Cours Complet 1

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CM : Droit constitutionnel Semestre 1

Syllogisme : c’est la recherche de l’application d’une norme de portée générale à une


situation particulière.

Hans Kelsen, avec sa théorie : le droit c’est une matière particulière avec ses méthodes.
Le droit se fonde sur le principe de l’imputation et non de causalité. Le droit est une
science autonome : si un évènement se produit, un autre devra se produire et c’est le
droit qui devra intervenir (Exemple : une personne qui vole, elle sera punie).
Ce qui, de fait, exclue la morale et la religion.

Ensuite, H. Kelsen a aussi institué la notion de « Hiérarchie des normes » : (la norme est
une règle qui prescrit certains comportements et qui suppose l’hypothèse d’une sanction
en cas de manquements). Pour qu’une norme soit valide, il faut qu’elle soit
nécessairement conforme à la norme qui lui est supérieure. (Cf La pyramide de la
hiérarchie des normes).

La Constitution détermine le contenu des autres normes juridiques. (Article 16 à regarder)

Ouvrages à consulter :
Julien Boudon,

Dictionnaire du droit constitutionnel : Armel Le Divellec, Michel de Villiers

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CM : Droit constitutionnel Semestre 1

CM : Droit constitutionnel
Chapitre 1 : Les fondements théoriques du droit
constitutionnel moderne
Introduction : Le pouvoir politique, objet du droit
constitutionnel moderne
1. Ses origines
L’un des enjeux centraux du droit constitutionnel moderne est d’étudier et de comprendre
les constitutions politiques des États. Le pouvoir politique qui est naturel, à la plupart des
sociétés humaines, s’est certes organisé de manières di érentes selon les époques. Il
n’en demeure pas moins que l’organisation politique des sociétés, si l’on observe la carte
du monde, s’e ectue de nos jours selon une division géographique en États. L’essentiel
des règles d’organisation et de fonctionnement de ces États se retrouvent principalement
réuni dans un acte juridique et politique fondateur, que cet acte exprime une volonté
écrite ou une tradition : la Constitution. Dans certains pays, la constitution n’est pas écrite
: c’est le cas du Royaume-Uni, où on retrouve la constitution coutumière.
Le pouvoir politique rend compte des rapports de commandements et d’obéissance qui
existent dans toutes sociétés humaines. Il ne s’agit pas ici des rapports de soumission de
l’enfant vis-à-vis de ses parents, ni des rapports de subordination de l’employé vis-à-vis
de son employeur, mais d’une relation asymétrique entre gouvernants et gouvernés qui
est déterminée par une nalité : garantir au groupe social son identité, sa cohérence et sa
permanence. Dès lors, l’activité politique a bien pour objet de construire, de consolider et
de conserver un groupe social déterminé. Cela se traduit notamment par la citoyenneté.
On le disait, la relation est asymétrique dans la mesure où les membres du groupe social
acceptent, en principe, les règles édictées par les titulaires du pouvoir. La nature de ce
consentement a été exploré par les penseurs du contrat social.

