(Warren Buffett) Leçons Pour Gagner
(Warren Buffett) Leçons Pour Gagner
(Warren Buffett) Leçons Pour Gagner
James Pardoe est avocat et fait partie depuis de très nombreuses années du cercle
restreint des familiers de Warren Buffett dont il s’est particulièrement intéressé à
« décoder » les stratégies d’investissement.
infos/nouveautés/catalogue : www.maxima.fr
Titre original : How Buffett Does It, 24 simple Investing Stra-tegies from The World’s Greatest Value Investor.
Traduit de l’anglais (américain) par Anna-Clercq-Roques © MMV by The McGraw-Hill Companies, Inc. All rights
reserved.
Nous sommes nombreux à avoir souffert des aléas du marché, et nous éprouvons une
certaine défiance lorsqu’il s’agit de placer en Bourse notre argent chèrement gagné.
Beaucoup d’entre nous l’ont appris à leurs dépens : qu’il se soit agi d’un tuyau « en or »
confié par un ami, des conseils d’un courtier ou de l’effritement d’une valeur
technologique, la leçon est toujours la même : les astuces pour s’enrichir « à vitesse
grand V » ne sont que des recettes pour s’appauvrir encore plus rapidement.
Si vous êtes un investisseur échaudé – que ce soit à cause des courtiers, d’un krach
soudain, d’un accès de faiblesse des OPCVM, d’une pratique hasardeuse du « day
trading »1, des aléas du « market timing »2, des actions cotées en centimes d’euro, des
opérations à terme, des entreprises de haute technologie ou des valeurs de forte
croissance – le temps est venu pour vous d’étudier la philosophie et l’approche de
l’investissement incarnées par Warren Buffett.
Étudier Warren Buffett vous dotera d’une méthode qui a fait ses preuves pour s’enrichir
lentement grâce aux placements en Bourse. Buffett a su « transformer le gland en
chêne » moyennant des pratiques d’investissement intelligentes. Vous aussi, vous pouvez
devenir un investisseur intelligent et gagner en Bourse sur le long terme, à condition de
suivre ses concepts fondamentaux et d’adopter sa discipline, sa patience et son
tempérament.
Warren Buffett n’a pas hérité un centime de ses parents. Aujourd’hui, à travers ses
propres investissements exclusivement, il « pèse » quelque 30 milliards d’euros à lui
tout seul. Cependant, qu’il s’agisse d’Harvard, sur la côte est, ou de Stanford, sur la
côte ouest, Buffett ne figure que rarement au programme des grandes écoles de gestion.
En d’autres termes, le plus grand investisseur de tous les temps est en général ignoré
par les milieux universitaires.
2. La patience.
3. Le tempérament adéquat.
4. La pensée indépendante.
10. L’opportunisme énergique qui se traduit par une capacité à saisir les bonnes
occasions d’investissement qu’offre ponctuellement l’irrationalité des marchés.
Il a tracé une voie simple de réussite pour investir en Bourse. Toute personne dotée
d’une intelligence moyenne est tout à fait capable d’investir dans les bonnes valeurs,
sans l’assistance d’un professionnel, car les fondamentaux d’un investissement
intelligent sont faciles à comprendre.
Buffett n’investit que dans des entreprises dont on comprend facilement ce qu’elles font,
des sociétés solides et durables, dont la réussite s’explique simplement. Il n’accepte
jamais de placer son argent dans quelque activité complexe qui échapperait à sa
compréhension.
En fait, dit Buffett, la complexité peut vite se révéler être un cadeau empoisonné. Ne
risquez pas l’épuisement en essayant de décoder les dernières théories en matière
d’investissement, telles que l’évaluation des options ou le calcul des bêtas. Dans la
plupart des cas, votre ignorance de ces systèmes de pointe vous confère un avantage.
Une leçon essentielle, que Buffett a apprise grâce à son mentor, Benjamin Graham, est
que vous n’avez pas à accomplir « des choses extraordinaires pour obtenir des résultats
extraordinaires ».
Visez la simplicité. Votre objectif doit être le suivant : acheter les titres d’une excellente
entreprise, gérée par des personnes honnêtes et capables ; les payer à un prix inférieur à
ce que qu’ils valent réellement en termes de potentiel de gains futurs ; puis, conserver
ces titres et attendre que le marché confirme la pertinence de votre choix.
Si vous ne comprenez pas l’activité d’une entreprise, évitez d’y placer votre
argent.
Buffett a fait de Berkshire Hathaway une entreprise qui vaut aujourd’hui plus de
100 milliards de dollars en s’appuyant sur ce simple principe de conduite. Lorsqu’il
investit en Bourse, il place son argent dans des entreprises dont l’activité est facile à
comprendre, solides, présentant des perspectives fortes et durables et ayant mis en
place une direction compétente et éthique. Il achète un grand nombre d’actions lorsque
le marché les vend au rabais. Voilà, en quelques phrases, l’explication de sa réussite.
Voici trois principes sur lesquels fonder toutes vos décisions d’investissement :
Prenez vos décisions d’investissement par vous-même. Soyez votre propre conseiller
en investissements. Méfiez-vous des courtiers et autres vendeurs qui chercheront à vous
forcer la main afin que vous achetiez tel ou tel titre, ou encore des parts d’OPCVM,
dans l’unique but de faire monter leurs commissions. À l’évidence, ces personnes ne
sont pas animées par la recherche de votre propre intérêt.
Étudiez l’homme sous la direction duquel Buffett a étudié. L’homme qui a le plus
influencé Buffett, en dehors d’Howard, son père, est Benjamin Graham, le père de
l’investissement en actions, et celui qui a montré à Buffett, voici quelques décennies,
que les placements ne fructifiaient pas obligatoirement grâce à leur complexité. Ayez la
bonne idée de lire ce que cet homme a à dire.
▶ N’oubliez pas que les stratégies simples de Buffett ont produit des résultats
extraordinaires.
1 Sélection de quelques actions destinées à figurer sur les listes d’achat et de vente des brokers. L’objectif est l’obten-
tion de listes dont la performance dépasserait largement celle du marché.
tout autre professionnel. Il va même plus loin. Dans l’ensemble, croit-il, ces soi-disant
« experts » n’apportent rien de plus. Quelles que soient leurs prétendues compétences,
vous pourrez toujours faire bien mieux par vous-même.
Peut-être est-ce difficile pour vous de croire que les experts, que vous connaissez à
travers les médias, n’apportent pas réellement de valeur. Si cela est votre cas,
réfléchissez à la façon dont ces professionnels gagnent leur vie et aux motivations
financières à l’origine de leur comportement. Les spécialistes financiers sont souvent
des vendeurs dont les marchandises sont les produits d’investissement à partir desquels
ils tirent un bénéfice. Le revenu d’un courtier sera souvent basé sur son volume
d’activité, c’est-à-dire sur les commissions réalisées pour l’achat et la vente de titres.
Logiquement, par conséquent, les courtiers ne gagnent habituellement rien du tout à voir
leurs clients conserver leurs titres indéfiniment, ce qui est la caractéristique principale
de l’approche prônée par Warren Buffett. Le volume d’activité est souvent la
préoccupation majeure des courtiers qui sont rémunérés sur la base du nombre
d’opérations effectuées par les investisseurs. Que ces opérations s’avèrent fructueuses
ou désastreuses ne change rien à l’affaire.
Pour être juste, il faut admettre que la plupart des spécialistes financiers croient en toute
bonne foi à l’intérêt des formules et des techniques spécifiques qu’ils ont réussi à
maîtriser après de longues années d’efforts soutenus. Malheureusement, ils sont encore
nombreux à tout ignorer de ce que signifie « investir dans une valeur », une technique
dont les pionniers ont été, il y a un demi-siècle, Benjamin Graham et Dave Dodd, et que
Warren Buffett a adopté il y a près de quarante ans. Cette technique du value investing
consiste principalement à déceler les écarts entre le cours d’une action constaté sur le
marché boursier et sa valeur réelle. En langage imagé, il s’agit de chercher des billets
d’un dollar en vente à 40 cents.
Mon conseil – tiré des succès du modèle Buffett – est que vous devriez adopter le value
investing. Vous pouvez d’ores et déjà être certain que les « commandements » de
Buffett sont tout ce dont vous aurez besoin pour agir de façon autonome. Ils
Cela signifie que vous allez devoir faire preuve d’un état d’esprit approprié lorsque
vous devrez affronter les mauvaises nouvelles et les déconvenues qui affecteront
inévitablement votre portefeuille de titres. Il faut de la rigueur et du sang-froid quand
tout va mal. Mais faire preuve du bon état d’esprit signifie également savoir garder la
tête sur les épaules dans la situation contraire, c’est-à-dire lorsque le marché est
haussier et que, tout autour de vous, les gens sont euphoriques et avides.
C’est sur votre tempérament que vous pourrez compter lorsque tout ne sera pas au beau
fixe pour vous. Que ferez-vous lorsque vous serez confronté à un brusque effondrement
du cours d’un titre que vous possédez ? Cédant à la panique, vendrez-vous vos titres ?
Que ferez-vous face à un événement politique ou macro-économique majeur tel qu’une
guerre, une récession, ou la brusque chute de tel ou tel indice boursier ?
Que déciderez-vous si l’entreprise dans laquelle vous avez investi affiche de mauvais
résultats trimestriels ou publie un piètre bilan annuel ? Garderez-vous l’œil rivé sur les
cours de l’action ou, au contraire, resterez-vous concentré sur les fondamentaux et les
résultats à long terme de cette société ? Comment réagirez-vous lorsque tel ou tel expert
dépeindra un avenir sombre pour vos titres ou pour la Bourse en général ?
Vos réactions et vos réponses à ces situations joueront un rôle essentiel dans le succès
de vos investissements. L’investisseur sage garde son calme face aux événements
négatifs. Êtes-vous prêt à « sous-vendre » vos actions en cas de chute des cours ou, au
contraire, à tirer parti d’une opportunité potentielle afin d’acheter davantage de titres
« à prix sacrifiés » ?
Buffett utilise un repère précis que vous devriez appliquer à votre propre cas. Si vous
êtes du genre à paniquer lorsque l’un des titres de votre portefeuille perd la moitié de
sa valeur du jour au lendemain, évitez d’investir en Bourse. Pour réussir sur ce marché,
vous devez non seulement être capable d’investir dans d’excellentes entreprises, mais
également disposer de la confiance nécessaire pour ne pas lâcher ces dernières au
moment où tout le monde leur tourne le dos. Lorsqu’il y a de la tension dans l’air,
affirme Buffett, il n’est pratiquement jamais pertinent de vendre les titres d’une
entreprise de qualité.
Dans un contexte comme celui-ci, qu’est-ce que l’approche Buffett ? Cela signifie se
montrer capable d’identifier une opportunité d’achat dans la chute de 50 % du cours
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d’une action. Cela signifie garder l’œil rivé sur les fondamentaux des entreprises dans
lesquelles vous avez investi plutôt que de vous polariser sur les soubresauts d’un
marché inconstant. Si les investisseurs avaient prêté attention à ces conseils, et « acheté
du Berkshire » au moment où le cours de l’action venait de perdre la moitié de sa
valeur, ils en auraient été généreusement récompensés. En effet, l’action allait connaître
un fort rebond en 2004 et atteindre le cours record de 97 000 dollars !
Bien sûr, on peut facilement perdre la tête lorsque le marché affiche des soubresauts
violents. Et il est encore plus dur de garder son calme lorsque les cours s’effondrent et
que les experts comme les journalistes rivalisent de pessimisme. Dans ce contexte, le
plus simple est tout naturellement de céder à la panique. Ne tombez pas dans ce piège.
Si vous détenez des titres d’une très bonne entreprise, gardez-les. Et si quelqu’un vous
propose d’en acheter davantage à un prix vraiment intéressant, faites-le !
À l’âge de 22 ans, Buffett avait accumulé quelque 350 actions de GEICO Insurance
pour une valeur totale d’environ 15 000 dollars. À ce moment-là, il décida de les
vendre. S’il les avait conservées, son capital une vingtaine d’années plus tard, aurait été
d’1,3 million de dollars. À travers cette expérience et d’autres encore, Buffett apprit, à
ses propres dépens, ce qu’il en coûtait de vendre les actions que l’on détient d’une
société qu’il avait pourtant identifiée comme une affaire magnifique. Il rachèterait cette
erreur plus tard, en investissant massivement dans GEICO en 1976, puis en rachetant la
totalité du capital de l’entreprise en 1996.
Voici trois conseils qui vous aideront dans les bonnes comme dans les mauvaises
situations :
« Connais-toi toi-même ». N’achetez pas un titre si vous ne supportez pas l’idée qu’il
puisse perdre la moitié de sa valeur. Cela signifie que vous devez avoir la patience et la
discipline nécessaires pour conserver les titres des entreprises qui affichent des
fondamentaux et une gestion solides.
Ne prenez pas une décision d’investissement parce que d’autres vous ont encouragé à
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le faire. Faites la sourde oreille face aux conseils boursiers « infaillibles », aux
« experts » médiatiques, et à d’autres qui ont un intérêt particulier à vous voir acheter
certains titres. Menez votre enquête et réfléchissez seul.
lors qu’il n’avait que onze ans, Warren Buffett achetait ses premières actions :
A trois titres de Cities Service Preferred au prix de 38 dollars l’une. Peu de temps
après, il revendait ses trois actions alors que leur cours atteignit 40 dollars,
réalisant un bénéfice net de cinq dollars. Quelques années plus tard, ces mêmes titres
s’échangeaient au prix de 200 dollars l’action. C’est ainsi que Buffett apprit très tôt que
la patience de l’investisseur était une nécessité.
