiellement), le striatum
(noyau caudé et putamen), le pallidum, le thalamus, l'hypothalamus, le noyau interpédonculaire,
les tubercules quadrijumaux, le corps de Luys, le noyau rouge, la formation réticulée du
mésencéphale etc. D'ailleurs, au cours de la dégénérescence comme dans toute maladie de
système, l'atrophie ne se limite pas seulement à la structure en question mais s'étend aussi à des
structures parfois éloignées (Gauthier, 1985). Ceci peut renforcer l'hypothèse de déafférentation
nigro-striato-corticale à l'origine des troubles d'allure frontale décrits dans la littérature.
Figure 3. Principales lésions cérébrales
Cortex dans la mP.
: lésion modérée du système neuronal
: lésion sévère du système neuronal
ACh : acétylcholine ;
ACh NA DA 5HT NA : noradrénaline ;
VL MD DA : dopamine ;
Thalamus 5HT : sérotonine ;
SI : substance innominata ;
LC : locus coeruleus ;
PAL
VTA : aire tegmentale ventrale ;
SI
Striatum SN : substance noire ;
LC
VTA PAL : globus pallidus ;
Raphé VL : noyau thalamique ventro-latéral ;
SN MD : noyau thalamique médio-dorsal

Figure 3-1. Principales lésions cérébrales dans la maladie de Parkinson.

Ainsi, l'atrophie des neurones nigro-striés et la déficience en dopamine striatale sont les causes
principales de la genèse des symptômes de la mP. Cependant, l'altération neurochimique de la mP
n’est pas réductible à un déficit dopaminergique. L'implication des systèmes cholinergiques, gaba-
ergiques et sérotoninergiques est bien établie, alors que celle de certaines enzymes de synthèse
(décarboxylase de l'acide glutamique...) et peptides (cholécystokinine, somatostatine) reste controversée.

3.1.3 Données épidémiologiques


Les données épidémiologiques sur la mP sont rares et très variables d'une publication à l'autre
(Guillard et Fenelon, 1983). En Tunisie, la prévalence est de 43/100.000 habitants (Attia-
Romdhane et al., 1993). Cette prévalence est comparable à celle en Chine 44/100.000 d'après Li
(1985) et inférieure à celle aux USA 187/100.000 (Schoenberg, 1986). Ce taux devrait augmenter
à l'avenir du fait de l'allongement de l'espérance de vie. Dans la population à risque âgée de plus de
50 ans la prévalence s'élève à 296/100.000 habitants (Gouider-Khouja, 1991).

40
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

L'âge moyen de début de la mP se situe le plus souvent aux alentours de 55 ans (Hoehn et
Yahr, 1967). Il est de 55,7 en Tunisie. La fréquence maximale est notée entre 50 et 59 ans. Son
apparition avant l'âge de 40 ans est rare, estimée à 11,5%. La mP atteint les 2 sexes avec une
légère prédominance masculine ; le sexe ratio : 1,4/1 (Gouider-Khouja, 1991).

3.1.4 Les hypothèses étiologiques


La mP est une maladie dégénérative du système nerveux central dont la cause est actuellement
inconnue (Guillard et Fenelon, 1983 ; Gauthier, 1985). Plusieurs hypothèses avaient été
proposées parmi lesquelles celle qui préconisait la voie infectieuse : la mP serait causée par une
infection virale ou par une réponse immunologique anormale consécutive à une agression virale.
Actuellement, deux hypothèses différentes sont retenues :

♦ L'hypothèse du vieillissement cérébral prématuré, découle de la constatation d'une identité


qualitative des altérations anatomiques (raréfaction des neurones nigriques) et biochimiques
(réduction du taux de Dopamine) entre le cerveau du sujet âgé et celui du parkinsonien
(Hirai, 1968). Il est possible que les neurones nigriques de certains sujets âgés aient une
susceptibilité particulière qui serait liée à un éventuel facteur génétique (Ward et al., 1983).

♦ L'hypothèse toxique, est appuyée par la découverte de l'effet destructeur sélectif du MPP+
sur les neurones du locus niger (Stern et Langston, 1985). Le MPP+ agit par l'intermédiaire
de son métabolite le MPTP (méthyl-1 phénil-4 tétrahydropyridine), une neurotoxine qui détruit
sélectivement la voie dopaminergique nigro-striatale tant chez l'homme que chez l'animal.
Ces hypothèses ne sont pas mutuellement exclusives. Elles pourraient être combinées dans le
cadre d'une étiologie multifactorielle (Gauthier, 1985).

3.1.5 Présentation clinique


Les signes cliniques classiques caractéristiques de la mP sont le tremblement, la rigidité et l'akinésie.
Les neurochimistes estiment que les symptômes de la mP n'apparaissent que lorsque la déficience
en Dopamine atteint 70 à 80% par rapport au taux normal (Bernheimer et al., 1973 ; Agid et al.,
1987). La mP s'installe de façon insidieuse : le patient se plaint de fatigue, de crampes, de raideur
douloureuse, de maladresses. Après une période variable d'un individu à un autre, les gestes deviennent
limités et lents et le tremblement commence à apparaître. Ensuite, la triade parkinsonienne
(tremblement, rigidité, akinésie), réunie au complet ou pas, s'installe (Guillard et Fenelon, 1983).

41
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

3.1.5.1 Le tremblement
Le tremblement parkinsonien, à qui la mP doit son ancien nom de "paralysie agitante", est le plus
fréquent (85% des cas) des signes initiaux de la maladie (Pollak et al., 1989). Il s'agit d'un
tremblement de repos qui disparaît lors de l'accomplissement d'un geste ou d'un changement
d'attitude et pendant le sommeil. Dans les formes sévères, le geste n'abolit pas le tremblement
mais réduit son importance. Il est surtout évident au niveau des extrémités. Il commence presque
toujours aux membres supérieurs de façon asymétrique. Il peut s'étendre aux membres inférieurs,
mais touche rarement la musculature buccale et péri-buccale.
Sur le plan physiopathologique, le tremblement relèverait d'une cause centrale et serait dû à
l'interruption de la voie nigro-striatale qui entraînerait des modifications de l'influence modulatrice
qu'exerce le pallidum sur le noyau ventrolatéral du thalamus. La chirurgie stéréotaxique du noyau
ventromédian du thalamus abolit significativement le tremblement (Guillard et Fenelon, 1983).

3.1.5.2 La rigidité
C'est une rigidité plastique qui augmente avec la fatigue et le stress. Elle n'est pas modifiée en
fonction de la vitesse de déplacement imprimée au segment du membre comme c'est le cas dans
la spasticité. L'intensité de la résistance n'est pas régulière et elle est souvent renforcée par à-
coups : c'est le signe de la roue dentée de Negro qui est particulièrement net quand il coexiste
avec un tremblement (Pollak et al., 1989). L'attitude du malade est caractéristique. Les différents
segments corporels sont comme soudés les uns aux autres. La posture du parkinsonien,
globalement en flexion, traduit une répartition inégale de la rigidité (Guillard et Fenelon, 1983).
La rigidité serait, du point de vue physiopathologique due à l'hyperactivité au sein des longues
boucles spino-cérébro-spinale. Cette hyperactivité traduirait une désinhibition consécutive aux
perturbations des systèmes biochimiques des noyaux gris centraux : la libération insuffisante de
dopamine désinhibe les neurones cholinergiques et provoque un état d'hyperactivité fonctionnelle
cholinergique au niveau du striatum. Ce déséquilibre serait à l'origine de la rigidité.

3.1.5.3 L'akinésie
En absence de tout déficit paralytique, le patient est "avare du geste", lent dans ses mouvements,
aspontané et amimique.
L'akinésie se traduit par une difficulté d'initiation du mouvement volontaire ou par des arrêts
au cours de son exécution (Gauthier, 1985). L'akinésie réduit la motricité volontaire et
automatique. Comme le souligne Charcot (cité par Gauthier, 1985), "Le parkinsonien est
condamné au mouvement volontaire à perpétuité". L'akinésie perturbe l'exécution de deux

42
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

mouvements volontaires simultanés et les tests moteurs sont mieux effectués sous un contrôle
visuel. C'est la nécessité de ce contrôle visuel qui expliquerait aussi en partie la difficulté
qu'éprouve le parkinsonien à accomplir deux actes simultanément (Chouza, 1986 ; Horstink et al.,
1990). L'akinésie est donc caractérisée par une mauvaise transmission des commandes motrices
vers le système effecteur, bien que ces commandes soient élaborées dans des délais normaux,
(Delwaide et Crenna, 1985, cités par Gauthier, 1985).
Gauthier (1985) souligne qu'il ne faut pas confondre akinésie et bradykinésie. Celle-ci étant la
lenteur d'exécution du mouvement. Selon lui, l'akinésie est analysée par les temps de réaction,
alors que la bradykinésie s'apprécie en termes de temps d'exécution (Hallett, 1988). Un mauvais
état clinique du patient est fortement corrélé à l'allongement du temps d'exécution (Pullman et al.,
1990). L'apprentissage préalable du test moteur à effectuer permet de réduire le temps de
réaction, mais ne le normalise pas (Worringham et Stelmach, 1990).
L'akinésie interfère dans plusieurs activités, même les plus automatiques :

• La marche et l'équilibre sont perturbés : le démarrage est souvent difficile avec un net
retard entre l'ordre et son exécution ;
• La parole, dysarthrique, devient monotone et aprosodique avec un débit accéléré ;
• La mimique, souvent pauvre, donne au malade un aspect figé et indifférent.
Sur le plan physiopathologique, l'akinésie correspond à un défaut de transfert du programme
moteur vers les structures exécutives (Gauthier, 1985). Elle serait la conséquence d'une altération
de l'activité inhibitrice du striatum sur le pallidum (structure activatrice indispensable à la
préparation du mouvement) par manque de contrôle inhibiteur dopaminergique du locus niger sur
le striatum. À l'inverse, un excès de dopa dans le striatum pourrait conduire à une activité anormale
du pallidum traduite par l'apparition de mouvements anormaux (Guillard et Fenelon, 1983).

3.1.5.4 Les autres signes moteurs et neurologiques


Les autres signes cliniques qu'on peut rencontrer chez les parkinsoniens incluent :

• Une altération des réflexes de la posture : attitude générale de flexion, le malade semble
courir après son centre de gravité et ne s'arrête que devant un obstacle ;
• Une hypersudation ;
• Une séborrhée du visage ;
• Des troubles urinaires et une constipation chez presque 50% des patients.

43
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

3.1.5.5 Les troubles psychiques


Ils sont très variables quant à leur nature et leur intensité. Ces troubles concernent
essentiellement l'humeur. La dépression est très fréquente. Trente à 70% des parkinsoniens
présentent un état dépressif. La sévérité de la dépression serait selon certains travaux fortement
corrélée à la sévérité de l'état mental tel qu'estimé par une forme modifiée du Mini-Mental State
(Mayeux et al., 1981) et par des tests neuropsychologiques (Starkstein et al., 1989). Les Pk
présentant une dépression majeure ont des déficits plus importants que ceux ayant une
dépression mineure; particulièrement dans des tests supposés sensibles aux lésions frontales
(Starkstein et al., 1989). Toutefois, ces résultats sont controversés et plusieurs études ne sont pas
parvenues à établir de corrélation significative entre la dépression et les déficits cognitifs. En
évaluant la mémoire à court terme, Taylor et al. (1986b) ne constatent pas de différence
significative entre les performances des Pk déprimés et non déprimés. De plus, les deux groupes
ont des performances supérieures à celles de patients ayant une dépression fonctionnelle. Quoi
qu'il en soit, la dépression ne peut expliquer à elle seule les dysfonctionnements cognitifs de la mP.
Si la dépression est présente dans la mP quelle peut être alors son origine?. Plusieurs
hypothèses explicatives se présentent :

 Pour Mindham et al. (1976), la dépression des Pk serait secondaire à la recrudescence des
déficits physiques ;
 Pour Mayeux et al, (1984) elle serait le résultat inévitable des altérations monoaminergiques.
 Pour Rabins (1982) elle peut être endogène chez certains malades ressemblant à celle
observée en psychiatrie.
Taylor et al. (1986b) testent ces hypothèses en analysant les performances de 4 groupes de
sujets à des tests de MCT et au subtest de vocabulaire de la WAIS-R. Il s'agit d'un groupe de Pk
déprimés, un groupe de Pk non déprimés, un groupe de patients souffrant de dépression
endogène et un groupe témoin. Les auteurs notent que les performances des Pk en MCT sont
comparables quel que soit le degré de sévérité de leur dépression. Toutefois, 3 des 5 indices de
MCT sont déficients chez les patients ayant une dépression endogène. Les auteurs analysent les
réponses des Pk à l'échelle de dépression Beck. Ils remarquent que les réponses peuvent être
classées sous deux rubriques. Une rubrique générale contenant des difficultés psychologiques
similaires à celles évoquées par les témoins. L'autre rubrique comporte des items en relation avec
la frustration secondaire aux difficultés motrices. Très peu de patients rapportent des pensées
auto-destructrices, un sentiment de culpabilité, une sensation d'échec ou un autre type de troubles

44
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

de l'humeur tels qu'on en retrouve dans la dépression endogène. Ainsi, la dépression des Pk est
loin de s'apparenter à la dépression psychiatrique névrotique ou psychotique.
Il paraît que les modifications neurochimiques (déplétion dopaminergique du cortex
préfrontal) et leurs conséquences neuropathologiques prédisposent les patients à un affect
dépressif qui serait facilement réactivé par les difficultés motrices réelles (Agid et al., 1984; cités
par Taylor et al., 1986b).

3.1.5.6 Les troubles cognitifs et la notion de démence sous-corticale


La présence de troubles cognitifs dans la mP a été niée par plusieurs auteurs classiques et par
Parkinson lui-même. Toutefois, actuellement l'existence de troubles cognitifs même au début de
la maladie est établie. La nature de ces troubles sera décrite plus loin. Nous discutons ici de la
présence controversée de la démence dans la mP.
L'estimation de la prévalence de la démence dans la mP varie selon les auteurs de 8% pour
Taylor (1985) à 72% pour Oyebode et al. (1986) voire même à 93% pour Pirozzolo et al. (1982).
Cette divergence des estimations serait due à trois facteurs :

• Des différences de méthodes dans les critères utilisés pour définir la démence dans la mP,
les instruments diagnostiques employés et les caractéristiques démographiques et cliniques
des populations examinées (Oyebode et al,. 1986 ; Dubois et al., 1991).
• Des difficultés d'application des critères classiques de démence, tels les critères
comportementaux ou ceux du DSM III-R (1989), du fait de la présence de troubles
moteurs et des effets iatrogènes des thérapeutiques notamment les anticholinergiques.
• l'association possible entre mP et maladie d'Alzheimer, l' "alzheimérisation de la mP" et le
fameux débat mettant en question l'individuation d'une "démence sous-corticale"
(Cummings, 1986 ;, pour une revue Cf. Gibb, 1989).
Lorsque les critères de sélection des populations sont contrôlés, la fréquence est de 15 à 20%
(Cf. Dubois, 1989) donc supérieure à la prévalence de la démence dans la population générale.
La "démence sous-corticale", décrite par Wilson en 1912 et introduite par Albert et al. en 1974
(cités par Cummings, 1986) réfère à un ralentissement des processus cognitifs associé à des troubles
de la mémoire et des changements de l'humeur. Les études comparant les performances de
patients ayant des lésions à prédominance corticale (comme la maladie d'Alzheimer) à ceux ayant
des lésions sous-corticales (comme la mP) montrent des patterns de déficit différents. Dans les
démences "corticales" les troubles des fonctions instrumentales aphaso-apracto-agnosiques et
l'amnésie sont prévalants. La lenteur, l'altération des fonctions exécutives et le déficit du rappel
sont typiques de la "démence sous-corticale" (Cummings, 1986). Ces données descriptives ont été

45
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

analysées dans le but de savoir si ces différences sont qualitatives (processus cognitifs différents)
ou quantitatives (degrés différents de la sévérité de la démence). Les travaux de Huber et al.
(1986) et Pillon et al (1993) postulent l'existence de patterns de dysfonctionnements différents
entre mP et maladie d'Alzheimer. Les travaux de Mayeux et al. (1983) et la revue critique de
Brown et Marsden (1988) montrent que le poids des arguments ne favorise pas un découpage
clair entre ces deux pathologies. D'une part, les troubles exécutifs frontaux ne sont pas
spécifiques aux "démences sous-corticales" et peuvent s'observer dans les "démences corticales"
(Bhutani et al., 1992). D'autre part, les plaques séniles, marqueur histologique habituel de la
maladie d'Alzheimer, sont observées dans la mP (Hakim et Mathieson, 1979). De plus, les lésions
sous-corticales touchant le noyau de Meynert (Whitehouse et al., 1986) et le locus niger avec le
corps de Lewy (Ditter et Mirra, 1987) sont également observées dans la maladie d'Alzheimer.

3.1.6 Les formes cliniques


On distingue globalement les formes à prédominance akinéto-rigide et les formes à prédominance
tremblante. En Tunisie 48,5% des patients présentent une forme à prédominance tremblante
(Gouider-Khouja, 1991). Les formes à prédominance akinéto-rigide auraient un pronostic plus
sévère que les formes à prédominance tremblante (Stern 1987 ; Gouider-Khouja, 1991).

3.1.7 Évolution
L'évolution spontanée de la maladie est caractérisée par une aggravation progressive et inéluctable
dont la vitesse varie selon les patients. Cette variabilité dépend de l'âge du sujet au moment de
l'installation de la pathologie, de la durée de la maladie, de la sévérité de la symptomatologie, de
l'éventuelle présence de troubles végétatifs ou psychiatriques, de l'attitude du patient et de son
entourage vis-à-vis de la maladie et de la réponse au traitement.
Dans la majorité des cas, le traitement modifie l'aspect évolutif en comparaison à l'évolution
spontanée sans traitement. Il conduit à une phase de stabilisation de quelques années (Parkes
1983), suivie par une phase beaucoup plus lente de déclin sur les plans moteur et cognitif, associé
aux effets secondaires de la dopathérapie chronique (Guillard 1989).
Dés que le traitement est mis en œuvre à des doses adaptées, les effets apparaissent aux
alentours du sixième mois par une amélioration franche, parfois même spectaculaire (Guillard et
Fenelon, 1983). À l'évidence, le patient reste un parkinsonien, mais retrouve une aisance motrice
et une autonomie relatives. La réponse au traitement est un élément important des critères
diagnostiques de la maladie. La stabilité a lieu généralement avec une répartition de la prise
médicamenteuse à des intervalles allant de 6 à 8 heures, parfois même un jour sur deux. La vitesse

46
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

et la qualité de l'amélioration de la symptomatologie ne sont pas homogènes. L'akinésie s'améliore


plus rapidement que le tremblement (Guillard et Fenelon, 1983). Plus tard, quelques dyskinésies
ou dystonies liées à un surdosage peuvent avoir lieu ; l'akinésie peut réapparaître au cours d'un
épisode infectieux, traumatique ou émotionnel, ou parfois sans raison apparente. Ces incidents
disparaissent par simple ajustement du traitement (Guillard, 1989). Le temps de réponse à une dose
de lévodopa diminue progressivement et des signes secondaires (troubles digestifs, dépressifs...)
commencent à apparaître. Ceci annonce généralement le passage à la phase de déclin (Parkes 1983).
L'aggravation de la symptomatologie parkinsonienne ou sa résurgence constituent la modalité
évolutive la plus fréquente. Le déclin moteur survient après presque 3 ans de dopathérapie. Ce
déclin devient franc après environ 5 ans d'évolution et sévère après presque 10 ans (Guillard 1989).
À cette aggravation s'associent des fluctuations de l'état moteur connues sous le vocable du
"phénomène On-Off". L'effet de la L-Dopa commence une demi-heure après la prise, il devient
maximal après une heure et se maintient (phase On) environ quatre heures avant de s'estomper
(phase Off) si une nouvelle prise n'assure pas le relais (Guillard et Fenelon, 1983). Avec l'augmentation
de la durée de la maladie, et après plusieurs années de L-Dopa, la phase "On" d'efficacité tend à se
raccourcir progressivement et le malade, conscient de sa durée, réorganise ses activités quotidiennes
en fonction de ces fluctuations. De plus, des troubles de l'équilibre et de la marche, des épisodes de
freezing et de chutes "en statue", une dysarthrie, des dyskinésies bucco-linguo-faciales, d'autres
mouvements involontaires, des bouffées d'anxiétés, des éléments dépressifs et même des états
confusionnels, des délires et des hallucinations peuvent apparaître plus ou moins tardivement.
La progression de la mP vers un état démentiel est très discutée. L'incidence d'un syndrome
démentiel chez les parkinsoniens va de 3% à 87%. Cette fourchette énorme est rapport avec les
critères diagnostiques adoptés et les instruments d'évaluation utilisés. Il pourrait s'agir d'une
forme spécifique de démence dite démence sous-corticale.
Plusieurs échelles ont été conçues afin de suivre l'évolution de la maladie, l'effet des diverses
thérapeutiques et pour avoir des indices quantifiables sur de nombreux aspects de la maladie. Ces
échelles se basent, pour la plupart, sur ce que rapporte le patient et sont, malgré leur subjectivité,
très utiles et relativement sensibles (Brown 1989). Parmi ces échelles, celle de Hoehn et Yahr
(1967) est la plus utilisée actuellement, elle se distingue par sa simplicité et sa facilité d'application.
En Tunisie, la sévérité globale de la maladie selon sa durée d'évolution semble moins
importante que celle des patients décrits dans la littérature : jusqu'à 6 ans d'évolution la majorité
des patients est au stade 2 ; Au-delà de 6 ans la majorité des patients est au stade 3 ; 27,7%
seulement des patients arrivent à des stades sévères de la maladie (4 et 5 de Hoen et Yahr) même
au-delà de 10 ans d'évolution (Gouider-Khouja, 1991).

47
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

3.2 Les changements cognitifs


La possibilité d'occurrence de troubles cognitifs dans la mP paraît de prime abord peu probable
puisque les atteintes ne touchent pas directement le cortex "siège des opérations cognitives".
Toutefois, ceci revient à nier le rôle des structures sous-corticales dans la cognition. Or,
l'expérimentation animale et la clinique nous apprennent que toute activité mentale est générée
par l'interaction des activités de différentes formations cérébrales" (Divac et Öberg, 1992).
Actuellement, la question n'est plus de savoir s'il existe ou non des troubles cognitifs suite à des
lésions sous-corticales, mais elle concerne le type de déficit et sa pathogénie (Marsden, 1980).
Les travaux de neuroanatomie comparée de Stephan et Andy (1969) révèlent que chez l'espèce
humaine, l'index d'évolution du striatum dans la phylogenèse occupe la deuxième place après
celui du néocortex. De plus, sa progression est proportionnelle à celle du néocortex. Ceci montre
une relation fonctionnelle nette entre les deux étages à travers les étapes successives du
développement du cerveau antérieur, incluant notamment les phases majeures de l'expansion du
cortex associatif. Ces données concordent avec celles obtenues chez les primates, les carnivores
et les rongeurs. Elles montrent que toutes les parties de l'enveloppe corticale, incluant les aires
associatives, ont des projections directes vers le striatum (Grofova, 1979 ; cité par Divac et
Öberg, 1992). Des connexions multiples existent entre le cortex préfrontal et le striatum. En
effet, plusieurs travaux ont montré que l'activation d'aires corticales particulières (par le 2-
deoxyglucose) coactive une région néostriatale spécifique de même que le noyau thalamique qui
sert de relais (Caveness et al., 1980, cité par Divac et Öberg, 1992).
Chez l'homme, l’atteinte des structures sous-corticales a des conséquences sur le fonctionnement
cognitif. Comme c'est le cas de la maladie de Huntington (Sprengelmeyer et al., 1995), de
l'atrophie multi-systèmes (Testa et al., 1993), de la paralysie progressive supranuctéaire (Pillon et al.,
1995) et de la mP.
L'examen de la littérature portant sur la question des troubles cognitifs chez les parkinsoniens,
nous permet de constater que ces troubles touchent deux grands aspects :
1. La vitesse de traitement des opérations cognitives et ;
2. Des fonctions spécifiques dont les fonctions linguistiques, visuo-spatiales, mnésiques et exécutives.
Avant de présenter et de discuter cette partie, il nous paraît utile de nous arrêter sur les
notions de "fonction" et de "spécificité des troubles". Plusieurs points sont à noter :
 D'abord, la notion de "fonction cognitive spécifique" bien qu'elle soit valide et pertinente sur
le plan psychologique peut prêter à confusion. Le concept de fonction est arbitraire puisqu’il
existe plusieurs manières alternatives pour analyser un comportement donné (Sergent, 1988).

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Étant donnée la nature adaptative du comportement humain, la diversité et la complexité des


manifestations comportementales après des lésions cérébrales, aucune description ou
définition d’une fonction n'est capable d'englober tous les paramètres appropriés. Ainsi, nous
rejoignons Lezak (1995) qui suggère que les fonctions sont interdépendantes, mais liées
ensemble, et peuvent se manifester sous différentes facettes dans une même activité.
 Ensuite, nous voulons rappeler que les notions de fonction ou de spécificité ne sont pas
synonymes d’exclusivité. Par exemple, il est couramment souligné que la fonction linguistique
est spécifiquement associée au fonctionnement de l'hémisphère gauche. Or, cet énoncé ne
signifie pas que le langage est exclusivement l'apanage de l'hémisphère gauche.
Par ailleurs, dans les approches anatomo-cliniques, la notion de fonction est depuis longtemps
automatiquement associée à une localisation cérébrale. Cependant, parler d’un trouble du
langage chez un parkinsonien ne signifie nécessairement pas l’existence d’une lésion gauche.
 Enfin, il est important de noter qu'avec les postulats de fractionnement et de modularité
(Fodor, 1983), la notion de fonction a été soutenue et a emprunté un tournant intéressant. Les
fonctions ont subit une décomposition conceptuelle en sous-unités de traitement. Ainsi, une
lésion cérébrale peut entraîner une altération sélective des composantes du traitement cognitif.
Ceci fait que l’examen de patients cérébrolésés permet de déterminer des patterns de
dissociation et d’association de symptômes aboutissant à discuter les notions de fonction et de
spécificité avec plus de rigueur et de dynamique dans l’analyse des déficits.
Par ailleurs, plus nos connaissances sur le traitement cognitif de l’information évoluent et plus
les choses se compliquent sur le plan conceptuel. On sait en effet qu'il existe, pour chaque
fonction, plus d’un modèle théorique qui la subdivise à sa façon. Ce problème de démarcation
entre différentes fonctions est loin d’être résolu.
Dans les passages suivants, nous envisageons d'analyser d’abord la question de vitesse de
traitement chez les Pk, puis de traiter des fonctions touchées par la maladie. Il s'agit des fonctions
verbales, visuo-spatiales, mnésiques et exécutives. D’autres fonctions (perception tactile ou auditive
par exemple) ne vont pas être examinées, car elles sont censées être épargnées par la maladie.

3.2.1 La vitesse de traitement


La question de la relation entre efficience des opérations intellectuelles et vitesse de traitement a
attiré l'attention de plusieurs chercheurs. Salthouse et Babcock (1991), Salthouse (1992) et
Salthouse et Meinz (1995) pensent que la vitesse de traitement est une variable intermédiaire qui
explique la majorité des différences observées dans l'efficience cognitive des sujets âgés. Selon

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Fehereisen (1994, cité par Van der Linden et Hupet, 1994) la vitesse d'exécution des opérations
cognitives conditionne la qualité et la quantité de la performance.
La question de vitesse a été étudiée depuis longtemps chez les Pk et a été étiquetée sous le
terme de "bradyphrénie". Nous traitons dans ce qui suit de la vitesse de traitement en termes
cliniques (bradyphrénie) puis en termes expérimentaux comme un paramètre physiologique
quantifiable expérimentalement.

3.2.1.1 La notion de bradyphrénie


Étymologiquement, la bradyphrénie réfère à une lenteur (brady) des processus de la pensée
(phrénie). C'est un terme conçu par Naville (1922 ; cité par Brown et Marsden, 1990) pour
désigner la diminution de l'attention volontaire, de l'initiative, de la capacité d'effectuer des efforts
avec une fatigabilité et un léger affaiblissement de la mémoire.
Selon certains auteurs (Rogers, 1986 ; Gibb, 1989), la bradyphrénie est assimilable à la notion
de "démence sous-corticale". Il s'agit d'une entité clinique qui inclue une série de symptômes très
présents dans la mP : apathie, inertie mentale, lenteur d’utilisation de notions acquises antérieurement
(akinésie psychique) et même des troubles de l’attention. Pate et Margolin (1994) distinguent
entre bradyphrénie et lenteur cognitive non spécifique. Ils proposent de réserver le terme
bradyphrénie chez les Pk à la co-présence de la lenteur et de la démence. Sur le plan moteur, les
Pk déments ne sont pas plus lents que les non déments, alors qu'ils présentent une lenteur cognitive.
Les Pk bradyphrénes ont le même niveau de performance cognitive générale que les malades
d'Alzheimer débutants, mais sont plus déficients dans les tests d'attention (Mayeux et al., 1987).

3.2.1.2 Vitesse de traitement, dépression et akinésie (lenteur motrice)


L’un des problèmes méthodologiques rencontrés au cours de l’évaluation est de pouvoir
différencier la lenteur cognitive de la dépression et de la lenteur motrice souvent présentes dans la
mP. Les patients qui ont une lenteur cognitive sont souvent très déprimés et / ou très akinétiques.
En effet, la lenteur psychomotrice est une composante importante de la dépression. Elle figure
même dans les critères diagnostiques de la dépression du DSM III-R (1989). Cependant, la
relation entre lenteur motrice et dépression est controversée. Rogers et al. (1987) constatent que
la lenteur cognitive est améliorée après un traitement par des agonistes dopaminergiques qui
améliorent en même temps la dépression. Ceci indiquerait selon les auteurs, l’existence d’une
relation étroite entre lenteur cognitive et dépression, celle-ci pouvant être basée sur un mécanisme
dopaminergique. En revanche, Mayeux et al. (1987) suggèrent que la vitesse cognitive est plus liée
à la démence qu'à la dépression. Les composantes N2 et P3 des réponses cérébrales évoquées par
des stimuli auditifs sont prolongées chez les Pk déments contrairement aux Pk non déments.

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Mayeux et al. (1987) notent que les performances des Pk déprimés (5 parmi les 15 Pk examinés,
plus un dysthymique) ne diffèrent pas de ceux des patients non déprimés dans des épreuves de
TR simple ou de choix. De plus, ils n'obtiennent pas de corrélation significative entre le score à
l'échelle de dépression de Hamilton et la vitesse cognitive. Ces résultats sont compatibles avec
ceux de Cooper et al. (1991) qui remarquent que les performances à des tâches cognitives ne sont
pas influencées par la sévérité de la dépression telle qu’évaluée par la Beck. Toutefois, les Pk
déprimés ont un déficit moteur plus important.
Comme la dépression, la lenteur motrice peut influencer la vitesse cognitive. En effet, la plupart
des opérations mentales exigent une réponse motrice. L’akinésie est un symptôme de base dans la
mP, elle est directement liée à la dénervation dopaminergique nigrostriatale. Les études physiologiques
confirment la prolongation dans la mP, aussi bien le temps d'exécution du mouvement que le temps
de réaction (Evarts et al., 1981). Cependant, Cooper et al. (1991) suggèrent que la composante
cognitive est indépendante de la déficience dopaminergique qui sous-tend les difficultés motrices.
Rafal et al. (1984) examinent l'analogie entre bradyphrénie et bradykinésie, e montrent que la
lenteur de la pensée n'est pas affectée par la dopa-thérapie et n'accompagne pas la bradykinésie.

3.2.1.3 Étude de la vitesse de traitement par la chronométrie mentale


Les études portant sur la vitesse de traitement se basent sur les techniques de chronométrie
mentale. Ce sont des méthodes de mesure temporelle du flux d'informations dans le système
nerveux humain (Posner, 1986). La méthode de chronométrie mentale la plus simple est l'utilisation
des TR comme variables dépendantes. Ces procédures expérimentales servent à mesurer la vitesse
de traitement et permettent ainsi de comprendre la nature des déficits attentionnels associés. Deux
variétés de procédures sont à distinguer : les TR simples (TRS) et les TR de choix (TRC).
• Dans une tâche de TRS, le sujet est invité à donner une réponse unique (appuyer sur un bouton)
dés l'apparition d'un stimulus. Le TRS est le temps qui sépare le moment d'apparition du
stimulus de l'émission de la réponse. La procédure de TRS est un cas particulier de détection
sans incertitude sur la présence ou l'absence du stimulus, ni sur le choix de la réponse ;
• Dans une tâche de TRC, le sujet doit donner une réponse spécifique (appuyer sur un bouton)
dés l'apparition d'un stimulus donné parmi d'autres. Le TRC est un cas particulier de détection
avec incertitude sur la présence ou l'absence du stimulus et / ou sur le choix de la réponse.
Les procédures de TRS peuvent être utilisées pour examiner le niveau d'alerte lorsque les
stimuli sont précédés par un signal avertisseur. Elles sont plus utiles dans l'examen de la vitesse
du circuit sensori-moteur que dans l'analyse de la vitesse des opérations cognitives en soi. Elles
exigent en effet moins de traitement cognitif que les procédures de TRC.

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Dans les TRC, les sujets sont invités à faire des choix. Ainsi, la prolongation du TR en
fonction de la complexité de la tâche refléterait des différences dans le traitement central
associées à l’identification des différents stimuli et à la sélection des stratégies de réponse. Pour
faire des inférences sur la vitesse de traitement, on diminue expérimentalement la demande
motrice de la tâche et on varie la composante cognitive.
Les travaux expérimentaux utilisant des procédures de TR chez des Pk, fournissent peu
d'arguments empiriques en faveur d'une lenteur de traitement cognitif. Wilson et al. (1980)
utilisent la procédure de Sternberg et ne notent de lenteur cognitive que chez des Pk âgés au delà
de 65 ans. Toutefois, dans cette étude, les auteurs ne spécifient pas la durée de la maladie, sa
sévérité ni la présence éventuelle d'une dépression. Ce manque de précision peut également être
relevé à travers le travail de Zimmerman et al. (1992) qui rapportent une lenteur cognitive chez
les Pk débutants et non traités, sans pour autant donner d'informations sur la présence ou non
d'une dépression ou d’une démence chez leurs sujets. Howard et al. (1990) mettent l'accent sur
les failles méthodologiques de l'étude de Wilson et al. (1980). Ils répliquent l'expérimentation en
contrôlant les facteurs âge, QI, dépression, durée et sévérité de maladie, mais ne constatent pas
de différence significative entre les Pk et les Té même âgés.
L'examen des performances des Pk rapportés dans les travaux sur les TRS et les TRC permet
de relever trois types de résultats :
 Evarts et al. (1981) ; Bloxham et al. (1984) ; Sheridan et al. (1987) et Pullman et al. (1988)
notent que les Pk sont déficients dans les tâches de TRS mais pas dans les tâches de TRC.
Ces résultats sont interprétés en termes d'un déficit de pré-programmation puisque dans les
TRS, la réponse est la même dans tous les essais et les sujets peuvent pré-programmer la
réponse avant l'apparition de la cible.
 À l'opposé, Lichter et al. (1988) constatent un déficit sélectif dans les TRC et non dans les
TRS. Ceci suggère selon les auteurs des difficultés de programmation, c'est à dire, de
sélection et de formulation de programmes centraux de réponses.
 Enfin, d'autres auteurs ne rapportent pas de différences entre les performances dans les
TRS et les TRC. Soit que les deux sont normaux (Talland, 1963) ou que les deux sont
déficients (Mayeux et al., 1987).
Ces résultats sont discordants, mais il y a de plus en plus d'arguments en faveur de l'absence de
ralentissement cognitif chez les Pk dans les tâches de TR (Howard et al., 1994). Gibb (1989)
pense que ceci serait dû à la facilité de ces tâches.

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Aussi, plusieurs chercheurs ont essayé une autre piste d'examen de la lenteur du traitement
cognitif en l’explorant par des tâches plus complexes que celles des TR. Ainsi, Morris et al. (1988)
observent une augmentation du temps de réponse dans une tâche informatisée de la Tour de
Londres. Brown et Marsden (1988) de leur côté enregistrent une prolongation du temps de
réponse dans une tâche informatisée du Stroop. Enfin, Taylor et al. (1987) attestent d'un
allongement du temps de réflexion dans le Trail Making Test, même si la vitesse motrice est
contrôlée (différence de temps B-A). Or, dans ces tâches complexes, la lenteur des Pk peut
indiquer un trouble de stratégie cognitive plutôt qu'une véritable lenteur de traitement cognitif
central. En effet, cette dernière hypothèse est confirmée par Pillon et al. (1989). Ces auteurs
analysent les performances des Pk à travers le test des 15 objets et une tâche de discrimination de
15 dessins d’objets superposés. Ils constatent que dans le test des 15 objets, à mesure que la tâche
devient difficile, la lenteur augmente du 1er au 12ème objet identifié. De plus, la réussite dans cette
tâche dépend de l'efficience de plusieurs fonctions exécutives comme l'élaboration de stratégies et
l'inhibition. La lenteur du traitement cognitif démontrée dans cette étude parait donc être due,
plus au type de tâche en question qu'à une lenteur de vitesse de traitement cognitif per se.

3.2.2 Le langage et les fonctions visuo-spatiales

3.2.2.1 Le langage
Comparé aux autres fonctions, le langage est le moins touché chez les Pk (Cummings, 1986). Ce
qui parait le plus touché c'est la parole qui implique des processus neuro-mécaniques de l'articulation.
Lieberman et al. (1992) examinent des échantillons de parole de 40 Pk en mesurant le temps
mis par une personne pour prononcer un vocable (Voice Onset Time: VOT). Ils constatent que
les patients ont des déficits dans le timing de prononciation de certaines consonnes. Neufs sujets
sur 40 ne présentent pas de distinction entre différentes classes de consonnes dans leur VOT. Un
retard dans le temps de réponse et plusieurs erreurs de compréhension syntaxique des phrases
complexes sont également observés. Ces déficits auraient selon les auteurs une base
physiologique commune : la perturbation des circuits fronto-sous-corticaux.
Il a été souvent noté que les capacités linguistiques demeurent intactes chez les Pk. En effet,
les Pk ne diffèrent pas des Té dans la dénomination d'objets. Feedman et al. (1984) utilisent le
Boston Naming Test et ne constatent pas de différences entre Pk et Té. De même, Bayles et
Tomoeda (1983) ne notent pas de différence significative entre des Pk et des Té dans le nombre
d'erreurs commises au Peabody Language Development Kit. Toutefois, Pirozzolo et al. (1982)
notent que les Pk ont des performances inférieures aux témoins à des tests neuropsychologiques

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

incluant les subtests Information et Vocabulaire de la WAIS. Matison et al. (1982) signalent aussi
que les Pk ont des difficultés de dénomination que les auteurs appellent "anomie de production
de mots" qui est peu atténuée par l'indiçage sémantique. Elle est par contre réduite par l'indiçage
phonétique rappelant le phénomène du mot "sur le bout de la langue" (tip of the tongue) qu'on
rencontre dans certaines aphasies. Ces difficultés de dénomination sont corrélées avec la sévérité
de la bradyphrénie. Cependant, Matison et al. (1982) constatent aussi que la répétition de phrases
est déficiente et que ce déficit est corrélé avec la dysarthrie. Ils concluent que ces déficits peuvent
être attribués à des difficultés de changement de programme d’action et de planification plutôt
qu'à un trouble linguistique.
Dans une étude examinant des échantillons de parole spontanée de 10 Pk, autant de malades
de Huntington, d'Alzheimer et de Té à l'aide d'une analyse neurolinguistique par le "Montreal
Linguistic-Stanford Protocol", Illes et al. (1989) examinent les axes temporel, syntaxique et lexical
du langage. Ils constatent, que les Pk ne présentent aucun déficit sur l'axe syntaxique. En
revanche, sur l'axe lexical, sans faire de néologisme, les Pk tendent à produire des phrases
optionnelles, ouvertes, décrivent plus et donnent plus d'informations autour de la même question
afin de maîtriser les difficultés motrices de la parole. Enfin, concernant l'axe temporel, les auteurs
notent que chez les Pk, le taux de la production est normal mais la durée des pauses est longue et
les hésitations fréquentes en début de phrase. Les auteurs interprètent ces résultats en termes de
difficulté de formulation ou de planification des séquences linguistiques. Ils concluent que les
pauses représentent un mécanisme adaptatif compensatoire face aux difficultés motrices de la
parole qui accompagnent la maladie.
Outre ces difficultés, les Pk non déments manifestent des difficultés de compréhension des
phrases à rôle thématique complexe (Natsopoulos et al., 1991), de traitement des phrases et de
détection des erreurs (Grossman et al., 1993).
Natsopoulos et al. (1991) comparent des Pk à des Té dans une tâche de compréhension de
phrases à différents niveaux de complexité thématique et dans une tâche d'appariement phrases-
images. Les patients ont eu des difficultés de compréhension des "phrases relatives" à rôle
thématique complexe. Ils traitent les phrases irréversibles sémantiquement à partir d'une
représentation heuristique et non algorithmique. Leur stratégie d'analyse des relations syntaxiques
est simple. Elle obéit au principe de la distance minimale qui considère comme sujet le mot le
plus proche (en terme de distance) de la relative.
Dans une autre expérience, les auteurs comparent les performances des Pk à ceux d'un groupe
d'enfants âgés de 11 à 12 ans et suggèrent l'hypothèse maturationniste, trop générale, d'une
régression mentale chez les Pk. Si cette hypothèse explicative nous paraît discutable, ce travail

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

met bien l'accent sur un déficit de stratégie d'analyse dans le processus de compréhension.
Grossman et al. (1993) examinent un groupe de Pk et un groupe Té appariés par une tâche
composée de phrases et de questions afin d'expliquer l'origine des troubles de compréhension de
phrases complexes chez les Pk. Les auteurs manipulent la forme syntaxique (phrase déclarative
simple, subordonnée par une préposition, complexe avec un relatif intégré), la correspondance ou
non à la question présentée (en voie passive ou active) et l'existence ou non de contraintes
sémantiques (noms réversibles ou non). Ils constatent que les patients présentent un déficit dans
le traitement des phrases à mesure que la tâche devient astreignante. Ils notent que le pattern de
déficits ne peut être expliqué seulement par une difficulté grammaticale. Pour rendre compte de
ces données, les auteurs discutent un éventuel déficit mnésique qu'ils rejettent, car les Pk
réussissent mieux les phrases longues que celles courtes et complexes. Ils discutent ensuite un
éventuel déficit attentionnel et trouvent que cette hypothèse est plus défendable. Le déficit est
plus important avec les phrases qui demandent plus de ressources de traitement. De plus, dans une
tâche de détection d'erreurs grammaticales, les Pk ont des difficultés pour déceler des erreurs dans
les morphèmes grammaticaux des phrases traduisant un déficit attentionnel. Ces données ont été
confirmées par les PET Scan de 6 patients et 4 témoins qui montrent une corrélation entre le
pattern de traitement déficient des phrases et un hypométabolisme du glucose dans les lobes
frontaux. Ainsi, Grossman et al. (1993) interprètent ces résultats en éliminant la causalité motrice
et mnésique. Ils suggèrent qu'il s'agit plutôt d'un problème attentionnel. Les Pk seraient déficients
dans l'utilisation de la mémoire de travail pour supporter le traitement des phrases complexes.
Ainsi, deux points sont à noter :

• S'il y a une unanimité sur la présence de troubles de la parole, une controverse existe par
contre quant à l'existence de troubles authentiques du langage, c'est à dire d'un déficit
primaire et spécifique du langage. En effet, nombre de tâches verbales utilisées pour
explorer le langage font appel à des capacités complexes de planification, d'attention et de
mémorisation, comme si elles n'avaient du verbal que la modalité. Un déficit dans ce type
de tâche n'implique pas forcément l'existence d'un déficit du langage. C'est le cas par
exemple des tâches de fluence verbale qui impliquent en plus des habiletés langagières, la
participation des fonctions exécutives.

• Il est vrai qu'une aphasie au sens strict et classique du terme n'est pas présente dans la mP
et que les déficits de nature linguistique sont mineurs et peu fréquents. En revanche, des
troubles du langage existent lorsque l'échantillon inclut des patients déments ou dans des
étapes avancées de la maladie. En effet, la comparaison des performances linguistiques d'un
groupe de Pk non déments, d'un groupe de Pk déments et d'un groupe de malades

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

d'Alzheimer met en évidence l'importance du statut cognitif et de l'existence ou non de


syndrome démentiel dans la manifestation des troubles (Cummings et al., 1988).
Ainsi, l'estimation des modifications linguistiques chez les Pk est variable selon la méthode
utilisée et l'échantillon examiné.

3.2.2.2 Les fonctions visuo-spatiales


Les habiletés visuo-spatiales ont une grande importance dans la vie quotidienne. Elles réfèrent à
plusieurs registres qui ne sont évidemment pas équivalents. Le terme "déficit spatial" n'est pas
informatif en soi. Kolb et Whishaw (1985) énumèrent au moins 13 types de déficits spatiaux
décrits dans la littérature qui incluent la difficulté de localisation spatiale des stimuli visuels,
auditifs ou tactiles, la confusion droite/gauche, l'incapacité de déterminer l'orientation visuelle de
lignes, le trouble de discrimination de formes, les déficits constructifs etc. Newcombe et Ratcliff
(1989) pensent que tous les stimuli visuels et tous les comportements moteurs en réponse à ses
stimuli sont virtuellement spatiaux vu qu'ils impliquent une position dans l'espace. La nature du
trouble spatial est donc difficile à établir et à délimiter. Nous limitons notre discussion des
déficits visuo-spatiaux aux capacités suivantes :
 Apprécier la position relative d'un objet dans l'espace ;
 Intégrer ces objets dans un cadre spatial cohérent ;
 Effectuer des opérations mentales impliquant des concepts spatiaux.