2. Sa formalisation : les théories du contrat social


Cette conception du pouvoir politique, comme formalisation du consentement des
individus à faire société, renvoie aux théories classiques du contrat social. On peut ici
retenir 3 grandes oeuvres :
- Le Leviathan, Thomas Hobbes (1651)
- Traité sur le gouvernement civil, John Locke (1690)
- Du Contrat social, Rousseau (1762).
Chez Hobbes : l’État de nature (c’est une ction selon laquelle il y aurait un État
entre les hommes avant la société, avant le regroupement des hommes au sein d’une
communauté avec des règles)( ction =/= abstraction) se caractérise par la violence de
tous contre tous, selon la fameuse citation : « L’Homme est un loup pour l’Homme ».
C’est la raison pour laquelle les individus, selon Hobbes, décident de se lier, de se
rassembler pour mettre un terme à cette situation d’insécurité chronique. Les individus se
regroupent au sein du Leviathan, autorité politique absolue et consentent à perdre une
part de leur liberté a n que ce Leviathan puisse garantir leur sécurité et leur propriété. Ils
décident : « de con er tous leurs pouvoirs et toutes leurs forces à un seul homme ou à
une seule assemblée ». On comprend ainsi que, puisque les individus renoncent à leur
liberté, pour leur sécurité, le propos de Hobbes annonce de manière évidente les thèses
autoritaristes. Surtout Hobbes théorise d’une certaine manière l’État monarchique
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absolutiste du 16ème siècle et du 17ème siècle, dans lequel l’autorité politique s’incarne
quasi-exclusivement dans la personne du Roi.
La perspective de John Lock est tout autre. Elle part du principe selon lequel les
individus prospèrent/vivent paisiblement dans l’État de nature, sans pour autant que ne
soient empêchées des situations de domination. La société, dit Locke, devient politique,
civile, lorsque les individus passent entre eux un pacte pour renoncer à une part de leur
liberté, a n que l’autorité politique assure la paix entre eux et leur permette de béné cier
et de pro ter de leur propriété privée du fruit de leur travail. Il reste, selon Locke, que les
individus n’abandonnent pas leur droits naturels fondamentaux. Aussi, ils pourront
exercer, si l’autorité politique dépasse le cadre de ses pouvoirs, leurs droits de résistance
à l’oppression. (Locke va être selon celui qui va pré gurer l’idée des droits de l’Homme :
l’Homme est pourvu de droit car il est Homme et il est homme car il est doué d’une
conscience contrairement aux animaux.)
En France, le contractualisme politique a été particulièrement mis en lumière par
Rousseau. Il s’agit ici d’une tradition très di érente car sensiblement moins libérale. Le
contrat social est en e et, selon Rousseau, à la fois plus général et plus absolu. L’idée
peut être résumée ainsi : tout individu consent à rejoindre la société pour se soumettre
immédiatement à la volonté générale. La volonté générale symbolise le contrat social et
elle transcende/dépassent les volontés particulières. Selon Rousseau, les individus ainsi
regroupés, ainsi associés, constituent le peuple qui ne peut vouloir que l’intérêt général,
que le bien-être de tous. C’est donc une logique du groupe qui s’impose aux individus.
Dès lors, la majorité où les représentants du peuple ont nécessairement raison : « la
minorité a toujours tort ». Rousseau va inspirer en France une conception particulière de
loi : Article 6 de la DDHC pose notamment que « la loi est l’expression de la volonté
générale ». Ceci va conduire à une longue primauté formelle de la loi en France : on parle
de légicentrisme.

Ces di érentes conceptions philosophiques du pouvoir politique ont imposé la dimension


contractuelle du pouvoir. Il en ressort que la Constitution symbolise ce contrat et institue
le pouvoir de l’État, comme elle limite ce pouvoir de l’État pour protéger les libertés.

Si toute société humaine connaît une organisation du pouvoir politique, qui traduit une
légitimité particulière, ces manifestations du pouvoir politique ont pris des formes
diverses dans le temps. Il su t ici de se référer aux grands modèles historiques du
pouvoir politique :
- La cité de la Grèce antique
- l’Empire romain d’Occident et d’Orient
- La féodalité médiévale
- Les régimes autocratiques ou oligarchiques.
Ces di érents modèles ont façonné le droit constitutionnel contemporain, que l’on prenne
les notions : de cité, de peuple, d’espace public, de République.