Buffett ne spécule pas sur une séance mais plutôt sur une décennie. Son approche est
fondée sur la patience et une vision à long terme. Il pratique une méthode qui a fait ses
preuves pour devenir riche lentement.
Les spéculateurs « à la séance », ceux que l’on appelle les day traders ont l’habitude
de se débarrasser de leurs titres après quelques semaines ou même quelques jours.
Buffett, lui, conserve ses titres pendant des années voire des décennies. Il a décrit la
Bourse comme une « structure de réaffectation » : un moyen grâce auquel l’argent passe
des mains des impatients à celles des gens qui ont de la patience. Quelle est la stratégie
la plus avisée ? Pensez-y un instant : combien de spéculateurs à court terme ont réussi à
transformer 10 millions de dollars en 1 milliard, comme l’a fait Warren Buffett ?
Charlie Munger, associé depuis de longues années à Buffett depuis, partage son point de
vue en ce qui concerne la patience, mais il l’exprime de manière plus succincte :
« L’investissement consiste d’abord à trouver quelques sociétés de qualité et ensuite à
pratiquer la position assise. » Il ajoute : « Un investisseur qui manifeste une trop grande
agitation fait fausse route. La patience fait partie du jeu. »
Voici un petit exercice mental recommandé par Buffett : imaginez, lorsque vous achetez
des titres, que les marchés fermeront dès le lendemain pour cinq ans. Buffett affirme que
cette situation ne serait pas un obstacle pour lui car il n’achète presque jamais des titres
avec l’intention de les revendre rapidement. Il est déterminé à gagner de l’argent grâce
à une entreprise plutôt que grâce à la Bourse. Cette dernière sert uniquement
d’intermédiaire dans le cadre de vos efforts pour dégager des plus value. Vous pouvez
imaginer d’autres contraintes que vous pourriez vous imposer pour vous aider à adopter
cette discipline de patience.
Bien entendu, il n’est pas facile de faire preuve de patience, mais il s’agit d’une
composante cruciale du tempérament approprié au value investing. Lorsque vous
investissez, considérez-vous comme un résident permanent et non comme quelqu’un de
passage. Un urbaniste français avait été averti que les arbres qu’il souhaitait planter le
long des grands boulevards parisiens n’arriveraient à maturité que 80 ans plus tard et ne
donneraient pas avant toute l’ombre qu’il en attendait. Voici sa réaction : « Dans ce cas,
nous devons planter ces arbres immédiatement ! » C’est à cet état d’esprit que fait
référence Warren Buffett lorsqu’il remarque que si nous pouvons nous asseoir à l’ombre
aujourd’hui, c’est bien parce que quelqu’un a planté un arbre il y a de cela de
nombreuses années.
Il faut du temps pour qu’un gland devienne chêne. Il y a quelque 25 familles à Omaha,
dans le Nebraska, qui ont conservé leurs actions Berkshire pendant plus de 35 ans, et
leurs parts valent aujourd’hui plus de 100 millions pour un investissement de départ qui
représentait tout au plus 50 000 dollars.
Buffett s’inscrit donc à contre-courant des tendances éphémères, aussi bien en tant
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qu’investisseur que comme responsable d’une entreprise importante. En ce qui concerne
les actionnaires de Berkshire Hathaway, il souhaite des gens personnellement impliqués
dans l’avenir de cette société. Voici le langage qu’il leur tient : ne considérez pas vos
actions comme un simple morceau de papier dont la valeur fluctuerait à chaque instant –
même si, de fait, cette valeur fluctue effectivement tous les jours. Au lieu de cela,
pensez à votre pourcentage d’actions comme s’il s’agissait d’un bien immobilier dont
vous auriez fait l’acquisition en commun avec d’autres membres de votre famille.
Mettriez-vous en vente la maison ou l’appartement de la famille à la première
perturbation externe mineure ? Bien sûr que non. Eh bien, poursuit Buffett, pensez aux
titres que vous détenez de la même manière.
Buffett détient un gros bloc d’actions Berkshire Hathaway depuis plus de 40 ans. Il n’en
a jamais revendu une seule. Il a vécu tous les événements dramatiques de la Bourse, du
fameux « lundi noir » au dépassement de la barrière psychologique des 11 000 points
par le Dow Jones, et cela sans jamais perdre la tête. Il n’est pas animé par un esprit de
contradiction. Il ne s’agit pas simplement d’acheter lorsque les autres vendent et de
vendre lorsque les autres achètent. Il s’agit en revanche de la détermination à garder la
tête froide. Ne cédez pas, comme les autres, à l’« exubérance irrationnelle » (pour
reprendre la célèbre phrase d’Alan Greenspan). Et ne vous laissez pas emporter non
plus par les sirènes de la désolation. En prenant du recul, vous verrez que le ciel n’est
pas près de vous tomber sur la tête.
En d’autres termes, il s’agit d’avoir une vue d’ensemble plutôt que de s’embarrasser
d’une quantité de détails techniques. L’une des raisons pour lesquelles Buffett a été
capable de transformer son investissement de 10 millions de dollars dans le
Washington Post en un actif valant 1 milliard de dollars, c’est qu’il a conservé les
titres contre vents et marées. Juste après son acquisition, en 1973, le cours de l’action
du Washington Post a chuté de 50 %, et l’effondrement allait se poursuivre pendant
deux ans encore. Buffett a refusé de se débarrasser de la moindre action. Dans sa tête, il
avait une vue d’ensemble.
Au cours des années qui suivirent, le Washington Post traversa une période de grande
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adversité, allant de la grève de son personnel à son rôle dans le scandale du Watergate,
en passant par les récessions, la guerre, et le krach boursier du 19 octobre 1987 – le
fameux « lundi noir » – au cours duquel l’indice Dow Jones perdit 508 points.
Buffett ne revendit pas ses actions en dépit des temps difficiles car il ne s’est jamais
départi de sa vue d’ensemble. Et sa patience fut généreusement récompensée : chaque
année il récupère son investissement de départ avec un chèque de dividendes annuels du
Washington Post d’un montant de 10 millions de dollars.
Pour Buffett, il s’agissait d’une action volatile, mais pas d’une entreprise volatile. Ce
qui représentait deux choses diamétralement opposées. Il pouvait y avoir des
fluctuations dans le cours de l’action en raison d’un marché boursier chaotique, mais
l’affaire sous-jacente demeurait forte et sûre. Il n’a jamais paniqué. Il a tenu bon, et les
résultats sont parlants.
Les actionnaires de Berkshire qui ont conservé leurs titres malgré la tempête ont vécu la
même heureuse conclusion. Le cours de l’action Berkshire Hathaway de catégorie A
était de 40 dollars en 1974, de 1 275 dollars en 1984, de 15 400 dollars en 1994 et de
97 000 dollars en 2004. Dotés du tempérament adéquat, ces actionnaires ont été
récompensés. Aux autres, ceux qui avaient revendu leurs titres, il ne restait plus que
leurs yeux pour pleurer.
N’ayez pas l’œil rivé sur le cours des actions. Au lieu de cela, étudiez l’entreprise,
son potentiel de développement, ses projets, et ainsi de suite.
En d’autres termes, il ne s’agit pas de « jouer en Bourse » mais d’acquérir des parts
d’entreprises – et d’entreprises de qualité. Sur le long terme, ce type d’entreprises
prospère obligatoirement. De la même manière, les entreprises de piètre qualité sont
incapables de tenir leurs engagements, aussi bien sur le court que sur le long terme.
Aussi, la chose la plus importante que vous puissiez faire avant d’acheter des titres est
de réfléchir longuement et dans les moindres détails à l’entreprise dans laquelle vous
investissez et à son avenir, en vous considérant non pas comme un simple investisseur
mais comme un analyste d’entreprise. Prenez bien évidemment en considération le
cours, mais soyez plus attentif à la valeur (le « cours » et la « valeur » devraient être
étroitement liés, mais dans de nombreux cas ce lien a été rompu).
La valeur d’une entreprise se développe à partir de ce qu’elle fait, de ses résultats par
rapport à la concurrence, de l’échelle à laquelle elle opère, et des perspectives de ces
différents facteurs pour l’avenir. L’investisseur avisé est celui qui choisit une entreprise
« de valeur » en se fondant sur ces types d’évaluation.
Dans le cadre d’un investissement, souligne Buffett, ce qui compte est la performance
de l’entreprise qui se trouve à l’autre bout de l’investissement. Ce qu’elle fait, les
résultats qu’elle obtient (à la fois en termes relatifs et absolus). Un investissement ne
relève pas de la sphère émotionnelle mais, comme le dit Buffett, il s’agit toujours d’un
acte « professionnel ».
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La performance commerciale d’une entreprise est primordiale dans le choix des
actions. Étudiez l’historique de toute société qui se trouve sur votre liste
d’achats.
En 1985, Buffett a analysé la compagnie textile la plus importante aux États-Unis et ses
résultats de 1964 à 1985. Ses actions se revendaient 60 dollars l’une en 1964. Une
vingtaine d’années plus tard, le prix de l’action n’avait pratiquement pas évolué. En
dépit de lourds investissements, l’entreprise luttait, plus ou moins constamment, pour sa
survie. « Mauvaise affaire » fut la conclusion de Buffett. « Achetez et conservez » est un
conseil qui ne peut pas fonctionner si vous misez dès le départ sur la mauvaise affaire.
Un regard en arrière, sur toutes ces sociétés « .com » aujourd’hui perdues et disparues,
confirme l’importance de l’analyse d’entreprise préconisée par Buffett. Pendant cette
période grisante que l’on a appelé la « bulle internet », les gens achetaient toutes sortes
d’actions de sociétés de haute-technologie dont les prix grimpaient exponentiellement.
Mais ils ignoraient la valeur des entreprises qui émettaient ces titres et leurs
perspectives à long terme. Les investisseurs achetaient des actions en se fondant sur
l’activité du titre plutôt que sur la qualité de l’entreprise qu’il représentait.
Les actions d’entreprises telles que Global Crossing et Etoys.com s’échangeaient à plus
de 80 dollars pièce. Aujourd’hui, elles ne valent plus rien. Buffett n’a pas acquis la
moindre action des sociétés Internet car, selon lui, ces dernières n’étaient pas des
entreprises prévisibles et rentables, affichant de solides bilans et d’importantes
capacités d’autofinancement. Ses analyses lui ont conseillé de ne pas s’approcher de
ces sociétés.
Il aime les entreprises « faciles à comprendre » car il sait que leur avenir est plus sûr et
leur capacité d’autofinancement plus facile à prévoir. Des sociétés telles que See’s
Candies, Nebraska Furniture Mart, ou Coca-Cola figurent parmi ses favorites, car il
s’agit d’entreprises stables avec des capacités d’autofinancement et des résultats
prévisibles, et qui feront probablement encore la même chose d’ici un demi-siècle.
Si vous êtes incapable de faire ce type de prévisions en toute confiance, Buffett vous
met en garde : vous faites de la spéculation, pas de l’investissement. L’objectif est
d’éliminer autant d’incertitude que possible, en partie grâce au ciblage des entreprises
qui demeurent relativement faciles à « décoder ». La confiserie et les sodas se prêtent à
un type d’analyse que la plupart des innovations technologiques de pointe ne permettent
pas.
Buffett évite les entreprises complexes qui sont sujettes à des changements majeurs en
raison de l’incertitude autour de leur avenir. Le bénéfice et la capacité
d’autofinancement sont les deux piliers de la viabilité d’une entreprise. Une
capitalisation spectaculaire – en dépit de son côté impressionnant – peut rapidement se
transformer en un feu de paille. La capitalisation boursière a son importance car elle
traduit la surface financière d’une société et sa capacité d’emprunt. Mais la certitude
d’un chiffre d’affaires engrangé mois après mois, trimestre après trimestre et de
manière prévisible, est bien plus importante.
Certains observateurs pourraient reprocher à Buffett son refus de s’aventurer dans ces
entreprises nouvelles et souvent enthousiasmantes. Si tel était le cas, il ne s’en
préoccuperait probablement pas. « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras » leur
répondrait-il sans doute. Il est préférable de percevoir une rémunération prévisible
plutôt que d’attendre une rémunération potentiellement énorme mais fortement
spéculative. Mieux vaut à ses yeux réaliser des gains à un ou deux chiffres sur une base
régulière plutôt que de prendre de gros risques dans l’espoir d’en tirer un profit élevé.
Le produit est-il durable ? Posez-vous la question suivante, même si elle peut avoir
l’air bête au premier abord : lequel de ces deux produits est davantage susceptible
d’être encore là dans dix ans : une application logicielle spécifique ou une crème
glacée de chez Dairy Queen ? La réponse est bien évidemment la crème glacée. Les
logiciels évoluent bien trop vite pour pouvoir constituer un bon pari pour les dix années
à venir.
