Bringing Forest Carbon Projects To The Market FR (2009)
Bringing Forest Carbon Projects To The Market FR (2009)
Bringing Forest Carbon Projects To The Market FR (2009)
du carbone forestier
Bringing forest carbon
projects to the market
ENERGY, CLIMATE
AND SUS TA INABLE
DEVEL OPMENT
Les marchés du carbone forestier
Quelle est la place de la forêt dans les marchés du carbone?
Quelles sont les tendances à anticiper?
Comment financer un projet et vendre des crédits?
Clément Chenost*
Yves-Marie Gardette*
Julien Demenois
Nicolas Grondard
Martin Perrier
De l’ONF International (ONFI)
et Matthieu Wemaëre (avocat)
* auteurs principaux
ENERGY, CLIMATE
AND SUS TA INABLE
DEVEL OPMENT
Remerciements
Le guide a été réalisé grâce au soutien du Programme des Nations Unies pour
l’Environnement (PNUE DTIE & Risoe), de l’Agence Française de Développement
(AFD), du BioCarbon Fund de la Banque Mondiale et de l’ONF International.
Le document a été révisé par un panel d’experts d’horizons variés. Merci aux
professionnels suivants pour leurs contributions, leurs précieux commentaires et
observations afin d’améliorer le contenu et le format du document:
Enfin, pour leur aide à la réalisation du document et pour les études de cas, merci
à : Olivier et Thierry Mushiete (Novacel), Pierrot Rakotoniaina et James MacKinnon
(Conservation International), Raquel Luna (FAS), Trista Maj Patterson(USDA),
Guillaume Thomé (Ernst & Young), Cyril Loisel (MAE), Bruno Locatelli (CIFOR),
Anne Sophie Brunet (Polytech’), Till Neef (Ecosecurities), Kate Hamilton (Ecosytem
Marketplace), Olivier Bouyer, Marie Calmel, Jean-Guénolé Cornet, Fabien Garnier,
Marion Chesnes (ONF International).
Table des matières
Résumé exécutif........................................................................................................ 7
1.3. Quelle est la place des projets forestiers au sein des marchés du carbone ?..............23
1.3.1. Un rappel préalable: les bases des marchés carbone .............................................. 23
1.3.2. Les projets forestiers dans les marchés régulés . ...................................................... 25
1.3.2.1. Les mécanismes du protocole de Kyoto ................................................... 25
1.3.2.2. Le système de quotas européens (EU-ETS) .............................................33
1.3.2.3. Les autres marchés régulés . .........................................................................33
1.3.3. Les projets forestiers dans les marchés volontaires .................................................. 34
1.4. Les projets forestiers dans le monde : état des lieux. .................................................... 41
1.4.1. Une dynamique des projets vers la standardisation ................................................ 42
1.4.2. Une répartition géographique homogène .............................................................. 44
1.4.3. Une majorité de projets AR ................................................................................... 48
1.4.4. Des tailles diverses selon le type de projet et la standardisation . ............................ 48
1.4.5. Un prix de vente des crédits en moyenne supérieur aux autres technologies ............. 50
3
Les marchés du carbone forestier
2.1.3. Quelles sont les initiatives en cours ?...................................................................... 63
2.1.4. En conclusion, quelle sera la place des projets
AR, IFM et REDD dans le REDD+?........................................................................ 66
2.2. La prise en compte de la forêt dans les autres marchés du carbone............................67
2.2.1. Système « cap and trade » fédéral américain .......................................................... 67
2.2.2. EU-ETS................................................................................................................. 68
2.2.3. Les autres marchés . .............................................................................................. 69
2.2.4. Conclusion............................................................................................................ 70
4
3.3.2.1. La dette .......................................................................................................... 100
3.3.2.2. Les capitaux propres.................................................................................... 102
3.3.2.3. Les subventions et les donations.............................................................. 104
3.3.3. Qui financent les projets ?................................................................................... 104
3.3.3.1. Le porteur de projet ................................................................................... 104
3.3.3.2. Le secteur privé . .......................................................................................... 105
3.3.3.3. Le secteur public ........................................................................................ 107
3.3.4. Conclusion........................................................................................................... 110
5
Les marchés du carbone forestier
6
Résumé exécutif
L’objectif du guide «Les marchés du carbone forestier : quelle est la place de la forêt
dans les marchés du carbone ? Quelles sont les tendances à anticiper ? Comment
financer un projet et vendre des crédits ? » est d’appuyer les porteurs de projets et
les investisseurs dans l’élaboration et la mise en place des projets forestiers rentables
dans le cadre des marchés du carbone.
Malgré une évolution rapide et un fort dynamisme, les échanges de crédits carbone
forestiers n’ont représenté que 5,3 MtéqCO2 en 2008, soit 1% des transactions
issues de projets . En valeur, les échanges de crédits forestiers ont représenté en
1,2,3
2008 25 M€ lorsque le marché global des crédits issus de projet représentait 4807
M€. Ces chiffres indiquent que ce secteur est encore très largement sous exploité,
notamment vis-à-vis de son potentiel. En effet, les écosystèmes terrestres absorbent
plus de 30% des émissions globales de CO2, environ 20% de ces émissions sont
provoquées par le changement d’usage des sols, principalement par la déforestation . 4
7
Les marchés du carbone forestier
du marché du carbone forestier (partie 1) et de ses principales tendances (partie
2), en s’appuyant notamment sur la constitution d’une base de données de 434
projets carbone forestiers dans le monde. Une troisième partie apportera ensuite des
éléments opérationnels sur l’économie et les risques associés aux projets forestiers,
ainsi que sur les possibilités de financement et de vente de crédits. Le guide illustrera
les meilleures pratiques, les facteurs clés de réussite, les écueils à éviter, tout en
mettant en évidence les causes du sous développement des projets forestiers. Chaque
composante du guide sera illustrée par l’intermédiaire de cinq études de cas.
Les projets MDP forestiers sont limités aux boisement et reboisements (AR) et
représentent 0,4% des projets enregistrés et 1,4% des projets en cours de validation . 7
crédits MDP forestiers. L’absence d’intérêt du plus large acheteur de crédits CER 9
marché volontaire.
8
Résumé exécutif
Par ailleurs, du côté de l’offre, le retard pris pour définir les modalités du MDP
forestier au sein de la CCNUCC a causé un préjudice aux projets forestiers. En effet,
ce marché régulé est focalisé sur l’achat de crédits à des fins de conformité avant la
fin de la première période d’engagement du protocole de Kyoto en 2012. Néanmoins,
ces barrières techniques, méthodologiques et légales se réduisent à mesure que
se développent les projets et que se renforce l’expérience des développeurs et
des consultants. Aujourd’hui, même si le montage des projets reste complexe, ces
principaux obstacles au développement de projets sont levés : seize méthodologies
sont d’ores et déjà disponibles, 8 projets sont enregistrés et 39 sont candidats à la
validation. Ces projets représentent un potentiel de 13,9 millions de crédits générés
d’ici 2012 malgré les nombreux freins évoqués.
Alors que la place actuelle des crédits forestiers au sein du MDP est encore mineure,
la forêt représente 7% des échanges de crédits sur le marché volontaire en 2008.
11
Dans ce cadre, les activités éligibles sont beaucoup plus diverses : AR, REDD, IFM
et même stockage de carbone dans les produits bois. C’est avant tout l’attrait des
acheteurs pour les projets forestiers qui explique cette forte prise en compte. Ils sont
en effet plus attractifs en termes d’image car leurs effets positifs sur le réchauffement
climatique sont plus intelligibles pour le grand public. Dans un marché où l’image des
crédits et projets prime, les co-bénéfices socio-économiques qu’apportent ces projets
aux populations rurales (emplois créés dans les filières agro-sylvicoles, diversification
des sources de revenus, lutte contre la pauvreté, etc.) ainsi que les bénéfices
environnementaux (lutte contre l’érosion, protection des ressources hydriques,
protection de la biodiversité, etc.) sont particulièrement significatifs.
Les quantités de crédits forestiers échangés sur le marché volontaire ont continué
leur hausse entre 2007 et 2008 passant de 3,7 à 5 MtéqC02 soit une progression
de près de 135%. Cette forte hausse s’explique principalement par le développement
au sein du CCX (+1,3 MtéqC02) tandis que la progression sur le reste des marchés
12
volontaires restait modeste (+0,05 MtéqC02). La part relative des projets forestiers
au sein des marchés OTC est quant à elle en forte diminution, passant de 50% avant
2006, à 8% en 2007 et 7% en 2008.
9
Les marchés du carbone forestier
Cette diminution de la part de marché révèle la professionnalisation du secteur au
travers de l’instauration et de l’application de standards de qualité . En effet, au fur et
13
standardisation, les surfaces et les volumes engagés ont ainsi été répertoriés. Les 434
projets recensés montrent toutefois une tendance actuelle de standardisation très
forte des projets carbone forestiers permettant de renforcer l’offre future en projets
forestiers de qualité et de conforter leur place au sein du marché volontaire. Selon
une étude récente , la standardisation des projets est le premier critère de choix des
15
investisseurs lorsqu’ils achètent des crédits carbone forestiers. Enfin, le prix moyen de
vente des crédits forestiers (1,7 €/téqCO2 pour le CCX, 3 €/téqCO2 pour le MDP et
4,7 €/téqCO2 pour le marché volontaire OTC) est comparable aux crédits issus des
autres technologies.
Face aux craintes longtemps évoquées de voir déferler d’importants volumes de crédits
forestiers à bas coûts conduisant à une dégradation du signal prix sur les marchés,
force est de constater que la situation est quasiment inversée. La forte demande pour
les crédits forestiers est jugulée par des impératifs de qualité et une offre insuffisante
en projets de ce type. Le marché du carbone forestier marque donc une phase de
transition et de consolidation, l’euphorie désordonnée des premiers temps ayant cédé
la place à l’instauration de standards qui professionnalisent en partie ce marché non
régulé. Toutefois, en volume, le marché volontaire reste très minoritaire par rapport
aux marchés régulés et seule une réelle intégration du secteur au sein des marchés
d’engagement permettra de diriger des flux financiers d’ampleur vers la forêt et de
lutter efficacement contre le réchauffement climatique.
13 CCBs, CFS, CCAR, CCX, Gold Standard, GGAS, GHG friendly initiative, MDP, MOC, PFSI, Plan
Vivo, VER +, VCS, etc.
14 Actualisation de la base de données de 178 projets de l’étude ONFI-CIRAD : Les Marchés du
Carbone Forestier, Gardette & Locatelli, 2007
15 Neeff & al., 2009. Forest Carbon Offsetting Survey 2009, Ecosecurities
10
Résumé exécutif
◆◆ Comment financer des projets carbone forestiers ? Comment vendre des crédits ?
Les crédits carbone peuvent rémunérer les services environnementaux que fournissent
les forêts. S’il peut s’agir d’une source de revenus importante (même si pour de
nombreux projets forestiers il ne s’agit que d’un produit parmi les autres), il ne s’agit pas
d’une source de financement. Les barrières à l’investissement restent particulièrement
nombreuses pour les projets carbone forestiers : investissements initiaux importants,
retours sur investissement reportés dans le temps, risques élevés (risque politique dans
certains pays tropicaux, permanence des crédits, etc.) ou encore manque de visibilité
sur les marchés (le marche volontaire étant très peu liquide). Ainsi les indicateurs
financiers de ces projets sont en général moins bons que dans d’autres secteurs,
même s’ils engendrent en général des bénéfices additionnels en termes sociaux et
environnementaux.
Malgré cela, l’illustration de cinq études de cas démontre que ces barrières sont
surmontables. Le guide donne ainsi des éléments opérationnels aux porteurs de projet
et aux investisseurs sur le cycle des projets carbone forestiers, les étapes à réaliser pour
financer un projet et vendre des crédits, l’économie et les risques qui y sont associés,
les flux financiers et l’analyse de sensibilité des variables, les différentes modalités de
financement et les acteurs actuels de ce marché (compensateurs, fonds, banques,
acteurs publics, industriels, etc.).
La typologie des projets existants et les montants engagés dans ce secteur dégagent
trois grands types de financement. Il est plutôt rare qu’un projet n’utilise qu’une seule de
ces sources, qui peuvent être utilisées simultanément :
◆◆ Une part importante des fonds alloués aux projets forestiers provient de la
compensation volontaire des émissions de CO2 ou plus généralement des
politiques de mécénat environnemental des entreprises. Le financement se
réalise principalement par des dons, des paiements anticipés de crédits (ex-
ante, pouvant s’assimiler à une forme de dette), voire à des emprunts à taux
préférentiels. Ce financement se réalise en direct ou via des intermédiaires,
compensateurs et ONGs (internationales et locales). Dans ce cadre, l’image
des projets est primordiale et les bénéfices sociaux et environnementaux qu’ils
apportent sont souvent importants, tout comme la qualité globale des projets ;
11
Les marchés du carbone forestier
montants significatifs sont aujourd’hui dédiées à ce secteur. Les mécanismes
16
vente et comment et quel standard choisir selon les différentes typologies de projet.
◆◆ Une ré-intégration au sein des marchés régulés après Kyoto ? selon quelles
modalités ?
Parce que la dimension des marchés volontaires reste trop restreinte face à l’ampleur
des enjeux liés au changement climatique, les négociations en vue d’un accord post-
Kyoto visent maintenant à réintégrer la question de l’inclusion des forêts au cœur du
dispositif global de lutte contre le changement climatique post-Kyoto. Par ailleurs,
d’autres marchés d’engagement (Europe, Etats-Unis, etc.) envoient de nombreux
signaux positifs pour la création d’un vaste marché de crédits forestiers.
Ainsi, la Papouasie Nouvelle Guinée et le Costa Rica ont proposé d’inclure des
incitations pour réduire la déforestation tropicale (REDD) lors de la 11 COP
ème
12
Résumé exécutif
à Montréal (2005). Cette demande a entraîné l’ouverture d’un processus de
négociation marqué par une participation très active de l’ensemble des pays, au Nord
comme au Sud. Après deux ans de négociation, à la conférence de Bali (COP 13), les
Parties s’accordent pour inclure la question forestière REDD dans le cadre de l’accord
sur le post 2012 et établissent la « feuille de route » qui doit mener à un accord.
Actuellement, les principaux points de discussion restent les suivants : quel doit être le
champ du mécanisme (REDD, REDD +, REDD ++) ? Comment définir des niveaux de
référence garantissant l’additionnalité des actions ? À quelle échelle doit-il intervenir
(approche nationale ou sous-nationale) ? Quel type de mécanisme incitatif mettre en
œuvre et dans quels délais (mode de financement notamment) ?
pays sont déjà rentrés dans cette phase, notamment via le FCPF ou le
programme UN-REDD ;
◆◆ Une phase intermédiaire : Elle permet la mise en œuvre des premières mesures
incluses dans la stratégie nationale REDD et considérées comme préalables à
la participation à un mécanisme basé sur des paiements au résultat. On estime
que cette phase intermédiaire nécessiterait un financement de l’ordre de 1,2 à
2,25 milliards d’€ ; 18
◆◆ Une phase finale basée sur le paiement aux résultats : le pays perçoit alors
des paiements basés sur les réductions d’émissions constatées par rapport
à un scénario de référence, grâce à un système de suivi et de comptabilité
fiable et transparent. Les travaux menés dans le cadre de la revue Eliasch 19
Si les modalités de participation des projets à ces mécanismes (notamment pour les
phases 2 et 3) sont encore inconnues, le guide donne des éléments aux porteurs de
projet et investisseurs pour les anticiper.
18 ���������������������������������������������������������������������������������������������
Report of the Informal Working Group on Interim Finance for REDD+ (IWG-IFR), October 27, 2009
19 ����������������������������������������������������������������������������
Eliash J., 2008. Climate change: Financing global forests, The Eliash Review
13
Les marchés du carbone forestier
◆◆ Conclusion
Alors que les projets forestiers ont longtemps été les parents pauvres des stratégies
d’atténuation, ils peuvent aujourd’hui profiter de ces nouvelles opportunités. Après
des blocages techniques, un démarrage des projets AR s’observe dans le cadre du
MDP. Toutefois les obstacles financiers demeurent (fermeture des marchés, crédits
temporaires, etc.). Le marché volontaire permet à des projets innovants, communicants
et exemplaires du point de vue environnemental et social de se développer, leur
qualité pouvant être garantie par des standards reconnus. Certains d’entre eux ont
le mérite de proposer des alternatives efficaces dans des contextes institutionnels
délicats et peuvent servir de précurseur. Des projets plus complexes ayant vocation
à devenir des modèles pour le reste du marché, comme les projets REDD+, sont
d’ores et déjà appuyés par des mécanismes « pilotes » comme le BioCF, le FCPF, les
programmes CASCADe (UNEP, FFEM) ou UN-REDD. Enfin, une éventuelle ouverture
des marchés du carbone de l’ère « post-Kyoto » aux crédits forestiers pourrait
bouleverser le paysage du marché du carbone forestier, stimulerait les investissements
et professionnaliserait ce marché encore naissant.
La force et la réussite de ces projets passe par leur rôle d’interface entre l’action
publique et l’initiative privée. Ils ont dans ce sens un grand rôle à jouer dans la mise
en œuvre et le déploiement des politiques climatiques de demain. Une déclinaison
des politiques et mesures en projets de ce type apparaît possible et nécessaire. La
participation du secteur privé dans cette approche constitue un levier que les enjeux
climatiques appellent.
14
Résumé exécutif
1. La position fragile des
projets forestiers au sein
des marchés du carbone
1 Terme issu des lignes directrices du GIEC pour les inventaires nationaux de GES (1996). Un autre
terme pour désigner ce secteur a été défini par ce même rapport actualisé en 2006 : Agriculture,
Forestry and Other Land Uses - AFOLU. Toutefois, le terme officiellement utilisé par les Nations
Unies reste LULUCF
15
Les marchés du carbone forestier
a)
49,0
44,7
39,4
Gt équiv.-CO2 /an
35,6
28,7
CO2 – combustibles fossiles, autres sources CO2 – déboisement, décomposition organique, tourbe
CH4 – agriculture, déchets, énergie N2O – agriculture, autres sources Gaz fluorés
b) Gaz fluorés c)
N 4O Déchets et eaux usées
1,1 % 2,8 %
7,9 %
Foresterie Approvisi-
CH4
17,4 % onnement
14,3 %
énergétique
25,9 %
CO 2
Agriculture
(combustibles
CO2 13,5 %
fossiles) 56,6 % Transports
(déboisement,
13,1 %
décomposition
de la biomasse, Industrie Bâtiments résidentiels
etc.) 17,3 % 19,4 % et commerciaux
CO2 (autres 7,9 %
sources)
2,8 %
Ces émissions sont principalement liées à la déforestation dans les pays de la zone
intertropicale et notamment au Brésil, en Indonésie, en Malaisie ou encore en République
Démocratique du Congo.
2 GIEC, 2007. Bilan 2007 des Changements Climatiques : Contribution des Groupes de Travail I, II
et III au Quatrième Rapport d’Evaluation du GIEC
16
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Si la déforestation contribue fortement aux émissions anthropiques de GES, les
écosystèmes forestiers interviennent également dans la lutte contre le changement
climatique au travers de l’absorption de grandes quantités de C02 grâce à la
photosynthèse. Cette situation s’explique à la fois par l’accroissement des surfaces
forestières dans les pays de l’hémisphère Nord, mais aussi par l’augmentation des
quantités de carbone stockées dans les forêts existantes au Nord comme au Sud.
Ainsi, au niveau mondial, les écosystèmes terrestres absorbent près de 2,6 GtéqC par
an soit plus que les émissions liées à la déforestation (1,6 GtéqC par an). Le bilan
« net » de la forêt est donc globalement positif d’environ 1 GtéqC par an (figure 2).
ns
io
ns
iss
tio
ém
rp
C
so
ab
C
Absorption par les écosystémes
Déforestation terrestres
Accumulation dans
l’Atmosphere
Figure 2 : Bilan global annuel des flux de carbone (émissions et absorptions) au niveau mondial
en GtéqC3. Les écosystèmes terrestres (principalement les forêts) absorbent plus de 30% des
émissions globales de carbone. 20% des émissions sont dues au changement d’usage des
sols, principalement la déforestation (Source : ONFI/GIEC)
Ainsi, le rôle des forêts vis-à-vis du climat est multiple. (i) Quand les forêts sont en
croissance (nouveaux boisements, forêts jeunes), elles retirent de l’atmosphère des
quantités importantes de CO2 pour les stocker sous forme de chaînes carbonées dans
17
Les marchés du carbone forestier
le tronc, les branches, les racines des arbres, ou encore le sol et sa litière . (ii) Quand
4
les forêts sont à l’équilibre, elles maintiennent ce stock de carbone : l’impact sur le
changement climatique est relativement neutre (émissions faibles liées à la mortalité
naturelle de certains individus ou absorptions faibles liées à la croissance des arbres).
(iii) Quand les forêts sont déboisées et remplacées par des cultures (palmier à huile
en Indonésie, soja au Brésil, agriculture de rente ou familiale en Afrique) ou des
prairies (élevage bovin en Amazonie), les quantités de carbone stockées sont relâchées
vers l’atmosphère. Enfin (iv) les produits bois peuvent se substituer à des énergies
fossiles ou à des matériaux énergétivores, évitant ainsi des émissions de GES lorsqu’ils
proviennent de forêts gérées durablement.
Amont Aval
4 Les bonnes pratiques du GIEC distinguent cinq compartiments de stockage de carbone au sein
d’une forêt : les biomasses aériennes et souterraines, le sol, la litière et le bois mort
18
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
1.2.1. Les projets de réduction des émissions dues à la
déforestation et la dégradation des forêts (REDD)
1 600
1 400 236
1 200
1 000
800
600
442 1 261
400 208
450 7
200 353 293
0
Tropical forests Temperate forests Boreal forests Arable land
(average for dry
and humid forests,
Biomass
weighted for
surface area) Soil
19
Les marchés du carbone forestier
Qu’est-ce qu’une forêt ?
Dans le cadre de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements
Climatiques (CCNUCC ou United Nations Framework Convention on Climate
Change – UNFCCC), on entend par « forêt », une terre d’une superficie
minimale comprise entre 0,05 et 1 hectare, comportant des arbres dont le
houppier couvre plus de 10 à 30% de la surface (ou ayant une densité de
peuplement équivalente) et qui peuvent atteindre à maturité une hauteur
minimale de 2 à 5 mètres. Chaque pays hôte doit choisir ces trois paramètres
de définition de forêt dans ces intervalles. Cette valeur peut se trouver sur
le site de la CCNUCC ou en contactant les Autorités Nationales Désignées
(AND) des pays considérés . (Source : ONFI)
1
20
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
On parlera de REDD « mosaïque » lorsque celle-ci se réalise en différents endroits,
comme dans le cas du développement de l’agriculture sur brûlis. On parlera de
REDD « frontière » lorsque celle-ci se réalise sur un front pionner, comme lors de
déboisements liés à l’agriculture de grande échelle. Pour lutter contre la déforestation
et la dégradation des forêts, ces projets mettent en œuvre des actions de conservation
(mise en place d’aires protégées) ou des activités permettant de lutter contre les causes
de ces phénomènes (reboisements, intensification de l’agriculture, gestion sylvicole
durable, amélioration de l’efficacité énergétique de foyers, etc.). Une récente étude
détaille les différents types d’activités mises en place dans le cadre de projets REDD . 7
◆◆ Les (re)boisements commerciaux, souvent de grande échelle, qui ont pour vocation
principale de produire des produits bois ou des produits forestiers non ligneux
(caoutchouc, etc.) ;
◆◆ Les (re)reboisements sur terrains dégradés dont les objectifs principaux sont la
récupération et la préservation des sols ;
7 Calmel M. et al., 2010. REDD at project scale. Development and evaluation guide. ONFI, CEPAL, AFD
21
Les marchés du carbone forestier
1.2.3. Les projets d’amélioration de la gestion sylvicole
(Improved Forest Management - IFM)
Ces projets sont mis en œuvre sur des « forêts » qui ont vocation à le rester. L’objectif
est d’accroître le stock de carbone au sein de ces espaces ou de réduire l’impact et les
émissions des activités d’exploitation via de meilleures pratiques sylvicoles. On peut
citer les exemples suivants :
Les produits bois jouent un rôle important dans la lutte contre le réchauffement
climatique. Tout d’abord, ils prolongent la durée du stockage du carbone contenu
dans le bois. Une fois l’arbre exploité, son contenu en carbone continue d’être stocké
dans les produits commercialisés, plus ou moins longtemps en fonction des produits
considérés. Selon le Groupement Intergouvernemental d’Experts du Climat (GIEC), un
m de produit bois permet de stocker, en moyenne 1 tCO2.