L’in uence des grands modèles historiques se retrouve également dans les techniques de
votation et de délibération, ainsi qu’à propos de la classi cation des régimes (La
classi cation des régimes = Rechercher le critère de fonctionnement d’un régime
politique. Déterminer les rapports qu’entretiennent les institutions politiques entre elles
qui leur permettent de fonctionner régulièrement).
En n, la question centrale de la représentation politique apparaît déjà à la lumière de ses
formes historiques du pouvoir politique. On peut en rendre compte par une série de
questionnements : Le peuple est-il souverain et doit-il exprimer directement sa volonté
pour que les décisions soient prises ? Le peuple vote-t-il directement sur toute question
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qui concerne l’organisation politique de la société (référendum) ? Le peuple doit-il être
représenté par des élus censés porter, traduire sa volonté dans une assemblée
délibérante ? (Cf l’opposition mandat impératif =/= mandat représentatif). En France , on
applique le mandat représentatif depuis SIEYÈS (grand auteur de la Révolution
française) : en termes modernes, l’élu n’est pas soumis aux volontés/exigences de ses
électeurs, il n’y a pas de règles juridiques qui contraignent l’élu. Le mandat impératif
suppose à l’inverse que le mandat passé entre l’élu et l’électeur , l’élu est pris/contraint
dans l’engagement qu’il a pris auprès des électeurs et en cas de manquements :
sanctions juridiques.
Tous les membres de la société politique sont-ils aptes, capables de voter ou d’être des
représentants ?

De nos jours, le pouvoir politique s’incarne dans l’État. L’État est devenu la forme
universelle du pouvoir politique, la forme primordiale des organisations politiques. L’État
présente des caractéristiques propres qui expliquent qu’il soit devenu le modèle universel
de l’organisation du pouvoir politique. Sa spéci cité réside dans la puissance du concept
auquel il est associé, si ce n’est assimilé : le concept de souveraineté. D’un point de vue
matériel, il en ressort que l’État rassemble, sous l’autorité de sa souveraineté, une
population, un territoire sur lesquels il exerce une plénitude de compétences. Dans la
mesure où l’État détermine, dé nit sa propre compétence, un auteur de la doctrine
juridique allemande estime que l’État souverain dispose « de la compétence de la
compétence » (JELLINEK). Ainsi, la souveraineté de l’État constitue un titre pour exercer
une compétence illimitée et se spéci e par la capacité qu’elle donne à l’État de délimiter
sa propre compétence.
NB : On oppose le critère matériel (contenu d’une norme, d’une règle) au critère formel
(se fonde sur la procédure d’adoption de la norme).
D’un point de vue formel, l’État est classiquement présenté grâce à deux hypothèses qui
ne sont plus exclusives :
- Soit l’État est unitaire, comme en France, c’est-à-dire qu’il est doté d’un ordre juridique
centralisé, dont les normes s’imposent sur celles que prennent les autorités locales,
c’est-à-dire dans le cas français les autorités déconcentrées et les autorités
décentralisées.
- Soit l’État est fédéral, comme aux USA ou en Allemagne, c’est-à-dire qu’il est
caractérisé par la coexistence d’un ordre constitutionnel fédéral et d’ordres
constitutionnels propres à chaque État membre ou fédéré.
Cette présentation binaire appelle bien des nuances. Il y a, dans l’État unitaire français, un
processus de décentralisation qui s’accentue et qui confère de plus en plus de
compétences aux collectivités territoriales. À l’inverse, il y a aux USA un phénomène de
centralisation du droit constitutionnel que l’on peut repérer dans les décisions de la Cour
suprême. En n, la distinction est encore davantage remise en cause par l’apparition
d’États dits régionaux que l’on retrouve en particulier en Espagne et en Italie. Ces États,
dits régionaux, sont a priori centralisés mais ils s’approchent de plus en plus du
fédéralisme, voire de la scission notamment pour ce qui concerne l’Espagne et du cas
particulier de la Catalogne.
En ce qui concerne l’Union européenne, elle présente des caractéristiques proches de
l’État fédéral mais elle reste ce que l’on appelle une organisation sui generis, tant elle
n’existe pas en tant qu’autorité autonome et souveraine pouvant décider de son avenir.