Si vous n’avez aucune idée de ce que pourrait être une entreprise dans dix ans, alors
c’est que vous ne comprenez pas cette entreprise. Et si vous ne comprenez pas
l’entreprise dans laquelle vous placez votre argent, vous faites de la spéculation plutôt
que de l’investissement. Vous êtes animé par l’espoir plutôt que par la réflexion.
Voici quelques conseils qui aideront les investisseurs à formuler des perspectives à
long terme :
Évaluez les fondamentaux de l’entreprise avant d’acheter un titre quel qu’il soit.
Bénéfices, résultat, capacité d’autofinancement, bilan et compte de résultat représentent
quelques clés qui vous aideront à déterminer la santé à long terme de toute entreprise.
arren Buffett s’attache à acheter les titres des entreprises dont les atouts
Les entreprises construites comme de solides citadelles sont ce que Buffett appelle des
« franchises ». Non pas des franchises au sens d’Afllelou ou McDonald’s, mais des
structures qui jouissent d’une position privilégiée, représentant quasiment une garantie
de succès. Une « franchise économique » fournit un produit ou un service qui :
Le fabricant américain de sucreries See’s Candies, déjà mentionné plus haut, offre une
illustration de ce type de « franchise ». Il s’agit d’une entreprise disposant d’un atout
concurrentiel durable. Elle vend des chocolats avec succès depuis plus de 70 ans et est
susceptible d’en vendre encore dans 70 ans.
Ces erreurs de novice sont à mettre en perspective avec le choix de Buffett en 2003,
année où il choqua de nombreux observateurs en achetant quelque 2 milliards d’actions
du groupe énergétique chinois PetroChina. Cette immense société, dont peu de gens
Une autre clé importante dans l’achat de « franchises » – ou de toute autre entreprise –
consiste à attendre jusqu’à ce que la société ait atteint un prix raisonnable. C’est l’un
des traits marquants de la méthodologie de Buffett.
Ne faites pas des passages éclairs sur les marchés boursiers. Les statistiques
montrent que plus les transactions sont fréquentes, plus les pertes sont
importantes.
Dressez la liste des entreprises qui vous intéressent et du prix plafond que vous seriez
prêt à débourser pour acquérir leurs titres. Gardez cette liste à portée de main et
consultez-la régulièrement. Elle vous aidera à observer une discipline et vous évitera
des prises de décisions qui nuiraient à votre portefeuille.
Dans son best-seller publié chez McGraw-Hill, How to Pick Stocks Like Warren
Buffett, Timothy Vick utilise des arguments irréfutables en faveur du « stockage des
actions » à la manière de Buffett : « (…) cela vous force à rester vigilant. Avant
d’acheter, vous devrez déterminer une valeur raisonnable pour la société, ce qui
implique que vous devrez l’étudier. Investir votre temps dans un processus d’évaluation
diminuera sensiblement vos risques d’un achat prématuré » (page 98).
Voici quelques suggestions qui vous aideront à identifier et à conserver les bonnes
sociétés :
Identifiez les « franchises » qui passeront l’épreuve du temps. Cherchez sans relâche
l’entreprise conforme aux critères de Buffett : celle qui fabrique des produits
nécessaires ou désirés, pour lesquels il n’existe pas de substituts proches, qui n’est pas
excessivement gourmande en capital, et non soumise à la réglementation des prix.
Étudiez les fondamentaux sous-jacents des entreprises avant d’en acquérir les titres.
Assurez-vous d’effectuer un contrôle adéquat avant d’acheter des actions. Vous pourrez
ainsi mieux fonder vos décisions d’investissement et améliorer vos chances de succès
sur le long terme.
▶ Si vous voyez des piranhas et des crocodiles dans les profondes douves qui
entourent un château imposant, commente Buffett, c’est que vous avez trouvé le
genre d’entreprise pérenne qui peut vraiment faire gagner de l’argent à ses
actionnaires.
Quel genre de fille inviteriez-vous au bal de fin d’année ? Celle qui vient d’arriver dans
votre lycée, à la beauté éblouissante mais que personne ne connaît réellement ? Ou
inviteriez-vous la « fille d’à côté » ? « Misez sur la fille d’à côté » conseille Buffett.
Ne succombez pas aux sirènes de la nouvelle entreprise « sexy » affublée de
séduisantes perspectives de croissance. Les facteurs qui la rendent attrayante sont ceux-
là mêmes qui rendent particulièrement délicates les estimations concernant son
évolution sur le long terme. Bien entendu, une entreprise « glamour » peut connaître un
succès spectaculaire à court terme mais, au final, elle est susceptible de faire un fiasco.
La haute technologie est sans aucun doute parfaite, estime Buffett… pour les autres. S’il
n’arrive pas à comprendre qui dans un secteur donné gagnera de l’argent, ni comment, il
évite de s’engager sur cette voie. À l’inverse, lorsqu’il visualise le flux de revenus, il
est bien plus enclin à y adhérer. Il est discipliné. S’il ne comprend pas l’activité, si
l’entreprise est trop complexe ou difficilement prévisible, il garde son argent dans sa
poche. Cette discipline est un axe fondamental de la philosophie du value investing que
prône Buffett. Soyez prudent face aux entreprises inhabituelles qui se donnent des airs
de réussite facile et rapide. Et, si de grands changements s’annoncent à l’horizon pour
une entreprise, ne vous en approchez pas. Si vous ne voyez pas exactement comment et
quand cette entreprise gagnera de l’argent – d’une manière que vous estimerez
satisfaisante – gardez vos distances.
Évitez les sociétés issues de secteurs en évolution. L’un des critères de Buffett consiste
à acheter des titres dans des entreprises qu’il comprend, dont les modèles et la
croissance des revenus sont prévisibles. Ne succombez pas aux « sirènes » des sociétés
« tendance » qui règnent sur la Silicon Valley. Leur activité est trop difficilement
prévisible sur le long terme. Si vous avez des doutes, consultez la rubrique
nécrologique de la nouvelle économie. Vous y trouverez une illustration des dangers de
l’investissement dans des sociétés stimulantes promettant une croissance inégalée.
Souvenez-vous qu’il faut des décennies pour qu’une entreprise devienne excellente.
La dernière leçon de cette partie de la stratégie de Buffett nous invite à procéder à une
réflexion sur le long terme. Il n’y a que trop d’entreprises qui montent en flèche au cours
de leurs premières années avant de retomber comme une masse quelques années plus
tard. Tâchez d’écarter les entreprises qui risquent d’être « ébranlées » par une nouvelle
technologie ou un nouveau concurrent.
Aussi, lorsque les courtiers vous poussent à diversifier vos placements et vous mettent
en garde contre des investissements trop importants dans quelques titres seulement, car
cela représenterait un risque majeur et construirait un portefeuille très déséquilibré,
rappelez-vous que si Warren Buffett « pèse » aujourd’hui 44 milliards de dollars c’est
en détenant directement 474 998 titres dans une seule société : Berkshire Hathaway. De
la même façon, la plus grande partie de la richesse de Benjamin Graham venait des
actions qu’il détenait dans GEICO Insurance. Munger estime que, lorsque l’opportunité
d’accéder à une « affaire exceptionnelle gérée par un dirigeant exceptionnel » se
présente, c’est commettre une grande erreur que de ne pas y placer le maximum d’argent
possible.
Comment tirer parti de cette stratégie de Buffett ? Mettez en pratique les trois conseils
suivants :
Assurez-vous que les titres que vous achetez sont conformes aux critères de Buffett.
Ils doivent représenter de bonnes et solides entreprises (à la limite de l’« ennuyeux »)
dotées d’équipes de direction à toute épreuve. Étudiez les résultats de chaque entreprise
sous sa direction actuelle. Et ne commencez pas à vous agiter sur votre siège. Attendez
que les titres soient à des prix attractifs.
Faites preuve de courage. Un grand nombre des placements majeurs de Buffett ont été
courageusement réalisés dans des périodes de repli économique et financier, où tout le
monde était gagné par la paralysie.
Même l’investisseur individuel est affecté. L’un des mythes communs sur
l’investissement, construit au fil du temps, est qu’il faut des transactions fréquentes pour
réussir. Mais il y a au moins un investisseur légendaire qui est une remarquable
exception au sein de toute cette hyperactivité. Warren Buffett, sans doute le plus grand
investisseur de tous les temps, ressemble davantage à Rip Van Winkle1 qu’à un derviche
tourneur. Il parle de l’inactivité comme d’un « comportement intelligent ». Il affirme,
non sans raison, qu’un investisseur sage peut gagner de l’argent tout en dormant. Il
célèbre la léthargie et la considère comme l’un des fondements de sa philosophie
d’investissement.
En un mot comme en cent : « Non ». Buffett fuit comme la peste ce qu’il appelle
l’« hyperactivité ». Pour lui, ne rien faire équivaut à bien faire lorsque vous détenez les
bons titres. Une étude de 2004 sur les six valeurs dont Buffett détenait le plus de titres
nous révèle qu’il faut remonter à 2000 pour le voir modifier sa position concernant
Moody’s, à 1998 pour American Express, à 1994 pour Coca Cola, à 1989 pour Gillette,
et jusqu’en 1973 pour la Washington Post Company. Il ne s’agit pas là d’un schéma de
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comportement de nature à rendre Buffett sympathique aux yeux des courtiers !
Buffett aime acquérir des titres, mais les revendre est une autre histoire. Il compare
l’investisseur qui vend facilement à une abeille butinant une fleur après l’autre. Si vous
êtes sur la bonne fleur, conseille-t-il, restez-y. Ne cédez pas à la tentation de
l’hyperactivité.
De nombreux investisseurs ferment les yeux sur les implications fiscales des
transactions fréquentes. Buffett ne cesse de marteler ce point, soulignant que pour un
même taux de rendement composé, les contribuables (c’est-à-dire la plupart d’entre
nous !) sont bien mieux lotis en demeurant fidèles aux titres d’une entreprise plutôt
qu’en passant continuellement d’une entreprise à l’autre. Les retombées fiscales
absorbent les rendements nets des investisseurs.
Ainsi, les fonds avec frais de souscription ou « load funds » non seulement vous
facturent plusieurs points de pourcentage en guise de commission mais aussi – compris
dans le prix des actions – des coûts de transaction, de gestion, et ainsi de suite. À
l’instar d’un impôt, ces coûts cachés grignotent les rendements nets des investisseurs
sur le long cours. Toutefois, la plupart d’entre eux ignorent que ces frais leur sont
facturés. Plus il y a de transactions, explique Bogle, plus il y a de pertes. Il assimile les
transactions fréquentes aux tables de jeux de Las Vegas : au final, celui qui gagne c’est
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le casino.
Pour d’excellents investisseurs comme Bogle et Buffett, l’inactivité signifie des achats
et des ventes peu fréquentes, mais cela signifie également autre chose : attendre aussi
longtemps que nécessaire qu’émerge une opportunité d’achat. Si, pendant un an, aucune
opportunité ne se présente, Buffett ne bouge pas en attendant qu’émerge un occasion, et
peu importe le temps d’attente. En 2004, Buffett n’a réalisé aucun investissement
majeur. Il y a quelques années, il avait estimé que 50 des 61 années qu’il avait passées
dans l’investissement lui avaient apporté de bonnes opportunités d’investissement.
Inversement, cela signifiait aussi que pratiquement une année sur cinq – soit 20 % du
temps – il n’y avait rien d’intéressant à acheter. Donc, si vous avez du mal à vous
souvenir de la dernière fois où vous avez laissé passer toute une année sans rien
acheter, il se peut que vous n’opériez pas d’une manière optimale.
Devenez un spéculateur « sur dix anse », plutôt que « sur dix heures » ou sur le court
terme. Souvenez-vous du côté van Winkle de Buffett ! La clé de l’investissement
consiste à être gagnant sur le long terme. Conservez longtemps les titres des entreprises
de qualité et vos résultats surpasseront la grande majorité de ceux des investisseurs plus
actifs.
Prenez garde aux coûts cachés. Dans l’univers de l’investissement, peu de choses sont
gratuites. Toutefois, vous pouvez vous défendre sur le long terme, en esquivant les coûts
et en minimisant les impôts. Cela signifie ne pas devoir régler des commissions
importantes sur les opérations concernant les actions comme les OPCVM. Cela signifie
éviter les échanges fréquents. Cela implique aussi de rester patient afin de permettre
l’accumulation de vos gains. Enfin, cela signifie poser beaucoup de questions, lire de
nombreux documents sur les différents titres et fonds, et ne pas se précipiter après avoir
entendu quelque tuyau « en or » à la radio. Restez fidèle à votre programme.
1 NdT. Personnage né sous la plume de Washington Irving. Rip Van Winkle dormit paisiblement pendant vingt ans au
sommet d’une montagne après l’ingestion d’un breuvage. Lorsqu’il se réveilla la révolution américaine avait eu lieu.
Mettez cela en parallèle avec une salle de marchés ou un site internet où les cotations
sont affichées sur l’écran dans une cascade ininterrompue de cours, de ratios et
d’évaluations au dixième de centime. De nombreux investisseurs « actifs » (ceux qui
pratiquent de fréquentes opérations sur titres) suivent les évolutions des cours minute
après minute, comme si leur vie en dépendait, et attachent une grande importance au
moindre écart de cotation.