3
22
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
1.2.5. Les projets de biomasse énergie
Lorsque la ressource est gérée de manière durable , l’utilisation du bois comme source
8
d’énergie est quasiment neutre vis-à-vis du climat : les quantités de CO2 émises lors
de la combustion du bois sont compensées par les absorptions de CO2 par les forêts
en croissance. La biomasse utilisée pour des besoins énergétiques se substitue à des
énergies fossiles et évite ainsi les émissions de CO2 associées à leur combustion.
9
Il n’y a pas un marché mais des marchés du carbone caractérisés par leurs règles,
les types d’actifs échangés ainsi que par les types d’acteurs impliqués. On en
distingue deux grandes catégories. (i) Les marchés d’engagements contraignants font
intervenir des acteurs qui ont des engagements de réduction d’émissions dans le
cadre d’accords internationaux, de politiques nationales ou locales. (ii) Les marchés
volontaires fonctionnent en dehors d’engagements réglementés de réduction.
8 Ces critères de durabilité sont par exemple définis dans le cadre de méthodologies MDP
9 Ou dans certains cas à de la biomasse issue d’une ressource non renouvelable
10 Ces projets sont largement répandus dans le cadre du MDP. Les barrières méthodologiques et
financières pour ces projets sont différentes des projets REDD, AR et IFM
23
Les marchés du carbone forestier
Régulation
Cadres légaux : C CNUCC, Commission européenne, etc.
Organes exécutifs : Secrétariat de la CCNUCC, CE MDP, CS MOC, AND, PFD, etc.
Offre
Développeurs
de projet Intermédiaires
Crédits Crédits
Industriels sous sec ondaires Demande
quotas primaires Brokers (garantis) Acteurs sous quotas
Financeurs Traders
(pays, industriels, etc.)
Consultants Places de marché
Acheteurs volontaires
Développeurs de Acteurs financiers Produits (secteur privé, public,
technologies propres Produits (banques, assurances, ONG, individuel)
financier s de gestion
arbitrage, etc.) des risques
Gouvernements
ou agences Fonds carbone
gouvernement ales
Autres services
Contrôle qualité (EOD, EIA, ONG, etc.) ; assist ance juridique et légale ; assist ance technique ; information et analyse
de marché ; renforcement de capacité (agences de développement, ONG, AND, etc.)
Plusieurs marchés du carbone se sont mis en place depuis le début des années 2000.
En 2009, les principaux marchés opérationnels étaient les suivants :
11 Banque Mondiale, 2009. State and Trends of the Carbon Market 2009
12 D’après la Banque Mondiale, en 2008, 4 811 MtéqCO2 se sont échangées sur les marchés du
carbone, pour une valorisation de 84 milliards d’€. Il s’agit principalement d’échange de quotas
du système européen EU-ETS (64%), de crédits MDP secondaires (22%) et de crédits MDP
primaires (8%).
24
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
◆◆ Le marché des Etats qui ont pris des engagements dans le cadre du protocole de
Kyoto ;
Notons que d’autres marchés de ce type sont en cours de développement aux Etats-
Unis (Western Climate Initiative - WCI, marché fédéral), en Australie, au Canada ou
encore au Japon.
Dans le cadre des marchés d’engagement, des accords internationaux, des politiques
nationales ou locales contraignent des pays ou des acteurs économiques à réduire
leurs émissions de GES et leur attribuent un contingent de droits d’émissions qu’ils
ont la possibilité d’échanger. Un objectif d’émission total est fixé et les acteurs doivent
atteindre cet objectif soit en réduisant leurs émissions soit en achetant des permis
d’émissions à des acteurs ayant réussi à réduire leurs émissions au-delà de leurs
engagements. Le choix s’établit en fonction des coûts de réduction et de la valeur du
permis d’émissions (ce système est dit de « cap and trade »).
réductions effectives qu’ils pourront réaliser, les pays disposent de trois mécanismes
pour remplir leurs engagements: (i) un mécanisme d’échange de quotas (Unité de
Quantité Attribuée - UQA ou Assigned Amount Unit - AAU), et deux mécanismes de
projet : (ii) la Mise en Œuvre Conjointe dans les pays de l’annexe I (MOC ou Joint
13 http://unfccc.int/parties_and_observers/items/2704.php
14 Et à ce titre inscrits à l’annexe B du protocole de Kyoto
25
Les marchés du carbone forestier
Implementation – JI) et (iii) le Mécanisme de Développement Propre dans les pays
hors annexe I – les pays de développement (MDP ou Clean Development Mechanism –
CDM). Les crédits issus de ces deux derniers mécanismes sont les Emission Reduction
Unit (ERU) et les Certified Emission Reduction (CER).
Malgré son rôle très important, l’inclusion du secteur LULUCF a été âprement discutée
lors des négociations du protocole. La décision de comptabiliser les absorptions de
la forêt dans les pays de l’annexe I et les émissions dues à la déforestation dans les
pays non annexe I (via le MDP) a été très controversée. Certains s’y opposaient pour
des raisons environnementales, car ils craignaient la création d’une échappatoire
aux efforts de réduction des émissions liées à la combustion d’énergies fossiles
étant donné le très grand potentiel de la forêt. D’autres opposaient des questions
méthodologiques à cette comptabilisation: incertitudes scientifiques, manque de
données disponibles, données peu comparables d’un pays à l’autre et risque de
création d’incitations perverses. Par ailleurs, le protocole de Kyoto a nécessité la mise
en place à grande échelle d’outils financiers, réglementaires, nouveaux et complexes,
au terme de négociations âpres. En conséquence, les pays n’ont pas souhaité fragiliser
cet édifice avec des projets à l’époque moins bien maîtrisés. En conséquence le rôle de
la forêt dans le cadre du protocole Kyoto est limité dans les pays de l’annexe I (via les
articles 3.3 et 3.4) et dans les pays non annexe I (via la limitation du MDP aux projets
AR).
◆◆ La place de la forêt dans les pays de l’annexe I : une équation complexe entre
quotas d’absorption et crédits issus de projets MOC
Les forêts des pays de l’annexe I sont prises en compte via les articles 3.3 et 3.4
du protocole de Kyoto et peuvent, à ce titre, générer des « Unités d’Absorption »
(UA ), utilisables par les pays pour remplir leurs engagements. Toutefois, les règles de
15
Dans les inventaires nationaux de GES, l’article 3.3 comptabilise les changements
d’usage du sol. L’article 3.4 comptabilise la gestion forestière (figure 6). Notons que
l’article 3.3 est obligatoire alors que l’article 3.4 est optionnel. La séquestration du
carbone dans les produits bois a été exclue du protocole.
26
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Article 3.3 – Obligatoire
Surface boisée
Figure 6: Comptabilisation des forêts dans Les articles 3.3 et 3.4 du protocole de Kyoto au titre
de l’année 2008 (source : ONFI)
Les forêts déboisées ou (re)boisées entre 2008 et 2012 sont prises en compte dans
16
le cadre de l’article 3.3. Seules les émissions résultant de déboisements intervenus sur
la période 2008-2012, ainsi que la séquestration due à des boisements sur la période
2008-2012 sont prises en compte (on parle ainsi de comptabilisation « brut – nette »).
Malgré une dynamique de (re)boisement importante dans les pays de l’annexe I, le
bilan de l’article 3.3 est difficilement positif car les déboisements entraînent des
émissions rapides et importantes, tandis que la séquestration par les (re)boisements
est plus lente.
Les modalités et procédures relatives aux projets MOC ont été développées
récemment, notamment parce que les projets MOC ne peuvent générer des crédits
27
Les marchés du carbone forestier
qu’à compter de 2008 (début de la période du protocole de Kyoto). Un faible
nombre de projets est en cours d’instruction à ce jour (256 projets contre 5513
projets MDP ). Le cas des projets forestiers dans le cadre de la MOC est encore plus
19
complexe. D’une part, les articles 3.3 et 3.4 sont faiblement incitatifs. D’autre part,
de nombreuses questions se posent encore aujourd’hui concernant la possibilité de
générer des ERU par des projets MOC forestiers . Ces obstacles expliquent en grande
20
partie l’absence d’intérêt des pays de l’annexe I et d’acheteurs potentiels pour ces
crédits, les règles actuelles ne permettant pas aux projets forestiers de se développer
correctement . Néanmoins, un projet MOC (en Roumanie) est enregistré. Seule la
21
Le cas de la Nouvelle-Zélande
La forêt dans les pays non Annexe I est prise en compte au travers du MDP . Seuls 22
les projets AR sont éligibles. De nombreux critères, présentés dans l’encadré suivant,
précisent les modalités d’éligibilité à ce mécanisme . 23
Pour pouvoir générer des crédits carbone dans le cadre MDP, un projet
doit être audité par un tiers externe (validation) et démontrer qu’il remplit
un certain nombre de critères décrits ci-dessous. Le projet peut alors être
enregistré par le Conseil Exécutif du MDP (voir annexe 2 pour plus de détails)
22 Les modalités du MDP forestier sont précisées par trois principales décisions de la Conférence des
Parties : la décision 17/CP7 adoptée à Marrakech en 2001, la décision 19/CP9 adoptée à Milan
en 2003, et la décision 14/CP10 adoptée à Buenos-Aires en 2004
23 Les modalités et procédures sont facilitées pour les projets dits de « petite échelle », c’est-à-dire
les projets qui absorbent moins de 16 000 tonnes de téqCO2 par an
29
Les marchés du carbone forestier
◆◆ Scénario de référence : un projet doit établir un scénario de référence qui
décrit ce qui se passerait en l’absence de projet. Seule la différence entre
les absorptions du projet et le niveau de référence pourra être l’objet d’une
vente de crédits ;
1 http://cdm.unfccc.int/methodologies/index.html
30
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Aujourd’hui, les projets MDP forestiers représentent une fraction très faible des projets
et des crédits du marché MDP (figure 7).
Gaz industriel
Projets MDP enregistrés : 1834 Projets MDP en validation : 2839
9 Enérgies renou
8 3 39
42 24 Méthane (déc
79 68
202
Efficacité éner
505
Substitution d
AR
autres
Gaz industriels
Projets MDP en validation : 2839
Enérgies renouvelables 469
460 9
39 1725
24 1040
68 Méthane (déchêts, mines, etc.), Ciment
Efficacité énergétique
505
Gaz industriels Substitution de combustibles
Enérgies renouvelables AR
24 Méthane (déchêts, mines, etc.), Ciment autres
Efficacité énergétique
469
Substitution de combustibles 1725
Figure 7 : La place des projets forestiers dans le MDP. Les projets forestiers représentent 0,4%
AR
des projets enregistrés et 1,4% des projets en validation. 0,1 MtéqCO2 de crédits MDP forestiers
ont été échangés en 2008 pour 389 MtéqCO2 de crédits MDP primaires au total. A noter que
autres
la validation de cinq projets a été terminée sans demande d’enregistrement (Source : PNUE / 24
1725
Banque Mondiale ) 25
31
Les marchés du carbone forestier
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
Décisions sur les modalités et procédures
Autres
X
secteurs
Secteur
X
LULUCF
Méthodologies approuvées
Autres
10 32 61 83 104 115 132
secteurs
Secteur
1 5 13 15 16
LULUCF
Projets enregistrés (entre parenthèse : nombre total de candidats à la validation pour les projets
AR)
Autres
2 143 586 1146 1723 1834
secteurs
Secteur 1 1 1 8
LULUCF
(4) (13) (36) (52)
Figure 8: Mise en œuvre de projets MDP AR, en comparaison avec les autres secteurs (en
cumulatif) (Source : ONFI)
Les projets MDP forestiers sont plus complexes que nombre d’autres technologies
de projets MDP (énergie, industrie, etc.), notamment sur le plan méthodologique. En
effet, ils nécessitent la réalisation, de nombreuses mesures de terrain, la démonstration
de l’éligibilité des terres ou la délimitation des parcelles plantées. De plus, pour que
les projets forestiers puissent être éligibles, les AND doivent choisir des paramètres de
définition des forêts et des critères de développement durable, ce qui n’a pas encore
été fait dans un certain nombre de pays du Sud). Au fur et à mesure de la mise en
œuvre des projets, d’autres barrières peuvent surgir. Il s’agit notamment des obstacles
juridiques liés à la détermination de la propriété foncière, mais aussi des obstacles
relatifs aux droits réels et d’usage, y compris coutumiers, sur les terrains ou les
ressources sylvicoles. Ces barrières ont pu conduire les investisseurs à se tourner vers
d’autres technologies MDP aux coûts moindres et aux risques mieux maîtrisés.
32
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
développeurs et des consultants. Aujourd’hui, même si le montage des projets reste
complexe, les principaux obstacles au développement de ces projets sont levés : seize
méthodologies sont d’ores et déjà disponibles, ainsi qu’un certain nombre d’outils
officiels pour aider les porteurs de projets à démontrer l’additionnalité du projet,
calculer les gains carbone ou choisir la bonne méthodologie.
Nous venons de présenter les contraintes pesant sur l’offre de projets MDP AR. L’un
des principaux facteurs de blocage à l’essor du MDP forestier pèse néanmoins sur la
demande et reste la non-acceptation des crédits forestiers dans le cadre du système
européen EU-ETS. Ce système d’échange est le dispositif communautaire pour réduire
les émissions dans le secteur de la production d’énergie et des principales industries
émettrices de GES. Ce marché du carbone est actuellement le plus important au
monde, tant en valeur qu’en volume, et représente la principale demande en crédits
issus du MDP . La fermeture de ce marché aux crédits forestiers limite fortement la
26
Ce blocage est tout d’abord lié (i) à des facteurs politiques. Certains acteurs ont
fait pression pour laisser de coté le secteur forestier au motif que la séquestration
du carbone n’est que temporaire et réversible. Selon ce point de vue le système doit
se concentrer sur la réalisation d’investissements dans les secteurs énergétiques
et industriels fortement émetteurs. Il est ensuite lié (ii) à des facteurs comptables.
L’inclusion de crédits temporaires dans le système de registre européen engendrerait
des complexités méthodologiques et une crainte d’un déplacement de responsabilité
vers l’Etat en cas de disparition d’entreprises ne pouvant ainsi plus remplacer les
crédits temporaires à l’expiration de leur durée de validité. Enfin (iii), la crainte d’un
afflux de crédits forestiers susceptibles de déstabiliser ce marché naissant a conduit
les décideurs européens à exclure ce type du projet du système EU-ETS.
26 Banque Mondiale, 2009. State and Trends of the Carbon Market 2009
27 Ecosystem Marketplace, 2010. State of the Forest Carbon Markets 2009
33
Les marchés du carbone forestier
de nombreux États ont adopté des politiques de plafonnement de leurs émissions
de GES, de concert avec des initiatives régionales plus larges. Dans le Nord-Est, la
RGGI, limite les émissions des centrales électriques pour une période de six années
selon un mécanisme de marché « cap and trade ». Dans l’Ouest, la WCI a été formée
en 2007 et se donne un objectif régional de réduction de 15% des émissions de GES
entre 2005 et 2020. Un mécanisme de marché similaire se dessine, plaçant la forêt
au cœur de la stratégie de compensation des émissions par des projets. La plupart
des initiatives développées dans le cadre des marchés régulés américains intègre des
projets forestiers notamment le RGGI et le WCI au niveau régional, et les marchés de
Californie, de l’Oregon et d’Alberta au niveau des Etats.
Dans les marchés volontaires, des acteurs prennent des engagements volontaires
de réduction de leurs émissions et achètent des réductions d’émissions pour «
compenser» (tout ou en partie) ou « neutraliser » leurs impacts sur le climat. Cette
neutralité peut concerner des émissions individuelles (particuliers), des entreprises,
des évènements et même des produits de grande consommation. Les individus ou
entreprises, organisateurs d’évènements ou fournisseurs n’ont pas de contraintes
dans leurs pays pour lutter contre les changements climatiques mais veulent agir pour
des raisons éthiques, d’image environnementale ou pour anticiper de prochaines
régulations (on parle alors de pre-compliance). Ils achètent des réductions d’émissions
sur les marchés volontaires (alors appelées VER - Voluntary Emission Reduction), qui
présentent la particularité d’être générés conformément à des standards d’origine
privée généralement plus flexibles que les règles et modalités prévues par les marchés
règlementés, notamment les crédits MDP et MOC du protocole de Kyoto.
34
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Présentation d’un projet issu du marché volontaire : REDD
dans la réserve de Juma (étude de cas n°1, voir annexes)
En 2008, le marché du CCX a représenté près de 56% des volumes échangés contre
44% pour le marché OTC . Si l’on regarde la valeur des crédits échangés, la tendance
28
est inversée : 56% pour le marché de détail contre 44% pour le marché CCX.
Globalement, le CCX échange de plus grandes quantités de crédits à des prix plus
faibles.
28 Ecosystem Marketplace, 2009. State and Trends of the Voluntary Carbon Markets 2009
35
Les marchés du carbone forestier
Dans le cadre des marchés volontaires, les activités éligibles sont beaucoup plus
diverses que les projets AR éligibles au MDP. Elles peuvent concerner tous les types de
projets forestiers, notamment REDD et IFM. Comme le montre la figure 9, la place de la
forêt dans ces marchés est bien plus importante que dans le cadre du MDP.
Crédits MDP primaires échangés en 2008 Crédits VER échangés OTC en 2008
par technologie : 389 MtéqCO2 par technologie : 54 MtéqCO2
Forêt : 3,7 MtéqCO2 = 21 M�
6%
0% 14% 5%
6%
2% Efficacité énergétique
Energies renouvelables
4%
37% 7% Gaz industriels
Méthane : mines de charbon
Méthane : décharges &
50% déjections animales
20% Forêt
Autres
3%
45% 1%
Crédits CFI (CCX) échangés en 2008 : 69 MtéqCO2. Forêt : 1,3 MtéqCO2 (2%) = 3,5 M �
Figure 9 : La place des projets forestiers dans le marché volontaire en comparaison avec le MDP, en
échange de crédits (2008). On observe une plus grande place des projets forestiers dans le marché
volontaire OTC (7%), CCX (2%) que dans le MDP (0,1%) (Source : Ecosystem Marketplace)
C’est avant tout l’attrait des acheteurs pour les projets forestiers qui expliquent cette
tendance. Ils sont en effet plus attractifs en termes d’image car leurs effets positifs
29
sur le changement climatique sont plus intelligibles pour le grand public . Une récente 30
étude confirme l’intérêt des acheteurs pour ces crédits (figure 10) : ces derniers
31
29 Harris E., 2006. The voluntary Carbon Market: Current & Future Market Status, and Implications for
Development Benefits; Working Paper, Round Table Discussion : Can Voluntary Carbon Offset Assist
Development ?, IEDD
30 Taiyab N., 2006. Exploring the Market for Voluntary Carbon Offsets, IIED
31 Neeff T. & al., 2009. Forest Carbon Offsetting Survey 2009
36
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Bénéfices environnementaux et sociaux 447
7 4411 55 66
Prix compétitif 1
111 22 9
9 333
3 2266
0%
0% 20%
20% 40%
40% 60%
60% 80%
80% 100%
100%
Tout á f ait d'accord Pas d'accord
D'accord Pas sûr
Figure 10 : Les avantages des projets forestiers pour les acheteurs de crédits
(Source : Ecosecurities)
Les quantités de crédits forestiers échangés sur le marché volontaire ont continué
leur hausse entre 2007 et 2008 passant de 3,7 à 5 MtéqC02 soit une progression
de près de 135%, (pour une valorisation de 24,5 M€ ). Cette forte hausse s’explique 32
37
Les marchés du carbone forestier
Les principaux standards de qualité forestiers
sur le marché volontaire
des crédits correspondant à des absorptions par le projet qui auront lieu dans
le futur) ;
5
1 http://www.v-c-s.org/
2 http://www.climate-standards.org/
3 http://www.climate-standards.org/REDD+/index.html
4 S’opposant aux crédits ex-post, générés après la séquestration ou les émissions évitées de
GES
5 http://www.carbonfix.info/
38
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
◆◆ Le Chicago Climate Exchange (CCX), créé en 2003, est un marché
volontaire qui fonctionne comme une véritable bourse où s’échangent des
unités de GES. D’abord limité aux projets issus de pays non signataires du
protocole de Kyoto, il s’est ouvert en 2008 aux projets de réduction de
GES du monde entier. Son cahier des charges est plus souple que celui des
projets MDP, comme par exemple sur la démonstration de l’additionnalité.
Les protocoles CCX acceptent aujourd’hui aussi bien des projets AR, IFM et
REDD ainsi que des projets de stockage dans les produits bois ;
6
6 http://www.chicagoclimatex.com/
7 http://www.climateregistry.org/
8 http://www.planvivo.org/
39
Les marchés du carbone forestier
◆◆ Notons enfin que le MDP peut-être utilisé comme standard de qualité dans
le cadre des marchés volontaires. Parmi les autres standards du marché
volontaire utilisés l’on peut citer les standards des bureaux d’audits SGS et
Tüv Süd (VER +), des standards plus régionaux (Greenhouse Friendly en 9
9 http://www.climatechange.gov.au/greenhousefriendly/
10 http://www.americancarbonregistry.org/
11 http://www.socialcarbon.org/
Dans le cadre du marché CCX, si la forêt occupe en 2008 une place relativement
faible (2%), le secteur a connu une très forte hausse (de 0,04 à 1,3 MtéqCO2). La
forte structuration de ce marché (définition des protocoles pour le secteur forestier,
etc.), la souplesse et la simplicité de ces protocoles peuvent expliquer cette tendance.
40
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Marchés Mécanismes de projet
Kyoto Volontaire
EU-ETS
GGAS
CCBs
MOC
MDP
CCX
CAR
VCS
Vivo
Plan
CFS
REDD
AR
IFM
Tableau A : éligibilité des projets aux principaux standards et marchés
◆◆ Une revue des informations mises à disposition par les différents standards et
marchés a été réalisée pour identifier les projets forestiers enregistrés ou candidats
à l’enregistrement. Cette revue a concerné les principaux standards et marchés
suivants : MDP, MOC, VCS, VER+, CCBs, CFS, American Carbon Registry, Plan Vivo,
CCX, Greenhouse Friendly, PFSI, Oregon standard, GGAS, RGGI, CAR ;
◆◆ Une revue des projets proposés dans le cadre des marchés volontaires a été
réalisée via l’information fournie par 83 compensateurs au niveau mondial ;
Ces informations ont été croisées avec d’autres sources disponibles comme les bases
de données de projets forestiers existantes (notamment celles de l’ONF International,
du BioCarbon Fund, du Forest Carbon Portal, du Carbon catalog, de Winrocks, etc.)
ou des informations mises à disposition par les AND des pays hors Annexe I.
Seuls les projets ayant spécifiquement un objectif carbone (calcul des absorptions
de C02, compensation ou vente de crédits associés aux projets) ont été retenus. Les
33 Gardette Y. & Locatelli B., 2007. Les Marchés du Carbone Forestier. ONFI, CIRAD
41
Les marchés du carbone forestier
projets correspondants à plusieurs sites de plantations mais réalisés par un même
opérateur dans un même endroit ont été considérés comme un seul projet afin de ne
pas surestimer le nombre de projets. Par contre, un projet de reboisement localisé
dans deux zones différentes (deux pays différents ou deux Etats) a été considéré
comme double. L’échelle administrative retenue a été l’Etat (Etats-Unis, Australie,
Canada, Australie, Brésil) ou la région (principaux pays européens).
◆◆ L’utilisation d’un standard ou label. Les projets forestiers ont été classés en
trois catégories : (i) les projets enregistrés au titre d’un standard, (ii) les projets
candidats et en cours d’enregistrement auprès d’un standard, et (iii) les projets qui
ne sont pas aujourd’hui (ou pas encore) dans une démarche de standardisation.