Les indices portant sur le rôle des ganglions de la base dans les fonctions visuo-spatiales
proviennent de l’expérimentation animale. Les rats, les carnivores et les primates ayant des lésions
des ganglions de la base ont des performances pauvres aux épreuves impliquant une forte composante
visuo-spatiale telles les tâches de labyrinthes (Thompson, 1974), les tâches de réponses spatiales
alternées différées et les tâches spatiales impliquant la discrimination visuelle (cf. Teuber, 1976).
Plusieurs auteurs plaident en faveur de l'existence d'un déficit visuo-spatial chez les Pk (Boller
et al., 1984 ; Hovestadt et al., 1987). Cependant, certains auteurs ne contrôlent pas toujours la
difficulté motrice. Pour ce, Boller et al. (1984) utilisent deux types de tâches: visuo-motrices et
visuo-perceptives qui exigent un minimum de réponses motrices. Les Pk montrent une altération
des performances aussi bien dans les tests visuo-moteurs que visuo-perceptifs. Ce déficit visuo-
spatial semble être indépendant du niveau intellectuel. Aussi, Hovestadt et al. (1987) examinent
les performances des Pk à une épreuve d'orientation spatiale, un test de reconnaissance de visages
et un test de reconnaissance de formes géométriques. Ils constatent que l'orientation spatiale est
altérée chez 43/44 patients, alors que la reconnaissance de visages est déficiente chez 17 patients
(/44). Toutefois, dans le test d'orientation de lignes 7 patients seulement (/44) sont déficients.
Les auteurs n'observent pas de corrélation entre les résultats à l'épreuve d'orientation spatiale et

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

les résultats aux autres tests ni avec d'autres variables (durée de la maladie, âge du patient, sévérité
de la maladie, score verbal à la WAIS). Les auteurs défendent l'hypothèse d'un déficit visuo-
spatial chez les Pk même quand la tâche n'implique pas une grande composante motrice. Ces
résultats sont compatibles avec ceux d'autres travaux dont ceux de Stern et al. (1983, 1984) qui
confirment l'existence chez les Pk d'un déficit visuo-spatial et visuo-moteur.
Certains chercheurs obtiennent des résultats mitigés, alors que d'autres ne relèvent aucun
déficit visuo-spatial primaire chez les Pk.
Taylor et al. (1986a) utilisent plusieurs tâches visuo-spatiales (discrimination de dessins d'objets
enchevêtrés, raisonnement spatial numérique, discrimination figure-fond, rotation mentale et
orientation topographique droite / gauche). Leurs résultats montrent qu'en termes de précision
dans la réalisation de la tâche, les Pk n’ont pas de déficit aux tests visuo-spatiaux. Les Pk
présentent une lenteur qui ne concerne que le raisonnement spatial numérique. Cette hypothèse
de l'absence de déficit visuo-spatial confirmée par Brown et Marsden (1986) qui n'observent pas
de différence entre les performances des Pk et des Té dans la discrimination droite / gauche et la
manipulation de ces concepts dans différentes perspectives spatiales. Cependant, Brown et
Marsden (1986) restent prudents en notant qu'il n'existe aucune preuve que les patients n'ont pas
utilisé une stratégie verbale pour effectuer la tâche. Il est possible que les résultats reflètent la
mise en jeu d'autres processus que les opérations spatiales.
L'opérationnalisation des déficits visuo-spatiaux n'est donc pas simple. De Renzi, Faglioni et
Scotti (1971) remarquent que les tâches utilisées pour évaluer la perception de l'espace sont très
complexes, de sorte qu'il est difficile de distinguer l'influence des facteurs praxiques, mnésiques et
intellectuels sur les performances spatiales. Rappelons qu'à ces facteurs s'ajoutent ceux de
l'implication des fonctions exécutives.
Grossman et al. (1993) examinent des Pk non déments et des Té à travers la Figure Complexe
de Rey (FCR) et des tests des fonctions exécutives, d'attention visuelle et de perception visuelle.
Leurs résultats montrent que les copies de la FCR des Pk sont qualitativement non organisées. Ils
ont des difficultés à considérer les principaux éléments de la figure comme ayant un rôle organisateur.
Ceci est révélé par l'omission de certaines unités structurales principales dans la reproduction de
mémoire. Les résultats issus de la FCR ne sont pas corrélés avec l'âge, le sexe, la scolarité, la durée
de la maladie, la médication, la sévérité de la rigidité, du tremblement ni avec la sévérité globale de
l'atteinte. Cependant, les corrélations et régressions montrent que les possibilités constructives
des Pk sont compromises par les déficits des fonctions exécutives et à un moindre degré par la
perception visuelle et les difficultés motrices. Les auteurs montrent que les difficultés aux tâches

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visuo-spatiales complexes sont difficiles à interpréter et que le déficit visuo-constructif dans ces
tâches complexes qui impliquent l'intervention des fonctions exécutives est de nature multifactorielle.
Raskin et al. (1992b) comparent des Pk et des Té à deux batteries de tests, l'une évaluant
l'orientation spatiale et l'autre le changement de programme d'action. Ils notent que les Pk n'ont
pas de déficit aux tâches d'orientation spatiale pure qui ont peu ou pas de composante motrice.
Ils sont toutefois déficients aux tests de changement de programme d'action. De plus, les
performances aux tests d'orientation spatiale ne sont pas corrélées à celles des tests de
changement de programme d'action. Il y aurait donc chez les Pk une dissociation entre des
fonctions d'orientation spatiale (préservées) et des fonctions exécutives (altérées).
Ainsi, l'hypothèse du déficit visuo-spatial chez les Pk n'est pas bien établie surtout si l'on
considère les biais de méthodes. En effet, l'examen détaillé des résultats de Boller et al. (1984), qui
est l'une des références de base qui conclue que les Pk sont déficients dans toutes les tâches
visuo-motrices et visuo-perceptives, montre que les seules tâches où les Pk réussissent
normalement sont purement spatiales. On rejoint donc Spinnler et Della Sala (1987) qui notent
que deux problèmes de méthode pourraient expliquer les inférences faites sur les déficits visuo-
spatiaux chez les Pk à savoir le choix des tests et l'échantillonnage :
 En ce qui concerne le biais de choix du test, il est important de remarquer que la plupart
des études qui rapportent un déficit visuo-spatial chez les Pk s'appuient sur des performances
à des tests ayant une forte composante motrice. Par ailleurs, même si cette composante est
contrôlée, les composantes attentionnelle, exécutive et mnésique le sont peu. Della Sala et
al. (1986) signalent aussi l'importance de la contrainte temporelle qui peut défavoriser les Pk.
 S'agissant du biais de sélection des sujets, deux points sont à noter. Le premier est que dans
la plupart des études on écarte les sujets qui sont à des stades avancés de la maladie ou
ayant un grand déficit moteur. D'après Hovestadt et al. (1987b), ces critères contribuent à
l'exclusion des Pk pouvant présenter des déficits visuo-spatiaux. Le deuxième point est que
l'on ne doit pas oublier que la mP est une maladie dégénérative progressive et que
l'hypothèse d'une démence associée n'est pas à rejeter. Plusieurs études ont fourni des
preuves montrant que chez les Pk déments la dégénérescence touche des structures extra-
nigro-striatales (structures corticales frontales) et même plus diffuses sur le plan cortical
(Hakim et Mathieson, 1979 ; Boller et al., 1980).
Ces problèmes de méthode s'appliquent aussi bien aux travaux portant sur les fonctions visuo-
spatiales que sur le langage. L'ensemble des résultats n'est pas en faveur de l'existence d'un déficit
généralisé du langage et des fonctions visuo-spatiales chez les Pk.

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

3.2.3 Les fonctions exécutives


D'après Lezak (1995), les fonctions cognitives non exécutives s’expriment en termes de quoi
"What" ou combien "How much" c'est à dire "combien connais-tu?", "qu'est ce que tu peux faire?".
Les fonctions exécutives portent sur le comment "How" : comment le sujet va effectuer cette tâche.
Le terme fonctions exécutives réfère aux processus mentaux impliqués dans la réalisation d'un
comportement dirigé vers un but et exprimé sous la forme d'un acte mental ou moteur. On pense
généralement que les fonctions exécutives contrôlent la formulation des actions orientées vers un
but, la planification, la réalisation de plans dirigés vers un but et la performance effective (Lezak,
1995). Les fonctions exécutives sont fréquemment altérées suite aux lésions des lobes frontaux
(Damasio, 1979). C’est pour cette raison qu’on a actuellement tendance à admettre que la mise en
évidence d'un dysfonctionnement exécutif est synonyme de l'existence de lésions frontales. Or,
cette conclusion n'est probablement pas toujours vérifiée. En effet, et comme le signale bien
Vallar (1991), les performances aux tests neuropsychologiques fournissent des informations sur
les processus cognitifs impliqués dans ces tests plutôt que sur la localisation d'une lésion ou sa
structure. Plusieurs expériences récentes montrent que les fonctions exécutives peuvent être
altérées suite à une lésion touchant les lobes frontaux ou d'autres parties du cerveau, particulièrement
les ganglions de la base (Cf. Dubois et al., 1991). Ceci souligne la relation étroite qui existe entre
le cortex préfrontal et certaines structures sous-corticales, chacun d'eux est un composant
essentiel de l'entité anatomo-fonctionnelle qu'est le "système frontal".
L'examen des fonctions exécutives chez les Pk se fait, le plus souvent, dans le cadre de l'étude de
la nature frontale du déficit (Taylor et al., 1990 ; Bondi et al., 1993 ; Pillon et al., 1993). Les fonctions
exécutives couvrent des aptitudes diverses et leur spécification n'est pas encore établie empiriquement.
Il n'existe pas d'unanimité sur le fait que telle fonction particulière est ou non exécutive. Nous
abordons dans ce qui suit les travaux portant sur la planification, l'inhibition et la flexibilité.

3.2.3.1 Planification de l'action


La planification peut être définie comme l'élaboration et l'organisation d'étapes et éléments
nécessaires pour accomplir une intention ou réaliser un but (Lezak, 1995). L'administration d’une
version informatisée de la Tour de Londres (Shallice, 1982) a des Pk montre que ces patients ont
des performances équivalentes aux normaux en terme du nombre de mouvements effectués.
Cependant, le temps initial de planification est plus long même si on contrôle le "temps moteur"
(Morris et al., 1988). Ceci indique que les Pk sont précis mais pas aussi efficients que les Té.
L'augmentation du temps de réponse dans des tâches cognitives telle la Tour de Londres peut
être le résultat d'une lenteur non spécifique de traitement comme cela est décrit dans la littérature

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sur la bradyphrénie ou d’un déficit spécifique de planification. Le déficit de planification a été


démontré par Saint-Cyr et al. (1988) avec la Tour de Toronto. Les auteurs constatent que les Pk
font significativement plus de mouvements que les normaux. Ils suggèrent qu'il s'agit d'un déficit
de mémoire procédurale. Or, l'augmentation du nombre de mouvements même dans le premier
block de réponses est en faveur de l'hypothèse d'une difficulté de planification.
Avec une autre version informatisée de la Tour de Londres Owen et al. (1990, 1991, 1992)
montrent que les Pk sous traitement ont un trouble de planification qui se manifeste par une
lenteur significative dans le temps initial. Avec l'avancement dans la maladie une augmentation du
nombre de mouvements est aussi observée. À l'opposé, les patients frontaux ne présentent pas de
lenteur d'initiation des solutions aux problèmes mais sont plus lents lorsqu'ils raisonnent durant
l'étape subséquente au premier mouvement. De plus, comme les Pk avancés dans la maladie, il font
un nombre plus important de mouvements. Il s'agit donc de patterns différents de déficits de
planification.
Les travaux de Morris et al. (1988) et d'Owen et al., (1990, 1991, 1992) sont réalisés à partir de
deux versions différentes de la version originale de la Tour de Londres décrite par Shallice en
1982. Les données des auteurs ne sont pas comparables à celles issues des travaux de Shallice sur
des patients frontaux. De plus, le ralentissement des Pk dans le temps initial peut n'être qu'une
conséquence d'une attitude autocritique du patient (Goldenberg et al., 1990).
D'autres instruments servent à examiner la planification. L'épreuve d'arrangement d'images de
la WAIS-R est utilisée par Sullivan et al. (1989) pour apprécier la capacité d'élaboration d'une
interprétation et d'organisation de séquences thématiques. Cette étude montre que les scores des
Pk sont constamment inférieurs à leur score présumé à partir des performances au subtest de
Vocabulaire (WAIS-R). Les auteurs suggèrent que cette altération spécifique reflète un déficit de
manipulation d'items multiples dans lesquels une séquentiation cognitive est exigée.
Wallesch et al. (1992) soumettent des Pk et des Té appariés à une tâche informatisée de
résolution de 6 labyrinthes. S’agissant des performances générales, les auteurs constatent que les
Pk font un grand nombre d'essais pour la résolution des problèmes. Ils font surtout des
répétitions de la dernière action dans les situations de choix multiple. Toutefois, le temps de
réponse est identique pour les deux groupes dans toutes les situations. Les auteurs rejettent
l'hypothèse d'une réduction dans la vitesse de traitement cognitif ou dans la réponse motrice et
concluent à l'existence chez les Pk d'une difficulté de génération de plans d'action. Quand des
patients frontaux (8 nouvellement atteints et 8 chroniques) sont soumis à la même tâche, le
pattern de réponse est partiellement similaire à celui des Pk. Ce déficit dans la programmation de
l'activité motrice est également relevé dans le travail de Flowers (1978) à travers le comportement

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

d'anticipation des Pk. Lors de la poursuite d'une cible en mouvement, les Pk n’ont pas tendance à
prédire spontanément le mouvement futur immédiat, tendance qu'on observe pourtant chez les
Té. Dans leurs réponses, les Pk tendent à être collés aux informations sensorielles en cours au lieu
d'anticiper les événements. La dépendance du patient à l'environnement et aux stimulations
environnementales peut représenter une tentative de compensation de leur déficit de programmation.
Cette dépendance a été décrite chez les patients frontaux par Lhermitte et al. (1986).
Gabrieli et al. (1996) analysent les performances des Pk dans une tâche de pointage auto-dirigé
issue des travaux de Petrides et Milner (1982). Dans cette tâche, le sujet doit toucher des mots
distribués sur 10 pages, tout en adoptant une stratégie et en conservant en mémoire les mots
touchés. Les résultats montrent que les Pk sont déficients dans cette tâche qui exige la mise en
œuvre de stratégies efficientes de pointage auto-dirigé et le maintien en MT des opérations
effectuées.

3.2.3.2 Inhibition des interférences


L'inhibition est la capacité de supprimer les réponses non pertinentes. Cette capacité est sensible
aux dysfonctionnements frontaux (Luria, 1973, 1978). Il y a peu d'études examinant l'efficience
des mécanismes inhibiteurs chez les Pk.
L'inhibition des réponses non pertinentes peut être examinée par une variété d'épreuves dont
la plus connue est le Stroop. Il s’agit d’une tâche d'attention sélective où le sujet est en face de
deux informations simultanées et où il est invité à inhiber la réponse dominante (lecture) tout en
activant la réponse moins dominante (dénomination de couleur). Brown et Marsden (1988)
constatent que les Pk ont des difficultés à réaliser cette épreuve lorsqu'ils doivent guider eux-
mêmes la progression dans la tâche. Les auteurs suggèrent que ce qui apparaît comme sensibilité
accrue à l'interférence chez les Pk peut n'être que le reflet d'un déficit plus fondamental qu'est
l'absence de contrôle interne de l'attention et la nécessité d'indices ou de plans externes. Richards
et al. (1993) évaluent les fonctions exécutives des Pk à travers le Stroop. Ils n'observent pas de
déficit et concluent que ce test n'est pas approprié à l'examen des Pk. Selon les auteurs, la
sensibilité du Stroop à l'effet de l'âge le rend peu discriminatif des dysfonctionnements cognitifs
des sujets âgés. De plus, les Pk sont capables de maintenir, sans difficulté, un programme
comportemental. Or, les difficultés des Pk dans le travail de Brown et Marsden (1988) reflètent
plus un déficit de contrôle interne de l'action qu'un déficit d'inhibition.
D'autres travaux examinent les difficultés d'inhibition dans la mP. Sharpe (1992) utilise une
tâche d'écoute dichotique, là les sujets doivent focaliser leur attention sur l'information envoyée à
une oreille (droite ou gauche) et ignorer l'information interférente envoyée à l'autre oreille. Les

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résultats montrent que les Pk ont plus de difficultés que les Té à ignorer les stimuli non pertinents
mais lorsqu'il s'agit de détecter les stimuli pertinents, leurs performances deviennent comparables
à celles des normaux. Ils sont plus sensibles à l'interférence en présence de distracteurs phonémiques,
sensibilité indépendante de la dépression, des déficits moteurs et du niveau intellectuel.
D'autres indices sur la difficulté d'inhibition des Pk proviennent de l'analyse des erreurs dans
des tâches de rappel libre. En comparant les performances des Pk à celles de malades de
Huntington et d'Alzheimer au CVLT (rappel libre), Pillon et al. (1993) ne notent pas de
différence dans le nombre de mots rappelés par ces trois groupes de même que dans l'indice
d'interférence proactive et rétroactive. Néanmoins, l'analyse des erreurs montre que les malades
d'Alzheimer font plus d’intrusions extra-listes que les Pk. Helkala et al. (1989) comparent le
pattern de déficit mnésique des Pk et des Alzheimers à travers une tâche de mémoire de récits
inspirée du "Luria Nebraska Neuropsychological Battery". L'analyse des erreurs des séries de
récits montre que les Pk, tout comme les malades d'Alzheimer, font plus d'intrusions que les
normaux mais qu'ils diffèrent quant au type d'intrusion. Les deux groupes de patients font le
même nombre d'intrusions intra-récit. En revanche, les Pk font moins d'intrusions extra-récit que
les malades d'Alzheimer, mais ne diffèrent pas des normaux. Au vu du nombre d'intrusion intra-
récits, ces résultats suggèrent que les Pk ne diffèrent pas des Alzheimers en ce qui concerne la
sensibilité à l'interférence proactive (IP). Toutefois, les Alzheimers ont plus de difficultés que les
Pk dans l'inhibition des informations non pertinentes.
Le déficit d'inhibition ne paraît donc pas très prononcé dans certaines tâches. Il est mis en
évidence à travers l'écoute dichotique et l'analyse des erreurs. Son examen par d'autres épreuves
peut apporter des éclairages sur sa présence et sur ses relations avec les autres fonctions cognitives.

3.2.3.3 Flexibilité cognitive


La flexibilité cognitive est une fonction adaptative qui a été largement étudiée chez les Pk.
Cependant, il y a un manque de consensus clair concernant sa définition et son opérationnalisation.
Pour Eslinger et Grattan (1993), il y aurait deux formes de flexibilité : spontanée et réactive. La
flexibilité spontanée, réfère à la capacité de génération interne de réponses différentes. Elle sous-
tendrait la richesse de la productivité des réponses non automatiques et non routinières. La flexibilité
réactive réfère quant à elle à la capacité de changer et de réguler son comportement en fonction
des changements du contexte d'une situation. La flexibilité mentale est exprimée par Cools et al.
(1984) en termes de changement de programme d'action. Elle réfère à la capacité d'alterner entre
différents programmes comportementaux aux niveaux perceptif, cognitif ou moteur.

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Des épreuves de classement de cartes comme le "Wisconsin Card Sorting Test" (WCST) et le
"Odd Man Out" (OMO) sont fréquemment utilisées pour rendre compte de ce type de déficit. Le
WCST consiste à présenter au sujet des cartes qui diffèrent selon la forme, la couleur et le
nombre des signes qu'elles contiennent. Le sujet est invité à classer ces cartes comme il veut et à
progresser en fonction des feed-backs de l'examinateur (correct - faux). Au départ, le sujet doit
classer selon le critère couleur ; lorsque le sujet a fournit 10 réponses correctes consécutives, il
doit changer de critère. Cette épreuve, développée par Grant et Berg, (1948) et modifiée par
Nelson (1976), est largement utilisée pour apprécier la flexibilité et la capacité de former des
concepts. Elle est connue pour être très sensible aux dysfonctionnements frontaux (Milner, 1963 ;
Nelson, 1976) et a été largement utilisée pour examiner les fonctions exécutives chez les Pk.
Bowen et al. (1975) furent les premiers à utiliser le WCST sur des Pk. Ils ont noté des difficultés
de changement de critère, une augmentation du nombre total d'erreurs et du nombre d'erreurs
non persévératives. Taylor et al., (1986a) et Bowen et al. (1975) constatent que les Pk réussissent à
verbaliser la bonne réponse au WCST, mais qu’ils paraissent incapables d'utiliser cette information
de façon appropriée. Cette faiblesse des performances est supposée refléter un dysfonctionnement
frontal. Les résultats de Bowen et al. (1975) quant au faible nombre de catégories réalisées par les
Pk, ont été confirmés par d'autres études. Ces résultats suggèrent un déficit dans la capacité de
changer et de moduler ses réponses. Ce déficit est retrouvé dans les premiers stades de la maladie
(Lees et Smith, 1983 ; Canavan et al., 1989), chez les patients non traités (Lees et Smith, 1983) et
chez les patients ayant des capacités intellectuelles préservées (Bowen et al., 1975 ; Lees et Smith,
1983 ; Taylor et al., 1986a ; Brown et Marsden, 1988 ; Caltagirone et al., 1989). Ainsi, la difficulté
rencontrée par les Pk paraît être un phénomène lié spécifiquement à la maladie (Dubois, 1991).
Canavan et al. (1989) utilisent la version de Nelson (1976) du WCST et n'observent pas chez
les Pk de diminution du nombre de catégories réalisées par rapport à des Té mais une augmentation
des persévérations. Ceci peut être dû au changement de la nature des opérations cognitives exigé
dans la version de Nelson qui est plus simple, plus directe et plus adaptée aux sujets âgés. De
plus, cette version implique plus la mise en œuvre des capacités d'inhibition d'un mode de
réponse en faveur d'un autre quand ceci devient approprié. Le nombre élevé de persévérations
chez ces Pk rappelle les performances des sujets ayant une lobectomie (Milner, 1963).
Le WCST fait l'objet d'une vague de critiques portant sur son ambiguïté, sa longueur et le
stress qu'il peut générer (Nelson, 1976). De plus sa sensibilité aux lésions frontales est remise en
question (Reitan et Wolfson, 1994).
Face aux travaux utilisant le WCST, et à la notion de changement de programme d’action,
Flowers et Robertson (1985) ont mis au point une autre épreuve de classification : le "Odd Man

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Out" (OMO). Ils proposent la notion de maintien de programme d’action pour rendre compte
d'un autre aspect du déficit de flexibilité à savoir la capacité de maintenir un programme d'action
durant l'exécution d'une tâche. Dans le OMO, le sujet doit appliquer un programme d'action de
manière constante avant de le changer lorsque d'autres programmes alternatifs sont présents. Dans
cette tâche, les Pk sont capables de comprendre et d'appliquer une règle de classement mais
échouent lorsqu'on introduit une nouvelle règle. Après le premier changement, ils tendent à
retourner à la catégorie incorrecte. Ceci indique une difficulté à maintenir l'attention sur l'attribut
approprié. La difficulté résulte de la présence de possibilités alternatives compétitives que le Pk
n'arrive pas à inhiber (Flowers et Robertson, 1985). L'instabilité du programme d'action révélée
par le OMO montre que les Pk ont des difficultés de régulation cognitive. Richards et al. (1993)
utilisent ce test auprès de Pk et concluent que la difficulté correspond plus à un déficit des
opérations de changement que de maintenance. Les Té et les Pk réussissent à élaborer et maintenir
une catégorie conceptuelle, sauf que les Pk échouent plus dans le changement de catégories.
L'origine des troubles mentionnés jusqu'ici dépasse la seule question de flexibilité d'un
programme à un autre. Ces troubles peuvent être intégrés dans un cadre plus large de déficit de
flexibilité comportementale dans lequel les Pk n'ont pas seulement un problème de changement
mais aussi de maintien de programme d'action et d'inhibition.
À côté des épreuves de classement, plusieurs chercheurs recourent aux épreuves de fluence
verbale alternée. Dans ces tâches, le sujet est invité à produire le plus de mots appartenant à une
catégorie sémantique ou commençant par une lettre données en alternant entre deux critères
différents. Cools et al. (1984) testent des Pk et des Té appariés par une tâche de fluence alternée
(animaux et activités). Ils constatent une faiblesse des performances des Pk qui serait due à un
déficit de programmation centrale. Ils pensent que l'affaiblissement de la capacité de changement
est une caractéristique des patients ayant une lésion des ganglions de la base. Un travail plus récent
de Downes et al. (1993) ne révèle pas de déficit "de base" en fluence sémantique et phonémique chez
des Pk. Ces auteurs se servent de différentes versions de la tâche de fluence, chez des Pk non
déments comparés à des Té appariés (âge, scolarité et QI). Ils utilisent deux critères : sémantique
et phonémique, pour chaque critère, la fluence peut être simple ou alternée. L'alternance peut être
pure (produire le plus d’items en alternant entre deux catégories ou lettres) ou mixte (alterner entre
la production d’items appartenant à une catégorie sémantique et des mots commençant par une
lettre). Pour chaque type d'alternance, il existe deux conditions : une condition non indicée où le
sujet doit générer lui-même les exemplaires et une condition indicée où on fournit au sujet un
indice lui indiquant la catégorie ou la lettre à partir de laquelle il doit fournir un mot. Downes et al.
(1993) constatent que les Pk ont des performances comparables à celles des Té dans toutes les

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

conditions sauf en fluence alternée mixte. Ces résultats ne fournissent aucun support en faveur d'un
déficit de base en fluence verbale. Ils montrent que la capacité d'alternance n'est pas altérée en soi
et que, comme suggéré par Taylor et al. (1986a), le manque d'indices internes n'est pas l'élément
le plus important dans la mP. Par ailleurs, l'hypothèse d'un déficit de contrôle attentionnel,
défendue par Brown et Marsden (1988), paraît d'après Downes et al. (1993) plus robuste quoique
insuffisante pour expliquer les résultats observés. Ces auteurs insistent plutôt plus sur l'hypothèse
d'un déficit des processus attentionnels inhibiteurs. Les patients paraissent avoir une difficulté à
inhiber et désinhiber alternativement les algorithmes de production. Il est regrettable que Downes
et al (1993) n'aient pas examiné cette hypothèse en soi, bien qu'ils l'aient longuement discuté.
La difficulté des Pk dans les tâches de fluence et de classification évoquent la question du
déficit d'inhibition, de maintien et de changement de programme d'action. La relation entre ces
fonctions relève du fractionnement du SAS de l'AC.

3.2.4 Les fonctions mnésiques


La présence de changements du fonctionnement mnésique est une conséquence constante de la
mP. Cependant, nous ne disposons pas d'études ayant décrit de manière détaillée et analysé
finement la nature des déficits mnésiques sous leurs différentes facettes. D'ailleurs, certains
aspects de la mémoire restent préservés même chez des Pk déments (Sagar et al., 1988 ; Bellaj et
Ben Hmida, 1993). Il est actuellement inadmissible de parler de troubles de la mémoire de façon
unitaire. En effet, les données issues de la neuropsychologie clinique et expérimentale ainsi que
des sciences cognitives montrent que la mémoire ne peut plus être examinée comme un système
unitaire. Ainsi, sur la base de différentes dichotomies conceptuelles, on a pu organiser la mémoire
humaine en opposant plusieurs couples de systèmes mnésiques distincts sur le plan psychologique
et neurobiologique. Ces dichotomies classent les systèmes de mémoire en MCT vs MLT
(Baddeley, 1993), mémoire déclarative vs mémoire procédurale (Cohen et Squire, 1980), mémoire
implicite vs mémoire explicite (Schacter, 1987), mémoire épisodique vs mémoire sémantique
(Tulving, 1972). La combinaison de ces dichotomies dans un schéma plus général a permis à
Tulving (1994) d'identifier au moins cinq systèmes de mémoire :

• Le système de mémoire procédurale ;


• Le système de représentation perceptive (amorçage d'identification) ;
• Le système de mémoire sémantique ;
• Le système de mémoire primaire (de travail ou à court terme) ;
• Le système de mémoire épisodique.

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Nous examinons les études portant sur les changements du fonctionnement mnésique dans la
mP selon cette classification en considérant les différents processus qui opèrent sur ces systèmes
(encodage, stockage et récupération).

3.2.4.1 La mémoire procédurale


La mémoire procédurale réfère à un système d'actions cognitives ou comportementales. Ceci la
distingue des autres systèmes de mémoire (épisodique, sémantique, amorçage et de travail) qui sont
plutôt des systèmes de représentation cognitive (Tulving, 1994). Des performances adéquates dans
des tâches cognitives ou perceptivo-motrices comme balancer une tige sur le doigt ou lire un texte,
sont des exemples de fonctionnement de la mémoire procédurale. L'acquisition est implicite, elle
survient avec la pratique et se manifeste par la diminution des TR ou du nombre d'erreurs d'un
essai à un autre. Deux éléments sont communs à la mémoire procédurale :
• Elle tend à être préservée chez la plupart des amnésiques (Butters et al., 1987) et des
malades d'Alzheimer (Knopman et Nissen, 1987) ;
• Elle est acquise et utilisée sans effort délibéré ou conscient (Graf, Squire et Mandler, 1984).

Nous ne connaissons pas encore le substrat anatomique de la mémoire procédurale, mais nous
savons que le néostriatum et surtout le noyau caudé y jouent un rôle principal (Martone et al., 1984).
Une importante recherche est faite par Saint-Cyr et al. (1988) sur l'efficience de la mémoire
explicite (déclarative) et de l'apprentissage procédural chez des Pk comparés à des malades de
Huntington, deux patients amnésiques et des Té appariés. La tâche d'apprentissage procédurale
est une version simplifiée du Tour de Hanoi que les auteurs appellent Tour de Toronto. Elle est
composée de deux séries :
 Une série de 3 essais comportant trois tiges fixes et trois disques (noir, rouge et jaune). Le
sujet est invité à déplacer les disques un à un en respectant deux règles : il ne doit pas bouger
plus qu'un disque en même temps et il ne doit pas mettre un disque foncé sur un disque clair ;
 Une série de 5 essais avec trois tiges fixes et quatre disques (noir, rouge, jaune et blanc). Le
sujet a à déplacer les tiges en respectant les mêmes règles. Cette série est répétée après un délai
de 1 h 30 pour vérifier si les sujets examinés profitent ou non de la répétition de l'apprentissage.
Les auteurs notent d'abord que les Pk ont des performances normales à toutes les épreuves de
mémoire déclarative. Leurs performances sont également normales dans la phase préliminaire de
la tâche d'apprentissage procédural à 3 disques. Ceci suggère que la capacité globale de résolution
de problèmes n'est pas altérée. Toutefois, ces patients échouent à phase d'apprentissage à 4
disques. Leurs performances sont altérées et ne s'améliorent pas d'une session à une autre. Ceci
indique qu'ils ne profitent pas de la pratique et de la répétition. En revanche, la performance des

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

amnésiques s'améliore dans la deuxième session. Ceci suggère, selon les auteurs l’existence d’une
double dissociation (procédurale vs déclarative). La présence d'un déficit sélectif de la mémoire
procédurale avec une préservation de la mémoire déclarative supporte l'hypothèse que le
néostriatum et le cortex préfrontal appartiennent à un circuit principal d'acquisition de
procédures cognitives (Saint-Cyr et al., 1988).
Pour vérifier la dissociation, décrite par Saint-Cyr et al. (1988), entre acquisition d'habilité et
mémoire explicite chez les Pk, Daum et al. (1995) examinent dans une première expérience les
performances de Pk débutants, comparés à des Pk avancés et des Té appariés à travers :

 Une épreuve de mémoire explicite (mots couplés de la WMS) ;


 Une épreuve de rappel immédiat et différé d'une liste de 16 mots et
 Deux tâches d'acquisition d'habilités. La première porte sur l'acquisition d'une habilité
perceptive (lecture en miroir de mots présentés sur ordinateur). La deuxième vise
l'acquisition d'une habilité cognitive (version simplifiée de la Tour de Hanoi avec 3 tiges et
4 disques de différentes tailles).
Les résultats montrent que l'acquisition d'une habilité perceptive est préservée chez les Pk
débutants et avancés. Cependant, l'acquisition d'une habilité cognitive est modérément affectée
chez les Pk débutants et sévèrement altérée que chez les Pk avancés. Enfin, dans le rappel, qui
exige une plus grande demande de traitement, les patients avec une symptomatologie avancée se
sont vus diminuer. Ce résultat supporte la distinction faite par Bondi et Kaszniak (1991) selon
laquelle les tâches d'apprentissage exigeantes en opérations cognitives auto-dirigées (acquisition
d'habileté cognitive et rappel) dépendent de l'intégrité du circuit fronto-striatal. D'autres types
d'apprentissages, telle la lecture en miroir, n'exigeant pas des opérations cognitives auto-dirigées,
peuvent demeurer intactes dans la mP.
Dans une deuxième expérience, Daum et al. (1995) administrent les mêmes tâches (sauf celle
d'acquisition d'habileté cognitive) à des patients frontaux. Ils constatent que ces patients ont des
performances normales dans les tâches d'apprentissage d'habilités perceptives et les tâches de
reconnaissance, alors que l'apprentissage de paires associées et le rappel libre est déficitaire. Les
auteurs concluent que les Pk, débutants ou avancés, présentent un déficit de mémoire procédurale
d'apprentissage d'habilités cognitives auto-dirigées. Ceci confirme l'observation faite par Saint-Cyr
et al. (1988) sur l'importance du circuit fronto-striatal dans le développement des stratégies
procédurales durant l'acquisition d'habilités cognitives. Néanmoins, la réussite de tous les patients
à la tâche de lecture en miroir, sensée refléter la capacité d'acquisition d'une habilité perceptive,
montre que ce circuit n'est pas impliqué dans tous les aspects de l'apprentissage d'habilités.

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Cependant, le choix de la Tour de Toronto pour mettre en évidence un déficit de mémoire


procédurale chez les Pk pose problèmes car cette épreuve implique la participation des fonctions
exécutives, généralement déficientes chez les Pk. Il devient alors difficile de discerner un déficit
de mémoire procédurale d'un déficit des fonctions exécutives. De plus, la présence de difficultés
motrices chez les Pk invite à la prudence dans l'interprétation des résultats (Van der Linden, 1994).
En effet, les difficultés des Pk dans l'apprentissage d'une nouvelle habilité manuelle ont été
interprétées par Frith et al. (1986) comme la conséquence d'un déficit comportemental plus
général qui est la capacité de maintenir un programme d'action face à des alternatives
compétitives. En conclusion, l'interprétation des déficits procéduraux des Pk doit tenir compte,
en dehors des difficultés motrices, des difficultés exécutives concomitantes.

3.2.4.2 L'amorçage d'identification


L'amorçage (priming) d'identification est un autre type de mémoire implicite. Il est défini comme
la facilitation temporaire de la performance suite à une exposition antérieure au stimulus (Butters
et al., 1990). Il s'agit d'une forme spéciale d'apprentissage perceptif qui s'exprime par l'amélioration
de l'identification des objets comme des entités physico-perceptives structurées. Une rencontre
perceptive avec un objet dans une occasion donnée amorce (facilite) la perception du même objet
ou d'un objet similaire dans une occasion ultérieure. C'est un phénomène de nature pré-sémantique
dépendant d'un système de représentation perceptive (Tulving, 1994).
Le priming lexical, qui dépend de l'intégrité des aires néocorticales, est épargné dans l'amnésie
mais déficient dans la maladie d'Alzheimer (Butters et al., 1990). Toutefois, il existe peu de
travaux expérimentaux qui ont mis en évidence des différences dans l'amorçage d'identification
chez les Pk. Taylor et al. (1990) comparent des Pk à des Té appariés par une tâche de priming : le
"Pixel Dissolve Test". Il s'agit d'une tâche d'identification de mots composée des items de la liste
"A" du CVLT mélangés à 8 items de la liste "B" et 20 distracteurs. Les items sont présentés
aléatoirement sur un écran d'ordinateur avec un masquage qui disparaît graduellement. Le
priming est opérationnalisé par le niveau de dévoilement nécessaire à l'identification des mots. Un
niveau minimum de dévoilement suffit pour les mots déjà expérimentés dans une phase antérieure.
Taylor et al. (1990) constatent que les Pk ont des performances analogues à celles des Té quand il
s’agit d'identifier des mots qui ont été déjà présentés et concluent que le priming est épargné chez
les Pk. Cette préservation réduit de l’importance de l'atteinte de la mémoire implicite chez les Pk
qui ont des difficultés aux tâches de mémoire procédurale telle qu'évaluée par Saint-Cyr et al. (1988).

68
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

3.2.4.3 La mémoire sémantique


La mémoire sémantique est le dépôt permanent des informations qu'on utilise pour comprendre
et produire les signes, pour raisonner, résoudre des problèmes et prendre des décisions. Nécessaire
à l'utilisation du langage, elle est perçue comme notre stock mnésique permanent et comprend
notre savoir général sur le monde. Elle est comparée à un dictionnaire mental ou une encyclopédie
organisant le savoir que possède une personne concernant les mots et d'autres symboles verbaux,
leurs sens et leurs référents, les relations entre eux, et concernant les rôles, formules et algorithmes
indispensables à la manipulation de ces symboles, concepts et relations (Tulving, 1972).
À l'opposé de ce que le terme "sémantique" laisse penser, la mémoire sémantique n'est pas liée
exclusivement au langage. Elle comprend aussi le savoir sur le monde non basé sur les mots
comme les images (visuelles, kinesthésiques ou autres), le savoir des nombres et des
mathématiques. La désignation "mémoire sémantique" n'est, d'après, Tulving (1994) qu'un
accident historique. Hintzman (1978, cité par Ashcraft, 1989) propose de remplacer le terme
mémoire sémantique par mémoire "générique". Il pense que générique sous-entend avec plus de
précision la notion de "savoir général sur le monde".
Le savoir sémantique des Pk a été évalué essentiellement par des tâches de fluence verbale, des
tests de vocabulaire, de dénomination, de compréhension, de catégorisation ou d'association.
Contrairement aux malades d'Alzheimer, qui dans des tâches de dénomination présentent des
erreurs de type sémantique (Martin et Fedio, 1983), les performances des Pk sont normales
(Bayles et Tomoeda, 1983). Leurs performances sont également comparables à celles des Té aux
épreuves conventionnelles de vocabulaire telles que le "Mill Hill" (où le sujet est invité à identifier
le synonyme d'un mot parmi six possibilités) ou le subtest "Vocabulaire" de la WAIS où on le
sujet est appelé à définir des mots (Sullivan et al., 1989). De même, Weingartner et al. (1984)
rapportent que des Pk n'ont pas de difficultés d'identification de dessins d'objets connus
incomplets ou dégradés suggérant la préservation des connaissances stockées en mémoire.
En revanche, les Pk sont connus pour avoir des difficultés dans les tâches de fluence (Lees et
Smith, 1983 ; Girotti et al., 1986 ; Gurd et Marshall, 1995). Là, le sujet est appelé à générer,
pendant un minute par exemple, le plus de mots appartenant à cette catégorie sémantique
(exemple, animaux) ou commençant par une lettre donnée (exemple la lettre F). Plusieurs travaux
rapportent que l'indiçage réduit considérablement les difficultés des Pk jusqu'à la normalisation
de leurs performances (Randolph et al., 1993 ; Hanes et al., 1995).
Randolph et al. (1993) comparent les performances des Pk à celles de malades de Huntington,
de malades d'Alzheimer et de Té (jeunes et âgés) à travers deux tâches de fluence verbale :

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

 Une tâche de fluence sémantique simple où le sujet est invité à générer, pendant 60
secondes, le plus de mots appartenant à deux catégories "Animaux" et "Items de supermarché".
 Une tâche de fluence indicée où l'examinateur fournit au sujet, toutes les 15 secondes, les
superordonnés des catégories. Pour la catégorie "Animaux" les indices sont (animaux de
compagnie, de la ferme, sauvages et aquatiques). Pour la catégorie "Items de supermarché"
les indices sont (fruits et légumes, viande et poissons, boissons et produits de ménage).
Les résultats montrent que tous les patients sont déficients en fluence simple. En revanche, en
fluence indicée, seuls les malades d'Alzheimer continuent à avoir d'importantes difficultés, les Pk
et les Huntingtons ont des performances normales. D'après Randolph et al. (1993) ceci indique la
préservation des mécanismes linguistiques et la déficience des processus de récupération chez les
Pk et les Huntingtons, alors que le déficit des Alzheimers reflète plutôt une dégradation du stock
sémantique. Les auteurs suggèrent que le déficit de récupération en fluence simple peut être dû à
l'altération d'une des voies ganglio-baso-thalamo-corticale supposée impliquée dans la médiation
de certaines opérations cognitives et qui ont un rôle critique dans le circuit fonctionnel régissant
les opérations cognitives associées au lobe frontal.
L'examen des Pk par des tâches de fluence non verbale n'est par de règle vue l'interférence
possible des difficultés motrices. En effet, Taylor et al. (1986a) utilisent une tâche de fluence
graphique sur des Pk et attribuent leurs difficultés à des troubles moteurs. Cependant, d’autres
auteurs n'évoquent pas de relation possible entre ce type de déficit et les troubles des fonctions
visuo-perceptives et visuo-constructives (Pirozzolo et al., 1982 et Boller et al., 1984). En effet,
Auriacombe et al. (1993) rapportent que les Pk font autant de dessins (fruits et outils) et de
figures (tracés curvilignes abstraits) que les Té, mais leurs productions sont moins détaillées. Ils
suggèrent que les Pk n'ont pas de déficit en fluence figurale et que les différences de résultats par
rapport à l'étude de Taylor et al. (1986a) seraient dues à des différences de méthode (5 minutes de
production dans l'étude de Taylor et al. Vs 3 minutes dans l'étude d'Auriacombe et al.) et au fait
que les patients de l'étude de Taylor et al. (1986a) sont plus sévèrement atteints.
La comparaison des performances en fluence sémantique et phonémique donne des résultats
controversés. En effet, Gurd et Ward (1989) et Hanley et al. (1990) notent des déficits dans les
deux critères. Beatty et al. (1989), Matison et al. (1982) et Raskin et al. (1992) rapportent que les
difficultés ne touchent que le critère sémantique et que la fluence phonémique est préservée.
L'interprétation de ces résultats est difficile du fait que les tâches de fluence sémantique sont
connues pour être plus faciles que celles phonémiques (Lezak, 1995). Face à ces résultats, le design
expérimental d'Auriacombe et al. (1993) est instructif. Les auteurs contrastent entre fluence verbale
(sémantique et phonémique) et non verbale (tracés abstraits et dessins d'objets appartenant à deux

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

catégories sémantiques). Ils constatent que seules les performances en fluence sémantique verbale
sont déficientes. Ce déficit n'est associé à aucune donnée clinique (sévérité de la difficulté motrice,
médication), démographique (âge, niveau de scolarité) ou de fonctionnement général (vitesse,
niveau verbal). Selon Auriacombe et al., ce déficit sélectif de fluence sémantique ne paraît pas dû
à un déficit sémantique, comme suggéré par Beatty et al. (1989) vu l'absence de difficultés de
catégorisation et la réussite en fluence graphique avec un critère sémantique. De plus, la difficulté
en fluence sémantique ne peut être attribuée à la modalité verbale puisque les Pk réussissent la
tâche de fluence phonémique. Auriacombe et al. (1993) pensent que la dissociation entre fluence
phonémique préservée et fluence sémantique altérée serait due à un déficit des processus de
récupération lexico-sémantique. Ces processus ne sont pas impliqués en fluence graphique puisque
le sujet n'a pas besoin de récupérer le mot pour dessiner et ne sont pas non plus exigés en fluence
phonémique puisque les lettres inductrices peuvent suffire à la production des réponses. Les lettres
sont donc des indices plus utiles aux Pk que les catégories sémantiques. L’hypothèse de déficit
des processus de récupération lexico-sémantique est supportée par le fait que les Pk présentent
les mêmes difficultés dans une tâche de rappel de mots.
Une des questions d'actualité est de savoir si le déficit observé dans des tâches comme la
fluence verbale est spécifique à une catégorie donnée, à un critère donné ou à une modalité
donnée. Les résultats relatifs à la spécificité du déficit en termes de catégorie sont formels : il n'y a
pas de déficit spécifique à la catégorie chez les Pk.
Au total, deux points sont à signaler. Le premier est la rareté des travaux portant sur la
mémoire sémantique chez les Pk. Le deuxième est l'interférence possible de deux types de biais :
le biais de sélection des sujets et le biais du choix des instruments. Dans la plupart des études on
exclu les Pk avancés. De plus, les indices d'efficience de la mémoire sémantique (performances au
subtest vocabulaire, information générale ou le Mill Hill) figurent, dans la plupart des études,
comme des critères de sélection plutôt que comme des variables d'intérêt. Pourtant, ce sont
essentiellement les résultats obtenus à travers les tâches de fluence qui sont les plus informatifs.
La réussite en fluence parait reposer sur deux composantes qui peuvent être dissociées
empiriquement : l'intégrité du stock sémantique et l'efficacité des processus de récupération
(Randolph et al., 1993). Les résultats de la plupart des travaux montrent que le stock sémantique
est intact chez les Pk et chez les patients ayant des maladies consécutives à des atteintes sous-
corticales (Huntington). Toutefois, le processus de récupération est déficient (Auriacombe et al.,
1993). Au total, les Pk ne présentent pas de déficit de la mémoire sémantique per se, sauf que
certains processus d'accès aux savoirs et certaines stratégies de recouvrement posent problème.

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

3.2.4.4 La mémoire épisodique


La mémoire épisodique réfère à la récollection consciente des événements personnels du passé
c'est à dire, le rappel d'informations individuelles et spécifiques localisables dans un contexte
tempo-spatial.
Cependant, comme noté par Kausler (1985; cité par Van der Linden, 1989) la majorité des
études sur la mémoire épisodique portent sur le recouvrement conscient du contenu de listes de
mots. Il s’agit donc de situations d'apprentissage intentionnel, alors que dans la vie quotidienne, la
mémoire d'événements épisodiques opère souvent de manière incidente. Bien que la mémoire de
liste de mots constitue une activité peu représentative des activités quotidiennes de la mémoire
épisodique (Van der Linden, 1989), son intérêt est notable dans l'étude des processus mnésiques
en jeu. En effet, ce n'est pas tellement le contenu "personnel" de cette mémoire qui nous
intéresse, mais plutôt l'efficience des différents processus en jeu et l'identification de la ou les
étapes où le traitement de l'information est déficitaire. Ce nous amène à analyser l'efficience les
processus en jeu dans l'acquisition (stratégie d'encodage) et la récupération (rappel libre ou indicé,
reconnaissance) d'informations supra-span à l'aide de tests explicites (liste de mots, récits, etc.).

3.2.4.4.1 L'encodage
La méthode la plus fréquemment utilisée pour contrôler les stratégies d'encodage dans la
performance est celle issue de l'approche des niveaux de traitement proposée par Craik et
Lockhart (1972 ; cités par Van der Linden, 1991). Elle consiste à orienter le patient vers l'adoption
d'une stratégie d'encodage donnée : formel superficiel ou sémantique profond. Dans cette optique,
l'hypothèse d'un déficit d'encodage, chez les Pk n'est pas soutenue. En effet, Sagar et al. (1991)
montrent que les Pk font un encodage sémantique de l'information et développent le phénomène
de relâchement de l'inhibition proactive dans le paradigme de Wickens (1963)7. Sagar et al. (1991)
présentent à des Pk débutants et non traités et des Té appariés, une tâche d'interférence proactive
avec un rappel libre de 10 listes de 9 mots chacune appartenant à 4 catégories sémantiques (fruits,
vêtements, animaux et professions). Les auteurs utilisent également une épreuve de mémoire
déclarative (WMS), un test d'évaluation du langage (Reporter's test de production langagière et le
Boston Naming Test), un test de profondeur de traitement, un test de reconnaissance de mots et
un test de changement de programme d'action (WCST). Leurs résultats montrent que les Pk sont

7 Cité par Van der Linden (1989). Dans ce paradigme, quand on présente au sujet examiné des listes successives de mots
appartenant à la même catégorie taxonomique (nom de fruits par exemple) et on évalue leur performance en rappel après la
présentation de chaque liste on observe que la performance se détériore progressivement pour chaque nouvelle liste. Ce
phénomène est attribué à l'accroissement de l'interférence proactive (IP) lié aux listes précédentes. Or, quand une nouvelle liste,
composée d'items appartenants à une autre catégorie taxonomique (noms d'animaux par exemple) est présentée, la
performance s'améliore significativement du fait du relâchement de l'interférence proactive.

72
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

déficients dans le rappel de listes de mots, mais qu'ils ont un pattern de performance identique à
celui des Té (différence de niveau) aussi bien dans la construction que dans le relâchement normal
de l'interférence proactive. Le relâchement de l'interférence proactive observé est indépendant
des faibles performances au WCST, de la production du langage, de la mémoire explicite, du
niveau intellectuel global et de la sévérité de la dépression. Les auteurs soulignent que les Pk sont
capables d'encoder les informations sémantiquement (encodage profond) et de profiter de cet
encodage. Leurs résultats indiquent une dissociation entre la capacité de bénéficier des propriétés
sémantiques du stimulus et les processus de changement de programme d'action, de mémoire
explicite et d'expression langagière. Sagar et al. (1991) concluent que la déficience fronto-striatale
n'affecte pas les processus impliqués dans l'IP. Les processus mnésiques concernés par le
traitement automatique et implicite des stimuli sont épargnés dans la mP.
Pillon et al. (1993) utilisent la procédure de Grober et Buschke et constatent que l'encodage est
préservé dans la mP. D'autres arguments en faveur de la préservation des processus d'encodage
proviennent du fait que les Pk profitent de l'indiçage taxinomique dans les tâches de rappel,
montrant qu'ils ont bien encodé l'information lors de la présentation des listes (Cohen et al., 1993).
La présence de construction et de relâchement de l'interférence proactive (IP), et la capacité de
bénéficier de l'indiçage montrent que les Pk encodent normalement les caractéristiques
sémantiques de l'information verbale.

3.2.4.4.2 Le stockage
Le stockage temporaire de l'information est-il déficient dans la mP? Etant capables de profiter,
autant que les Té, de l'indiçage lors du rappel immédiat ou différé de listes supra-span, est un
indice en faveur de la préservation des capacités de stockage. De plus, la présence de l'IP et du
relâchement de l'IP (Sagar et al., 1991) est peu compatible avec cette hypothèse.

3.2.4.4.3 La récupération
C'est sur ce processus que porte la plupart des travaux : l’hypothèse d’un déficit d'encodage et de
stockage étant peu soutenable pour expliquer le déficit des Pk en rappel, celle d'un déficit de
récupération devient plus plausible. L'évaluation des processus de récupération a souvent été
menée en comparant les performances mnésiques des sujets sous ses différentes conditions :
rappel libre, rappel indicé et reconnaissance.

Plusieurs travaux (Flowers et al., 1984 ; Taylor et l., 1986a) rapportent l’existence de dissociations
entre les performances des Pk en rappel et en reconnaissance : leurs performances en rappel libre
sont faibles alors qu’elles sont équivalentes à celles des Té en reconnaissance et en rappel indicé.
Ce pattern ne s'observe pas dans l'autre sens (supériorité du rappel libre sur la reconnaissance).