Encore une fois, Buffett observe d’un œil expert la performance de l’entreprise. Il
privilégie sa valeur intrinsèque et ses perspectives d’avenir, au détriment du cours de
ses actions. La plupart des personnes se focalisent sur le contraire, ce qui se traduit par
une obsession de constamment vérifier les cours et le volume des échanges journaliers.
Buffett assure qu’il n’a pas regardé le cours des actions See’s Candies depuis qu’il en
acheté en 1972 – il y a 35 ans ! – et il n’en voit pas la nécessité. Il remarque que les
gens réussissent à survivre pendant le week-end sans leur « dose » de cours boursiers.
L’investisseur évolué, dit-il, ne présenterait aucun symptôme d’abstinence si la Bourse
fermait un an ou deux. Si votre portefeuille est solidement construit, pourquoi vous
agiter à propos des variations de cours ?
Au lieu de garder l’œil rivé sur les évolutions des prix de ses titres, l’investisseur ferait
bien mieux d’utiliser son temps à suivre la performance de l’entreprise : sa gestion, son
résultat, sa capacité d’autofinancement, ses perspectives d’avenir, et ainsi de suite.
Saviez-vous qu’en 1960, Wal-Mart affichait un chiffre d’affaires de 1,4 million de
dollars et un bénéfice de 112 000 dollars ? En 1980, son chiffre d’affaires s’élevait à
1,2 milliard de dollars et ses bénéfices à 41 millions de dollars. En 1990, son chiffre
d’affaires atteignait 26 milliards de dollars pour un bénéfice de 1 milliard de dollars.
Pour Buffett, c’est le point central. Le cours du titre finit par refléter la valeur de
l’entreprise. Toutefois, ce cours futur ne sera pas alimenté par l’hystérie d’aujourd’hui,
mais par les bénéfices de demain. Il compare l’investisseur au spectateur d’un match.
L’important est d’observer le terrain de jeu plutôt que le tableau des résultats.
Qu’annonce la qualité de jeu de votre équipe quant à ses chances de gagner ses
prochains matchs ? Et quel est le meilleur endroit pour évaluer ses chances ? Le terrain
lui-même.
C’est la performance qui compte. Prenez le cas de figure suivant : si vous aviez acquis
100 actions Wal-Mart en 1970 au prix de 16,50 dollars l’une, vingt ans plus tard vous
auriez eu en main un portefeuille composé du total exceptionnel de 51 200 actions
(résultant de neuf opérations de division du nominal par deux) au prix de 62 dollars
l’action. En d’autres termes, vos 1 650 dollars se seraient transformés en plus de
3,1 millions de dollars (d’après les chiffres cités par Sam Walton dans son livre Made
in America, Bantam Books, New York, 1993). Stupéfiant, n’est-ce pas ? Mais cela ne
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s’est pas produit en conservant l’œil rivé sur le cours des actions, mais simplement
grâce à une entreprise ayant réussi une performance spectaculaire.
En d’autres termes, si vous achetez des actions dans d’excellentes entreprises, le cours
de la bourse finira par valider vos choix. Benjamin Graham avait formulé les choses de
la manière suivante : « Sur le court terme, la Bourse est une machine à voter mais, sur le
long terme, c’est une machine à peser. »
Pour investir comme Buffett, changez vos habitudes. Efforcez-vous d’évaluer les
chances de succès de votre investissement à l’aune de la performance de l’entreprise et
non des actions.
Berkshire Hathaway encaisse chaque semaine 100 millions de dollars via ses activités.
L’entreprise affiche une bonne performance, une direction et des perspectives d’avenir
solides. Alors, quel intérêt y a-t-il à savoir ce qu’affichent les téléscripteurs à propos
du cours de l’action Berkshire Hathaway aujourd’hui ? Si l’entreprise a de bons
résultats, l’évolution du cours reflétera sa solidité sur le long terme. Observez les
résultats d’exploitation des sociétés dans lesquelles vous investissez. Au final, les
marchés sanctionneront vos investissements sur ces mêmes critères. La fièvre du
moment finira par retomber, les entreprises robustes émergeront du lot, et le cours de
leurs titres sera élevé.
Coupez le son. Si vous écoutez chaque jour des programmes dont le thème est
l’investissement – ces émissions débordant de conseils « en or » dispensés par des soi-
disant « experts » médiatiques – éteignez votre récepteur. Encore une fois :
débarrassez-vous de vos dépendances. Tout cela ne constitue qu’un bruit de fond. Le
secret ne réside pas dans l’évolution des cours jour après jour mais bien dans la santé
des entreprises dont vous envisagez d’acheter des titres.
▶ Warren Buffett ignore le prix auquel sont échangés les titres de sa propre société,
Berkshire Hathaway, pour une journée donnée. Il ignore également, car cela ne
l’intéresse pas vraiment, ce qu’était ce prix la veille et ce qu’il sera le lendemain.
Ce qui l’intéresse, c’est le prix de ce titre d’ici une dizaine d’années, car il donnera
alors la mesure de la performance de l’entreprise et, par conséquent, sa véritable
valeur.
Et ainsi de suite. Supprimez les chiffres du paragraphe précédent, et vous pourriez vous
en servir comme modèle pour un grand nombre d’articles rédigés au cours de ces
dernières décennies. Des événements négatifs se produisent dans le monde, et voilà que
les marchés s’effondrent. Des événements positifs leur succèdent, et voilà que les
marchés se redressent.
Puis, voilà qu’ils reculent à nouveau et que la bourse – et son environnement immédiat
– se met à paniquer. « Panique » est un mot qui a peut-être été banni du vocabulaire des
marchés financiers, mais la réalité de la réaction de panique est toujours présente. La
majorité de ceux qui ont placé leur argent en Bourse a horreur de voir chuter les cours.
Ils voient les corrections boursières au mieux comme des revers, au pire comme des
catastrophes. Apeurés, ils cherchent à « sauver les meubles » en se débarrassant de
leurs titres.
La plupart des grands investissements de Buffett ont été réalisés en période de marché
baissier, alors que les cours des titres d’entreprises splendides (et moins splendides)
s’étaient effondrés ou lorsque d’excellentes entreprises traversaient des difficultés
passagères mais surmontables et que leurs titres étaient sous-évalués.
Washington Post, GEICO et Wells Fargo offrent des exemples de la manière dont Buffett
se sert des chutes boursières pour investir dans l’avenir. En 1973, le marché boursier
était fortement déprimé, et l’action du Washington Post ne valait plus que l’équivalent
de 6 dollars (en prix ajusté pour tenir compte des divisions ultérieures du nominal).
Buffett se précipita, injectant 10,6 millions de dollars dans la société.
Une bonne trentaine d’années plus tard, le prix de cette action atteint plus de
900 dollars. C’est la deuxième action la plus chère à la Bourse de New York, juste
derrière le titre de Berkshire Hathaway lui-même. Encore une fois, Buffett a investi
dans une entreprise solide au moment où ses titres se vendaient pour une bouchée de
pain. C’est une discipline dans laquelle Buffett excelle. Il est constamment à la
recherche d’actions sous-évaluées dont la valeur intrinsèque est supérieure à ce
qu’affiche le cours. En d’autres termes, il est toujours à la recherche de billets d’un
dollar vendus avec une réduction de 60 %.
Recherchez des entreprises de qualité qui sont « soldées » pour des raisons autres
que leurs fondamentaux sous-jacents ou la qualité de leur gestion.
En raison des caprices des marchés financiers, souvent dominés par l’avidité ou la
peur, les titres d’excellentes entreprises voient parfois leurs cours s’effondrer, ce qui
représente une opportunité magnifique de saisir leurs titres au rabais. Parallèlement,
cela signifie que l’irrationalité du marché affecte des entreprises qui ne devraient
pourtant pas « payer pour les autres ». Quoi qu’il en soit, de là naît une opportunité à
saisir de toute urgence.
Par conséquent, Buffett se mit à accumuler des actions GEICO, investissant au final
46 millions de dollars dans la société. GEICO avait été « mal évaluée » d’après Buffett.
Il ne lui restait plus qu’à concrétiser son investissement et à attendre qu’une évaluation
plus juste soit publiée. Ainsi que nous l’évoquions précédemment, cette réévaluation
finit par avoir lieu. Et la part de 46 millions de dollars de Buffett se transforma en une
part valant un milliard de dollars.
En 1990, Buffett a racheté 5 millions d’actions Wells Fargo Bank d’un seul coup, à une
époque où les titres bancaires se vendaient au rabais en raison d’une série de créances
douteuses et d’un climat d’affaires défavorable. Wells Fargo connaissait des problèmes
notamment en raison du repli du marché immobilier californien. Mais Wells Fargo
plaisait à Buffett. Il appréciait son équipe de direction, son activité et, surtout, il aimait
ses actions à petit prix.
Changez votre manière de voir les choses. Reprogrammez votre mentalité en tant
qu’investisseur. Apprenez à aimer un marché en baisse car il ouvre des opportunités.
Ne rejoignez pas la cohorte de ceux qui agissent sous le coup de la panique lorsque la
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Bourse chute.
Recherchez sans cesse la valeur. Les meilleurs investissements de Buffett ont été
réalisés lorsque les cours des actions étaient en repli, dû à la situation boursière ou aux
difficultés passagères d’une entreprise. L’astuce consiste à reconnaître la différence
entre un revers temporaire et une faille véritable et fatidique dont souffrirait
l’entreprise.
Lancez-vous lorsque les trois critères de Buffett sont réunis. Lorsque, dans votre
champ de vision d’investisseur, il apparaît une entreprise solide, dotée d’un atout
concurrentiel durable, d’une direction stable, et dont les titres se vendent « pour une
bouchée de pain », lancez-vous » même si, pour débuter, vous n’achetez qu’un petit
nombre de titres.
▶ Buffett affirme que les investisseurs ne sont pas perdants lorsque les marchés
chutent. Les perdants, ce sont les « désinvestisseurs ». Alors, soyez comme
Buffett : soyez un investisseur.
Buffett aime recourir à la métaphore du baseball pour illustrer cette façon d’investir. Un
investisseur est quelqu’un qui est à la batte, et vers qui des placements boursiers
potentiels sont continuellement lancés. « Il ne doit pas essayer de frapper la balle à
chaque fois » conseille de Buffett.
Il faut, au contraire, être patient, laisser passer quelques balles et attendre la bonne.
Buffett a lu avec un grand intérêt le livre de Ted Williams, le célèbre batteur des Red
Sox, intitulé The Science of Hitting. Aux yeux du non-spécialiste, détenir la batte
consiste à frapper les balles et il faut par conséquent tenter de le faire à chaque fois.
Mais Williams envisageait ce rôle du batteur comme un vaste paysage qui devait
d’abord être visuellement réaménagé en un nombre de séquences spécifiques. Et ce
n’est que lorsque la balle arrivait dans une très petite « séquence » – qu’il appelait la
séquence « optimale » que Williams faisait swinguer sa batte de baseball.
Buffett est toujours dans ce rôle du batteur qui observe les balles qui passent. Mais il
n’essaiera de frapper que les celles – en l’occurrence les titres – qui seront dans la
séquence « optimale ». Cette séquence « optimale », ainsi que nous l’avons vu
précédemment, est constituée d’entreprises excellentes dotées de solides perspectives
de gains, placées sous la direction d’équipes capables et respectueuses de l’éthique, et
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dont le prix par action est attractif. Si les balles n’arrivent pas selon ce scénario et ne
satisfont pas ces critères, il ne frappe pas.
Et, ainsi que nous l’avons déjà vu, il est capable d’attendre une ou deux années avant de
faire un placement lorsqu’aucune des entreprises observées ne lui plait. Il a laissé
s’écouler des années sans tenter de frapper la balle une seule fois. Ce n’est que lorsque
tous les ingrédients sont réunis que Buffett frappera, et qu’il le fera d’une frappe
puissante, en investissant d’importantes sommes d’argent. Quel résultat obtient-il
alors ? Il remporte en général le grand chelem.
Buffett estime que l’une de ses plus grandes erreurs a été de ne pas investir
massivement dans les actions Wal-Mart. Selon lui, il aurait pu gagner au minimum une
dizaine de milliards de dollars s’il s’était précipité sur Wal-Mart, mais, l’époque, le
prix des actions ne lui convenait pas. Buffett appelle ces erreurs d’appréciation des
« erreurs par omission » : elles résultent de l’absence de frappe lors d’un lancer de
balle particulier. Si Buffett se pardonne facilement ce genre d’erreurs, il est plus sévère
avec lui-même dans le cas d’« erreurs de commission », à savoir des investissements
massifs dans des titres qui s’avèrent décevants.
L’une des rares erreurs de commission de Buffett a été d’investir dans US Air. Elle lui a
permis d’améliorer – mais à ses dépens – ses connaissances en matière de compagnies
aériennes. De son point de vue, passer à côté d’un gain de 10 milliards de dollars avec
Wal-Mart est sans doute moins douloureux que de perdre un montant inférieur sur US
Air. Une erreur d’omission traduit une discipline à l’œuvre. Une erreur de commission
reflète une mauvaise assimilation de cette discipline. Et, dans l’ensemble, force est de
reconnaître que la moyenne à la batte de Buffett est plus qu’honorable. Au cours des
quatre décennies passées à la tête de Berkshire Hathaway, les gains ont dépassé les
pertes dans un rapport de 100 à 1.