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L’État reste la référence indépassable de l’organisation du pouvoir politique. C’est
particulièrement parce qu’il est souverain qu’il détient l’autorité pour disposer du
monopole de la violence physique légitime (Max Weber), que l’État est devenu l’objet
d’étude du droit constitutionnel moderne. Dans ce cadre, les constitutions modernes sont
pour l’essentiel des documents ou des pratiques politiques codi ées (Royaume-Uni) aux
termes desquels sont établies les règles qui instituent et constituent l’État. Les
constitutions modernes sont, depuis les révolutions de la n du 18ème siècle, des textes
qui organisent le pouvoir dans l’État a n d’éviter toute transformation autoritaire du
pouvoir. L’État doit être limité et ne pas être considéré comme une n en soi, mais
comme un moyen technique et normatif permettant de préserver les libertés individuelles.
Ce mouvement libéral renvoie au concept de constitutionnalisme. La constitution a donc
pour objectif central de xer les règles de la compétition politique paci que qui
permettront l’exercice du pouvoir dans l’État. Aussi, cette constitution indiquera les
libertés fondamentales que la justice constitutionnelle imposera au pouvoir étatique.

Le droit constitutionnel moderne repose en conséquence sur une étude du pouvoir


politique. C’est la raison pour laquelle il s’agira d’appréhender en premier lieu le siège du
pouvoir politique moderne qu’est l’État (Section 1), en second lieu, il faudra examiner,
saisir le socle qui permet l’exercice de ce pouvoir politique moderne qu’est la constitution
(Section 2).

Section 1 : Le siège du pouvoir politique moderne : l’État


Il faut ici en premier lieu, aborder l’apparition de l’État moderne comme expression d’une
autorité politique souveraine qui produit le droit. Il s’agira ensuite d’analyser les
composantes matérielle et formelle de l’État.

1. L’apparition de l’État moderne


La naissance de l’État, dans son acception moderne, peut être datée du début du 16ème
siècle si on se réfère à l’apparition du vocabulaire lié à l’État. Le terme « Status » (= État
en latin) apparait tout d’abord dans un grand ouvrage Le prince de Machiavel (1513),
dans cet ouvrage, le mot « État » semble indistinctement signi é « République » ou
« principauté ».
C’est surtout Jean Bodin, dans un ouvrage intitulé Les 6 livres de la République (1576) qui
utilisera le terme « État » dans son sens moderne. Dans ce texte, il est en e et question
d’une république dans laquelle un gouvernement soumis au droit maîtrise la chose
publique (intérêt général) par l’attention portée à la population, ce gouvernement
disposant de la souveraineté. La souveraineté est la notion qui spéci e l’État moderne et
qui fonde la particularité de sa personnalité juridique.

A. La souveraineté de l’État
1) La construction historique et théorique de la souveraineté de l’État
Dans le cadre de la Monarchie française d’Ancien régime, la notion de souveraineté est
apparue pour soutenir les prétentions royales en vue d’exercer un pouvoir exclusif et
suprême. Ce pouvoir lui était contesté, à la fois par les grands seigneurs, qui s’avéraient
parfois plus puissants que lui, et par les revendications impériales et papales qui
prétendaient exercer un pouvoir supérieur. Trois phénomènes vont permettre l’apparition
de l’État moderne à la n du Moyen-Âge, c’est-à-dire vers la n du 15ème siècle.
3 phénomènes :