Dans la suite du document, nous pourrons regrouper sous le terme « dans une
démarche de standardisation » les projets des catégories (i) et (ii).
Cette analyse permet d’avoir une vision unique de l’offre en projets carbone forestiers
et de leurs principales caractéristiques présentes et à venir.
Sur les 178 projets recensés en 2007, moins d’une vingtaine étaient dans une
démarche de standardisation (environ 10%). Sur les 434 projets recensés
aujourd’hui, 136 projets sont enregistrés ou candidats à l’enregistrement (soit plus
de 30%, figures 11 et 12). Cela montre une très forte dynamique des projets vers la
standardisation.
42
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
434 projets recensés en 2009
61
Projets enregistrés
selon au moins un
standard
Projets candidats à la
75 standardisation
298
15 projets envisagent une double certification
Standards considérés : MDP, MOC, CCBs, CCX, CAR, CFS, Greenhouse
Friendly, Oregon Standard, VCS, Plan Vivo, VER +, GGAS, PFSI, RGGI
Figure 11 : 31% (136 projets) sont actuellement dans une démarche de standardisation
(Source : ONFI)
60
50
40
30
20
10
0
ly
C
AS
R+
St
B
vo
SI
nd
CF
VC
CA
O
CC
CC
PF
GG
VE
Vi
on
ie
M
Fr
an
g
DP
re
se
Pl
M
O
ou
nh
ee
Gr
Figure 12 : Répartition des projets par type de standard (Source : ONFI)
Parmi les projets dans une démarche de standardisation, près de 72% d’entre eux
répondent à l’un des trois standards suivants : MDP ou MOC (35%), CCBs (24%),
CCX (13%). Premier cadre réglementaire, le standard MDP/MOC est donc le standard
le plus utilisé. Parmi ces standards, il faut distinguer les standards régionaux adaptés
à un marché précis (CAR et Oregon Standard aux Etats-Unis, Greenhouse Friendly
43
Les marchés du carbone forestier
et GGAS en Australie, PFSI en Nouvelle Zélande) et les standards internationaux
susceptibles de s’appliquer dans toutes les régions du Monde. Les premiers n’ont
pas vocation à s’appliquer dans d’autres régions du monde ce qui explique leur part
relative plus faible en nombre de projets.
Notons que les données relatives au standard VCS sont sous estimées en raison de
la non diffusion sur le site du VCS des projets en cours d’enregistrement. Seuls les
projets validés sont publics.
La figure 13 laisse apparaître une répartition homogène des projets forestiers de par le
monde.
L’Amérique Latine est le principal fournisseur de projets avec près de 33% des projets
recensés répartis entre l’Amérique du Sud (environ 22% des projets) et l’Amérique
Centrale (10%). En Amérique du Sud, 80% des projets sont localisés dans seulement
quatre pays : le Brésil (33%), la Colombie (19%), le Pérou (14%) et l’Equateur (14%).
En Amérique Centrale, les projets sont répartis de manière plus homogène au sein
des huit pays de la sous région qui comptent tous au moins trois projets. Trois pays
regroupent environ 55% des projets : le Mexique (26%), le Costa-Rica (16%) et le
Honduras (16%).
44
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Projets forestiers par région 2009 : 434 projets
8,1%
15,9%
13,8%
15,1% 7,6%
32,0%
Amérique du Nord
11,0%
Amérique Latine
Europe
7,0% Afrique
Asie
Océanie
16,3%
18,6%
Figure 13 : répartition des projets forestiers par grande région géographique en 2007 et 2009
(Source : ONFI)
L’Afrique arrive en deuxième position avec près de 22% des projets recensés (95
projets répartis au sein de 22 pays). C’est donc beaucoup plus qu’en 2007 ou la
part des projets forestiers africains avait été estimée à seulement 7%. Trois pays se
détachent nettement: le Kenya (19%), l’Ouganda (14%) et l’Ethiopie (13%).
L’Amérique du Nord vient ensuite avec environ 16% des projets répartis entre les
Etats-Unis (80%) et le Canada (20%).
L’Asie compte pour 14% des projets répartis sur 10 pays. Les deux pays principaux
sont l’Indonésie (31%) et l’Inde (27%). La Chine arrive seulement ensuite avec 14%
des projets. 8% des projets sont localisés en Océanie, quasiment tous en Australie et
7,6% en Europe.
L’évolution la plus notable par rapport aux données de 2007 est le rééquilibrage
45
Les marchés du carbone forestier
Nord/Sud : la part relative des projets basés dans les pays du Nord diminue largement
que ce soit aux Etats-Unis (32 à 16%), en Australie (15 à 8%) ou en Europe (19 à
7%) pour passer de près de 65% des projets à seulement 32% des projets. La part
relative des projets basés dans les pays du Sud augmente largement pour passer de
35 à 68%. Cette tendance est particulièrement importante pour l’Amérique Latine (16
à 33% des projets) et l’Afrique (7 à 22% des projets). Elle est moins notable en Asie
(11 à 14%).
Au niveau des pays annexe I, les principaux pays concernés restent les Etats-
Unis (13%) et l’Australie (8%). Ces pays sont plus dynamiques sur les marchés
volontaires en raison notamment de la non ratification par ces pays du protocole
de Kyoto (au moins jusqu’en 2007 pour l’Australie) laissant une place importante
au développement de projets volontaires . Le premier pays européen en termes de
34
<5
< 10
< 30
> 30
46
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Projets dans une démarche de standardisation : 136 projets
11,7%
23,5% 24,5%
10,1%
Figure 14 : répartition des projets forestiers par pays et par grande région géographique selon la
standardisation (Source : ONFI)
47
Les marchés du carbone forestier
Projets forestiers par technologie : 434 projets
4,1%
15,6%
AR
REDD
IFM
80,3%
Figure 15 : répartition des projets forestiers par technologie (Source : ONFI)
Pour évaluer la taille des projets, deux sources d’informations sont généralement
disponibles : les crédits générés par les projets et les surfaces concernées. Il a été
décidé ici de ne travailler que sur les données en surface qui sont plus souvent
disponibles et qui sont surtout plus précises que les données relatives aux quantités
de crédits générées. En effet, les données en volume de crédits sont difficilement
comparables en raison de la variété des approches méthodologiques adoptées par les
porteurs de projet.
Il a été possible de collecter les données de surface pour environ 250 projets
forestiers (57,6% des projets) avec une répartition homogène entre les projets
disposants de label (79 données – 58%) et ceux n’en disposant pas (171 données –
57,4%).
48
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
Surfaces Nombre Surface
cumulées (ha) moyenne (ha)
70
60
50
Nombre de projets
40
30
20
10
0
AR REDD AR REDD AR REDD AR REDD AR REDD
<100 ha 100-500 500-5000 5000- > 20000 ha
ha ha 20000 ha
Figure 16 : Taille des projets recensés selon la technologie et la standardisation (Source : ONFI)
Près de 9 millions d’ha de projet ont ainsi été recensés. Les projets AR cumulent une
surface totale d’environ 550 000 hectares (200 projets) tandis que les projets REDD
représentent 8,5 millions d’ha (50 projets), confirmant la différence d’échelle entre les
projets AR et REDD. Notons que 55 des 59 projets de moins de 100 ha ne sont pas
dans une démarche de standardisation. Ces 55 projets représentent 32% des projets
non standardisés.
49
Les marchés du carbone forestier
1.4.5. Un prix de vente des crédits en moyenne
supérieur aux autres technologies
En ce qui concerne les prix de vente des crédits, une récente étude montre que le
35
prix moyen de vente des crédits forestiers est de 1,7 €/téqCO2 dans le CCX,
3 €/téqCO2 dans le MDP et de 4,7 €/téqCO2 dans le cadre du marché volontaire
36
OTC (en 2008, figure 17). Dans le cas du principal marché pour les crédits forestiers
(OTC), cette moyenne est supérieure au prix moyen observé sur l’ensemble du marché
(3,4 €/téqCO2). On observe de plus une forte différence de prix entre les projets AR
(3,9€/téqCO2) et REDD (7,6 €/téqCO2). Enfin, il faut noter une très forte variabilité
des prix observés dans le cadre du marché OTC (de 0,4 à 40 €/téqCO2), reflétant
l’absence de liquidité dans ce marché et le manque de visibilité sur le prix de vente qui
peut en découler.
9
8
7
6
5
4
3
2
1
0
OTC REDD OTC AR OTC CCX MDP
Figure 17 : Prix de vente des crédits en fonction du marché et des types de projets (Source :
Ecosystem Marketplace)
50
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
1.5. Conclusion
Face aux craintes longtemps évoquées de voir déferler d’importants volumes de crédits
forestiers à bas coûts conduisant à une dégradation du signal prix sur les marchés,
force est de constater que la situation est quasiment inversée. La forte demande
pour les crédits forestiers est jugulée par la fermeture des principaux marchés
d’engagement et par des impératifs de qualité sur les marchés volontaires. L’offre
en crédits forestiers standardisés à coût raisonnable reste actuellement insuffisante,
même si les 136 projets rentrés dans cette démarche incitent à l’optimisme quand à
la consolidation du rôle des projets forestiers au sein des marchés du carbone. Ces
deux points se reflètent dans l’évolution modérée des projets forestiers entre 2007 et
2008 (figure 18), mais aussi dans le prix de vente des crédits forestiers sensiblement
proche des prix moyens observés. Le marché du carbone forestier marque donc une
phase de transition et de consolidation. L’euphorie désordonnée des premiers temps
cède la place à l’instauration de standards qui professionnalisent en partie ce marché
non régulé.
6,0
Kyoto (UQA)
5,0
NZ ETS
MDP
4,0 GGAS
CCX
3,0 OTC
2,0
1,0
-
pre-2002 2.002 2.003 2.004 2.005 2.006 2.007 2.008 Jan-Juin
2009
51
Les marchés du carbone forestier
Notons toutefois que ce marché reste une « niche » en comparaison des marchés
régulés, notamment le MDP (figure 19). Si les barrières méthodologiques se lèvent
progressivement, les barrières à l’investissement demeurent et restent aujourd’hui un
frein majeur au développement des projets. Seule une réelle intégration du secteur au
sein des marchés d’engagement permettra de diriger des flux financiers d’ampleur vers
la forêt et de lutter efficacement contre le changement climatique.
Volumes CER primaires (MDP), CFI (CCX) et VER OTC échangés en 2006, 2007 et 2008 OTC
CCX
MDP
700
600 43
15 23
10
500
54
69
400
En MtéqCO2
300
537 552
200 389
100
0
2006 2007 2008
Figure 19 : Le marché volontaire (470 M€, dont 265 M€ pour les crédits OTC, 205 M€
pour CCX), malgré sa forte progression, reste bien plus restreint que le marché MDP primaire
(4 346 M€)
52
La position fragile des projets forestiers au sein des marchés du carbone
2. Quel marché du carbone
forestier après 2012 ?
Dans ce contexte, la prise en compte des projets REDD dans les pays en voie de
développement apparaît comme une option d’atténuation significative, susceptible
37 GIEC, 2007. Bilan 2007 des Changements Climatiques : Contribution des Groupes de travail I, II
et III au Quatrième Rapport d’Evaluation du GIEC
53
Les marchés du carbone forestier
de générer des réductions d’émissions importantes à un coût relativement bas, ce
qu’à notamment mis en exergue le rapport Stern sur l’économie du changement
climatique . De plus, on attend également du REDD d’importants co-bénéfices en
38
2005. Le REDD fait ainsi partie du plan d’action adopté par les Parties à la CCNUCC
lors de la COP 13 de Bali en décembre 2007 et des accords de Copenhague
(COP 15), qui pourront mener à l’adoption d’un nouvel accord international sur le
changement climatique, attendu lors de la COP 16 de Cancun (novembre 2010).
De nombreux points restent en suspend dans les négociations sur le REDD. Plusieurs
questions relatives à l’intégrité environnementale des réductions d’émissions
qui seront reconnues au mécanisme REDD sont en débat (échelle et champ du
mécanisme, scénario de référence, distribution des bénéfices, etc.). De plus, les
modalités de mise en œuvre et de financement restent à établir.
Avant Copenhague, la plupart des parties s’accordaient pour considérer que le futur
54
Quel marché du carbone forestier après 2012 ?
mécanisme REDD devra être mis en œuvre à une échelle nationale afin d’éliminer le
risque de déplacement d’émissions à l’intérieur d’un même pays. A Copenhague, et
sous la pression notamment des Etats-Unis, de l’Indonésie et de la Colombie, l’idée
que les activités REDD pourraient aussi être sous-nationales a été renforcée.
Les partisans d’une approche sous-nationale mettent en avant que peu de pays
39
Si le débat n’est pas tranché, une voie intermédiaire est proposée, la « nested
approach » qui permettrait la mise en œuvre d’actions au niveau sous national
susceptibles de générer des crédits lors d’une phase temporaire. Ces actions auraient
pour objectif de tester des initiatives pilotes et renforceraient progressivement
les capacités nationales. Au bout d’un certain temps, ou lorsque ces actions
concerneraient une certaine proportion du territoire national, le pays devrait alors
passer à une approche nationale.
Par ailleurs, afin d’éviter les fuites d’un pays à l’autre, la participation au futur
mécanisme REDD devra être la plus importante possible, ce qui suppose de mettre
en place un dispositif suffisamment flexible et incitatif pour des pays aux contextes
nationaux très différents.
39 L’échelle sous-nationale peut inclure des échelles étatiques (pour les pays fédéraux), régionales,
départementales, etc. mais aussi « projets » comme dans le cadre du MDP
55
Les marchés du carbone forestier
multiples causes d’ordre économique, politique, social, culturel, biophysique , dont il 40
transition forestière (figure 20). Dans la phase initiale, la déforestation est entraînée
par la demande croissante en matières premières agricoles et le développement
corollaire des infrastructures. Cette tendance s’accélère avec l’arrivée de migrants et
la croissance économique jusqu’à atteindre un maximum puis s’inverser du fait de la
rareté des terres boisées défrichables, du développement des opportunités d’emploi
en dehors du secteur agricole, et de l’augmentation de la demande en produits et
services forestiers qui stimule les plantations et le recru naturel.
Couverture
forestière Nord Amazonie,
Bassin du Congo
Brésil, Indonésie
Europe, Amérique
du Nord
Philippines Inde, Chine
Temps
40 Geist H. & Lambin E., 2006. What Drives Tropical Deforestation? A Meta-analysis of Proximate
and Underlying Causes of Deforestation Based on Subnational Case Study Evidence. LUCC
Report Series
41 Rudel T.K. & al., 2005. Forest Transitions: Towards a Global Understanding of Land Use Change.
Global Environmental Change 15 (1): 23-31
56
Quel marché du carbone forestier après 2012 ?
Pour les pays en pleine transition forestière, le niveau de référence pourrait être une
projection des tendances historiques, mais les pays se situant en amont du processus
ne peuvent adopter cette approche qui les pénaliserait (car leur taux de déforestation
historique est peu élevé). Ils réclament donc l’application d’un scénario de référence
« projeté » qui reflète les pressions que leurs écosystèmes forestiers devraient subir du
fait de leurs trajectoires de développement à venir.
Si les discussions se sont tout d’abord concentrées sur la lutte contre la déforestation
tropicale, le champ potentiel du REDD s’est ensuite élargi à d’autres options
d’atténuation dans le secteur forestier. Le Plan d’Action de Bali (2007) fait ainsi
référence à la réduction des émissions liées à la déforestation et dégradation des
forêts ainsi qu’au rôle de la conservation, de la gestion forestière durable et de
l’accroissement des stocks de carbone forestier, ce qui inclut potentiellement les (re)
boisements (périmètre que l’on nomme REDD+ ou REDD plus).
Cette formulation reste peu précise et semble mêler résultats attendus (réduction des
émissions, séquestration de carbone par les forêts) avec les moyens pour y parvenir
(conservation des forêts, gestion forestière durable, (re)boisements, etc.) (figure 21).
Elle reflète la volonté des pays de voir figurer dans le futur accord les options qui leur
sont les plus favorables. Ainsi, les pays n’ayant pas encore entamé le processus de
transition réclament la prise en compte de la dégradation forestière et de leurs efforts
en matière de conservation et gestion forestière durable. Ceux qui ont achevé leur
transition demandent la reconnaissance de leurs efforts en termes de (re)boisements.
57
Les marchés du carbone forestier
Types de
Comptabilité Champ du
Situation initiale Actions projets
carbone mécanisme
associés
Situation
Situation initiale
initiale Actions
Actions
Situation initiale
Lutte contre la Actions
déforestation :
Situation initiale
conservation, (re) Lutte
Réduction
Luttedes contre
contre la Actions
la déforestation
déforestation ::
Situation
Déforestation initiale Lutte
émissions contre
dues à la la déforestation
Actions
RED REDD :
boisement, gestion sylvicole conservation,
conservation, (re)boisement,
(re)boisement, gestion gestion Rédu
Rédu
Déforestation
Déforestation
durable, intensification de
déforestation
conservation,
Lutte contre la(re)boisement,
déforestation :gestion Rédu
Déforestation sylvicole
sylvicole durable, intensification de
durable, intensification de défor
défor
l’agriculture, etc. sylvicole
Lutte contre
conservation, durable,
la intensification
déforestation
(re)boisement, de
:gestion défor
Rédu
Déforestation
Lutte contre la dégradation Réduction
l'agriculture,
l'agriculture,
des
etc.
etc.
l'agriculture,
conservation, etc.
Forêt avec des
Forêt Déforestation
avec des stocks
: conservation, (re)qui
sylvicole
Lutte
Luttedues
émissions contre
contre la(re)boisement,
durable,
à la la dégradation
dégradation :: gestion
intensification de Rédu
défor
Rédu
Forêt
stocks qui avecboisement,
diminuent des stocks qui Lutte
sylvicolecontre
l'agriculture, la
durable,
etc.dégradation :
intensification
REDD REDD de Rédu
défor
Forêt avec des stocks gestionqui conservation,
conservation,
sylvicole dégradation au sein (re)boisement,
(re)boisement, gestion gestion Rédu
diminuent
(dégradation) (dégradation)
diminuentdurable,(dégradation)
etc. conservation,
Lutte
forêts contre la
desl'agriculture, (re)boisement,
etc.dégradation : gestion dégra
dégra
diminuent
Forêt (dégradation)
avec des stocks qui sylvicole
sylvicole durable, etc.
durable, etc. dégra
Rédu
Forêt avec sylvicole
Lutte contre
conservation, durable, etc.
la(re)boisement,
dégradation : gestion
desdes stocks stables ou
ou qui Conservation, gestion
gestion sylvicole durable, Augm
Augmentation
Forêt avec
ForêtForêt des stocks
avecstocks
diminuent
avec des stables
stocks
(dégradation) quiou qui Conservation, sylvicole durable, Augm
Rédu
dégra
Forêt avec des stables
Conservation, gestion qui
desConservation,
stocks de
conservation,
sylvicole gestion sylvicole
(re)boisement,
durable, etc. durable,
gestion Augm
diminuentaugmentent
stocks stables ou qui
augmentent
(dégradation)
sylvicole durable, etc. etc.
etc.
carbone forestiers
REDD+ IFM fores
fores
dégra
Forêt avec des
augmentent augmentent
stocks stables ou qui(séquestration) etc.
Conservation,
sylvicole gestion
durable, etc. sylvicole durable, fores
Augm
Augm
Zone non forestière (Re)boisement Augm
Forêt avec Zonedes non
augmententforestière
stocks stables ou qui (Re)boisement
Conservation,
etc. gestion sylvicole durable, Augm
fores
fores
Zone non forestière (Re)boisement
Augmentation fores
augmentent desetc.
stocks de fores
Augm
Augm
Zone
Zone non forestière
Zone non forestière
(Re)boisement (Re)boisement REDD+ ? AR Augm
Zone agricole
agricole Amélioration
Amélioration
carbone forestiers de
de la la gestion
gestion des
des sols sols Augm
fores
agric
Zone agricole
Zone non forestière Amélioration
(Re)boisement
(séquestration) de la gestion des sols agric
agrico
Augm
fores
ZoneAmélioration
agricolede la gestion AugmentationAméliorationdes de la gestion des sols
Zone agricoleZone agricole Augm
agrico
des sols Amélioration
stocks de carbone de la gestion des
REDD++ ALM sols
agricoles agrico
Il reste maintenant à préciser si le REDD+ sera géré par un seul mécanisme ou via
plusieurs instruments distincts. Par exemple un instrument centré sur la réduction
des émissions liées à la déforestation (REDD), un instrument séparé pour les (re)
boisements (AR), un instrument pour la gestion forestière au sens large (IFM).
Il semble que la recherche d’un mécanisme unique ait la préférence des parties
prenantes.
42 http://unfccc.int/meetings/cop_15/items/5257.php
58
Quel marché du carbone forestier après 2012 ?
2.1.2.2. Les modalités de mise en œuvre et de financement
Si un mécanisme REDD+ était mis en place, très peu de pays disposeraient des outils
techniques et du cadre politique nécessaires pour y participer. En outre, de profondes
réformes en termes de gouvernance forestière seront probablement nécessaires pour
que le REDD+ fonctionne et devront être entreprises au préalable de la participation
au mécanisme. Pour ces raisons, un consensus s’établit pour adopter une mise en
place en trois phases :
Cette phase a pour objectif le développement d’une stratégie nationale sur le REDD+
à travers un processus d’information et de consultation des parties prenantes.
Cette phase de préparation est également le moment de définir les outils techniques
les plus adaptés aux circonstances nationales pour établir un scénario de référence
et un système de suivi, de rapportage et de vérification (Monitoring, Reporting and
Verification – MRV) des émissions de GES liées au secteur forestier.
Plus de 40 pays ont déjà entamé cette phase de préparation au travers des diverses
initiatives internationales qui se sont lancées suite à l’adoption du plan d’action de
Bali en décembre 2007.
43 Estimation pour 43 pays déduite du Report of Informal Working Group on Intermim Finance for
REDD+ (IWG-IFR), Octobre 2009. Discussion Document
59
Les marchés du carbone forestier
Figure 22 : Pays rentrés en phase 1 du mécanisme REDD+, bailleurs principaux (voir 2.1.3)
(Source : ONFI)
Elle permettra la mise en œuvre des premières mesures incluses dans la stratégie
nationale REDD+ et qui sont considérées comme préalables à la participation à
un mécanisme basé sur des paiements au résultat. Il s’agirait vraisemblablement de
réformes politiques ou de gouvernance concernant le droit foncier et le droit du
carbone forestier, l’aménagement du territoire, l’élimination des incitations perverses
(subventions, fiscalité) favorisant la déforestation et l’exploitation non durable des
forêts, l’amélioration et l’application des lois relatives au secteur forestier, mais aussi
des réformes institutionnelles au sens large (définition des rôles et responsabilités des
administrations, coordination interministérielle).
Des projets et des programmes pilotes seraient développés dans les zones les
plus touchées par la déforestation, de façon à tester de nouvelles technologies et
incitations auprès des acteurs du terrain.
Certains pays, plus avancés, seront à même d’entrer dans cette phase beaucoup plus
rapidement que d’autres. Ainsi le Brésil, qui a mis en place un dispositif de suivi des
changements de couvert forestier sur le bassin Amazonien, a pu lancer le Fonds pour
l’Amazonie dans ce but, qui fédère des investissements internationaux destinés à
financer des actions de lutte contre la déforestation. On estime généralement que la
plupart des pays ne seront pas prêts à passer à la phase finale avant 2020.
Le pays perçoit alors des paiements basés sur les réductions d’émissions constatées
par rapport à un scénario de référence, grâce à un système MRV fiable et
transparent. Des projets (REDD, IFM, AR, etc.) pourraient alors s’articuler avec cette
comptabilisation.