En fait, Buffett est le Ted Williams de Wall Street. Un examen des investissements de
Buffett année après année, entre 1987 et 2004, révèle que presque chacun de ses
investissements – pratiquement à chaque fois qu’il a frappé la balle – a ostensiblement
augmenté en valeur. Ainsi, son placement de 463 millions de dollars dans Wells Fargo
vaut aujourd’hui 3,5 milliards de dollars. Son investissement de 1,4 milliard de dollars
dans American Express vaut désormais 8,5 milliards de dollars.
Pour réussir, il vous suffit de frapper deux fois au cours de votre carrière
d’investisseur. Charlie Munger affirme que si vous supprimiez les 15 investissements
majeurs du portefeuille de Berkshire Hathaway, vous vous retrouveriez avec une
performance très moyenne. Quelles leçons en tirer ? D’une manière générale, il est
difficile de faire franchir certaines limites à une mauvaise balle mais une bonne balle
peut aller très loin.
Warren Buffett recommande de toujours garder à l’esprit une carte de pointage grâce à
laquelle nous nous autoriserions à prendre une vingtaine de décisions d’investissement
au cours de notre vie. À chaque fois qu’une décision d’investissement sera prise, la
carte serait perforée. Selon Buffett, le concept de la carte de pointage nous oblige à
réfléchir attentivement et longuement avant de procéder à un investissement. Cela
améliore les chances d’obtenir un bon résultat tout en éliminant les décisions hâtives et
prises sous le coup des impulsions. La qualité – et non la quantité – doit fonder la
stratégie d’investissement.
Adaptez l’idée de la carte perforée de Buffett à votre propre portefeuille. Imposez une
discipline à chacune de vos démarches en fixant une limite au nombre de vos
investissements. Faites en sorte que chacune de vos décision compte en vous livrant à
un travail d’analyse préalable, à l’observation des fondamentaux… et en étant patient.
Assurez-vous que la balle est dans la configuration optimale. Souvenez-vous que cette
configuration optimale compte, selon Buffett, trois aspects importants : d’excellentes
entreprises dotées de perspectives d’avenir solides en termes de bénéfices, gérées par
une direction compétente et éthique, et dont les titres sont disponibles à bon prix.
Ne frappez pas trop tôt. Outre à limiter le nombre d’opérations que vous effectuerez,
assurez-vous de toujours « prendre une position » (acheter des titres) au bon moment.
Ainsi, au printemps 2004, un journal financier pouvait dispenser les conseils suivants :
« Attendez-vous à tel type de réaction du marché, liée notamment à la tenue des
Conventions nationales du parti démocrate et du parti républicain, des Jeux olympiques
de cet été, ainsi qu’à la tension permanente en Iraq. Ces manifestations sont susceptibles
de ne pas favoriser la dynamique économique nécessaire, alors n’hésitez pas à prendre
vos bénéfices le cas échéant ou mettez en place vos ordres à seuil de déclenchement. »
Demandez-vous sur quoi porte précisément votre analyse. Seriez-vous une sorte
d’analyste de l’économie nationale ? Un analyste « boursier » ? Un analyste
« financier » ? Si vous avez répondu « oui » à l’une de ces questions, vous faites fausse
route selon Buffett. En revanche soyez – ou cherchez à devenir – un analyste
d’entreprise.
Pour investir comme Buffett, vous devez ignorer les facteurs et événements
macroéconomiques afin de vous concentrer sur les entreprises dans lesquelles vous
envisagez d’investir. Analysez les perspectives d’avenir de leur activité, leur équipe
dirigeante, et ainsi de suite. « Avoir des œillères » a souvent une connotation péjorative
et signifie que l’on est borné. Mais, lorsqu’il s’agit d’analyser les choses, conseille
Buffett, n’hésitez pas à porter des œillères et ne vous laissez pas distraire par les
aspects macro-économiques.
Buffett aime dresser la liste de tous les facteurs « extérieurs » qui ont émaillé sa
carrière d’investisseur : des facteurs tels que l’implication des États-Unis dans la
guerre du Vietnam, la loi sur le blocage des salaires et celle qui a entraîné la
réglementation des prix, votée par un président républicain conservateur, puis la
démission de ce même président, des chocs pétroliers multiples, l’effondrement de
l’Union soviétique, la chute du Dow Jones de 508 points en une seule journée, le taux
de base bancaire proche de 20 pour cent, et l’oscillation du rendement des bons du
Trésor entre 2,8 et 17,4 pour cent. Personne, affirme Buffett, ne possédait la boule de
cristal capable de prévoir de tels événements. Et aucun de ces épisodes dramatiques n’a
eu le moindre impact sur son approche de l’investissement.
En fait, raconte Buffett, certains de ses meilleurs achats ont été réalisés dans le contexte
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d’événements qui avaient conduit d’autres investisseurs à déserter la Bourse. Même
après l’horreur des événements du 11 septembre 2001, Buffett n’a revendu aucun de ses
titres. Au lieu de cela, il a fait savoir qu’il pourrait acheter des titres si les cours
boursiers chutaient de manière significative. Il était dans la position de l’homme
solitaire pendant ces jours tragiques, mais aussi dans celle de l’homme sage. Buffett
prévoit que les décennies à venir apporteront leur lot de catastrophes – naturelles et
autres – mais il n’y voit aucun motif pour cesser d’acheter des « entreprises de
première classe » si l’opportunité se présentait.
Pour vous aider à vous fabriquer votre propre paire d’œillères de style Buffett, lisez les
conseils suivants :
Ne jouez pas au spécialiste de l’économie si vous n’en êtes pas un. Votre mission en
tant qu’investisseur ne consiste pas à analyser les chiffres fournis par l’État. En règle
générale, ne laissez pas des facteurs macro-économiques ou des événements politiques
vous dicter vos décisions d’investissement.
Ne cédez pas à la panique. Buffett n’a rien d’un Candide. Il comprend tout à fait qu’une
nouvelle ère est née après les événements du 11 septembre 2001 (et après ceux du
11 mars 2004 en Espagne). Il comprend que certains événements, comme le terrorisme
ou la guerre, peuvent affecter les cours boursiers sur le court terme. Mais il ne cède
jamais à la panique. Dans les semaines et les mois qui ont suivi le 11 septembre 2001,
les marchés financiers ont été mis à rude épreuve. Mais, trois ans après, l’indice
Standard & Poor (S&P) 500 enregistrait de nouveaux records sur les années
précédentes. En cédant à la panique à ce moment-là – et de nombreux investisseurs ont
été dans ce cas – vous auriez abandonné la place très exactement au mauvais moment du
cycle. Alors, pas de panique !
5. Les actionnaires sont-ils traités comme des partenaires ou comme des gogos ?
Il est possible de faire une mauvaise affaire avec une personne estimable mais, soutient
Buffett, il est impossible de réaliser une bonne affaire avec la mauvaise personne.
D’ailleurs, pourquoi s’engager sur cette dernière voie ? Votre réputation risquerait d’en
pâtir, et votre placement de courir des risques inutiles. Placez votre argent là où vous
placez votre confiance.
Quelles en sont les implications ? Buffett gagne de l’argent lorsque ses actionnaires en
gagnent aussi. Il considère ces derniers comme des partenaires, et chacune de ses
décisions est motivée par le souhait de créer de la valeur pour l’actionnaire. Ainsi,
l’émission de nouvelles actions étant de nature à diluer les avoirs des détenteurs de
titres existants, Buffett n’emprunte que rarement cette voie et à contrecœur. Lorsque
Buffett a pris le contrôle de Berkshire Hathaway, en 1965, on dénombrait 1 137 778
actions en circulation. Quarante années plus tard, il est surprenant de constater que le
nombre d’actions Berkshire Hathaway de catégorie A en circulation reste inférieur à
1,4 million. Chez Berkshire Hathaway, la frugalité et la « conscience du coût » sont
fortement enracinées dans la culture d’entreprise.
Charlie Munger affirme que « l’opulence du siège social est souvent inversement
proportionnelle à la consistance financière de l’entreprise ». Le siège de Berkshire
Hathaway à Omaha n’a rien d’impressionnant ni de « glamour » (et c’est un
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euphémisme). Si vous êtes à la recherche de locaux rénovés à coups de millions de
dollars, ne vous donnez pas la peine d’aller jusqu’aux bureaux qu’occupe Buffett dans
l’Omaha. En revanche, si vous recherchez de la consistance financière – le « glamour »
des chiffres – vous y serez chez vous.
Sam Walton, fondateur de Wal-Mart, était connu pour son sens des économies et son
manque d’ostentation au niveau de son entreprise. Voilà le type même d’entrepreneur
que Buffett adore et avec lequel il cherche à s’associer. Ciblez des dirigeants qui sont
davantage intéressés par la réduction des coûts que par l’installation de robinets
plaqués or dans les toilettes de la direction (ou par des rideaux de douche à 6
000 dollars dont on rapporte qu’ils ont été achetés par un dirigeant sans scrupules).
La qualité du management est donc primordiale pour Buffett. Mais une bonne direction
doit être associée à une bonne activité. Vous pouvez être le meilleur jockey au monde,
vous ne gagnerez jamais la course sur le dos d’un vieux canasson. Ou alors peut-être
dans un conte de fées, mais les bons investissements ne suivent pas la logique des
contes de fées.
Évitez d’investir dans des entreprises faibles, y compris lorsqu’elles sont pourvues
d’excellentes équipes de direction. Au final, la qualité de l’affaire prévaudrait et
noierait le placement.
Buffett émet un certain nombre d’avertissements que les investisseurs devraient prendre
en compte lorsqu’ils évaluent des entreprises et leurs équipes dirigeantes, notamment à
travers leurs rapports annuels. Tout d’abord, étudiez leur comptabilité. Si elle souffre
de faiblesses, passez votre chemin. Lorsqu’une société n’inscrit pas en charge les
options qu’elle propose à ses cadres, présente des engagements de retraite fantaisistes,
claironne son EBE (excédent brut d’exploitation), et s’appuie sur un déchaînement de
notes inintelligibles de bas de page, vous êtes en présence de mauvais signes. Partons
du principe que vous détenez au moins une capacité modérée en matière de lecture
d’états financiers : si vous ne comprenez pas quelque chose dans l’état financier d’une
entreprise, soutient Buffett, c’est parce que sa direction n’a aucune envie que vous
compreniez. Êtes-vous à la recherche d’un partenaire qui vous cache des choses ?
Certainement pas !
Par ailleurs, Buffett conseille aux investisseurs de se méfier des sociétés qui regardent
exclusivement vers l’avenir à la recherche de « bonnes nouvelles ». Les bonnes
nouvelles ne concernent-elles que des projections bénéficiaires et des estimations de
croissance ? « Mauvais signe » dirait Buffett. Et, en disant cela, il s’appuie en partie sur
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sa propre expérience en tant que dirigeant. Les responsables de Berkshire Hathaway
n’ont pas une idée précise de ce que l’une de leurs entreprises est susceptible de gagner
au cours de l’année à venir – ni même du trimestre à venir. Lorsqu’un dirigeant prétend
connaître l’avenir, avertit Buffett, c’est mauvais signe. Et lorsque ce dirigeant atteint
vraiment ces résultats, trimestre après trimestre, c’est un très mauvais signe, qui laisse
présager qu’il y a eu manipulation quelque part. Si vous promettez, de la manière la
plus solennelle qui soit, de vous « arranger pour atteindre les résultats », vous risquez
de vous mettre dans une position où vous finiriez par « arranger les résultats atteints »,
n’y gagnant qu’embarras et tristesse. Health-South avait suivi cette voie : son Président
s’était vanté de 46 trimestres consécutifs de bénéfices supérieurs aux prévisions des
analystes… jusqu’au moment où la fraude comptable a été découverte !
Les mauvais signes visibles sont les meilleurs indicateurs des mauvais signes
invisibles. Une cuisine sale, explique Buffett, n’abrite pas un seul cafard. En voir un
suffit pour vous faire comprendre qu’il y en existe d’autres cachés dans les murs. Si
vous les soupçonnez d’être présents, il est très probable que vous ayez raison.
Pour vous garder de ces types de catastrophes et améliorer vos chances de réaliser un
placement réussi, n’oubliez pas à chaque fois de passer par les étapes suivantes :
Étudiez l’équipe dirigeante avant d’investir. La qualité d’une direction est presque
aussi fondamentale que celle de l’affaire sous-jacente. Buffett ne fait affaire qu’avec
des personnes honnêtes et qu’il estime. Il n’a jamais tiré profit d’une société placée
sous la houlette d’un management dépourvu de sens éthique.
Recherchez les sociétés qui traitent leurs actionnaires avec considération. Investissez
dans les entreprises dont les dirigeants placent les exigences des actionnaires au-dessus
de leurs propres besoins. Misez sur des sociétés qui mettent en place des programmes
de rachat d’actions qui profitent aux actionnaires et des sociétés qui savent se montrer
économes et se livrent à une affectation rationnelle du capital.