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Il s’agit tout d’abord du processus au terme duquel le pouvoir du monarque passe
d’un statut patrimonial à un statut institutionnel. Cela implique que le roi devient en lui-
même une institution abstraite, en plus d’être un homme au sens physique. Ce processus
renvoie à la thèse des 2 corps du roi de l’historien KANTOROWICZ, selon cette thèse, le
roi dispose donc d’un corps physique en tant qu’individu et d’un corps mystique qui fait
de lui l’institution titulaire de la souveraineté. Ainsi, si le roi corps physique meurt, le roi
corps mystique survit. Cette institutionnalisation qui est une ction permet en réalité la
permanence de l’institution monarchique et explique une célèbre formule « Le roi est
mort, vive le roi ».
En second lieu, une fois cette transformation opérée, un phénomène de
centralisation du pouvoir se produit à mesure que la monarchie française s’absolutise. La
division du pouvoir féodal cède face à la monopolisation du pouvoir et à l’uni cation de
l’espace territorial.
En n, l’origine du pouvoir cesse d’être purement mystique ou religieuse. Un
phénomène de sécularisation du pouvoir apparaît, dans la mesure où la volonté divine
n’est plus systématiquement convoquée pour fonder l’action du pouvoir monarchique.
C’est ainsi que Dieu n’est plus systématiquement la source des décisions judiciaires. Et
surtout que les volontés des sujets commencent à être prises en considération dans la
production du droit de l’État : apparition des cahiers de doléance.

Il faut surtout retenir que l’État moderne prend sa signi cation juridique au terme de
l’institutionnalisation du pouvoir politique. L’État apparaît véritablement lorsqu’il se
détache de la personne même du monarque pour acquérir un statut propre, autonome et
durable, distinct du patrimoine du roi et dépassant l’existence de ce dernier. Une étape
décisive sera accomplie au cours du 15ème siècle, avec l’apparition du concept de
couronne. La couronne va devenir une notion juridique autonome, dépassant donc l’objet
symbolique, notion qui va désigner des droits réels et personnels qui appartiennent et qui
caractérisent la fonction royale et non le roi lui-même.
Droit réel : droit qu’on exerce sur une chose (exemple : droit de propriété).
Droit personnel : pouvoir conféré à une personne d’exiger quelque chose à une autre
(exemple : droit de créance).
Cette notion a été illustré par l’idée d’indisponibilité de la couronne, ce qui implique que
le roi n’est pas le propriétaire de sa fonction royale. Ainsi, le roi ne pourra pas y renoncer
durant sa vie, il ne pourra pas davantage céder son pouvoir politique à une puissance
étrangère. De plus, les règles de succession au trône lui interdisent de désigner son
successeur : il s’agira nécessairement de son ls le plus âgé, de confession catholique.
En n, le royaume en tant que territoire est inaliénable (ce qu’on ne peut s’approprier), cela
conduit à penser l’existence d’un domaine public qui échappe donc à toute volonté
d’appropriation.
Au terme de ce processus, l’État devient donc un pouvoir politique autonome, mais
également le lieu politique où se concentre ce pouvoir unique et suprême. c’est dans
cette perceptive que la monarchie française a progressivement absorbé les di érentes
manifestations de pouvoir, non seulement d’un point de vue territorial, mais également du
point de vue de l’unité du peuple. Deux instruments y ont concouru : l’application
uniforme du droit d’une part, et l’obligation administrative d’utiliser la langue française sur
tout le territoire : Ordonnance de VILLERS COTTERETS. Il en ressort que l’État nit par
posséder la puissance ultime (potestas, en romain) et la plus haute autorité (auctoritas ,
en romain).

Si l’unité territoriale française est désormais évidente, l’unité de la population française ne


s’est faite que progressivement. Cette particularité tient à la persistance de langues
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régionales, mais également aux conséquences du processus de décolonisation qui a
engendré des revendications à l’auto-détermination de certains territoires ou actuels
départements d’outre-mer. Certains de ces territoires béné cient d’un régime juridique
dérogatoire, c’est notamment le cas de la Nouvelle-Calédonie ou se trouve une
assemblée délibérante habilitée à prendre/voter des « lois du pays ». Ces lois ont le
même statut que celles votées par le parlement national, pour autant elles ont un champ
d’application local et elles sont automatiquement controlées par le Conseil
constitutionnel.
Plus généralement, la France repose sur l’idée de nation, c’est-à-dire sur une volonté
commune de « vivre ensemble » (Ernest RENAN), il s’agit ici d’une construction
symbolique, supposée rassembler les Français autour de convictions et de valeurs
républicaines. Cette association de l’État à la Nation a conduit à l’idée d’État-nation qui
tend à associer l’unité du pouvoir et l’unité culturelle de la population sur un territoire.