44 Report of Informal Working Group on Interim Finance for REDD+ (IWG-IFR), Octobre 2009.
Discussion Document
45 Kindermann G. & al., 2008. Global Cost Estimates of Reducing Carbon Emissions Through
Avoided Deforestation. PNAS
46 Eliash J., 2008. Climate Change : Financing Global Forests. The Eliash Review
61
Les marchés du carbone forestier
2007 2020
11,5 -22 milliards par an
1,2 -2,25 milliards
200-250 M
Intermédiaire Finale
Phases Préparation
UN-REDD
Initiatives Initiative Forêt Climat de la Norvège * et séquestration de
existantes carbone si le champ
Initiative sur le Carbone Forestier de l’Australie d’application du REDD
inclus le
boisement/reboisement
Fonds Forestier du Bassin du Congo
Figure 23 : Une montée en puissance du mécanisme REDD+ en trois phases (Source : ONFI)
Les deux premières phases nécessitent un appui financier ex-ante avant que les
résultats en termes de réduction d’émissions puissent être valorisés. Des instruments
de financement principalement publics sont donc envisagés pour financer ces actions.
Pour la troisième phase, les pays développés devront-ils créer un fonds pour
récompenser les pays qui réduisent les émissions issues de la déforestation? Ou
bien, ces réductions d’émissions devront-elles être liées aux systèmes d’échanges de
carbone basés sur le marché (EU-ETS, USA-ETS, etc.)?
Dans le premier cas, se pose notamment la question du financement d’un tel fonds.
62
Quel marché du carbone forestier après 2012 ?
Plusieurs options sont envisagées (taxe sur les crédits carbone échangés, revenu des
enchères des quotas distribués, etc.). Dans le second cas, les crédits issus d’activités
REDD+ seraient directement fongibles avec les crédits carbone qui s’échangent sur les
marchés d’engagement. Cela permettrait aux Etats ou entreprises privées soumis à des
quotas d’émissions de respecter leurs engagements en utilisant en partie ce type de
crédits (selon un système proche du MDP ou de la MOC actuels). Un tel lien entre le
REDD+ et les marchés d’engagements devra s’accompagner d’objectifs de réduction
d’émissions ambitieux afin de créer une demande importante en crédits.
Le financement de la troisième phase du REDD+ est ainsi un des points clés des
négociations en cours et reste aujourd’hui non tranché. Pour en savoir plus, les
différentes options de financement, leurs avantages et défauts, sont décrits dans un
ouvrage récent .47
Dans la foulée du plan d’action de Bali et pour faciliter la conclusion d’un accord post-
2012, plusieurs initiatives internationales se sont mises place pour appuyer les pays
dans leur préparation au REDD+:
◆◆ Outre le BioCarbon Fund (voir partie 3.3.), la Banque Mondiale a mis en place le
Fonds de Partenariat pour le Carbone Forestier, FCPF, composé de deux fonds :
47 Global Canopy Programme, 2009. The Little Climate Finance Book: http://www.globalcanopy.org/
main.php?m=117&sm=224&t=1
48 Argentine, Bolivie, Cameroun, Cambodge, RCA, Chili, Colombie, RDC, Rép. du Congo, Costa Rica,
Salvador, Guinée Equatoriale, Ethiopie, Gabon, Ghana, Guatemala, Guyana, Honduras, Indonésie,
Kenya, Laos, Liberia, Madagascar, Mexique, Mozambique, Nepal, Nicaragua, Panama, Papouasie
Nouvelle Guinée, Paraguay, Pérou, Suriname, Tanzanie, Thaïlande, Ouganda, Vanuatu, Vietnam.
http://www.forestcarbonpartnership.org/fcp/
63
Les marchés du carbone forestier
◆◆ Un fonds pour l’achat des réductions d’émissions (Carbon Fund) de pays qui
auront pu satisfaire aux conditions permettant d’entrer en phase 3 (33 M€
annoncés à fin novembre 2009).
◆◆ Le programme UN-REDD, mis en place par le PNUE, le PNUD et la FAO, est doté
de 34,8 M€, et appuie la préparation de 9 pays ; 49
◆◆ Le Fonds pour les Forêts du Bassin du Congo (Congo Basin Forest Fund - CBFF ), 50
◆◆ L’Initiative Forêt Climat de la Norvège, dotée de 333 M€ par an sur 5 ans (soit 1,6
milliards d’€). La Norvège contribue ainsi aux fonds multilatéraux sur le REDD+
(FCPF, FIP, UN-REDD), finance des initiatives menées par les organisations de
la société civile, des programmes de recherche, et appuie plusieurs programmes
bilatéraux :
49 Bolivie, RDC, Indonésie, Panama, Papouasie Nouvelle Guinée, Paraguay, Tanzanie, Vietnam, Zambie.
En octobre 2009, 5 pays supplémentaires ont rejoint l’initiative (Argentine, Cambodge, Equateur,
Népal, Sri Lanka) et le Danemark a annoncé une nouvelle contribution de 2 millions de US$.
http://www.un-redd.org/
50 http://www.cbf-fund.org/
64
Quel marché du carbone forestier après 2012 ?
◆◆ Contribution de 2 M€ au Guyana pour la mise en œuvre (phase 2) de sa
stratégie REDD+ (la Norvège pourra augmenter sa contribution jusqu’à 166
M€ en fonction des résultats obtenus).
◆◆ L’Initiative Forêt Carbone de l’Australie, dotée de 107 M€. Elle inclut des
contributions aux fonds multilatéraux sur le REDD (FCPF, FIP), l’appui à des
initiatives menées par les organisations de la société civile, des programmes de
recherche, et finance plusieurs programmes bilatéraux :
65
Les marchés du carbone forestier
Outre ces dernières dédiées aux enjeux forestiers, d’autres initiatives bilatérales
dédiées au changement climatique en général incluent des volets forêt/REDD,
comme l’Initiative Internationale sur le Climat de l’Allemagne.
On peut donc constater que des fonds engageant des montants très significatifs (plus
de 4 milliards d’€) financent déjà le mécanisme REDD+. Ces fonds, principalement
publics, se positionnent pour l’instant sur ses phases 1 et 2, et peuvent déjà
bénéficier aux initiatives et projets pilotes.
La place des projets du secteur forestier dans le post-2012 reste donc aujourd’hui
incertaine. Un consensus semble s’établir sur le champ du mécanisme : REDD+. En
terme de comptabilité carbone, ce champ incluerait donc les projets REDD et IFM. Il
n’est pas encore clair si le MDP AR disparaîtrait pour s’intégrer au REDD+ ou serait
réformé pour devenir un instrument d’incitation à l’échelle nationale complémentaire
au mécanisme REDD+.
Dans le cadre d’une échelle nationale, les réductions d’émissions générées sur le
territoire d’un pays le seraient selon un scénario de référence adopté nationalement
et via un système de MRV couvrant l’ensemble du territoire. Sous un tel système de
comptabilisation nationale, c’est l’Etat qui serait le bénéficiaire des crédits carbone
générés, et qui serait en charge d’en répartir les bénéfices entre les acteurs concernés
selon les modalités établies par la phase de préparation. La mise en œuvre d’activités à
une échelle sous-nationale ou de projet pourrait alors se faire :
◆◆ Dans un cadre « pilote », pour tester les hypothèses et orientations d’une politique
nationale (phase 2). Ces initiatives peuvent être appuyées par le marché volontaire
ou les initiatives citées plus haut ;
66
Quel marché du carbone forestier après 2012 ?
politiques de réductions des émissions de GES. Les projets pourraient être
directement rémunérés par l’Etat, ou l’Etat pourrait se dessaisir de ses crédits au
profit des projets (mécanisme similaire à la MOC).
Dans le cadre d’une approche sous-nationale, un système similaire pourrait être mis en
place à l’échelle d’une région ou d’un état, mais serait probablement à terme relié à un
échelon national (nested approach).
Enfin, une échelle strictement « projet » (similaire au MDP mais élargit au REDD et à
l’IFM) semble peu probable.
Dans ce cadre de comptabilisation (phase 3), la place des projets volontaires serait
restreinte car un double-compte avec l’inventaire national pourrait alors apparaître
(comme c’est le cas dans les pays de l’annexe I actuellement).
Notons enfin qu’une modification des règles de comptabilisation de la forêt dans les
pays de l’annexe I (notamment l’article 3.4) est discutée et à prévoir. Cette évolution
pourrait modifier les possibilités de réalisation de projets dans les pays industrialisés.
67
Les marchés du carbone forestier
2.2.1. Système « cap and trade » fédéral américain
fut accepté par la chambre des représentants en juin 2009. Le second , introduit 52
au Sénat par les députés Boxer et Kerry le 30 septembre 2009, y est actuellement
débattu.
Selon les modalités prévues par la législation, 2 milliards de crédits issus de projets
pourront être utilisés annuellement par les entreprises sous quotas. Au plus, le quart
ou la moitié (selon les projets de loi) pourront être liés à des projets internationaux.
En attendant qu’un pays remplisse ces critères, le recours à une approche « sous-
nationale », ou même une approche « projet » dans certaines situations, serait possible
sur une période pouvant aller de 5 à 13 ans selon les cas.
2.2.2. EU-ETS
51 http://www.opencongress.org/bill/111-h2454/show
52 http://kerry.senate.gov/cleanenergyjobsandamericanpower/intro.cfm
53 (i) Le pays doit avoir un accord bi ou multilatéral avec les États-Unis promouvant les activités
REDD; (ii) Le pays doit être prêt pour le REDD (système MRV, etc.) ; (iii) Le scénario de référence
doit être établi au niveau national, se baser sur des taux historiques de déforestation sur une
période minimale de 5 ans ; (iv) Les activités REDD nationales doivent suivre des pratiques
forestières reconnues et promouvoir les essences forestières locales ; (v) Les communautés
locales et peuples autochtones doivent être dûment consultés avant le démarrage des activités;
(vi) les systèmes de partage des revenus doivent les inclure en tant que bénéficiaires
68
Quel marché du carbone forestier après 2012 ?
crédits forestiers ont été expliquées en première partie du document. Toutefois, des
propositions ont été soumises par des ONG ou des scientifiques dans le but d’étendre
le marché EU-ETS aux crédits MDP forestiers , . Le paquet « Energie-Climat » , qui
54 55 56
54 Streck C., O’Sullivan R., 2006. Briefing Note: LULUCF Amendment to the EU ETS. Technical
Workshop on ”Using Forest Carbon Credits in the European Emission Trading Scheme”, Brussels,
March 29, 2006, Carbon Finance, BioCarbon Fund www.carbonfinance.org
55 O’Sullivan R., Streck C., Janson-Smith T., Haskett J., Schlamadinger B., Niles J.O., 2006. Local and
Global Benefits of Including LULUCF Credits in the EU ETS. Technical Workshop on ”Using Forest
Carbon Credits in the European Emission Trading Scheme”, Brussels, March 29, 2006, Carbon
Finance, BioCarbon Fund www.carbonfinance.org
56 http://ec.europa.eu/environment/climat/climate_action.htm
69
Les marchés du carbone forestier
2.2.4. Conclusion
70
Quel marché du carbone forestier après 2012 ?
3. Comment financer un
projet et vendre des crédits ?
Un projet « carbone » forestier est avant tout un projet forestier (de reboisement, de
conservation, d’agroforesterie, etc.) s’inscrivant dans un mécanisme de génération
de crédits carbone (tCER, lCER, VER, etc.) qui en constitue l’une des composantes.
La composante carbone du projet peut être considérée comme un « volet » ou une
activité complémentaire qui implique pour l’investisseur des coûts de développement
supplémentaires, mais aussi des revenus additionnels liés à la cession à des tiers
ou à l’utilisation en propre de crédits carbone (figure 24). S’ils ne constituent
généralement pas l’objectif principal du projet, ces revenus carbone, par leur
impact sur les taux de rentabilité de chaque projet, peuvent modifier la priorité des
investissements envisagés ou les choix d’options techniques associés. Les revenus liés
aux crédits carbone peuvent aussi constituer un levier pour dépasser les barrières à
l’investissement inhérentes aux projets forestiers, notamment en zone tropicale.
Flux entrant
R ev en us
D ette
Fo nds pr opres
Coû ts de ge stion
Figure 24 : Exemple de flux financiers d’un projet carbone de reboisement. Le volet carbone
nécessite des coûts initiaux de développement mais permet de générer des revenus supplémentaires
au cours de la vie du projet (Source : ONFI)
71
Les marchés du carbone forestier
Le projet de reboisement Commercial du Magdalena Bajo :
production de bois d’œuvre et de crédits carbone
(étude de cas n°4)
Revenus du projet
12%
Produits bois
Crédits carbone
88%
72
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Les documents de présentation d’un projet aux investisseurs
Les acteurs impliqués dans le montage d’un projet carbone forestier sont
généralement:
73
Les marchés du carbone forestier
représente. C’est le responsable opérationnel du projet. Il entre généralement
dans l’une des catégories suivantes : propriétaire, locataire ou concessionnaire du
terrain (parfois regroupé en coopérative), collectivité territoriale ou gouvernement
national, entreprise d’exploitation forestière, industriel du secteur forêt / bois,
ONG ou association ;
ERPA
Acheteur de crédits
Développeur du projet
Achat de
(SPV) produits Autres Clients
bois, etc.
Contrats de Contrats
fourniture de d’exploitation,
biens et de construction,
services etc.
Fournisseurs Opérateurs
Figure 25 : Plusieurs acteurs sont impliqués à divers degrés dans le montage du projet. Certains
pourront prétendre à tout ou partie des crédits carbone générés par le projet (Source : ONFI/EY)
◆◆ Les clients : acheteurs des crédits carbone, des produits bois, etc. ;
74
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
◆◆ Enfin d’autres parties prenantes jouent un rôle incontournable. Les autorités
publiques, notamment, définissent l’environnement légal et réglementaire dans
lequel le projet va être mis en œuvre. Enfin, dans le cadre de certains projets
forestiers, le rôle des communautés locales, pouvant parfois dépendre de
l’écosystème considéré, est aussi essentiel.
Chacune de ces composantes a son calendrier et son cycle propre (le cycle détaillé
du volet carbone est présenté en annexe 2). On peut toutefois dégager les grandes
étapes suivantes :
Cette phase permet de déterminer l’intérêt du projet via une première analyse
technique et financière, une évaluation de l’éligibilité aux standards carbone, et une
première quantification des crédits générés par le projet. Pour les projets AR, la
quantification des crédits peut se faire grâce aux outils TARAM (grande échelle) et
57
TARASM (petite échelle) qui se basent sur des méthodologies approuvées par la
58
CCNUCC. Pour les projets REDD, le lecteur peut se référer au guide suivant . 59
Cette première phase se formalise sous la forme d’un business plan simplifié et d’une
note d’opportunité qui peut prendre la forme d’une note d’identification de projet
(NIP ou Project Idea Note - PIN). Pour cela, plusieurs modèles de PIN et de business
57 http://wbcarbonfinance.org/Router.cfm?Page=DocLib&CatalogID=31252&zrzs=1
58 http://www.proyectoforma.com/Documentos/TARASM.zip
59 Calmel M. et al., 2010. REDD at project scale. Development and evaluation guide. ONFI, CEPAL,
AFD
75
Les marchés du carbone forestier
plan simplifiés ont été développés par la Banque Mondiale . Pour les projets REDD,
60
un outil a aussi été développé par le CCBs et Social Carbon : le « REDD financial
feasibility tool » . La PIN n’est pas un document obligatoire, elle est néanmoins un bon
61
3.1.2.2. Faisabilité
constitue le document de base pour faire enregistrer le projet auprès d’un standard
carbone. Le PDD doit s’appuyer sur une méthodologie existante (annexe 1). Si aucune
méthodologie existante ne s’applique, le porteur du projet doit en développer une en
propre. Etant donné les délais associés à une démarche de standardisation (figure 26),
l’enregistrement effectif d’un projet auprès d’un standard peut n’avoir lieu qu’en phase
de mise en œuvre ou d’opération.
Si les conclusions de l’étude de faisabilité sont positives, cette phase doit permettre
de constituer l’ensemble des documents demandés par les investisseurs, et de lever les
fonds nécessaires à la mise en œuvre du projet.
60 Modèle : http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/TOPICS/ENVIRONMENT/EXTCARBONFINANCE/0,,c
ontentMDK:21844289~pagePK:64168445~piPK:64168309~theSitePK:4125853,00.html
61 http://www.climate-standards.org/projects/redd.html
62 Modèle : http://cdm.unfccc.int/Reference/PDDs_Forms/PDDs/index.html
76
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
allant de quelques dizaines à quelques centaines de milliers d’euros. Cette phase dure
généralement plusieurs mois voire années (si un pilote est réalisé par exemple).
60
50
Nombre de semaines pour
40
30
20
10
0
MDP MDP petite VER + CCBs CCX VCS
échelle
Figure 26 : délais moyens associés à l’enregistrement d’un projet auprès de quelques standards
carbone (Source : CDC ) 63
Selon la taille et le type de projet, le CAPEX peut varier de manière très importante.
On peut toutefois retenir que le CAPEX d’un projet carbone forestier est
généralement compris dans une fourchette allant de plusieurs centaines de milliers
d’euros à plusieurs millions ou dizaines de millions d’€ (tableau C). La mise en œuvre
des projets forestiers dure souvent plusieurs années.
63 Guigon P. et al., 2009. Voluntary Carbon Markets: What the Standards Say... CDC
77
Les marchés du carbone forestier
Cas 1 : Cas 2 : Cas 3 : Cas 4 : Cas 5 :
Juma Corridor Corridor Magdalena Ibi Batéké
AR REDD Bajo
Technologie REDD AR REDD AR AR
Taille 589 612 ha 591 ha 376 000 ha 5 000 ha 4 226 ha
360 9,3 1500 100 54
téqCO2 générés/an
ktéqCO2 ktéqCO2 ktéqCO2 ktéqCO2 ktéqCO2
3.1.2.4. Opérations
78
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
dizaines d’années parfois) et peuvent représenter des montants cumulés sensiblement
équivalents aux investissements initiaux. Ces derniers sont néanmoins généralement
couverts par les recettes dégagées par le projet. Une trésorerie temporairement
négative peut engendrer un besoin de financement qui sera couvert par des fonds
propres ou des dettes de court terme. La phase d’opération s’étale sur toute la durée
de vie du projet, généralement de plusieurs années ou dizaines d’années pour les
projets forestiers.
Tableau D : Articulation entre les différents volets d’un projet, principaux documents associés
79
Les marchés du carbone forestier
Deux besoins de financement se distinguent lors du cycle de développement
d’un projet. Un premier besoin pour couvrir les coûts des phases amont de projet
(préfaisabilité et faisabilité), un second besoin pour couvrir les coûts de construction
(CAPEX) et d’opération (OPEX) du projet.
Pour couvrir ces besoins (coûts), le porteur doit les connaître avec suffisamment
de précision et savoir de quelle manière il pourra les rembourser (revenus). Le choix
de l’investisseur dépendra en grande partie de la « confiance » qu’il a dans la bonne
réalisation du projet. Celle-ci s’évalue via une analyse des « risques » liés aux projets.
La partie suivante donne des éléments opérationnels permettant d’évaluer ces trois
composantes.
On peut distinguer trois types de coûts liés à un projet carbone forestier. Les coûts
techniques, les coûts spécifiques à sa composante carbone et les coûts liés à la
gestion et au pilotage du projet.
Les coûts associés à la mise en œuvre opérationnelle d’un projet sont très différents
d’un projet à l’autre selon le type de projet et de ses objectifs. Certains projets
capitalistiques (comme les plantations commerciales) peuvent avoir des coûts très
élevés aussi bien au niveau de la mise en place des plantations que dans les phases de
suivi. La valeur des plantations justifie ces investissements. D’autres plantations qui
génèrent des revenus plus modestes (plantations villageoises, bois de feu, fruitiers)
ont des coûts de mise en œuvre plus faibles, en rapport avec les revenus générés à
terme. Enfin, certains sortent de la logique économique et peuvent avoir des coûts
d’investissement lourds avec des revenus directs modérés ou nuls. C’est par exemple le
cas de reboisement de récupération de terrains dégradés ou de lutte contre l’érosion
par exemple, qui nécessitent des investissements importants (récupération des sols,
aménagements anti-érosifs).
80
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Si les montants peuvent être très différents pour les projets, la structure des coûts
reste relativement similaire, à savoir :
(ii) Une phase de « fonctionnement » avec des coûts plus réduits : les opérations
sylvicoles diminuent au fur et à mesure de la croissance des plantations (diminution
des opérations de dégagement et de dépressage notamment pour laisser la place aux
premières éclaircies). Si ces phases d’entretiens sont moins lourdes, elles nécessitent
néanmoins la mise en œuvre de moyens humains et matériels (ne serait-ce que pour
le gardiennage des plantations) qui sont déployés sur de longues périodes : les coûts
cumulés de cette phase ne sont donc pas à négliger puisqu’il peuvent à terme – sur
20 à 40 ans – dépasser les coûts d’investissement initiaux.
Les coûts associés à la mise en place de projets REDD sont extrêmement dépendants
des contextes nationaux et des causes (directes et indirectes) de la déforestation
observée dans les pays. Le rapport Stern évalue le coût de réduction des émissions
64
liées à la déforestation (calculs réalisés sur huit pays responsables d’environ 70% des
émissions mondiales) entre 0,7 et 1,3 € la téqC02. Des évaluations plus récentes 65
Les approches économiques de calcul de coûts sont principalement basées sur des
analyses de coûts d’opportunité. Le profil d’un projet REDD dépend en premier lieu
de la nature de l’agent ou des agents qui déboise(nt). Cet (ces) agent(s) ont une ou
des activité(s) destructrice(s) qu’ils exercent pour des raisons diverses souvent liées
à la recherche d’un profit économique. Pour enrayer efficacement la déforestation,
le projet REDD devra cibler ses activités sur les agents à l’origine de la déforestation
et développer des activités qui viendront se substituer efficacement aux activités
destructrices tout en satisfaisant la motivation initiale. Selon l’activité sélectionnée, le
coût de la mise en œuvre du projet sera plus ou moins élevé.
Prévention de la co nversion au
Coûts d’opportunité par soja/palmier
ha de forêt préservé
Prévention de la
conversion à l’élev ag e
Clarific ation de la
propriété des sols
ha
Contrôle
des fe ux
66 Bosquet B., 2007. The Proposed Forest Carbon Partnership Facility (FCPF)
82
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
La figure 27 montre de manière schématique les coûts associés au REDD. Ces
coûts sont élevés si la déforestation est engendrée par la mise en place de cultures
industrielles fortement rentables (soja en Amazonie brésilienne ou palmier à huile
en Indonésie). Les gains associés dans ce cadre à des projets REDD ne seront
généralement pas suffisants pour justifier de la mise en place des projets. Prévenir le
changement d’usage du sol dans le cadre d’activités d’élevage extensif (Brésil) peut
permettre de lutter contre la déforestation à des coûts plus faibles. Enfin, certaines
activités de réduction des émissions liées au déboisement (comme la protection de
certains massifs, la définition de la propriété des sols ou la prévention des feux de
brousse) peuvent être relativement peu coûteuses à mettre en place.
Partant de là, il n’est pas possible de donner une valeur moyenne aux coûts techniques
liés à la mise en œuvre de projets REDD. La figure suivante présente une liste
d’activités pouvant être mises en place dans le cadre des projets REDD. Chacune de
ces activités présentera une structure de coût propre.
Notons néanmoins que pour la plupart de ces projets la sécurisation du foncier (et
notamment des forêts à protéger) peut être une composante importante des coûts.
67 Voir le projet Reducing Carbon Emissions By Protecting A Native Forest in Tasmania développé
par REDD Forests et dont le PDD est téléchargeable sur le site du CCBA http://www.climate-
standards.org/projects/files/tasmania/REDD_Forests_CCB_PDD_FINAL_071609.pdf
68 Voir le projet Nhambita Community Carbon Project développé par Envirotrade et certifié par le
label Plan Vivo http://www.planvivo.org/fx.planvivo/scheme/mozambique.aspx
83
Les marchés du carbone forestier
Causes de déforestation
Facteurs
•Coût
•Politique de d’opportunité •Renforcement des
•Concessions diverses
Institutionnels développement capacités
•Développement des
Infrastructures •Lacune de gouvernance •Statut foncier •Soutien exécutif
•Commerciale •Soutien budgétaire
•Taille et type
de structure
•Substitution financière
•Commerciale •Pays •Arrêt de l’exploitation
Privés •Exploitation forestière
•Utilisation directe •Exploitation à impacts
•Etc. réduits
Figure 28 : Le coût des projets REDD dépend du type d’activité mis en place (Source : ONFI)
La réalisation des différentes étapes d’un projet carbone se traduit par des coûts
de transaction qui restent le plus souvent modestes face aux revenus générés par la
vente des crédits carbone du projet, sauf dans le cas de très petits projets. Des coûts
moyens observés dans le cadre du MDP ou de standards volontaires sont présentés
dans le tableau E. Dans le cadre des études de cas, ces coûts s’échelonnent entre 120
k€ (projet n°5, AR Ibi-Batéké) et 340 k€ (projet n°1, REDD Juma), soit entre 4 et
12% des coûts globaux des projets.