Évitez d’investir dans une société qui a l’habitude de recourir à des ruses financières
ou comptables. Les failles dans une comptabilité laissent habituellement présager que
le management s’efforce de dissimuler les failles de la performance d’une entreprise.
i nous devions faire une « promenade théorique » à travers Wall Street – c’est-à-
S dire en prenant des notes sur les différents concepts mis en œuvre sous nos yeux –
nous trouverions que les méthodes de sélection des actions ne manquent pas. Vous
pourriez même les trouver plus ou moins impressionnantes : analyse technique,
détermination du moment propice ou « market timing », « day-trading » ou « trading
intraday », théorie des vagues, oscillateurs, et d’autres encore. Toutes offrent des
exemples de méthodes médiatisées supposées conférer à l’investisseur le pouvoir de
déchiffrer le marché boursier et de connaître une réussite – spectaculaire, forcément
spectaculaire – dans le cadre de ses placements.
D’où nous viennent toutes ces techniques ? Principalement de deux sources : la filière
universitaire et celle des professionnels de la finance, autrement dit de deux filières
prestigieuses. Et les concepts ont quelque mérite, du moins à première vue. Prenez
l’« analyse technique » par exemple. Ceux qui travaillent dans ce mystérieux domaine
s’intéressent de manière presque exclusive aux données boursières. Ils observent les
fluctuations des cours, les volumes échangés et les profils des graphiques illustrant la
performance du cours de l’action, en partant de la théorie que d’une part, les cours
boursiers résument tout ce qu’il est nécessaire de savoir à propos d’un titre donné et,
d’autre part, qu’un individu isolé ne pourrait jamais égaler la sagesse collective.
Heureusement, un homme a osé faire un pas en avant et affirmer ce qu’il était évident de
voir : « Le roi est nu ! » Warren Buffett estime que toute analyse de placements fondée
uniquement sur des graphiques, le volume des transactions et l’évolution des cours n’est
rien d’autre qu’une énumération de balivernes et de sottises.
Ces investisseurs, rapporte Buffett, sont à la recherche d’écarts entre la valeur d’une
entreprise et le prix de petits morceaux de cette entreprise sur le marché. Il s’agit
presque de l’exact contraire de l’analyse technique, avec son obsession des modèles,
schémas, données et ainsi de suite. Les investisseurs intelligents, affirme Buffett avec
force, ont l’obsession de la valeur.
Toutefois, les résultats obtenus par Buffett et les investisseurs ayant adopté le style
Graham et Dodd parlent d’eux-mêmes. Le value investing propose à l’investisseur un
cadre intellectuel qui a fait ses preuves. Dit simplement, pratiquer l’investissement à la
manière de Buffett exige que vous ignoriez les méthodes qui n’ont ni queue ni tête.
Oubliez les stratégies d’investissement au style compliqué, à la mode, qui vous en
apprendront bien peu sur l’entreprise sous-jacente.
Voici trois recommandations qui vous aideront à comprendre ce qui est réellement
important au moment de prendre vos décisions d’investissement :
Ignorez les graphiques. Le value investing ne s’intéresse pas aux graphiques. Buffett
vous invite formellement à ne pas regarder les graphiques boursiers dans le cadre de
votre prise de décision d’investir. Ignorez les amateurs de graphiques qui prétendent
avoir appris à choisir les bons titres en se basant sur le volume et l’historique des
cours.
Si quelqu’un prétend détenir une méthode « à toute épreuve » pour s’enrichir grâce à
la Bourse, précipitez-vous vers la sortie de secours la plus proche. Rappelez-vous
que les secrets d’un investissement réussi sont la patience et la discipline.
Ayant atteint le statut d’une quasi-célébrité, Buffett est constamment sous les feux de la
rampe et, par voie de conséquence, de nombreuses louanges ou critiques lui sont
adressées en réaction à ses décisions d’investissement. Toutefois, Buffett ne se fonde
pas sur une validation venue de l’extérieur lors de ses prises de décision. Il demeure
inébranlable face aux louanges comme aux désapprobations émanant d’autrui.
Buffett a appris une leçon très importante auprès de Benjamin Graham : « Vous n’avez
ni tort ni raison parce que les autres sont d’accord avec vous. Vous avez raison parce
que vos arguments et votre raisonnement sont justes. » Qu’il y ait de nombreuses ou
d’importantes personnes avec ou contre vous, ne vous donne ni raison ni tort. C’est une
réflexion juste fondée sur les données justes qui fait en sorte que vous soyez dans le
vrai. C’est le cœur même de la pensée indépendante : l’utilisation des faits et du
raisonnement pour arriver à une conclusion, que d’autres vous donnent tort ou raison.
Inutile de préciser que des millions d’investisseurs dégageaient des gains fabuleux
grâce à la détention de ce genre de titres. Les gens s’enrichissaient, et ils le faisaient
très rapidement. De son côté, Berkshire Hathaway ne traversait pas une période aussi
faste à cette époque, ce qui ne manquait pas d’avoir des retombées sur le cours de son
titre. Pourtant, en dépit des gains monumentaux affichés par les actions de la haute-
technologie, Buffett se refusa à acheter le moindre titre Internet ou à participer à cette
nouvelle « ruée vers l’or » de quelque manière que ce soit.
D’autres publications n’hésitaient pas à titrer : « Une légende depuis 30 ans voit son
éclat se ternir », « Buffett serait-il lessivé ? » ou encore « La phobie de la technologie
pourrait avoir raison de Buffett ». Nombreux étaient ceux qui pensaient que Buffett
aurait dû investir dans les titres technologiques, et ne comprenaient pas qu’il laisse
échapper toutes ces opportunités. Mais, en dépit de la désapprobation de la part du
public – et du ridicule dont le couvraient les médias – Buffett ne changea pas d’avis et
ne broncha pas.
Les données qu’il possédait et son raisonnement étaient limpides. Il ne comprenait pas
les entreprises de l’Internet et préférait les voir de loin. Il n’arrivait pas à discerner,
En s’appuyant sur ces réflexions, Buffett avait décidé de ne pas investir dans ces
sociétés, y compris dans un moment où des millions d’investisseurs s’arrachaient leurs
titres à grand succès. Buffett estimait avoir raison car ses données et son raisonnement
étaient justes. Il ne pensait pas se tromper simplement car la quasi-majorité lui donnait
tort. Sa pensée indépendante serait vengée ultérieurement, lorsque la formidable bulle
éclaterait et que les titres « high-tech » s’effondreraient.
Dans le sillage de l’éclatement de la bulle, la plupart des sociétés Internet ont fait
faillite et le Nasdaq, cotant une majorité de sociétés technologiques, a connu une chute
de plus de 75 % en valeur. Des centaines de milliards de dollars boursiers sont parties
en fumée. Que serait-il arrivé si Buffett s’était rallié à l’opinion publique et avait
rejoint le « troupeau » Internet ? Une imitation des autres dénuée de réflexion lui aurait
coûté cher.
En se basant sur des expériences telles que celle-ci, certains investisseurs concluent
que la stratégie de placement à contre-courant est supérieure à la « stratégie du
mimétisme ». Les « investisseurs à contre-courant » se contentent de courir dans la
direction opposée à celle dans laquelle se déplace la masse. Mais, encore une fois,
Buffett n’est pas d’accord. Si la masse a emprunté la mauvaise voie, partir dans la
direction opposée pourrait s’avérer tout aussi nocif. Ce type d’investissement est en
effet fondé sur des « sondages », sur des modélisations chiffrées, et non sur la réflexion,
estime Buffett, et toute stratégie de placement qui privilégie les sondages par rapport à
la réflexion est forcément une mauvaise stratégie.
La leçon à retenir grâce à Buffett est qu’il est important de fonder ses décisions de
placement sur des faits et sur le raisonnement. Ne prenez jamais une décision parce
qu’elle est « dans l’air du temps ou au contraire « à contre-courant ».
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Ne remplacez jamais la réflexion indépendante par la sagesse populaire. Ne suivez
pas la masse. Réfléchissez par vous-même et prenez vos propres décisions en matière
de placement. Ne vous laissez pas influencer par les autres et ne prenez pas une
décision au motif qu’elle est « tendance ».
Faites de la réflexion indépendante l’un des atouts majeurs de votre portefeuille. Être
intelligent ne suffit pas, rappelle Buffett. De nombreuses personnes dotées d’un QI
exceptionnel font preuve d’une mentalité grégaire. La pensée indépendante est l’une des
forces premières de Buffett. Prenez-en de la graine.
Ne soyez pas un investisseur à contre-courant irréfléchi. Pour Buffett, faire quoi que
ce soit de manière irréfléchie est une erreur. Ne soyez pas grégaire en suivant la masse
de façon irréfléchie et n’empruntez pas, non plus, la direction opposée simplement par
esprit de contradiction. Ces deux voies nous montrent le chemin du danger.
Ainsi que précédemment mentionné, Buffett n’a pas investi dans les sociétés de la
haute-technologie pendant le boom de l’Internet. Pourquoi ? Parce qu’elles se trouvent
en dehors de son cercle de compétence. Et un grand nombre de secteurs, souligne
Buffett, se trouvent à l’extérieur de ce cercle. Ni Buffett, ni son associé Charlie Munder
ne se considèrent comme des experts en technologie de la puce électronique, en
évaluation des contrats à terme sur marchandises, pas plus qu’en matière de prospection
minière. Ce n’est pas leur métier.
Depuis 1982 Buffett publie tous les ans dans ses rapports annuels une annonce
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concernant les « sociétés recherchées », exposant les caractéristiques des entreprises
dans lesquelles il aimerait investir. Ainsi, il est à la recherche :
2. D’entreprises qui ont prouvé leur capacité à accroître leur rentabilité de manière
stable et régulière (des projections enthousiastes concernant les profits futurs ne
l’intéressent pas).
3. D’entreprises affichant un bon rendement sur capitaux propres tout en ayant peu ou
pas de dettes.
6. D’un prix attrayant (une société dont l’« étiquette prix » est invisible serait une perte
de temps pour Buffett).
Cette liste nous intéresse particulièrement dans le contexte de cet ouvrage car elle
définit de manière spécifique le cercle de compétence de Warren Buffett, à savoir les
domaines d’activité dans lesquels il est le plus à l’aise pour prendre ses décisions
d’investissement. Il s’agit, en effet, ni plus ni moins de la check-list qui lui sert à
contrôler si un investissement se trouve bien à l’intérieur de son cercle.
Des bottes, des briques, de la moquette et de la peinture, voilà qui peut paraître bien
peu engageant. Toutefois, la capacité de ces entreprises à générer des profits est tout à
fait enthousiasmante. Trois années après avoir été rachetées par Buffett, Acme Brick,
Benjamin Moore Paint et Shaw Industries ont toutes enregistré des profits record.
Quelle leçon en tirer ? Restez à l’intérieur de votre cercle de compétence. Agissez
lorsque vous êtes en terrain connu. Ainsi, vous serez mieux à même d’agir rapidement et
plus susceptible de frapper un grand coup. En adhérant strictement à ce principe, Buffett
a fait progresser la valeur comptable par action de Berkshire Hathaway de
19,46 dollars en 1965 à plus de 50 000 dollars en 2005. Aucun autre investisseur
n’arrive à la cheville d’un tel accomplissement.
En tant qu’investisseur, vous devez définir de manière précise votre propre cercle de
compétence. Par extension, vous devrez également définir ce qui se trouve à l’extérieur
de votre cercle de compétence. Introductions en Bourse (OPI), vente à découvert
(VAD), organismes de placement collectif (OPC), contrats à terme, actions cotées en
centimes d’euro, ou encore options : comprenez-vous bien ce dont il s’agit ? Êtes-vous
en mesure d’évaluer proprement leur rentabilité future ? Si vous ne pouvez ni les
comprendre ni les évaluer, cela signifie que ces instruments se trouvent à l’extérieur de
votre cercle de compétence et que vous devez éviter de vous y aventurer.
Charlie Munger aime recourir à l’image des trois bannettes posées sur votre bureau et
identifiées grâce aux trois étiquettes suivantes : « Entrant », « Sortant » et « Trop
compliqué ». Munger affirme qu’aussi bien lui-même que Buffett déposent un vaste
pourcentage de l’ensemble des opportunités de placement qui leur parviennent dans la
bannette « Trop compliqué ».
Voici une idée à reprendre : à l’instar de Buffett, dressez une liste de critères et
n’investissez que lorsque ces conditions sont réunies. Ne vous aventurez pas au-delà de
votre cercle. Placez la plupart des opportunités dans la bannette « Trop compliqué »,
n’agissez que lorsque votre analyse vous paraît compétente, et n’hésitez pas à vous
montrer énergique à l’intérieur de votre domaine de compétence.
Jouez sur votre terrain, pas sur celui d’un autre. L’exemple cité par Buffett concerne
les contrats à terme sur le soja. Si une personne réalise de gros gains sur le marché du
soja, c’est tant mieux pour elle, observe Buffett, car le soja ne fait pas partie de son
terrain de jeu. Vous aussi, restez sur votre terrain.
Charlie Munger compare l’obsession des prévisions boursières à celle des anciennes
techniques de divination. Les rois, explique-t-il, employaient des devins dont le rôle
était d’interpréter les entrailles des animaux sacrifiés. Les prévisionnistes
d’aujourd’hui, estime-t-il, ne valent guère mieux que ces sorciers « lisant » dans les
boyaux de mouton.