En n, on se contentera ici de préciser que la sécularisation du pouvoir en France s’est


longtemps heurtée contre le principe de la catholicité. Pour autant, l’idée de
l’indépendance du roi de France, vis-à-vis de l’église de Rome, a été très tôt défendu,
dès le 13ème siècle, pour favoriser la constitution d’une église de France : c’est ce que
l’on appelle le gallicanisme. Il n’en demeure pas moins que la véritable sécularisation du
pouvoir par l’État ne sera pleinement atteinte qu’avec la loi de 1905 qui pose le principe
de séparation de l’Église et de l’État : cette loi va donner naissance au principe de laïcité,
qui est un principe désormais constitutionnel : qui pose l’autonomie du religieux vis-à-vis
du politique avec pour seule contrainte politique, à l’encontre du religieux, qu’est la
protection de l’ordre public.

2) La signi cation juridique de la souveraineté de l’État


Il est ici possible de distinguer deux approches juridiques de la souveraineté de l’État :
• une dé nition matérielle d’une part,
• une dé nition strictement juridique d’autre part.
Concernant la dé nition matérielle de la souveraineté de l’État, elle a été donné par
l’auteur Raymond Carré de Malberg. Cet distingue deux types de souveraineté de l’État :
- Souveraineté externe : elle établit/pose que l’État souverain n’est pas subordonné,
soumis à une quelconque puissance extérieure. En conséquence, les États, quelle que
soit leur taille, sont strictement égaux dans l’ordre international. Cette souveraineté
externe est en quelque sorte négative, en ce sens qu’elle se dé nit comme une
indépendance qui traduit une incapacité extérieure de remettre en cause la puissance
de l’État.
- Souveraineté interne : du point de vue interne, la souveraineté étatique retrouve cette
fois une dimension positive car il s’agit de considérer la primauté de l’autorité politique
sur toute autre volonté, aussi bien individuelle que collective, au sein du territoire
étatique. Est reformulée ici l’idée selon laquelle l’État est l’entité qui dispose du
monopole de la violence physique légitime, sur sa population. Ainsi, la souveraineté
interne implique que l’État exerce une puissance suprême sur son territoire.
À l’évidence, ces deux types de souveraineté sont interdépendants. La souveraineté
externe exprime, aux yeux des autres États, la souveraineté interne qu’est supposé
exercer un État sur son territoire. La reconnaissance de l’une ne va pas sans la
reconnaissance de l’autre.

En plus de cette dé nition matérielle, il est possible de retenir une dé nition strictement
juridique de la souveraineté de l’État, plus limitative, cette approche consiste à poser, à
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retenir qu’est souverain le pouvoir qui dispose « la compétence de la compétence »
(JELLINEK). Autrement dit, est souverain le pouvoir qui peut dé nir librement l’étendue de
sa propre compétence. Ainsi, il ne s’agit pas d’une simple somme de compétences, qui
pourraient d’ailleurs être illimitées, mais principalement d’une aptitude, d’une capacité à
en établir librement le contenu. Dans la continuité, Kelsen estime que l’État constitue un
ordre juridique centralisé qui produit des normes et qui habilite des institutions à faire
appliquer ces normes. En cela, l’État est un ordre normatif reposant sur la contrainte qu’il
émet en tant que centre d’impulsion. Certains auteurs ont très tôt cherché à limiter ce qui
semble être une hypothèse d’une toute puissance de l’État, c’est JELLINEK, encore lui,
qui va produire la théorie de l’auto-limitation de l’État : selon Jellinek, l’État s’auto-limite
en ce sens qu’il s’engage à respecter l’ordre juridique qu’il a lui-même instauré.