84
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Etapes Produits MDP, principaux standards volontaires
Préfaisabilité PIN 5 – 15 k e
Mise en place d’un buffer pour les La mise en réserve d’une partie des
standards proposant cette solution crédits pour garantir leur permanence
peut engendrer un coût important,
dépendant directement de la taille du
buffer et du prix de vente des crédits
Frais de délivrance 2% des crédits pour le fonds
d’adaptation dans le cadre du MDP
1) La réalisation du scénario de référence et l’acquisition de données satellites précises peuvent engendrer des coûts très importants.
Néanmoins, des données satellitaires gratuites permettront de les réduire de manière significative
2) Calmel M. et al., 2010. REDD at project scale. Development and evaluation guide. ONFI, CEPAL, AFD
Tableau E : Frais de transaction moyens carbone pour des projets standardisés
85
Les marchés du carbone forestier
important pour les projets. Les porteurs de projets ont toujours intérêt à utiliser
une méthodologie existante. Les méthodologies développées dans le cadre
du MDP couvrent aujourd’hui un champ assez large de possibilités. Plusieurs
méthodologies VCS sur le REDD et l’IFM sont en cours de validation (annexe 1). Il
est possible également de proposer des adaptations des méthodologies existantes,
procédure beaucoup plus simple que de soumettre une nouvelle méthodologie
complète ;
◆◆ Hormis les coûts de monitoring, les coûts de transaction sont peu sensibles à
la taille du projet ce qui pénalise les projets de petite taille. Toutefois, plusieurs
possibilités existent pour réduire les coûts unitaires de transaction des petits
projets (« small scale ») : méthodologies et procédures simplifiées ou regroupement
de projets similaires (« bundling »). La figure 29 montre que pour un projet de très
petite taille (5 ktéqCO2 par an) et un prix de vente des crédits à 3€, les coûts de
transaction peuvent atteindre 3€, couvrant à peine les recettes carbone ;
◆◆ Les coûts peuvent varier d’un standard à un autre. L’exemple précédent montre
que les différences de coûts de transactions entre standards peuvent varier entre
1,5 € et 3€. Certains standards (comme VCS et VER+) proposent de délivrer des
crédits permanents via un système d’assurance (buffer) alors que le MDP délivre
des crédits temporaires. La mise en réserve d’un pourcentage des crédits du projet
se traduit par un coût supplémentaire important (figure 29). Le prix de vente des
crédits s’en trouve cependant nettement amélioré (voir partie 3.4.1).
3,5
2,5
1,5
0,5
0
MDP VCS CCBs MDP + CCBs VER + CCX
Figure 29 : Frais de transaction carbone pour un projet AR de petite taille (5téqCO2/an) et un
prix de vente de 3 € par téqCO2 (Source : CDC)
69
69 Guigon P. & al., 2009. Voluntary Carbon Markets: What the Standards Say... CDC
86
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
3.2.1.3. Les coûts de « gestion »
Les revenus des projets forestiers sont de plusieurs types. On peut distinguer les
revenus liés aux produits forestiers ligneux, non ligneux (chasse, fruits, caoutchouc,
huiles essentielles, etc.) ainsi que les produits issus de PSE ou sociaux comme le sont
les crédits carbone. Les projets carbone forestiers apportent souvent de nombreux
co-bénéfices sociaux et environnementaux (protection de la biodiversité, lutte
contre l’érosion des sols, protection d’une ressource aquifère, etc.) qui peuvent être
rémunérés ou non.
87
Les marchés du carbone forestier
Remants
Futaie
Plaquettes forestiéres
Bois d’industrie
Elagage Billions Produits en
fin de vie
Bois d’oeuvre
Grumes Produits finis
Premièr Seconde
transformation du bois transformation du bois
Figure 30 : Schéma simplifié des différents types de produits bois et de la filière bois
◆◆ Le bois d’industrie est issu de grumes de plus faibles diamètres (jeunes arbres, bois
d’éclaircies ou de plantations dédiées, etc.). Après leur exploitation, les bois sont
destinés à l’industrie de la production de palette, de papier ou de panneaux ;
◆◆ Le bois énergie est issu des bois de plus faibles diamètres qui ne trouvent
pas de valorisation dans les filières classiques d’approvisionnement. Selon la
transformation qu’il subit, le bois énergie peut se présenter sous différentes
formes : le bois bûche, les plaquettes forestières ou les pellets. La valeur
économique de ces produits est moindre.
88
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Les revenus dépendront donc du volume de produits bois exploité et du prix de vente
de ces produits. En zone tropicale, la productivité d’une forêt va de quelques m à 3
quelques dizaines de m par ha et par an. Le prix de vente peut varier de quelques €
3
Le prix de vente des produits bois dépend de nombreux paramètres d’où une
variabilité importante des prix observés sur les marchés du bois. Le rapport annuel de
l’ITTO (International Timber Trade Organization) permet de donner des éléments de
70
3.2.2.3. Les revenus issus des produits bois non ligneux (PFNL)
Les produits forestiers non ligneux (PFNL) sont des produits d’origine biologique,
autres que le bois, dérivés des forêts, d’autres terres boisées et d’arbres hors forêts.
Les PFNL peuvent être récoltés dans la nature, ou produits dans des plantations
forestières ou des périmètres d’agroforesterie. Ils englobent les produits utilisés
comme nourriture et additifs alimentaires : noix comestibles, champignons, fruits,
herbes, épices et condiments, plantes aromatiques mais également produits
alimentaires d’origine animale (produits de la chasse, collecte d’insectes, de chenilles
etc.). Sont également inclus les fibres (utilisées dans la construction, les meubles,
l’habillement ou les ustensiles), les résines, gommes, et produits végétaux et animaux
utilisés pour des buts médicinaux, cosmétiques ou culturels. On peut citer les
quelques exemples suivants :
70 http://www.itto.int/
89
Les marchés du carbone forestier
◆◆ Le caoutchouc (hévéa) : la production de latex à partir des hévéas (Hevea spp.)
fût une industrie extrêmement importante en Amazonie brésilienne, réalisée par les
seringueiros en forêt naturelle. Les plantations industrielles d’hévéas sont répandues
en Asie du Sud –Est et en Afrique ;
◆◆ L’agroforesterie peut concerner un ensemble d’espèces cultivées aussi bien pour des
besoins ligneux que non ligneux (fruits, plantes médicinales) et également agricoles ;
Dans les différentes études de cas, la production de crédits carbone va de 0,6 tCO2/ha/
an (n°1, REDD Juma) à 20 tCO2/ha/an (n°4, AR Magdalena Bajo).
Les co-bénéfices liés aux projets forestiers sont nombreux, on peut citer les exemples
suivants :
90
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
◆◆ Des reboisements diversifiés (utilisant des essences natives) et des projets de
conservation permettent de promouvoir ou de conserver la biodiversité en faune et
flore ;
◆◆ Le couvert forestier joue un rôle également dans la protection des sols et dans la
protection des ressources en eau.
Ces bénéfices peuvent être directement rémunérés aux projets via des systèmes de
PSE, ou bien se répercuter indirectement dans le prix de vente de certains actifs du
projet (comme les crédits carbone). Notons enfin que ces bénéfices restent aussi bien
souvent non financièrement valorisés.
3.2.2.6. Conclusion
Le calcul des coûts et des revenus selon une échelle de temps doit permettre au
porteur de projet de réaliser un business plan, c’est-à-dire de modéliser les flux de
trésorerie (cash flows), de calculer des indicateurs financiers et de réaliser une analyse
de sensibilité afin d’identifier les variables importantes pour le bon déroulement du
projet. Cette dernière information doit aussi permettre d’analyser les risques du projet,
essentiels pour les choix d’investissement des bailleurs de fonds.
L’analyse des risques d’un projet carbone par un investisseur (due diligence) se réalise
généralement sur :
◆◆ La propriété des crédits carbone par le vendeur des crédits (partie 3.4.) ;
De très nombreux risques sont associés aux projets. On peut distinguer les risques
« classiques » inhérents aux projets forestiers et les risques « carbone ». Les principaux
91
Les marchés du carbone forestier
sont présentés dans les paragraphes suivants. Deux études , détaillent ce sujet.
73 74
Ces risques se divisent entre risques « internes » qui dépendent du projet lui-même, du
porteur de projet et de ses éventuels partenaires, et les risques « externes » qui sont
subis. On peut mentionner:
◆◆ Les risques liés à la mauvaise exécution du projet en tant que tel, ou à la défaillance
technique ou financière de l’un ou plusieurs des participants au projet. Cela peut
concerner également le non respect de la réglementation nationale (annulation
d’un permis d’exploiter l’activité pour non respect des règles en matière
d’urbanisme ou d’environnement) ;
◆◆ Les risques liés à l’instrument « carbone » envisagé en tant que tel (risque de rejet
de la méthodologie proposée, non enregistrement auprès du standard recherché
pour non respect de modalités et procédures prévues, etc.) ;
◆◆ Les risques liés à la non permanence du projet : des causes d’origines diverses
(naturelles et humaines) peuvent réduire le stock de carbone pendant la durée
de vie du projet. Ce risque est valable aussi bien pour les projets A/R que pour
92
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
les projets IFM ou REDD. La question de la permanence crée une responsabilité
potentielle pour les porteurs de projet et les investisseurs sur le long terme ;
◆◆ Les risques liés à la propriété des crédits (partie 3.4.2) : régime foncier, droit
d’utilisation des terres, lois pertinentes, etc. ;
◆◆ Les projets REDD sont particulièrement soumis aux risques de fuite : la possibilité
que le ralentissement du taux de déforestation dans le périmètre du projet entraîne
une accélération de la déforestation ailleurs ;
◆◆ Les risques de marché : le marché des crédits carbone en général, et des crédits
forestiers en particulier reste, peu liquide, volatile et sans grande visibilité sur le
long terme (partie 1). Le prix de vente des crédits carbone, notamment à moyen et
long terme peut ainsi varier de manière significative.
outils plus élaborés existent pour les due diligence. Une fois le constat réalisé, trois
actions sont envisageables : (i) réduire autant que possible les risques ; (ii) partager le
risque avec l’investisseur (voir 3.4.3.), ce qui aura une influence sur le prix des crédits
ou de l’investissement (et donc un coût) ; (iii) transférer le risque à un tiers grâce à
des solutions d’assurance (exemples : ARIZ de l’AFD , MILF de la Banque Mondiale ,
76 77
75 http://www.v-c-s.org/docs/Tool%20for%20AFOLU%20Non-Permanence%20Risk%20
Analysis%20and%20Buffer%20Determination.pdf
76 http://www.cefeb.org/jahia/webdav/site/afd/users/administrateur/public/plaquettes/AFD_ARIZ_
FR.pdf
77 http://www.miga.org/
93
Les marchés du carbone forestier
Risque de propriété Obtenir une lettre d’agrément par la DNA du pays hôte, obtenir des lettres
des crédits et de de reconnaissance des droits carbone par les différents participants au
contrepartie projet, notamment par les éventuelles communautés locales présentent
dans le périmètre du projet.
Risque foncier Définition stricte du périmètre et obtention des titres fonciers ou des
documents attestant de l’accord du propriétaire (autorisations, contrats)
Risque de permanence Plusieurs options sont possibles : utilisation de crédits temporaires (MDP)
ou mise en réserve (VCS, Carbonfix, etc.) ; maintien de la plantation au-
delà de la durée de comptabilisation, extension du reboisement au-delà
des limites spatiales du projet (assurance). Une implication des parties
prenantes et des communautés locales dans les bénéfices du projet est
aussi un levier significatif pour garantir la permanence des actions
Risque technologique Réaliser des pilotes, signer des contrats de long terme avec les
prestataires, fournisseurs et opérateurs
Les coûts de développement et de mise en œuvre d’un projet, les revenus et charges
d’opérations, et les risques associés au projet (et donc la « confiance » que peut avoir
un investisseur) sont trois composantes essentielles à maîtriser pour procéder à la
levée de fonds.
Plusieurs acteurs peuvent intervenir dans le financement du projet (figure 31), parmi
lesquels on peut citer :
94
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
◆◆ Des banques locales ou internationales, pouvant financer des projets par de la
dette ou des capitaux propres ;
◆◆ Des acheteurs de crédits finançant le projet par paiement anticipé des crédits
achetés (cela pouvant s’assimiler à une forme de dette) ;
Comme nous allons le détailler dans la suite du document, chaque type d’acteurs a sa
propre logique d’investissement en terme de volume de coûts pris en charge, de retour
sur investissement et de prise de risques.
Après avoir décrit les principales caractéristiques financières des projets carbone
forestiers, nous en décrirons les principales modalités de financement aujourd’hui
accessibles.
Investisssement Dividendes
Dette
Subventions Donations
95
Les marchés du carbone forestier
3.3.1. Quelles sont les caractéristiques
financières des projets ?
96
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Taux d’intérêt des
Pays banques centrales au
19/01/2010
Etats-Unis 0,25%
Europe 1%
Royaume-Uni 0,5%
Japon 0,1%
Australie 3,75%
Mexique 4,5%
Brésil 8,75%
Indonésie 6,5%
Colombie 4%
Chine 3,33%
Le Taux de Rentabilité Interne (TRI) est, comme son nom l’indique, le taux de
rentabilité d’un projet. Si le TRI d’un projet est supérieur au taux de rentabilité à
exiger de l’investissement compte tenu de son risque, alors le projet vaut la peine,
d’un point de vue financier, d’être réalisé. Au contraire, si son TRI est inférieur au
taux de rentabilité à exiger de l’investissement compte tenu de son risque, alors cet
investissement ne mérite pas, d’un point de vue financier, d’être réalisé. Plus un projet
est risqué, plus l’investisseur exigera un TRI fort. Moins il est risqué, plus l’investisseur
acceptera un TRI faible. Techniquement, le TRI est la valeur du taux d’actualisation qui
annule la VAN du projet (VAN = 0). Les deux indicateurs (VAN et TRI) sont donc liés.
On peut retenir que si les deux indicateurs permettent de juger l’intérêt d’un projet
d’un point de vue financier, le TRI est un taux, et donc ne reflète pas la valeur globale
que peut générer un projet. Il est donc difficile de comparer deux projets par leur TRI.
Par contre la VAN est un montant, et prend donc à la fois en compte la rentabilité d’un
projet et son volume. Cela permet de comparer plusieurs choix d’investissement.
78 On peut citer d’autres indicateurs financiers guidant le choix des investisseurs comme : le délai de
récupération actualisé ou non, les options réelles, le taux de rentabilité comptable, la VAR, l’indice
de profitabilité, etc. cependant une étude récente indique que 75% des directeurs financiers
retiennent systématiquement le TRI et la VAN pour évaluer un investissement (Graham & Harvey)
97
Les marchés du carbone forestier
3.3.1.2. Quelques caractéristiques financières des projets carbone forestiers
◆◆ Pour être mis en œuvre, les projets forestiers ont généralement besoin de
lever des fonds initiaux très importants. C’est notamment le cas pour des (re)
boisements coûteux en terme d’acquisition du foncier et de mise en œuvre des
plantations (voir par exemple les études de cas des projets n°4 et 5). Comme nous
l’avons vu précédemment, le coût des projets REDD est très variable. Certains
types de projets REDD, comme ceux ne mettant en œuvre que des mesures de
conservation, peuvent avoir des CAPEX plus restreints (voir l’étude de cas n°3) ;
◆◆ Les projets forestiers génèrent leurs principaux revenus après un délai important,
les retours sur investissement sont donc longs ;
◆◆ Les coûts associés au volet carbone des projets sont importants mais restent
modestes au regard des coûts d’investissement globaux. Cependant pour les
projets forestiers de taille restreinte l’effet levier des crédits carbone peut souvent
être faible du fait de la complexité du montage carbone et du coût du monitoring
du carbone séquestré ou évité. Ainsi, l’équilibre entre faisabilité du projet et
additionnalité (requise par de nombreux standards) est souvent subtil ;
◆◆ Les risques associés aux projets forestiers sont très importants. Les projets
forestiers sont des projets de long terme. Hors, comme nous l’avons vu
précédemment, ceux-ci sont soumis à un ensemble de risques techniques (aléas
naturels, etc.), financiers (volatilité sur les marchés, absence de visibilité et de
liquidité sur le marché du carbone, notamment forestier, etc.) et institutionnels
(projets réalisés dans des pays peu stables, aux législations changeantes, avec un
fort risque de corruption, etc.). Pour les investisseurs, ces risques important se
traduisent par des taux d’actualisation forts sur ce type de projet (et donc une
VAN plus faible) et des TRI exigés forts. En conséquence, les indicateurs financiers
98
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
(TRI, VAN) sont généralement moins bons que pour d’autres secteurs ;
Ce constat doit alerter les potentiels porteurs de projets et les préserver de choix
hasardeux. Il ne doit pas néanmoins les décourager. Dans un contexte pré-crise,
l’étude mentionnée précédemment a ainsi démontré que l’investissement forestier
bien maîtrisé peut produire des TRI entre 10 et 20% (figure 32). De plus le carbone
peut apporter un levier significatif à l’investissement. Par ailleurs, les projets forestiers
en s’insérant dans les politiques énergétiques, sociales ou environnementales des
territoires, peuvent percevoir des aides importantes pour les services qu’elles rendent.
Cela peut contribuer fortement à la rentabilité des projets.
79 Cubbage F. & al., 2007. Timber Investment Returns for Selected Plantations and Native Forests in
South America and the Southern United States, New Forests
99
Les marchés du carbone forestier
Exemple de TRI pour des plantations et de la gestion de forêt naturelle
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Brésil
USA -
Uruguay
Argentine
Brésil
USA
Amérique
naturel
du sud
Argentine
USA -
planté
Uruguay
Argentine
Brésil
Argentine
Plantation d'Eucalyptus Plantation de Pinus taeda (exotique) Plantation Gestion des forêts
grandis (exotique) d'Araucaria a. naturelles
(natif)
Figure 32 : Exemples de TRI pour des projets forestiers aux Etats-Unis et en Amérique du
sud (plantation et gestion de massifs naturels). Le TRI des plantations les plus productives
(Eucalyptus) se situe entre 13% et 23%. Le TRI de gestion de forêt naturelle est lui entre 2% et
4% (Source : Cubbage et al.)
3.3.2.1. La dette
Un prêt ou une dette est une somme d’argent fournie par un tiers à un projet, une
personne ou organisation qui doit être remboursée, soit pendant soit à la fin du
mandat convenu, majoré des intérêts au cours de la période de l’emprunt. Lors de
la réalisation d’un projet, les emprunts sont remboursés avant les autres sources de
financement du projet (capitaux propres, etc.).
100
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
La majorité des prêts sont offerts par des banques. En comparaison avec des
investissements en capitaux propres, les rendements exigés par des prêts (taux
d’intérêts) sont souvent plus faibles (car la prise de risque est moindre). En
conséquence, ils représentent généralement la source de capital la moins chère. En
contrepartie, des garanties très fortes sont demandées au porteur du projet. Ces
garanties peuvent s’appliquer sur les actifs du projet, ce qui peut inclure les contrats
de vente des produits du projet, mais aussi sur le porteur du projet lui-même.
Pour certains projets, un acheteur peut être disposé à payer à l’avance pour
la livraison future de produits (comme les crédits carbone), ce que l’on peut
assimiler à une forme de dette. Ces paiements initiaux peuvent être utilisés pour
financer le projet. L’avantage de cette forme de financement est qu’il n’a pas
besoin d’être remboursé en espèces, seulement « en nature ». L’inconvénient est
que l’acheteur attend généralement une remise importante sur le prix de vente
des crédits, afin de prendre en compte la prise de risque et le coût du capital.
Certains standards permettent de labelliser ces crédits. On parle alors de crédits
ex-ante.
Enfin des mécanismes de dette à taux préférentiel peuvent être proposés par des
agences gouvernementales ou des acteurs philanthropiques.
80 http://www.cefeb.org/jahia/webdav/site/afd/users/administrateur/public/plaquettes/AFD_ARIZ_
FR.pdf
81 http://www.miga.org/
101
Les marchés du carbone forestier
Un exemple de projet financé par la dette : le projet de
boisement sur le plateau de Batéké (étude de cas n°5)
Financement du projet
3%
35%
26% Dette à taux préférentiel
Dette
Capitaux propres
Subventions
36%
Les capitaux propres sont des capitaux versés par des investisseurs contre une prise
de participation dans le véhicule de portage du projet (SPV). Ils en deviennent à ce
titre actionnaires. Les actionnaires sont rémunérés par les dividendes du projet, après
remboursement des autres partenaires. Le risque est plus important et les rendements
attendus pour les actionnaires sont en conséquence plus élevés que pour les prêteurs.
L’avantage des capitaux propre est qu’ils n’exigent pas d’être remboursés pendant les
premières années du projet, ce qui libère de la trésorerie. L’inconvénient est qu’étant
donné le risque plus élevé, le coût du capital est plus important.
Les capitaux propres permettent de financer des projets aux profils risqués là où la
dette ne le fait pas. Typiquement, les fournisseurs de capitaux propres ne couvrent
102
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
qu’une partie du coût total d’un projet. Le taux de rendement des capitaux propres
s’améliore en augmentant le montant de la dette ou de subventions dans la structure
de financement de projets (effet de levier).
◆◆ Le Capital Risque (Venture Capital). Le capital risque est ainsi nommé parce qu’il il
est généralement investi ou «osé» dans la phase de démarrage du développement
des projets. Cet apport de capitaux est donc à haut risque. En retour, les fonds de
capital-risque exigent un taux de rendement élevé, qu’ils obtiennent en prenant
des participations dans un certain nombre d’entreprises, dont ils espèrent le
succès. Typiquement, les investissements de capital-risque se situent généralement
dans une fourchette de 1 à 10 M€ ;
◆◆ Les fonds de private equity. Il s’agit de fonds principalement gérés par des
établissements bancaires. On peut noter l’apparition d’un certain nombre de fonds
« forêt », « verts » ou « éthique » qui cherchent à investir dans des projets carbone
forestiers ;
103
Les marchés du carbone forestier
◆◆ L’émission d’actions par l’intermédiaire d’un marché boursier (titrisation): les
promoteurs du projet peuvent envisager l’émission d’actions sur le marché ou
l’émission d’actions supplémentaires pour le stock déjà coté de l’entreprise. En
général cette option n’est pas poursuivie pour des projets individuels, mais peut
être une option pour de nouvelles entreprises possédant un portefeuille de projets
similaires à développer. Dans le secteur forestier, on peut noter l’existence de
discussions autour de « Tropical rainforest bonds » répondant à cette logique.
Une subvention est une somme d’argent accordée par un tiers à un projet, une
personne ou organisation qui contribue aux objectifs de la tierce partie. En général,
les subventions sont accordées aux projets qui sont marginaux dans le commerce, et
ils ne doivent pas être remboursés (à condition que le but déclaré de la subvention
soit atteint). Toutefois, dans certains cas, les subventions peuvent être convertibles
en prêts ou en capitaux propres si le projet a atteint un succès commercial. Les
subventions sont généralement fournies par des organisations gouvernementales et
portent sur un pourcentage de l’investissement global du projet.
Le coût du capital pour ces deux formes de financement est faible voir souvent nul.
104
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
plus amonts du projet (préfaisabilité ou faisabilité). Des financements publics ou
privés peuvent permettre de couvrir ces phases . Notons cependant que dans le
82
cas d’un investissement privé, le financement de ces phases peut entraîner une prise
de participation très importante et une perte de contrôle du projet. Dans le cadre
de l’industrie de la forêt et du bois, des projets peuvent être en grande partie ou
totalement financés par les industriels concernés . C’est aussi le cas de l’étude de cas
83
n°5 ou le développeur du projet finance une partie du projet via des capitaux propres.