Ainsi que nous l’avons vu, Buffett préfère passer son temps à examiner des éléments qui
lui offrent une chance de mieux comprendre leur évolution. Une entreprise dans son
cercle de compétence se prête à ce genre d’exercice. Pour Buffett, les marchés
boursiers demeurent un « mystère » et ce dernier n’est pas près d’offrir des possibilités
de prévision à qui que ce soit. De nouvelles prévisions ne cessent d’être annoncées,
souvent associées à un nom très respectable. Cela n’a aucune importance : une grande
partie du succès de Buffett est attribuable à son aptitude à ne pas se laisser distraire par
Il s’agit d’une distraction qui freine l’action et trouble le jugement. Pourquoi ? En partie
parce que ces prévisions créent l’illusion de la précision. Elles paraissent fondées sur
des données, et leurs analyses paraissent se développer directement à partir des
données. Tout faux, estime Buffett, en réalité, plus les prévisions ont l’air précises et
plus vous devrez vous montrer sceptique. Encore une fois, le but est d’examiner des
résultats avérés et non des projections et des prévisions. Ne laissez pas les pronostics
vous éloigner de votre objectif, concentrez-vous sur ce qui compte réellement. Placez-
vous au niveau de l’entreprise et non au niveau de la Bourse, utilisez votre temps pour
analyser les résultats passés et présents d’une société, afin d’avoir une meilleure idée
de son avenir. Soyez à l’affût d’une opportunité prometteuse sans permettre aux
prévisions d’intervenir dans vos décisions.
Certains investisseurs trouvent que les prévisions apportent un éclairage sur l’avenir.
Les prévisions auraient donc la faculté de rendre les choses plus claires. Cela n’a aucun
sens, proteste Buffett, l’avenir est toujours obscur. Espérer que le futur s’éclaircisse,
moyennant l’utilisation de prévisions boursières ou d’autres outils du même acabit,
pourrait signifier attendre pour toujours. Ne recherchez pas la certitude, recommande
Buffett, investir consiste avant tout à agir une fois que vous avez identifié une bonne
entreprise dotée d’un bon management. Ne laissez pas les devins vous paralyser.
Identifiez la cible et décochez la flèche.
Et ne vous laissez pas dominer par vos émotions. Débordant de faits et de chiffres, les
prévisions semblent être à l’opposé de l’émotion. Mais croire à 100 % dans ces faits et
chiffres relève d’un schéma émotif. Restez dans le domaine de l’observable. Ne jouez
pas au devin, formulez des jugements bien informés.
Éliminez toute implication des prévisions dans vos décisions d’investissement. Buffett
ne prête aucune attention aux prévisions boursières à court terme, n’en faites aucun cas
vous non plus.
Ces deux concepts, alliés à une approche des titres envisagés comme matérialisant une
partie de la propriété d’une entreprise, forment les « rochers de Gibraltar » de Graham.
Buffett estime qu’un investisseur qui comprend ces trois idées de base sera de taille à
connaître le succès. Buffett a évoqué ces concepts lors du centième anniversaire de la
naissance de Graham, affirmant qu’ils étaient toujours valables et susceptibles d’être
tout aussi importants dans cent ans.
Mais qui est donc ce « M. Marché » inventé il y a déjà de nombreuses années par
Benjamin Graham, le mentor de Buffett ?
Buffett décrit M. Marché comme un partenaire en affaires – affligé par des problèmes
émotionnels incurables – qui apparaît chaque jour sans faute, et annonce le prix auquel
il achètera ou vendra sa participation dans une société.
M. Marché est pour le moins tenace, observe Buffett. Il se présente tous les jours, bien
ou mal luné. Il n’a pas l’air de s’en faire si vous l’ignorez. Invariablement, il revient le
lendemain avec une proposition. Vous devrez simplement deviner quelle sera l’humeur
de M. Marché et décider ce que vous allez en faire. Allez-vous l’ignorer ? En tirer
parti ?
Encore une fois, quoi que vous fassiez, cela paraît lui être égal.
Une fois que vous aurez ajouté M. Marché à votre schéma mental, vous devrez
également comprendre l’importance de la « marge de sécurité », un autre des grands
principes de Benjamin Graham. Dit simplement, pour qu’une « marge de sécurité »
existe, le prix des actions devra être substantiellement inférieur à la valeur de
l’entreprise. Une société dont le prix des actions et la valeur intrinsèque sont très
proches ne nous intéresse pas. Vous devez rechercher un écart important entre ces deux
chiffres, un « fossé » dirait Buffett. Encore une fois, vous êtes à la recherche d’un billet
d’un dollar vendu 40 cents en Bourse. Buffett parle aussi de conduire un camion de 4,5
tonnes à travers un pont conçu pour supporter 15 tonnes, en d’autres termes accordez-
vous une généreuse marge d’erreur.
Il existe encore une autre raison pour laquelle Buffett privilégie les entreprises faciles à
comprendre : il peut examiner leurs résultats, le flux de trésorerie et le capital
nécessaire à leur fonctionnement, et il peut utiliser ces informations pour analyser leur
valeur intrinsèque. Il peut ensuite constater une éventuelle disparité importante entre le
cours et la valeur.
Quel est votre objectif ? Faire comme Buffett et tirer profit des erreurs commises par
M. Marché lorsqu’il assigne un prix bas à des entreprises qui valent bien plus. Lorsque
la morosité de M. Marché crée une marge de sécurité, il est temps d’agir.
Écoutez les analogies de Buffett. Ce dernier a déclaré que, tout comme le ciel, le
marché aide ceux qui s’aident eux-mêmes. Mais, ajoute-t-il aussitôt, le marché ne
pardonne pas à ceux qui « ne savent pas ce qu’ils font ».
Prenez votre temps, et attendez que M. Marché soit déprimé et provoque une baisse
des cours des titres capable de créer une opportunité d’achat accompagnée d’une
marge de sécurité. De nouveau, la recommandation de Buffett en matière de patience et
de discipline est très claire. Si vous êtes capable d’atteindre ce niveau de discipline,
vous serez récompensé.
▶ Certains déplorent la volatilité des marchés. Ce n’est pas le cas de Buffett. Pour
lui, cette volatilité – les formidables sautes d’humeur de M. Marché – est ce qui
crée des opportunités pour des investisseurs futés. Attendez que les autres se
mettent à réagir sottement, et ensuite agissez judicieusement.
calculer le mouvement des corps célestes mais pas la folie des hommes » a dit Isaac
Newton. Warren Buffett exploite souvent les manifestations de ces émotions très
contagieuses, en se comportant de manière opposée au sentiment dominant.
Lorsque la majorité des investisseurs se montre avide, Buffett se montre craintif (ou du
moins extrêmement prudent). Si la plupart des investisseurs exprime sa peur, voilà que
Buffett sera gagné par l’« avidité » (ou du moins par une fièvre acheteuse inhabituelle).
En suivant cette stratégie, Buffett a gagné beaucoup d’argent, au moment où d’autres
connaissaient un certain nombre de déboires.
En 1960, la Bourse connut une accélération sans précédent, avec une hausse
vertigineuse des cours et des volumes échangés. Un enthousiasme boursier se
communiqua à la plupart des investisseurs qui contribuèrent fortement à la tendance
haussière. En d’autres termes, au moment où la montgolfière était pratiquement gonflée
à bloc, certaines personnes continuèrent de l’alimenter en air chaud. C’est dans cette
« phase lunaire » – celle de la surchauffe avide – que Buffett prend confortablement une
place sur le banc de touche.
Il ne réalise pas de placements au moment où les cours des titres connaissent une hausse
irrationnelle et sont visiblement déconnectés de la vraie valeur de l’entreprise sous-
jacente. En d’autres termes, dans les situations où les cours échappent à l’attraction
gravitationnelle des résultats réels de l’entreprise.
Au début des années 70, le marché a traversé une phase baissière caractérisée.
N’écoutant que leur peur, les actionnaires vendirent leurs titres. En 1973-1974,
l’économie entra en récession, la morosité s’empara de tous et l’indice Dow Jones
plongea sous les 700 points. Arrivé à ce point de votre lecture, vous aurez
probablement deviné quel événement corollaire se produisit en cette même période…
Eh oui, Buffett se mit à acheter. En fait, il acheta même à tour de bras. C’est à ce
moment-là, par exemple, qu’il a réalisé un placement devenu légendaire : celui du
Washington Post.
Par ailleurs, nous avons également constaté le comportement craintif de Buffett lors du
boom de l’Internet alors que tous les autres investisseurs, pris d’avidité frénétique,
s’arrachaient les valeurs technologiques. Buffett n’a pas perdu le moindre dollar, tandis
que des millions d’Américains ont perdu jusqu’à leur chemise dans les titres Internet.
Des périodes de peur et d’avidité se succèderont par intervalles et ces émotions se
propageront au sein de la communauté des investisseurs. Vous devrez vous comporter
exactement comme Buffett dans ces situations et tirer parti de ces émotions.
Achetez lorsque les autres vendent et vendez lorsque les autres achètent. Préparez-
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vous à vous montrer craintif au moment où la plupart des investisseurs sont animés par
l’avidité. Les titres ne sont jamais aussi intéressants, dit Buffett, que lorsqu’ils
n’intéressent personne ou presque. Cela est vrai pour de nombreux marchés – le marché
de l’immobilier commercial étant un autre exemple – mais particulièrement frappant
dans le cas de la Bourse, où les mouvements de masse des investisseurs sont si faciles à
détecter. En réalité, étant donné la couverture omniprésente de l’actualité financière
aujourd’hui, il est impossible d’ignorer ce que fait la masse. Lorsque la masse des
investisseurs a peur, elle n’est pas intéressée par l’achat de titres. C’est alors que vous
devez vous montrer motivé. Bien entendu, suivez l’autre conseil de Buffett également et
n’investissez pas à l’aveuglette ni sans réfléchir. Faites-le uniquement lorsque le
placement en question satisfait l’ensemble de vos critères de sélection.
Soyez réactif lorsque l’opportunité se présente. Lorsqu’en 1974, l’indice Dow Jones
s’est écroulé jusqu’à toucher les 580 points, Buffett compare son attitude d’alors à celle
d’un homme « doté d’un grand appétit sexuel débarquant dans un lupanar ». Soyez prêt à
agir rapidement et courageusement lorsque la peur s’installe et que les cours boursiers
chutent.
omme la plupart des grands penseurs, Warren Buffett est un lecteur vorace. Il
C dévore le Financial Times, le Wall Street Journal, le New York Times et des
magazines financiers tels que Fortune. Parfois, il s’agit d’une lecture générale
destinée à s’informer, mais très souvent elle vise à recueillir des informations sur une
société qui l’intéresse. Lorsqu’une société occupe ses pensées, Warren Buffett se met à
lire tout ce qui lui tombe sous la main concernant cette société et ses activités.
En particulier, il parcourt sans répit des rapports annuels. Lorsque Buffett s’intéresse à
une entreprise, il a pour habitude d’acheter quelques actions des sociétés concurrentes
de manière à recevoir leurs rapports annuels. Ici aussi, il s’agit d’une lecture de type
général, mais elle est faite dans un but précis. Une lecture exhaustive offre à Buffett les
données et les idées qui alimentent sa réflexion indépendante et son raisonnement. Il
n’est pas excessif de dire que les lectures de Buffett – alliées à sa réflexion, cela va de
soi – ont été les fondements de ses succès.
Un adepte du value investing devrait lire tout ce qu’il peut trouver sur Warren Buffett et
Charlie Munger. Sur le site Internet BerkshireHathaway.com, accessible au public,
figurent toutes les lettres adressées par Buffett aux actionnaires et les rapports annuels
de l’entreprise depuis 1977. Ces documents forment une véritable mine d’or
d’informations et de sagesse pour tout investisseur potentiel et représentent une lecture
incontournable.
Un exemple ? L’une des théories que Buffett rejette avec vigueur est celle de « marchés
efficients ». Souvent avancée par les professeurs des meilleures écoles de gestion, cette
théorie soutient que les marchés sont complètement efficients. En d’autres termes, à
chaque titre correspond le bon cours, car les poussées et les tractions de la Bourse ont
conduit à cet état de grâce et de sagesse. Si cela est vrai, alors l’analyse des entreprises
est un gaspillage de temps car, soit vous obtenez la « bonne » évaluation – celle du
marché – soit vous vous retrouvez avec une évaluation différente qui serait, par
définition, mauvaise.
Buffett a été le témoin amusé du passage progressif de cette théorie, des cercles
universitaires à ceux de la Bourse. Un temps la marotte de seulement quelques
professeurs de finance très en vue, la théorie des marchés efficients devint rapidement
le mantra des professionnels de l’investissement comme des cadres d’entreprise. « Les
cours des titres prennent en compte l’ensemble des informations disponibles, ont-ils
soutenu plus ou moins à l’unisson, par conséquent il n’est pas nécessaire d’approfondir
davantage. »
Pour aussi choquante que la théorie des marchés efficients ait pu paraître aux yeux de
Buffett, elle n’en était pas moins la source d’un grand atout concurrentiel. Choisir des
titres est un exercice de nature intellectuelle, observe Buffett, comme les échecs ou le
bridge. C’est extrêmement confortable, poursuit Buffett, d’avoir en face de vous, de
l’autre côté de l’échiquier, quelqu’un qui ne croit pas aux vertus de la réflexion pendant
le jeu.
Cela pourra vous sembler beaucoup de bruit pour rien, mais il en a été tout autrement.