B. La personnalité juridique de l’État


L’État souverain dispose d’une personnalité juridique, dans la mesure où il est une
personne morale en tant que centre de production de droits et d’obligations qui ne se
confondent pas avec les droits et obligations que le droit reconnaît aux agents de l’État.
L’État est autonome des agents qui oeuvrent pour lui, il est un sujet de droit particulier qui
peut émettre des obligations, revendiquer des droits qui le concernent lui-seul et non ses
agents. C’est ici la particularité de la personnalité morale de l’État qui permet la
reconnaissance d’un patrimoine propre de l’État qui pourra supporter la réparation des
dommages causés par ses agents dans leurs missions de service public. En outre, cette
personnalité morale ouvre la possibilité pour l’État de s’engager envers d’autres États,
dans le cadre de conventions internationales.
Personnalité morale : capacité juridique qu’on va octroyer à une entité qui va pouvoir être titulaire de
droits et obligations, cela à la place des personnes/membres qui composent cette entité (exemples :
associations, sociétés, etc).
L’État souverain dispose bien d’une personnalité et est aussi soumis au principe de
continuité de l’État. Ce principe rejoint théoriquement celui de la permanence du pouvoir
royale. Il exprime le fait que l’État perdure au-delà de la vie de ses agents et au-delà des
circonstances qui amènent les gouvernants à quitter le pouvoir au béné ce d’autres. Ce
principe de continué de l’État conduit à garantir la validité des conventions internationales
dans le temps et à permettre la satisfaction permanente des missions d’intérêt général,
ce qui vise ici le principe de continuité des services publics.

II. Les composantes matérielles et formelles de l’État


A. Les conditions matérielles de l’État :
1) Un territoire, une population, une autorité politique souveraine
Le territoire, en premier lieu, dé nit matériellement l’État à la lumière de trois conditions
dont on va voir qu’elles ne sont pas toujours observables. Il s’agit d’abord d’une
condition de stabilité du territoire qui peut être sans cesse remise en cause au regard de
plusieurs phénomènes :
- annexion
- Sécession —> Scission
- Cession : c’est l’achat d’un territoire
- Dislocation : Par exemples : la Yougoslavie en 1990, la Tchécoslovaquie en 1995
- Disparition d’un territoire.
Ensuite, il est possible de retenir une seconde condition de continuité du territoire qui
implique une certaine unité facilitant les accès et les communications. Là également