73
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Cette dissociation est généralement interprétée en termes de déficit de récupération. Ce pattern


mime les résultats obtenus chez les patients frontaux (Della Rochette, 1986 ; Janowsky et al., 1989).
La reconnaissance est la procédure la plus "passive" de la mémoire déclarative : "tout ce
qu'elle demande est une simple décision entre des alternatives fixées" (Flowers et al., 1984). Les
Pk ont une reconnaissance normale aussi bien pour du matériel verbal que non verbal (Lees et
Smith, 1983 ; Boller et al., 1984 ; Flowers et al., 1984 ; Weingartner et al., 1984 ; Taylor et al., 1986 ;
El-Awar et al., 1987). La reconnaissance devient déficiente quand la tâche exige un balayage
mental, une manipulation du matériel ou une organisation active de la réponse.
À l'opposé, le rappel exige un effort soutenu (Weingartner et al., 1984). Le rappel d'histoires
ou de paires associées de mots sont généralement déficients dans la mP (Bowen et al., 1976 ; El-
Awar et al., 1987). Le déficit est plus sévère quand le matériel à apprendre n'est pas organisé
sémantiquement (Tweedy et al., 1982 ; Weingartner et al., 1984), lors du test d'apprentissage
auditivo-verbal de Rey (Taylor et al., 1986, 1987 ; Caltagirone et al., 1989) ou au test du Selective
Reminding de Buschke (Della Sala et al., 1986 ; Mayeux et al., 1987). De même, le rappel visuel
des Pk est plus pauvre que celui des normaux (Boller et al., 1984 ; Sullivan et al., 1989).
Ainsi, la capacité d'enregistrer un matériel verbal ou visuo-spatial est préservée chez le Pk
comme ceci est révélé à travers leur réussite en reconnaissance. En revanche, le déficit en rappel
suggère que le processus de récupération ou l'utilisation fonctionnelle des stocks mnésiques soit
déficient (Ruberg et Agid, 1988). Notons que le déficit en rappel est présent même dans la forme
juvénile de la mP (Hietanen et Teräväinen, 1988) et n'est pas plus importants dans la forme
retardée de la maladie (Dubois et al., 1990). Ce déficit ne peut être interprété comme un effet non
spécifique de l'avancement dans l'âge car on l'observe aussi chez les malades débutants non traités
(Hietanen et Teräväinen, 1986). Aussi, il ne peut être dû à un effet non spécifique du traitement.
Bien que l'hypothèse d'un déficit de récupération chez les Pk soit défendue par la plupart des
travaux, elle ne nous renseigne pas sur les questions qui nous intéressent à savoir quel sont les
mécanismes qui sous-tendent ce déficit? et quels sont les relations qu'ils entretien avec les
fonctions exécutives? Plusieurs hypothèses explicatives sont présentes :

 Hypothèse de la sensibilité accrue à l'interférence. Cette hypothèse a été avancée au départ


par Warrington et Weiskrantz (1973, cités par Van der Linden, 1989) pour rendre compte des
déficits mnésiques de l'amnésie. Ce déficit serait dû à une sensibilité accrue à l'interférence.
Les informations non pertinentes ou apprises précédemment entrent en compétition avec les
informations à apprendre et affectent négativement la récupération.
Helkala et al. (1989) notent que les Pk commettent plus d'erreurs intra-listes alors que les
Alzheimers commettent plus d'erreurs extra-listes. Ceci suggère que les Pk sont sensibles à

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_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

l'interférence proactive alors que les Alzheimers ont des difficultés dans l'inhibition des réponses
non pertinentes (sensibilité plus générale à l'interférence). Cette hypothèse n'est pas confirmée
par les travaux de Pillon et al. (1993) et Cohen et al. (1993) qui ne relèvent pas de différence
entre les Pk et les Té dans l'indice d'interférence. L'hypothèse de la sensibilité à l'interférence a
été aussi testée par Breen (1993) dans une tâche de reconnaissance. Elle constate que les Pk ne
font pas plus de fausses alertes que les Té et ne sont pas gênés par la présence des synonymes
des mots cibles. Ceci ne permet pas selon Breen de conclure que les Pk ne présentent pas de
sensibilité accrue à l'interférence puisque la tâche qu'elle a utilisée n'est pas très sensible.
Toutefois, cette hypothèse d'une sensibilité à l'interférence n'est pas à réfuter surtout que les
Pk montrent des difficultés d'inhibition dans des tâches d'attention sélective (Sharpe, 1992).
Cette hypothèse montre l'interaction entre certaines étapes de la récupération et l'efficience des
fonctions exécutives puisqu'on a tendance à considérer la résistance à l'interférence comme
relevant des fonctions frontales.

 Hypothèse d’un déficit de stratégie interne de récupération. Brown et Marsden (1988) estiment
que les Pk ont des difficultés pour générer des stratégies et des indices internes lors de la
réalisation des tâches. Leurs performances sont cependant normales lorsqu'on leur fournit
des indices externes. Cette hypothèse concorde avec les résultats de Taylor et al. (1986a) qui
remarquent que les Pk n'échouent que dans les tâches impliquant une génération spontanée
de plans spécifiques. Concernant les tâches mnésiques, Taylor et al. (1986a) avancent que la
présence ou l'absence de déficit mnésique dépend de l'importance du plan d'action dans la
réussite. Les patients réussissent à une large gamme de tâches mnésiques où le matériel est
organisé au niveau de l'input ou présenté sous un format de reconnaissance. Ceci concorde
avec les conclusions de Weingartner et al. (1984) et Brown et Marsden (1988) dans le sens où
les tâches internes (actives, effortful) se distinguent des tâches externes (passives,
automatiques). Cette hypothèse est plutôt descriptive, elle renseigne sur le type de tâche où
les Pk échouent mais ne nous dit rien sur les mécanismes sous tendant les déficits.

 Hypothèse d'un déficit d'utilisation du contexte. Contrairement à la mémoire sémantique qui


est a-temporelle et a-spatiale, la mémoire épisodique est particulièrement associée au contexte
(temporo-spatial, émotionnel et cognitif) qui donne à l'information un caractère singulier et
unique (Tulving, 1983). Le déficit en mémoire contextuelle a été largement décrit chez les
frontaux. Petrides et Milner (1982) rapportent que les lésions frontales perturbent les
jugements temporels sans influer la reconnaissance du contenu du matériel en question.
L'efficience de la mémoire contextuelle implique entre autre, la capacité de dater un événement
dans le temps et par rapport à d'autres événements. Cette capacité implique généralement un

75
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

jugement temporel et un classement des événements selon leur ordre d'apparition. Sagar et al.
(1988) remarquent chez les Pk un déficit dans la capacité de dater les événements passés et
dans la discrimination de récence. Cependant, leur déficit de discrimination est disproportionné
par rapport à leur reconnaissance intacte du contenu des événements. Ces résultats sont
confirmés par Vriezen et Moscovitch (1990). Ils comparent les performances de Pk et de Té à
des tâches de mémoire de l'ordre temporel comprenant la reconstitution de l'ordre de
présentation de séries de dessins, de mots et de figures. La reconnaissance des mêmes stimuli a
été aussi examinée. Les résultats montrent que les Pk ont un déficit de mémorisation des
relations temporelles entre les stimuli alors que la reconnaissance est intacte. L'absence de
corrélation entre ces deux processus indique que pour l'ordre temporel, le trouble mnésique
n'est pas dû à une dégradation des informations relatives aux stimuli, mais plutôt à un déficit
dans l'estimation et l'organisation séquentielle d'une série de stimuli. Ces résultats suggèrent
d'après les auteurs que le rappel stratégique implique la mémoire de l'ordre temporel qui
dépend de l'intégrité du système fronto-striatal, lui-même affecté chez les Pk.
S'agissant du contexte spatial, Pillon et al. (1996) notent que les Pk ont un déficit spécifique
dans la localisation spatiale des stimuli présentés visuellement. Les auteurs examinent des Pk
non déments par une forme visuelle du Grober et Buschke et constatent que les Pk présentent
une grande difficulté d'apprentissage visuo-spatial. Cette difficulté n'est pas due à un déficit
visuo-spatial général puisque les performances ne sont pas corrélées aux scores des tests
perceptifs visuo-spatiaux. Elle n'est due, ni à un trouble d'encodage (rappel indicé immédiat
normal), ou à un trouble non spécifique de récupération (rappel indicé et reconnaissance
altérés). De plus ce déficit n'est pas associé à un trouble mnésique global car les sujets réussissent
normalement aux tâches parallèles de mémoire verbale. Les auteurs suggèrent que les Pk ont
un déficit primaire de mémoire des localisations spatiales qui se manifeste aussi bien en rappel
libre qu'en rappel indicé et en reconnaissance. Ce déficit sévère est interprété en termes de
difficulté d'auto-élaboration de stratégies dans les étapes d'encodage et de récupération, déficit
fortement associé au syndrome dysexécutif observé chez ces Pk dans différentes tâches
(WCST, Stroop, Odd Man Out).
La reconstitution de l'ordre temporel et des localisations spatiales paraissent être compromises
dans la mP. Elles semblent mettre en jeu des processus exécutifs de segmentation planifiée et
d'organisation interne. Brown et Marsden (1990) pensent que les concepts d'ordre temporel et
de discrimination de récence ont été appliqués à des tâches différentes et que des définitions
précises sont nécessaires pour ces classes hétérogènes de comportements.

76
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

 Hypothèse de déplétion des ressources dans les tâches exigeantes. Weingartner et al (1984)
opposent deux types de tâches mnésiques : des tâches exigeantes en efforts cognitifs
"effortful" (rappel de mots et d'images non reliés et apprentissage sériel) et des tâches plus
automatiques n'exigeant pas beaucoup de capacités cognitives (identification d'images
incomplètes ou dégradées, jugement de fréquence d'apparition d'un événement et
identification de la modalité de présentation des stimuli). Weingartner et al (1984) notent que
les Pk ont des performances normales aux tâches de traitement automatique, mais qu'ils sont
déficients dans les tâches effortful. Ils suggèrent que les Pk disposent de moins de ressources
attentionnelles pour réaliser les tâches "effortful" comme la mise en place d'un processus de
récupération active dans les tâches de rappel.
Cependant, cette hypothèse de déplétion des ressources dans les tâches effortful nous
paraît élusive. Brown et Marsden (1990) pensent que la distinction effortful - automatique
n'apporte rien de nouveau par rapport à la distinction interne - externe. De plus, c’est une
interprétation circulaire car elle insinue que tout échec est dû au fait que la tâche est effortful.

En revoyant les différents travaux sur la mémoire épisodique chez les Pk, nous avons noté que
les processus d'encodage et de stockage sont relativement préservés alors que le processus de
récupération est déficient dans la condition de rappel. L'activité de récupération paraît avoir plus
d'éléments communs avec le contrôle attentionnel qu'avec les mécanismes mnésiques purs
(Spinnler, 1991). L'examen des hypothèses explicatives de la dissociation observée chez les Pk
entre rappel et reconnaissance, nous invite à rappeler la difficulté inhérente aux plans expérimentaux
de ce type de comparaison. En effet, la comparaison des performances de patients et de Té à des
tâches de rappel et de reconnaissance exige beaucoup de précautions méthodologiques (Van der
Linden, 1994). Il faut tout d'abord être attentif à l'effet plafond et à l'effet plancher fréquemment
observés. De plus, on ne peut inférer l'existence de dissociation entre rappel et reconnaissance que
si les tâches sont de sensibilité égale. Par ailleurs, un dysfonctionnement striato-frontal sous-
tendant ces troubles est invariablement signalé. Bondi et al. (1993) font remarquer que les
troubles de mémoire s'estompent chez les Pk si on co-varie statistiquement les performances
mnésiques avec les performances à des tâches sensibles aux dysfonctionnements frontaux. Ceci
montre que le dysfonctionnement frontal est responsable d'une grande partie des difficultés
mnésiques observées chez les Pk. Cette question sera discutée plus loin.

77
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

3.2.4.5 La mémoire de travail


Les concepts de mémoire de travail, mémoire primaire et MCT réfèrent au même système
mnésique (Ashcraft, 1989). Le concept de MT est plus approprié pour rendre compte du système
à capacité limitée responsable du maintien temporaire et de la manipulation de l'information
pendant la réalisation de diverses tâches cognitives. La MT est assimilable à une table de travail
ou à une ardoise mentale, un espace où l'effort mental conscient prend place (on line information)
(Baddeley et Hitch, 1974). L'analyse du fonctionnement de ce système chez les Pk a été faite,
dans plusieurs travaux, de façon disparate. En effet, les données disponibles sur l'empan verbal et
non verbal, de même que sur certaines fonctions exécutives sont issues en majorité de travaux ne
se référant pas à des modèles théoriques. De plus, notre connaissance du fonctionnement de la
MT des Pk est dans la grande majorité des cas inférée plutôt qu'expérimentée (Gabrieli, et al., 1996).
Ainsi, la répétition passive et immédiate de chiffres (Hietanen et Teräväinen, 1988) et le BTT
(Morris et al. 1988 ; Bradley, 1989 ; Sullivan et Sagar, 1989) sont généralement préservés même
chez les patients qui ont une installation tardive de la maladie (Dubois et al., 1990), une réponse
modérée à L-dopa (Taylor et al., 1987) ou une démence (Huber et al., 1989). De plus, les Pk
montrent un effet de récence comparable à celui des sujets normaux (Cohen, 1980). Les
difficultés n'apparaissent qu'avec l'introduction d'interférence.
Les Pk sont déficients dans la procédure de Brown-Peterson qui implique le maintien de
l'information en présence d'interférence, exigeant ainsi plus de ressources de traitement (Tweedy
et al., 1982 ; Cooper et Sagar, 1993). Cooper et Sagar (1993) administrent une procédure modifiée
de Brown-Peterson avec des délais de rappel (0, 3, 6, 9, 15, et 30 sec.), des durées d'exposition des
stimuli (1, 2, 4 et 8 sec.) et des soustractions de 3 comme tâche distractrice. Ils constatent que les
Pk rappellent moins d'items que les Té. Leur performance s'améliore avec l'augmentation de la
durée d'exposition (mais pas de façon linéaire comme les Té) et se détériore en fonction du délai
de rappel. Les Pk tirent des bénéfices modestes du temps additionnel. Ceci prouve, d'après les
auteurs, qu’ils font moins d'opérations d'encodage par unité de temps. L'hypothèse d'une réduction
du taux de traitement de l'information n'est pas rejetée. Les performances des Pk ne sont pas
associées aux difficultés motrices ni au score de dépression ou à la durée de la maladie. Le déficit
de MT chez les Pk paraît, donc d'après Cooper et Sagar (1993), relever de la vitesse de traitement
de l'information et de l'élaboration d'indices pertinents de récupération. Le déficit dans la procédure
de Brown-Peterson est documenté aussi bien sur un matériel verbal que non verbal (Sullivan et
al., 1993). Ce déficit est similaire à celui observé chez les Alzheimers (Huber et al., 1989).

78
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Bradley et al. (1989) testent le système verbal et visuo-spatial de la MT chez les Pk dans
différentes conditions d'interférence. La tâche visuo-spatiale comporte une mémorisation et une
reproduction sur une feuille d'une route qui vient d'être projetée dans un film vidéo, puis d'une
discrimination "droite - gauche" de différents points de cette route. Dans la tâche verbale, les
auteurs demandent aux sujets d'apprendre une phrase courte et de faire ensuite des décisions
lexicales. Trois conditions de TR sont notées : une condition d'interférence visuelle, une condition
d'interférence verbale et une condition sans interférence. Les résultats montrent que pour les
tâches visuo-spatiales les TR sont plus longs chez les Pk que chez les Té. L'interprétation de cette
dissociation n'est pas facile du fait que les deux tâches n'ont pas le même niveau de difficulté : les
tâches visuo-spatiales étant plus difficiles que celles verbales, même pour les Té. Les auteurs en
sont conscients et suggèrent que le déficit n'est pas dû à une réduction dans la capacité du RVS,
mais à une difficulté d'utiliser les informations stockées dans ce sous-système pour réaliser des
tâches visuo-spatiales complexes. En effet, la nature de la tâche n'est pas le facteur principal car
les Pk n'échouent que lorsqu'on leur demande de générer eux mêmes la réponse et non quand on
leur donne une tâche à choix multiples (Ransmayer et al., 1987). D'autres travaux ont montré que
le déficit touche indifféremment les deux modalités (Sagar, et al., 1988; Sullivan et al., 1993).
De même, les Pk paraissent avoir des difficultés manifestes de gestion des ressources
attentionnelles et de contrôle superviseur de l'action. Dans une première étude, Brown et Marsden
(1988) analysent l'échec des parkinsoniens dans des tâches de contrôle interne vs externe en se
référant dans l'interprétation des résultats, a posteriori, au modèle de MT et à celui du SAS. Les
auteurs administrent une version informatisée du Stroop avec trois conditions. Dans la condition
indicée, les stimuli sont des noms de couleurs écrits dans des couleurs non congruentes (rouge
écrit en vert par exemple). La tâche consiste à lire les mots en ignorant la couleur d'impression ou
dénommer la couleur d'impression en ignorant le mot. Le sujet doit changer de tâche "lecture ou
dénomination" après l'apparition du mot "changer" sur l'écran. L'indiçage consiste à fournir des
indices externes "encre" ou "mot" avant l'apparition de chaque stimuli. Dans la condition non
indicée, les stimuli et la tâche sont les mêmes sauf qu'on ne donne pas d'indices externes. Dans la
condition de contrôle, le sujet est invité à lire les mots écrits en blanc sur un fond noir. En
prenant en considération le retard psychomoteur, les Pk paraissent aussi efficients que les Té dans
la condition indicée. Cependant, les Pk sont moins performants que les Té dans la tâche non
indicée. Les auteurs suggèrent que cette difficulté est due à une défaillance de l'AC dans son rôle
de contrôle superviseur de l'action.
Plus tard, Brown et Marsden (1991) ont vérifié cette hypothèse en examinant des Pk et des Té
à travers des tâches doubles. La tâche principale est la condition indicée du Stroop informatisé.

79
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

Les tâches secondaires consistent en une tâche motrice (taper du pied), une tâche de suppression
articulatoire (répéter itérativement le mot "blah") et une tâche de génération de chiffres au hasard.
Les deux premières tâches secondaires sont peu exigeantes en ressources attentionnelles alors que
la dernière est connue, et vérifiée par les auteurs, pour être exigeante en ressources attentionnelles.
Les résultats montrent une augmentation du temps de réaction dans la tâche principale
uniquement lorsqu'elle est accomplie avec la tâche de la génération de chiffres au hasard. Ceci
indique que les Pk ont des difficultés de réalisation d'une tâche double exigeante en ressources
attentionnelles. Les auteurs suggèrent que les Pk ont une "déplétion dans les ressources du
traitement central". Or, les tâches utilisées par Brown et Marsden (1991) posent des problèmes de
méthode car l'union du Stroop et de la génération de chiffres au hasard dans une tâche double est
en mesure d'induire une interférence structurale. Ce qui rend l'interprétation des résultats difficile
surtout que les Té sont avantagés sur les Pk dés le départ comme l'attestent les auteurs eux mêmes.
Owen et al. (1993a) étudient les performances de Pk à des tâches sensibles aux
dysfonctionnements frontaux en utilisant entre autres une tâche de "mémoire de travail spatiale".
Il s'agit d'une tâche de fouille spatiale auto-dirigée. Le sujet voit apparaître sur un écran
d'ordinateur des boites fermées qui s'ouvrent et montrent leur contenu si on les touche. La tâche
consiste à fouiller pour trouver un jeton qui se trouve dans l'une des boites et à le mettre dans
une colonne à l'extrémité de l'écran. À chaque essai, le sujet est invité à chercher ce jeton jusqu'à
le trouver. L'instruction clé est qu'une fois la boite ouverte contient un jeton, elle ne sera plus
utilisée pour cacher d'autres jetons. Le sujet doit donc retenir "on line" l'identité spatiale des
boites qui contiennent les jetons et des boites qu'il vient de toucher. Deux types d'erreurs de
fouille sont notées : le sujet peut revenir à une boite où il a déjà trouvé un jeton (erreur inter-
fouille), le sujet peut retourner à une boite qu'il a déjà ouverte (erreur intra- fouille). Les patients
frontaux sont déficients dans cette tâche (Owen et al., 1990). Les Pk traités sont déficients dans la
phase "Off" de la L-dopa et moins déficients dans la phase "On" (Lange et al., 1992).
Parmi les rares travaux qui ont examiné de près le fonctionnement de la MT chez les Pk dans
le cadre des modèles de Baddeley et Hitch et Norman et Shallice, il y a celui de Gabrieli et al.
(1996). Ces auteurs administrent 5 types d'instruments à un groupe de Pk et un groupe de Té :
1. Deux épreuves de MT issues des travaux de Salthouse et Babcock (1991). Une tâche d'empan
verbal et une d'empan arithmétique qui exigent le maintien en mémoire des derniers mots ou
chiffres, tout en effectuant respectivement une tâche de complètement de phrase et des
opérations arithmétiques ;
2. Deux épreuves de vitesse psychomotrice ;

80
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

3. Trois épreuves de "mémoire stratégique" : une tâche de pointage auto-dirigé issue des travaux de
Petrides et Milner (1982). Il s’agit de 10 pages comportant chacune un certain nombre de mots.
Le sujet doit toucher tous les mots à raison de 1 mot par page en adoptant une stratégie et en
conservant en mémoire les mots touchés. La deuxième est une tâche de reconstitution d'un
matériel verbal (mots écrits sur des cartes) dans l'ordre temporel de sa présentation. La troisième
est une tâche de rappel libre, de rappel des catégories des mots puis de rappel indicé. Les sujets
effectuent une tâche interférente de calcul entre la présentation et le rappel ;
4. Une tâche de "mémoire déclarative non stratégique" de reconnaissance de mots;
5. Deux épreuves de mémoire sémantique : le subtest "Vocabulaire" de la WAIS-R et des
tâches de fluence phonémique et sémantique.
Les résultats montrent que les Pk sont déficients dans les tâches de MT (verbale et
arithmétique) et dans les tâches de "mémoire stratégique". Leurs performances aux épreuves de
"Vocabulaire", de fluence et de "mémoire déclarative non stratégique" sont comparables à celles
des Té. Les auteurs concluent que le déficit mnésique dans la mP n'est pas global. Il épargne la
mémoire sémantique et la "mémoire non stratégique" ; toutes les deux ne dépendent pas, d'après
les auteurs de l'efficience de l'AC. Les Pk montrent pourtant un important déficit de la MT. Ils
ont en effet la moitié de l'empan des Té. Cette performance est, de surcroît corrélée avec le
déficit aux tâches de "mémoire stratégique" et à la vitesse psychomotrice. Les auteurs discutent de
la corrélation entre les performances aux épreuves de MT et de "mémoire non stratégique" en
termes de causalité. Les performances en mémoire stratégiques seraient ainsi, la conséquence de
la réduction de la capacité de la MT. Cette corrélation n'a pas nécessairement cette direction. De
plus, les auteurs considèrent la tâche de fluence comme non stratégique alors qu'elle est décrite
dans la littérature et par Baddeley lui-même (1993), comme nécessitant un contrôle continu de la
production et une mise en jeu d'une stratégie de récupération. Enfin, le groupe expérimental est
restreint (N = 10) et pourtant les auteurs utilisent des statistiques paramétriques (t et Anova).
C'est surtout Fournet et al. (1996) qui ont examiné le fonctionnement de la MT en analysant
ses différentes composantes. Les performances de Pk sont comparées à celles de Té dans des
tâches d'empan simple (mots, pattern visuel, position spatiale) puis dans des tâches doubles qui
interfèrent avec deux conditions de suppression articulatoire : une simple où le sujet doit répéter
itérativement "da" et l'autre exigeante où le sujet doit compter en ajoutant à chaque fois 3 à un
nombre de 1 à 9. Les résultats montrent que les patients ont des performances médiocres aux
tâches d'empan simple. Il existe un effet d'interférence et de charge dans la condition verbale,
visuelle et spatiale mais aucune interaction avec l'effet groupe n'est notée. Ces résultats ne
permettent pas de conclure à un déficit spécifique de l'AC. Le coût en ressources attentionnelles

81
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

est le même pour les Pk et les Té. Ce résultat est très controversé en raison de la faible sensibilité
des épreuves utilisées. Par ailleurs, l'intérêt de l'étude de Fournet et al. (1996) est qu'elle analyse
explicitement dans le cadre du modèle de Baddeley et Hitch les différentes composantes de la MT.
Elle n'examine malheureusement au sein de l'AC que la fonction de division des ressources
attentionnelles, alors que les fonctions exécutives de l'AC ne sont pas approchées.
La première remarque générale est que peu de travaux portant sur la MT chez les Pk discutent
leurs résultats en se référant à un modèle théorique. Les travaux les plus intéressants sont ceux de
Bradley et al. (1989) ; Brown et Marsden (1991) ; Owen et al. (1993a) ; Sullivan et al. (1993) ;
Fournet et al. (1996) et Gabrieli et al. (1996). Cependant, aucun de ces travaux n'a examiné toutes
les composantes de la MT et/ou toutes ses fonctions. De plus, plusieurs travaux portent sur des
petits effectifs (Bradley et al., 1989 : 16 Pk - 12 Té ; Fournet et al., 1996 : 15 Pk - 15 Té ; Gabrieli et al.,
1996 : 10 Pk - 10 Té) sans recourir aux méthodes non paramétriques ni effectuer de transformations
pour respecter les pré-requis des analyses de variance. Les outils utilisés sont parfois peu sensibles
(Fournet et al., 1996), non équilibrés entre les modalités (Bradley et al., 1989) ou ayant une interférence
structurale biaisant les résultats et rendant l'interprétation moins fondée (Brown et Marsden, 1991).
Enfin, les résultats sont parfois controversés, nous discutons de l'origine de ces désaccords plus loin.

3.2.5 Synthèse et conclusion


La recherche sur les troubles cognitifs dans la mP s'est développée de manière importante ces
dernières années. Il s'avère d'après cette revue de la littérature que :

• La vitesse de traitement des opérations cognitives paraît normale si on contrôle la dépression,


la démence et la sévérité des perturbations motrices ;
• Le langage et les fonctions visuo-spatiales ne sont pas authentiquement altérés ;
• Les troubles de mémoire touchent sélectivement certains systèmes et épargnent d'autres ;
• Les troubles des fonctions exécutives sont de règle.

Plusieurs hypothèses explicatives ont émergé. Il s'agit surtout de descriptions des déficits
cognitifs et des conditions dans lesquelles ils ont été observés. Ces hypothèses sont exprimées en
termes de "contrôle interne vs contrôle externe" (Brown et Marsden 1988), de changement (Cools
et al., 1984) ou de maintien de programme d'action (Flowers et Robertson, 1985), de tâches
"effortful" (Weingartner et al., 1994). Toutefois, ces "labels" ne peuvent fournir une explication
dynamique des mécanismes cognitifs sous-tendant les troubles (Brown et Marsden, 1990).
L'étude des déficits cognitifs dans la mP pose également plusieurs problèmes dont ceux de
l'hétérogénéité des caractéristiques démographiques et cliniques des malades, de la variabilité
intra-individuelle, de l'éventuelle coexistence d'un syndrome démentiel et/ou dépressif, de la

82
_________________________________________ Changements cognitifs dans la maladie de Parkinson

lenteur de la vitesse motrice et cognitive, de l'effet des médicaments, etc. Ces problèmes sont
discutés au chapitre suivant mais nous invitent déjà à réfléchir sur la validité externe des résultats
décrits dans la littérature et aussi dans ce travail.
Par ailleurs, si les troubles du langage, des fonctions visuo-spatiales et de la mémoire observés
chez les Pk relèvent d’un dysfonctionnement exécutif, il devient intéressant d'examiner ces
fonctions dans le cadre d'un modèle théorique. Cet examen ne cherche pas à inférer des corrélats
neuroanatomiques (déafférentation sous-cortico-frontale) à partir des performances des sujets.
Conclure à un dysfonctionnement frontal ne suffit pas à expliquer la nature du trouble cognitif.
Nous envisageons plutôt d'analyser les déficits dans un cadre théorique précis qui servira d'outil
mais aussi d'objet d'analyse. Le modèle de MT de Baddeley et Hitch (1974) et son corollaire le
SAS de Norman et Shallice (1986) ont servi de référence pour de nombreux travaux (Brown et
Marsden, 1988, 1991 ; Gabrieli et al., 1996 ; Fournet et al., 1996). Cependant, ces travaux n'ont pas
examiné toutes les composantes du modèle en question et ont abouti à des résultats controversés.
Nous envisageons d'examiner toutes les composantes de la MT dans le but d'apporter un éclairage
sur le locus du déficit. Nous nous proposons aussi de voir dans quelle mesure ce modèle peut
rendre compte des déficits observés dans la mP.

83
4 PROBLEMATIQUE ET METHODE

4.1 Problématique et hypothèses


Nous analysons le fonctionnement de la MT en prenant la mP comme modèle pathologique.
Nous étudions les différentes composantes de la MT, et examinons un autre aspect, développé par
des travaux récents sur la MT (Salthouse, 1994) à savoir, la vitesse de traitement des opérations
cognitives et l'efficience des mécanismes de contrôle attentionnel. Notre objectif est de mettre à
l'épreuve différentes hypothèses concernant les déficits cognitifs dans la mP et de voir dans quelle
mesure le modèle de la MT peut rendre compte des changements cognitifs consécutifs à la maladie.
La question des déficits cognitifs chez les Pk attire de plus en plus l'attention des
neuropsychologues et des neurologues. La nature relativement circonscrite des lésions fait qu'elle
se prête à des études de groupes sans pour autant réfuter le poids de la variabilité individuelle.
L'examen de la littérature montre qu'il existe d'importantes controverses concernant les capacités
cognitives affectées par la mP. L'implication des lobes frontaux dans les dysfonctionnements
rencontrés constitue le seul point sur lequel il y a un consensus (Lees et Smith, 1983 ; Cools et al., 1984 ;
Taylor et al., 1986a ; Brown et Marsden, 1988 ; Grossman et al., 1993 ; Pillon et al., 1993). Or, ce
consensus renseigne peu sur les processus neuropsychologiques sous-jacents aux troubles (Divac et
Öberg, 1992).
Les troubles cognitifs rencontrés chez les Pk ont été "conceptualisés" comme suit :
 Un déficit dans des tâches "mobilisatrices d'effort", en contraste avec des performances
normales dans des épreuves "automatiques" (Weigartner et al., 1984) ;
 Une défaillance dans des épreuves qui exigent le changement (Cools et al., 1984) ou le
maintien d'un programme d'action (Flowers et Robertson, 1985) ;
 Un déficit dans des tâches nécessitant une planification auto-dirigée, avec des performances
normales dans le contrôle externe des stimuli (Taylor et al., 1986a) ;
 Un déficit dans des tâches exigeant une organisation séquentielle, ordonnée temporellement
et une discrimination de récence (Sagar, 1988) ;
 Une détérioration des performances dans des tâches exigeant un contrôle interne de
l'attention, alors que les performances sont normales lorsque des indices externes sont fournis
(Brown et Marsden, 1988).
__________________________________________________________________________ Méthode

Il est évident que ces conceptions ne sont pas mutuellement exclusives. Au contraire, elles
peuvent dans certains cas se compléter et dans d'autres s'organiser hiérarchiquement. Cependant,
ces conceptions ne font d'après Brown et Marsden (1991) que décrire la nature des tâches dans
lesquelles les Pk sont déficients sans pour autant expliquer les processus impliqués. Pour aller au-
delà des descriptions, expliquer les données et pouvoir ainsi faire des prédictions, un cadre
théorique de référence devient indispensable.
Les modèles théoriques de la neuropsychologie cognitive n'ont été que rarement et récemment
adoptés dans l'étude de la mP. Toutefois, ils peuvent être d'un grand intérêt dans la
compréhension du fonctionnement cognitif normal et pathologique. Ils permettent ainsi de
passer d'une analyse des troubles en termes de comportements à une analyse en termes de
processus. Or, les modèles neuropsychologiques ne figurent que de façon disparate dans quelques
travaux sur les troubles cognitifs de la mP (Brown et Marsden, 1988, 1991 ; Grossman et al.,
1993 ; Gabrieli et al., 1996 ; Fournet, Moreaud, Roulin, Naegele et Pellat, 1996).
Il nous semble nécessaire de nous baser sur un cadre théorique, aussi avons-nous opté pour le
modèle de MT de Baddeley et Hitch (1974) et celui du SAS formulé par Norman et Shallice
(1986). Ces deux modèles de traitement de l'information constituent des outils appropriés
d'analyse et d'explication des processus cognitifs sous-tendant les déficits rencontrés dans
diverses pathologies notamment chez les frontaux (Baddeley, 1992). Ces modèles se situent à
l'interface du fonctionnement mnésique et du fonctionnement attentionnel. Ils ont été construits
en vue d'expliquer et d'intégrer les mécanismes neuropsychologiques mis en jeu dans les activités
cognitives complexes. De plus, les déficits cognitifs rencontrés dans la mP miment dans plusieurs
aspects ceux observés dans les dysfonctionnements frontaux, rendant ainsi le recours à ces
modèles plus pertinent. Nous y faisons référence pour pouvoir avancer dans la compréhension
des déficits observés et pouvoir mettre à l'épreuve leur pertinence et leur validité. En effet, les
modèles sont toujours en cours de validation et la pathologie est là pour les tester et les enrichir.
Notre travail est motivé, entre autres, par un souci de méthode qui consiste à prendre en
considération la vitesse de traitement. Celle-ci est une variable associée à l'âge mais négligée dans
la plupart des travaux bien qu'elle soit symptomatique de la pathologie sous-corticale. De longs
délais de réponses dans des tâches de TR peuvent être dus à une lenteur dans la vitesse de
traitement et être interprétés, à tort, comme traduisant un déficit spécifique d'une fonction
donnée (planification, changement de programme d'action, rappel...). En considérant la vitesse de
traitement de l'information dans l'analyse des composantes de la MT, nous nous proposons
d'explorer deux hypothèses principales selon lesquelles le déficit de la MT dans la mP concerne
l'AC et épargne les systèmes esclaves (BPA et RVS) et le dysfonctionnement touchant l'AC n'est

85
__________________________________________________________________________ Méthode

pas global (fractionnement de l'AC), il épargne un de ces processus : gestion des ressources de
traitement, planification, inhibition et flexibilité.
La mise à l'épreuve de ces hypothèses générales nous amène à exprimer des attentes relatives à
chaque composante de la MT afin de voir dans quelle mesure elles sont affectées par la maladie.
S'agissant de la BPA et du RVS, la majorité des études sur la mP s'accordent sur le fait que
l'empan verbal (Lees et Smith, 1983 ; Hiethanen, 1986 ; Bradley et al., 1989 ; Huber et al., 1989)
et l'empan visuo-spatial (Morris et al., 1988 ; Bradley et al., 1989) ne sont pas altérés. Le déficit
n'apparaît que lorsqu'on impose aux Pk une tâche exigeant l'intervention de l'AC comme c'est le
cas par exemple avec le paradigme de Brown-Peterson (Tweedy et al., 1982 ; Huber et al., 1989).
Ceci suggère que les Pk n'ont pas de difficultés de stockage passif de l'information. Toutefois, le
déficit apparaît dés qu'on leur impose des tâches qui empêchent l'auto-répétition (stockage d'une
information et un autre type de traitement). Ainsi, nous pouvons nous attendre à ce que le rappel
sériel immédiat de l'information verbale et visuo-spatiale des Pk ne soit pas déficient par rapport
à celui des témoins.
Nous poussons plus loin l'étude du fonctionnement des composantes de la MT en analysant,
au sein de la BPA, le stock phonologique et les processus de récapitulation articulatoire à travers
la recherche des effets de similarité phonologique et de longueur des mots sur l'empan. Nous
pensons que le système de stock phonologique et la récapitulation articulatoire sont intacts chez
les Pk et nous nous attendons à retrouver un effet de similarité phonologique et de longueur des
mots. Par conséquent, nous prévoyons que le déficit de la MT chez les Pk se situe au niveau de
l'AC et non pas au niveau des sous-systèmes esclaves (BPA et RVS).
Baddeley (1993) affirme que l'AC fonctionne comme un système non-unitaire, amodal et à
capacité limitée. Il précise qu'il est essentiellement un système de contrôle attentionnel de l'action
qui joue deux rôles principaux : un rôle de gestion des ressources attentionnelles et un rôle de
contrôle exécutif de l'action. Nous supposons que chez les Pk, c'est la capacité de gestion des
ressources attentionnelles de l'AC qui est altérée. En effet, nous nous attendons à ce que nos Pk
soient diminués par rapport aux Té dans leur capacité de partager efficacement les ressources
attentionnelles quand ils sont engagés dans l'exécution simultanée de deux tâches exigeantes.
Cette hypothèse est soutenue par les résultats du travail de Brown et Marsden (1991) qui
constatent que les Pk sont déficients dans les tâches doubles et que leur TR est lent dans une
forme simple du Stroop lorsqu'ils effectuent en parallèle une tâche secondaire exigeante en
ressources attentionnelles.
Nous pensons que ce n'est pas seulement la gestion des ressources attentionnelles de l'AC qui
est altérée chez les Pk mais également le contrôle exécutif de l'action, c'est-à-dire la planification,

86
__________________________________________________________________________ Méthode

l'inhibition et la flexibilité cognitive. Les arguments en faveur de cette hypothèse sont multiples.
Ils réfèrent essentiellement au dysfonctionnement d’allure frontale largement documenté chez les
Pk (Cf. § 3). Ainsi, nous nous attendons à ce que les Pk soient moins efficients que les Té dans la
planification des étapes nécessaires à l'accomplissement d'une tâche complexe, dans l'inhibition
des réponses dominantes, et qu'ils soient plus sensibles à l'interférence. Nous supposons
également que les Pk auraient plus de difficultés que les Té dans la manipulation flexible des
réponses.
Par ailleurs, la revue de la littérature nous informe que les troubles de l'alerte et la lenteur dans
la vitesse de traitement, variables d'intérêt dans notre travail, sont plutôt observés chez les Pk
déments et/ou déprimés (Duncombe et al., 1994). Ayant sélectionné des Pk non déments et non
déprimés, nous pouvons nous attendre à ce que les patients ne soient ni moins alertes ni plus
lents que les Té dans le traitement des opérations cognitives.
Afin de mettre à l'épreuve empiriquement nos hypothèses, nous examinons des Pk traités et
non déments dans des tâches qui examinent les différentes composantes de la MT. Cette
approche nous offre l'opportunité d'évaluer la pertinence des modèles de MT et du SAS afin de
voir dans quelle mesure ils peuvent rendre compte des processus sous-jacents aux déficits
observés dans la mP.

4.2 Problèmes de méthode


L'étude des changements cognitifs dans la mP est confrontée à plusieurs types de problèmes de
méthode qui font que la généralisation des interprétations devient hasardeuse et la comparaison
des différentes études complexe. Ces problèmes peuvent avoir trois origines possibles :
l'hétérogénéité des groupes, la variabilité des procédures expérimentales et les différences de
cadres théoriques de référence.

4.2.1 L'hétérogénéité
Les troubles cognitifs associés à la mP ont longtemps été considérés comme homogènes (Dubois
et al., 1991), alors qu'ils sont en fait très hétérogènes. En effet, on est actuellement de plus en plus
conscient de la diversité de sa symptomatologie, sa neuropathologie et son évolution (Zetusky et
al., 1985 ; Jankovic et al., 1990 et Hughes et al., 1993). Par ailleurs, le poids souvent sous-estimé
des caractéristiques démographiques des groupes expérimentaux et de contrôle est à reconsidérer.

87
__________________________________________________________________________ Méthode

4.2.1.1 La variabilité clinique, symptomatologique et neuropathologique


 La variabilité dans l'âge d'installation de la maladie. L'âge d'installation de la maladie est
le facteur le plus déterminant de son évolution et de la réponse au traitement. L'âge du début
de la maladie semble également avoir une influence sur les capacités motrices et cognitives
des Pk. Gouider-Khouja (1991) souligne que plus l'installation de la maladie est tardive, plus
la détérioration motrice est rapide. Lieberman et al. (1979 et Jankovic et al. (1990) aboutissent
aux mêmes conclusions concernant les changements cognitifs. Cependant, l'effet de l'âge
d'installation n'explique pas à lui seul la totalité des dysfonctionnements observés (Dubois et
al., 1991). En effet, des troubles des fonctions exécutives sont notés même chez des Pk
jeunes (Hietanen et Teräväinen, 1988).
 La contribution de la dépression. La prévalence de la dépression est d'environ 50%
(Mayeux et al. 1981). La contribution de la dépression aux déficits observés est un sujet de
controverse. Mayeux et al. (1981) et Starkstein et al. (1989) rapportent une corrélation
positive entre la sévérité de l'altération cognitive et celle de la dépression. Huber et al. (1988)
et Taylor et al. (1986b) ne sont pas de cet avis, ils pensent que la dépression amplifie (sévérité)
les déficits des Pk mais ne modifie pas leur pattern de performance. Cette controverse nous
invite à la prudence. Nous excluons les Pk dépressifs de notre population afin de diminuer les
sources de variation des performances.
 La présence d'une démence. La prévalence de la démence dans la mP varie
considérablement selon les auteurs : elle est de 8% selon Taylor et al. (1985) et de 93%
d'après Pirozzolo et al. (1982). Guillard et al. (cités par Fearnley et Lees, 1991) rattachent
cette divergence aux problèmes de classification, aux différences de méthode d'évaluation de
la démence et à l'hétérogénéité des populations étudiées. La présence d'un syndrome
démentiel fera partie de nos critères d'exclusion.
 La bradyphrénie. Le ralentissement cognitif peut interférer avec l'exécution des tâches
surtout lorsqu'elles sont exigeantes en ressources attentionnelles et/ou nécessitent une
réponse motrice (Morris et al., 1988 ; Pillon et al., 1989). Nous avons vu (Cf. § 3) que la
notion de bradyphrénie réfère plutôt à une impression clinique. Son évaluation par des tâches
de TR n'a pas révélée de lenteur chez les patients non déments et non déprimés (Wilson et
al., 1980). Vu l'importance de la vitesse de traitement dans les opérations intervenant dans
l'évaluation de la MT (Salthouse, 1992, 1993), nous avons jugé indispensable de l'étudier chez
nos patients.
 La sévérité des symptômes. L'ampleur des difficultés motrices et leurs conséquences
primaires et secondaires sur les performances cognitives est aussi un sujet de controverses.

88
__________________________________________________________________________ Méthode

Certains auteurs constatent une corrélation entre difficulté motrice et altération des
performances (Mayeux et Stern, 1983), d'autres n'en rapportent aucune (Brown et al., 1984).
Nous savons que les corrélations n'impliquent pas de causalité mais l'existence de difficultés
motrices importantes peut entraver la réalisation des épreuves cognitives et fausser
l'interprétation des résultats. Ainsi, nous excluons les sujets ayant des difficultés motrices
sévères (score supérieur au stade III de l'échelle de sévérité de Hoehn et Yahr, 1967).
 L'état de la médication et sa contribution aux performances enregistrées. Plusieurs travaux
ont démontré l'effet positif des médications dopaminergiques sur les performances dans des
tâches frontales (Downes et al, 1989 et Owen et al., 1992). Un autre argument en faveur de la
médication sur les performances cognitives est celui des conséquences négatives de la
médication anticholinergique sur la cognition dans la mP (Dubois et al., 1990 ; Cooper et al.,
1992). Toutefois, Dubois et al. (1990) pensent que la médication anticholinergique ne
détériore pas les processus cognitifs en soi mais réduit le niveau de contrôle attentionnel.
Enfin, il est indispensable de rappeler la variabilité des performances cognitives des Pk selon
qu'ils soient sous l'effet de la médication : en phase "on" ou hors de l'effet de la médication :
en phase "off". Malapani et al. (1994) constatent que les Pk en phase "off" et les Pk débutants
non traités ont des performances plus faibles dans des tâches doubles que des Pk en phase
"on". Lange et al., (1992) notent que l'arrêt du traitement par L-dopa entraîne une altération
sélective des performances aux tests frontaux (planification, MT spatiale, flexibilité) sans
affecter les performances aux tests de mémoire visuelle et d'apprentissage. Puisque les
fluctuations de la performance motrice peuvent affecter la réalisation des tâches cognitives,
nous examinons tous les patients lorsqu'ils sont en phase "on" et probablement à un même
niveau d'action potentielle de L-dopa.
 L'hétérogénéité lésionnelle. La mP ne se résume pas à une dégénérescence des voies
dopaminergiques nigro-striatales. D'autres circuits neuronaux sont impliqués directement ou
indirectement dans la genèse de la symptomatologie cognitive des Pk (Dubois et al., 1991). Il
s'agit des lésions touchant le locus coerulus, le noyau du raphe et la substance innominata et
qui sont à l'origine des voies noradrénergiques, sérotoninergiques et cholinergiques. À ces
sources de variabilité lésionnelles, s'ajoute l'éventuelle coexistence de déficits associés tels une
alzheimérisation ou des troubles vasculaires. Hughes et al. (1993) font une étude histologique
de 100 cas de Pk. Ils identifient des changements de type Alzheimer dans 17 cas et des
anomalies striatales principalement vasculaires dans 34 cas alors que les corps de Lewy sont
présents dans tous les cas.

89
__________________________________________________________________________ Méthode

4.2.1.2 La variabilité des caractéristiques démographiques


Un problème épineux dans l'évaluation neuropsychologique réside dans le fait que les épreuves
ne sont pas seulement sensibles aux lésions cérébrales mais aussi à des caractéristiques
démographiques comme l'âge et le niveau de scolarité (Adams, Boak et Crain, 1982). Nous avons
étudié l'effet de l'âge et du niveau de scolarité à travers le Stroop test auprès d'une population
tunisienne (Bouaziz, Bellaj, Bouzaouache et Bouaziz, 1995). Nos résultats suggèrent que
l'avancement en âge a un effet négatif notable sur la flexibilité, alors qu'une faible scolarité influe
aussi bien sur la capacité d'inhiber les interférences que sur la flexibilité.
 L'âge des sujets au moment de l'examen peut être un facteur de variabilité. Bien que
l'hypothèse selon laquelle l'âge joue un rôle primordial dans la pathogénie de la mP n'ait
pas été très défendue, plusieurs travaux notent une perte considérable des neurones de la
substance noire avec l'avancement en âge (Cf. Fearnley et Lees, 1991). De plus, d'autres
travaux (Cf. Dempster, 1992) observent que les lobes frontaux sont les structures les plus
enclines à se détériorer avec l'âge. Ceci fait que l'avancement dans l'âge amplifie les déficits
des patients surtout si les fonctions en question impliquent des compétences des lobes
frontaux. En fait, ce sont les fonctions allouées aux lobes frontaux qui seraient déficientes
chez les Pk (Taylor et al, 1986). Par ailleurs, l'âge du patient au moment de l'examen est un
facteur qui varie d'une étude à l'autre. La moyenne d'âge des Pk examinés varie de 53.9
+10.2 (Van Spaendonck et al., 1995) à 72.9 +6.5 (Dewick et al., 1991). De plus, l'intervalle
des groupes d'âge examinés est relativement large : [35 - 83] dans l'étude de Flowers et al.
(1995) et [47 - 79] dans celle de Fimm et al. (1994). Ces différences sont une source de
variabilité qui influe considérablement sur l'analyse et l'interprétation des résultats.
 Le degré de scolarité est un des facteurs qui détermine le cours du déclin cognitif et
conditionne les performances aux épreuves neuropsychologiques (Finlayson et al., 1977 ;
Adams et al., 1982 ; De Mattos Pimenta Parente et Lecours, 1988 ; Van der Linden, Wyns,
Bruyer, Ansay et Seron, 1993 ; Leibovici, Ritchie, Ledésert et Touchon, 1996). Le niveau
de scolarité des Pk varie d'une étude à l'autre. La moyenne est aux environs de 9.6 +2.89
années de scolarité pour Downes et al. (1993), 17.1 +1.9 pour Randolph et al. (1993) et
varie de 3 à 17 ans dans l’étude de Faglioni et al. (1997). Toutefois, nombreuses sont les
études qui ne fournissent aucune donnée sur le niveau de scolarité des patients (Flowers et
Robertson, 1985 ; Downes et al., 1989 ; Taylor et al., 1990 ; Owen et al., 1993a et b ; Van
Spaendonck et al., 1995 ; Owen et al., 1997). Ces auteurs se contentent de fournir une
estimation du QI, d'autre ne font allusion ni au niveau de scolarité ni même au QI
(Jahanshahi et al., 1993 et Sharpe, 1996). Pourtant, l'influence du degré de scolarité sur les

90
__________________________________________________________________________ Méthode

performances aux épreuves neuropsychologiques n'a pas seulement un intérêt pratique


mais aussi, un intérêt fondamental puisque l'acquisition de la lecture et de l'écriture peut
changer radicalement les stratégies cognitives (Vygotsky, 1962) et modifier l'organisation
cérébrale de certaines fonctions comme le langage (Cameron, Currier et Haerer, 1971 ;
Lecours et al., 1987).
Le contrôle des facteurs âge et niveau de scolarité est indispensable surtout chez les sujets
âgés. L'interaction entre les effets de l'âge et de la scolarité sur les performances aux épreuves
neuropsychologiques est analysée par Van der Linden et al. (1993). Ils constatent que les
performances au Grober et Bushcke ne sont pas influencées par l'âge chez les sujets hautement
scolarisés et que l'effet positif d'une scolarité élevée devient de plus en plus important avec
l'avancement en âge.

4.2.2 La variabilité des procédures expérimentales

La variabilité des épreuves utilisées constitue selon Joosten et al. (1995) une des sources de
discordance entre les résultats des travaux. Ces épreuves peuvent différer selon :

◊ Le niveau de difficulté de la tâche et le niveau d'exigence motrice qu'elle sollicite comme c'est
le cas pour la figure complexe de Rey ou la tâche de poursuite visuo-motrice.

◊ La contrainte temporelle qui risque de pénaliser les sujets lents dans la réalisation de la tâche.

◊ Les versions différentes d'une même tâche : par exemple, différentes versions du Stroop sont
utilisées : Richards et al. (1993) utilisent les trois planches classiques, Meco, Gasparini et
Doricchi (1996) n'en utilisent que deux, Brown et Marsden (1991) optent plutôt pour une
version informatisée. De même, dans l'exploitation des résultats, chaque auteur se fie à des
indices différents. Pour les tâches de fluence aussi, il y a des variations dans le temps consacré
au sujet allant de 60 sec (Auriacombe et al., 1993 ; Downes et al., 1993 ; Randolph et al., 1993 ;
Troyer et al., 1998) à 5 minutes (Flowers et al., 1995). Des variations existent également dans
les critères utilisés (sémantique, phonémique, mixte, idéationnel, figuratif) et les indices relevés
: par exemple, nous n'avons pas de données relatives aux erreurs dans les travaux de Hanes et
al. (1995b) et Troyer et al. (1998).

4.2.3 Les différences des cadres théoriques


Nous notons sous cette rubrique :

91
__________________________________________________________________________ Méthode

◊ Le manque de détails des modèles décrivant le fonctionnement des lobes frontaux et de


ses relations avec le striatum, ainsi que les fonctions associées à ces structures.