En 1973, nombreux étaient les investisseurs institutionnels qui adhéraient strictement à
la théorie des marchés efficients. Par conséquent, peu d’entre eux s’intéressèrent à
l’achat des actions de la Washington Post Company, qui étaient à l’époque à leur niveau
le plus bas. Les titres de la société avaient, selon les adeptes de la théorie, la place
qu’ils méritaient et leur achat n’en valait pas la peine. N’oubliant jamais sa formation
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de jeunesse auprès de Benjamin Graham, Buffett fut le premier sur les rangs, et il ne
tarda pas à prouver aux tenants de la théorie des marchés efficients qu’ils s’étaient
fourvoyés.
Quelle leçon en tirer ? Au moment où les lectures des autres penseurs avaient pour
thème la théorie des marchés efficients, Buffett relisait Graham, sans parler de tout ce
qui lui tombait sous la main et concernait la société détentrice du Washington Post et
son secteur. Les résultats parlent d’eux-mêmes. Lisez en permanence, mais lisez des
documents qui apporteront une information – et non une déformation – à votre approche
globale de l’investissement. Ne vous inquiétez pas de la dernière mode intellectuelle
qui, échappée des bancs des écoles de gestion, s’efforce de conquérir une place sur le
marché de la crédulité. (Souvenez-vous des instincts grégaires !) Occupez-vous de
créer de la valeur, ce qui, dans de nombreux cas, commence par de saines habitudes de
lecture.
Prenez l’habitude de lire. Buffett et Munger sont des lecteurs enthousiastes, et ils
apprennent majoritairement à travers les livres, les périodiques, les rapports annuels,
les rapports trimestriels et autres publications spécialisées. Alimentez votre réflexion
en lisant davantage.
Lisez les lettres et les rapports annuels de Buffett. On ne vous le répétera jamais
assez. Un des maîtres reconnus du monde de l’investissement publie sa réflexion sur
Internet afin que chacun puisse en prendre connaissance. Vous cherchez à reproduire ses
succès, alors pourquoi ne pas commencer par là ? Les détails sont bien évidemment
précieux. Encore plus appréciable, ces documents offrent l’occasion de voir son
« fonctionnement intellectuel » à l’œuvre d’une manière concrète. Étudiez les lettres et
les rapports annuels de Buffett. Ils vous permettront d’acquérir de saines habitudes
intellectuelles.
Ensuite, poursuit Buffett, efforcez-vous d’acquérir les qualités de la personne que vous
admirez le plus. Pourquoi ? Parce que lorsque les caractéristiques la définissant sont
mises en pratique de façon régulière, elles deviennent vos habitudes à vous. De la
même manière, cessez de reproduire les défauts de la personne que vous n’admirez pas.
Ainsi, dans une vingtaine d’années, lorsque vous jetterez un regard sur votre passé,
vous constaterez l’illustration d’un ensemble de bonnes habitudes et des comportements
qui leur sont associés, et l’abandon des mauvaises habitudes.
Développez des habitudes positives. Évitez et effacez les mauvaises. Quel en sera le
résultat, d’après Buffett ? Une corrélation bien plus directe entre vos « chevaux
vapeur » et votre rendement.
Si vous êtes à la recherche d’un modèle positif, vous ne risquez pas de beaucoup vous
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tromper en prenant exemple sur Buffett lui-même. Son père lui a inculqué les principes
les plus stricts en matière d’intégrité et d’éthique. Sous la houlette de Buffett, Berkshire
Hathaway s’acquitte de millions de dollars d’impôts auprès du gouvernement américain
et n’est présent dans aucun paradis fiscal. Par contraste, Enron avait créé 881 filiales
offshore, dont 692 aux îles Caïman, afin de se soustraire au paiement de taxes. Buffett
est la preuve qu’un excellent comportement peut harmonieusement cohabiter avec
d’excellents profits. Les sociétés de type Enron, Adelphia ou Tycos, partout dans le
monde, nous rappellent avec quelle rapidité une conduite malhonnête et immorale
risque de conduire à la débâcle financière.
On a beaucoup écrit sur Buffett. Il ne devrait pas être difficile de dresser une longue
liste composée d’habitudes et de comportements que vous souhaiteriez reproduire (et
n’oubliez pas de croquer le portrait de ce personnage complémentaire – celui que vous
ne voudriez jamais imiter !). Peu importe qui vous aurez choisi comme modèle positif,
dressez une liste aussi longue que possible des caractéristiques que vous aimeriez
posséder.
Voici quelques questions que vous pouvez vous poser afin de vous assurer que vous
n’êtes pas en train de saboter votre stratégie d’investissement :
3. Faites-vous la sourde oreille aux tuyaux « en or », quelle que soit leur source ?
6. Vous abstenez-vous d’investir dans des sociétés, des activités ou des secteurs qui
échappent à votre compréhension ?
Assurez-vous de bien choisir vos modèles positifs. Dites-moi quels sont les héros
d’une personne et je vous dirai de quel type de personne il s’agit et dans quelle
direction elle va. Et vous, qui sont vos héros ? Leurs qualités sont-elles devenues vos
habitudes ?
Prenons l’exemple d’une futur retraite qui, vers la fin des années 1990, disposait de 385
000 dollars sur son compte épargne retraite. À cette époque, il se rend à un séminaire
sur le thème de la retraite où il écoute la communication d’un courtier qui conseille aux
participants d’accepter les dispositifs de retraite anticipée mis en place par leur
entreprise et de lui confier les sommes qu’ils percevront à cette occasion afin qu’il les
investisse dans un portefeuille de sa propre construction.
Comme notre futur retraité, tous les participants sont assurés qu’ils vont ainsi pouvoir
jouir d’une retraite confortable grâce aux plus-values dégagées sur les placements,
qu’ils vont même devenir millionnaires en quelques années. Le courtier procède donc
au placement de l’argent de ce retraité dans des actions du secteur technologique, de la
santé, des services financiers et dans des fonds « high load »1.
Lorsque la valeur de son portefeuille perdit près de 100 000 dollars, notre retraité n’eut
pas d’autre choix que de retourner au travail. Tous ses espoirs et rêves d’une retraire
sereine s’envolèrent en fumée, temporairement du moins.
Considérez encore le cas de la malheureuse retraitée qui investit 410 000 dollars – les
économies de toute une vie – auprès d’un courtier lui ayant fait miroiter une rente
mensuelle de 3 000 dollars pendant toute la durée de sa retraite et cela grâce à des
gains en Bourse. L’agent plaça l’essentiel de l’argent de la retraitée malchanceuse en
actions Internet, technologiques et en OPCVM. Dans le sillage de la « ruine » du trader,
la valeur du portefeuille de la dame plongea jusqu’à ne plus valoir qu’un dérisoire
montant de 38 000 dollars.
Appâtés par le baratin commercial des brokers et leurs promesses sans lendemain, ils
sont devenus les victimes de placements douteux basés sur l’hyperactivité, les
commissions généreuses, le « market timing » et les entreprises de qualité médiocre.
Toutes ces histoires se sont déroulées sous les auspices de la « gestion professionnelle
de l’argent ».
La plupart d’entre nous sommes, à un moment ou à un autre, attirés par les boniments
commerciaux promettant monts et merveilles, les formules supposées nous dévoiler les
arcanes de la Bourse, et les invitations à investir dans des entreprises qui n’ont pas fait
leurs preuves. Lisez l’« attaque » du communiqué suivant : « Investir dans ces titres
aujourd’hui pourrait représenter l’occasion de gagner des plus-values substantielles.
Imaginez ce qui aurait pu se produire si vous aviez investi dans Exxon-Mobil ou l’une
des compagnies énergétiques majeures lorsqu’elles en étaient encore à leurs
balbutiements ! »
Voyez-vous les nuances introduites par les termes « pourrait » et « imaginez » ? Vous
devez être armé d’une bonne dose d’expérience – et de discipline aussi – pour ignorer
les séduisants discours commerciaux qui jouent sur vos émotions (et prennent grand
soin d’éviter de s’engager sur des promesses concrètes). Vous devez suivre les
fondamentaux de l’investissement intelligent épousés et pratiqués par Warren Buffett. En
procédant de cette façon, vous mettez de votre côté toutes les chances de voir vos
placements croître et prospérer plutôt que de dépérir.
Charlie Munger affirme que : « Des avantages énormes attendent l’individu qui réalise
Pour finir, faites très attention aux coûts associés à vos placements. De nos jours, il
existe quasiment des centaines de fonds « no load » (sans frais d’acquisition), et les
opérations sur actions sont pratiquement devenues un service courant. Alors, il n’y a
réellement aucune raison de payer des commissions pénalisantes pour vos opérations
sur les parts de fonds ou les actions.
Veillez à ne pas vous engager sur les propositions du mauvais type de « conseiller » en
placements. Prenez en considération les conseils suivants qui vous aideront à ne pas
devenir la victime de types de procédés qui ont principalement pour but de séparer les
investisseurs de leur argent :
Si cela a l’air trop beau pour être vrai, il est très probable que cela le soit
véritablement. Méfiez-vous des promesses de richesse immédiate et de profits
mirobolants. Elles s’accompagnent la plupart du temps de risques stratosphériques. Tout
aussi négativement, elles incluent presque toujours de généreuses commissions
destinées à la personne qui vous vend cet investissement « à ne pas rater ».
▶ Tirez parti des erreurs d’autrui, conseille Buffett. Vous n’avez aucune raison de
revivre les épisodes malheureux que d’autres ont traversé avant vous.
1 Fonds dont l’émission et le retrait de parts sont soumis à des commissions élevées.
ar ses mots et ses actions, Warren Buffett a posé les jalons d’un parcours destiné à
P être suivi par d’autres investisseurs. En suivant les conseils de Buffett,
l’investisseur moyen peut mettre en œuvre un investissement intelligent et obtenir
les résultats recherchés, sans dépendre des services d’un professionnel.
Passons en revue les fondamentaux de Buffett. Il aime que les choses restent simples et
faciles. Il évite la complexité et la difficulté. Il ne faillit pas à la règle qui consiste à
investir dans ce qu’il comprend, à l’exclusion de tout le reste. Il ne réalise jamais de
placements situés en dehors de son cercle de compétence.
Il respecte une discipline stricte qui consiste à ne chercher à frapper que les balles qui
sont dans la zone « optimale ». Il rejette l’hyperactivité et recommande au contraire des
longs intervalles d’inactivité. L’idée d’une vingtaine de décisions au total prises au
cours d’une vie lui semble tout à fait acceptable. Pour lui, maîtriser l’art de ne rien faire
fait partie du jeu.
L’« approche Buffett » de l’investissement n’est pas une méthode pour s’enrichir du jour
au lendemain. C’est au contraire un programme pour s’enrichir lentement. Il faut du
temps pour que le gland se transforme en chêne.
Avoir le bon tempérament est crucial. Plus précisément, un investisseur doit toujours
raison garder, dans les bons comme dans les mauvais moments. Il doit conserver –
contre vents et marées – les titres qu’il possède dans des entreprises de qualité
disposant d’une équipe de direction compétente. Un investisseur doit toujours garder un
œil sur l’entreprise, son management, et sa valeur intrinsèque.
Une action est une partie d’une entreprise, et la performance de l’entreprise finit
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toujours par rejaillir sur la performance du cours de l’action. Rappelez-vous que vous
êtes à la recherche de titres émanant de sociétés dirigées par des responsables
compétents, ayant le sens de l’éthique et pour lesquels l’intérêt de l’actionnaire est
primordial.
Vous constaterez que Wall Street est le théâtre d’une série de pratiques sans queue ni
tête. Ainsi, certains investisseurs ne jurent que par les « charts », les graphiques
boursiers et autres « outils » à court terme. Le secret consiste à ne vous occuper ni des
graphiques ni d’autres éléments qui ne concerneraient pas la valeur réelle d’une
entreprise.
Ne cédez pas à leurs sirènes et soyez celui qui révèle (ou du moins constate) que le roi
(de Wall Street) est nu. Évitez les entreprises « high-tech » au futur incertain et ciblez
les sociétés « low tech », ces entreprises de type « franchises » entourées de douves
profondes qui génèrent en permanence des revenus solides et une capacité
d’autofinancement, tout en évitant d’avoir recours à de gros investissements en capital.
Ce sont ces entreprises-là qui occuperont encore la scène d’ici une dizaine d’années.
Cultivez de bonnes habitudes de lecture, telles que celle d’un solide quotidien
économique, et tenez-vous au courant de l’actualité des entreprises. Vous obtiendrez
ainsi les données qui formeront la base d’une réflexion indépendante. La connaissance
de ces données et la réflexion – et non pas les opinions d’autrui – détermineront si vous
avez raison ou tort.
Les rapports annuels de Warren Buffett sur BerkshireHathaway.com ont été une mine
inépuisable d’informations tout au long de la rédaction de ce livre et représentent une
lecture incontournable. Les livres suivants sont des sources d’information fantastiques
sur Buffett et Berkshire Hathaway : « The Making of an American Capitalist » par
Roger Lowenstein et « Of Permanent Value » par Andrew Kilpatrick.
Sanjeer Parsad constitue une autre excellente source d’informations sur Warren Buffett.
Pour en savoir davantage, consultez le site Internet :
groups.msn.com/BerkshireHathawayShareholders.