Etant donné le profil très particulier des projets carbone forestier, l’accès des
projets aux sources de financements « traditionnelles » (dettes ou fonds propres) est
actuellement rare. On peut néanmoins noter les trois grandes tendances et sources de
financement suivantes :
82 Par exemple, la coopération française, pour appuyer l’exportation, appui la réalisation d’études
de faisabilité via le fonds FASEP : http://www.ccinordisere.fr/Commun/documents/DOC_
PATH_50_1079624604.pdf
83 On peut citer l’exemple connu du projet Plantar au Brésil de l’industriel de l’acièrie Vallourec :
http://www.ccinordisere.fr/Commun/documents/DOC_PATH_50_1079624604.pdf
105
Les marchés du carbone forestier
Projets forestiers parmi d’autres Projets forestiers seulement
Atmos Clear - USA Ebex 21 - Nouvelle Zélande - American Forest - USA Green Fleet - Australie
programme Carbon Zero
106
Australian Carbon Traders - Australie EcoAct - France AusCarbonGroup - Australie Greening Australia - Australie
Carbon Clear - Angleterre Evolution Markets - USA AusCarbon International - GreenOxx - Uruguay
Australie
Carbon Footprint - Angleterre First Climate - Suisse Carbon Balance - Angleterre Grow A Forest - Angleterre
Carbon Fund - USA Good Planet - Action Carbone Carbonica - Angleterre Impatto Zero - Italie
- France
Carbon Planet - Australie Green Seat - Pays Bas Carbon me - Angleterre Men of The Trees - Australie
Carbon Pool - Australie Max Ambiental - programme Climate Stewards - ONF International - France
Carbono Neutro - Brésil
Cero CO2 - Espagne Natsource - USA Conservation Fund - USA PrimaKlima - Allemagne
Climate Neutral Group - Pays Bas Orbéo - France Conservation International - USA Pure Planet - USA
Climate Neutral Network - USA Origin Energy - Australie CO2 Australia - Australie ex Oil Pur Projet - France
Mallee
Climate Positive - Australie South Pole - Suisse Cool Earth - Angleterre Reward Group - Australie
Climate Trust - USA Sustainable Travel International Econeutral - Canada SOS Mata Atlantica - Programa
- USA Florestas do Futuro - Brésil
C02 Balance -Angleterre The Carbon Neutral Company - Elementree - Australie The Green Initiative - Brésil
Angleterre
C02 Logic - Belgique Trees & Water and People - USA Enviro-trade - Angleterre The Equilibrium Fund - USA
Tableau H : Exemples de compensateurs proposant des projets forestiers à leurs clients
Easy Being Green - Australie Zero Footprint Offsets - Canada Face the Future - Face Foundation TIST - International Small Group
- Pays Bas Tree Planting Program - USA
Le secteur public joue un rôle fondamental dans le financement des projets carbone
forestiers à trois niveaux. Premièrement, il est souvent la seule source de financement
pour certaines activités forestières qui produisent des bénéfices sociaux et
environnementaux importants. Deuxièmement, il peut encourager les investissements
107
Les marchés du carbone forestier
du secteur privé avec des incitations telles que des subventions, des allégements
fiscaux et des prêts bonifiés. Enfin, il est chargé de fournir une politique et un cadre
favorable à « l’environnement des affaires » (législation adéquate, expertise locale,
projets pilotes, premiers retours d’expérience, etc.). Ainsi, la finance publique ou
l’aide publique au développement joue un rôle majeur dans le cadre du lancement des
mécanismes carbone forestiers.
L’APD, par des programmes de renforcement des capacités dans les pays hôtes, par
des solutions de financement pour les projets (emprunts, donations, investissements),
de l’achat de crédits via des fonds carbone, ou encore par des fonds de garantie
permettant l’accès des projets à l’emprunt, joue un rôle très important dans le
développement des projets carbone forestiers.
Comme nous l’avons décrit en partie 2, des montants significatifs sont engagés par
les coopérations bilatérales pour des programmes nationaux et de renforcement de
capacités locales. Par ailleurs, ces coopérations peuvent aussi appuyer des projets.
Parmi les plus actives dans le secteur l’on peut citer les coopérations bilatérales
Norvégienne, Allemande (GTZ), Anglaise, Américaine (USAID), Australienne, Danoise
(Danida) ou encore Française (AFD).
108
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Initiatives Type d’appui
BioCarbon Fund Le BioCarbon Fund (BioCF) a démarré ses opérations en 2003. Doté de
(Banque Mondiale) 60 M€, celui-ci achète des crédits issus des projets forestiers et renforce
les capacités des porteurs de projet pour stimuler place du secteur
LULUCF au sein des marchés du carbone.
CASCADe (UNEP /
Doté de 1,3 M€, le programme CASCADe a pour objectif de développer
FFEM)
le MDP en Afrique Subsaharienne dans les secteurs de l’agriculture,
la sylviculture et la bio énergie via des programmes de renforcement
des capacités dans les pays suivants : Bénin, Cameroun, République
Démocratique du Congo, Gabon, Madagascar, Mali, Sénégal (pour
illustration voir l’étude de cas n°5).
109
Les marchés du carbone forestier
◆◆ Les aides publiques locales
3.3.4. Conclusion
110
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Financement « mécénat » Financement « lance-
Etudes Financement
Compensation Mécénat ment des mécanis-
de cas « traditionnel »
volontaire environnemental mes », appui public
111
Les marchés du carbone forestier
La typologie des projets existants (partie 1) et les montants engagés dans ce secteur
indiquent que le mécénat environnemental (que ce soit dans le cadre du marché
de la compensation volontaire, des donations directs, ou des donations via des
ONGs) ainsi que les acteurs publics jouent un rôle fondamental dans le financement
actuel des projets carbone forestiers. Le rôle du secteur purement privé (dans une
logique de rentabilité) reste aujourd’hui faible. Toutefois, les nombreux signaux
positifs qu’envoient les marchés régulés (partie 2) entraînent une explosion de
l’intérêt des investisseurs pour le secteur forestier. Si ces signaux se confirment, une
professionnalisation du marché et un meilleur accès au financement « traditionnel »
sont ainsi à anticiper.
S’elle ne constitue souvent pas une source de financement, la signature d’un contrat
de vente de crédits permet de garantir les revenus futurs liés à la vente des crédits
carbone. En ce sens, ils sont un levier important pour le financement des projets.
Cette dernière partie détaille les conditions de vente de ces crédits.
choix des investisseurs lorsqu’ils achètent des crédits carbone forestiers (figure 33).
Ce critère devance l’expérience et la crédibilité du porteur de projet, le type de projet,
les bénéfices sociaux et environnementaux, et le prix de vente des crédits.
112
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Standards carbone
Expérience et crédibilité
Type de projet
Trés
Bénéfice biodiversité
Imp
Bénéfice communautés Peu
Non
Prix
s carbone Ne
Pre-compliance
crédibilité
Localisation
de projet
Participation ONGs Trés Important
odiversité
Important
munautés 0% 20% 40% 60%
Trés Important 80% 100%
Peu important
Trés Important Important Non important
Prix
Important Peu important Ne sais pas
mpliance Peu important Non important
Figure 33 : Les critères de choix
Nondes acheteurs de crédits
important Ne carbone
sais pas forestiers
calisation
Ne sais pas
on ONGs
0% On peut
20% 40%
classer les différents 60%
standards 80%catégories :
en deux 100%
% 40% 60%
◆◆ Les standards 80% qui labellisent
« carbone » 100% les tonnes de CO2 issues des projets selon
60% 80% 100%
un certain nombre de critères de qualité (mesurabilité, additionnalité, etc.). Parmi
ceux-ci, on distingue :
◆◆ Les standards « projets » garantissent la qualité du projet dans son ensemble selon
un certain nombre de critères (climat, biodiversité et social dans le cas de CCBs)
mais ne labellisent pas des tonnes de CO2 mesurées. Les garanties apportées à
un acheteur sont donc limitées. Ces standards (CCBs, Social Carbon) sont ainsi
souvent considérés comme additionnels aux standards précédents.
85 Nous excluons les labels centrés sur une zone géographique donnée : CAR, GGAS, etc.
113
Les marchés du carbone forestier
Les projets carbone forestiers dans leur ensemble sont soit standardisés par un label
« carbone », un label « projet », les deux, ou restent non standardisés (cf. partie 1).
Le choix d’un label se fonde, dans l’ordre, sur les trois critères suivants :
◆◆ Les atouts commerciaux des différents standards, ainsi que ceux du projet
considéré.
On peut retenir que pour des projets d’une taille supérieure à 30 000 tCO2 par
an, une labellisation se justifiera aisément. Pour des projets d’une taille inférieure
à 5 000 tCO2 par an ou 100 ha (cf. figures 16 et 29), la question de l’intérêt
d’une labellisation se pose vraiment. Pour des projets de grande taille, une double
certification « carbone » et « projet » peut s’avérer pertinente (voir triple dans certains
cas : « carbone » régulé (MDP), « carbone » volontaire et « projet »). Cette certification
multiple permet de garantir le plus haut niveau de qualité des crédits générés aux
acheteurs.
114
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
3.4.1.2. L’éligibilité du projet aux différents standards
Si l’intérêt d’une labellisation se démontre, le projet doit ensuite être éligible aux
standards. Cette éligibilité dépend de la localisation, du type de projet, de la propriété
du sol ou encore de l’historique du terrain.
◆◆ Où se déroule le projet ?
Dans les deux cas, cela implique que le pays en question ait ratifié le protocole de
Kyoto et qu’une AND fonctionnelle soit mise en place. De plus, et comme cela a été
souligné en première partie du document, les règles associées à la comptabilisation
des émissions liées au secteur forestier dans les pays de l’annexe I entravent de
manière importante la possibilité de réaliser des projets MOC (à noter l’exception de
la Nouvelle-Zélande présentée en première partie). La MOC ne concernant que la
période 2008-2012, nous ne la considérerons donc pas dans la suite du document.
Dans tous les cas, il convient de contacter l’autorité compétente du pays hôte, et
notamment l’AND si celle-ci est en place , .86 87
Dans les pays de l’annexe I, si un projet volontaire est mis en place, un risque de
double comptage des crédits peut apparaître avec l’inventaire GES national du pays
hôte au titre du protocole de Kyoto. Certains standards (comme le VCS) exigent que
ce problème de double comptage soit évité (annulation des crédits Kyoto, non prise
en compte dans l’inventaire, etc.). Un contact avec l’AND permettra de répondre à
cette question.
Pour les autres standards, on peut noter que certains d’entre eux restreignent
l’aire géographique d’éligibilité. C’est le cas du CAR sur les Etats-Unis, du GGAS en
Nouvelle-Galles du Sud (Australie), du Plan Vivo dans les zones rurales des pays en
voie de développement.
86 http://unfccc.int/parties_and_observers/parties/non_annex_i/items/2833.php
87 http://cdm.unfccc.int/DNA/index.html
115
Les marchés du carbone forestier
◆◆ Quel est le type de projet ?
Le second critère à prendre en compte est le type de projet. En effet, certains peuvent
ne pas être éligibles, rendant de fait impossible la génération de crédits carbone.
Standards carbone
Types de projet Standards projets
Régulés Volontaires
Boisement et MDP VCS, VER +, Plan Vivo, CCBs, Social Carbon
reboisement (AR) CarbonFix, CCX, CCAR
Amélioration de la VCS, Plan Vivo, CCX, CCBs, Social Carbon
gestion forestière (IFM) CCAR
Déforestation et VCS, Plan Vivo, CCX, CCBs, Social Carbon
dégradation évitée CCAR
(REDD)
Il est important de noter que si un de projet est éligible à un standard, cela ne veut
pas dire que le projet est conforme aux critères de qualité de ces standards et qu’une
méthodologie existante s’applique au projet.
Notons de plus que dans le cas spécifique des projets AR, les différents standards
imposent des conditions d’éligibilité supplémentaires concernant le contrôle des
terres et la date de déboisement. Pour certains standards, la date de déboisement
doit être antérieure au 31/12/1989 (MDP, VER +, Plan Vivo, CCX) tandis que pour
d’autres elle doit être antérieure de 10 ans à la date des premières opérations du
projet (VCS, CarbonFix). De plus, le terrain doit être contrôlé au 2/3 pour le standard
MDP.
116
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
« carbone » : la gestion de la permanence. Le choix doit ensuite se baser sur la qualité
des différents standards, et l’intérêt des acheteurs pour ceux-ci.
Pour gérer le cas de la permanence dans le cadre du MDP, il a été décidé de créer deux
unités particulières aux projets MDP forestiers :
◆◆ Le short term CER (tCER), qui est « un CER émis pour une activité de projet
de boisement ou reboisement du MDP, qui devient caduque à la fin de la
période d’engagement postérieure à la période à laquelle elle a été expédiée
» . Pratiquement, ce sont des unités qui ont une validité d‘une période
88
◆◆ Le long term CER (lCER), qui est un « CER émis pour une activité de projet
de boisement ou de reboisement du MDP qui expire à la fin de la période
d’accréditation du projet de boisement ou de reboisement du MDP pour lequel
elle a été émise ». Pour un projet forestier, la période d’accréditation peut être
de 20 ans (renouvelable deux fois pour un maximum de 60 ans) ou de une fois
30 ans. Toutefois, si à un moment quelconque le projet sous-jacent n’est plus
en mesure de démontrer que la séquestration de carbone perdure, ces unités
devront être remplacées prématurément.
Les CER classiques émis dans le cadre des projets MDP énergétiques ont eux une
durée de vie considérée comme permanente car ils ne doivent pas être remplacés. Cela
signifie que les crédits forestiers (temporaires ou longue durée) auront un prix plus
faible que les crédits permanents (un tCER vaut environ un tiers du prix d’un crédit
équivalent permanent). L’annexe 3 décrit une méthode de calcul du prix des crédits
temporaires et réalise une comparaison et une clé de choix des crédits tCER et lCER.
117
Les marchés du carbone forestier
voire une baisse du prix des crédits carbone. Or globalement, le contraire est plutôt
anticipé (hausse du prix des crédits carbone). Responsabilité et anticipation d’une
hausse du prix des crédits carbone sont les deux facteurs principaux qui expliquent
l’intérêt limité des acheteurs pour les crédits carbone forestiers. Dans la pratique, on
peut observer que quasiment tous les projets ont choisi les crédits tCER. Enfin, le
BioCF et la CAF (Corporacion Andina de Fomento) sont aujourd’hui les principaux
et uniques acheteurs à grande échelle de crédits temporaires, principalement pour le
compte de pays de l’annexe I sous quotas Kyoto.
CO 2e CO 2e CO 2e
90 90 10 buffer 30%
80 7 VCU
80 20
buffer 30%
14 VCU
60 60 40
buffer 30%
28 VCU
20 20 20
buffer 30%
14 VCU
2012 2017 2022 2027 2032 2012 2017 2022 2027 2032 2012 2017 2022 2027 2032
20 crédits valables 5 ans 20 crédits valables 20 ans 14 crédits permanents
60 crédits valables 5 ans 40 crédits valables 15 ans 28 crédits permanents
80 crédits valables 5 ans 20 crédits valables 10 ans 14 crédits permanents
Figure 34 : Génération de crédits tCER, lCERs et VCU sur un projet de reboisement. On considère
que le prix d’un crédit temporaire de type tCER vaut un tiers du prix d’un crédit permanent
(Source : ONFI)
118
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Les modes de génération des crédits dans le cadre d’un système temporaire et
permanent sont différents. Dans le cadre des tCERs, la génération des crédits se base
sur les « stocks », alors que dans le cadre d’un crédit permanent (comme les VCU), elle
se base sur les « flux » d’absorption (figure 34).
La conséquence directe est que le nombre de crédits générés dans le cadre d’un
standard permanent est beaucoup plus faible. Cet effet est encore plus fort dans le
cadre de plantations où les éclaircies ou les coupes intermédiaires sont importantes
(il est alors impossible de prendre en compte plus de la moyenne globale du stockage
sur la durée de vie du projet, et le buffer sera important). Cet effet dit « de crête »
implique que les standards permanents diminuent de manière très importante le
nombre de crédits que peuvent générer ces projets, alors que dans le cadre du tCER
quasiment tous les stocks sont pris en compte. Les crédits permanents permettent
donc d’améliorer la possibilité de vendre les crédits et le prix de vente, mais imputent
de manière importante le nombre de crédits générés. Ils sont notamment pertinents
dans le cas de plantations de conservation ou le déstockage est limité ou accidentel.
Dans les autres cas, une modélisation selon les deux systèmes permettra de déterminer
celui qui est le plus adéquat.
Dans le cas où le porteur de projet dispose encore de plusieurs choix, c’est avant
tout l’attrait des acheteurs pour les différents standards qui doit guider le choix final.
Le tableau suivant donne ainsi des éléments de discrimination entre ces différents
standards. Les résultats de trois études dédiées à ce sujet sont ici repris.
119
Les marchés du carbone forestier
Forestry The Forest Carbon Review of Prix de Bilan
Carbon Offsetting Survey forestry carbon vente des
2 3
Standards 2009 standards 2009 crédits
Standard
1 4
2008 (en% de très (note sur 60, (délivrés ,
désirable et désirable dépendante toutes
pour des acheteurs de différents technolo-
de crédits) critères) gies)
Standards carbone
Non Premier : 64% Non considéré Le MDP est le standard de qualité
2,5-3,3 €
considéré le plus reconnu, réalisé et soutenu
/ tCER (prix
par la CCNUCC. Toutefois les
d’achat du
complexités méthodologiques, ces
BioCF)
coûts de transaction, et l’absence
d’acheteurs pour les crédits
Les crédits
temporaires (hormis l’exception
CER
notable du BioCF) limitent son
permanents
MDP
120
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Forestry The Forest Carbon Review of Prix de Bilan
Carbon Offsetting Survey forestry carbon vente des
2 3
Standards 2009 standards 2009 crédits
Standard
1 4
2008 (en% de très (note sur 60, (délivrés ,
désirable et désirable dépendante toutes
pour des acheteurs de différents technolo-
de crédits) critères) gies)
Non Troisième : 41% Non considéré Entre 2,5 Le VER + présente de nombreuses
considéré et 15,5 € similitudes avec le MDP et le
VER +
121
Les marchés du carbone forestier
Forestry The Forest Carbon Review of Prix de Bilan
Carbon Offsetting Survey forestry carbon vente des
2 3
Standards 2009 standards 2009 crédits
Standard
1 4
2008 (en% de très (note sur 60, (délivrés ,
désirable et désirable dépendante toutes
pour des acheteurs de différents technolo-
de crédits) critères) gies)
Standards projets
A réaliser 30% (46% quand Second : 51/60 Entre 1,3 Le standard CCBs est un standard
en plus des combiné avec un et 10 € reconnu pour les bénéfices sociaux
standards autre standard) (moyenne et environnementaux des projets
“carbone” à 6) forestiers. Il donne un plus au
CCBs
122
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
3.4.2. Comment définir la propriété des crédits carbone ?
La question de la propriété des crédits carbone d’un projet est majeure à plusieurs
titres. Tout d’abord, seuls le ou les propriétaires de ces crédits seront légitimes
à procéder à leur vente, et de fait à bénéficier directement de leurs revenus. La
propriété de ces crédits et leur distribution entre les contributeurs au projet devront
être gages d’équité et de viabilité sur le long terme du projet. Ce dernier point est
particulièrement essentiel pour les projets forestiers qui se déroulent sur plusieurs
décennies et font bien souvent intervenir une multitude d’acteurs.
123
Les marchés du carbone forestier
La définition de la propriété des crédits carbone se réalise tout d’abord en étudiant
la qualification juridique nationale des crédits carbone. Ensuite via la réponse (dans
l’ordre) aux deux questions suivantes:
3.4.2.1. Un préalable : quelle est la nature juridique des crédits carbone dans
le pays hôte ?
Avant tout il est important de connaître la nature juridique des crédits carbone pour
déterminer les droits et obligations de leurs détenteurs, et la possibilité de transférer
le titre légal à l’acheteur. La détermination de la nature juridique des crédits constitue
un des indices qui peuvent être utilisés pour identifier le ou les propriétaire(s) de
ceux–ci, en fonction des droits et obligations qui se rattachent à la production et la
détention des crédits.
A titre préliminaire, il convient de noter que les crédits carbone sont des instruments
sui generis - créés soit par des instruments de droit international (Protocole de Kyoto,
Accords de Marrakech), soit par des initiatives volontaires privées (VCS, etc.). Or, ni
les premiers, ni les seconds ne définissent la nature juridique des crédits.
La nature juridique des crédits n’est pas définie par le droit international qui ne peut
que régler les relations juridiques d’Etat à Etat. Ni l’article 12 du Protocole de Kyoto,
ni les « Accords de Marrakech » ne donnent d’indications pour déterminer la nature
juridique des CERs ou encore régler la question de la propriété de ces crédits.
Quant aux initiatives volontaires, elles relèvent de la sphère privée qui ne saurait
se substituer au législateur. Si elles venaient à retenir une quelconque qualification
juridique de manière arbitraire, celle-ci ne s’appliquerait qu’aux parties prenantes et ne
pourrait être sanctionnée que par la voie de la responsabilité contractuelle sur la base
des conventions conclues entre l’acheteur et le vendeur.
124
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
applicable, qui peut être la loi applicable au contrat de vente des crédits ou celle du
pays d’accueil dans lequel le projet est mis en œuvre. Si aucun contrat n’est négocié
au moment où les parties prenantes au projet se pose la question de la qualification
juridique, il convient donc de se référer au droit national du pays d’accueil du projet.
Si certains pays, notamment des pays industrialisés acheteurs de crédits à des fins
d’observance aux engagements du Protocole de Kyoto, ont défini la nature juridique
des crédits par la détermination de la loi , il y a très peu de pays en développement
89
national relative au droit civil et/ou au droit des obligations et/ou en matière
commerciale (dans l’hypothèse où la transaction portant sur la vente des crédits serait
constitutive d’un acte de commerce).
89 A titre d’exemple, le législateur français a introduit dans le Code de l’environnement français une
définition des URCEs à l’article L.229-22 du Code de l’Environnement
90 IUCN, “Legal Aspects in the Implementation of CDM Forestry Projects” (2005), IUCN
Environmental Policy and Law Paper No. 59, disponible sur le site http://data.iucn.org/dbtw-wpd/
edocs/EPLP-059.pdf.
125
Les marchés du carbone forestier
où la loi fédérale relative aux forêts publiques, qui a mis en place un système de
concessions pour l’exploitation du bois, précise, dans le cas des concessions à titre
onéreux, que celles-ci ne concernent pas le carbone qui demeure propriété de l’Etat
fédéral. Les « fruits » que peuvent exploiter les concessionnaires n’incluent donc
pas, dans ce cas précis, le carbone séquestré.
Sur les marchés MDP et volontaires, les crédits sont le plus souvent envisagés comme
des « intangible goods » ou « commodities » (bien incorporel, marchandise), mais aussi
parfois comme un instrument financier (lorsque la transaction est constitutive d’un
contrat à terme) ou, éventuellement, comme une prestation de services.
Concernant les projets forestiers, et hormis les cas dans lesquels le législateur a défini
la nature juridique des crédits dans la loi comme c’est le cas de la Nouvelle Zélande, le
carbone séquestré est considéré comme un « fruit » des forêts. Le crédit carbone qui
atteste de cette séquestration est perçu comme un « bien », c’est-à-dire une chose (en
l’occurrence il s’agit d’un titre), objet de droits réels, susceptible de propriété privée.
Par ailleurs, on peut dire qu’il s’agit d’un bien « meuble », car le carbone séquestré sera
un jour rejeté dans l’atmosphère, il n’est pas rattaché au sol à perpétuelle demeure.
Enfin, selon la nationale applicable, il peut s’agir d’un bien « incorporel », car il n’a
pas de réalité matérielle en tant que tel et n’existe que par l’effet d’une construction
juridique.