◊ Le manque de consensus concernant la définition et l'opérationnalisation des fonctions


de l'AC comme l'inhibition, la planification, la flexibilité et le contrôle. Ces fonctions ne
sont d'après Rabbit (1997) que de simples descriptions des exigences des tâches utilisées.
Elles ont une faible validité constructive car, bien que les exigences des tâches diffèrent
logiquement l'une de l'autre, elles peuvent être sous-tendues par un "même système
hiérarchique de production" (Rabbit, 1997). On ne sait pas avec précision si les
différentes fonctions de l'AC, et implicitement du SAS, impliquent des processus
fonctionnels et des circuits neuronaux distincts. Là se pose donc la question de l'unicité
vs multiplicité de l'AC.

◊ la diversité des sens donnés aux concepts, la multiplicité des hypothèses explicatives et
des interprétations. Par exemple, en étudiant le changement de programme d'action,
certains auteurs postulent que la réduction de la performance est due à un déficit
spécifique de formation de concepts (Bowen et al., 1975), de maintien (Flowers et
Robertson, 1985) ou d'alternance de programmes cognitifs (Cools et al., 1984). D'autres
études expliquent ces mêmes déficits par une altération plus générale touchant le SAS
(Brown et Marsden, 1988, 1991 ; Downes et al., 1989) ou par des difficultés de vitesse
de traitement (Sharpe, 1990).

4.3 Les Sujets


Notre population d'étude se compose de deux groupes de sujets :
 Un groupe expérimental de patients parkinsoniens non déments ;

 Un groupe de sujets normaux de contrôle.

Tous les sujets ont donné leur consentement pour participer à cette étude (Cf. annexe 1a et
1b). L'évaluation des patients s'est faite à l'Institut National de Neurologie (INN). Certains
témoins ont été des examinés à leur domicile et d'autres sur leur lieu de travail (notamment à
l'INN).

4.3.1 Le groupe expérimental


Ce groupe (Pk) est composé de 21 patients (16 hommes et 5 femmes) recrutés parmi les
consultants du service de Neurologie de l'INN. Ils sont tous droitiers. Leur moyenne d’âge est de

92
__________________________________________________________________________ Méthode

61.79 (σ= 5.8). Dix-huit sont peu ou pas scolarisés avec une moyenne de 3.52 (σ= 4.82) années
de scolarité. Le score moyen du groupe expérimental au PM 47 est de 17.86 (σ= 3.64) et leur
score moyen au MMS est de 27.38 (σ= 1.2). Deux patients sont au stade 1 de sévérité de Hoehn
et Yahr, 16 sont au stade 2 et quatre au stade 3. Leur score moyen au questionnaire de l’état
général de santé PDQ-39 (Cf. 4.4.2.1) est de 31.4 (σ= 17.61). La durée moyenne de maladie étant
de 4.52 (σ= 3.39). Quatre patients sont traité uniquement par L-dopa et 17 par L-dopa et des
anticholinergiques.
Les parkinsoniens examinés ont été diagnostiqués par un neurologue spécialisé dans l'étude
des mouvements anormaux8. Ils répondent aux critères d'inclusion et d'exclusion suivants :

Critères d'inclusion
1. Patients présentant une mP idiopathique répondant aux critères diagnostiques suivants :
♦ 2 des 3 signes cardinaux : akinésie, tremblement de repos, rigidité à début unilatéral ;
♦ répondant positivement à la L-dopa
2. Patients au stade I, II ou III de l'échelle de sévérité de Hoehn et Yahr (1967) donc n'ayant
pas d'importantes difficultés motrices.
3. Patients non déments selon les critères diagnostiques du DSM III-R (1987), ayant un score
supérieur à 25 au Mini Mental State -MMS (Folstein et al., 1975) dans sa version arabe
adaptée (Bellaj, 1990) et ne présentant pas de dépression évidente lors de l'examen
clinique.
Du fait que les fluctuations des difficultés motrices (On / Off) peuvent affecter les
performances aux tâches cognitives, tous les patients ont été examinés une heure après la prise
matinale de L-dopa (en présence de l'examinateur) de manière à ce que tous les sujets soient
examinés en phase "On" et probablement à un même niveau d'action potentielle de L-dopa.

Critères d'exclusion
♦ Patients ayant une affection neurologique (atteinte cérébrale infectieuse ou inflammatoire,
traumatisme crânien, accident vasculaire cérébral) autre que la mP ou ayant subi une
intervention neurochirurgicale (thalamotomie par exemple...).
♦ Patients présentant un syndrome parkinsonien secondaire à une autre maladie comme un
dysfonctionnement cérébelleux, pyramidal, une atrophie multisystème...
♦ Patients ayant une affection endocrinienne (diabète, maladie thyroïdienne...), métabolique,
somatique ou psychiatrique ayant nécessité une hospitalisation ou un congé de longue
durée.
♦ Patients ayant des antécédents d'alcoolisme ou de toxicomanie ;

8
Nous remercions le Dr. Neziha Gouider-Khouja qui nous a aidé à sélectionner nos patients parkinsoniens.

93
__________________________________________________________________________ Méthode

♦ Patients sous traitement pouvant affecter le système nerveux central -SNC (médicaments
psychoactifs) autres que des anti-cholinergiques qui font partie du traitement.
♦ Parkinsoniens déments ayant un score de 25 ou moins au MMS (Folstein et al., 1975 ;
version adaptée, Bellaj, 1990) ou souffrant d'un syndrome dépressif.

4.3.2 Le groupe témoin


Le groupe témoin (Té) est apparié au groupe expérimental quant aux caractéristiques
démographiques (âge, sexe et degré de scolarité) et au QI tel que mesuré par les Matrices
Progressives de Raven (PM 47). Il est composé de 21 sujets (17 hommes et 4 femmes) tous
droitiers. Leur moyenne d’âge est de 63.21 (σ= 8.93). Dix-sept sont peu ou pas scolarisés avec
une moyenne de 3.9 (σ= 5.37) années de scolarité. Au PM 47, leur score moyen est de 19.43 (σ=
4.58) et au MMS, ils ont un score moyen de 27.52 (σ= 0.93).
Ces Té ont été sélectionnés à partir de plusieurs sources : conjoints de patients, personnel de
l'hôpital et d'autres institutions, voisins et parents de collègues ou amis. Sont exclus : les sujets
présentant ou ayant présenté une affection neurologique ou psychiatrique pouvant affecter le
SNC et les sujets ayant présenté l'un des critères d'exclusion du groupe expérimental.
Les données démographiques et psychométriques des parkinsoniens ont été analysées par des
épreuves statistiques pour savoir si les variables démographiques distinguent les deux groupes.
Nous n’avons pas noté de différence au niveau de l'âge [U= 203 ; z ajustée = -.44 ; p= .6598], du
niveau de scolarité [U= 216 ; z ajustée = -13 ; p= .8951], du score au MMS [U= 192.5 ; z ajustée
= -.74 ; p= .4577] et des performances aux Matrices Progressives de Raven [U= 184.5 ; z ajustée
= -.91 ; p= .3627]. Les caractéristiques démographiques et cliniques des deux groupes figurent
sur le tableau 4-1.

94
__________________________________________________________________________ Méthode

Tableau 4-1. Caractéristiques démographiques et cliniques des sujets.

Parkinsoniens Témoin
(n= 21) (n= 21)
Âge (années)
Moyenne 61,79 62,73
Écart type (5,80) (7,54)

Scolarité
Non scolarisé ou niveau du primaire (inférieur à 7 ans d'études) 18 17
Niveau secondaire (de 7 à 13 ans d'études) 3 4
Sexe:
Féminin 5 7
Masculin 16 14
Score aux Matrices Progressives de Raven (PM 47) 17,86 19,42
(3,63) (4,58)
Score au Mini Mental State 27,86 27,71
(1,31) (0,71)
Durée de la maladie (années) 4,52 PA
(2,39)
Forme clinique
Trémo-akinéto-rigide 14 PA
Akinéto-rigide 7
Stade de Hoehn et Yahr
Stade 1 2 PA
Stade 2 16
Stade 3 3
Score au questionnaire de l’état général de la santé 31.4 PA
PDQ-39 (17.61)
Médication
L-dopa seule 4 PA
L-dopa + Anticholinergiques 17

Âge Scolarité
Score aux PM 47 Sexe
Score au MMS Moyenne (écart type) Forme Nombre de sujets
Durée Stade
Médication
* P A: pas applicable.

95
__________________________________________________________________________ Méthode

4.4 Les instruments


L'examen de la mémoire de travail peut être abordé par trois méthodes (Van der Linden, 1994) :

♦ Soit directement par une tâche de MT exigeant des opérations de stockage et de traitement.
Dans ce cas, le chercheur apprécie le fonctionnement de la MT de façon globale et directe.
Le Brown-Peterson9, l'empan alphabétique10 ou le N-back-span11 sont souvent utilisés.

♦ Soit de façon plus analytique comme dans la procédure de Danneman et Carpenter (1980)12
qui présentent aux sujets une tâche complexe puis entreprennent des expériences où ils
tentent de "disséquer" la tâche pour inférer l'efficience des processus mis en jeu.

♦ Soit de façon progressive en examinant une à une les différentes composantes de la mémoire
de travail. Cette méthode est la stratégie utilisée par Baddeley et al. (1991) et Van der Linden
Coyette et Seron (1992). C'est également celle que nous adoptons.

Nous analysons la MT et les variables qui influent directement ou indirectement sur son bon
fonctionnement en prenant en compte :
 Des facteurs généraux tels que le niveau intellectuel, le niveau d'alerte, la vitesse de
traitement et le niveau de fonctionnement dans la vie quotidienne.
 Le fonctionnement de la boucle phonologique et du registre visuo-spatial.
 Le fonctionnement de l'administrateur central; c'est à dire la capacité de partager les
ressources attentionnelles et les aspects exécutifs de la mémoire de travail.
Notre choix des épreuves répond aux critères suivants :
• Les tâches doivent être adaptées à notre objectif : l'examen des différents aspects de la MT ;
• Être adaptées aux caractéristiques générales (âge, scolarité, culture) et spécifiques (tenir
compte des tremblements, de la lenteur et de la fatigabilité) de notre population : les tâches
doivent donc être brèves, peu fatigantes, peu dépendantes des acquisitions scolaires (lecture,
écriture), peu chargées culturellement et ayant une faible composante motrice ;

9
Les sujets doivent rappeler trois consonnes après un délai de 0, 5, 10 ou 20 secondes durant lequel on leur demande d'effectuer
une tâche distrayante (exemple, compter à rebours à partir de 237).

10
Une tâche d'empan alphabétique dans laquelle on présente aux sujets des listes de mots non reliés qu'ils doivent rappeler dans
l'ordre alphabétique (Gick et Craik, cité par Van der Linden, 1994).

11
On présente aux sujets une séquence continue de lettres ou de chiffres et on leur demande de rappeler la lettre ou le chiffre qui
est "n" (1, 2, ou 3) places en arrière dans la séquence (Kirchner, 1958; cité par Van der Linden, 1994).

12
Cette procédure consiste à demander aux sujets de juger le plus rapidement possible si une phrase est vraie ou fausse. En plus
de cette tâche de vérification, les sujets doivent retenir le dernier mot de chaque phrase. On leur demande de rappeler, dans
l'ordre de présentation, la série des derniers mots. On manipule expérimentalement, le nombre de phrases, le type de phrase
(positive ou négative) et la nécessité de diviser l'attention entre stockage et manipulation.

96
__________________________________________________________________________ Méthode

• Être conforme à des exigences métriques et expérimentales : les tâches doivent permettre
une variation intra-tâche (within-task variation) des demandes en ressources cognitives. Ceci
est possible par la manipulation quantitative et qualitative de la complexité. L'introduction
d'une variation quantitative de la complexité vise à neutraliser l'effet possible des autres
variables. Elle vise également à minimiser la possibilité d'attribuer des différences de
performance (dues à la complexité et à l'augmentation dans la demande en ressources) à une
composante de traitement qui est ajoutée aux changements qualitatifs de la tâche.

4.4.1 Le problème de l'adaptation des épreuves


Nous voulons d'abord préciser que nous n'adoptons pas une approche psychométrique : nous ne
cherchons pas à comparer les performances de nos sujets à des normes d'étalonnage. Nous nous
situons plutôt dans le cadre de la neuropsychologie cognitive qui essaye de comprendre à quel
niveau de l'architecture cognitive se situent les composantes déficitaires responsables des troubles
des patients (Seron, 1989). Nous avons pris la précaution de réserver le terme "test" pour le sens
psychométrique et d'utiliser les termes "épreuve" et tâche" pour mettre l'accent sur la dimension
expérimentale et analytique des processus cognitifs dans notre approche.
Dans ce contexte, l'adaptation des épreuves neuropsychologiques est problématique aussi bien
sur le plan rationnel que technique. Sur le plan rationnel, si on ne construit pas d'épreuves, on se
trouve contraint d'en adapter en raison du manque que nous connaissons en la matière. La
question de l'adaptation s'impose pour le chercheur tunisien. Toutefois, ce problème se pose
actuellement de façon moins aiguë (sinon pas) pour des chercheurs européens ou américains
pour qui les épreuves sont disponibles et ont été construites par et pour des membres de la
population en question. Néanmoins, si on ne construit pas ses propres épreuves, l'existence de
différences interculturelles rend l'adaptation incontournable. De plus, en neuropsychologie, les
processus cognitifs ne sont pas seulement sensibles aux affections cérébrales mais aussi aux
caractéristiques du sujet tels que l'âge (Winthorpe et Rabbitt, 1988), le degré scolaire (Adrila et
Rosselli, 1989 ; Rosselli et al., 1990 ; Van der Linden et al., 1993), le niveau intellectuel
prémorbide et l'appartenance culturelle (Adams et al., 1982). Un sujet qui n'a jamais manipulé de
cubes peut être désavantagé du fait qu'il n'est pas familiarisé avec le matériel. En fait, un matériel
non verbal n'est pas nécessairement "culture-free" (De Mattos Pimenta Parente et Lecours,
1988). Il n'existe pas d'épreuves "culture-free" comme il n'existe pas d'Homme "culture-free"
(Curran, 1980).
Ce problème a préoccupé les neuropsychologues américains en raison de leur diversité
ethnique. L'importance de la variabilité interindividuelle a amené Reitan (1955) à développer des

97
__________________________________________________________________________ Méthode

tests "culture fair" qui ne défavorisent pas certaines populations. Il a forgé la notion
d'"intelligence biologique" et a essayé de tester l'intelligence indépendamment du contexte
culturel. Or, ces travaux n'ont pas abouti à des résultats substantiels, tout comme les multiples
travaux qui ont essayé d'indexer l'intelligence par l'électroencéphalogramme (pour une revue, Cf.
Andreassi, 1989). La cognition, comme n'importe quel aspect du fonctionnement supérieur n'est
pas a-contextuelle.
L'adaptation des tests neuropsychologiques à la population tunisienne est nécessaire et
possible. Le problème de la langue est important. En effet, la langue est un des médiateurs les
plus importants entre culture et cognition. Elle transmet la culture et diffère sur le plan
syntaxique et lexical d'une culture à une autre. Ce qui intéresse le psychologue c'est l'effet de ces
variations sur la cognition des individus. Les différences entre les langues peuvent refléter des
différences perceptuelles et conceptuelles dans le sens où notre langue porte notre conception de
l'univers. Or, comme le souligne Curran (1980), la langue n'est pas une "camisole conceptuelle"
paralysante. Il faut se comporter rationnellement en puisant ses items de la langue mère, en
respectant son organisation lexicale et son système sémantique. C'est donc le dialecte tunisien qui
est notre interface d'adaptation et non l'arabe classique.
La difficulté de l'adaptation provient surtout du pourcentage d'analphabètes qui est encore
élevé malgré les efforts déployés. Le taux d'analphabètes dans la population générale est de 29%.
Il est de 84,9% pour la population âgée de plus de 60 ans (Institut National de la Statistique
1997)13. Cependant, le contexte socioculturel en Tunisie rend l'adaptation des tests possible sans
préalable d'adaptation de type "culturaliste" (Fontaine, 1959). Notre système social, scolaire,
économique et politique se rapproche en certains points de celui des pays d'Europe. D'ailleurs,
les cultures sont des réseaux complexes et interdépendants d'organisations qui ont évolué dans le
temps et à travers des adaptations réciproques entre l'Homme et son environnement social et
physique (Curran, 1980). Ce sont des systèmes dynamiques et non des structures statiques.
Certes, certaines spécificités existent comme la langue, le bilinguisme, la directionnalité de la
lecture et de l'écriture (De Mattos Pimenta Parente et Lecours, 1988) mais, elles ne constituent
pas un obstacle pour l'adaptation des tests neuropsychologiques. Ainsi, pour la Tunisie, le
problème culturel n'est pas, à notre avis, épineux au point qu'il faille tout refaire. Par contre, celui
de l'existence de sous-cultures est plus difficile. C'est le problème de l'hétérogénéité et des
différences intra-cultures (entre régions, générations, modèles socioculturels etc.) qui est difficile à
surmonter.

13 Selon des données tunisiennes officielles de l'Institut National de la Statistique (1997) relatives au recensement effectué en 1994,
le taux d'analphabètes est 84.9% chez les sujets âgés de plus de 60 ans.

98
__________________________________________________________________________ Méthode

Sur le plan technique, l'adaptation d'outils consomme beaucoup de temps et d'énergie. Le


travail d'adaptation ne se résume pas à une simple traduction des items d'épreuves existantes dans
la langue souhaitée, ni à un ré-étalonnage. L'adaptation se rapproche de la construction.
Schématiquement, la construction d'un test implique le recours à une approche analytique,
empirique ou rationnelle, le développement et la sélection des items et de leur format, l'étude des
qualités métrologiques et l'étalonnage (Golden et al., 1990). En revanche, l'adaptation commence
par la sélection de l'épreuve. Cette opération n'est pas simple, elle se base sur une revue critique
des fondements théoriques, de l'intérêt méthodologique et de la commodité pratique de l'épreuve.
Elle est suivie par la sélection des items en prenant comme point de départ des données brutes
issues de la population mère pour laquelle les épreuves sont destinées. Il faut enfin réexaminer les
qualités métrologiques et l'étalonnage.
Nous pensons qu'il n'est pas indispensable d'étalonner les épreuves puisque nous ne faisons
pas un travail clinique de décision diagnostique ou pronostique. Il s'agit de comparaisons
expérimentales entre les performances de deux groupes appariés. Dans notre réflexion relative
aux procédures expérimentales et aux qualités métrologiques des tâches, nous :
1. Nous sommes basés sur la littérature scientifique et avons confronté les résultats des travaux
ayant utilisé nos épreuves pour nous aider à la décision.
2. Avons procédé à des pré-expérimentations en faisant passer chaque outil présélectionné à des
étudiants volontaires puis à des patients consultants à l'INN. Ce travail préliminaire nous a
permis d'apporter des modifications aux tâches d'empan de mots, aux tâches doubles et à
l'épreuve d'inhibition "le Hayling". La pré-expérimentation nous a également permis
d'éliminer le recours à certaines procédures expérimentales, malgré leur intérêt théorique.
C'est le cas de l'amorçage négatif (Tipper, 1985) qui évalue l'efficience des mécanismes
inhibiteurs dans l'attention sélective14. Cette épreuve a été éliminée car la pré-expérimentation
et toutes les manipulations qui l'ont accompagnée n'ont pas permis de répliquer les résultats
obtenus par Tipper. Des chercheurs du service de neuropsychologie de l'Université de Liège
n'ont pas pu eux aussi répliquer les résultats de Tipper (discussion personnelle). Par ailleurs,
nous avons mis au point l'épreuve de Stroop (Stroop, 1935) en langue arabe. Nous avons
comparé les performances de cette version à celles de la version française (Bellaj, Bouaziz et
Bouaziz, 1994) et l'avons étalonné sur 401 sujets normaux de différentes classes d'âge et de
différents niveaux de scolarité (Bellaj, Bouzaouache et Bouaziz, 1999). Cependant, lors de son

14
Si on présente à un sujet deux stimuli: un distrayant et une cible, on remarque qu'on passe plus de temps si la cible vient d'être
présentée comme distrayante dans l'essai précédent que si elle ne l'était pas. L'interprétation proposée suggère qu'une inhibition
de la représentation du stimulus distrayant a été à l'origine du prolongement du temps de réponse et que l'inhibition participe à
la sélection (Tipper, 1985; 1992).

99
__________________________________________________________________________ Méthode

application auprès des malades, nous avons constaté que seuls quelques sujets ont pu
l'effectuer car elle requiert un niveau minimal de lecture. Nous nous sommes donc vu obligé
de l'éliminer en dépit de la fiabilité de ses indices sur les capacités d'inhibition et la flexibilité
mentale.
Pour le choix des items de l'empan de mots, nous avons construit une base de données
lexicales tunisienne et avons classé les exemplaires de chaque catégorie sémantique sont selon
leur fréquence d'apparition et leur degré de prototypie (Ayadi, Bellaj, Bouaziz et Bouaziz, 1999).
Dans ce travail, notre objectif été de développer une banque de données lexicales en arabe à
l'instar de ce qui est fait en anglais (Battig et Montague, 1969) et en français (Dubois, 1983). Nous
avons retenu 28 catégories sémantiques : animaux, arbres, armes, boissons, couleurs,
édifices/bâtiments, épices et herbes, fleurs, fruits, insectes, instruments de musique, jeux et jouets,
légumes, maladies, métaux, meubles, noms de filles, noms de garçons, oiseaux, outils, parties du corps,
pays, poissons, professions, sports, ustensiles, véhicules, vêtements. Ce travail a été fait avec la
participation de 148 étudiants de la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis, tunisiens
et de langue maternelle arabe. La passation de la tâche est collective : par groupe de 30 sujets. On
demande aux sujets d'écrire sur un cahier où figure en entête un terme catégoriel par feuille, le
plus de mots appartenant à la catégorie indiquée. Quatre-vingt-dix secondes sont réservées à
chaque catégorie. La consigne est présentée en arabe et les réponses doivent être formulées en
arabe (standard ou dialectal). Nous avons pris la précaution de distancer l'ordre de présentation
des catégories reliées sémantiquement. Le dépouillement des données et les analyses statistiques
nous ont permis de mettre au point, pour chaque catégorie sémantique, des listes de mots triés
par ordre de fréquence.
Pour la fluence verbale, nous avons au départ pensé utiliser des critères sémantique et
phonémique. Toutefois, nous avons été contraint d'abandonner le recours au critère phonémique
car l'évocation formelle est fortement influencée par le niveau de scolarité alors que environ 85%
de nos sujets sont analphabètes. Un travail normatif sur les tâches de fluence a été effectué auprès
d'un groupe de 360 sujets tunisiens (Laguibi, 1998). Les résultats montrent que la production
moyenne des sujets âgés de plus de 60 ans est de 6.1 (σ= 4.31) pour la lettre "J" et de 6 (σ= 5.15)
pour la lettre "M". Par contre, cette moyenne est de 18.4 (σ= 6.79) pour la catégorie "Vêtements"
et de 18.4 (σ= 5.42) pour la catégorie "Animaux". Le faible nombre d'énoncés en fluence
phonémique est une donnée classique qu'on retrouve dans tous les travaux sur les normaux et les
patients. Cependant, les performances des sujets âgés tunisiens pour ce critère sont nettement
inférieures à celles rapportées dans la littérature. Ceci ne paraît pas dû à un déficit de production
en fluence verbale en soi puisque tous les sujets ont une production "normale" en fluence

100
__________________________________________________________________________ Méthode

sémantique. Il est plus probable que la faible performance soit due au fait que le critère
phonémique est un critère inhabituel pour le sujet qui a plutôt l'habitude de rechercher les mots
selon des critères catégoriels. De plus, cette épreuve s'apparente beaucoup à une tâche scolaire.
En effet, Ratcliff et al. (1998) obtiennent les mêmes résultats chez des indiens. Ils pensent que
l'échec des sujets âgés non scolarisés en fluence phonémique serait associé à une réduction de la
capacité de segmenter et de manipuler les sons de la parole, en particulier les phonèmes initiaux.
Ceci dépend essentiellement de l'expérience avec le système d'écriture alphabétique et de la
conscience phonologique qu'on acquiert avec la scolarisation.
Quant aux tâches non verbales, nous n'avons pas effectué d'adaptation. Notre travail a
consisté seulement à présenter les consignes en arabe dialectal.

4.4.2 Les épreuves sélectionnées

4.4.2.1 Épreuves d'évaluation des facteurs généraux

4.4.2.1.1 L'intelligence
Là, le recours aux tests psychométriques est indispensable. La liste est longue : WAIS-R,
Progressive Matrice de Raven, D 48 ou D 70, cubes de Kohs etc. Néanmoins les tests longs
(WAIS) ou exigeant un minimum de scolarité (D 48, D 70) ou encore une motricité intacte
(cubes de Kohs) ne répondent pas à nos critères de sélection et sont donc à éliminer. En
revanche, les Matrices Progressives de Raven (PM 38 et PM 47) nous ont paru satisfaisantes.
Notre choix a porté sur le PM 47. Il est plus court et plus adapté aux populations âgées peu ou
pas scolarisées (Spreen et Strauss, 1991).

4.4.2.1.2 L'état mental général


Le Mini-Mental State: MMS (Folstein et al., 1975) est sans doute le test de dépistage de la
démence le plus employé. En clinique, il peut être utilisé seul ou en complément, dans un
protocole expérimental. Son administration est simple et rapide, elle dure entre 5 et 10 minutes.
Le test comprend des questions sur l'orientation temporo-spatiale, une épreuve mnésique, une
épreuve de calcul, de rappel, répétition, habileté visuo-constructives. Le score maximum est de
30, un score inférieur à 24 est considéré comme pathologique pour le dépistage de la démence.
Les performances à ce test seraient corrélées au niveau d'instruction et à l'avancement dans l'âge
chez les patients mais pas à la sévérité de la dépression (Lezak, 1995). Nous utilisons une forme
arabe que nous avons adapté (Bellaj, 1991).

101
__________________________________________________________________________ Méthode

4.4.2.1.3 L’état général de santé


Le PDQ 39 (Peto, Jenkinson, Fitzpatrick et Greenhall, 1995) est un questionnaire de mesure de
l'état général de la santé. Il est composé de huit rubriques : Mobilité (10 questions), activités de la
vie quotidienne (6 questions), bien être émotionnel (6 questions), stigma (4 questions), support
social (3 questions), cognition (4 questions), communication (3 questions) et malaise corporel (3
questions). Pour chaque question, le patient doit répondre si la maladie l’a affecté Chaque
question est notée de 0 à 4. Le score total varie de 0 à 156. Ce questionnaire possède une validité
de construction en relation avec d'autres mesures effectuées auprès de 359 parkinsoniens. De
plus, il a montré une fidélité satisfaisante par la méthode de test-retest.

4.4.2.2 Épreuves d'évaluation de l'alerte et de la vitesse de traitement


Le seul moyen d'explorer l'alerte est de recourir à des tâches informatisées de temps de réaction
simple avec un signal avertisseur de période préparatoire variable. Il s'agit de réagir rapidement en
pressant sur un bouton lors de l'apparition d'une cible sur l'écran.
Concernant la vitesse de traitement, nous avons deux possibilités :
• Inférer la vitesse de traitement à partir de tests connus tels que le subtest code de la WAIS, la
première planche du Stroop, la première carte de la tâche double etc.;
• Construire une tâche et utiliser les temps de réaction (TR) pour indexer la vitesse;

Inférer la vitesse de traitement à partir de tests ne répond pas à nos besoins. La vitesse de
traitement est une mesure qui demande beaucoup de précision et qui peut être facilement biaisée
par le contenu ou les exigences cognitive et motrice de la tâche. Pour ces raisons, nous avons
opté pour la construction d'une tâche informatisée en nous inspirant des tâches utilisées par
Salthouse (1992). L'introduction de l'évaluation informatisée, durant les dernières années, a
facilité l'enregistrement et le calcul des temps de réaction.

4.4.2.3 Épreuves d'évaluation du fonctionnement de la BPA et du RVS


Pour cet aspect de l'étude, les options se limitent aux méthodes proposées par la psychologie
cognitive. Les mesures d'empan sont de règle. Pour les empans de mots nous avons sélectionné
les mots à partir de la base de données tunisienne portant sur la fréquence d'apparition des mots
par catégorie sémantique (Ayadi, Bellaj, Bouaziz et Bouaziz, 1999).

4.4.2.4 Épreuves d'évaluation du fonctionnement de l'administrateur central


Comme le souligne Van der Linden (1994), l'évaluation de l'AC doit faire face à deux problèmes :
le manque de spécificité de ses composantes et la difficulté de trouver des tâches à travers

102
__________________________________________________________________________ Méthode

lesquelles les fonctions de ces composantes peuvent être clairement isolées. La revue de la
littérature des travaux évaluant l'AC nous apprend que différents types d'épreuves peuvent être
utilisées. Il s'agit par exemple, des tâches de génération aléatoire de lettres (Baddeley, 1966), des
tâches doubles (Baddeley et al., 1991), des tâches de mise à jour de la mémoire (Morris et Jones,
1990)15.
Par ailleurs, l'AC est supposé avoir un rôle de division des ressources attentionnelles (Cf. § 2).
Il est également impliqué dans les opérations classiquement attribuées aux lobes frontaux (rôle
exécutif). Pour évaluer la capacité de division des ressources attentionnelles, la construction d'une
tâche est indispensable. Quant à l'évaluation des fonctions exécutives, nous avons à choisir entre
ces trois options :
• Inférer les fonctions frontales à partir des performances dans d'autres tests ; tels les subtests
cubes ou arrangement d'images de la WAIS, le dessin, le récit d'histoires, etc.
• Utiliser des tests neuropsychologiques communément considérés comme sensibles aux
dysfonctionnements frontaux. Les plus connus sont : le Stroop, le WCST, le Trail Making
Test, le Halstead Category Test...
• Construire des tâches expérimentales en adoptant un des paradigmes disponibles : la
procédure de Brown-Peterson, l'apprentissage conditionnel associatif, les tests d'apprentissage
de listes de mots, la Tour de Londres, les tâches de fluence verbale, le Hayling, le Brixton.

La question des tests dits "frontaux" est l'objet de débats. Est-ce que les tests frontaux
détectent seulement et spécifiquement les déficits frontaux? La réponse qui se dégage de plus en
plus de la littérature est que non. Même les tests réputés être frontaux, le WCST par exemple, ne
sont pas sensibles exclusivement aux dysfonctionnements frontaux (Anderson et al., 1991). De
plus, certains tests dits "frontaux" comme le Halstead a été développé il y a environ 50 ans et n'a
pas connu de mise à jour par rapport à la littérature et aux données neuropsychologiques
actuelles.
Nous comptons examiner les fonctions suivantes :
• La division de l'attention ;
• La planification de l'action ;
• L’inhibition des réponses dominantes et des interférences ;
• La flexibilité cognitive.

15
On présente aux sujets des séquences de consonnes de longueur différente, par exemple 4, 6, 8 ou 10 consonnes. Les séquences
sont présentées aléatoirement et les sujets ne connaissent pas à l'avance la longueur d'une séquence donnée. On demande de
rappeler dans l'ordre les n (4, 5 ou 6) dernières consonnes de chaque séquence

103
__________________________________________________________________________ Méthode

Nous avons donc choisi de construire certaines tâches cognitives et d'utiliser certains tests
existants. Nous n'aurons pas recours à des tests qui demandent un effort d'inférence risqué. Ainsi,
nous avons retenu :
 Une tâche double avec trois niveaux. Un niveau de référence simple (barrage de signes). Un
niveau double, peu exigeant en ressources attentionnelles (barrage de signes et répétition
itérative de chiffres de 1 à 7) et un niveau double plus exigeant en ressources attentionnelles
(barrage de signes et empan de chiffres). Notre objectif à travers l'utilisation de cette tâche est
d'analyser la division de l'attention.
 La Tour de Londres, comme épreuve de planification
 L'épreuve de complètement de phrases "Hayling" pour explorer l'inhibition des
réponses dominantes.
 Une tâche de fluence sémantique simple et alternée afin d'examiner la flexibilité
cognitive spontanée et réactive.
Ces tâches seront présentées plus en détail ultérieurement.

4.5 Plan expérimental


Nous analysons le fonctionnement de la mémoire de travail chez les Pk en prenant les modèles
de Baddeley et Hitch (1974) et de Norman et Shallice comme cadre général de référence. Afin
d'identifier la ou les composantes déficientes, nous explorons les différents sous-systèmes de la
MT, à savoir la BPA, le RVS et l'AC.
Un facteur général comme le niveau d'alerte peut affecter les performances des sujets. Par
ailleurs, la vitesse de traitement des opérations cognitives est d'une grande importance dans
l'étude de la MT. La lenteur peut expliquer une large part des déficits observés chez certaines
populations (Salthouse et Babcok, 1991 ; Salthouse, 1994). Les Pk étant généralement âgés et
lents, il devient donc nécessaire de considérer le niveau d'alerte et la vitesse de traitement comme
variables d'intérêt. De plus, il nous parait indispensable de contrôler les facteurs âge et niveau de
scolarité car ils peuvent affecter les opérations cognitives.
Notre étude de la mémoire de travail chez les Pk comporte quatre volets :
 Un premier volet où nous évaluons le niveau d'alerte à travers une tâche de TR simple avec
signal avertisseur et la vitesse de traitement des opérations cognitives par une tâche de jugement
de similarité.
 Un deuxième volet où nous analysons le fonctionnement de la BPA et du RVS par des tâches
d'empan. Nous nous intéressons particulièrement à la BPA, qui est le sous-système le plus connu
et pour lequel nous disposons de plus d'outils d'exploration. Nous recherchons un effet de

104
__________________________________________________________________________ Méthode

longueur et de similarité phonologique sur l'empan de mots qui témoignerait du bon


fonctionnement de cette composante.
 Un troisième volet où nous examinons les fonctions présumées de l'AC à savoir, la gestion des
ressources attentionnelles, la planification, l'inhibition et la flexibilité. De même, nous analysons
les effets du niveau d'alerte et la vitesse de traitement car ils risquent d'affecter ces fonctions.
 Dans un quatrième volet nous abordons la question de la variabilité des performances en
fonction des données cliniques et démographiques (âge, sexe et niveau de scolarité).

Nous présentons ici un plan expérimental général, des plans détaillés seront exposés au début
de chaque expérience.

♦ Facteurs expérimentaux
 Facteur inter-sujets :
- état cérébral (sans lésion connue / avec lésion : Parkinsonisme idiopathique)
 Facteurs intra-sujets :
- facteurs liés à la tâche : différents niveaux de la tâche ou type d'opérations cognitives.
 Variables à contrôler : âge et durée de scolarisation
niveau d'alerte et vitesse de traitement

♦ Variables dépendantes
 Performances (quantité d'information traitée, temps d'exécution, nombre et type
d'erreurs).

4.6 L'examen neuropsychologique : procédure


Tous les sujets sont consentants et ont été examinés individuellement. Les épreuves ont été
administrées dans une seule séance selon la séquence suivante :
 Les Matrices progressives de Raven (PM 47) ;
 Empan de chiffres, de mots et Bloc Tapping Test ;
 Mesure des temps de réaction simple ;
 Mesure de la vitesse de traitement ;
Ensuite, nous laissons le sujet se reposer 5 minutes à la suite desquelles nous enchaînons avec :
 La Tour de Londres ;
 La fluence verbale simple et alternée ;
 Le Hayling.

Nous avons ainsi essayé de prendre les précautions suivantes :


• Alterner entre épreuves verbales et non verbales ;
• Éviter les effets d'interférence inter-tests ;

105
__________________________________________________________________________ Méthode

• Octroyer un repos de 5 minutes ;


• Finir l'examen sur une épreuve agréable avec le Hayling.
Pour les patients, après l'examen des fonctions cognitives, nous passons le questionnaire de la
mP "PDQ 39" qui permet l'évaluation des difficultés physiques, psychologiques et sociales, mais
qui sert aussi à l'écoute des plaintes et des craintes des patients.

Tous les patients et 8 des témoins ont été examinés en milieu hospitalier. Les 13 autres
témoins ont été examinés à leur domicile.
Les sujets ont montré de la curiosité et de l'intérêt pour les tâches. L'humeur dépressive n'est
apparue que chez quelques patients lors de la passation du "PDQ 39". C'était pour nous une
occasion pour discuter avec le malade des ses difficultés.

4.7 Outils de traitement statistique


Plusieurs travaux utilisent des méthodes paramétriques (Anova, Ancova, Manova, le coefficient
de corrélation "r" de Pearson etc.) pour mettre à l'épreuve leurs hypothèses à partir d'effectifs
réduits ou ayant un nombre de sujets non équivalent dans les séries (Rafal et al., 1984 ; Frith et
al., 1986 ; Bloxham et al., 1987 ; Daum et al., 1995 ; Gabrieli et al., 1996 etc.). Cependant, ces
épreuves reposent sur la réunion de trois pré-requis : la normalité des distributions, l'homogénéité
des variances et l’additivité des effets. Sans ces conditions techniques, l'interprétation des résultats
demanderait de grandes précautions puisque les moyennes et les écarts types ne sont plus des
indices fiables de la tendance centrale et de la dispersion des mesures. Dans ce cas de figure, deux
solutions se présentent : normaliser les distributions ou recourir aux statistiques non
paramétriques. Dans notre travail, les effectifs des deux groupes sont équivalents, mais ne sont
pas très larges (21 pour chaque groupe). L'examen de toutes les données par l'épreuve de
Lilliefores qui teste la normalité de la distribution, montre qu'un grand nombre de nos données
n'est pas distribué normalement. Devant cette situation, nous avons été tenté par l'utilisation des
statistiques non paramétriques qui ont l'avantage de n’avancer aucune hypothèse sur la normalité
et l'équivalence des variances des distributions. C'est ainsi que nous comptons recourir à l'épreuve
de U de Mann et Whitney pour comparer deux groupes ou deux niveaux et au coefficient de
corrélation par rang de Spearman pour évaluer le degré et la direction de l'association entre les
variables. Cependant, la plupart de nos analyses statistiques comportent plus que deux niveaux.
L'épreuve appropriée pour la comparaison de groupes indépendants est celle de Kruskall-Wallis.
Or, cette épreuve ne traite qu'un seul facteur et n'offre aucune information sur les interactions
possibles entre les facteurs expérimentaux. Une alternative consiste à faire des comparaisons
multiples par le U de Mann et Whitney entre chaque couple de données. Ceci multiplie le nombre

106
__________________________________________________________________________ Méthode

de comparaisons statistiques sans éviter pour autant le risque de perte d'informations inhérent
aux statistiques non paramétriques. Pour parer à cet inconvénient, nous avons recouru à la
solution alternative : la normalisation des distributions et l'utilisation des scores normalisés dans
des analyses de la variance, des régressions et des covariances. Nous avons recouru à plusieurs
types de transformations (logarithmique, Z, racine carrée, réciproque). Pour chaque variable,
nous utilisons celle qui permet de rejoindre les pré-requis des statistiques paramétriques16.
Nous complétons les analyses de variances par le HSD de Tukey comme épreuve a posteriori
(post hoc) pour tester de la significativité des différences entre les paires de comparaisons sans
pour autant augmenter le risque d'erreurs de type I. En effet, s'agissant des épreuves a posteriori,
le choix est grand. Jaccard et al. (1984) consultent 49 articles, pris au hasard parmi ceux publiés
par "The American Psychological Association" en 1982. Ils notent que 37% utilisent le Newman-
Keuls, 27% utilisent le Fisher, 10% le Duncan, 8% le Scheffé, 8% le Bonferroni et 8% le HSD de
Tukey. Paradoxalement, le Newman-Keuls qui figure au premier rang est l'épreuve la moins
efficiente dans le contrôle des erreurs de type I. En revanche, le HSD de Tukey figure parmi les
épreuves les moins utilisées bien qu'elle soit, avec le Bonferroni, une des plus robustes
comparativement aux autres (Jaccard et al., 1984). Le Tukey a en plus l'avantage d'avoir une
version (Tukey-Kramer) utilisée lorsque la distribution n'est pas normale, les variances ne sont
pas équivalentes et/ou le nombre de sujets par groupe de comparaison diffère.
Le calcul statistique est effectué par le logiciel "Statistical Analysis System" au centre de calcul
"El-Khawarezmi" à la Faculté des Sciences de Tunis.
Le seuil de signification est fixé à .05.

16 Nous avons constaté après toutes les analyses statistiques que les calculs sur les données non transformées donnent les mêmes
résultats que sur les données transformées.

107
5 NIVEAU D'ALERTE ET VITESSE DE TRAITEMENT

La question de la lenteur cognitive chez les Pk est intéressante à explorer et très controversée. Sa
pertinence augmente du fait que le contrôle des facteurs non spécifiques comme le niveau d'alerte
ou la vitesse de traitement peut remarquablement atténuer certains déficits observés dans la MT.
Les travaux de Salthouse (1992, 1993) montrent par exemple que la vitesse de traitement explique
une large portion des variations des performances dans plusieurs mesures cognitives. Fisk et Warr
(1996) montrent que les différences dues à l’âge dans le fonctionnement de l'AC sont
essentiellement attribuables à une lenteur générale dans la vitesse d’activation des informations
dans le système de MT.
Nous examinons la question de lenteur des Pk en termes de niveau d'alerte et de vitesse de
traitement.

5.1 Le niveau d'Alerte


La notion d'alerte renvoie à une capacité attentionnelle de base. L'alerte, phasique ou tonique,
réfère à un état d'éveil général physique et mental, de préparation à répondre (Posner, 1986).

• L’alerte tonique correspond à un état d'activation générale de l'organisme et à ses variations


nycthémérales. Les variations du niveau d'alerte tonique sont généralement lentes,
involontaires et secondaires aux tâches qui exigent une attention soutenue.

• L’alerte phasique réfère à un changement brusque et transitoire du niveau d'éveil suite à un


signal avertisseur auquel le sujet sait qu'il doit réagir rapidement. Les variations du niveau
d'alerte phasique sont rapides, volontaires et déclenchées immédiatement après l'apparition
d'un signal avertisseur.
Le niveau d'éveil conditionne remarquablement le fonctionnement cognitif. Une baisse du
niveau d'éveil tonique ou phasique est en mesure d'altérer différents aspects du comportement.
L'évaluation du niveau d'éveil est indispensable dans l'étude du fonctionnement cognitif des
sujets âgés et/ou présentant des lésions sous-corticales. L'évaluation de l'attention chez les
parkinsoniens n'est pas facile vu les difficultés motrices qui peuvent entrer en jeu (Van Zomeren
et Brouwer, 1994).
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

L'évaluation de l'alerte tonique se fait généralement par des indices électrophysiologiques tels
que l'EEG ou les potentiels évoqués. L'alerte tonique n'est pas évaluable directement par les
épreuves neuropsychologiques. Elle peut être appréciée par un questionnaire tel que le
"Neurobehavioral Rating Scale" (Levin et al., 1987) ou par l'observation directe du
comportement du sujet pendant toute la journée.
La procédure classique d'évaluation du niveau phasique consiste à utiliser un paradigme de
Temps de Réaction Simple (TRS) avec signal avertisseur. Il s'agit de réagir rapidement (en
pressant sur un bouton) dés l'apparition d'une cible à l'écran. La cible est précédée par un signal
avertisseur qui annonce son arrivée. Un intervalle de temps variable (300, 500, 700 msec..) sépare
le signal avertisseur de l'apparition de la cible (période préparatoire). Les effets de l'intensité du
stimulus, de la modalité sensorielle et des dimensions du stimulus peuvent influer sur les TR
(Teichner et Krebs, 1972) et ne vont pas être manipulés dans notre travail. Ils sont très
dépendants des capacités sensorielles des sujets, capacités très hétérogènes surtout chez les
personnes âgées.
En revanche, pour explorer l'alerte, nous avons préféré manipuler un facteur processuel et
non sensoriel, et ce par la manipulation de la période préparatoire. Pour Holender et Bertelson
(1975) la période préparatoire a deux fonctions :

• Elle permet de réduire (ou augmenter) l'incertitude sur le moment d'apparition du stimulus ;
• Elle permet en conséquence au sujet de mobiliser son attention sur ce moment, de façon à
être préparé à répondre à l'apparition du signal d'exécution de manière optimale.

Le TRS avec signal avertisseur est un paradigme particulier de détection sans incertitude (le
stimulus est unique, ainsi que le type de réponse qui lui correspond) sur la présence ou l'absence
du stimulus, ni sur le choix de la réponse. La cible est toujours présentée, sans essais-pièges et elle
est unique. Le facteur principal manipulé est la période préparatoire. La mesure des TRS précédés
par un signal avertisseur peut être utilisée comme indice de l'état d'alerte du sujet. Le type
d'information fourni par le signal avertisseur est variable. Tout signal apparaissant avant la cible
peut servir d’avertisseur pour le sujet et constituer une amorce pouvant augmenter ou diminuer le
niveau d'alerte et de préparation à la réponse.
Notre objectif est de savoir si les Pk sont moins alertes que les Té et de voir si les TR des deux
groupes suivent le même pattern en fonction des différentes périodes préparatoires. Les données
de la littérature qui n’objectivent pas de véritable lenteur chez les Pk (Cf. § 3.2.1) et les critères de
sélection de notre groupe expérimental (non déments, non déprimés) nous amènent plutôt à
penser que le niveau d'alerte des Pk est comparable à celui des Té. Ainsi nous ne nous attendons

112
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

pas observer de différence entre Pk et Té dans les TR à une tâche de détection de stimuli simple
précédée par un stimulus avertisseur. Nous pensons qu'il n'y aura pas d'effet "groupe" sur les TR
et pas d'interaction entre "groupe" et "période préparatoire".

5.1.1 Matériel
L'épreuve d'alerte est issue du logiciel "Brain Scan 1.3.1" (Coyette, Van der Linden, Seron,
Prairial et Pasquier, 1993) qui comporte quatre épreuves : l'alerte, le TRS sans stimulus avertisseur,
la sélectivité et la vigilance.
Dans l'épreuve d'alerte, le sujet doit réagir le plus rapidement possible à la cible qui apparaît
après un signal avertisseur. La cible est un carré blanc de 3 cm de côté apparaissant au centre d'un
écran noir et précédé par un signal avertisseur (sonore, visuel ou les deux). L'intervalle entre le
signal avertisseur et la cible est variable. Huit intervalles différents de périodes préparatoires sont
prévus : 100, 300, 500, 700, 900, 1100, 1300 et 1500 msec. Ils sont randomisés à chaque essai. Le
signal avertisseur est auditif (bip sonore) de 50 msec de durée et l'écart entre les stimuli est de 4
sec. Le sujet doit réagir à l'apparition du stimulus cible en appuyant sur un bouton réponse
(souris). Le stimulus disparaît immédiatement après la réponse. En cas de non-réponse, il reste
affiché durant 5 secondes. La version de l'épreuve utilisée comporte 98 essais. L'épreuve d'alerte
est administrée sur un ordinateur Macintosh portable PowerBook 140, équipé du système 7 et
ayant un écran monochrome.

5.1.2 Procédure
Après avoir présenté le matériel, l'expérimentateur lit la consigne qui apparaît à l'écran à haute
voix, en arabe dialectal, à la suite de quoi nous proposons une ou plusieurs séries d'essais et de
familiarisation avec le matériel et la procédure. Nous ne commençons l'évaluation qu'une fois
assuré que le sujet s'est familiarisé avec le matériel et a compris la consigne suivante :

"Vous allez voir apparaître au centre de l'écran, un carré auquel vous devez réagir le plus
vite possible en appuyant sur ce bouton-réponse. Ce carré est précédé d'un bip sonore qui vous
avertit de son arrivée. L'intervalle est variable, il peut être court ou long, mais il faut toujours
attendre l'apparition du carré avant d'appuyer. Dès que vous aurez appuyé, le carré
disparaîtra et après un certain délai, la procédure se renouvellera. Nous allons faire quelques
essais : dés que vous êtes prêt, appuyez sur le bouton-réponse."
Toute pression sur le bouton-réponse est enregistrée. Une réponse correcte est comptabilisée
au-delà de 100 msec après l'apparition du stimulus. Les essais sont divisés en deux blocs de 45
essais chacun, entre les deux, le sujet marque une pause de quelques minutes. Chaque bloc dure

113
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

au maximum 3 min. Les sujets répondent uniquement avec la main dominante (droite). L’examen
est individuel.

5.1.3 Indices relevés


Deux types d'indices sont calculés pour chaque sujet :

 La médiane des TR pour chacun des 8 niveaux de périodes préparatoires (100, 300, 500, 700,
900, 1100, 1300 et 1500) ;
 Le nombre d'erreurs selon les quatre types suivants :
• Anticipation : pression sur le bouton-réponse survenant moins de 100 msec après
l'apparition de la cible ;
• Pression impulsive : pression continue depuis la réponse à la cible jusqu'à l'apparition de
la séquence suivante ;
• Pression au signal avertisseur : pression survenant 100 msec après l'apparition du signal
avertisseur et l'arrivée de la cible ;
• Non-réponse : absence de réponse ou pression au-delà de 5000 msec.

5.1.4 Résultats
Les TR moyens des Pk sont inférieurs à ceux des Té. Cependant, l'analyse de variance effectuée
sur les TR transformés en log ne révèle pas d'effet "groupe" significatif [F(1, 40)= 2.11 ; p=
.1537]. Elle montre en revanche (comme prévu) un effet "période préparatoire" [F(7, 280)=
27.34 ; p< .0001]. L'interaction n’est pas significative [F(7, 280)= .38 ; p= .9112].

