Turbine Francis
Une turbine Francis, du nom de l'ingénieur James Bichens Francis, est une turbine hydraulique de type « à réaction ». Elle est adaptée à des hauteurs de chute moyennes (de 30 à 300 mètres), pour des puissances et débits moyens ou forts (tel le barrage d'Itaipu), à savoir de quelques kilowatts à plusieurs centaines de mégawatts pour des débits de 10 à 700 m3/s[Note 1].
Principe de fonctionnement
[modifier | modifier le code]Une turbine « à réaction », comme celle de James Francis, est une turbine qui extrait d'un fluide l'énergie qu'il contient principalement sous forme de pression (par opposition aux turbines « à action » dans laquelle c'est l'énergie cinétique du fluide qui est extraite principalement). La forme du tube d'alimentation est conçue pour décélérer le fluide, et le faire remonter en pression. Ainsi le fluide entre sous une grande pression et vitesse relativement faible, et transmet son énergie aux pales solidaires du rotor. Une partie de l'énergie est transmise par le fluide sur les pales en raison du changement de pression tandis que le reste de l'énergie est extraite par la spirale qui entoure la turbine. À la sortie, le fluide a une vitesse faible et peu d'énergie[1].
Caractéristiques
[modifier | modifier le code]Les caractéristiques habituelles des turbines Francis sont les suivantes[2] :
- diamètre de la roue : de quelques décimètres à une dizaine de mètres ;
- nombre d'aubes : 11 à 17[Note 2] ;
- vitesse de rotation : de 70 à 3 000 tr/min ;
- rendement énergétique : de 80 à 95 %[3].
Le record de puissance atteinte par une turbine Francis est de 800 MW, pour une turbine fabriquée par Alstom. Ces modèles de turbine, d'un diamètre de 10 mètres et d'un poids de 450 tonnes équipent le barrage des Trois-Gorges, sur le fleuve Yangzi Jiang, en Chine[4], ainsi que le barrage de Xiangjiaba, sur le même fleuve[5].
Histoire
[modifier | modifier le code]Ce système a été proposé par le Français Jean-Victor Poncelet à la fin des années 1820. En 1826, l'inventeur et industriel français Benoît Fourneyron améliora le système en augmentant le rendement (80 %) par la modification de la circulation de l'eau, en la dirigeant radialement à travers la roue.
Aux États-Unis, en 1838, ce système fut breveté par le nord-américain Samuel B. Howd, puis popularisé par l’anglo-américain James B. Francis, dont il porte le nom. Il installa ses premières turbines en 1848 à l'usine de Pawtucket Gatehouse (en), à Lowell dans le Massachusetts. Dans les années 1860, cette turbine commença à supplanter la roue hydraulique.
En 1918, la papeterie de Chappes fut équipée d'une turbine Francis de type « Singrün » qui fonctionna jusqu'en 2004. La même année, ce type de turbine fut utilisé sur la centrale des Vernes à Livet-et-Gavet. Cette centrale est aujourd'hui classée monument historique.
Au Canada, il s'agit de la turbine la plus utilisée dans le parc de production d'Hydro-Québec[6].
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Pawtucket Gatehouse, la première usine à turbines Francis, installée en 1848, par James Bicheno Francis, à Lowell, Massachusetts.
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Turbine Francis, de fabrication suisse, à Zurich.
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Turbine Francis du barrage de Grand Coulee.
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Démolition d'une ancienne turbine Francis, datant de 1918.
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Turbine Francis de la première centrale hydroélectrique de Bergerac mise en service en 1892.
La plus puissante de France se trouve à la centrale du Pouget : turbine Francis de 286 MW accouplée à un alternateur de 275 MVA, sous 444 mètres de chute[7].
Contrôle de flux
[modifier | modifier le code]Le contrôle de flux se fait au niveau du distributeur par l'orientation des ailettes de guide ou directrices (en anglais guide vanes) par rapport aux ailettes fixes ou aubes (en anglais stay vanes) situées sur la roue (en anglais runner). Ce sont des éléments essentiels de la turbine qui permettent de transférer convenablement l'énergie du flux à la roue, tout en évitant l'apparition du phénomène destructeur de cavitation[8].
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Coupe d'une turbine Francis : circulation du fluide, entrée radiale, sortie axiale.
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Directrices, en position débit minimum.
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Directrices, en position débit maximum.
Phénomène de cavitation
[modifier | modifier le code]Le phénomène de cavitation peut provoquer l'érosion prématurée des aubes au niveau du bord d'attaque[9]. La cavitation provoque une chute du rendement de la turbine, ou de la hauteur absorbée, et l’apparition de vibrations sur la structure mécanique, accompagnées d'un bruit intense. Ce phénomène peut nécessiter l'arrêt de la turbine et de lourds travaux de maintenance et de réparation, engendrant des conséquences économiques importantes (arrêt de la production, frais de maintenance sur site ou de réparation lourde en atelier, etc.).
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Turbine Francis de 1956, bords d'attaque des aubes érodés par la cavitation.
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Turbine Francis aux aubes érodées par la cavitation, après de précédentes réparations par apport et soudage d'acier inoxydable.
Maintenance hydraulique
[modifier | modifier le code]Les équipements hydrauliques des centrales françaises, concédées par l'état à EDF ou à ses filiales, sont présents dans 447 centrales hydroélectriques. On y trouve en particulier des turbines Francis et leurs composants (rotors, aubes, vannes, robinets, paliers, etc.). Tous les éléments touchant à l'équipement hydraulique de ces centrales sont entretenus et maintenus par une unité interne d'EDF, le Service de Réparation Hydraulique[10], qui effectue des opérations de rechargement métallique par soudage, de meulage pour remise au profil (en atelier ou sur site), ainsi que des travaux d'usinage.
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- Cf le document en référence, issu du Service de Réparation Hydraulique d'EDF, en page 4 : les turbines prises en charge par le SRH
- Une aube comporte deux faces: l'extrados et l'intrados, comme une aile d'avion. L'eau coulant plus vite près de l'extrados, il en résulte une dépression qui génère le couple moteur. L'arête de sortie d'une aube s'appelle le bord de fuite alors que l'arête d'entrée de l'aube s'appelle le bord d'attaque
Références
[modifier | modifier le code]- (en) World News (WN) Network, « Francis turbineté », sur wn.com, (consulté le )
- [PDF]« De quoi est faite une turbine Francis? », sur angelfire.com (consulté le ).
- [PDF] Gino Blommaert - Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, « Thèse de doctorat : Étude du comportement dynamique des turbines Francis : contrôle actif de leur stabilité de fonctionnement », sur epfl.ch, (consulté le ).
- Alstom, « Turbines hydroélectriques Francis », sur alstom.com (consulté le ).
- [PDF](en)Alstom, « Xiang Jia Ba, Francis Hydro Power Plant », sur alstom.com (consulté le ).
- Hydro-Québec, « Turbine Francis », sur hydroquebec.com, (consulté le ).
- Tpebarrages, « Les turbines à réaction : la turbine Francis », sur jimdo.com (consulté le ).
- (en) R. Dadfar, B. Firoozabadi, G. Ahmadi, université de technologie de Sharif, « Effect of Different Configurations on 3-D Analysis of Flow Through Stay Vanes and Guide Vanes of a Francis Turbine », sur sid.ir, (consulté le ).
- (en) Paul Bourdon - Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, « Détection vibratoire de l'érosion de cavitation des turbines Francis : Thèse de doctorat », sur epfl.ch, année 2000 (consulté le ).
- [PDF] EDF - SRH, « Le service de réparation hydraulique (SRH) d'EDF », sur edf.com, (consulté le ).