Cette qualification est importante car, si elle ressort du droit privé (et que les crédits
ne font pas l’objet d’une nationalisation par l’Etat du pays d’accueil), elle donne un
indice pour identifier le propriétaire, les crédits étant susceptibles de propriété privée.
Si la loi du pays d’accueil n’identifie pas le ou les propriétaire(s) des crédits carbone,
mais qu’il est possible de qualifier, par analogie avec d’autres instruments existants, que
le bien est susceptible d’appropriation privée, il est possible de déterminer qui est le ou
les propriétaires à partir de plusieurs critères ou indices.
Comme indiqué précédemment, les fruits sont perçus par le propriétaire du bien qui
126
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
les produit (les arbres en l’occurrence), conformément au droit de jouissance qui
constitue l’un des trois éléments du droit de propriété (fructus). Dans certains pays,
notamment ceux qui ont des traditions juridiques issues du droit latin, il existe une
présomption selon laquelle la propriété du sol emporte propriété du dessus et du
dessous. Dans ce cas, c’est donc le propriétaire du terrain qui pourra revendiquer tout
ou partie du carbone séquestré, en fonction des apports d’autres intervenants au
projet.
Sur cette base, les acteurs suivants sont potentiellement le ou les propriétaire(s) des
crédits carbone générés par des projets forestiers:
◆◆ Le propriétaire du foncier ;
◆◆ La personne qui jouit de droits réels sur les arbres dans le périmètre du projet. Ce
sera le cas d’un locataire, d’un concessionnaire, ou d’une personne titulaire d’un
droit usufruit ;
Par ailleurs, la production de crédits carbone résulte d’une activité spécifique, c’est
à dire des plantations dans le cas d’un projet AR par exemple. Les crédits seront
d’abord le résultat du projet ; S’il s’agit d’un projet éligible au titre du MDP, c’est
usuellement l’entité, publique ou privée, qui s’inscrit comme participant au projet
dans le PDD qui est présumée être le propriétaire des crédits. En cas de pluralité
d’acteurs, et en fonction de leurs apports respectifs pour le montage du projet, ceux-
ci peuvent s’entendre pour la répartir les crédits entre eux. Il faudra tenir compte (i)
des personnes qui sont liés ou associés au projet (monteurs de projet), (ii) de celles
qui ont un intérêt légal ou économique dans le projet (investisseur, établissement
127
Les marchés du carbone forestier
de crédit, détenteurs) et, (iii) éventuellement de celles qui exercent des droits réels
ou, (iv) éventuellement, d´usages sur des biens meubles et immeubles, y compris les
terrains, que l’on peut considérer comme contribuant à la « production » des crédits
carbone, que ce soit dans le cadre du MDP ou du marché volontaire.
Dans le cas d’un projet forestier, on pourra notamment envisager que les acteurs
suivants puissent être reconnus comme propriétaires de tout ou partie des crédits:
De ce fait, la propriété des crédits carbone a été divisée entre les différents
acteurs du projet. En effet, un pourcentage des dits crédits sera attribué aux
propriétaires-éleveurs, en contrepartie de leurs apports. Un autre pourcentage
sera accordé aux financeurs, la Corporation et la Banque (qui vont recevoir aussi
un pourcentage des recettes pour la vente du bois), et finalement un pourcentage
pour ONFI. Les pourcentages varient en fonction des apports de chacun.
Pour éviter toute contestation, ces accords ont été formalisés entre les parties
prenantes.
128
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
◆◆ Celui qui met à disposition ses terrains, c’est à dire le propriétaire foncier ;
◆◆ Celui qui réalise les activités ou qui est propriétaire des arbres ou de droits
usufruitiers ;
Sur cette base, et dans l’hypothèse où plus d’une personne peut revendiquer la propriété
des crédits carbone, les parties prenantes à l’activité doivent décider comment se
répartir les crédits qui seront générés par l’activité (pourcentage du volume des crédits
carbone générés par le projet, pourcentage des revenus générés par la vente des crédits
carbone ...). En cas de pluralité de propriétaires ainsi identifiés, il est souvent utile de
prévoir un mécanisme de commercialisation par lequel l’un, ou une structure ad hoc,
sera mandaté(e) pour vendre les crédits au nom et pour le compte des vendeurs. Ce
mécanisme pourra aussi, afin de simplifier la transaction, prévoir que certains renoncent
à leurs droits de propriété. Ces derniers pourront percevoir une contrepartie en nature
ou numéraire de la valeur des crédits qu’ils auraient pu vendre, le cas échéant, via le
projet lui-même.
Il y a donc une possibilité de partager et répartir les droits de propriété sur les crédits
du carbone, proportionnellement aux apports fournis ou efforts consentis
129
Les marchés du carbone forestier
Notons par ailleurs que la mise en place d’un système de type REDD+ discuté en
partie 2 est susceptible de modifier de manière importante le mode de définition
de la propriété des crédits carbone forestiers, notamment par des législations qui
pourraient se mettre en place. Les modalités du REDD étant encore actuellement
discutées, il est cependant pour l’instant très difficile d’évaluer ces évolutions.
L’identification du ou des propriétaires des crédits carbone doit se faire très tôt, dès
avant la validation, souvent pour faciliter le financement du projet lui-même. En effet
les crédits peuvent être vendus à l’avance pour générer une source additionnelle de
financement, également pour rendre le projet éligible à l’égard des autorités en charge
du MDP (AND et Conseil Exécutif du MDP) ainsi que pour celles des standards
volontaires. Dans le cas du MDP, les participants au projet mentionnés dans le Project
Design Document (PDD) sont présumés être les propriétaires des crédits carbone
reconnus et acceptés par les autres intervenants dans le projet. Il en va de même
du « Project Owner » dans le cas du standard VCS. Dans les deux cas, il s’agit d’une
présomption simple pouvant être renversée par tout moyen, d’où la nécessité d’en
prendre acte par la voie contractuelle (« ERPA » notamment) qui constitue un élément
de preuve par écrit.
Parallèlement, les différents ayant droit sur les crédits carbone doivent établir entre
eux des relations contractuelles qui auront notamment pour objectifs :
130
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
3.4.3. Comment contractualiser (ERPA) et
vendre des crédits carbone ?
Les transactions de crédits carbone prennent le plus souvent la forme d’une vente
de gré à gré sur le marché primaire qui intervient en amont du développement du
projet ou de sa mise en œuvre, souvent même avant sa validation par un standard, afin
d’offrir aux développeurs de projet une source de financement additionnelle ou une
garantie d’emprunt bancaire.
La vente des crédits suppose une relation juridique qui s’analyse comme un contrat
d’achat de réductions d’émissions vérifiées (CAREV, ou Emissions Reductions Purchase
Agreement - ERPA). L’objectif d’un contrat de vente de crédits carbone est de gérer la
relation entre le vendeur et l’acheteur, et de prévoir les conditions de cette relation,
sous réserve de la bonne exécution du projet lui-même.
Pour autant, il est important de comprendre que chaque contrat reste unique, même
s’il est négocié sur la base d‘un contrat type, en ce sens qu’il se rapporte à un projet
précis, tient compte de ses particularités, ainsi que des risques commerciaux et non
commerciaux propres au pays d’accueil. A cet égard, il convient de noter que les
contrats peuvent être assez différents selon les caractéristiques du projet, l’activité
concernée (notamment pour les projets forestiers), le type de crédits (MPD, crédits
volontaires, etc.), et le marché sur lequel la transaction a lieu (vente de gré à gré sur le
marché primaire, marché spot, vente aux enchères par appels d’offres…).
91 www.cerspa.org
131
Les marchés du carbone forestier
Sur le marché primaire, ces pourparlers revêtent un intérêt à plus d’un titre, notamment
pour tenir compte des spécificités du projet ainsi que des positions respectives du
vendeur et de l’acheteur, et pour bien cibler les risques respectifs et s’assurer une marge
de manœuvre. Ces pourparlers ont des formes diverses (lettre d’intention précédant
le contrat, promesse d’achat ou autres formules telles que le contrat d’option d’achat,
pour garantir tant la sécurité juridique que l’exclusivité de la vente pendant une certaine
période).
Dans le cas des contrats négociés sur le marché primaire, l’objet porte sur des crédits
qui seront délivrés à une date ultérieure. Il faut ainsi prévoir un certain nombre de
clauses pour garantir les risques susceptibles d’empêcher la délivrance des crédits. Ces
risques ont été détaillés en partie 3.2.3.
La survenance des évènements identifiés comme étant des risques peut avoir pour
conséquences :
132
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
◆◆ La rupture du contrat et de tous les engagements pris et honorés depuis sa
signature (résolution du contrat) ;
Un certain nombre d’autres risques peuvent être écartés par le recours à des clauses
de validité (ou « conditions precedent »). Toutefois, il est possible de prévoir que la
clause de validité du contrat ne s’applique pas à certaines clauses (pénalités) qui
visent à sanctionner la partie qui n’aurait pas exécuté ses obligations. Ainsi, par
exemple, si le projet ne peut être enregistré au titre d’un standard, le contrat est alors
caduque en ce qui concerne la réalisation de son objet (à savoir la vente des crédits),
mais les sanctions à l’égard du vendeur peuvent s’appliquer pour réparer le préjudice
subi par l’acheteur.
On peut recenser les conditions de validité suivantes comme étant les plus
fréquemment utilisées :
◆◆ La condition pour les participants au projet d’avoir obtenu toutes les autorisations
nécessaires prévues par le droit national pour la réalisation du projet et l’exercice
des activités ;
133
Les marchés du carbone forestier
3.4.3.4. Comment sont négociées les conditions de livraison des crédits ?
Le moment de la livraison des crédits doit être déterminé avec soin. La plupart des
contrats contiennent des obligations de livraison annuelles mais les règles du MDP
et des crédits volontaires permettent d’opter pour des périodes plus courtes ou plus
longues, notamment dans le cas des projets forestiers. Fixer le lieu de livraison suppose
que le vendeur et l’acheteur disposent chacun d’un compte de personne dans un registre
(officiel dans le cadre du MDP, auprès d’une banque agréée dans le cas du VCS, auprès
d’un registre privé bien souvent sur le marché volontaire, etc.).
Reste la question fondamentale du prix d’achat des crédits et, accessoirement, des
modes de paiement par l’acheteur.
Nous avons vu en partie 1.4.5. (figure 17) que les crédits forestiers se répartissaient
principalement entre le marché volontaire de gré à gré, le marché volontaire CCX, et les
crédits MDP. Les prix moyens observés actuellement sont autour de 4,7 €/téqCO2, 1,7
€/téqCO2 et 3 €/téqCO2 respectivement . 92
92 Ces moyennes décrivent l’ensemble de la chaîne de vente des crédits (c’est-à-dire primaire et
secondaire). Néanmoins, l’essentiel des transactions enregistrées sont primaires, c’est-à-dire entre le
porteur de projet et le premier acheteur
134
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
Ces chiffres sont un premier élément pour fixer la valeur de vente des crédits selon le
marché considéré, notamment pour les crédits MDP et CCX. Pour le cas du marché
volontaire de gré à gré, il faut noter que la variabilité des prix observés est très
importante : de 0,4 à 40 €/téqCO2. Cette variabilité reflète que dans le cadre du
marché volontaire, c’est avant tout la qualité et la valeur « marketing » des projets qui
guide le choix des acheteurs plutôt que la recherche de réductions d’émissions à bas
coût (figure 10). A ce titre, il est intéressant de noter que 42% des acheteurs seraient
prêt à payer des crédits forestiers plus de 6,6€ (figure 34). Ainsi le prix de vente du
crédit pourra varier selon la qualité du projet (utilisation de standards reconnus) les
co-bénéfices qu’il apporte, sa localisation, le type de projet, et tout autre élément jugé
important pour les acheteurs. Notons enfin que le prix de vente est aussi sensible au
volume de crédits vendus.
Reste du monde
Reste du monde
Europe Europe
Amérique
Amérique du Nord du Nord
Total Total
0% 0%
10% 10%
20% 20%
30% 30%
40% 40%
50% 50%
60% 60%
70% 70%
80% 80%
90% 90%
100% 100%
0,5 - 2,5€0,5
� - 2,5€2,5
� - 6,5€2,5
� - 6,5€ �€
> 6,6 > 6,6 €
Figure 35 : Prix de vente acceptable pour des acheteurs de crédits carbone forestier (Source :
Ecosecurities)
Ces deux premiers éléments permettent de calculer le prix de vente d’un crédit
« généré » (crédits secondaires). Néanmoins de très nombreuses transactions se
réalisent avant la génération des crédits (crédits primaires). Une décote est alors
appliquée selon les risques que prend l’investisseur dans la transaction (financement
d’une partie des coûts, risque de permanence, etc.). Comme le montre la figure 36,
plus le projet est avancé, plus les risques diminuent et le prix des crédits atteint la
valeur de marché définit précédemment.
135
Les marchés du carbone forestier
Evolution du risque (ligne rouge) en fonction de la phase de développement d’un projet MDP/MOC
Agrégation
Phase Faisabilité Construction Exploitation Echange
(f onds CO 2 )
• Faisabilité • Délais/retard • Mise en œuvre
• Obtention • Coût de la dette de la technologie
de la licenc e • Prix du marché • Mise en œuvre
Risques projet d’exploit ation • Fournisseurs/
conventionnels matières premièr es
• Risque financier
et légal
• Contreparties
Figure 36 : Les prix des crédits dépendent de l’avancement dans le cycle de projet (Sources :
UNEP, Ecosecurities, Banque Mondiale, E&Y)
◆◆ Prix fixe. L’approche la plus simple consiste à adopter un prix fixe par crédit.
Ce prix fixe restera en vigueur pendant la durée du contrat. Cette approche est
rassurante pour les deux parties, mais elle fait fi de l’impact de l’inflation ou des
fluctuations du marché. Il est aussi possible de tenir compte de l’inflation avec un
contrat à prix fixe en stipulant que le Prix Unitaire augmentera automatiquement
de X% chaque année ;
◆◆ Prix indexé. Le prix indexé fait appel à un cours au comptant pour calculer le
prix unitaire. Le cours au comptant peut soit faire référence à des crédits, soit,
plus souvent, à d’autres unités de réduction des émissions, comme le cours des
quotas alloués dans le cadre de l’EU-ETS. En conséquence, le prix unitaire fluctuera
et changera à chaque paiement annuel. Cette méthode de calcul comporte des
opportunités et des risques pour le vendeur et l’acheteur, selon l’évolution du
cours au comptant de référence sur la durée du contrat. L’utilisation d’un prix
indexé simple signifie que ni le vendeur ni ses banques ne seront en mesure de
calculer les recettes tirées du carbone et donc la valeur du contrat ;
136
Comment financer un projet et vendre des crédits ?
◆◆ Combinaison d’un prix fixe et d’un prix indexé. L’association d’un prix unitaire
fixe par crédit et d’un prix indexé permet de garantir un prix minimum et limite
l’impact des fluctuations du cours au comptant sur le prix unitaire. L’association
d’un prix indexé et d’un prix fixe peut aussi être assortie d’un plafond et d’un
plancher sur le prix unitaire, comme indiqué ci-dessous ;
Il convient de noter que dans un pays au moins (la Chine dans le cas du MDP) les
prix sont régulés. Il est possible que des réglementations locales stipulent des prix
planchers. Enfin, les contrôles de change dans certains pays, même s’ils sont favorables
au pays hôte dans le cas d’une transaction carbone, nécessitent parfois le respect de
certaines procédures au moment du paiement. Le vendeur se doit donc de consulter le
droit local avant de fixer un prix ou de choisir une formule de prix.
La vente des crédits du projet peut s’effectuer « en direct » à l’utilisateur final du
crédit (dans le cadre d’une stratégie de compensation, etc.) ou via des intermédiaires,
brokers et traders, qui proposent ce service d’intermédiation. Le choix de l’une
ou l’autre des solutions (en direct, ou via un intermédiaire) dépend de la capacité
marketing et commercial du porteur de projet pour trouver un acheteur de crédits.
Si celle-ci est limitée, il aura alors intérêt de passer par des intermédiaires pour
démultiplier ses chances de trouver un acheteur de crédits au meilleur prix. Le coût
de cette intermédiation dépend du niveau de service que propose l’intermédiaire
(recherche de l’acheteur, appui aux négociations, etc.) et du volume de crédits à
vendre. Ce coût se rémunère très souvent entre quelques % et 10% de la transaction.
Parmi les entreprises qui proposent ces services, on peut citer Evolution Markets,
Ecosecurities, Camco, MGM International, First Climate, etc. Le volume de crédits
déjà vendu dans le secteur forestier par ces prestataires est un bon indicateur de leur
performance.
137
Les marchés du carbone forestier
Annexe 1 : Les méthodologies
applicables aux projets forestiers
Méthodologies grande échelle Boisement/Reboisement approuvées par le Conseil Exécutif du MDP
méthodologie AR-AM0001 AR-AM0002 AR-AM0004 AR-AM0005 AR-AM0006
Conditions d’applicabilité
plantation
à but
Type de plantation sur des
commercial ou
plantation terres agricoles
industriel sur
prairies
absence de Absence de absence de
Déplacement déplacement
déplacement déplacement déplacement
d’activités d’activités possible
d’activités d’activités d’activités
mise en place de
régénération assistée
mise en place de plants d’arbres
Régéneration ou mise en place de
plants ou semis ou d’arbustes ou
plants
semis
absence
émissions
d’émissions absence d’émissions
du carbone
du carbone du carbone
organique du
Sol organique du organique du sol du
sol du fait de la
sol du fait de fait de la préparation
préparation du
la préparation du site
site possible
du site
pas
Irrigation pas d’irrigation
d’irrigation
drainage et drainage et
Drainage perturbations du sol perturbations
faibles du sol faibles
activité de
Activité de absence d’activité
boisement/
Activité boisement/ de boisement/
reboisement
préalable reboisement reboisement
préalable
préalable possible préalable ou prévue
possible
138
Annexe
AR-AM0007 AR-AM0008 AR-AM0009 AR-AM0010 AR-ACM0001 AR-ACM0002
plantation
plantation
forestière pour plantation dans
sur des terres
la production une aire protégée
agricoles
durable de bois
mise en place de
plants d’arbres ou
semis
pas
pas d’irrigation pas d’irrigation pas d’irrigation pas d’irrigation
d’irrigation
drainage et
perturbations
pas de drainage du sol limités
sur sols
organiques
activité de
boisement/
reboisement
préalable possible
139
Les marchés du carbone forestier
méthodologie AR-AM0001 AR-AM0002 AR-AM0004 AR-AM0005 AR-AM0006
plantation
d’espèces plantation
plantation d’espèces
Fixation fixatrices d’espèces
fixatrices d’azote
d’azote d’azote fixatrices d’azote
possible mais limitée
possible mais possible
limitée
absence de
brûlage lors de
Brûlage
la préparation
du terrain
production
Fourrage de fourrage
possible
Couvert
boisé
Litière
Dégradation
tCER / lCER
140
Annexe
AR-AM0007 AR-AM0008 AR-AM0009 AR-AM0010 AR-ACM0001 AR-ACM0002
plantation
d’espèces fixatrices
d’azote possible
mais limitée
coupe et brûlage
absence de
de la végétation
brûlage lors de
limités à la
la préparation du
végétation non
terrain
arborée
strate herbacée
couvert boisé
stable ou en
initial limité
diminution
litière et bois déjections pas de récolte du
mort laissés animales laissées bois, de la litière de
sur site sur site la plantation
terres non
dégradées depuis
au moins 20 ans
ou non cultivées
depuis au moins
3 ans
approche de la
permanence via les
tCER
diminution
pâturage et
des activités absence de
silvopastoralisme
d’agriculture et pâturage
possibles
de pâturage
141
Les marchés du carbone forestier
Méthodologies petite échelle Boisement/Reboisement approuvées par le Conseil Exécutif du MDP
Méthodologies AR-AMS0001 AR-AMS0002 AR-AMS0003
version en cours 5 2 1
Conditions d’applicabilité
plantation en bordure
plantation en zone de
Type de plantation d’axes de transport ou en plantation en zones humides
prairie ou de culture
zones d’habitations
zones humides intertidales
dégradées, tourbières non
drainées dégradées, plaines
emprise d’axes de
alluviales dégradées sur
Terre prairies ou cultures transport ou zones
terrains non organiques,
d’habitations
zones inondées de manière
saisonnière en bord de plan
d’eau
surface cultures surface cultures pré-
surface cultures déplacées
Déplacement déplacées < 50% surface existantes < 10% surface du
< 50% surface du projet
du projet projet
bétail déplacé < 50%
bétail déplacé ne doit pas
Bétail capacité de pâturage des
impliquer de fuites
terrains du projet
perturbations du sol liées
au projet < 10% surface du
perturbations du sol perturbations du sol liées
projet
Sol liées au projet ≤ 10% au projet ≤ 10% surface
sur sols organiques,
surface du projet du projet
perturbations du sol
interdites
zones humides dont la
végétation dominante est
Couvert initial
composée d’herbacées
autochtones non éligibles
Par ailleurs, on peut noter que plusieurs méthodologies sont en cours de validation
dans le cadre du VCS :
142
Annexe
AR-AMS0004 AR-AMS0005 AR-AMS0006
2 2 1
surface cultures
déplacées < 20% surface
du projet
◆◆ Baseline and Monitoring Methodology for Project Activities that Reduce Emissions
from Deforestation on Degrading Land (REDD);
Autres acteurs Développeur du projet Pays hôte Pays investisseur Tierce partie UNF CCC
impliqués indépendante
Conception du pr ojet - Faisabilité du volet MDP/MOC
Identification d’une
opportunité de projet
Financements publics
Etude de faisabilit é
(identification d’une méthodologie,
calcul du potentiel de ér duction,
business plan du projet,
analyse de risques)
Non objection
Formalisation
(test d’éligibilité et
d’une NIP
de durabilité)
Développement Avis du
Proposition de la
d’une « Meth Panel »
Utilisation d’une méthodologie
méthodologie (approbation ou rejet)
méthodologie Eventuellement demande de clarification ou de modification
Construction du projet - Enregistrement du volet MDP/MOC
existante
Méthodologie Approbation par le
approuvée Comité exécutif
Assistance légale pour l’ enregistrement du projet, la négociation et la signat ure d’un ERPA (société d’avocats)
Rédaction
du PDD Commen-
Sélection du Audit du
taires du
validateur (1) PDD
public
Rapport
préliminair e
Lettre d’approbation Lettre d’approbation
du représentant du représentant R apport de
validation définitif
national (2) national (2)
Revue et
Soumissions des
enregistrement
documents validés
du projet (3)
Ouverture d’un
compte dans le
registre MDP
Rédaction du
rapport de suivi
Exploitation du projet - Obtention des crédits
Vérification des
Sélection du
réductions
vérificateur (1)
d’émissions
Publication du
rapport de
vérification
Approbation
Certification des
de la demande
émissions r éduites
de crédits (3)
Conversion des
Echanges
UQ A en URE
financiers avec un
Inscription des URE
client éventuel
Transfert des URE sur le c ompte des
Délivr anc e des URCE
(via ITL) participants dans le
dans le r egistre
registre national
Transfert des MDP sur le compte
crédits au client des participants
éventuel au projet
Source: E&Y. Pr océdures communes MDP et MOC Spécificités du MDP Spécificités de la MOC
Cas du MDP Cas de la MOC (voie 2)
(1) Entité Opérationnelle Désignée/EOD (1) Entité Indépendante Accréditée/EIA
(2) Autorité Nationale Désignée/AND (2) Point Focal Désigné/PFD
(3) Comité Exécutif/CE (3) Comité de supervision/CS
93 Gazzo et al., 2008. Developing a CDM or JI Project to Reduce GhGs : Identifying Opportunities, Getting
Started. GEF, MEIE, MEEDDAT
144
Annexe
Annexe 3 : tCER ou lCER ?
Pour que le prix d’un crédit temporaire (tCER) soit attractif, il faut que le prix de ce
crédit aujourd’hui, plus le coût d’un crédit permanent dans 5 ans (cas des tCERs)
soit inférieur au coût d’un crédit permanent aujourd’hui, c’est-à-dire qu’il remplisse
l’équation suivante : « le coût d’acquisition présent de l’unité temporaire (tCERs ou
lCERs) plus le coût d’acquisition futur de l’unité permanente doit être inférieur au
coût d’acquisition présent de l’unité définitive ».