600

Parkinsoniens
550
Témoins

500
TRs

450

400

350
100 300 500 700 900 1100 1300 1500

Période préparatoire

Figure 5-1. Temps de réaction des Pk et des Té aux différents intervalles de période préparatoire.

Le fait que les TR diminuent avec l'allongement de la période préparatoire suggère que les
sujets bénéficient du signal avertisseur à intervalle long.

114
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

S'agissant des erreurs, le tableau 1 montre que les deux groupes en font très peu. Des analyses
inférentielles ne peuvent être appliquées du fait du faible nombre d'erreurs.

Tableau 5-1. Nombre moyen (écart type) de chaque type d'erreur.


Anticipation Pression impulsive Pression au signal avertisseur Non-réponse
Parkinsoniens 0.38 1.62 2.19 0
(.66) (3.7) (1.96)
Témoins 0.19 0.29 1.19 0
(.40) (.46) (1.32)

Tous les sujets ont répondu avant 5000 msec. Les Pk font en général plus d'erreurs que les Té.
Il s'agit surtout d'une tendance à répondre de façon impulsive.

5.1.5 Discussion
Il est clair que pour chaque période préparatoire, les Pk répondent en moyenne plus lentement
que les Té. Cependant, les différences ne sont pas significatives. Les courbes des TR des deux
groupes sont quasi-parallèles, d'allure curviligne et l'interaction "groupe" X "période" est non
significative.
Les périodes préparatoires dépassant 700 msec paraissent les plus avantageuses pour les deux
groupes. Ce pattern de réponse ressemble à celui des Pk examinés par Bloxham et al. (1987), chez
qui les TR deviennent rapides à partir de 800 msec de période préparatoire. Chez les sujets
jeunes, les périodes préparatoires de 200 msec sont celles qui permettent de donner les réponses
optimales. Il paraît que l'avancement en âge occasionne ce décalage.
Notre évaluation de la vitesse implique une réponse motrice unique et réduite à l'apparition
d'un stimulus singulier précédé par un signal avertisseur à intervalle variable. Cette évaluation
montre que les Pk ne présentent pas de troubles de l'alerte phasique. Ceci concorde avec d’autres
travaux (Talland, 1963 ; Bloxham, 1987). La divergence entre nos résultats et ceux d'autres études
peut être reliée à deux facteurs :

• La nature spécifique des tâches utilisées diffère d'une étude à l'autre. Par exemple, la tâche de
TR simple de Nakamura et Taniguchi (1980, cités par Jahanshahi et al., 1993) implique une
flexion ou une supination bimanuelle de l'avant bras à un signal auditif alors que la nôtre n'a
pas de composante motrice importante. Elle n'implique qu'une pression d'un doigt sur un
bouton.

• Le type de population cible. Nos patients ne sont pas déments, n'ont pas de dépression
manifeste et ne présentent pas de difficulté motrice sévère. Or, nous n'avons pas

115
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

d'informations sur la durée de la maladie, sa sévérité et la présence éventuelle de dépression


chez les Pk examinés par Wilson et al. (1980) ou Zimmerman et al. (1992).

Nous n'obtenons pas de différence nette entre les TRS des Pk et des Té. Nous ne pouvons
pas dire que nos patients ont un bas niveau d'alerte général, ce qui va dans le sens de notre
attente.

5.2 La vitesse de traitement des opérations cognitives


La vitesse de traitement est une variable qui conditionne l'efficience du traitement de
l'information sans avoir pour autant de produit final (Lezak, 1995). La lenteur de la pensée a été
considérée comme la principale caractéristique des maladies dégénératives du système nerveux
central impliquant les ganglions de la base comme dans la mP (Mayeux et Stern, 1983 ; Bloxham
et al., 1987 ; Jahanshahi et al., 1992 ; Howard et al., 1994), la maladie de Huntington (Jahanshahi
et al., 1993), la paralysie progressive supranucléaire (Albert et al., 1974). Ce phénomène est l'un
des aspects de l'attention les plus controversés. En effet l'existence d’une lenteur cognitive doit
être prouvée, or il est difficile de distinguer entre la composante purement cognitive et la lenteur
générale (motrice).
La vitesse de traitement peut être évaluée par une variété de tâches mais il faut veiller à ce que
la composante motrice de la tâche soit minimale. En effet, l'un des problèmes dans l’utilisation
des épreuves chronométrées chez les Pk est que ces patients ont, dans la quasi-totalité des cas, une
bradykinésie qui affecte la validité des mesures de la vitesse de traitement (Becker et al., 1995). D'où
la nécessité de contrôler cette variable. La méthode la plus appropriée est celle des Temps de
Réaction de Choix (TRC). Plusieurs critères doivent être considérés lors de la sélection de la
tâche. Pour Salthouse (1992) la mesure de la vitesse de traitement ne doit être ni trop simple ni
trop complexe :
• Elle ne doit pas être trop simple car ceci risque de surestimer les aspects sensoriels et moteurs
par rapport aux aspects supposés refléter la vitesse d'exécution des opérations mentales. Ainsi,
les tâches de TRS et celles requérant des discriminations sensorielles ou des réponses motrices
ne sont probablement pas des mesures appropriées à l’évaluation de la vitesse de traitement ;
• Elle ne doit pas être très complexe car la mesure sera alors influencée substantiellement par le
type d'opération sous traitement ou par le contenu de ce qui est en cours de traitement. Dans
ce cas, il est possible que les mesures représentent plus l'habilité cognitive en cours ou les
connaissances que la vitesse par laquelle ces opérations sont effectuées.

116
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

Parmi les mesures pouvant satisfaire ces critères, figurent les tâches de vitesse perceptive.
Salthouse (1992, 1993) a développé et utilisé plusieurs tâches dont celles de comparaison de
patterns impliquant des jugements "similaires-différents" et de comparaison de séries de lettres
non reliées. Notre choix a porté sur la tâche de comparaison de patterns. C'est une tâche de TRC
qui n'est pas très simple puisqu'elle comporte une composante cognitive de jugement perceptif.
Elle n'est pas très difficile du fait qu'elle n'implique pas d'opération cognitive complexe. Elle est
plus une tâche cognitivo-perceptive que cognitivo-motrice du fait que la demande motrice est
négligeable. Les réponses du sujet peuvent être recueillies en inscrivant pour chaque item "S"
pour similaires et "D" pour différents sur la feuille d'examen (Salthouse, 1992). Or, l'évaluation
informatisée offre une mesure plus fine du temps de réponse et de son exactitude : la réponse
consiste seulement à appuyer sur un bouton.
Pour séparer la composante cognitive de celle motrice, il est nécessaire de varier le degré de
difficulté de la tâche cognitive tout en utilisant une tâche ayant une composante motrice minime
et invariable. L'observation de différences dans les TR entre les tâches complexes et les tâches
simples peut nous permettre une meilleure appréciation de la vitesse de traitement.
Au vu des résultats de certains travaux (Duncombe et al. 1994), nous pouvons penser que la
vitesse de traitement cognitif des Pk est relativement préservée. En effet, nous ne nous attendons
pas à observer de différence entre Pk et Té dans les TR lors d'une tâche de jugement perceptif.
De même, nous pensons ne pas obtenir d'interaction entre l'effet "groupe" et l'effet "niveau de
difficulté de la tâche". Cette absence d'interaction serait un bon argument en faveur de la
normalité de la vitesse de traitement des Pk. Si notre hypothèse est vérifiée, l'ampleur de la
différence absolue entre les TR des Pk et des Té ne devrait pas augmenter en fonction de la
complexité de la tâche.

5.2.1 Matériel
Nous avons mis au point une épreuve de vitesse de traitement à l'aide du logiciel "SuperLab"
version 1.5.7 (1992). L’épreuve est administrée sur un ordinateur Macintosh portable PowerBook
140, à écran monochrome. Dans chaque essai, le sujet voit apparaître au centre de l'écran deux
carrés de 5 cm de côté, séparés d’un espace de 4 cm. Chaque pattern contient une paire de
stimulus représentant des lignes droites qui comportent 2, 4 ou 6 segments correspondant aux
trois niveaux de difficulté présumés (Cf. figure5--2). Il y a 30 essais par niveau. La tâche compte
150 essais, dont 30 essais préliminaires de familiarisation. Dans la moitié des essais, les patterns
sont identiques et dans l'autre moitié, ils sont différents. Les essais "similaires" ou "différents"
apparaissent selon un ordre quasi-aléatoire.

117
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

a b

c
Figure 5-2. Exemples d'items du TCP.
a. Facile : 2 segments "patterns similaires"
b. Moyen : 4 segments " patterns différents"
c. Difficile : 6 segments "patterns similaires."

L'intervalle inter stimulus est de 2000 msec. Dès que le stimulus apparaît, le sujet doit
répondre avec autant de rapidité et d’exactitude que possible en appuyant sur l'un des deux
boutons-réponse. Le stimulus disparaît immédiatement après la réponse ou après 5 sec en cas de
non-réponse. Les boutons-réponse sont de couleur différente l'un rouge et l'autre vert, émergeant
d'une planche en bois qui couvre le clavier de l'ordinateur. La désignation d'un bouton pour les
essais similaires et d'un autre pour les essais différents est contrebalancée d'un sujet à un autre
une fois à droite et une fois à gauche.

5.2.2 Procédure
Le sujet est placé en face de l’ordinateur, 40 cm environ séparent les yeux du sujet de l'écran.
Après avoir présenté le matériel, l'expérimentateur lit, à voix haute, en arabe dialectal la consigne
qui apparaît sur l'écran. Ensuite, une ou deux séries d'essais de familiarisation sont proposées.
Chaque série comporte 30 essais. On ne commence l'évaluation qu'une fois assuré que le sujet
s'est familiarisé avec le matériel et a bien assimilé la consigne suivante :
"Vous allez voir apparaître sur l'écran deux carrés contenant chacun un dessin. Les deux
dessins peuvent être similaires ou différents. À chaque fois, vous devez répondre en appuyant
sur l'un des deux boutons suivants (montrer les boutons) le plus vite et le plus efficacement
possible. Appuyez sur ce bouton rouge à droite (à gauche) si les deux dessins sont similaires.
Appuyez sur ce bouton rouge à gauche (à droite) si les deux dessins sont différents. Dès que
vous aurez répondu, les deux carrés disparaîtront. La procédure se renouvellera après un
certain délai. Nous allons faire quelques essais."
La consigne insiste aussi bien sur la vitesse que sur l'exactitude du jugement. Toute pression
sur le bouton-réponse est enregistrée. Une réponse est jugée valable au-delà de 100 msec après
l'apparition du stimulus. Le TR (msec) est la mesure qui correspond à la réponse du sujet située
l'apparition du stimulus et la pression sur le bouton-réponse. Les erreurs sont enregistrées
automatiquement.

118
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

Les essais sont divisés en deux blocs de 60 items chacun, entre lesquels le sujet peut marquer
une pause de quelques minutes. Chaque bloc dure au maximum 5 minutes. Tous les sujets
répondent avec leur main dominante (droite). L'examen est individuel.

5.2.3 Indices relevés


Deux types d'indices sont calculés pour chaque sujet :
 Les médianes des TR dans chacun des 3 niveaux de difficulté ;
 Le nombre d'erreurs par niveau de difficulté.

5.2.4 Résultats
La figure 2 montre les moyennes des médianes des TR bruts des deux groupes. À tous les
niveaux de difficulté, les Pk sont plus lents que les Té mais la différence n'est pas significative.

2300

2100

1900
TRs (ms)

1700

1500 Parkinsoniens
Témoins
1300
2 lignes (Facile) 4 lignes (Moyen) 6 lignes (Difficile)

Niveau de difficulté

Figure 5-3. Temps de réaction des Pk et Té aux différents niveaux de difficulté de la TCP.
Une analyse de variance à mesures répétées "groupe" X "niveau de difficulté" (2 x 3) a été
effectuée sur les données transformées en log. Le seul effet significatif est celui du "niveau de
difficulté" [F(2, 80)= 123.65; p< .0001]. En revanche, l'effet de "groupe" [F(1, 40)= .78; p=
.3802] et l'interaction ne sont pas significatifs [F(2, 80)= 1.24; p= .2944]. Une comparaison par
l'épreuve post hoc HSD de Tukey, entre les TR des Pk et des Té dans chaque niveau de
difficulté, ne montre aucune différence significative entre toutes les paires de comparaison.
S'agissant des erreurs, le tableau 2 montre que le nombre d'erreurs augmente sensiblement
dans les deux groupes en fonction du niveau de difficulté de la tâche. Ceci est un argument en
faveur de la validité de construction des niveaux de difficulté.

119
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

Tableau 5-2. Nombre moyen d'erreurs (écart type) dans chaque niveau de difficulté.

Facile Moyen Difficile

Parkinsoniens 2.14 4.76 7.52


(1.65) (2.64) (2.23)

Témoins 0.62 1.90 5.81


(.74) (1.34) (2.38)

Une analyse de variance a été effectuée sur les scores des erreurs transformés en log. Elle a
révélé un effet "groupe" [F(1, 40)= 10.94; p< .005] et un effet "niveau de difficulté" [F(2, 80)=
91.08; p< .0001]. L'interaction est presque significative [F(2, 80)= 2.66; p= .0784]. L'analyse post
hoc (HSD de Tukey) montre que la différence entre les Pk et les Té dans le nombre d'erreurs est
significative dans les essais faciles (p.= .0269) et moyens (p.= .0001), mais pas dans les essais
difficiles (p.= .1744).

5.2.5 Discussion
Nous ne notons pas de différence significative entre la vitesse de traitement des Pk et des Té. De
plus, les deux pentes de la vitesse ne diffèrent pas de façon statistiquement significative.
Néanmoins, on constate que les pentes se rapprochent avec l'augmentation du niveau de
difficulté. En se plaçant dans une logique linéaire (qui n'est pas nécessairement représentative des
phénomènes cognitifs), il semblerait que les Pk se comportent comme les Té quand la tâche
devient difficile. Ceci est un autre argument en faveur de notre hypothèse de la préservation de la
vitesse de traitement chez les Pk.
Nos résultats concordent avec ceux de Evarts et al. (1981), Bloxham et al. (1984), Rafal et al.
(1984) Sheridan et al. (1987) et Pullman et al. (1988) qui constatent que les TR des Pk dans les
tâches de TRC ne diffèrent pas de ceux des Té. En effet, si on contrôle la composante motrice de
la tâche et qu’on élimine les Pk déments, la vitesse des patients devient comparable à celle des Té.
En effet, comme le signalent Duncombe et al. (1994), la lenteur cognitive n'est généralement
décrite que chez quelques sous-populations de Pk où la dépression et la démence ne sont pas
contrôlées (Mayeux et al., 1981 ; Wilson et al., 1980). Pour Howard et al. (1994), les arguments en
faveur de l'existence d’une bradyphrénie sont plus anecdotiques que scientifiques puisqu'il existe
très peu de données empiriques qui les confirment. Dubois et al. (1988) pensent que le concept
de bradyphrénie s'applique plus aux patients ayant une paralysie progressive supranucléaire
qu'aux Pk.
Le nombre d'erreurs chez les Pk est significativement supérieur à celui des Té. Cependant,
l'interaction entre le nombre d'erreurs et le niveau de difficulté n'arrive pas au seuil de

120
_________________________________________________ Niveau d'alerte et vitesse de traitement

signification. Ceci montre que le nombre n'évolue pas en fonction de la difficulté de la tâche et
que l'augmentation de l'exigence du traitement n'affecte pas significativement la performance.
Duncombe et al. (1994) notent aussi que les Pk font plus d'erreurs que les Té sans que la
différence soit significative. Le faible nombre de sujets (N= 10) pourrait, d'après les auteurs
masquer une tendance à la compensation (trade-off) entre vitesse et précision.
Les niveaux de difficulté de nos tâches ont été déterminés a priori. Les patterns composés à
partir de deux lignes sont supposés être faciles, ceux à 4 lignes moyennement difficiles et ceux à 6
lignes, difficiles. Cette classification est validée par les résultats. En effet, Té et Pk passent plus de
temps et font plus d'erreurs lorsque le niveau de difficulté augmente.
Nous avons examiné dans cette expérience, la vitesse de traitement comme variable
dépendante des conditions expérimentales. Dans les expériences suivantes, cette variable peut
devenir indépendante : nous chercherons si la vitesse de traitement peut aider à interpréter
certains aspects du dysfonctionnement de la MT.

121
6 FONCTIONNEMENT DES SYSTEMES ESCLAVES

Nous abordons le fonctionnement des systèmes esclaves par l'évaluation de la capacité de


stockage temporel de l'information, nous procédons ensuite à un examen plus détaillé de la BPA.

6.1 Les capacités de stockage temporaire simple


Nous analysons la capacité de stockage passif simple de l'information. Pour ce, nous comparons
les performances de Pk à celles de Té par des tâches d'empan verbal et visuo-spatial. L'empan de
chiffres (Digit Span) est une épreuve classique de mesure de l'empan verbal à court terme. Le
Block Tapping Test (BTT) de Corsi (Milner, 1971) est l'épreuve la plus fréquemment utilisée pour
l'évaluation de la mémoire visuo-spatiale à court terme. Bien que nous ne nous situions pas dans
une perspective psychométrique, rappelons que sur le plan normatif l'empan de chiffre est de 7 +
2 et celui du BTT est légèrement inférieur. En effet, plusieurs auteurs constatent qu’au BTT les
sujets normaux ont un empan visuel inférieur à celui de l'empan de chiffres avec une disparité de
un (Sullivan et al., 1989) et de deux et plus (Canavan et al., 1989).
L'objectif de cette expérience est d'évaluer la capacité de rétention des informations verbales et
visuo-spatiales chez des Pk comparés à des Té. Au vu des résultats de différents travaux
(Hietanen et Teräväinen, 1988, pour l’empan de chiffres et Morris et al. 1988 ; Bradley, 1989 pour
le BTT), nous pouvons nous attendre à ce que les Pk aient des performances analogues à celles
des Té en ce qui concerne leur empan de chiffres et leur empan visuo-spatial.

6.1.1 Matériel
6.1.1.1 L'empan de chiffres
La feuille de protocole contient des séries de séquences de chiffres alignés aléatoirement semblables
à ceux de la WAIS-R (Wechsler, 1981). La tâche comporte 7 niveaux comptant chacun des
séquences de 3 à 9 chiffres (Cf. annexe 2).

6.1.1.2 Le Block Tapping Test de Corsi (Milner, 1971)


Le matériel consiste en 9 cubes verts de 3 cm de côté disposés de façon aléatoire sur une planche
en bois blanche (21 x 30 cm) et une feuille de protocole semblable à celle de la tâche d'empan de
chiffres.
____________________________________________________ Fonctionnement des systèmes esclaves

6.1.2 Procédure
 Pour l'empan de chiffres, l'examinateur lit les séquences de chiffres à voix haute au rythme
d'un item par seconde. Le sujet doit répéter immédiatement la série de chiffres dans l'ordre de
présentation. La consigne est :
"Je vais lire une série de chiffres dans un ordre donné. Vous allez bien écouter. Dès que
j’aurais terminé, Vous répéterez les chiffres dans l’ordre où vous les avez entendus."
Les séries de chiffres sont présentées selon un ordre aléatoire préétabli, à raison de 3 essais
consécutifs par niveau de longueur. On commence l'épreuve avec une série de trois chiffres, si le
sujet réussit, l'examinateur lui présente une série plus longue en continuant jusqu'à ce qu'il échoue
deux fois sur trois (critère utilisé par Baddeley et al., 1991 avec des malades d'Alzheimer). On
laisse 20 sec au sujet pour le rappel entre chacun des essais.
 Au BTT, le sujet est en face de l'examinateur qui place devant lui la planche sur laquelle sont
disposés les 9 cubes. L'examinateur pointe de l'index (tapping) un nombre de plus en plus
grand de cubes dans un ordre préétabli à raison d'un cube par seconde. Les séries de cubes à
toucher sont mentionnées par des chiffres inscrits sur une face de chaque cube, de manière à
ce qu'ils ne soient perçus que par l'examinateur. La tâche du sujet consiste à reproduire
immédiatement et exactement ces séquences "spatiales". La consigne est la suivante :
"Je vais désigner en les touchant certains de ces cubes dans un ordre donné. Vous allez bien
regarder quels cubes je touche et dans quel ordre. Dès que j’aurais terminé, Vous désignerez
les mêmes cubes que moi, dans le même ordre."
Le score est celui de la série la plus longue reproduite correctement au moins 2 fois sur 3.

6.1.3 Indices relevés


Deux indices sont utilisés :
• L’empan de chiffres : le nombre le plus élevé de chiffres rappelés dans l'ordre ;
• L’empan visuo-spatial : le nombre le plus élevé de positions spatiales répétées dans l'ordre.

6.1.4 Résultats
L'empan de chiffres est de 5.09 (σ= 0.76) chez les Pk et de 5.14 (σ= 0.79) dans le groupe
contrôle. L'empan de mémoire spatiale à court terme tel que mesuré par le BTT est de 4.76 (σ=
0.89) chez les patients et de 5 (σ= 0.63) chez les Té. La performance moyenne des patients et des
Té est illustrée sur la figure 6-1.

124
____________________________________________________ Fonctionnement des systèmes esclaves

La comparaison statistique de ces performances s’est faite par l'épreuve U de Mann et


Whitney. Cette analyse montre que la performance des patients n'est pas significativement
différente de celle des Té aussi bien pour l'empan de chiffres [U= 218, Z ajustée = -.0628; p=
.9459] que pour l'empan visuo-spatial [U= 184, Z ajustée = -.9769; p= .3286].

5
Parkinsoniens
Empan

4 Témoins

1
Empan de BTT
chiffres

Figure 6-1. Empan verbal et visuo-spatial chez les Pk et les Té.

Ainsi, nous n'avons pas trouvé de déficit de la capacité de stockage temporel simple de
matériel verbal et visuo-spatial chez les Pk.

6.1.5 Discussion
Les résultats de cette expérience tendent à supporter l'hypothèse selon laquelle la capacité isolée
du stockage passif par les systèmes esclaves (BPA et RVS) est intacte dans la maladie de
Parkinson. Des performances normales au BTT ont été observées par Morris et al. (1988) et
Bradley et al. (1989) qui concluent que la capacité de la mémoire spatiale à court terme est intacte
chez les Pk. De même, des performances normales dans l'empan de chiffres (Bradley et al., 1989 ;
Huber et al., 1989) et la présence d'un effet de récence (Cohen, 1993) comparable à celui des
sujets normaux ont été notées chez les Pk. Nos résultats concordent avec les données de la
littérature et nous invitent à explorer plus finement le fonctionnement de ces sous-systèmes étant
donné que la mesure de l'empan renseigne peu sur le fonctionnement de la MT. En effet un
trouble subtil peut ne pas être détecté par la mesure de l'empan simple. Il peut résulter de déficits
se situant à différents niveaux : traitement phonologique, stock phonologique à court terme,
boucle articulatoire, AC (Van der Linden et Wyns, 1991). Ainsi, nous envisageons dans
l’expérience suivante, d'évaluer de plus près le fonctionnement de BPA afin de vérifier si la mP
affecte la capacité d'utiliser le système de stockage phonologique et les mécanismes de
récapitulation articulatoire dont le bon fonctionnement est indispensable à l'enregistrement
temporaire de l'information verbale ou verbalisable.

125
____________________________________________________ Fonctionnement des systèmes esclaves

6.2 Fonctionnalité de la Boucle Phonologique et Articulatoire


L'examen de la MT chez les Pk passe par l'identification et l'investigation des composantes
hypothétiquement altérées. S'agissant des systèmes dits esclaves (BPA et RVS), rappelons que nos
connaissances sur le RVS sont encore très limitées par rapport à celles sur la BPA. De même, on
ne sait pas encore avec précision si le codage dans le RVS est spatial ou visuel. De plus on n'a pas
suffisamment d'épreuves permettant de différencier la manière dont les stimuli sont traités et
maintenus temporairement dans le RVS. Par ailleurs, les travaux de Logie (1986, 1995)
fournissent déjà des données de plus en plus intéressantes sur le fonctionnement du RVS; les
effets équivalents à ceux de la similarité ou de longueur sont en cours d'expérimentation (Fournet
et al., 1996).
La BPA est le système le mieux connu du modèle. Ce système est spécialisé dans le stockage
temporaire de l'information verbale ou verbalisable. Il est postulé composé de deux sous-
systèmes: un stock phonologique et un processus de récapitulation articulatoire. Le stock
phonologique stocke temporairement l'information codée phonologiquement. Le processus de
récapitulation articulatoire utilise l'auto-répétition subvocale pour maintenir et rafraîchir le
contenu du stock phonologique. Ces deux composantes du système de BPA ont été mises en
évidence par différentes manipulations expérimentales. En effet, plusieurs travaux (Cf. § 1)
montrent que les performances en rappel verbal sériel immédiat (empan verbal) sont affectées par
les propriétés du matériel et par la procédure d'évaluation. Il s'agit notamment :
 Du degré de confusion phonémique entre les items à rappeler (effet de similarité) ;
 De la durée de l'articulation des items à rappeler (effet de longueur) ;
 De l'engagement du sujet dans une activité de vocalisation concurrente de parole non
appropriée (effet de suppression articulatoire) ;
 De la présentation simultanée de sons non appropriés à ignorer (effet d'écoute de sons non
appropriés).
L'affaiblissement de l'un de ces effets suggère l'existence d'un dysfonctionnement dans la
BPA. Vallar et Cappa (1987) ont décrit le cas PV qui présente un déficit sévère de la MCT
verbale. La patiente montre un effet de similarité phonologique mais pas d'effet de suppression
articulatoire ou de longueur de mots. L'effet de similarité phonologique et l'effet de longueur de
mots correspondent à des composantes fonctionnellement distinctes de la BPA. En effet, la
présence d'un effet de similarité est un indice de fonctionnement normal du stock phonologique,
alors que la présence d'un effet de longueur témoigne du fonctionnement normal de la
récapitulation articulatoire.

126
____________________________________________________ Fonctionnement des systèmes esclaves

L'objectif de cette expérience est d'examiner la fonctionnalité de la BPA. Cet examen inclut
l'évaluation du stock phonologique et des processus de récapitulation articulatoire. La vérification
de l'existence d'un effet de similitude phonologique serait un indicateur de la normalité du stock
phonologique. L'existence d'un effet de longueur indiquerait un fonctionnement normal de la
récapitulation articulatoire. Nous ne comptons pas procéder à la combinaison de ces effets avec
celui de la suppression articulatoire qui devrait normalement les abolir. La présence des effets de
longueur et de similarité phonologique suffisent pour conclure à la normalité du fonctionnement
de la BPA. Au vu des résultats de la littérature (Cf. § 2), nous nous attendons à ce que la BPA
fonctionne normalement chez les Pk. On s'attend donc à observer un effet de longueur et de
similarité analogue à celui des Té.

6.2.1 Matériel
L'effet de longueur est manipulé en comparant des mots arabes monosyllabiques à des mots
quadrisyllabiques. Les 9 mots longs sont :ÓÝäÇÑíÉ¡ ÒÑÈíÉ¡ ÒÑÇÝÉ¡ ßáÇÊæÓ¡ ÔßáÇØí
äÓÑíä¡ ØÑäÌíÉ¡ ãÇÏÇáíäÉ¡ ãæÑíØÇäíÇ¡. La similitude phonologique est définie comme la
récurrence des lettres "ÇÑ " dans les deux dernières lettres de mots monosyllabiques à trois
lettres. Les 9 mots monosyllabiques similaires phonologiquement sont : ÏÇÑ¡ ßÇÑ¡ ØÇÑ¡ ÝÇÑ¡
äÇÑ¡ ÛÇÑ¡ ÌÇÑ¡ ËÇÑ¡ ÍÇÑ. Les 9 mots monosyllabiques phonologiquement dissemblables de
référence sont :áæÒ¡ ÞÕÑ¡ Ëæã¡ ÝÌá¡ ÊãÑ¡ ÓíÝ¡ ÓÇÞ¡ Ìãá¡ ÐíÈ¡ .
Nous avons tenu à ce que les mots ne soient pas ambigus, ne prêtent à aucune confusion
phonologique et aient une fréquence se situant entre 5 et 20 (Cf. annexe 3)17.

6.2.2 Procédure
Les sujets sont testés individuellement e la présentation des items est auditive. On présente au
sujet des séquences de mots dont le nombre augmente progressivement. Les séries de mots sont
présentées selon un ordre aléatoire préétabli à raison de 3 essais consécutifs par niveau de
longueur. Si le taux de réussite est inférieur à 2/3 essais en rappel ordonné des stimuli, la
procédure est interrompue. Les mots sont lus à un rythme de 1 mot / sec. On laisse au sujet 20
sec pour le rappel entre chacun des essais. Pour chaque série, on commence par des essais de
familiarisation avec le matériel : on lit les mots un à un et le sujet répète chaque mot
immédiatement. On corrige les erreurs éventuelles jusqu'à ce que le mot soit répété correctement.

17 Nous remercions Mr Houcine Hebaili (linguiste) qui a eu l'amabilité de vérifier avec nous cet aspect des mots.

127
____________________________________________________ Fonctionnement des systèmes esclaves

Une fois la consigne comprise, on passe au testing. La consigne pour les séries de mots (mots
phonologiquement similaires, mots longs et mots de référence) est la même :
"Je vais vous lire une série de mots dans un ordre donné. Vous allez bien écouter. Dès que
j’aurais terminé, vous répéterez les mots dans l’ordre où vous les avez entendus."
On note les réponses du sujet s’il commet des erreurs. Sinon, on marque (+). La mesure de
l’empan est la série la plus élevée pour laquelle le sujet a réussi au moins 2/3 séries. Les
conditions sont contrebalancées et l'ordre de passation des séries est randomisé entre les sujets.

6.2.3 Indices relevés


Pour chaque tâche de rappel sériel immédiat, les variables dépendantes sont les empans de mots :
le nombre maximal que le sujet peut rappeler dans l'ordre de présentation.

6.2.4 Résultats
Le tableau 6-1 montre les performances moyennes (écart types) des Pk et Té pour chaque condition.

Tableau 6-1. Moyennes (écart types) des empans de mots pour chaque condition.
Parkinsoniens (n=21) Témoins (n=21)
Mots de référence 4,76 4,76
(courts et dissimilaires) (0,70) (0,54)

Mots longs 4,14 4,19


(0,73) (0,40)

Mots similaires 3,81 3,76


(0,51) (0,54)

6.2.4.1 Effet de longueur


L'analyse de variance mixte "groupe" (Pk, Té) X "longueur des mots" révèle un effet "longueur
de mots" sur le rappel sériel immédiat [F(1, 40)= 58.96 ; p< .0001] mais pas d'effet "groupe" [F(1,
40)= .02 ; p= .8901]. L'interaction entre l'effet des deux variables n’est pas significative [F(1, 40)=
.094; p= .7601] (Cf. figure 6-2).

128
____________________________________________________ Fonctionnement des systèmes esclaves

4,9
4,8 Parkinsoniens
4,7 Témoins

4,6

Empan de mots
4,5
4,4
4,3
4,2
4,1
4,0
Mots courts Mots longs

Figure 6-2. Empan des mots courts et des mots longs chez les Pk et les Té.

Ce résultat va dans la même direction que nos hypothèses. Il montre que le processus de
récapitulation articulatoire est aussi performant chez les Pk que chez les sujets normaux de
contrôle.

6.2.4.2 Effet de similarité phonologique


Afin d'examiner l'effet de similarité phonologique, une ANOVA mixte est effectuée sur l'empan
de mots avec "groupe" X "similarité phonologique des mots" (similaires, dissimilaires). L'analyse
met clairement en évidence un effet similarité [F(1, 40)= 178.83 ; p< .0001] et pas d'effet groupe
[F(1, 40)= .021 ; p= .8841]. L'interaction entre les deux effets n’est pas significative [F(1, 40)=
.106 ; p= .7461] (Cf. figure 6-3).

5,0
Pakinsoniens
4,8
Témoins
4,6
Empan de mots

4,4

4,2

4,0

3,8

3,6
Mots dissimilaires Mots similaires

Figure 6-3. Effet de similarité phonologique chez les Pk et les Té.

Ce résultat montre chez les Pk et les Té un effet de similarité robuste. On ne peut donc pas
mette en évidence un dysfonctionnement dans le système de stockage phonologique chez les Pk.

129
____________________________________________________ Fonctionnement des systèmes esclaves

6.2.5 Discussion
L'effet de longueur reflète le processus de contrôle articulatoire et l'effet de similitude
phonologique résulte de l'utilisation normale du stock phonologique. Le pattern de résultats
relatif au fonctionnement de la BPA chez les Pk montre qu'en présentation auditive et lorsqu'il
s'agit de mots longs ou similaires phonologiquement, l'empan de mots chute significativement.
L'absence d'effet "groupe" et d'interaction indique que le fonctionnement de la BPA est
comparable dans les deux groupes. Ce résultat suggère que les Pk ne montrent pas de déficit dans
le fonctionnement de la boucle. Il confirme notre hypothèse sur la fonctionnalité de la BPA.
La préservation du fonctionnement de la BPA est aussi observée dans les trauma crâniens (Cf.
Van der Linden et al., 1992) ou chez les malades d'Alzheimer qui, bien qu'ils aient un empan
faible, présentent le même pattern de performance face à des mots de différentes longueurs et de
différents niveaux de similarité phonologique (Morris, 1984 ; Morris et Baddeley, 1988) suggérant
que la BPA fonctionne aussi normalement chez ces patients.
L'absence de déficit dans la capacité de stockage des systèmes esclaves et le fonctionnement
normal de la BPA nous invitent à explorer l'hypothèse d'un éventuel déficit de l'AC.

130
7 FONCTIONNALITE DE L'ADMINISTRATEUR CENTRAL

L'examen de la fonctionnalité de la BPA et du RVS (§ 6) suggère que les déficits cognitifs


observés dans la mP sont à rechercher dans l'AC. Ceci a aussi été suggéré par plusieurs auteurs
dont Brown et Marsden (1988), Cooper et Sagar (1993) et Gabrieli et al. (1996). Considérant l'AC
comme modulaire, système avec différentes fonctions indépendantes tout comme le SAS
(Shallice, 1982, 1988 ; Burgess et Shallice, 1994) nous envisageons de l'explorer dans les
prochaines expériences, sous quatre aspects :
 La capacité de division des ressources attentionnelles ;
 L'inhibition des réponses automatiques ;
 La planification des actions ;
 La flexibilité cognitive.

7.1 Division des ressources attentionnelles


L'efficience de la capacité de diviser les ressources attentionnelles est classiquement
opérationnalisée par des tâches doubles (Morris et Baddeley, 1988 ; Baddeley et al., 1991 ; Van
der Linden et al., 1992 ; Fournet et al., 1996). En effet, la procédure de tâche double est aussi
ancienne que la psychologie cognitive (études sur l'interférence et l'attention divisée). Elle émane
de la notion de limitation des ressources attentionnelles défendue dans plusieurs travaux
(Broadbant, 1958 ; Kahneman, 1973 ; Shiffrin et Schneider, 1977 ; Hasher et Zacks, 1979 ; 1988).
En effet, un grand nombre de travaux sur l'attention se sont intéressés aux notions d'automaticité
vs contrôle, postulant qu'il existe un pool unique et limité de ressources attentionnelles. Les
tâches automatiques exigent peu de ressources attentionnelles et interfèrent peu avec l'action en
cours (on peut faire un calcul mental tout en tapant sur la table) alors que les tâches contrôlées
sont exigeantes en ressources et interfèrent avec l'action en cours (il est difficile de faire du calcul
mental et d'écrire simultanément sous la dictée). Dans les tâches doubles, les sujets sont amenés à
réaliser une tâche principale, généralement coûteuse en termes de ressources attentionnelles en y
associant simultanément des tâches secondaires de différents niveaux de charge attentionnelle.
Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour évaluer les performances dans la procédure de
tâche double :
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

 La méthode la plus simple consiste à examiner la performance dans la condition de tâche


double sans prendre en considération la performance dans la tâche simple. Cette méthode n'a
pas été utilisée par une grande partie des travaux puisqu'elle masque la contribution des
tâches simples ; elle est ainsi peu informative sur la performance dans la tâche double.
 La deuxième méthode consiste à ajuster les conditions de la tâche double selon les
performances dans les tâches simples. Ainsi, après avoir déterminé l'empan mnésique
(Salthouse et al., 1984) ou le niveau de poursuite visuo-motrice (Baddeley et al., 1986) de
chaque sujet dans les tâches simples, on utilise ces mêmes performances individuelles en les
combinant avec d'autres tâches. Ce type de procédure est intéressant mais il nécessite
beaucoup de temps pour avoir des mesures fidèles de chaque tâche simple afin d'établir les
paramètres appropriés pour les conditions de tâche double.
 La troisième méthode ajuste les performances dans les tâches doubles par rapport aux tâches
simples en effectuant des contrôles statistiques a posteriori. Il s'agit de calculer des différences
de scores (tâche double - tâche simple) ou des ratios (tâche double / tâche simple). Ce type
de méthode a été utilisé par Salthouse et Meinz (1995) et a montré sa pertinence.
S'agissant de notre travail, nous comptons combiner ces deux dernières méthodes : ajuster la
performance individuelle de chaque sujet dans la tâche secondaire et calculer l'excédent en temps
(tâche double - tâche simple). Ainsi, pour tester la pertinence de l'hypothèse d'une réduction chez
les Pk, de la capacité de l'AC à diviser les ressources attentionnelles entre différents niveaux de
charge, nous proposons la procédure de tâche double avec trois conditions expérimentales :
 Condition 1 tâche isolée : il s'agit d'une tâche de barrage de signes. C'est notre tâche
principale qui va servir de ligne de base pour comparer les sujets à eux-mêmes. Les
performances vont être égalisées intra-sujets en comptabilisant l'excédent en temps ou en
erreurs entre les performances à la tâche principale et à la tâche double. La tâche principale
consiste à discriminer le plus rapidement possible et à barrer deux types de signes (40/200)
mêlés à 6 autres types de signes parmi lesquels ils peuvent être aisément confondus.
 Condition 2 tâche double : peu exigeante en ressources attentionnelles. Cette condition
associe la tâche principale à une tâche secondaire automatique de répétition itérative des
chiffres 1 à 7 (Barrage + 7). Cette tâche secondaire est supposée avoir une faible charge sur la
MT. Elle pourrait être prise en charge par l'un des systèmes esclaves (dans notre cas la BPA)
sans nécessiter un support de l'AC.
 Condition 3 tâche double : exigeante en ressources attentionnelles. Cette condition joint
simultanément la tâche principale à une tâche secondaire d'empan de chiffre. La tâche

132
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

secondaire est censée alourdir le système et dépasser les capacités des systèmes esclaves.
L'intervention de l'AC est présumée, a priori, indispensable pour prendre en charge et
coordonner les deux tâches.
Il est important de noter que pour spécifier la nature du déficit de la MT chez les Pk, les
tâches mises au point ont les caractéristiques suivantes :

• elles minimisent les demandes motrices ;


• elles n'engendrent pas d'interférence structurale (tâche principale visuo-spatiale et tâches
secondaires verbales) ;
La procédure de quantification de la performance se base sur l'égalisation des charges de
chaque sujet dans la tâche principale et les tâches secondaires. Chaque sujet est ajusté
statistiquement à lui-même selon sa vitesse motrice, perceptive et de traitement.
Notre objectif est donc d'éprouver l'hypothèse d'une déplétion de la capacité de division des
ressources attentionnelles chez les Pk. L'interprétation de la tâche double repose sur la
comparaison des performances des sujets des deux groupes dans les deux tâches doubles. Si les
Pk souffrent d'une déplétion des ressources attentionnelles, ils auraient plus de difficultés que les
Té dans les tâches doubles très exigeantes. La réduction des ressources attentionnelles sera
indexée par le coût, en temps et en précision, des tâches secondaires sur la tâche principale. En
nous basant sur l'hypothèse du déficit de l'AC dans la division des ressources attentionnelles,
nous supposons que les Pk passeront plus de temps que les Té dans la tâche double exigeante
que dans la tâche double peu exigeante en ressources attentionnelles. Cette lenteur persistera
même si on égalisait la charge des tâches expérimentales pour les patients et les Té. Nous
pensons trouver ce résultat aussi bien pour le coût en temps que pour la précision, qui se traduira
en termes d'erreurs (omissions et fausses alertes).

7.1.1 Matériel
Des feuilles de protocole de Barrage de signes, un chronomètre, une feuille de protocole d'empan
de chiffres et un métronome.
S'agissant de la tâche principale de barrage de signes, nous avons conçu trois planches
composées chacune de 200 signes arrangés horizontalement sur une feuille (21 x 30 cm). Chaque
feuille comporte 10 lignes de 20 signes chacune. Huit types de signes ont été sélectionnés. Les
signes sont distribués quasi-aléatoirement. Une ligne supplémentaire a été ajoutée au début de la
planche pour familiariser les sujets à la tâche. Les deux signes cibles figurent au haut de la
planche. Les quatre planches sont composées selon le même principe mais la distribution des

133
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

signes diffère d'une planche à l'autre (Cf. annexe 4). Les signes ont été utilisés comme stimuli, à la
place des lettres ou chiffres, afin de ne pas défavoriser les sujets non scolarisés.

7.1.2 Procédure
On s'assure d'abord que le sujet a compris les tâches isolées (barrage, comptage, empan) et on
passe au testing. Chaque sujet passe la tâche principale seule puis les tâches doubles. L'ordre de
passation des tâches doubles est contrebalancé entre les sujets.
 Pour la tâche principale seule (Barrage), on présente au sujet la feuille contenant les signes et
on lui demande de barrer, le plus rapidement possible, les signes identiques aux deux signes
cibles. Afin de ne pas biaiser la stratégie de recherche pour chaque sujet, on demande de ne
balayer que dans le sens horizontal (de droite à gauche ou de gauche à droite). On
comptabilise le temps dès que le sujet commence à barrer son premier signe qui est toujours
une cible et on s'arrête lorsque le sujet indique qu'il a terminé la tâche. La consigne est la
suivante :
"Vous allez barrer, sur cette feuille, tous les signes identiques à ces deux signes (on montre les
modèles). Travaillez bien et vite. Bien, ça veut dire sans faire d'erreurs et vite ça veut dire
aussi vite que vous pouvez. Commencez par vous entraîner sur cette ligne."
 Dans la tâche double associant barrage et comptage (Barrage + 7), le sujet est invité à
effectuer la tâche de barrage tout en comptant itérativement de 1 à 7 à raison de un chiffre
par seconde en suivant le rythme d'un métronome. L'expérimentateur contrôle la vitesse du
sujet et intervient pour la pondérer si elle diminue ou s'accélère. La consigne est :
"Vous avez bien fait l'autre planche. Maintenant, vous allez faire la même chose pour les
signes mais cette fois, vous allez compter en répétant sans vous arrêter les chiffres de 1 à 7
suivant le rythme de cet appareil (métronome) tout en barrant les signes".
 Pour la tâche double associant barrage et empan (Barrage + Empan), le sujet est invité à
effectuer la tâche de barrage tout en répétant dans l'ordre sériel de présentation, les chiffres
correspondant à son propre empan. Le niveau de difficulté de la tâche se trouve ainsi ajusté à
un point où les patients et les Té sont présumés subir la charge attentionnelle de manière
équivalente (empan). La consigne est :
"Vous avez bien fait l'autre planche. Maintenant, vous allez faire la même chose pour les
signes mais, cette fois, je vais vous lire des chiffres et je vous demande de les répéter dans
l'ordre tout en barrant les signes".

134
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

Puisque les consignes données aux sujets sur la façon de distribuer leur attention entre les
tâches peuvent amplement affecter les performances aux tâches doubles, nous avons employé
une instruction "non biaisante" demandant aux sujets de déployer une attention équivalente aux
deux tâches.

7.1.3 Indices relevés


Les indices de la performance sont :

 L'excédent de temps dans la réalisation de la tâche principale de barrage dans les deux
conditions de double tâche :
 "barrage + 7" = (temps de réalisation barrage et comptage) - (temps de réalisation barrage
simple) ;
 "barrage + empan" = (temps de réalisation barrage et empan) - (temps de réalisation
barrage simple).
 La précision dans la détection des signes dans la tâche principale de barrages. Deux indices
nous intéressent :
 L'excédent individuel en P(A) dans les tâches. Le P(A), dans la Théorie de Détection du
Signal, est la mesure non paramétrique équivalente au d'. Elle prend en considération les
Hits ("cible" présente et détectée) et les fausses alertes ("cible" raportée mais absente) ;
 L'excédent en omissions ("cible" présente mais non détectée).
 Pourcentage de séquences d'empan que le sujet parvient à répéter correctement dans la tâche
double (barrage + empan).

7.1.4 Résultats
7.1.4.1 Le coût en temps
Une ANOVA mixte 2 x 3 "groupe" X "type de tâche" (tâche isolée, tâche double peu exigeante et
tâche double exigeante) sur le temps brut consommé pour chaque tâche montre un effet tâche
très significatif [F(2, 80)= 41.62 ; p< .0001], un effet groupe significatif [F(1, 40)= 10.76 ; p<
.005] et une interaction très significative [F(2, 80)= 8.89; p< .0001]. Ce pattern de résultats est
conservé même si l'on égalise les performances de chaque sujet sur la base de ses performances
dans la tâche principale isolée.
En effet, une analyse de la variance mixte 2 x 2 "groupe" X "type de tâche double" (tâche
double peu exigeante vs tâche double exigeante) a été faite sur l'excédent en temps pour chaque
tâche et suivie par le HSD de Tukey. Cette ANOVA révèle un effet tâche significatif [F(2, 80)=
68.07; p< .0001], un effet groupe proche de la signification [F(2, 80)= 3.27; p= .07] et une
interaction significative [F(1, 40)= 14.33; p< .001].

135
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

80
70
60
50
40

Temps (sec.)
30
20
10
Parkinsoniens
0
Témoins
-10
-20
Barrage + 7 Barrage + empan

Figure 7-1. Excèdent en temps pour chaque type de tâche double.

Le HSD de Tukey ne montre pas de différence entre Pk et Té dans l'excédent en temps dans
la tâche double exigeante (p= .9603) alors que la différence est significative pour la tâche double
exigeante (p< .0001). L'interaction significative entre groupe et type de tâche double suggère qu'à
l'opposé des résultats relatifs à la précision de la détection, les Pk consomment significativement
plus de temps que les Té lorsque la tâche double est exigeante en ressources attentionnelles (Cf.
figure 7-2).

Comme le montre le tableau 7-3, les calculs de corrélation par l'épreuve de Spearman entre
l'excédent en temps d'une part et le niveau d'alerte et la vitesse de traitement d'autre part
montrent que l'excédent en temps d'exécution de la tâche double exigeante est corrélée avec le
niveau d'alerte, les autres corrélations ne sont pas significatives.
Tableau 7-1. Coefficients et probabilités de corrélation entre l'excédent en temps dans chaque tâche avec l'alerte et
la vitesse de traitement.
Tâche double Tâche double
peu exigeante exigeante
Excédent en temps Excédent en temps

Nv. Alerte r - .02 .44


TR moy.
p. .8869 .0023
Vitesse de traitement r .29 .27
TCP moy. p. .0604 .0783

Si on calcule une corrélation pour chaque groupe séparément on se rend compte qu'elle n'est
significative que chez les Pk (r= .50 ; p. = .0202). La corrélation entre l'excédent en temps mis
pour accomplir la tâche double chez les Té et le niveau moyen d'alerte est presque nulle (r=
.0611 ; p. = .7925).
Face à ces résultats nous avons effectué une analyse de covariance (Ancova) sur l'excédent en

136
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

temps en covariant le niveau d'alerte (TR moyen) pour tous les sujets. Cette analyse vise à
examiner une éventuelle atténuation de l'effet groupe si on co-varie les performances avec le
niveau d'alerte. Des tests de parallélisme des pentes de performance des deux groupes se sont
avérés non significatifs (p. = .1214). Cette analyse montre que la covariance des sujets par rapport
au niveau d'alerte ne change pas le pattern des résultats. L'effet tâche reste, comme prévu,
hautement significatif [F(2, 80)= 66.37; p< .0001], celui de l'effet "groupe" diminue légèrement
[F(1, 40)= 1.79; p= .1886] et l'interaction reste significative [F(2, 80)= 13.97; p< .001]. L'Ancova
montre donc que la différence entre Pk et Té n'est pas seulement attribuable au niveau d'alerte.

7.1.4.2 Le coût des tâches secondaires sur la précision


La précision est analysée en termes d'excédent en P(A) et en omissions. Comme le montre le
tableau 7-2, la précision diminue dans les deux cas avec l'augmentation du niveau de charge
attentionnelle de la tâche alors que le nombre d'erreurs augmente. Les moyennes du score P(A)
des Pk dans la tâche isolée de barrage, la tâche double "barrage + 7" et la tâche double "barrage +
empan" sont respectivement 89.90, 88.05 et 83.33 alors que celles des Té sont 95.29, 92.90 et
89.67. Une analyse de variance mixte sur les scores bruts de P(A) révèle un effet groupe
significatif [F(1, 40)=6.44; p< .05], un effet tâche significatif [F(2, 80)=35.72; p< .0001] mais pas
d'interaction [F(2, 80)= .52; p= .5951]. Les épreuves post hoc révèlent des différences entre les
deux groupes dans toutes les tâches.
Tableau 7-2. Moyenne de P(A) et pourcentage moyen des omissions dans les tâches principales des trois
conditions.

Parkinsoniens Contrôles

Barrage P(A) 89.90 (10.62) 95.29 (2.37)


Omissions 16.42 (9.57) 15.56 (7.94)

Barrage + 7 P(A) 88.05 (9.86) 92.90 (2.95)


Omissions 22.73 (9.87) 22.97 (8.12)

Barrage + Empan P(A) 83.33 (9.27) 89.67 (5.74)


Omissions 31.07 (10.99) 30.11 (11.08)

En revanche si on égalise les performances des sujets sur la base de la tâche isolée de barrage
de la première condition, la configuration des résultats change :
L'anova mixte "groupe" X "tâche" (barrage + 7 vs barrage + empan) sur l'excédent en P(A)
fait disparaître l'effet "groupe" significatif [F(1, 40)= .02; p= .8759] comme on peut le voir sur la
figure 7-2. L'effet tâche reste robuste [F(1, 40)=34.94; p< .0001]. L'interaction entre "groupe" et
tâche demeure non significative [F(1, 40)= 1.30; p= .2791]. Le HSD de Tukey effectué pour la
comparaison entre toutes les paires de moyenne montre que les Pk ne diffèrent pas

137
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

significativement des Té dans tous les scores de P(A). Ceci s'applique aussi bien à la tâche double
peu exigeante "barrage + 7" (p=.9459) qu'à la tâche double exigeante "barrage + empan"
(p=.7496).

-1

-2 Parkinsoniens
Témoins
-3

-4
P(A)
-5

-6

-7

-8
Barrage + 7 Barrage + Empan

Figure 7-2. Excès de P(A) dans les deux conditions de la tâche double.
Ce résultat montre que les tâches doubles peu exigeantes et même exigeantes altèrent de la
même façon les performances des Pk et des Té dans la précision de la détection.
Lorsque l'analyse de la variance porte sur le pourcentage des omissions dans les différentes
conditions comme variable dépendante (Cf. fig. 7-3), on ne trouve pas d'effet "groupe" [F(1,
40)= .04; p= .8435] mais on retrouve l'effet tâche [F(2, 80)=63.07; p< .0001] et toujours pas
d'interaction [F(2, 80)= .12; p= .8806]. Le même pattern de résultats est retrouvé quand l'anova
porte sur l'excès en omissions après avoir égalisé tous les sujets sur la base de leurs performances
dans la tâche principale isolée.

14
13
12
11
Omissions

10
9 Parkinsoniens
Témoins
8
7
6
5
Barrage Barrage + 7 Barrage + empan

Figure 7-3. Nombre moyen d'omissions par tâche.


Ces résultats confirment que s'agissant de la qualité de la performance, le niveau de précision
des Pk et des Té ne diffère pas face au coût d'exigence de la tâche double. L'existence d'un effet
tâche robuste sur l'indice P(A) et les omissions, et l'absence d'interactions suggèrent : en premier

138
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

lieu que les deux groupes se comportent de façon équivalente dans les différents niveaux de
charges des tâches doubles, et en second lieu que le coût en précision des deux conditions de la
tâche double diffère. En effet, les épreuves post hoc portant sur les tâches montrent un effet
tâche significatif aussi bien chez les Pk (p<.001) que les Té (p<.01) dans l'indice excès en P(A) et
dans les excès en omissions (p<.001, pour les deux).
L'examen de corrélations entre les différents indices d'exactitude dans les tâches doubles avec
le niveau moyen d'alerte et la vitesse de traitement est effectué par le coefficient de Spearman. Cet
examen ne montre aucune corrélation significativement différente de zéro (Cf. tableau 7-3).

Tableau 7-3. Coefficients et probabilité des corrélations entre les indices d'exactitude dans les tâches doubles avec
l'alerte et la vitesse de traitement.

Tâche double Tâche double


peu exigeante exigeante
P (A) Omissions P (A) Omissions
r - .17 .26 - .15 .12
Nv. Alerte (TR moy.)
p. .2768 .0901 .3415 .4346
r - .03 .03 - .03 .10
Vitesse de traitement (TCP moy.)
p. .8299 .8265 .8236 .5042

7.1.4.3 Le coût sur l'empan en tant que tâche secondaire


Le pourcentage de réussite dans l'empan de chiffres comme tâche secondaire dans la condition de
tâche double exigeante est de 32.24% (σ = 17.17) chez les Pk et de 53.28% (σ = 22.36) chez les
Té. La différence entre les deux groupes examinée par l'épreuve U de Mann et Whitney. met en
évidence une différence hautement significative entre les deux groupes [U=94.50, Z ajustée =-
3.17; p<.005]. Ainsi, même en égalisant les performances des sujets en les testant par leur propre
niveau d'empan, les Pk ont des performances significativement inférieures à celles des Té dans
l'empan comme tâche secondaire. La corrélation entre l'empan comme tâche secondaire et le
niveau d'alerte (r = .22 ; p. = .1591) et la vitesse de traitement (r = .08 ; p. = .5736) n’est pas
significative.

7.1.5 Discussion
Nos résultats montrent que, comparés aux Té, les Pk mettent plus de temps pour exécuter la
tâche exigeante en ressources même si on égalise les performances de chaque sujet dans la tâche
principale et les tâches doubles. De plus, les performances des Pk chutent dans l'empan comme
tâche secondaire lorsque le type de tâche double est exigeant. En revanche, s'agissant de la qualité
de la performance, le niveau de précision des Pk ne diffère pas de celui des Té dans la détection

139
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

des cibles. Les différents niveaux d'exigence de la tâche double agissent de la même manière sur
le degré de précision des Pk et des Té. Ainsi, lorsque les exigences de certaines tâches doubles
dépassent les capacités limitées de division, les performances baissent. Comparativement aux Té,
cette baisse touche significativement le temps et la performance dans la tâche secondaire mais
laisse le niveau de précision optimal.
L'objectif de cette étude est de situer le locus du déficit cognitif observé en MT en analysant
ses différentes composantes. À ce point de l'analyse, l’examen montre que le déficit épargne la
BPA et le RVS. Il touche spécifiquement l'AC dans la capacité de coordination entre tâches
exigeantes en ressources attentionnelles. Ainsi, lorsqu'on impose aux Pk une tâche double
exigeante, à un point qui dépasse les capacités centrales de traitement, le temps nécessaire pour
effectuer la tâche s'allonge et les performances à la tâche secondaire chutent. Néanmoins, la
précision de la performance reste équivalente à celle des Té. Le degré du déficit dépend du degré
de charge sur l'AC. Ces résultats sont compatibles avec l’hypothèse d'une altération de la fonction
de division des ressources attentionnelles de l'AC chez les Pk. L'augmentation en temps (dans la
tâche principale) et en pourcentage d'erreurs (dans l'empan comme tâche secondaire) confirment,
à un certain niveau, nos hypothèses.
Cependant, d'autres hypothèses explicatives peuvent être émises dont celle d'une déficience
face à la difficulté de la tâche plutôt que sa nature, celle de la lenteur classiquement décrite chez
les Pk et celle du manque de ressources et de surcharge du système. En effet, l'hypothèse d'un
déficit de l'AC n'est pas la seule hypothèse plausible. En effet, on peut penser que ce déficit soit
lié à la difficulté des tâches doubles en comparaison aux tâches uniques pour expliquer l’échec des
patients. Or, les arguments en faveur de ce type d’hypothèse sont évasifs et circulaires. En effet,
la tâche double ne peut être que difficile et l'AC est censé intervenir là où la situation est difficile.
La notion de difficulté est elle-même non spécifique. Baddeley et al. (1991) discutent cette hypothèse
en manipulant chez des malades d'Alzheimer le niveau de difficulté des tâches, mais n’obtiennent
pas de corrélation entre le niveau de difficulté et la sévérité du déficit.
Le fait que les Pk ne diffèrent pas des Té dans la tâche double peu exigeante suggère que ce
n'est pas l'interférence inter-tâche per se qui est à l'origine des déficits observés dans les tâches
doubles exigeantes mais plutôt le niveau d'exigence de la tâche en ressources attentionnelles.
Comparés aux Té, les Pk ont besoin de plus de temps pour exécuter la tâche exigeante en
ressources même si on égalise les performances de chaque sujet dans la tâche principale et les
tâches secondaires. Cette lenteur peut représenter le coût de la tâche double exigeante sur la
capacité de division des ressources attentionnelles. Ce type de déficit peut être expliqué en termes
d'une lenteur non spécifique qui s'observe lorsque la tâche dépasse les ressources attentionnelles

140
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

des Pk. Nous avons obtenu une corrélation significative entre l'excédent en temps et le niveau
d'alerte chez les Pk. Or, l'analyse de covariance montre que le pattern de performances ne change
pas si on prend en compte les variations dans le niveau d'alerte. Ainsi, l'hypothèse qui relie le
déficit de la division des ressources à la lenteur n'est pas très soutenable.
Par ailleurs, une hypothèse en termes de compensation stratégique entre vitesse et précision
(trade-off) est possible. Une fois les capacités limitées dépassées (saturées), les Pk conservent un
niveau de précision satisfaisant dans la tâche principale mais deviennent plus lents. Cet argument
reste à vérifier. Il y a une suspicion qu'une partie de la lenteur soit la conséquence d'une grande
"prudence" telle celle manifestée dans le biais favorisant l'exactitude sur la vitesse. Les Pk
paraissent d'après cette optique sacrifier la vitesse en faveur de la précision. Le fait que la tâche
principale et l'empan comme tâche secondaire soient touchés (dans certains de leurs aspects)
lorsqu'elles sont combinées, montre que ces deux conditions puisent des ressources
attentionnelles et dépendent entre autre du fonctionnement d'un divisionnaire central. Ce dernier
est supposé être l'AC censé assurer la coordination et la division des ressources attentionnelles
disponibles.
Avant de discuter l'hypothèse d'un déficit en relation avec les ressources, il est indispensable
de préciser que nous distinguons entre déficience des ressources disponibles (notion physique,
énergétique, de réserve) et déficience dans la division des ressources (notion de coordination et
de gestion). En égalisant les performances de nos sujets, notre objectif est de dissocier ces deux
aspects. L'aspect physique n'est certes pas indépendant de l'aspect exécutif mais l'analyse fine des
résultats et leur discussion pourraient nous éclairer davantage sur le rapport.
L'hypothèse de surcharge et de manque de ressources postule que les Pk ont moins de
ressources attentionnelles disponibles à diviser. Si la tâche est exigeante en ressources, elle
dépasse chez les Pk plus que chez les Té les réserves disponibles d’où la chute des performances.
Cet argument ne nous paraît pas assez convaincant puisque nous avons évalué chaque sujet en
prenant son propre niveau de performance comme ligne de base de la charge à lui attribuer. Tous
les sujets des deux groupes ont été chargés de façon équivalente. En effet, le fait que les Pk et les
Té montrent des patterns de performance comparables aux tâches doubles suggère que le fait
d'égaliser le niveau de difficulté de la charge isolément constitue un contrôle approprié puisque
Té et Pk montrent un affaiblissement de leur performance dans toutes les mesures de la tâche
exigeante en ressources attentionnelles. De plus, dire que certaines tâches sont plus exigeantes en
ressources pour les Pk que pour les Té n'est pas une explication en soi, puisque cette
interprétation n’explique pas le pourquoi des choses.

141
____________________________________________________ Division des ressources attentionnelles

Les données issues de cette expérience et de la discussion des résultats suggèrent que les Pk
ont plus de difficultés que les Té dans la division efficiente de l'attention entre deux tâches qui
puisent lourdement dans des ressources disponibles. Ce déficit s'observe même si on minimise les
demandes motrices des tâches dans des conditions expérimentales qui n'engendrent pas
d'interférence structurale. Les déficits s’observent également lorsqu’on égalise les performances
de chaque sujet selon sa vitesse motrice, perceptive et de traitement. La division et la
coordination stratégique entre tâches sont possibles chez les Pk mais leur coût se manifeste par
l'augmentation du temps d'exécution de la tâche principale et l'augmentation des erreurs dans la
tâche secondaire. Ce type de fonctionnement peut être considéré comme stratégique. Or, ce coût
traduit l'existence d'un déficit qui ne correspond pas nécessairement à une déplétion des
ressources. Il suggère plutôt un déficit exécutif de coordination efficiente des ressources
attentionnelles disponibles. Ceci concorde avec l'hypothèse d'un déficit dans l'AC et le SAS émise
par Goldenberg et al. (1990) qui signalent l'existence d'une faiblesse du SAS à l'origine du déficit
des performances dans les tâches doubles si la tâche est dans un contexte où le SAS a d'autres
demandes importantes. La défaillance du SAS est également défendue par Brown et Marsden
(1991) et Gabrieli et al (1996). Toutefois, le SAS n'opère pas comme un système unitaire
(Baddeley, 1992b ; Van der Linden et al., 1993 ; Lehto, 1996) et la division des ressources
attentionnelles n'est pas la seule fonction de l'AC. Il est indispensable d'examiner les autres
dimensions de contrôle du SAS de la cognition et de l'action.
Par ailleurs, il est important d’être conscient des limites de l’esprit linéaire sous-tendant la
procédure d’égalisation. Il est possible que les Pk et les Té n’utilisent pas les mêmes processus
cognitifs dans la réalisation des tâches et la procédure d’égalisation ne fait dans ce cas que
masquer les différences sinon les biaiser. Or, cette objection n’est pas réfutable puisqu’elle
s’applique aussi aux paradigmes où l'on n’utilise pas de procédure d’égalisation.
Dans un travail ultérieur, nous comptons modifier notre protocole expérimental de tâche
double en suivant celui de Baddeley qui utilise la performance des sujets dans l’empan comme
tâche simple et la compare à celle en condition de tâche double comme tâche secondaire. Ceci
permettrait aussi d’utiliser sa formule d’indexation de la capacité de diviser les ressources
attentionnelles (Baddeley, Della Sala, Gray, Papgno et Spinnler, 1997).

142
7.2 Inhibition des réponses dominantes
L'efficience des mécanismes inhibiteurs est indispensable pour un fonctionnement normal de la
MT. Hasher et Zacks (1988) montrent que l'inhibition assure le contrôle des informations aussi
bien au niveau de l'encodage que de la récupération du contenu de la MT. La déficience des
mécanismes inhibiteurs peut résulter de l'avancement en âge (Comalli et al., 1962 ; Hasher et
Zacks, 1988 ; Kramer, 1994) ou de lésions cérébrales, essentiellement frontales (voir Stuss, 1991
pour une revue). Le cas de Phineas Gage redécrit par Damasio (1994) en est un exemple.
L'évaluation des mécanismes inhibiteurs peut être faite par plusieurs procédures. En fait,
l'inhibition a plusieurs facettes. Bjorklund et Harnishfeger (1995) dissocient entre la suppression
des contenus ou processus cognitifs activés, le filtrage des actions non pertinentes et la résistance
à l'interférence. Nous analysons chez les Pk la capacité de supprimer les automatismes activés en
comparant leurs performances à une tâche d'initiation rapide d'une action par rapport aux
performances à une tâche de suppression d'une réponse dominante en faveur d'une autre non
dominante. En partant de l'hypothèse de défaillance des mécanismes inhibiteurs dans la mP,
nous pouvons supposer que les Pk seront plus lents que les Té dans la suppression des
automatismes et feront plus d'erreurs dans la suppression des réponses dominantes.

7.2.1 Matériel
Une adaptation en arabe dialectal de la tâche de complètement de mots "Hayling"
Cette tâche est mise au point par Burgess et Shallice (1996) à partir des normes de complètement
de phrases de Bloom et Fischler (1980). Le "Hayling" comporte deux parties de 15 items
chacune. Chaque item est une phrase à laquelle manque le dernier mot. Les phrases doivent
fortement indicer le dernier mot (champs collocatif) c'est à dire que la probabilité de trouver le
mot spécifique manquant est très forte. Pour utiliser cette tâche, nous n'avons pas traduit les
items proposés par Burgess et Shallice (1996) ou l'adaptation française faite par Van der Linden
(1996)18 mais nous avons construit une tâche équivalente qui répond aux principes du "Hayling".
Ainsi, nous avons sélectionné 50 phrases qui répondent aux exigences de l'épreuve et nous les
avons expérimentées auprès d'un groupe d'étudiants volontaires puis auprès de patients
consultants à l'INN. Les résultats de cette pré-expérimentation nous ont permis de choisir 30
phrases dans lesquelles la probabilité de donner le dernier mot approprié dépasse 90%. Quatre
autres phrases ont été ajoutées pour servir d'essai de familiarisation. Les 30 phrases ont été

18 Nous remercions vivement Mr. Martial Van der Linden qui nous a procuré une adaptation en Français du Hayling.
______________________________________________________ Inhibition des réponses dominantes

réparties quasi-aléatoirement sur les deux parties de l'épreuve de façon à ce que la fréquence
moyenne des mots manquants et la longueur moyenne soient équivalentes dans les deux parties
de l'épreuve (Cf. annexe 5).
Les latences sont mesurées par un chronomètre avec une précision de 1/10 secondes.

7.2.2 Procédure
Le Hayling est composé de deux parties : A et B, comportant chacune 15 phrases et deux
exemples d'essai.
a) Dans la partie "A" (initiation), on présente au sujet une série de phrases auxquelles manque le
dernier mot et on lui demande de les compléter correctement le plus vite possible. Dans cette
partie, le mot est fortement induit par le contexte. La consigne est :
"Je vais vous lire une série de phrases dont le dernier mot est toujours absent. Je voudrais que
vous écoutiez attentivement chacune de ces phrases et que, dès que j'aurais fini de la lire, vous
me disiez quel devrait en être le dernier mot. Les phrases ne sont pas difficiles : le mot
manquant peut toujours être trouvé facilement. Nous allons d'abord essayer avec deux
exemples pour que vous voyez comment cela se passe."
On lit les deux exemples au sujet et on lui demande de donner une réponse raisonnable. Si les
réponses sont correctes, on lui dit :
"Les phrases que nous allons voir maintenant ne sont pas plus difficiles que les précédentes.
Ce qui est important, c'est la rapidité avec laquelle vous donner votre réponse. Donc, dès que
vous aurez entendu la phrase, votre tâche consistera à donner le plus vite possible le mot qui
vous semble le mieux compléter la phrase."
Si le sujet n'a pas compris la tâche on lui donne plus d'explications. Les phrases sont lues à une
vitesse de lecture normale. Le chronométrage est déclenché après l'émission du dernier mot de la
phrase, il est stoppé dès que le sujet prononce une réponse.

b) Dans la partie "B" (suppression), on demande au sujet de produire un mot non relié
sémantiquement au contexte de la phrase. Cette partie est administrée immédiatement après
la partie "A" selon la consigne suivante :

"Maintenant, la tâche sera un peu différente. Je vais vous lire des phrases dont le dernier mot
est toujours absent, mais cette fois, j'aimerais que vous me donniez un mot absurde, qui n'ait
aucune relation avec la phrase, qui ne donne aucun sens à la phrase. Cela n'est pas toujours
facile. Nous allons commencer par deux exemples. Vous êtes prêt ?"

144
______________________________________________________ Inhibition des réponses dominantes

Si le sujet donne une réponse qui donne un sens à la phrase, on le lui signale, et on lui
demande d'essayer de trouver un autre mot. Si la latence du sujet dépasse 60 secondes, nous
enregistrons 60 secondes et nous passons à la phrase suivante. Si le sujet donne, à chaque fois,
une réponse qui donne un sens à la phrase, on le lui signale et on lui rappelle la consigne.

7.2.3 indices relevés


Les indices de la performance au Hayling sont de deux types :
 Des données temporelles :
 La médiane des temps de latence dans chaque partie ;
 La différence entre le temps de latence dans la partie "A" et "B" (B - A) "additional
thinking time".

Tableau 7-4. Critères de cotation des réponses au Hayling selon Burgess et Shallice (1996).

C ♦ Le mot complète directement la phrase. 3


ãÔì áÓÈíÓíÑíÉ ÈÇÔ íÔÑí ÇáÏæÇÁ

SO ♦ Le mot est simplement une réponse qui est l'inverse de la réponse attendue.
ÇáÞØæÓ íÔæÝ ÈÇáÞÏÇ Ýí ÇáäåÇÑ
SA ♦ Le mot est clairement lié sémantiquement au sujet de la phrase.
ÇáÛáÉ ßíÝ ÊÈÏÇ ÝÇá ÓæãåÇ íÈÏÇ ÊÝÇÍ
SB ♦ Le mot est clairement lié sémantiquement au mot qui compléterait la phrase. 1
ÞÕ ÇáÎÈÒÉ ÈÇáãÛÑÝÉ
SC ♦ Le mot complète vaguement la phrase, mais en lui donnat un sens ridicule ou
alors il s'agit d'un mot argotique, semi-obscène ou inadéquat.
ßíÝ äÚØÔ äÊÝÑÝÔ

UR ♦ Le mot n'a aucun rapport avec la phrase, il est déconnecté :

UR • Le mot fait référence à un item qu'on peut trouver dans le bureau d'examen
ÇáÎÈÇÒ ÍØ ÕíäíÉ ÇáÈÞáÇæÉ Ýí ÇáãÚáÇÞ
UL • Le mot est en rapport avec la dernière réponse du sujet 0
URL • Le mot fait référence à la fois à quelque chose qu'on peut trouver à l'hôpital ou
le bureau d'examen et est relié à la dernière réponse du sujet.
U • Aucun des précédents n'est vrai (le mot est vraiment sans aucun rapport avec la
phrase stimuli).

 Des données qualitatives :


♦ Le "score d'erreurs" issu de l'analyse des réponses dans la partie "B" (suppression). Les
réponses sont classées selon les critères proposés par Burgess et Shallice (1994, 1996) en
plusieurs classes donnant lieu à un "score d'erreurs" de 3, 1 ou 0.
 On donne 3 lorsque le mot complète réellement la phrase (R. Habituelle)

145
______________________________________________________ Inhibition des réponses dominantes

 Un score de 1 est donné pour 4 types de réponses qui ont des liens sémantiques
quelconques avec le mot ou la phrase en question (R. reliée Sémantiquement) :
 Lorsque le sujet donne le mot opposé au mot à inhiber ;
 Lorsque la réponse est sémantiquement liée au mot à inhiber ;
 Lorsque le sujet donne une réponse sémantiquement liée au sujet de la phrase ;
 Lorsque le mot complète vaguement la phrase de façon à lui donner un sens ridicule
ou bien si le mot est argotique ou inapproprié.
 On donne 0 lorsque les mots n’ont pas de relation avec la phrase (R. Non reliée) :
 Soit un mot en relation avec un objet qu'on peut trouver dans le lieu où se passe le
testing : bureau, salle, laboratoire.... ;
 Soit que le mot est sémantiquement relié à la réponse précédente;
 Soit un mot sans aucun rapport avec la phrase inductrice et ne référant à aucune
classification précédente.

Les non réponses ne sont pas comptabilisées dans le "score d'erreurs", mais dans le temps de
latence. Ces réponses qualitatives, bien que rigoureusement codifiées par Burgess et Shallice
(1996) restent relativement sujettes à la subjectivité du correcteur. Une double correction en
double aveugle a été effectuée. Très peu de réponses ont entraîné un désaccord entre les deux
correcteurs. Lorsque c'est le cas, la réponse est analysée et discutée et une notation commune est
adoptée.

7.2.4 Résultats
7.2.4.1 Analyse des temps de latence
Les temps de latence moyens dans les deux parties et pour les deux groupes figurent sur le
tableau 7-5. Une analyse de variance "groupe" (Pk, Té) X "partie" (initiation, suppression) sur les
temps de latence, après transformation log ne révèle pas d'effet groupe significatif [F(1,40)=2.43 ;
p=.1264]. Cette analyse met en évidence un effet partie net [F(1,40)=721.64 ; p<.0001]
confirmant, comme attendu, que la partie "B" nécessite plus de temps que la partie "A".
L'interaction est non significative [F(1,40)=.01 ; p=.9622] (Cf. figure 7-4).
Tableau 7-5. Latences moyennes (écart types) au Hayling dans les deux groupes.

Groupe Partie "A" (Initiation) Partie "B" (Suppression) "B" - "A"


Parkinsoniens 12.73 29.67 16.94
(4.56) (8.52) (7.88)
Contrôles 10.93 27.94 17.01
(2.01) (6.69) (6.62)

Le HSD de Tukey ne témoigne d'aucune différence significative entre Pk et Té dans les deux
parties : "A" (p=.1867) ; "B" (p=.1646).

146
______________________________________________________ Inhibition des réponses dominantes

35

30

25

Temps (Sec.)
20
Parkinsoniens
15 Témoinss

10

5
Partie A Partie B

Figure 7-4. Temps de latence moyens dans les deux parties du Hayling.

Lorsque l'analyse statistique porte sur ce que les auteurs appellent "additionnal thinking time"
(B-A) pour produire un mot nouveau autre que le mot habituel, les résultats ne révèlent pas non
plus de différence significative entre les groupes [U=187; Z ajustée = -.8428; p= .3993].
Ces résultats indiquent que les deux groupes ne diffèrent pas significativement dans la vitesse
de générer des réponses aussi bien dans la partie "Initiation" que "Suppression". Le temps de
latence ne paraît pas être un indice différenciateur des performances des Pk et Té.

7.2.4.2 Analyse des types de réponse


Dans la partie "A", très peu de réponses (13/315 pour les Pk et 11/315 pour les Té) sont
différentes des mots ciblés. De même, dans la partie "B" (Suppression), une comparaison portant
sur le nombre de réponses correctes ne montre pas de différence significative entre les deux
groupes [U=171 ; Z-ajustée -1.27 ; p=.2024].
Cependant, lorsque l'analyse porte sur le "score d'erreurs", qui évalue la capacité de se
détacher sémantiquement de la phrase stimulus, une différence significative entre les deux
groupes se manifeste [U=97.5 ; Z-ajustée -.3101 ; p<.005] : les Pk ont un score d'erreurs
supérieur à celui des Té. Un résumé des différents types de réponses pour chaque groupe figure
sur le tableau 7-6.

Tableau 7-6. Pourcentage des types de réponses et moyennes (σ) du score d'erreurs.
Réponse Correcte Erreur Score d'erreurs
Groupe Non reliée Habituelles Sémantiquement reliées Non réponse

Parkinsoniens 13.65 24.13 60.95 1.58 21.71 (3.97)


Contrôles 19.05 8.57 71.11 1.27 19.05 (6.61)

147
______________________________________________________ Inhibition des réponses dominantes

Une analyse de variance sur les données des deux types d'erreurs (habituelles et sémantiques)
transformées en racines carrées, montre un effet groupe proche de la signification [F(1,40)=3.82;
p= .05736], un effet type d'erreur significatif [F(2,80)= 114.85; p< .0001] et une interaction
significative [F(2,80)=7.72; p< .01]. Ceci montre que la prévalence de chaque type d'erreur n'est
pas la même dans les deux groupes (Cf. figure 7-5). Une analyse post hoc révèle une différence
significative (p< .05) entre Pk et Té dans les erreurs d'impulsion. Les Pk ne peuvent éviter
d'énoncer le mot "habituel" bien que la consigne demande explicitement de le supprimer
activement. En revanche, les Té font plus d'erreurs de type "sémantique" bien que cette
différence ne soit pas significative (p= .7181). Ils arrivent à inhiber le mot "habituel" mais
donnent un mot qui lui est proche sémantiquement.

90
80
70
% de réponse

60
50 Parkinsoniens
*
40 Témoins

30
20
10
0
Non reliée Habituelle Sémantique Non réponse
Type de réponse

Figure 7-5. Pourcentage de chaque type de réponse dans les deux groupes.

Enfin, le nombre des non réponses est faible dans les deux groupes. Une comparaison par le
U de Mann et Whitney ne révèle pas d'effet groupe significatif [U=218.5 ; Z-ajustée -.07 ;
p=.9412].

7.2.4.3 Analyse des temps de latence en fonction des types de réponses


Le tableau 7-7 montre les temps moyens (écart type) pris par les sujets en fonction de chaque
type de réponse. Ce tableau montre que les réponses non reliées exigent relativement plus de
temps que les deux autres.
Tableau 7-7. Temps moyen (sec.) par type de réponse.

Groupe R. Habituelle R. Sémantique R. Non reliée

Parkinsoniens 30.18 29.37 37.16


(10.09) (10.16) (15.39)

Contrôles 33.17 27.37 35.60


(14.56) (6.94) (13.91)

148
______________________________________________________ Inhibition des réponses dominantes

Une analyse de variance sur les données transformées (log) : "groupe" X "temps de latence
pour chaque type de réponse" ne révèle aucun effet groupe [F(1,40)=.009 ; <.9226] mais un effet
type de réponse [F(2,80)=9.41 ; p< .001]. L'interaction n'est pas significative [F(2,80)=.31 ; p=
.7378]. Cette analyse est un indice en faveur de la non existence de "trade off" spécifique chez les
Pk favorisant la vitesse sur la qualité de réponse.

7.2.4.4 Examen des corrélations


Les corrélations entre les temps de latence dans la partie "A" et le "score d'erreurs" dans la partie
"B" sont calculés séparément pour les deux groupes. Le coefficient de corrélation de Spearman
est significatif aussi bien pour les Té (r= .54 ; p.< .05) que pour les Pk (r= .45 ; p.= .0401). Les
performances dans les deux parties de l'épreuves sont corrélées.
L'examen des corrélations entre différents indices du Hayling et les vitesses dans la tâche
d'alerte et la tâche de comparaison de patterns montre que les seules corrélations significatives
sont celles relatives aux données temporelles au Hayling (Cf. Tableau 7-8).
Tableau 7-8. Coefficients et probabilité des corrélations entre l'alerte et la vitesse de traitement d'une part et les
indices de performances au Hayling d'autre part.

Temps Type de réponse


Temps Temps Temps Score % R. % R. %R % non
A B B - A d'erreur non relié habituelle Sémantique réponse
TR moy r .48 .40 .38 .28 -.24 .26 -.18 .16
Alerte p. .0011 .0084 .0133 .0735 .1227 .10 .2646 .3051
TCP moy r .14 .43 .44 .16 -.11 .13 -.07 .02
Vitesse de traitement p. .3857 .0046 .0038 .3169 .4756 .41 .6399 .9125

Une nuance est à signaler : la seule donnée temporelle non corrélée avec la vitesse de
traitement est le temps de latence dans la partie "A". Ceci implique que cette partie de la tâche est
plus associée à l'alerte phasique qu'à un vrai traitement cognitif. Le "score d'erreurs" qui
différencie le plus Pk et Té n'est pas corrélé au niveau d'alerte et à la vitesse de traitement même
lorsqu'on effectue des corrélations indépendantes pour chaque groupe pris séparément.

7.2.5 Discussion
L'examen des mécanismes inhibiteurs par le "Hayling" montre deux résultats importants :
1. Les Pk ne différent pas des Té dans l'Initiation d'une réponse.
2. En revanche, lorsqu'il s'agit de suppression, bien qu'ils ne passent pas plus de temps pour
répondre, les Pk donnent significativement plus de réponses automatiques que les Té. Les Pk
ne sont donc pas plus lents que les Té dans ce type de tâche mais n'arrivent pas à contrôler

149
______________________________________________________ Inhibition des réponses dominantes

leurs réponses de façon efficace en fonction des exigences de la tâche. Selon Burgess et
Shallice (1994), ces résultats seraient dus à l'incapacité d'inhiber des schèmes de réponses
lorsque des déclencheurs spécifiques apparaissent.
Une interprétation alternative suggère que cette difficulté est associée à la faiblesse du niveau
scolaire ou d'intelligence générale. Or, les deux groupes sont appariés quant à la scolarité et au
QI.
Une interprétation en termes de trade-off spécifique aux Pk entre temps de latence et qualité
de réponse n'est pas justifiée, du fait de l'absence dans nos résultats d'interaction entre groupe et
temps de latence pour chaque type de réponse.
Les performances des Pk examinés dans le cadre de cette étude diffèrent de celles des patients
cérébrolésés examinés par Burgess et Shallice (1996) à l'aide de la même tâche. Le tableau 7-9
compare nos résultats à ceux de Burgess et Shallice.
Tableau 7-9. Comparaison de nos résultats au Hayling avec ceux de Shallice et Burgess (1996).

Temps "A" Temps "B" Score d'erreur


Parkinsoniens de notre étude   X
Patients à lésion antérieure
X X X
(Shallice et Burgess, 1996)
Patients à lésion postérieure
(Shallice et Burgess, 1996)   

 Performance comparable aux témoins


X Performance déficiente par rapport aux témoins

Le pattern du déficit des Pk diffère de celui des patients ayant des lésions antérieures
(frontales unilatérales et bilatérales). Le seul déficit observé chez les Pk concerne la qualité de la
performance (telle que indexée par le score d'erreurs).
Les calculs de corrélation montrent que le score d'erreurs et les différents types de réponses
ne sont pas corrélés au niveau d'alerte phasique général ou à la vitesse de traitement des
opérations cognitives. Le déficit observé chez les Pk ne paraît pas associé à l'effet de facteurs
généraux d'attention.
L'examen des corrélations entre les indices les plus sensibles des deux parties du Hayling
(temps de latence "A" et "score d'erreurs" "B") montre la présence d’une corrélation significative
chez les Pk et chez les Té. Cette corrélation a été obtenue par Burgess et Shallice (1996) auprès
de sujets Té et patients ayant des lésions postérieures. Cette corrélation n'appuie pas l'hypothèse
avancée par Burgess et Shallice (1994), selon laquelle chaque partie de l'épreuve du Hayling est
sous-tendue par des processus cognitifs différents et dissociés.

150
______________________________________________________ Inhibition des réponses dominantes

Ainsi, l'hypothèse de déficit de l'inhibition des automatismes est vérifiée par le "score
d'erreurs" qui paraît être l'indice le plus différenciateur entre Pk et Té. Les Pk auraient donc plus
de difficultés à ne pas produire la réponse programmée et sur-apprise. Il s'agit d'après Burgess et
Shallice (1994) de difficulté dans l'inhibition de la représentation en cours.

151
7.3 Flexibilité cognitive
Nous analysons la flexibilité cognitive chez des Pk comparés à des Té. La flexibilité cognitive
réfère à l’aptitude de réguler sa cognition et son comportement en fonction des changements de
l’environnement, des demandes particulières ou du contexte d’une situation. Elle est ainsi une
caractéristique essentielle du comportement humain adapté (Luria, 1990).
D'après Eslinguer et Grattan (1993), la flexibilité n'est pas un unitaire. Elle peut avoir au moins
deux formes : une flexibilité spontanée et une flexibilité réactive. La flexibilité spontanée, réfère à
la capacité de génération interne de réponses différentes appropriées à une situation ou à un
problème donné. Elle réfère à la productivité et la fluidité dans des réponses non automatiques et
non routinières. Elle exige l'emploi de stratégies de recherche à travers différentes classes et
catégories de savoir. La flexibilité réactive quant à elle porte sur la capacité d'orienter les
prédispositions cognitives et comportementales selon les contingences, les demandes particulières
et le contexte d'une situation (Eslinguer et Grattan, 1993). Cette forme de flexibilité renvoie à la
capacité de détourner l'attention d'une série de stimuli à une autre série de stimuli pertinents dans
une tâche exigeante en ressources attentionnelles19 (Stankov, 1988 ; cité par La Rue 1992).
Une dichotomie analogue à ces formes de flexibilité peut être faite entre le changement (set
shifting) et le maintien (set maintenance) de programme d'action. Le maintien de programme
d'action réfère à la capacité de conserver un programme d'action contre des alternatives
compétitives alors que le changement de programme d'action est la capacité de modifier le type de
réponse dans le cas où un changement externe de la tâche ou une initiative auto-dirigée exige
qu'une des alternatives soit choisie et exécutée (Flowers et Robertson, 1985).
Un système attentionnel superviseur efficient est indispensable aussi bien pour la flexibilité
spontanée que réactive. Dans le premier cas, le SAS assure la mise en œuvre de stratégies de
production et le contrôle "on line" de cette production afin qu'elle soit adaptée aux exigences de la
situation. Dans le second cas, le SAS veille à l'aboutissement des opérations de changement
contrôlé des programmes d'action. Ceci implique aussi un contrôle "on line" par un jeu
d'activation / désactivation des processus ou des représentations en cours en fonction de leur
pertinence.
L'examen des patients chez qui on suspecte un fléchissement du contrôle superviseur, comme
des patients frontaux, révèle un déficit de flexibilité telle qu'évaluée par le WCST (Milner, 1964 ;
Nelson, 1976 ; Janowsky et al., 1989), la partie B du Trail Making Test (Segalowitz, Unsal et

19 "the ability to change attention from one set of stimuli in a demanding task to another set of relevant stimuli".
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

Dywan, 1992), les tâches de type "go no-go" (Leimkuhler et Mesulam, 1985) ou les tâches de
fluence (Milner, 1964 ; Benton, 1968 Ramier et Hécaen, 1970 ; Perret, 1974). Le fait que les Pk
présentent une symptomatologie d'allure frontale rend l'examen de la flexibilité cognitive
intéressant et sa perturbation plausible sans être pour autant nécessaire. En effet, les résultats des
études sur l'efficience de la flexibilité cognitive chez les parkinsoniens sont controversés. Certains
auteurs constatent que les Pk sont déficients dans les tâches de flexibilité (Lees et Smith, 1983 ;
Taylor et al., 1986a ; Taylor et al., 1987 ; Owen et al., 1993b ; Van Spaendonck et al., 1995).
D'autres considèrent plutôt que les Pk ne présentent pas de déficit de flexibilité cognitive (Brown
et Marsden, 1988 ; Lichter et al., 1988 ; Dalrymple-Alford et al., 1994 ; Joosten et al., 1995 ;
Troyer et al., 1998). Flowers et Robertson (1985) suggèrent que les Pk ne présentent pas de
difficultés de changement de programme d'action mais plutôt de maintien de programme
d'action20.
L'objectif de cette expérience est d'examiner l'efficience de la flexibilité spontanée et de la
flexibilité réactive chez des Pk. Ces types de flexibilité sont supposés être sous-tendus par des
mécanismes de contrôle superviseur, et être dysfonctionnels dans les atteintes frontales et d'allure
frontale. Ainsi, en nous basant sur notre hypothèse de déficience de l'AC, nous pouvons nous
attendre à ce que les Pk soient déficitaires par rapport aux Té dans la flexibilité spontanée et la
flexibilité réactive.
Plusieurs épreuves d'évaluation de la flexibilité ont été utilisées et sont disponibles. Nous avons
opté pour des tâches de fluence verbale qui sont largement utilisées en neuropsychologie. Elles
sont très sensibles aux dysfonctionnements cérébraux, particulièrement aux lésions préfrontales
tel que démontré dans les études des patients cérébrolésés (Butler et al., 1993 ; Randolph et al.,
1993), les études de tomographie par émission de positron (Parks et al., 1988) et les études du
débit sanguin cérébral (Warkentin, Risberg, Nilsson, Karlson et Graae, 1991).
La flexibilité spontanée peut être explorée par une tâche de fluence simple puisqu'elle implique
une génération intrinsèque de réponses selon un critère donné. Baddeley (1993) pense qu'elle
fait intervenir l'AC puisqu'il s'agit d'une tâche non automatique qui nécessite la mise en œuvre
d'une recherche active et contrôlée. Nous nous attendons à ce que les Pk produisent moins
d'exemplaires que les Té dans cette tâche.
La flexibilité réactive peut être mise en évidence à travers une tâche de fluence alternée du fait
qu'elle implique une alternance successive entre deux critères différents. Ceci exige la mise en
œuvre de deux recherches différentes et une progression basée sur un changement successif et

20 Nous référons au concept de "changement d’un programme d’action" pour parler de "set shifting" et de "maintien d’un
programme d’action" pour le "set maintenance".

153
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

rapide entre deux dimensions différentes. Nous avons opté pour une tâche de fluence sémantique
alternée. Nous nous attendons à ce que les Pk produisent moins d'exemplaires et fassent plus de
persévérations que les Té. Cette hypothèse est supportée par les résultats de Caltagirone et al.
(1989) et Canavan et al. (1989).

7.3.1 Matériel
Nous examinons ces deux formes de flexibilité à travers deux tâches de fluence verbale :
• Une tâche de fluence simple à travers laquelle nous cherchons à évaluer la capacité de générer
des mots appartenant à la catégorie "vêtements" ;
• Une tâche de fluence alternée que nous utilisons pour apprécier la capacité de production
alternée de mots appartenant à deux catégories sémantiques : "légumes" et "meubles".
Nous avons opté pour ce design fixe plutôt que pour un design contrebalancé pour 2 raisons :
1. Le choix de ces trois catégories découle d’une étude pré-expérimentale effectuée sur 148
étudiants et qui a porté sur 28 catégories sémantiques. Nous avons constaté que les
productions moyennes de ces catégories sont les plus comparables ;
2. Nous portons un intérêt particulier à l’analyse des stratégies de production. Pour cette
raison nous choisissons pour la tâche de fluence simple, la catégorie "vêtements" afin que
les stratégies de groupement n’oscillent pas en fonction de la catégorie utilisée.

7.3.2 Procédure
Les deux tâches de fluence sont administrées individuellement. Tous les sujets commencent par la
tâche de fluence simple puis celle alternée. Nous effectuons un essai "warming up" avec la
catégorie «moyens de transport» afin de familiariser le sujet avec la tâche.
 Pour la fluence simple, on demande au sujet de produire, pendant 120 sec, le plus de
mots différents appartenant à la catégorie vêtements. La consigne est la suivante :
"J’aimerais que vous me donniez en 2 min, le plus possible de noms de vêtements".
 Pour la fluence alternée, nous demandons au sujet de produire, pendant 120 sec, le
plus de mots différents appartenant aux catégories fruits et meubles en alternant
entre les deux. La consigne est :
"Maintenant, j’aimerais que vous me donniez en 2 min le plus possible de noms de
fruits et de meubles mais cette fois essayez de changer alternativement d’une catégorie à
l’autre".

154
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

Si le sujet cesse l’énonciation des items avant la fin des 120 sec, on l'encourage par : "Vous
avez encore ... secondes : vous pouvez chercher...".
Toutes les réponses sont notées sur une feuille qui comporte quatre cases permettant ainsi de
noter les énoncés du sujet par tranches de 30 sec. Ceci nous permet d’examiner l’évolution des
performances dans le temps.

7.3.3 Indices relevés


Pour la tâche de fluence simple, nous relevons :

• Le nombre de mots corrects appartenant à la langue et à la catégorie émis durant 120 sec ;
• Le nombre d’erreurs commises :
◊ Les répétitions : redites non corrigées des mêmes mots ;
◊ Les intrusions : items ne faisant pas partie de la catégorie.
• Le taux de groupement sémantique : nombre total de mots regroupés rapporté au nombre
total de mots corrects énoncés.
Pour la tâche de fluence alternée, nous considérons :

• Le nombre de couples corrects émis durant 120 sec ;


• Le nombre d’erreurs commises :
◊ Les répétitions ;
◊ Les intrusions ;
◊ Les persévérations : émission de mots consécutifs de la même catégorie.
Un groupement sémantique est noté chaque fois que le sujet émet deux mots ou plus
appartenant à la même sous-catégorie (exemple : série de vêtements d'hommes vs de femmes ;
traditionnels vs modernes ; extérieurs vs intérieurs etc.). Un taux de groupement élevé est un
indice de bonnes stratégies de groupement, par contre lorsque le taux est bas ceci indique que les
groupements sont faibles et dispersés. Les protocoles ont été cotés par deux juges différents. La
corrélation inter-juges est de .82. Les points de différences ont été discutés et une cotation finale a
été adoptée.

155
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

7.3.4 Résultats
7.3.4.1 Analyse de la production
Les figures 7-6a et b illustrent le décours de la production de mots corrects durant les quatre
périodes en fluence simple et alternée.

12 P arkinso niens 5

Nb moyen de couples de
10 Témo ins
Nb moyen de mots

4
8
3
6

mots
4 2

2 1
0 0
0-30 31-60 61-90 91-120 0-30 31-60 61-90 91-120
Fluence sim ple Fluence alternée

Figures 7-6a et b. Nombre moyen (erreur type) de mots produits par les Pk et des Té au cours des quatre périodes
de 30 secondes.

Dans les deux conditions, la production est plus importante durant la première période. En
fluence simple, les Pk produisent 59% des mots durant la période initiale et 23% durant la
deuxième période. Ils ne produisent durant les deux dernières périodes que 18% des mots. Quant
aux Té, ils produisent 47% des mots durant la première période, 25% durant la deuxième et 28%
durant les deux dernières.
En fluence alternée aussi, la période initiale est la plus productive chez les deux groupes : 37%
chez les Pk et 39% chez les Té. Ainsi, la période initiale est la plus productive dans les deux tâches
et pour les deux groupes. Au-delà de cette phase les deux groupes montrent une importante
réduction dans leur production.
En fluence simple, la moyenne de production de mots appartenant à la catégorie "vêtements"
pendant les 120 secondes est de 16.19 (σ= 5.3) chez les Pk et de 23.14 (σ= 5.75) chez les Té.
En fluence alternée, la moyenne de production de couples de mots corrects pendant 120
secondes est de 8.24 (σ= 3.12) chez les Pk et de 10 (σ= 2.85) chez les Té.
Une analyse de variance mixte "groupe" (Pk vs Té) X "type de fluence" (Simple vs alternée) sur
le nombre de mots corrects révèle un effet "groupe" [F(1, 40)= 12.49; p< .001], un effet "type de
fluence" [F(1, 40)= 221.05; p< .0001] et une interaction significative [F(1, 40)= 13.38; p< .001].
La figure 7-7 montre les performances des deux groupes dans les deux conditions.

156
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

31 Parkinsoniens
Témoins
26

Nb moyen de mots
21

16

11

6
Fluence simple Fluence alternée

Figure 7-7. Moyenne (erreur type) des performances des deux groupes en fluence simple et alternée.

L’analyse a posteriori par l’épreuve HSD de Tukey montre que dans la tâche de fluence simple,
les Pk produisent significativement moins de mots corrects que les Té (p< .0005) alors qu’en
fluence alternée, la différence n'est pas significative (p= .3093). Pour toutes les comparaisons
intra-groupe, la production en fluence simple est supérieure à celle en fluence alternée (p< .0005).

7.3.4.2 Processus de contrôle : les réponses non-cibles


L’analyse des réponses non-cibles porte sur les répétitions, les intrusions et les persévérations. Si
les deux premiers types d’erreurs peuvent survenir aussi bien en fluence simple qu’alternée, les
persévérations ne concernent que la fluence alternée. En raison de la faiblesse relative du nombre
d'erreurs, nous n'aurons pas recours à des analyses de variances mais à des analyses descriptives.

7.3.4.2.1 Fluence simple


Comme illustré sur la figure 7-8, le nombre moyen d'erreurs en fluence simple est faible (inférieur
à 0,5 par période) aussi bien chez les Pk que chez les Té. De plus, les répétitions et les intrusions
sont moins nombreuses en période initiale (0-30 sec.) et durant la dernière période (91-120 sec).

0,6
Parkinsoniens
0,5
Témoins

0,4
Nb. moyen d'erreurs

0,3

0,2

0,1

0,0

-0,1
0-30 31-60 61-90 91-120 0-30 31-60 61-90 91-120
Répétitions Intrusions

Figure 7-8. Nombre moyen de répétitions et d'intrusions en fluence simple.

157
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

La médiane d’occurrence des répétitions en fluence simple chez les Pk et les Té est de 1.
L’analyse de la fréquence des répétitions (figures 7-9a et b) montre qu'un Pk fait 6 répétitions,
deux en font 4 chacun, quatre Pk font 2 répétitions chacun et six Pk font une seule répétition
chacun.
Parmi les Té, on constate qu'un seul sujet commet 5 répétitions, un en fait 3, cinq Té font 2
répétitions chacun et six en font 1 chacun. Ainsi, dans chaque groupe 8 sujets (38%) ne font
aucune répétition.
10 25

Parkinsoniens Témoins Parkinsoniens Témoins


8 20

6 15
Nb d'Obs.

Nb d'Obs.
4 10

2 5

0 0
-1 0 1 2 3 4 5 6 7 -1 0 1 2 3 4 5 6 7 -1 0 1 2 3 4 -1 0 1 2 3 4
Nb de répétition en fluence simple Nb d'intrusion en fluence simple

Figure 7-9a. Histogramme des répétitions chez les Pk et Figure 7-9b. Histogramme des intrusions chez les Pk et
les Té en fluence simple.. les Té en fluence simple.

Quant aux intrusions, la figure 7-9 b montre que les deux groupes en commettent très peu avec
une médiane de 0. Un patient fait 3 intrusions et deux en font 1 chacun.
Un seul Té fait deux intrusions en fluence simple.

7.3.4.2.2 Fluence alternée


La médiane d’occurrence des répétitions est de 1 dans les deux groupes. L’analyse de la fréquence
des répétitions (figures 7-10a et b) montre que parmi les Pk, quatre font plus de 2 répétitions alors
que deux Té en font 3 chacun.

10 20

Parkinsoniens Témoins
8
15 Parkinsoniens Témoins

6
Nb d'Obs.

Nb d'Obs.

10

5
2

0 0
-1 0 1 2 3 4 5 6 7 8 -1 0 1 2 3 4 5 6 7 8 -1 0 1 2 3 4 5 6 7 8 -1 0 1 2 3 4 5 6 7 8

Nb de répétition en fluence alternée Nb de persévération en fluence alternée

Figure 7-10a. Histogramme des répétitions chez les Pk Figure 7-10b. Histogramme des persévérations chez les
et les Té en fluence alternée. Pk et les Té en fluence alternée.