T + C ((1 + i) / (1 + d) )< C
n n 94
$CER 2
$tCER = $CER 1 −
(1 + i) d urée d e vie
Equivalent à:
(1 + j) d urée d e vie
$tCER = $CER 1 − SCER 1
(1 + i) d urée d e vie
Le calcul du prix d’un crédit temporaire en comparaison d’un crédit permanent est
présenté dans le tableau suivant, sur la base des équations décrites précédemment
en faisant varier les deux paramètres de l’équation, le taux de variation du prix du
145
Les marchés du carbone forestier
crédit permanent (j) et le taux d’actualisation (i). Nous avons fait varier ces deux
paramètres pour des valeurs comprises entre 1% et 10%, et mesuré le prix des crédits
temporaires en fonction de l’écart entre taux d’actualisation et taux de variation (i – j).
Les crédits temporaires, du fait qu’ils doivent être remplacés à terme, permettent de
gagner du temps. Dans ce cadre, si le taux de variation du prix est élevé, voire supérieur
au taux d’actualisation, il n’est pas rentable pour l’acheteur de se procurer des crédits
temporaires car il devra les remplacer à terme par des crédits permanents qui valent
beaucoup plus cher.
La valeur indiquée dans la case 1% (écart entre i et j de 1%) est calculée sur la moyenne
des résultats obtenus pour cet écart entre i et j (moyenne de i=2 et j=1, i=3 et j=2, i=4
et j=3, etc.).
Il ressort de ce calcul que le prix d’un crédit temporaire tCER, qui possède une durée
de vie de 5 ans, vaudra entre 4,6% et 21,1% du prix d’un crédit permanent selon que
l’écart entre le taux d’actualisation et le taux d’inflation est plus ou moins important
(1 à 5%). Globalement, plus l’écart entre le taux d’actualisation et la variation du prix
des crédits permanents est élevée, plus la valeur du crédit temporaire sera élevée. Cela
signifie que l’utilisation de crédits temporaires est intéressante dans deux cas :
Si le taux d’actualisation est très élevé pour l’opérateur – cela signifie qu’il préfère
amplement payer moins maintenant (problème de trésorerie, incertitudes sur le futur) ;
Si l’acheteur estime que l’augmentation du prix des crédits carbone sera faible (j
réduit) ou même sera négative, il préfèrera payer des unités temporaires moins chères
aujourd’hui. Au contraire, si l’opérateur s’attend à une forte tension sur le marché du
carbone, et une augmentation importante des prix des crédits permanents (j élevé), les
crédits temporaires seront beaucoup moins attractifs pour lui.
146
Annexe
Le prix des crédits temporaires peut être estimé à partir du prix des crédits
permanents (CER).
Sur la base d’un crédit CER à 12,6 € (prix Spot en juillet 2009), le prix du crédit
temporaire tCER pourrait s’échanger entre 0,58 et 2,66 € pour un écart entre i et j
de 1 à 5%. Le BioCarbon Fund de la Banque Mondiale, principal acheteur de crédits
carbone forestier à ce jour, propose des prix d’achat de l’ordre de 2,5 à 3,3 € pour
les tonnes de CO2 séquestrées jusqu’en 2017. Le mode de calcul proposé par la
Banque Mondiale prend en compte de ce fait une à deux générations de tCERs pour le
prix indiqué.
147
Les marchés du carbone forestier
Etude de cas n°1
Déforestation évitée de la Réserve de Juma
Crédits carbone générés 3,6 MtéqCO2 d’ici 2016, 189 MtéqCO2 crédits d’ici 2050
148
Initié par la Fundação Amazonas Sustentável (FAS) en partenariat avec le Secrétaire
d’Etat de l’Environnement et de Développement Durable, le projet REDD de Juma a
permis la création d’une aire protégée de 589 612 ha. La Réserve de Juma est située
dans la municipalité de Novo Aripuana au Sud Est de l’Etat d’Amazonas, au Brésil,
reconnue pour ses fortes menaces de déforestation. Sa création et sa mise en œuvre
effective n’ont été possibles que grâce au mécanisme de paiements pour services
environnementaux introduit par le gouvernement de l’état d’Amazonas. En partenariat
financier avec Marriott International, ce programme, appelé Bolsa Floresta, permet
de générer des compensations financières pour les populations engagées dans une
démarche de réduction des émissions dues à la déforestation. Les actions menées
dans la zone de projet se sont toutes appuyées sur des consultations publiques de
manière participative. Les communautés locales ont ainsi été mobilisées tout au long
du projet. A terme, ce sont 189 767 027 crédits carbone qui seront générés dans la
réserve de Juma. Ces revenus vont ainsi permettre d’auto-entretenir la dynamique de
déforestation évitée via le programme Bolsa Floresta. Le gouvernement a quant à lui
appuyé un système de suivi des émissions évitées et le renforcement des lois. Il faut
aussi noter que le projet entraîne des co-bénéfices importants vis-à-vis, notamment,
de la lutte contre la pauvreté et de la conservation de la biodiversité.
Economie du projet
Ces revenus carbone sont réinvestis pour financer le programme Bolsa Foresta qui
prévoit quatre lignes de revenus pour les familles des communautés locales qui
respectent les engagements : Bolsa Floresta Family (BFF) : 300 US$ /famille/an pour
les mère de famille ; Bolsa Floresta Association (BFA) : 175 US$/famille/an pour le
renforcement des organisations ; Bolsa Floresta Social (BFS) : 175 US$/famille/an
pour améliorer la qualité de vie des communautés ; Bolsa Floresta Income (BFI) : de
175 US$/famille/an pour les production durables.
149
Les marchés du carbone forestier
Coûts du projet : 25 MUS$
Activité : programme
1% Bolsa Forestal
9%
Activité : renforcement des
30% capacités
15%
Activité : gestion des aires
protégées
Frais de gestion
Frais carbone
19%
Faisabilité
26%
Les activités mises en place et les coûts du projet sont les suivants
◆◆ Gestion des aires protégées et renforcement des lois : 4,7 MUS$ (19,2%) ;
Financement du projet
Via la fondation FAS, la préparation du projet a été intégralement financée par Marriott
International qui garantit le financement des 4 premières années du projet (2 MUS$).
Marriott International propose à ses clients de compenser leurs séjours (1 $ / jour
soit 32 $ / tCO2). L’intégralité de ce financement est reversée au projet.
150
Etude de cas n°1
Vente des crédits carbone
Tous les crédits carbone générés par le projet REDD de la Réserve de Juma
appartiennent à la FAS. Ces crédits sont ensuite vendus aux clients des hôtels Marriott
qui souhaitent compenser leur séjour. Marriott s’est ainsi engagé à leur offrir le volume
total de crédits validé pour la première période de référence (2006-2016). Toutes les
recettes sont ensuite réinvesties dans la réserve de Juma via le programme de Bolsa
Floresta.
Marriott Internationale
Financeur
Clients hôtels Marriott
Acheteurs de crédits
Gouvernement
dʼAmazonas
Appui Fundação Amazonas Sustaentável
instituitionnel
Bradesco Développeur/Financeur/
Bank propriétaire crédit carbone/ IDESAM
Expertise carbone
Expertise carbone
Coca -Cola
Brésil
Communautés locales
Bénéficiaire
« Les investisseurs doivent collaborer étroitement avec les promoteurs du projet, afin
d’assurer que le projet est conçu et mis en œuvre en vertu d’une norme internationale
solide et fiable, qui sont capables de garantir que les crédits sont mesurables,
vérifiables et peuvent être contrôlés. Aussi, il est très important que les crédits
carbone génèrent aussi des bénéfices pour la population de la coopération locale et la
biodiversité. »
151
Les marchés du carbone forestier
Etude de cas n°2
Corridor Ankeniheny-Zahamena à MADAGASCAR : volet AR
Crédits carbone générés 280 000 tCO2 en 30 ans (sur 591 ha), soit 9 333 tCO2/an
Méthodologie AR-AMS0001
Standard MDP
Coûts d’investissement 1 600 300 US$
(CAPEX)
Coûts d’opération (OPEX) 750 000 US$ (sur 5 ans)
Revenus carbone ERPA signé avec le BioCF sur 200 000 tCO2
Revenus hors carbone Soutien à l’agriculture
TRI projet, inflation, Le projet est entièrement financé par donation et subvention. La
actualisation, financement plupart des revenus seront au bénéfice des communautés locales
152
Initié officiellement par le Ministère de l’Environnement et des Forêts, le projet vise
des activités de restauration écologique reliant des massifs forestiers fragmentés à
haute biodiversité dans l’Est du pays. Conservation International offre son expérience
de plus de 10 ans dans la région pour conduire le projet. Le corridor Ankeniheny-
Zahamena où prennent place les activités du projet, a été choisi pour sa richesse en
biodiversité, son niveau élevé d’endémicité, et son état fragmenté pouvant menacer
à terme la viabilité de sa biodiversité. Le projet prévoit le reboisement de plusieurs
milliers d’hectares avec plus de 120 essences autochtones dans des terrains privés
et publiques, éligibles ou non au MDP. La mise en œuvre du projet est faite en
partenariat avec différentes ONG locales (dont l’Association Nationale d’Actions
Environnementales et sept autres ONGs actives dans l’aire du projet), les organes
gouvernementaux régionaux et centraux. Les activités de plantations sont financées
par le Programme Environnemental III de la Banque mondiale. En 2009, 975 ha de
travaux de plantation ont été effectués. 591 ha éligibles au MDP généreront une
séquestration de 55 000 tonnes de CO2 jusqu’ à 2017 et plus de 280 000 tonnes
de CO2 en 30 ans. Les revenus carbone seront administrés par le Ministère de
l’Environnement et Forêts et distribués aux propriétaires de terrain participant dans
l’initiative. Les participants bénéficieront aussi des activités d’appui à l’adoption de
nouvelles pratiques agricoles (dont la plantation sous couvert végétale) financées par
CI et mises en place par l’ANAE.
Economie du projet
153
Les marchés du carbone forestier
Coûts du projet : 1,8 MUS$
11%
8% Activité : plantation
Frais carbone
34%
La répartition de revenu est encore en discussion, mais la plupart des revenus doivent
revenir aux participants dans les activités de plantation.
Financement du projet
154
Etude de cas n°2
Le mécanisme de décaissement du fond MDP se fera par des accords entre le
gouvernement et les propriétaires fonciers. Un Protocole d’Accord entre les parties
sera ainsi signé. Le schéma est encore en discussion.
MEEFT
UC FB
Autres Partenaires Unité de Coordination Acheteurs d’URE autres
Projets de du Fonds Biocarbone que BioCF
Développement, etc.
A NAE
Prestataires de service, Gestionnaire Conservation
ou assimil és International
Travaux et/ou études Projet Assistan ce Techn ique
Propriétaires et/ou
usufruitiers des terrains
155
Les marchés du carbone forestier
Etude de cas n°3
Corridor Ankeniheny-Zahamena à Madagascar : volet REDD
Fiche d’identité du projet
Pays Madagascar
Technologie REDD, déforestation mosaïque
Surface et essences 376 000 ha de forêt de l’Est sur 3 régions (Atsinanana,
Analanjirofo, Alaotra Mangoro)
Statut d’avancement PDD en cours, plan de gestion de l’aire protégé complet, étude
social et environnementale en préparation
Date de démarrage du projet 2005 : activités de mise en place de la Nouvelle Aire Protégée et
statut de protection temporaire
Développeur du projet Ministère de l’environnement des eaux et forêts, avec l’appui
technique de Conservation International
Réalisation de l’expertise Conservation International, avec l’appui technique du BioCF et de
carbone (PDD, etc.) Winrock
Financeurs Conservation International, USAID (Projet Miaro)
Crédits carbone générés En préparation. Estimations initiales montrent un potentiel de 45
millions tCO2 sur 30 ans
Période de comptabilisation 30 ans : 2009 – 2038
Méthodologie Méthodologie de déforestation mosaïque, développée par le BioCF,
est en cours de validation à travers le standard VCS
Standard VCS et CCBS
CAPEX 2,3 MUS$ (depuis 2004)
OPEX 10,5 MUS$ sur 5 ans (2010-2014)
Revenus carbone Achat de 430 000 VCU par le BioCF
Revenus hors carbone Nombreux co-bénéfices
TRI projet, inflation, Le projet est financé, par des donations, des subventions, et la
actualisation, financement vente des crédits
156
Initié officiellement par le Ministère de l’Environnement et des Forêts, l’objectif du
projet est de réduire la déforestation dans une surface totale d’environ 376 000
hectares qui forme le Corridor Ankeniheny – Zahamena (CAZ) à travers la promotion
d’activités alternatives à la déforestation et l’appui à la gestion décentralisée des
ressources naturelles. Le Corridor est découpé en 2 zones fonctionnelles i) une Aire
Protégée de type VI selon IUCN (International Union for Conservation of Nature)
ou Réserve de ressources naturelles d’environ 371 000 ha, prioritaire pour la
conservation des richesses naturelles, dont le statut de protection temporaire a été
issu par le Gouvernement malgache en décembre 2005 ; ii) une réservée à l’usage par
les 20 communautés présentes dans l’Aire Protégée. Actuellement dans ce corridor,
plusieurs acteurs entrent en jeu dans l’établissement de cette Aire protégée, dont :
(1) les Directions Régionales de l’Environnement et Forêts (DREFTs) qui jouent le
rôle provisoire de gestionnaire du Corridor (2) Conservation International qui fournit
des appuis techniques et financiers dans le processus de création de l’aire protégée,
la mise en place et l’opérationnalisation de la structure de gestion. Ces appuis sont
palpables à travers l’organisation des campagnes de sensibilisation, les consultations
publiques et la délimitation concertée de l’Aire Protégée, la préparation du plan
d’aménagement et de gestion, le renforcement des capacités et l’appui aux associations
communautaires impliqués dans la gestion et la mise en œuvre des activités alternatives.
Economie du projet
157
Les marchés du carbone forestier
Les revenus directement imputables aux activités de conservation sont issus de la
production de crédit carbone. Des co-bénéfices importants vont aussi être dégagés
des activités d’écotourisme, de micro projets et en matière de santé grâce notamment
aux activités d’accompagnements.
Financement du projet
Les coûts d’OPEX doivent être couverts par la vente des crédits carbone.
158
Etude de cas n°3
USAID , CI
Appui financier
Minist ère
de l’Environnemen t :
Développeur du projet
Ac t eurs locaux de
l’Aire Pr o t égé e
La propriété des crédits carbone est encore en discussion. Le BioCF a signé un contrat
avec le Ministère de l’Environnement et Forêt malgache pour l’achat de 430,000
tCO2 (VCU).
Afin de faciliter la vente des crédits, une vérification selon le standard VCS et CCBs a
été choisie.
« Le projet de réduction d’émissions de la déforestation du CAZ est l’un des premiers
projets de ce type en Afrique. Son importance réside dans le fait que sa potentialité
de réplication est énorme au niveau national, mais sert aussi de projet pilote sur
le potentiel de la recette carbone qui pourra aider en tant que mécanisme de
financement durable la gestion des aires protégées à Madagascar. »
159
Les marchés du carbone forestier
Etude de cas n°4
Reboisement Commercial du Magdalena Bajo
Fiche d’identité du projet
Pays Colombie
Technologie A/R, reboisement à vocation commerciale
Surface et essences 5000 ha (dont 4000 ha déjà replantés) de Mélina, Teck et Ceiba
Roja
Statut d’avancement Phase opérationnelle, méthodologie déviée pour le projet (AR-AM
0007), PDD réalisé. Validation MDP en cours, monitoring en cours
Date de démarrage du projet 2000
Développeur du projet Cormagdalena
Réalisation de l’expertise ONF International
carbone (PDD, etc.)
Financeurs Cormagdalena, Finagro, Faber Castell, Carbon positive, ONF
International, propriétaires fonciers
Crédits carbone générés 100 000 tCO2/an et 3 000 000 tCO2 (total)
Période de comptabilisation 30 ans : 2000 – 2029
Méthodologie AR-AM 0007 V3 (grande échelle)
Standards MDP, VCS
Coûts d’investissement 10 M€
(CAPEX)
Coûts d’opération (OPEX) 55% du coût total soit 5,5 M€
160
Le Projet de Reboisement Commercial (PRC) du Magdalena Bajo, a comme objectifs
la protection des sols contre l’érosion et la production de bois d’œuvre de qualité. Il
a été mis en œuvre à l’initiative de l’institution colombienne Cormagdalena, chargée
de la navigation sur le principal fleuve de Colombie, le Magdalena. Initié en 2000,
ce programme s’étend actuellement sur 4 000 hectares et utilise principalement les
espèces suivantes : Teck, Melina et Ceiba. 1 000 ha de plus sont prévus dans les
années à venir. Les reboisement sont réalisés sur des terrains privés appartenant à des
éleveurs de la Côte Atlantique, y compris de petits propriétaires – et sont financés au
travers de contrats en participations établis entre les propriétaires, des investisseurs
publics colombiens : Cormagdalena et la Banque colombienne Finagro, des
investisseurs privés étrangers : Carbon Positive, Faber-Castell et l’ONF International.
L’ONFI assure un appui technique et réalise le montage et le suivi carbone du projet.
Economie du projet
◆◆ Les revenus liés aux produits bois forestiers sont essentiels. Ils représentent
environ 88% des revenus globaux du projet. Le calcul se base sur des prix de bois
par espèce et par classe de diamètres, sur le marché local (2 et 3 éclaircies) et
ème ème
◆◆ Les revenus liés à la vente des crédits carbone représentent environ 12% des
revenus globaux du projet, sur la base d’un prix de vente de 3 € / tCER. Le revenu
carbone bien que très inférieur aux revenus bois améliore cependant le cash flow
du projet en démarrant plus tôt.
161
Les marchés du carbone forestier
Revenus du projet
Coûts du projet : 15 M€
12%
4% Activité : plantation
Frais carbone
18%
88%
Financement du projet
Les investisseurs ont d’abord été publics (CORMAGDALENA puis FINAGRO) pour
lancer le projet entre 2000 et 2006. Ils assurent le maintien des plantations qu’ils
ont mis en place jusqu’à la coupe finale. A partir de 2008, des investisseurs privés
(Carbon Positive puis Faber Castell) se sont substitués progressivement à eux pour
accroître les surfaces plantées avec de nouveaux propriétaires de la même zone, sans
toutefois changer les règles de répartitions établies.
162
Etude de cas n°4
ONF International qui appuie le projet depuis le départ (montage technique,
organisationnel, financier, carbone) finance sur fonds propre la totalité des coûts liés à
la composante carbone du projet en échange de 35% des crédits.
La propriété des crédits carbone se répartie entre les propriétaires fonciers et les
financeurs du projet au même titre que les produits bois, en retranchant cependant la
part qui revient à ONFI.
« Le volet carbone ne doit être qu’une composante du projet global. Le projet doit
être solide et rentable en lui-même, les crédits carbone venant conforter cette
rentabilité plus qu’ils ne la permettent. Il faut donc s’assurer du financement, de la
qualité des opérateurs technique, du suivi… au même titre que pour un projet normal.
La composante carbone a cependant permis au projet d’atteindre l’envergure qu’il a en
incitant de nouveaux investisseurs à s’associer à Cormagdalena. L’image du projet a été
fortement améliorée par cette composante ».
163
Les marchés du carbone forestier
Etude de cas n°5
Boisement sur les plateaux Batéké – Ibi Batéké
164
Le projet de boisement « Ibi Batéké » a comme objectifs de restaurer des terrains
dégradés par les feux de brousse à travers des plantations agro-forestières et
forestières à vocation de bois de feu et de bois d’œuvre. Outre la production de
manioc, de charbon de bois, de bois de service, et à terme, de bois d’œuvre, à
destination des 8 à 10 millions d’habitants du bassin d’approvisionnement de la ville
de Kinshasa, le projet doit permettre de contribuer à la réduction de la déforestation
et de la dégradation des forêts du pays. Localement, il assure l’emploi de plus de
400 personnes pour la mise en œuvre des travaux de plantation et la valorisation des
produits agricoles. Il a été initié et est réalisé par la société congolaise Novacel qui
dispose de la maîtrise foncière. Celle-ci s’investit depuis le milieu des années 1980
dans la zone dite « Ibi Village » à travers des activités agro-forestières, d’éducation
et de sensibilisation auprès des habitants. Après des premiers essais agro-forestiers
débutés en 2001, le projet est entré dans sa phase opérationnelle au cours de l’année
2008. A l’heure actuelle, plus de 750 ha d’Acacia sont déjà plantés. Le projet est le
fruit d’un partenariat entre Novacel, Umicore, Suez-Tractebel, appuyé par l’expertise
technique de l’ONF International. Novacel a conclu deux contrats de vente des crédits
carbone, l’un avec Orbéo et l’autre avec le BioCF de la Banque Mondiale.
Economie du projet
◆◆ Les revenus liés à la production de bois de feu représentent 10% des revenus
globaux du projet (0,30 M€) ;
◆◆ Les revenus liés à la production de manioc représentent 35% des revenus globaux
du projet (1 M€) ;
◆◆ Les revenus liés à la vente des crédits carbone représentent 50% des revenus
globaux du projet (1,5 M€) ;
165
Les marchés du carbone forestier
Coûts du projet Revenus du projet
4% 3% 5%
10%
Financement du projet
◆◆ Umicore et Suez interviennent à hauteur de 35% au travers d’un prêt à long terme
à taux préférentiel accompagné d’une période de grâce de 5 ans ;
◆◆ Deux bailleurs privés interviennent à hauteur de 35% au travers d’un prêt à long
terme assorti d’une période de grâce de 5 ans ;
166
Etude de cas n°5
◆◆ Profinaf Invest a ouvert une ligne de crédit qui représente 25% du financement à
taux réduit avec une option de conversion en capital.
La propriété des crédits carbone est reconnue à Novacel. Le BioCarbon Fund et Orbéo
sont également participants du projet et recevront respectivement 500 000 tCER
chacun d’ici 2017. Les contrats d’achat/vente des crédits carbone du projet (CAREV)
ont été signés dans le 1 semestre 2009 avec Novacel et portent sur les tCER générés
er
Pour la validation du projet, le standard MDP a été posé comme conditions par le
BioCarbon Fund. Par ailleurs, une certification VCS est également envisagée pour
faciliter la vente des crédits par les acheteurs (Orbéo).
167
Les marchés du carbone forestier
Glossaire
168
Glossaire
Sigle Français Sigle Anglais
Forest Carbon Partnership
FCPF
Facility
Fonds Français pour French Global Environmental
FFEM
l’Environnement Mondial Fund
169
Les marchés du carbone forestier
Sigle Français Sigle Anglais
Réduction des Emissions dues à la Reduced Emission from
REDD REDD
Déforestation et la Dégradation Deforestation and Degradation
Regional Greenhouse Gas
RGGI
Initiative
Système Communautaire European Emissions Trading
SCEQE EU – ETS
d’Echange de Quotas d’Emissions Scheme
Suivi des réductions d’émissions Monitoring
téqCO2 Tonne équivalent CO2 teqCO2 Tonne equivalent CO2
TRI Taux de Rentabilité Interne IRR Investment Return Rate
Unité de Réduction Certifiée Temporary Certified Emission
tURCE tCER
temporaires Reduction
UA Unité d’Absorption RMU Removal Unit
UQA Unité de Quantité Attribuée AAU Assigned Amount Unit
Unité de Réduction Certifiée des
URCE CER Certified Emission Reduction
Emissions
URE Unité de Réduction des Emissions ERU Emission Reduction Unit
Agriculture, Forestry and Other
Utilisation des Terres,
Land Uses (previously LULUCF
UTCF Changement d’usage des sols et AFOLU
: Land Use, Land Use Change
Foresterie
and Forestry)
VAN Valeur Actualisée Net NPV Net Present Value
Unité de Réduction des Emissions Voluntary / Verified Emission
VER
Volontaire / Vérifiée Reduction
VCS Voluntary Carbon Standard
170
Glossaire
171
Les marchés du carbone forestier
172