158
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

Nous n'avons noté aucune intrusion en fluence alternée. Nous avons plutôt relevé des
persévérations. La médiane des persévérations est de 0 dans les deux groupes. Un seul Té fait 2
persévérations et trois en font 1 chacun.
Quant aux Pk, l’analyse de la fréquence des persévérations indique que quatre patients font
chacun 1 persévération, deux en font 2, trois Pk en font 4 chacun et un patient en fait 7. Ainsi,
presque la moitié des Pk (10 ; soit 48%) commettent au moins une persévération, contre 4 (19%)
Té seulement. L'épreuve non paramétrique de la médiane révèle que les Pk font significativement
plus de persévérations que les Té [X2(1)= 3.86 ; p= .0495].
Ce n'est donc pas l'occurrence des répétitions ou des intrusions qui distingue les Pk des Té,
mais plutôt le nombre de persévérations.

7.3.4.3 Analyse des stratégies de production


En fluence simple, les deux groupes produisent des groupements sémantiques. Cependant, les Pk
en font significativement moins [U= 126.5, Z ajustée = -2.36; p< .0181]. La moyenne du taux de
groupement sémantique est de 45.37% (15.64) pour les Pk et de 59.81% (18.17) chez les Té.
L'analyse du taux de groupement sémantique en fonction des périodes nous donne une idée
sur l'évolution dans l'utilisation des stratégies lors de la production en fluence sémantique simple
(Cf. figure 7-11). L'analyse de variance "groupe" X "période" (0-30, 31-60, 61-90 et 91-120) met
en évidence un effet groupe [F(1, 40)= 7.62 ; p< .01] et un effet période [F(3, 120)=10.54 ; p<
.0001]. L'interaction "groupe" X "période" n'est pas significative [F(3, 120)= 2.02 ; p= .1146].

Parkinsoniens
80
Taux de groupement sémantique

Témoins
70
60
50
40
30
20
10
0
0-30 31-60 61-90 91-120
Périodes

Figure 7-11. Taux de groupement sémantique en fluence sémantique simple pour les 4 périodes.

L'analyse a posteriori montre une différence significative entre Pk et Té dans la dernière période
(p< .05). Les effets de période ne sont significatifs que pour les Pk. En effet, nous notons une
différence significative dans le taux de groupement entre la première et la troisième (p< .05)
période, la première et la quatrième (p< .0001) et entre la deuxième et la quatrième période (p<
.005).

159
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

Une analyse de corrélation montre que la production est hautement corrélée aux taux de
groupement pour la deuxième (r= .33 ; p< .05), la troisième (r= .65 ; p< .0001) et la quatrième
période (r= .78; p< .0001), alors que pour la première période la corrélation n'est pas significative
(r= -.14; p= .36). Ce pattern de corrélation s'applique aussi bien aux Pk qu'aux Té. Il suggère que
durant la première période la production est plus automatique et que plus on avance dans la tâche,
plus la production devient associée à la recherche stratégique.
Ces résultats montrent que les Pk utilisent significativement moins que les Té des stratégies de
groupement sémantique dans leur production en fluence simple. Nous avons également noté que
les taux de groupements sont corrélés avec la production d'exemplaires pour les différentes
périodes, excepté la première.

7.3.5 Discussion
Nous avons examiné, en nous référant à la classification d'Eslinguer et Grattan (1993), deux
formes de flexibilité (spontanée et réactive) à travers deux conditions de fluence verbale (simple et
alternée). Nous nous attendions à ce que les Pk rencontrent plus de difficultés que les Té dans ces
deux formes de flexibilité, ce que nous avons constaté. En effet, s'agissant de la flexibilité
spontanée, la difficulté des Pk est suggérée par leur faible production en fluence simple. Le déficit
de flexibilité réactive s'est quant à lui manifesté par l'importante occurrence des persévérations en
fluence alternée.
Le déficit de la flexibilité spontanée est difficile à analyser. Ceci est dû au fait que la nature des
processus impliqués dans la tâche de fluence simple est encore mal connue. En effet, il est difficile
de déterminer exactement le locus du déficit en fluence puisque les performances dans cette tâche
peuvent être affectées, d'après Ruff, Light et Parker (1997) soit :
 Indirectement par des déficits non frontaux tels que l'attention auditive, le savoir sur les mots
et la mémoire à long terme, et/ou ;
 Directement par des déficits frontaux exécutifs induisant une "brèche" entre l'action et le
savoir.
L'examen de nos résultats suggère que les difficultés des Pk sont plutôt de type exécutif. En
effet, en nous référant à la littérature, nous constatons que les Pk ne présentent pas de déficit
particulier dans l'attention auditive, ni dans le savoir sémantique per se ou de trouble authentique
de la mémoire (Cf. § 3). Le déficit paraît donc plus correspondre à des troubles d'allure frontale.
Ces troubles peuvent porter sur l'effort initial d'initiation de la réponse, sur l'efficience des
stratégies de recherche ou sur les processus de contrôle "on line" des erreurs. Nous avons

160
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

constaté que nos patients ne présentent pas de déficit remarquable d'initiation puisque c'est durant
la première période (0-30) que la production est la plus importante. Quant aux processus de
contrôle "on line" de la productivité, nous n'avons pas noté non plus de fléchissement manifeste
chez les Pk. Ils ne font pas plus de répétitions ou d'intrusions que les Té. Or, pour ce qui est des
stratégies de recherche, nous avons relevé une différence significative entre Pk et Té dans les taux
de groupement sémantique. Nous ne connaissons pas d'études ayant analysé le groupement
sémantique selon les différentes périodes de la tâche chez des Pk. Nous avons constaté que la
chute des taux de groupement augmente à mesure qu'on avance dans la tâche. Ceci ne peut être
dû à une fatigabilité plus importante des Pk puisque l'analyse chronologique (temporelle) montre
que le pattern de performance est similaire dans les deux groupes. Cette analyse nous a permis de
comprendre que c'est au-delà de la première période "automatique", que la recherche active et
stratégique fait le plus défaut chez les Pk. En effet, durant la première période la production n'est
pas corrélée avec le taux de groupement alors qu'elle l'est pour les périodes suivantes. Il est
possible que durant cette période initiale, les sujets énoncent les mots les plus fréquents, la
productivité serait donc plus automatique que stratégique. Par contre, au-delà de la première
phase, le déploiement de stratégies de production devient déterminant. Ceci pourrait être dû au
fait que la tâche de fluence simple est "effortful" et qu'elle exige l’intervention du SAS puisque le
sujet ne dispose pas de schémas préétablis pour faire face aux demandes de la tâche. Il est appelé à
mettre en œuvre de nouvelles stratégies et c'est le déploiement de ces stratégies qui fait défaut aux
Pk. Notons que la catégorisation est moins étudiée dans la littérature que la production. Nos
résultats concordent avec ceux de Raskin et al. (1992) qui constatent qu'en fluence sémantique, les
Pk non déments font moins de groupements sémantiques que les Té.
Nos résultats relatifs au déficit des Pk en fluence simple vont dans le même sens que ceux
d'Auriacombe et al. (1993) qui notent que les Pk produisent significativement moins d'items que
des Té en fluence simple (catégorie "Fruits"). Nos résultats s'accordent aussi avec ceux de Hanes,
Andrewes et Pantelis (1995b) qui constatent chez des Pk, des malades de Huntington et des
schizophrènes une réduction de la production en fluence. La flexibilité spontanée semble donc
être sensible à plusieurs types de pathologies sous-corticales.
S'agissant de la flexibilité réactive, nous constatons que les Pk en tant que groupe, sont aussi
productifs en fluence alternée que les Té mais font significativement plus de persévérations. Ces
résultats concordent avec ceux de Caltagirone et al. (1989) et Canavan et al. (1989) qui ne
constatent pas de diminution du nombre de catégories dans le WCST. En revanche, ils notent une
augmentation significative des erreurs persévératives. Ce résultat rappelle l'augmentation des

161
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

persévérations chez les patients ayant une lobectomie (Milner, 1963) ou présentant des lésions
frontales sélectives (Drewe, 1974).
L'occurrence des persévérations signe une faille dans le contrôle attentionnel de l'action. Les
persévérations apparaissent en fluence alternée lorsque la modalité des réponses en cours n'est pas
inhibée et changée par une autre appropriée. La différence entre les Pk et les Té est significative.
Downes et al. (1993) relèvent également une différence significative entre les Pk et les Té quant au
nombre de persévérations en fluence alternée mixte (sémantique et phonémique). Néanmoins,
nous n'avons aucune information sur le nombre de sujets ayant commis les persévérations ni de
données descriptives (moyenne, écart type, médiane) relatives à ces persévérations. D'autres
auteurs, comme Hanes et al. (1995a) et Troyer et al. (1998) ne rapportent rien non plus sur le
nombre ou le type d'erreurs commises par les Pk en fluence.
Nos résultats montrent que les deux groupes ne diffèrent pas quant à l'occurrence des
répétitions dans les deux conditions de fluence. De même, ils ne diffèrent pas quant à l'occurence
des intrusions. Gurd (1995) se réfère au modèle de Norman et Shallice (1986) et avance que
l'apparition des intrusions est le résultat d'une activation de schèmes d'actions erronés. Les
intrusions seraient le signe d'un important dysfonctionnement des mécanismes de contrôle
inhibiteurs. Nos patients, tout comme les Té, ne font pas d'intrusions en fluence alternée et en
font très peu en fluence simple. Donc, contrairement aux malades d'Alzheimer, les Pk font très
peu d'intrusions (Kramer et al., 1994).
Gurd (1995) distingue 3 types d'erreurs faites par les Pk en fluence alternée dont les erreurs de
contention "scheduling" incluant les répétitions et les persévérations qui constituent 37% des
erreurs des Pk contre 43% chez les Té. Or, il nous paraît peu défendable de mélanger les
répétitions et les persévérations. Ces deux types d'erreurs semblent faire appel à deux processus
de contrôle différents. Pour intercepter les répétitions, le sujet doit produire tout en conservant à
court terme ce qui a été dit. Pour ne pas faire de persévération, le sujet doit produire en alternant
successivement les processus d'activation - désactivation.
Plusieurs autres travaux font remarquer que les Pk ont plus de difficultés dans des tâches de
flexibilité que les Té. Pour Cools et al. (1984), les difficultés de flexibilité s'observent aussi bien
lors de tests verbaux (fluence) que lors de tests figuratifs (classement et catégorisation de dessins)
ou moteurs (taper du doigt de façon séquentielle). Le déficit de la flexibilité réactive est également
noté par Owen et al. (1993a), mais chez les patients non traités. Ces résultats ne concordent pas
totalement avec ceux de Downes et al. (1989) qui observent que les Pk (traités ou non) ont un
déficit sélectif de flexibilité extra-dimensionnelle contrastant avec une préservation de la flexibilité
intra-dimensionnelle. D'ailleurs Downes et al. (1989) et Downes et al. (1993) constatent que les Pk

162
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

n'ont pas de difficulté à alterner entre des catégories appartenant aux mêmes dimensions (intra-
dimensional shifting) mais échouent dans l'alternance entre des catégories appartenant à des
dimensions différentes (extra-dimensional shifting). Il nous paraît difficile de faire une distinction
franche entre des catégories "extra-dimentionnelles" et "intra-dimentionnelles". De plus, alterner
entre deux catégories "extra-dimentionnelles" n'est pas forcément plus difficile que d'alterner
entre deux catégories "intra-dimentionnelles". Ces dernières peuvent être plus contraignantes du
fait de l'importante interférence qui peut avoir lieu entre des dimensions proches ou similaires. Il
serait intéressant de comparer l'alternance entre deux catégories proches sémantiquement comme
"Fruits" et "Légumes" à celle de critères différents (fluence sémantique vs phonémique).
Un déficit en fluence simple et alternée est aussi rapporté par Troyer et al. (1998) chez des Pk
déments et des Alzheimers. En revanche, les Pk non déments examinés ont des performances
comparables à celles des Té pour tous les indices relevés. Notons que dans la tâche de fluence, les
auteurs donnent seulement 60 secondes aux sujets (contrairement aux 120 habituelles). Ils ne
laissent donc pas assez de temps aux patients pour déployer des stratégies de production efficaces
et pouvoir ainsi observer les différences entre les groupes. D'autant plus que la période 0-30
secondes est sensée être une phase de production automatique qui ne nécessite pas de recherche
active et qu'elle est peu discriminative.
Gurd et Marshall (1995) et Gurd (1995) rapportent également une équivalence des
performances en fluence alternée entre Pk et Té. Cependant, la tâche utilisée consiste à alterner
entre des séries automatiques (nombres, jours et mois). Toutefois, certains auteurs (Stankov,
1988 ; cité par La Rue 1992) ne parlent de flexibilité que lorsque les programmes d'actions en
question sont exigeants en ressources attentionnelles. De même, Troyer et al. (1998) et Hanes et
al. (1995a) ne relèvent pas de déficit spécifique d'alternance en fluence verbale chez les Pk.
Cependant, pour le premier travail, nous manquons d'informations sur le nombre d'erreurs. Quant
au second travail, il y a une présentation partielle des résultats et aucune analyse des erreurs. Or,
c'est dans la production d'erreurs qu'il y a des différences entre Pk et Té.
La discordance des résultats pourrait être due aux différences des populations étudiées
(déments vs non déments ; traités vs non traités) et du type de flexibilité exigé par les tâches. En
fluence verbale, les résultats diffèrent aussi en fonction du critère en question (sémantique ou
phonémique), du niveau d'exigence des tâches (catégories automatiques ou contrôlées), de la
longueur de la tâche (60 sec - 5 minutes), des indices relevés (production, répétitions, intrusions,
persévérations) et des critères de cotation etc.
Par ailleurs, dans notre travail, le déficit observé en fluence sémantique simple et alternée ne
peut être interprété qu'en référence à des difficultés de flexibilité spontanée et de flexibilité

163
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

réactive. Des performances faibles en fluence, simple et alternée, peuvent refléter un


ralentissement général des processus cognitifs et une contamination par des difficultés motrices de
production verbale. En effet, on peut penser que les difficultés motrices affectent la performance
en fluence verbale et que le déficit enregistré reflète plus les conséquences de la "bradykinésie"
que des déficits cognitifs. Or, nous avons sélectionné des patients ayant un score faible dans
l'échelle de Hoehn et Yahr (1967) de sévérité de la symptomatologie motrice. De plus, les Pk ont
une production analogue à celle des Té en fluence alternée, supposée être plus effortful que la
fluence simple. Si les difficultés motrices sont significatives, elles se seraient répercutées sur toutes
les tâches et non seulement en fluence simple. Enfin, la littérature nous renseigne que le déficit en
fluence verbale n'est associé ni aux difficultés articulatoires ni à la vitesse de récitation (Gurd et
Ward, 1989 ; Matison et al., 1982). En effet, Gurd et Marshall (1995) administrent à des Pk des
tâches de fluence verbale tout en mesurant la vitesse de la parole pour une séquence automatique
(jours de la semaine). Ils n'obtiennent pas de corrélation entre les résultats aux tâches de fluence et
à la tâche de prononciation. Ils concluent que la faible production des Pk en fluence n'est pas
associée à une lenteur de la motricité de la parole. Le déficit en fluence n'est donc pas dû à
l'artefact d'un facteur moteur mais à des difficultés cognitives. Cependant, le faible score des Pk à
une tâche de dénomination de dessins et sa forte corrélation avec les performances en fluence
verbale suggèrent plutôt un déficit de recherche de mots.
L'hypothèse selon laquelle les déficits observés en fluence traduisent une détérioration générale
ne nous semble pas soutenable pour interpréter nos résultats. Rappelons que nos patients ne sont
pas déments et que leur niveau intellectuel général est comparable à celui des Té. De plus, la
corrélation des scores en fluence simple (r= -.02 ; p= .9425) et alternée (r= .33 ; p= .1457) avec le
QI n'est pas significative. Hanley et al. (1990) examinent la fluence verbale chez des Pk et des Té,
ils remarquent que les différences disparaissent lorsqu'ils covarient les scores en fluence avec ceux
au Mill Hill (intelligence verbale générale). Bayles et al. (1983) pensent que cette procédure de
contrôle statistique ne fait qu'éliminer la composante verbale d'un test de fluence. Il aurait été plus
intéressant d'utiliser des tâches de fluence phonémique en parallèle avec les tâches de fluence
sémantique. En effet, la fluence phonémique est plus sensible aux lésions frontales et d'allure
frontale que la fluence sémantique. Celle-ci serait plus sensible à la maladie d'Alzheimer du fait
qu'elle nécessite l'intégrité du savoir sémantique (Monsch et al., 1992). Par contre, la tâche de
fluence phonémique dépendrait plutôt de la capacité de générer une stratégie de production dans
une situation nouvelle non écologique en comparaison aux catégories sémantiques, plus
écologiques. La comparaison des performances des Pk dans les deux types de tâches a donné
naissance à une controverse. Des déficits sont rapportés aussi bien en fluence sémantique

164
___________________________________________________________________ Flexibilité cognitive

(Gotham et al., 1988 ; Auriacombe et al., 1993) que phonémique (Lees et Smith, 1983) ou aux
deux (Weingartner et al., 1984 ; Taylor et al., 1986a ; Gurd et Ward, 1989 ; Flowers et al., 1995) ou
alors dans aucune d'entre elles (Hanley et al., 1990 ; Downes et al. 1993). Dans notre travail, nous
avons été contraints à ne pas utiliser la fluence phonémique parce que notre population est
constituée essentiellement de sujets non scolarisé et nous savons que cette tâche est fortement
influencée par le niveau de scolarité (Cf. § 3).

Nos résultats suggèrent que les deux formes de flexibilité décrites par Eslinguer et Grattan
(1993) sont altérées chez les Pk. En nous référant au modèle de Norman et Shallice, cette
altération serait associée à un défaut du SAS qui serait impliqué dans :

• La réalisation de tâches non routinières telles que l'abandon d’anciens programmes


surappris de production de mots sans contrainte sémantique et/ou phonémique (flexibilité
spontanée) ;
• La réalisation de réponses persévératives qui sont dues à la non modulation du gestionnaire
des priorités de déroulement (contention scheduling) dans les situations qui exigent une
régulation rapide en fonction des changements de l’environnement (flexibilité réactive).

165
7.4 Planification de l'action
La planification est considérée comme la capacité d'élaboration et d'organisation d'étapes et
éléments nécessaires pour accomplir une intention ou réaliser un but (Lezak, 1995). Elle est la
fonction la plus associée aux lobes frontaux (Fuster, 1989). Son examen entre dans le cadre de
l'évaluation de l'efficience du SAS tel que conceptualisé par Norman et Shallice (1986). Son
altération dans la mP est très plausible du fait de la suspicion de la perturbation des circuits
striato-frontaux secondaire à cette maladie. Cette altération est suggérée par Taylor et al. (1986a)
et examinée par Morris et al. (1988), Owen et al. (1990, 1992) et Hanes et al. (1995b).
Plusieurs instruments d'évaluation de la planification sont disponibles. Pour évaluer la
planification chez des patients frontaux, Lhermitte (1972) utilise la Figure Complexe de Rey, les
Cubes de Kohs et le récit. Lezak (1995) décrit d'autres épreuves comme les Labyrinthes de
Porteus et les épreuves de tours : Tour de Hanoi, Tour de Toronto et Tour de Londres. Nous
avons choisi la Tour de Londres car elle se distingue des autres sur plusieurs plans :

• C’est une épreuve développée dans le cadre d'un modèle théorique précis : celui du SAS ;
• Elle possède différents niveaux de difficulté ;
• Elle ne fait pas appel à des compétences perceptives spécifiques ;
• Les composantes spatiales (à l'opposé des labyrinthes) motrice et mnésique sont faibles ;
• Elle ne comporte pas de contrainte temporelle comme par exemple dans les "cubes de Kohs" ;

• De plus, on suppose, que les sujets n'ont pas de programmes de routine pour résoudre les
problèmes présents dans cette épreuve. Les sujets doivent générer eux-mêmes des plans à
partir de la configuration des données présentées. L'épreuve fait ainsi appel à la planification,
l'application de stratégies et la prise de décision dans des problèmes non routiniers.

La Tour de Londres est conçue comme une tâche complexe de résolution de problèmes
impliquant une succession de décisions entre plusieurs possibilités de mouvements dont le
nombre n'est pas spécifié dans les consignes. La résolution des problèmes de la Tour de Londres
implique un réarrangement de boules coloriées dans trois tiges afin de reproduire une
configuration donnée présentée chaque fois comme modèle. Les consignes insistent sur deux
aspects : reproduire le modèle avec un nombre minimum de mouvements et le faire le plus
rapidement possible. Ceci exige une mise en action de stratégies donc d'un plan d'action.
Nous examinons à ce niveau de l'analyse de la fonctionnalité du SAS, les performances des Pk
dans une tâche de planification. Nous cherchons également à analyser nos résultats en fonction
d'autres données neuropsychologiques à savoir l'intelligence, la vitesse de traitement, la mémoire
visuo-spatiale et les fonctions exécutives. L’examen des données de la littérature (Owen et al.,
_______________________________________________________________ Planification de l'action

1990, 1992 ; Lange et al., 1992) nous amène à nous attendre à ce que les Pk soient déficients par
rapport aux Té dans la planification d'une action nécessitant la mise en œuvre des étapes
nécessaires pour accomplir un but.

7.4.1 Matériel
La version manuelle de l’épreuve de la Tour de Londres21 (Shallice, 1982) est composé de :
 Deux supports en bois identiques ayant chacun une base de 20 cm x 40 cm sur laquelle
reposent 3 tiges verticales de taille différente (7, 13 et 19 cm ). Un support sert aux
manipulations du sujet et l’autre support est destiné à l'examinateur pour la présentation du
modèle de chaque item de l'épreuve.
 Six boules de trois couleurs différentes jaune, rouge et bleu (trois pour chaque support).
Les tiges sont numérotées de façon à ce que l'examinateur puisse lire les numéros qui y sont
inscrits :
 La tige 1 correspond à la petite tige qui ne peut comporter qu'une seule boule ;
 La tige 2 correspond à la tige moyenne qui peut comporter deux boules ;
 La tige 3 correspond à la grande tige qui peut comporter trois boules.

1 2 3 1 2 3

Configuration de départ Configuration d’arrivée


Figure7--12. Exemple de problème à initiateur positif exigeant 5 mouvements.

Dans chaque essai, les boules rouge, bleu et jaune sont placées dans une position prédéterminée
dans les tiges du support du sujet et les trois autres boules sont placées dans une autre position
prédéterminée dans les tiges du support de l'examinateur. L'épreuve comporte 12 problèmes
ayant des niveaux de difficulté variable. Le niveau de difficulté dépend du nombre et de la
complexité des sous-buts exigés pour résoudre les problèmes présentés. Il y a 2 séries de problèmes :

♦ Des problèmes nécessitant 3 mouvements au minimum.


♦ Des problèmes nécessitant 5 mouvements au minimum. Dans ce cas, on distingue 3 types de
problèmes (Cf. Tableau 7--10).

21 Nous remercions Mr Van der Linden qui nous a donné l'occasion de construire cette tâche à partir de sa propre adaptation
(1992) de l'épreuve préconisée par Shallice (1982).

167
_______________________________________________________________ Planification de l'action

Tableau 7-10. Types de problèmes dans la Tour de Londres

Type Symbole Caractéristique


Avec initiateur positif 5 I+ Dès le premier mouvement, le sujet peut placer directement une boule à la
bonne place.

Sans initiateur 5N Neutre

Avec initiateur négatif 5 I- Lors du premier mouvement, le sujet doit s'empêcher de mettre directement
une boule à la bonne place, car cela bloquerait la résolution du problème.

Au total, nous avons 3 items nécessitant au moins 3 mouvements et 9 items nécessitant au


moins 5 mouvements (3 de chaque type). Les items sont distribués de façon quasi-aléatoire.

7.4.2 Procédure
La tâche du sujet consiste à changer la disposition des boules afin de reproduire avec le minimum
de temps et de mouvements la disposition des boules d'un modèle présenté par l'examinateur. La
passation est individuelle. La consigne est la suivante :
"Voici 2 supports sur lesquels sont disposées 3 boules, arrangées d'une certaine manière.
Vous devez déplacer les boules du support de départ que voici <montrer le support le
plus proche du sujet>afin qu'il soit arrangé comme le support du modèle que voici
<montrer le support le plus proche de l'examinateur>. Le but de ce test est
d'arriver au modèle en réalisant le moins de déplacements possibles. Attention,

• Vous ne pouvez utiliser qu'une seule main, vous ne pouvez donc déplacer qu'une seule boule
à la fois.
• Vous ne pouvez pas déposer de boules à côté du support.
• Vous ne pouvez pas mettre plus d'une boule sur la première tige <la montrer> ni plus de
deux boules sur la seconde tige <la montrer>".
Nous répétons la consigne afin de nous assurer que le sujet l’a bien comprise. Nous effectuons
deux essais pour nous assurer de la bonne compréhension de la consigne et pour familiariser le
sujet avec le matériel. Les deux essais sont simples et se résolvent chacun en 2 mouvements. Pour
chacun des deux essais, si le sujet ne parvient pas à trouver la solution en deux mouvements,
nous la lui donnons et lui faisons recommencer l'item. S'il échoue à nouveau, nous arrêtons la
tâche. Par la suite, nous passons à l'épreuve proprement dite. Nous enregistrons la latence du
premier et du deuxième mouvement, l'identité du mouvement (par exemple boule R vers la tige
2), le nombre total de mouvements et le temps total pour résoudre chaque problème.

L'examinateur doit donc, entre autre, noter le détail des déplacements. Tout retrait d'une boule
constitue un mouvement. Si le sujet fait des mouvements trop rapides pour que nous ayons le

168
_______________________________________________________________ Planification de l'action

temps de les noter, nous lui demandons de ralentir, sinon, nous n'imposons aucune contrainte de
temps. Si le sujet fait plus de 30 mouvements, on arrête l'item.

7.4.3 Indices relevés


Deux types d'indices sont prévus : des indices temporels et des indices d'exactitude.
 Les indices temporels sont chronométrés en sec pour les quatre types de problèmes (3
mouvements, 5 mouvements N, 5 mouvements I+ et 5 mouvements I-).
 Le temps de latence initial est le temps moyen entre la présentation du problème et le
premier mouvement.
 Le temps de latence du deuxième mouvement est le temps moyen entre l'achèvement du
premier mouvement et l'exécution du deuxième.
 Le temps total de réalisation : temps moyen entre la présentation de chaque problème et
le dernier mouvement fait par le sujet.

 Les indices d'exactitude : pour chaque type de problème deux aspects sont mesurés et calculés.
 Nombre moyen de mouvements pour chaque type de problème offrant une mesure
générale de l'habilité de résolution du problème.
 Proportion de problèmes résolus avec le nombre minimal de mouvements offrant une
mesure de l'efficience de la planification.
 Nombre de problèmes non résolus où le sujet n'arrive pas à résoudre le problème.

Les données temporelles et le nombre de mouvements des items non résolus ne sont pas
comptabilisés avec les autres indices.

7.4.4 Résultats
7.4.4.1 Problèmes à 3 mouvements
7.4.4.1.1 Indices temporels
Le tableau 7--11 montrer les performances des Pk et des Té dans les problèmes pouvant être
résolus en 3 mouvements. Les Té sont plus performants que les Pk dans tous les indices retenus.
Les analyses comparatives entre les 2 groupes effectuées par le U de Mann et Whitney, ne
révèlent aucune différence significative relative aux indices temporels.
~ temps de latence initial: U = 135 ; Z ajustée = -.03 ; p= .9716
~ temps de latence du 2ème mouvement U = 106 ; Z ajustée = -1.09 ; p= .2740 N. S.
~ temps total de réalisation: U = 133.5 ; Z ajustée = -.11 ; p= .9153

169
_______________________________________________________________ Planification de l'action

Tableau 7-11. Moyennes (écart types) des données temporelles et d'exactitude.

Problèmes à 3 mouvements Parkinsoniens Témoins

Temps initial de latence 4.72 4.14


(3.03) (1.53)

Temps de latence du 2ème mouvement 3.03 2.36


(1.57) (0.57)

Temps total d'exécution 14.28 11.02


(12.03) (4.91)

Nombre de mouvements 3.59 3.25


(1.45) (0.54)

Proportion de problèmes résolus avec le nombre minimum de mouvements 2.54 2.67


(0.66) (0.48)

7.4.4.2 Indices de l'exactitude


Nous notons que les Té sont plus performants dans tous les indices des mesures de l'exactitude.
Cependant, les différences restent non significatives.

~ nombre de mouvements : U = 119.5 ; Z ajustée = -.69 ; p= .4885.

~ proportion de problèmes résolus avec N. S.


U = 128 ; Z ajustée = -.35 ; p= .7232.
le minimum de mouvements :

Ainsi, dans les problèmes à 3 mouvements, les différences entre Pk et Té sont non
significatives dans tous les indices de la performance (temporels et d'exactitude).

7.4.4.3 Problèmes à 5 mouvements


7.4.4.3.1 Indices temporels
Le tableau 7--12 montre que les Pk mettent plus de temps que les Té dans tous les indices
temporels de chaque type de problème, sauf pour le temps de latence initial des problèmes 5+.
Les écarts types sont plus larges chez les patients, témoignant d'une plus grande variabilité des
performances.

Les comparaisons entre les performances des Pk et des Té dans tous les indices temporels
sont effectuées après une transformation logarithmique des données. Elle ont été conduites par
une analyse de variance mixte avec "groupe" (2) comme facteur intra-sujets et "type de problème"
(3) comme facteur intra-groupe". Toutes les comparaisons se sont avérées statistiquement non
significatives. Les Pk ne prennent pas plus de temps que les Té pour commencer la résolution des
problèmes, pour effectuer le deuxième mouvement ou pour exécuter la totalité de la tâche.
En effet, s'agissant du temps de latence initial, nous n'avons pas observé d'effet "groupe" [F(1,
40)= .05; p= .8271], ni d'effet "type de problème" [F(2, 80)= 2.25; p= .1130] ni d'interaction [F(2,

170
_______________________________________________________________ Planification de l'action

80)= 1.28; p= .2836]. Pour le temps de latence du deuxième mouvement, l'effet "groupe" est non
significatif [F(1, 40)= 2.65; p= .1134] de même que pour l'effet "type de tâche" [F(2, 80)= 1.79;
p= .1749 NS] et l'interaction [F(2, 80)= 1.39; p= .2547]. Enfin, pour le temps total, nous n'avons
pas trouvé d'effet "groupe" [F(1, 40)= 2.14; p= .1530]. Cependant, nous avons relevé un effet
"type de tâche" [F(2, 80)= 10.94; p< .0001] montrant que les problèmes à initiateurs négatifs
nécessitent plus de temps que les problèmes neutres, qui à leurs tours exigent plus de temps
d'exécution que les problèmes à initiateurs positifs. L'interaction n'est pas significative [F(2, 80)=
.17; p= .8381].
Tableau 7-12. Moyennes (écart types) des données temporelles.

Problèmes à 5 mouvements Parkinsoniens Témoins

5 I+ 4.56 4.7
(2.75) (1.81)

Temps de latence initial 5N 4.91 4.36


(2.42) (1.38)

5 I- 4.60 3.75
(2.82) (1.52)

5 I+ 5.82 3.36
(6.62) (1.1)

Temps de latence du 2ème mouvement 5N 3.44 3.1


(1.17) (1.18)

5 I- 4 3.73
(2.02) (1.38)

5 I+ 26.56 21.42
(15.09) (8.75)

Temps total d'exécution 5N 40.72 32.27


(32.63) (21.37)

5 I- 43.80 37.53
(21.36) (19.48)

Pour le "temps total d'exécution" nous notons, sur le graphique 7--12, que tous les sujets
passent plus de temps dans les problèmes à initiateurs négatifs que pour le reste et plus de temps
dans les problèmes neutres que pour les problèmes à initiateurs positifs.

171
_______________________________________________________________ Planification de l'action

50
45

Temps total d'exécution (sec.)


40

35
30

25
Parkinsoniens
20 Témoins

15
5 I+ 5N 5 I-
Type de problème

Figure 7-13. Temps total d'exécution (brut) des différents problèmes de la Tour de Londres.

Ceci est une preuve en faveur de la validité de la distinction des différents types de problèmes.
Cependant, cette tendance ne se manifeste pas pour les deux autres données temporelles : temps
de latence initial et temps de latence du 2ème mouvement, comme on peut le constater sur le
tableau 7--12.

7.4.4.3.2 Indices de l'exactitude


Le tableau 7--13 présente les performances des Pk et des Té aux indices d'exactitude. Les Té sont
plus performants pour tous les indices. Un pattern bien clair se dégage pour les deux populations.
Les problèmes à initiateurs négatifs sont moins bien réussis que les problèmes neutres qui sont à
leur tours moins bien réussis que les problèmes à initiateurs négatifs.
Tableau 7-13. Moyennes (écart types) des données de l'exactitude.

Problèmes à 5 mouvements Parkinsoniens Témoins

5 I+ 6.65 6.21
(1.53) (1.38)

Nombre de mouvements 5N 10.44 8.34


(3.86) (2.99)

5 I- 11.92 9.87
(4.33) (3.73)

5 I+ 1.85 2.19
(0.8) (0.93)

Proportion de problèmes résolus avec 5 N 0.92 1.52


le nombre minimum de mouvements (0.86) (0.98)

5 I- 0.77 0.95
(0.73) (0.86)

5 I+ 0 0

Nombre de problèmes non résolus 5N 0.23 0.1


(0.44) (0.3)

5 I- 0.46 0.1
(0.66) (0.3)

172
_______________________________________________________________ Planification de l'action

Les analyses de variance sur les données transformées (racine carrée) révèlent des différences
significatives entre les Pk et les Té. En effet, s'agissant du nombre moyen de mouvements, nous
observons un effet groupe [F(1, 40)= 7.33; p< .0099] : les Pk font significativement plus de
mouvements que les Té pour résoudre les problèmes. Nous notons aussi un effet type de
problème [F(2, 80)= 12.86; p< .0001] : les problèmes les plus difficiles 5 I- sollicitent le plus de
mouvements suivis par 5 les problèmes N puis par 5 I+, mais l'interaction n'atteint pas le seuil de
la signification [F(2, 80)= .12; p= .8889 NS]. Le HSD de Tukey montre qu'au niveau de chaque
type de problème la comparaison est significative (p< .001). Les Pk font plus de mouvements que
les Té dans tous les types de problèmes à 5 mouvements (Cf. figure 7--13).

Proportion de problèmes résolus


13 2.4

A B
12 2.2
Parkinsoniens
Nb de mouvements

2 Témoins
11
1.8
10
1.6
9
1.4
8
1.2

7 1

6 0.8

5 0.6
5 I+ 5N 5 I- 5 I+ 5N 5 I-

Type de problèmes
Figure 7-14. Nombre moyen (brut) de mouvements (A) et proportion de problèmes résolus (B) avec le nombre
minimum de mouvements pour chaque type de problèmes

S'agissant de la proportion de problèmes résolus avec le minimum de mouvements nous


observons un effet "groupe" [F(1, 40)= 19.69; p< .0001] qui indique que les Pk résolvent moins
de problèmes avec le nombre optimal de mouvements que les Té. Nous observons aussi un effet
"type de tâche" [F(2, 80)= 10.5; p< .0001] mais l'interaction reste non significative [F(2, 80)= .83;
p= .4383].
Le nombre d'échec est faible dans les deux groupes. L'analyse de variance n'est pas effectuée à
cause de l'effet plancher. Nous notons dans le tableau 7--13 que les Pk échouent généralement
plus que les Té. Les deux groupes n'échouent pas dans les problèmes à initiateurs positifs mais en
l’absence d'initiateurs ou lorsque les initiateurs sont négatifs certains sujets des deux groupes
échouent. La proportion d'échec est plus importante pour les problèmes à initiateur négatif que
pour les problèmes neutres.
Au total, seuls les indices d'exactitudes différencient les performances des Pk de celles des Té
dans la Tour de Londres.

173
_______________________________________________________________ Planification de l'action

7.4.4.4 Examen des Corrélations


Les calculs de corrélation ont été effectués entre les deux indices d'exactitude qui différencient le
mieux les Pk des Té (nombre de mouvements dans chaque type de problème et proportion de
réussite avec le nombre minimum de mouvements) et les données neuropsychologiques pour
chaque groupe séparément.
Les données relatives à la vitesse de réaction simple et à la vitesse de traitement, de même que
celles relatives à l'intelligence visuo-spatiale et l'empan visuo-spatial ne sont pas significativement
corrélées aux indices d'exactitude dans la tour de Londres aussi bien chez les Pk que chez les Té
(Cf. Tableau 7--14). La seule corrélation significative, à ce niveau, est observée chez les Té avec la
performance au test d'intelligence PM 47.

Tableau 7-14. Principales corrélations significatives dans les deux groupes séparément.

Variables Parkinsoniens Témoins


Le TR moyen (avec stimulus d'alerte à intervalle varié) NS NS

Le TRC tâche jugement perceptif (vitesse de traitement) NS NS

Le score au PM 47 NS - nb. mvts 5 I-

- réussite à 5 I-

L'empan au BTT NS NS

"Additional Thinking Time" (B - A) dans le Hayling - nb mvts 5 I- NS

Fluence simple Production - nb mvts 5 I+ NS

Répétitions NS NS

Fluence alternée Production - réussite à 5 I+ NS

Répétitions - nb mvts 5 N NS

- réussite à 5 N NS

Persévérations NS NS

Intrusions - nb mvts 5 I- NS

Par ailleurs, des corrélations significatives ont été observées chez les Pk entre certains indices
d'exactitude et certains indices de la performance dans des tâches sensées évaluer les fonctions
exécutives.
* Le nombre de problèmes résolus avec le minimum de mouvements dans les problèmes à
5 mouvements à initiateur négatif est corrélé négativement avec l'indice d'inhibition "additional
thinking time" du Hayling [rs = -.61; p< .02], il est corrélé positivement, à un degré très proche de
la signification, avec le nombre d'intrusion dans la fluence alternée [rs = -.50; p= .08] ;

174
_______________________________________________________________ Planification de l'action

* Le nombre de mouvements dans les problèmes à 5 mouvements avec initiateurs positifs


est corrélé négativement au nombre de mots produits en fluence sémantique simple [rs = -.56; p<
.048].
* Le nombre de problèmes résolus avec le minimum de mouvements dans les problèmes
neutres à 5 mouvements est corrélé avec le nombre de réponses doubles à l'épreuve de fluence
alternée [rs = -.58; p< .03]. Le nombre de mouvements dans ce type de problème est aussi corrélé
avec cette variable [rs = -.61; p< .02].

7.4.5 Discussion
Dans notre évaluation du fonctionnement du SAS, nous avons examiné l'efficience de la capacité
de planification de l'action chez les Pk. Cet examen nous a conduit à l'utilisation d'une tâche non
routinière exigeant la formulation et l'organisation de plans d'action. Les résultats montrent que
les Pk ont des capacités intactes de planification lorsque les problèmes ne sont pas complexes (à 3
mouvements). Cependant, lorsque les problèmes deviennent plus complexes, les déficits se
manifestent. Les différences sont notées dans les mesures d'exactitude. Les Pk font plus de
mouvements pour résoudre les problèmes et résolvent moins de problèmes avec le minimum de
mouvements. En revanche, nous n'avons pas observé de différence entre Pk et Té quant aux
mesures temporelles. Ceci suggère que, lors des situations complexes, les Pk ne planifient pas
efficacement la séquence des mouvements et des sous-buts à réaliser. Ceci entraînerait des
solutions désorganisées nécessitant plus de mouvements et par conséquent moins de problèmes
résolus avec le minimum de mouvements. Ces résultats confirment l'altération de la planification
dans l'épreuve de la Tour de Londres chez les Pk décrite par Morris et al. (1988) et Owen et al.
(1990). La comparaison de nos résultats avec les données de la littérature confirme bien
l'unanimité sur la déficience de la planification. Cependant le pattern d'évolution des indices
reflétant ce déficit diffère d'un travail à l'autre.
Pour Morris et al. (1988) et Owen et al. (1992) qui travaillent en collaboration, le déficit de
planification se manifeste seulement par l'allongement du temps de latence initial. Avec
l’aggravation de la maladie, les indices d'exactitude différencient eux aussi les Pk des Té (Owen et
al. 1990 et Owen et al. 1992). Lorsque les patients ne sont pas traités par la L-dopa, leurs
performances à la Tour de Londres chutent significativement aussi bien dans les indices
temporels que d'exactitude (Lange et al., 1992). Dans notre travail, ce ne sont pas les indices
temporels mais plutôt les indices d'exactitude qui différencient les Pk des Té. Plusieurs raisons
peuvent expliquer ces différences. Nous supposons que les différences dans les critères de
sélection des patients et des procédure d'évaluation peuvent aider à expliquer ces différences.

175
_______________________________________________________________ Planification de l'action

L’épreuve de la tour de Londres est utilisée dans toutes ces études. Elle est la même sur le plan
de la conceptualisation, mais la présentation, les mesures et les caractéristiques intrinsèques des
problèmes de planification proposés diffèrent. Il est vrai que le chronométrage du temps, manuel
dans notre étude, est moins précis que le chronométrage électronique de Morris et al. (1988), de
Lange et al. (1992) ou de Owen et al. (1992). Cependant, il y a lieu de penser qu'un effet
"passation informatisée" peut à son tour influencer le comportement des sujets examinés et de la
sorte les résultats. De plus, le type de problèmes proposés aux Pk dans notre travail diffère de
ceux de Morris et al. (1988), de Lange et al. (1992) et de Owen et al. (1992). Nous avons utilisé la
forme manuelle adaptée par Van der Linden et al. (1992) version plus proche de celle proposée
par Shallice (1988) comportant 12 problèmes (3 à 3 mouvements et 3 séries de problèmes à 5
mouvements dont 3 avec des initiateurs positifs, 3 avec initiateurs négatifs et 3 neutres). Les
problèmes proposés par Morris et al (1988), Lange et al. (1992) et Owen et al. (1992) ne
comportent pas des problèmes ayant différents niveaux d'initiateurs. Ils manipulent uniquement
le nombre de mouvements exigés pour résoudre les problèmes. Il s'agit de quatre niveaux de
difficulté : des problèmes exigeant 2, 3, 4 ou 5 mouvements. En tout, ces auteurs ne proposent
que 4 problèmes sur 12 de 5 mouvements. Notre version n'est pas informatisée, donc n'a pas
l'avantage de la précision temporelle optimale, mais paraît plus exigeante en potentiel de
planification. La présentation de 9 problèmes sur 12 exigeant au moins 5 mouvements avec
différents types d'initiateurs rend la tâche plus sensible pour détecter les déficits explorés. Cette
version nécessite ainsi de la part du sujet, une confrontation continuelle avec la nouveauté et une
sollicitation plus intense du SAS. En effet, avec une version plus difficile que celle de Morris et al.
(1988), de Lange et al. (1992) ou de Owen et al. (1992), Hanes et al. (1996) trouvent que leur
version de la Tour de Londres est plus sensible. Les Pk réussissent les problèmes à 2, 3 et 4
mouvements et échouent aux problèmes plus difficiles (Hanes et al., 1996). Nous avons nous-
mêmes constaté que les Pk faisaient approximativement le même nombre de mouvements dans
les problèmes simples (à 3 mouvements) et n'échouaient que dans les problèmes complexes (à 5
mouvements) qui exigent un haut niveau de planification.
Les Pk ne passent pas plus de temps que les Té dans le temps initial de latence, dans le temps
de latence du deuxième mouvement et le temps total de résolution des problèmes. Néanmoins, ils
font plus de mouvements et résolvent moins de problèmes avec le nombre optimal de
mouvements. Les Pk font ainsi plus de mouvements erronés tout en réagissant dans les mêmes
délais que les Té. La dissociation entre "exactitude" et "latence" soulève plusieurs questions quant
à l'interprétation des résultats.

176
_______________________________________________________________ Planification de l'action

Il est possible que les Pk fassent le premier mouvement sans mettre au point une stratégie en
mesure de résoudre convenablement le problème à cause d'une limitation des capacités
intellectuelles générales et/ou visuo-spatiales. Il se peut aussi que les Pk réussissent à générer un
plan sans pour autant arriver à le réaliser soit parce qu'ils oublient les séquences de mouvements
pendant la réalisation de la tâche, soit parce qu'ils ne parviennent pas à transposer un plan
cognitif pertinent dans des séquences motrices appropriées ou encore parce qu'ils sont incapables
d'exécuter les séquences motrices elles-mêmes.
Prétendre que le déficit de planification est dû à un affaiblissement intellectuel est une
hypothèse peu défendable pour nos groupes de sujets. Dès les premières analyses nous avons
trouvé que les Pk et les Té ne diffèrent pas dans le niveau intellectuel général tel qu'estimé par le
PM 47 qui est un test spécifique de raisonnement visuo-spatial. De plus, les corrélations entre
chaque indice de la performance des Pk dans la Tour de Londres et le score au PM 47 sont
invariablement non différentes de 0.
Le déficit de planification ne paraît pas être associé à un déficit de la capacité de la MCT
puisque nous n'avons pas observé de déficit dans l'empan visuo-spatial ni de corrélations entre
cet empan et les indices de la performance à la Tour de Londres. Shallice (1982) a déjà souligné
que la performance à la Tour de Londres n'est pas très dépendante des capacités mnésiques. En
effet, le sujet n'a pas à mémoriser le but puisque ce dernier est toujours présent devant lui. Ce
qu'il doit avoir en mémoire c'est la solution du problème en termes de mouvements et de
séquences de sous-buts. De plus, Ward et Allport (1994) notent que les processus de contrôle
exécutif impliqués dans la planification dépendent plus de la capacité d'évaluer et de sélectionner
une action ou un but à partir d'une série d'actions ou de buts, que des ressources de stockage ou
de traitement générales. Le nombre maximum de mouvements exigés pour résoudre les
problèmes les plus difficiles de la Tour de Londres est de 5, et nos Pk ne montrent pas de déficit
dans le stockage à court terme de 5 positions spatiales tel que ce fût le cas au BTT. Donc la
probabilité que le déficit soit attribuable à un trouble de la MCT est faible. Il s'agirait plutôt d'un
déficit de génération d'un plan d'action. En fait, comme le soulignent Owen et al. (1992) la tâche
de planification dans la Tour de Londres n'implique pas la rétention et l'exécution d'une
moyenne de 5 positions visuo-spatiales mais plutôt la production et l'exécution de ces
séquences. Produire une stratégie est au cœur de la planification.
On peut aussi expliquer le déficit observé par une incapacité de suivre l'ordre séquentiel d'une
action comme déjà documenté par Sagar et al. (1988). Or, le nombre de mouvements exigés pour
résoudre même les problèmes les plus difficiles de la Tour de Londres ne dépasse pas 5. De plus,
les Pk réussissent à reproduire l'ordre séquentiel de 5 positions spatiales au BTT. Ceci rend

177
_______________________________________________________________ Planification de l'action

l'hypothèse de la contribution d'une éventuelle difficulté de maintenir l'ordre séquentiel peu


défendable pour rendre compte du déficit observé.
Par ailleurs, une interprétation en termes de trade-off entre la vitesse de génération d'une
réponse (temps de latence du 1ier mouvement et temps de latence du 2ème mouvement) et
l'exactitude de la séquence est peu convainquante pour plusieurs raisons. En premier lieu, si c'est
le cas, on devrait s'attendre à une forte corrélation négative entre ces deux paramètres chez les
Pk. Or, la corrélation entre le nombre de mouvements et le temps de latence initial est faible, de
même qu'entre le nombre de mouvements et le temps de latence du 2ème mouvement. En second
lieu, l'hypothèse du trade-off n'est pas convaincante du fait que nos patients n'ont pas de lenteur
cognitive globale (Cf. § 5). Ils ne manifestent pas de déficit dans le niveau d'alerte tel qu'évalué
par une tâche de TRS (avec stimulus d'alerte à intervalle varié) et ne différent pas des Té dans la
vitesse de traitement telle qu'elle est estimée par une tâche de TRC (jugement perceptif). Nous
avons constaté que les Pk ne diffèrent pas des Té dans tous les indices temporels de la tour de
Londres. En fait, le recours à la notion de bradyphrénie pour expliquer les troubles observés dans
la mP n'est pas justifié. Nos Pk ne présentent pas de syndrome démentiel et la littérature nous
confirme de plus en plus la non pertinence de l'hypothèse de la bradyphrénie comme sous-
tendant les déficits rencontrés chez les Pk (Mayeux et al., 1987 ; Duncombe et al., 1994). En
outre, les corrélations entre les mesures de la vitesse de traitement et les mesures temporelles et
d'exactitude de la Tour de Londres ne sont pas significatives.
Les résultats ainsi obtenus confirment nos hypothèses. Ils montrent que les Pk présentent un
déficit dans la génération et l'exécution de séquences de mouvements spatiaux non routiniers
pour résoudre des problèmes complexes de planification. Ce déficit n'est pas associé au niveau
d'alerte ou à la vitesse de traitement des opérations cognitives ni à l'intelligence visuo-spatiale ou à
la capacité de MCT visuo-spatiale. Il est par contre, relié à l'efficience des mécanismes de contrôle
exécutif de l'action notamment l'inhibition, la génération verbale contrôlée et la flexibilité. En
effet, le nombre de mouvements dans les problèmes à initiateur négatif est corrélé chez les Pk
avec le "additional thinking time" du "Hayling". Cette corrélation souligne fortement l'importance
de l'inhibition des faux schèmes externes d'action dans la résolution de ce type de problèmes. Le
sujet doit préconiser des sous-buts pour résoudre les problèmes en supprimant le mouvement
suggéré par le matériel. La flexibilité mentale est aussi impliquée dans les opérations de
planification. Ce sont surtout les problèmes à 5 mouvements neutres qui sont les plus reliés aux
indices de flexibilité mentale telle qu'évaluée par la fluence alternée. Enfin, c'est la capacité de
génération et de productivité dans le sens donné par Lezak (1995) à l'action dirigée vers un but
qui est fortement associée à la résolution des problèmes à 5 mouvements avec des initiateurs

178
_______________________________________________________________ Planification de l'action

positifs. La planification paraît ainsi associée à d'autres fonctions exécutives, essentiellement :


l'inhibition, la flexibilité et la génération contrôlée des réponses. Par ailleurs, la dissociation entre
des indices temporels et des indices d'exactitude supporte l'idée selon laquelle la planification met
en jeu plusieurs composantes cognitives interactives distinctes sous tendues par des structures
neuronales indépendantes.
Ainsi, le déficit de planification que nous observons chez les Pk ne paraît être dû ni à un
déficit de raisonnement visuo-spatial, ni à un problème de MCT ou à un déficit du maintien de
l'ordre séquentiel des actions ou à un retard de vitesse de traitement cognitive non plus. Il s'inscrit
plutôt dans le cadre d'un syndrome dysexécutif. Il peut être interprété en termes d'une défaillance
du SAS. Le déficit se manifeste au niveau des indices d'exactitude et paraît lié à d'autres capacités
exécutives. Ceci évoque la question de l'unité vs fractionnement du SAS que nous traitons plus
loin.

179
8 ANALYSE DES CORRELATIONS

Ce chapitre est composé de deux parties : la première est consacrée à l'analyse des relations entre
les indices des différentes sous-composantes de l'AC. Cette analyse examine l'hypothèse du
fractionnement de l'AC et du SAS défendue respectivement par Baddeley (1996 ; 1998) et
Burgess et Shallice (1993). La deuxième partie porte sur les relations entre des "facteurs
généraux" et des données cliniques d'un côté et des données cognitives de l'autre. Elle vise à voir
dans quelle mesure l'âge, l'état mental général, l'intelligence générale, la durée de la maladie, le
degré de sévérité des déficits moteurs, la dépression et l'état de santé général sont associés au
niveau de performance des Pk. Plusieurs auteurs ont étudié à l'aide d'analyses similaires jusqu'à
quel point les lésions cérébrales contribuent aux troubles cognitifs chez les Pk. Les données
cliniques reflètent des changements chimiques essentiellement dopaminergiques. C'est pourquoi
certains auteurs ont essayé d'étudier la corrélation entre les changements cognitifs et la sévérité
des déficits moteurs par exemple, car cette dernière est considérée comme indicatrice de la
déplétion striatale dopaminergique. Nous présentons et commentons brièvement les principaux
résultats de cette analyse.
De faibles corrélations entre les indices du fonctionnement exécutif et des indices de gestion
des ressources seraient en faveur du fractionnement de l'AC. Nous mettons à l'épreuve cette
hypothèse en utilisant les indices de performance dans lesquels les Pk se sont avérés déficients
par rapport aux Té.
Par ailleurs, de faibles corrélations entre les facteurs généraux et les données cliniques d'une
part et les résultats aux épreuves neuropsychologiques d'autre part sont en faveur de la distinction
entre des structures responsables des troubles moteurs et celles sous-tendant les déficits cognitifs.
Cette hypothèse est appuyée par les travaux de Brown et al., (1984) et Boller et al. (1984).

8.4 Corrélations entre les indices du fonctionnement de l'AC


Les analyses des corrélations entre les différents indices de l'AC sont effectuées par le calcul du
coefficient de corrélation de Spearman (épreuve non paramétrique) sur les données séparées de
chaque groupe. Nous n'utilisons que les indices dans lesquels les Pk sont désavantagés :
_______________________________________________________ Analyse des corrélations

• Pour la gestion des ressources attentionnelles, nous retenons "l'excès en temps dans la tâche
double" ;
• Pour l'inhibition des réponses dominantes, c'est le score d'erreur de Shallice qui différencie le
mieux les deux groupes ;
• Pour la flexibilité, nous recourons à la production en fluence simple comme indice du
fonctionnement de la flexibilité spontanée et au nombre de persévérations comme indice du
fonctionnement de la flexibilité réactive. Le taux de groupement sémantique refléterait la
performance relative à la capacité de générer des stratégies de production ;
• Enfin, nous retenons le nombre de mouvements effectués lors de la résolution des problèmes
à cinq mouvements sans initiateurs à la tour de Londres comme indice de la performance
dans la capacité de planification.
-.35
-.11

Flexibilité Flexibilité
Inhibition .14 réactive .09 spontanée
Hayling Persévérations
-.05 en Fluence .07 production
score Shallice Fluence simple
alternée

-.11.10
-.24 -.04 -.01 -.09
.13 -.02 -.35
-.23
.42
-.36
-.22 .08 -.27 .17
.22 .17

Stratégie Gestion
Planification -.08 Groupement .47*
nombre ressource
-.04 sémantique .01 attentionnelle
mouvement (fluence) Double tâche
(5N)

.26
-.14
Figure 8-1. Diagramme représentant la matrice des corrélations entre les indices du fonctionnement de l'AC.
* significatif à .05. En gras les coefficients de corrélations calculés sur les Pk. En normal, ceux calculés sur les Té.
Les résultats des calculs des corrélations représentés dans la figure 8-1 révèlent que la seule
association significative pour les Pk est celle entre l'indice de "Gestion des ressources
attentionnelles" et celui du déploiement des stratégie de production (r = .47 ; p.< .05). Toutes les
autres corrélations sont non significatives. Pour les Té, aucune des corrélation n'est significative.

181
_______________________________________________________ Analyse des corrélations

8.5 Corrélations avec les variables cliniques


Dans un deuxième temps, nous examinons, pour les Pk seulement, l'association entre des facteurs
généraux (âge, état mental général, intelligence générale) et des données cliniques (la durée de la
maladie, le degré de sévérité des déficits moteurs, la dépression et l'état de santé général) et les
indices de la performance dans les différentes composantes de la mémoire de travail étudiées de
même qu'avec la vitesse de traitement et le temps de réaction simple.

Tableau 8-1: Corrélations des facteurs généraux et des données cliniques avec les données aux différentes
épreuves neuropsychologiques utilisée.

Facteurs généraux Données cliniques


Score Santé
Âge MMS PM 47 Durée Sévérité
dépression générale
-.34 .63 -31 -.04 -.11 .29 .31
Empan Chiffres
1308 .0020 .1746 .8542 .6297 .2032 .1761
-.30 .57 .33 -.08 -.28 -.11 .06
BTT
.1857 .0066 .1412 .7143 .2169 .6358 .7902
.32 -.39 -.11 .07 .30 -.11 -.26
TRS
.1545 .0781 .6308 .7481 .1868 .6313 .2625
.43 -.47 -.13 .04 .51 -.33 -.10
TRC
.0542 .0332 .5674 .8681 .0178 .1377 .6537
.22 -.33 .04 -.24 -.05 -.05 -.17
TD. EXCES temps
.3389 .1458 .8479 .2967 .8247 .8208 .4577
.39 -.37 -.19 .10 .44 .08 -.01
Score Shallice
0846 .1001 .4142 .6660 .0438 .7220 .9563
Persévération fluence .15 -.27 -.05 -.18 .10 -.10 -.33
Alternée 5179 .2413 .8238 .4296 .6758 .6652 .1499
Production -.32 .53 -.02 .19 -.31 -.12 .07
fluence Simple .1637 .0126 .9125 .4186 .1658 .6085 .7637
Groupement Fluence .18 -.17 .06 .08 .05 -.04 -.15
.4384 0,4519 0,8038 0,7458 0,8346 0,8521 0,5102
Tour de Londres -.26 -.50 -.05 -.26 -.46 .50 .33
Pb. 5 Mvnts Neutres .3923 .0843 .8749 .3869 .1094 .0838 .2692

Les résultats de cette analyse révèlent que seuls le MMS et le degré de sévérité de la maladie
sont corrélés significativement aux performances cognitives. Le score MMS est corrélé
significativement avec les empans (de chiffres et de positions spatiales) et la vitesse de traitement
telle qu'évaluée par une tâche de TRC (jugement perceptif "similaires - différents"). De plus la
sévérité, indexée par l'échelle de Hoehn et Yahr (1967) est corrélée avec la vitesse de traitement et
le score d'erreur au Hayling. L'âge et le niveau d'intelligence générale (PM 47) ne sont pas
associés aux performances cognitives évaluées. C'est le cas aussi des variables durée de la maladie,
score de dépression et score de l'état de santé générale (telle qu'évaluée par le PDQ 39).

182
_______________________________________________________ Analyse des corrélations

8.6 Discussion
Les résultats de ces analyses de corrélations plaident en faveur d'un fractionnement de l'AC et
d'une faible association entre les données cliniques et les performances dans des tâches exigeant
l'intervention de l'AC. Ceci est valable aussi bien pour ses fonctions de gestion de ressources
attentionnelles que pour ses fonctions exécutives.
S'agissant de l'hypothèse du fractionnement de l'AC, nous soulignons que pour les données
relatives aux Pk, la seule corrélation significative est notée entre l'indice de gestion de ressources
attentionnelles (excès de temps dans la condition de tâche double exigeante en ressources) et
l'indice de la capacité de générer des stratégies de production (taux de groupement sémantique en
fluence simple). Pour les données des Té, aucune corrélation significative n'est constatée. Ceci
laisserait comprendre que la planification, la flexibilité, la gestion des ressources attentionnelles et
l'inhibition seraient des fonctions différentes, non hiérarchisées, faiblement inter-dépendantes et
sont sous-tendues par des processus différents.
Ces résultats corroborent ceux de Van der Linden et al. (1992) qui constatent dans l'étude du
cas "AM", que l'altération n'affecte pas uniformément et unanimement les différentes fonctions
attribuées à l'AC. Le déficit chez ce patient touche la performance dans une tâche double
exigeante en ressources attentionnelle et épargne des tâches frontales (WCST, tour de Londres,
Stroop, fluence phonémique). De leur côté, Burgess et Shallice (1993) ne notent pas de
corrélation significative entre les performances des sujets frontaux lors d'une tâche d'inhibition (le
Hayling) et une tâche d'anticipation spatiale (le Brixton). Les résultats de cette étude plaident en
faveur d'une distinction entre les processus impliqués dans les deux tâches et soutiennent
l'hypothèse du fractionnement du SAS. Ces résultats s'accordent avec ceux de Lehto (1996) qui
constate que parmi les trois tests de fonctions exécutives utilisés (WCST, Tour de Hanoi, tâche
de recherche d'un but), seul le WCST est fortement corrèle avec les tâches de MT. Les deux
autres tâches (la Tour de Hanoi et la tâche de recherche de but) ne sont corrélées avec aucune
tâche de MT. Lehto (1996) ne relève pas non plus d'intercorrélation entre les différents tests
sensés évaluer les fonctions exécutives. L'auteur conclut que les fonctions exécutives ne sont pas
liées à un facteur général de capacité limitée. Ainsi, à l'instar de nombre de travaux effectués sur
des sujets normaux (Lehto, 1996) et des sujets cérébrolésés (Van der Linden et al., 1992 ; Shallice
et Burgess, 1993), nos résultats suggèrent que l'AC n'est pas unitaire.
Par ailleurs, les calculs de corrélation effectués révèlent que la seule variable clinique ayant des
associations significatives avec les performances dans des tâches de mémoire de travail est la
sévérité des déficits moteurs. Cette variable est corrélée significativement à la vitesse de

183
_______________________________________________________ Analyse des corrélations

traitement telle qu'évaluée par le test de comparaison de patterns (TCP) et le score d'erreur de
Shallice. Toutes les autres corrélations sont non significatives. Ainsi, pour ce qui est de la
contribution des lésions cérébrales aux troubles cognitifs, nous pensons que la question est loin
d'avoir une réponse précise. D'ailleurs, les examens histopathologiques et radiologiques de
tomodensitométrie "TD-scan" ou d'imagerie par résonance magnétique "IRM" n'ont pas révélé
d'association entre la perte neuronale et les changements cognitifs dans la mP (Cf. Dubois et al.,
1991). On ne fait donc que des inférences à partir des corrélations entre les données cliniques et
les performances cognitives.
Pour ce qui est des facteurs généraux, les seules corrélations significatives relevées sont celles
entre le score au MMS et les empans (de chiffres et de positions spatiales) et entre le MMS et le
TCP. L'âge et l'intelligence générale (PM 47) ne sont pas corrélés aux performances de nos
patients dans les différentes tâches de mémoire de travail. Il est très important de noter que les
indices des facteurs généraux (âge, MMS et PM 47) ne sont corrélés à aucun des indices du
fonctionnement de l'AC. Il paraît qu'une partie des déficits cognitifs observés chez les Pk
résultent du dysfonctionnement des systèmes neuronaux non dopaminergique. Ceci nous invite à
explorer, dans des travaux ultérieurs, si des dysfonctionnements axiaux (comme les troubles de la
marche et la dysarthrie) qui répondent peu aux traitement dopaminergiques et des
dysfonctionnements moteurs (comme l'akinésie) répondant bien à ces traitements, sont
différemment corrélés avec les fonctions cognitives. Dans une même perspective, il serait aussi
intéressant de comparer les performances des patients traités par la L-dopa uniquement, aux
patients traités par la L-dopa et les anticholinergiques. Mais le faible nombre des patients traités
uniquement par la L-dopa (N = 4) ne nous permet pas d'aboutir à des conclusions conséquentes.
Les preuves en faveur de l'effet de la déplétion des systèmes dopaminergiques sur la cognition
sont multiples. C'est le cas des malades de novo, qui présentent des troubles cognitifs alors qu'à ce
stade seuls les neurones dopaminergiques sont affectés (Agid et al., 1987). C'est également le cas
du syndrome parkinsonien induit par la MPTP. Ce syndrome représente un cas de déficience
dopaminergique "pure" associé à des déficits cognitifs (Stern et Langton, 1985).
Cependant, si les déficits cognitifs observés dans la mP n'étaient dépendants que de la
dopamine, nous devrions nous attendre à ce que le traitement par la L-dopa atténue le degré des
déficits comme c'est le cas avec les symptômes moteurs. Or, il est difficile de définir avec
précision l'action de la L-dopa sur les fonctions cognitives. D'après Bowen et al. (1975), la prise
de L-dopa entraîne une diminution du nombre d'erreurs au WCST. Néanmoins, on n'est pas sûr
que ce type d'effet est dû à l'action spécifique de la L-dopa sur une fonction frontale ou
simplement dû à son effet sur l'attention et l'éveil en général. La comparaison des performances

184
_______________________________________________________ Analyse des corrélations

cognitives des patients en période "On" (période de restauration dopaminergique) et période


"Off" (réduction ou interruption de la transmission dopaminergique striatale) est instructive. Elle
révèle, pour ce qui est du fonctionnement de l'AC, que l'intégration et la coordination
d'information de sources différentes dépend de l'état de médication dopaminergique. En
revanche, la division des ressources attentionnelles dans une tâche double ne varie pas en
fonction de l'état de médication des Pk (Fournet, 1996). C'est le cas aussi pour la tâche de
classement du WCST, où l'état de médication n'influe pas sur le niveau de performance des
patients (Gotham et al., 1988). Cependant, ces mêmes auteurs constatent que leurs patients sont
plus déficients dans des tâches d'apprentissage associatif ou de pointage auto-ordonné quand ils
sont sous médication. Ceci révèle que la participation des circuits dopaminergiques dans la
cognition est limitée et variée ; et que d'autres circuits non dopaminergiques entrent en jeu dans
l'occurrence des déficits cognitifs dans la mP.
Un travail portant sur la relation entre les performances cognitives et les variables cliniques
mériterait une étude exhaustive et systématisée.
Nous signalons, par ailleurs, les limites de ces analyses de corrélation vu la faible variation des
scores au MMS (tous les patients ont des scores allant de 26 à 30) et vu le faible nombre de sujets
même si nous avons eu recours au coefficient de corrélation de Spearman préconisé spécialement
pour les groupes réduits.

185
9 DISCUSSION GENERALE

L'objectif général de ce travail est d'analyser l’efficience des différentes composantes de la


mémoire de travail chez les Pk dans le cadre du modèle de Baddeley et Hitch (1974) et de ses
différentes mises à jour (Baddeley, 1994, 1996, 1998). Ceci nous permettra également d'examiner
la pertinence de ce modèle dans l'étude de cette population. L'examen des composantes du
modèle et des différentes fonctions qui lui sont allouées nous permet d'expérimenter différentes
hypothèses que nous avons mises à l'épreuve et discutées dans les chapitres précédents. Nous
discutons d'abord les résultats les plus saillants en référence à la littérature qui a porté sur l'étude
des changements cognitifs chez les Pk dans le cadre du modèle de MT de Baddeley. Nous
traitons par la suite des problèmes de méthode pour débattre enfin des problèmes théoriques
portant sur le fractionnement de l'AC et la pertinence du modèle de MT.

9.4 Dysfonctionnement de la mémoire de travail


Nous avons analysé le fonctionnement des composantes (BPA, RVS et AC) de la MT chez des
Pk. Cette analyse comporte aussi l’évaluation de deux dimensions longuement décrites dans la
littérature clinique sur la mP mais rarement objectivées dans les travaux expérimentaux, à savoir,
la vitesse de réaction et la vitesse de traitement. Nous avons émis l’hypothèse selon laquelle le
déficit porte sélectivement sur la fonctionnalité de l'AC et épargne les systèmes esclaves de la
MT.
L’évaluation de la BPA et du RVS par une tâche d’empan de chiffre et d’empan visuo-spatial
ne révèle pas de déficit particulier chez les Pk. L’examen du fonctionnement de la boucle
phonologique par l’étude des effets de similitude et de longueur a montré que nos patients
utilisent normalement le système de stock phonologique et les processus de récapitulation
articulatoire. Ces résultats attestent de la préservation de la BPA chez des Pk, ils vérifient nos
hypothèses et sont compatibles avec les rares résultats de travaux ayant examiné cet aspect chez
les Pk (Fournet et al., 1996 ; Moreaud et al., 1997). Nous avons partiellement étudié le
fonctionnement du RVS. Ceci est dû au fait que les études et les paradigmes expérimentaux
relatifs à cette composante du modèle sont encore peu développés (Logie, 1995).
_________________________________________________________________ Discussion générale

L'AC est la composante la plus importante à étudier et la moins connue du modèle. Son
examen est effectué par des tâches sollicitant ses deux grandes fonctions : la gestion des
ressources attentionnelles et le contrôle exécutif de l'action. La mise à l'épreuve de l'hypothèse
d'un déficit sélectif de l'AC a pour but de connaître la nature du dysfonctionnement : s’il touche
la fonction de gestion et/ou l'une ou l’autre des fonctions exécutives de l'AC. Les résultats
révèlent que l'hypothèse de l’altération de la fonction de gestion des ressources attentionnelles
chez les Pk est vérifiée. En effet, les Pk montrent des difficultés dans la division des ressources
attentionnelles lors de la réalisation de tâches doubles, en particulier lorsque les tâches doubles
sont exigeantes en ressources attentionnelles. Le défaut se manifeste essentiellement dans les
données temporelles et dans les performances au niveau de la tâche secondaire.
Les fonctions exécutives de l'AC que nous examinons sont la planification, l’inhibition et la
flexibilité mentale. La fonction planificatrice de l'AC est étudiée à l’aide de la Tour de Londres
(Shallice, 1982). Elle révèle une limitation dans la capacité de planifier des sous buts pour
résoudre des problèmes. Cette limitation n’est pas attribuable à un déficit de la mémoire visuo-
spatiale à court terme ou à des difficultés de raisonnement spatial. Elle ne se manifeste pas à
travers les données temporelles mais au niveau du nombre considérable de mouvements pour
résoudre les problèmes difficiles de planification.
La flexibilité est examinée sous ses deux formes : spontanée avec une tâche de fluence
sémantique simple et réactive par une tâche de fluence sémantique alternée. Les deux formes de
flexibilité exigent l’intervention de l'AC. Les résultats montrent que la flexibilité spontanée est
déficiente chez les Pk. Ceux-ci génèrent moins de mots appartenant à une catégorie sémantique,
alors que leur nombre d'erreurs ne diffère pas de celui des Té. Quant à la flexibilité réactive, le
déficit ne se manifeste pas au niveau du nombre de mots générés mais dans le nombre de
persévérations. Le déficit de flexibilité spontanée serait associé à une difficulté de mettre en
œuvre des stratégies de recherche auto-dirigées dans le réseau sémantique. En revanche, le déficit
de flexibilité réactive serait plutôt associé à la difficulté d'inhiber le processus en cours et d'activer
un processus alternatif.
L’inhibition des réponses dominantes est examinée par le Hayling (Burgess et Shallice, 1996)
qui exige un processus de suppression des réponses dominantes dépendant de l'AC. Les
difficultés des Pk au Hayling se manifestent à travers leur nombre élevé d’erreurs et non au
niveau des mesures temporelles. Les Pk manifestent ainsi des difficultés pour inhiber les schèmes
dominants et pour trouver des réponse non routinières.
Au total, ces résultats sont en faveur de l’hypothèse d’une altération non spécifique de l'AC et
de certaines fonctions allouées au SAS. Nous avons vu que ces troubles ne sont pas réductibles à

188
_________________________________________________________________ Discussion générale

l’effet de certains facteurs généraux tels que l’éveil ou la vitesse de traitement. D’ailleurs les
données temporelles (au Hayling et à la Tour de Londres) ne se sont pas avérées très pertinentes
pour indexer les déficits des Pk.
En nous référant aux travaux qui se sont basés sur le modèle de mémoire de travail ou à celui
du SAS, nous constatons que nos résultats relatifs à la fonctionnalité des systèmes esclaves chez
des Pk sont compatibles avec ceux de Fournet (1996) et Moreaud et al. (1997). S'agissant de
l'étude de l'AC, il est important de noter que certains travaux comme celui de Brown et Marsden
(1991) ne font référence aux modèles de MT et de SAS que pour interpréter leurs résultats sans
pour autant l'examiner expérimentalement et explicitement. Les travaux ayant examiné
expérimentalement les changements cognitifs des Pk dans le cadre du modèle de MT ou du SAS
ne sont pas nombreux. Certains font un examen direct de la MT, selon la terminologie de Van der
Linden (1994), par des tâches dites de MT (Gabrieli et al., 1996), d'autres font un examen
progressif en évaluant une à une les différentes composantes de la MT (Fournet et al., 1996 ;
Moreaud et al., 1997).
Nos résultats relatifs à la gestion des ressources attentionnelles concordent avec ceux d’autres
recherches, bien qu'elles soient basées sur des paradigmes expérimentaux différents (Brown et
Marsden, 1991 ; Dalrymple-Alford et al., 1994 ; Gabrieli et al., 1996). Brown et Marsden (1991)
utilisent une tâche double où deux tâches verbales sont combinées (version indicée et
informatisée du Stroop et tâche de génération de chiffres), ce qui risque de provoquer une
interférence structurale. Dalrymple-Alford et al. (1994) associent une tâche de poursuite visuo-
motrice à une tâche d'empan verbal. Nos résultats ne s'accordent pas avec ceux de Fournet et al.
(1996). Ces auteurs croisent différentes tâches d'empan verbal (mots), visuel (pattern visuel) ou
spatial (séquences de localisations spatiales) et des tâches interférentes de suppression
articulatoire : simple (répéter le phonème "da") vs exigeante (compter de 3 en 3 à partir d'un
chiffre pris au hasard entre 1 et 9). Ils ne constatent pas d'interaction groupe X interférence et
concluent que les Pk ne sont pas déficients dans la division des ressources attentionnelles. Nous
pensons que les tâches n'étaient pas assez sensibles pour mettre en évidence les difficultés des
patients par rapport à des sujets contrôles âgés. D'ailleurs, les empans moyens des deux groupes
sont faibles même dans la condition sans interférence et s'affaiblissent davantage dans la tâche
interférente exigeante (2.4 +0.9 chez les Pk et 3.4 +1.2 chez les Té pour l'empan verbal et 2.6
+0.8 chez les Pk et 3.4 +0.5 chez les Té pour l'empan spatial). De plus nous n'avons aucune idée,
dans la condition de tâche double, sur l'efficience des Pk par rapport aux Té dans la tâche
interférente. Or, la faible performance des Pk dans la tâche interférente est l'un des arguments sur

189
_________________________________________________________________ Discussion générale

lesquels nous nous sommes basés pour attester du déficit des Pk dans la division des ressources
attentionnelles.
Nous avons constaté un déficit de planification à la Tour de Londres. Seulement, le déficit
s'est manifesté par un nombre de mouvements élevé, alors que Morris et al. (1988) et Owen et al.
(1993) constatent un allongement du temps de latence.
Concernant l'inhibition, certains auteurs (Kramer et al., 1994 ; McDowd, 1997) suggèrent que
les mécanismes inhibiteurs ne sont pas unitaires. Zacks et Hasher (1997) distinguent trois
fonctions inhibitrices : la fonction d'accès (access function) qui limite l'entrée au champ de la MT
aux représentations activées en ne permettant qu’à celles qui sont directement appropriées à la
tâche en cours d’y accéder. La fonction suppressive (deletion function) qui élimine du champ de la
MT les informations non pertinentes ou qui deviennent non appropriées à cause du changement
de but ou des demandes de la tâche. Enfin, la fonction de freinage (restrain function) qui arrête
l'émission des réponses fortes. Nos conclusions relatives à l'efficience de l'inhibition chez les Pk
ne concernent donc que la fonction de freinage. Nos résultats au Hayling concordent avec ceux
de Jackson et al. (1995) qui ont effectué une des rares études de cas sur une patiente
parkinsonienne. Les auteurs notent entre autres de faibles performances au Hayling et un déficit
de contrôle de l'action. Celui-ci se manifeste par une hypométrie lors de l'exécution d'une saccade
visuelle à une localisation d'une cible visuelle apprise ou lors de la préhension manuelle et le
transport kinématique.
Par ailleurs, s'agissant de l'efficience des mécanismes inhibiteurs chez les Pk, nous n'avons pas
noté de nombre particulièrement élevé d'intrusions dans les tâches de fluence. Ce résultat est
attendu du fait que la mP ne s'accompagne pas de déficits majeurs de la fonction suppressive de
l'inhibition comme c'est le cas chez les malades d'Alzheimer (Fuld et al., 1982 ; Ben Jemaa, 1998).
Il ressort que le déficit des mécanismes inhibiteurs chez les Pk est caractérisé par l'incapacité de
supprimer les réponses fortes (telles qu'elles se présentent au Hayling) avec une conservation de
la capacité de bloquer l’accès d'informations non pertinentes à la MT afin de ne pas la surcharger.
La façon dont ce déficit se répercute sur le fonctionnement cognitif général du sujet reste à
clarifier et à spécifier.
S'agissant de la flexibilité, nous avons distingué suite à Eslinguer et Grattan (1993), deux
formes de flexibilité : spontanée et réactive. Nos hypothèses quant à l'altération des deux formes
de flexibilité chez les Pk ont été vérifiées. Nous avons constaté, s'agissant de la flexibilité
spontanée examinée via une tâche de fluence simple, que les Pk produisent moins de mots que
les Té. L'étude de la flexibilité réactive à travers une tâche de fluence alternée, montre que les Pk,
en tant que groupe, commettent plus de persévérations que les Té. Soulignons que l'usage que

190
_________________________________________________________________ Discussion générale

nous avons fait de la tâche de fluence simple diffère sur plusieurs plans de celui de Gabrieli et al.
(1996) qui utilisent cette tâche dans le cadre de l'évaluation de la mémoire sémantique. La
longueur de la tâche et les résultats diffèrent. En fluence sémantique, nous laissons, comme dans
la majorité des travaux, 2 minutes aux sujets pour leur production, alors que Gabrieli et al. (1996)
laissent 1 minute dans les tâches de fluence sémantique et phonémique simple. Nous constatons
que, comparés aux Té, nos patients ont une faible production, ce que ne notent pas Gabrieli et al.
(1996). Downes et al. (1993) utilisent une variété de tâches de fluence sémantique et phonémique
simples et alternées et n'observent de déficit chez les Pk qu'en fluence alternée mixte (extra-
dimensionnelle) et non en fluence alternée pure (intra-dimensionnelle) ni en fluence simple. Nous
avons exprimé notre réserve quant aux limites floues entre les notions "intra vs extra-
dimensionnelle". Cependant, l'interprétation du déficit d'alternance en terme de défaut
d'inhibition/désinhibition (Downes et al., 1993) met l'accent sur l'importance de la fonction
exécutive de l'AC et du SAS dans le contrôle de l'action.
Nous avons insisté tout au long de ce travail sur l’importance d’examiner la vitesse de
traitement dans l’étude des malades de Parkinson et sur la parcimonie des travaux ayant pris en
considération cette variable dans l’exploration du fonctionnement cognitif des patients. La vitesse
de réaction et la vitesse de traitement pourraient influencer les performances cognitives.
Salthouse souligne l'importance de la vitesse de traitement comme variable qui pourrait expliquer
la différence de performance entre sujets jeunes et âgés aux tests de raisonnement (Salthouse,
1992), de mémoire de travail (Salthouse, 1992; Salthouse, 1994; Salthouse et Meinz, 1995) et de
traitement spatial (Salthouse, Mitchell, Skovronek et Babock, 1989). Les questions de vitesse de
traitement et de bradyphrénie se posent de manière aiguë chez les Pk,. Il est donc possible que les
différences dans l'efficience des différentes composantes de MT soient causées par ce facteur
cognitif général. Nous avons examiné la variable temporelle par deux tâches : une tâche de TRS
et une tâche de TRC. Dans aucune de ces tâches, nous n'avons noté de différence entre Pk et Té.
Ceci rejoint les résultats relatifs aux données temporelles issues de la Tour de Londres (utilisée
dans l'examen de la planification). De plus, au Hayling, le déficit des Pk ne se manifeste pas dans
la différence de temps d'exécution de la tâche d'initiation et celle de suppression, mais plutôt dans
le nombre d'erreurs. Nos patients ne semblent donc pas présenter de déficit particulier de vitesse
de traitement. Au niveau de la tâche double, la différence entre Pk et Té se manifeste même si on
égalise les performances au niveau des données temporelles. Nous ne pouvons soutenir
l'hypothèse selon laquelle les troubles cognitifs de la mP sont secondaires et réductibles à un
ralentissement moteur ou cognitif. Dans leurs travaux, Dalrymple-Alford et al. (1994), Fournet et
al. (1996) et Moreaud et al. (1997) n'examinent pas la vitesse de traitement en étudiant le

191
_________________________________________________________________ Discussion générale

fonctionnement de la MT chez les Pk. Gabrieli et al. (1996) utilisent le test de dextérité manuelle
"Perdue Pegboard Test" comme épreuve motrice et le "Symbol Digit Modalities Test" (similaire
au subtest Code de la WAIS-R) comme test de vitesse perceptivo-motrice. Les auteurs notent une
corrélation entre la vitesse perceptivo-motrice et l'empan verbal et arithmétique de MT.
Cependant, ils ne donnent aucune information sur la différence entre les performances des Pk
par rapport aux Té quant à la vitesse motrice et la vitesse de traitement perceptivo-motrice.
Bien que nous ne constatons pas de déficit de vitesse de traitement chez les Pk, nous insistons
sur l’importance de son examen systématique dans l’étude du fonctionnement cognitif des Pk et
particulièrement, le fonctionnement de la MT. Il est possible que d'autres opérations cognitives
non étudiées dans notre travail, soient plus sensibles à la vitesse de traitement.

192
_________________________________________________________________ Discussion générale

9.5 Problèmes de méthode


Nos résultats nous ont permis de répondre à certains de nos questionnements. Nous relevons ici
les problèmes de méthode inhérents à notre travail et aux travaux portant sur les changements
cognitifs associés à la mP.
Nous avons pris plusieurs précautions de méthode dans les critères de sélection des sujets, le
choix et le contrôle des procédures expérimentales et le traitement des données. Nous avons
sélectionné des patients non déments, non déprimés, répondant au traitement et ayant un déficit
moteur modéré qui ne risque pas d’affecter sérieusement les performances. Nous pensons que les
critères d’exclusion, bien qu’utiles pour le chercheur afin de réduire les sources de variabilité,
peuvent constituer un biais méthodologique. Ils font perdre une quantité considérable de
données en éliminant un pourcentage important de malades et masquent des aspects importants
de la clinique. De plus, la mP est une maladie du sujet âgé. Le recours à un groupe Té composé
de sujets âgés est problématique puisque ces derniers présentent eux aussi des difficultés de la MT
(Van der Linden et al., 1994 ; Van der Linden et Hupet, 1994). Ceci peut atténuer l’ampleur des
déficits et accumuler au niveau du pattern observé, l’effet de l’âge et de la maladie. En revanche,
comparer les Pk à des Té jeunes peut constituer une sources d’autres problèmes de méthode
épineux surtout celui de l’effet de cohorte qui risque de compliquer les comparaisons
intergroupes et la compréhension des phénomènes étudiés (Williams et Klug, 1995).
À côté de ces problèmes de méthode, nous avons constaté une grande hétérogénéité dans les
performances. La lésion de la substance noire caractéristique de la mP parait focale, circonscrite
et n'entraînant pas une grande variabilité symptomatologique. Or, il s'est avéré, tout au long de
nos expérimentations et de notre travail clinique que l'expression des troubles des Pk est
différente. La lésion de la substance noire est bien spécifique mais le dysfonctionnement
dopaminergique qui lui est secondaire et les dysfonctionnements noradrénergique,
sérotoninergique et cholinergique associés, altèrent des réseaux neuronaux plus ou moins larges et
entrent en compétition avec d’autres changements neuropathologiques inhérents à l’avancement en
âge et aux antécédents du sujet. La pluralité des déficits née de ces sources de variabilité est
difficile à analyser car nous ne disposons pas encore d'un modèle clair de la maladie aussi bien au
niveau des formes (sites lésionnels), que des modes d'installation des troubles cognitifs, de leur
évolution, ainsi que de la réaction des patients aux traitements.
Toutefois, des tentatives d'analyse de la variabilité sont faites dans quelques travaux (El-Awar
et al., 1987 ; Maddox, Filoteo, Delis et Salmon, 1996; Filoteo, Rilling, Cole, Williams, Davis et

193
_________________________________________________________________ Discussion générale

Roberts, 1997). En utilisant le CVLT, Filoteo et al., (1997) distinguent trois profils différents de
perturbation de la mémoire dans la mP : un profil similaire à celui observé dans la maladie
d'Alzheimer, un profil qui se rapproche de celui des sous-corticaux et un profil qui ne s'éloigne
pas de celui des normaux. Ceci est compatible chez les Pk avec l'hétérogénéité topographique des
altérations neuropathologiques telle que notée par Hughes et al. (1993).
Nous avons noté que les écart types de toutes les moyennes des performances des Pk sont
plus grands que ceux des Té témoignant d'une hétérogénéité plus importante au niveau de cette
population. L'importante variabilité individuelle nous incite à examiner dans nos travaux
ultérieurs les aspects différentiels dans l'expression des troubles cognitifs dans la mP. Dans ce
cadre, l'apport des études de cas uniques ou multiples est important. Caramazza et McCloskey
(1988) insistent sur les problèmes de méthodes inhérents aux études de groupes. Néanmoins,
nous pensons, que l’apport des études de groupes reste indéniable, malgré les lacunes qui leur
sont intrinsèques. L’apport des études de cas (telle celle de Jackson et al., 1995) et des études
longitudinales (comme celle de Piccirilli et al., 1989) est aussi capital bien que ces approches ne
soient pas exemptes d’imperfections méthodologiques (Caplan, 1988).
La variabilité individuelle ne se résume pas à l'hétérogénéité interindividuelle ; les aspects de
changements intra-individuels doivent être pris en compte : la variabilité de l’état moteur et
cognitif en fonction de l'état de médication "phénomène On-Off" en est l’argument le plus
proche. L'analyse de l'évolution des troubles dans le temps, est aussi d'une importance capitale.
Cet aspect est également rarement abordé dans les travaux sur la mP. La variabilité intra-
individuelle est plus complexe à analyser car elle exige un suivi longitudinal contrairement à
l'hétérogénéité qui peut être abordée par des approches transversales.
S'agissant des tâches, nous avons sélectionné des tâches de courte durée, n’exigeant pas de
compétences scolaires et ayant une faible composante motrice. Ces tâches ont été pré-
expérimentées et adaptées à notre population. De plus, nous avons essayé de contrôler au mieux
les différences individuelles par l’égalisation de la demande des tâches et de la mesure de la
performance. En dépit de la logique linéaire de la procédure d’égalisation, nous croyons à l’utilité
d'une telle procédure pour atténuer les différences individuelles tout en étant conscient de la
nécessité d’être prudent dans l’interprétation des résultats.

9.6 Pertinence du modèle


Une des motivations de ce travail est de contribuer à l'examen de la pertinence du modèle de MT
et de SAS pour rendre compte du fonctionnement cognitif dans la mP. Actuellement, ce modèle
est le plus influent dans les études neuropsychologiques portant sur la mémoire à court terme et

194
_________________________________________________________________ Discussion générale

les fonctions exécutives et celui qui sollicite le plus de recherches. Ce modèle nous paraît en
mesure d'expliquer les performances enregistrées chez les Pk. Nous avons noté que les systèmes
esclaves sont fonctionnellement préservés, alors que l'AC est altéré par la maladie. Des empans
verbaux et visuo-spatiaux avec des effets de longueur de mots et de similarité phonologique
comparables aux Té sont également notés chez nos Pk. Ceci atteste de la préservation de la
capacité de rétention passive à court terme et de la fonctionnalité de la boucle phonologique.
Cependant, les deux grandes fonctions de l'AC, à savoir la gestion des ressources attentionnelles
et le contrôle exécutif de l'action sont altérées chez nos patients. En effet, la capacité de
coordination de tâches concurrentes exigeantes en ressources attentionnelles est déficiente. Ceci
est dû à des difficultés de division des ressources attentionnelles dans des tâches doubles même si
on égalise les coûts attentionnels de chacune des tâches. De plus, la planification telle qu'évaluée
par la tour de Londres, l'inhibition à travers le Hayling et la flexibilité spontanée et réactive à
partir des performances en fluence simple et alternée sont altérées. Ces troubles correspondent à
un déficit au niveau de l'AC de la MT. Le modèle de MT de Baddeley paraît donc être une
métaphore utile pour rendre compte de ces déficits. De plus, l’assimilation de l'AC au SAS tel que
conçu par le modèle de contrôle attentionnel de Norman et Shallice (1980) enrichit notre
compréhension des déficits observés. Les Pk paraissent ainsi manifester des difficultés dans le
contrôle attentionnel de l'action. Ce déficit altère la capacité de gérer les conditions difficiles, de
planifier la résolution de problèmes complexes, d'inhiber des schèmes d'actions non pertinents,
d'activer un schéma adéquat pour réaliser l'action, de faire face à une situation non routinière, de
changer de programmes d'actions selon les contingences et de contrôler les erreurs. En effet,
d’après Norman et Shallice, c'est le SAS qui intervient dans ces situations qui dépassent les
processus automatiques (schèmes) et semi-automatiques de résolution de conflits (Gestionnaire
des priorités).
Ces interprétations sont compatibles avec les données anatomo-cliniques qui assimilent les
trouble cognitifs observés chez les Pk à un dysfonctionnement striato-frontal et supportent
l'implication des lobes frontaux dans les fonctions de gestion des ressources attentionnelles et de
contrôle exécutif de l'action. Le substrat anatomique de l'AC a été inféré à partir de patients
cérébrolésés ou étudié à partir des techniques d'imagerie cérébrale fonctionnelle. Certains travaux
ne croient pas à une localisation frontale des opérations de l'AC, d'autres si et d'autres encore
adoptent une position intermédiaire. Ainsi, Morris et al. (1994) suggèrent que le fonctionnement
de l'AC est sous-tendu par des circuits corticaux impliquant aussi bien des zones antérieures que
postérieures du cerveau. À l'opposé, Petrides, Alivastos, Meyer et Evans (1993) observent une
augmentation bilatérale du débit sanguin cérébral régional au niveau du cortex préfrontal

195
_________________________________________________________________ Discussion générale

dorsolatéral moyen dans une tâche de manipulation et de génération de chiffres au hasard.


L'implication des lobes frontaux est aussi notée dans les travaux utilisant l'imagerie par résonance
magnétique (IRM). En effet, D'Esposito et al. (1995) utilisent cette technique et constatent que
les lobes frontaux et plus particulièrement le cortex dorsolatéral et le gyrus cingulaire sont
spécifiquement activés par les tâches doubles. Cependant, l'implication majeure des lobes
frontaux dans les opérations associées à l'AC n'est pas unanime. Van der Linden et al. (1992)
décrivent le cas "AM", un traumatisé crânien présentant de faibles performances dans une tâche
double non associées à d'autres signes frontaux. Dalrymple-Alford et al. (1994) n'observent pas
de corrélation entre les performances à des tâches doubles et des tâches frontales (indices du
WCST et fluence phonémique). D'ailleurs, on constate de plus en plus, que les tâches de MT
impliquent des zones autres que les aires préfrontales. Salmon, Van der Linden, Collette,
Delfiore, Maquet, Degueldre, Luxen et Ftanck (1996) utilisent les mêmes techniques d’imagerie
pour discerner les aires cérébrales activées par une tâche verbale de mise à jour de MT. Ils
constatent que la tâche implique l'activation de zones dorsolatérales préfrontales, pré-motrices et
supramarginales gauches de même qu'une activation imprévue dans la région pariétale inférieure
droite.
Qu'en est-il des autres processus associés à l'AC?
Pour l'inhibition, Nathaniel-James, Fletcher et Frith (1997) utilisent le PET scan lors de
l'administration des deux conditions de l'épreuve du Hayling (initiation et suppression). Les
auteurs comparent les deux conditions et identifient, dans la condition d'initiation par rapport à la
condition de suppression, une augmentation de l'activation cérébrale au niveau du gyrus frontal
inférieur gauche et du gyrus temporal moyen gauche. Le manque d'activation cérébrale dans la
condition de suppression n'est pas attendu du fait que l'inhibition des réponses dominantes serait
sous-tendue par des aires frontales. Concernant la flexibilité spontanée telle qu'examinée par les
tâches de fluence simple, l'implication des régions frontales et temporales (postérieures
supérieures) a été récemment observée dans un travail de Fama, Sullivan, Shear, Cahn, Lim,
Marsh, Yesavage, Tinklenberg et Pfefferbaum (1997). Ces auteurs constatent chez des malades
d'Alzheimer, une corrélation entre un faible nombre d'énoncés dans une tâche de fluence
sémantique et une réduction du volume cérébral au niveau de ces régions. Le volume des tissus
lésés semble avoir un rôle, de même que l'implication des régions sous-corticales en raison de
leurs connexions avec les zones corticales (Randolph et al., 1993). Chez le sujet normal, Parks et
al. (1988) constatent une activation préférentielle des régions frontales et temporales bilatérales,
lors de l'exécution d'une tâche de fluence. Pour la planification, Morris, Ahmed, Syed et Toone
(1993) utilisent la tomographie par émission de simples photons (SPECT) lors de la résolution

196
_________________________________________________________________ Discussion générale

des problèmes de la tour de Londres chez des sujets normaux. Ils constatent une augmentation
du débit cérébral régional au niveau du cortex préfrontal gauche.
Ces données soulèvent la question de l'unicité vs fractionnement de l'AC, cette "zone
d'ignorance résiduelle". L'AC et le SAS sont de plus en plus décrits comme des entités
remplissant différentes fonctions indépendantes qui peuvent être affectées sélectivement. Burgess
et Shallice (1993) suggèrent que la catégorisation, telle qu'étudiée par le Brixton et l'inhibition telle
qu'elle est évaluée par Hayling sont deux fonctions distinctes. Eslinger et Grattan (1993)
distinguent au sein de la flexibilité deux types qui peuvent être altérés différemment. Kramer et al.
(1993) distinguent plusieurs types d'inhibition et l'imagerie cérébrale relève un pattern particulier
pour chaque fonction "frontale" (Stroop : Bench et al., 1993 ; tour de Londres : Baker et al., 1996 ;
Hayling : Nathaniel-James et al., 1997). Il y a donc un consensus plus ou moins général attestant
que l'AC n'est pas unitaire. Cependant, certaines approches prêtent à confusion. Wilson,
Alderman, Burgess, Emslie et Evans (1996) développent le "Behavioral Assessment of the
Dysexecutive Syndrome" qui aboutit à un score final suggérant implicitement que l'AC est une
entité unique qu'on peut mesurer et quantifier par un score.
En nous basant sur nos résultats, nous supportons avec quelques réserves l'hypothèse de
fractionnement de l'AC. Tout d'abord, il est important de distinguer entre fractionnement de la
MT et fractionnement de l'AC. Nos résultats concernant la fonctionnalité des systèmes esclaves
et la perturbation de l'AC supportent le fractionnement de la MT. Par contre, le fractionnement
de l'AC est à démontrer avec plus d'arguments.
En effet, les corrélations faibles entre les différents indices des fonctions attribuées à l'AC sont
en faveur du fractionnement, alors que le fait que les Pk soient déficients dans toutes les
fonctions de l'AC ne l'est pas. Ceci soulève la question de la spécificité de l'AC. La revue de la
littérature nous apprend également que l'AC est altéré dans la maladie d'Alzheimer (Morris et
Baddeley, 1988 ; Baddeley et al., 1991 ; Morris, 1994), dans les traumas crâniens (Van der Linden
et al., 1992 ; Veltman et al., 1996 ; McDowell et al., 1997), dans la schizophrénie (Zouari, 1998),
dans les lésions frontales (Fujii, Fukatsu, Yamadori, Suzuki et Odashima, 1997), chez les patients
séropositifs (Bartok et al., 1997)… Nos résultats sont interprétables à la lumière du modèle de
Baddeley et de l’hypothèse d’un dysfonctionnement touchant certaines fonctions du SAS.
Cependant, l'absence de spécificité pose de sérieux problèmes au modèle. Nous pensons que des
spécifications et des améliorations du modèle sont possibles si on entreprend des études de cas
multiples et si on réfléchit à une méthode de classification des patients autre que celle de l'entité
nosologique neurologique. Il serait intéressant d’examiner ces populations avec des tâches qui
ciblent différentes fonctions attribuées à l'AC afin d’identifier des profils de dysfonctionnement

197
_________________________________________________________________ Discussion générale

différents. Il faut donc multiplier les recherches de validation et de remise en question du modèle
et plus spécifiquement de sa composante la plus complexe, l’AC. D’ailleurs, en examinant les
travaux de Baddeley, depuis ses publications datant des années 80 jusqu’à nos jours, nous
pouvons noter une évolution sensible dans la modélisation de la MT. Sa position relative à
l’implications des aires frontales dans le fonctionnement de l’AC devient plus tempérée
(Baddeley, 1998). De même, les relations qu’entretiennent la mémoire de travail avec la mémoire
à long terme sont renforcées et de plus en plus prises en compte (Van der Linden, 1998).

198
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218
Doctorat Nouveau Régime

Spécialité : Psychologie
Langue : Français

Nom : Bellaj Prénom : Tarek


Date de naissance : 20 septembre 1963 Nationalité : Tunisienne
Adresse : B4 Résidence "Le Square" - Jardin d'El Menzah - 2092 Tunis
Tél. 870 604

Directeur de thèse : Pr. Moncef Bouaziz


Date de soutenance : 08 / 11 / 1999
Titre : Dysfonctionnement de la mémoire de travail dans la maladie de
Parkinson

Résumé de la thèse :

L'étude des changements cognitifs consécutifs à la maladie de Parkinson est effectuée dans le
cadre d'un modèle théorique de référence afin de passer de la simple description des troubles à
l'explication des déficits en termes de processus. Le modèle de mémoire de travail Baddeley et
son corollaire celui du Système Attentionnel Superviseur de Norman et Shallice sont utilisés.
L'examen des différentes composantes de la mémoire de travail par des tâches
neuropsychologiques adaptées montre que le déficit ne se manifeste pas au niveau des facteurs
non spécifiques comme l'alerte phasique ou la vitesse de traitement. Il ne se manifeste pas non
plus au niveau de la capacité de stockage temporaire ou de la fonctionnalité des systèmes esclaves
(Boucle Phonologique et Articulatoire et Registre Visuo-Spatial). En revanche, les parkinsoniens
sont déficients dans la fonctionnalité de l'administrateur central dans sa fonction de gestion de
ressources attentionnelles et dans des fonctions de contrôle exécutif de l'action aussi bien au
niveau de la planification de l'action qu'au niveau de l'inhibition des réponses dominantes et de la
flexibilité mentale réactive et spontanée). Les modèles théoriques utilisés se sont avérés
représenter une métaphore utile pour rendre compte des déficits observés. Cependant, ces
modèles manquent encore de spécificité puisque le déficit de l'administrateur central est observé
aussi dans d'autres populations pathologiques. D'autres travaux de remise en question des
modèles sont indispensables. L'examen de l'hétérogénéité dans l'expression des troubles serait en
mesure d'aider à spécifier la nature des déficits de l'administrateur central en dégageant différents
patterns de dysfonctionnement de la mémoire de travail.

Indications bibliographiques : Mots-clés ou vedettes-matière :


Nombre de pages 225 1 Mémoire de travail
Nombre de volumes 1 2 Maladie de Parkinson
Nombre de références bibliographiques 470 3 Fonctions exécutives
Nombre d'illustrations 4 4 Neuropsychologie

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