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existent plusieurs exceptions : certains États étant constitués d’archipel, c’est notamment
le cas de l’Indonésie, les Maldives.
En n, le territoire de l’État se conçoit par une application indistincte de la loi sur
l’ensemble de ce territoire. Il faut ici mettre de côté le fédéralisme qui, on le verra, tolère
des législations di érenciées dans les États fédérés. Pour autant, il existe des entorses à
ce principe dans les États centralisés. En France métropolitaine, les ministres du culte en
Alsace-Moselle sont des fonctionnaires d’État (les prêtres, les rabbins et la question s’est
posée sur les imams et le Conseil constitutionnel a décidé que ces derniers ne pouvaient
pas avoir ce statut).
Le territoire de l’État permet de délimiter la compétence étatique de manière théorique,
l’État est souverain sur son territoire. Toutefois peut, de lui-même, accepter de limiter la
maitrise de son territoire. On peut ici songer aux accords de Schengen (1985), on peut
également citer l’exemple du mandat d’arrêt européen de 2003 qui permet, sous l’autorité
d’interpole, d’arrêter un individu recherché dans un autre territoire.
En second lieu, la population dé nit à son tour l’État par la création d’une communauté
de vie ou de destin. La population est donc l’élément humain de l’État qui se rassemble
autour de valeurs, de symboles fédérateurs. La population s’exprime désormais
principalement par le biais de représentants élus qui délibèrent et adoptent les décisions
politiques fondamentales. La population conduit à penser deux notions : celle de
nationalité d’une part, et celle de citoyenneté d’autre part. S’agissant de la nationalité, elle
est librement établie, par chaque État, au regard de règles de droit privé et de droit
international. En France, c’est le parlement, en vertu de l’article 34 de la constitution qui
détermine les conditions d’attribution de la nationalité. La nationalité peut être acquise
par la liation (droit du sang), ou grâce au lieu de naissance (droit du sol). La
naturalisation, qui permet donc l’acquisition de la nationalité, s’obtient au regard de
critères posés par les autorités étatiques. En France, en particulier, le mariage peut
emporter acquisition de la nationalité selon certaines conditions. S’agissant de la
citoyenneté, elle suppose un lien politique entre les nationaux d’un État et l’État en tant
qu’entité. Cette citoyenneté ouvre l’accès à l’exercice de droits civils et politiques, le plus
notable d’entre eux est le droit de vote. On précisera ici que la citoyenneté européenne
« complète » la citoyenneté nationale, puisque depuis le traité de Maastricht, les
ressortissants de l’UE vivant dans un autre État de l’UE que leur État d’origine peuvent
participer aux élections municipales et aux élections européennes après 3 ans de
résidence. En n, l’autorité politique souveraine dé nit substantiellement l’État car elle
rend compte de l’e ectivité de sa puissance. Elle pose fondamentalement la question de
la légitimité politique. Il semble que la plupart des pays occidentaux ait opté pour la
légitimité démocratique sans toutefois renoncer pour certains à la forme monarchique du
pouvoir. Deux notions fondamentales dans le cadre de la légitimité politique : c’est
d’abord l’État de droit, puis celle de droits fondamentaux. Concernant l’État de droit, il
repose sur la pré-éminence/primauté du droit sur le pouvoir politique, il suppose
l’obéissance des gouvernants et des gouvernés à la loi, étant entendu que les
gouvernants sont habilités à prendre/édicter des normes dans le respect des droits
fondamentaux et dans le respect de la contrainte que constitue la hiérarchie des normes.

À coté de l’État de droit, la légitimité démocratique moderne est également encadrée par
la notion de droit fondamentaux. Au-delà des libertés fondamentales, individuelles et
collectives, la notion prend ici une dimension procédurale. En e et, elle vise la possibilité,
pour tout justiciable, d’exiger l’e ectivité de ses droits devant un juge : Tout citoyen est
placé dans une même situation face aux droits fondamentaux et face à la sanction
judiciaire qui doit survenir en cas de méconnaissance de ces droits.
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2) Le critère fondamental de l’autorité politique souveraine


Dans la continuité des travaux de Hans KELSEN et plus récemment ceux d’Olivier
BEAUD (La puissance de l’État, 1994), il est essentiel de retenir comme critère substantiel
et décisif de l’État, le critère de l’autorité politique souveraine. En e et, le territoire et la
population ne sont pas autonomes de cette autorité politique souveraine. Cette dernière
peut sans cesse/à tout instant redé nir le droit de la nationalité (article 34 de la
Constitution) et se faisant, redé nir la population. L’autorité politique souveraine peut en
outre céder ou acquérir une portion de territoire, elle peut même envisager la conquête
d’un nouveau territoire (Exemples : Crimée. Con it entre Arménie et Azerbaïdjan). Ce qu’il
faut donc retenir, c’est que la volonté de l’autorité politique souveraine prime, prédomine,
pour matérialisé l’État, a n de rentre tangible l’État.

B. Les formes de l’État


On retient classiquement deux formes de l’État :
- L’État unitaire,
- L’État fédéral.
Toutefois, cette distinction est de plus en plus remise en cause par l’apparition d’une
catégorie intermédiaire : l’État régional.

1) L’État unitaire
Il s’agit, fondamentalement, d’un État dans lequel une seule autorité publique existe sur
un même territoire et dans lequel un seul droit s’applique à l’égard d’une population qui y
vit. Cette dé nition est bien trop théorique et elle suppose un territoire restreint, peu
étendu car le centre politique ne peut pas se démultiplier sur un territoire vaste. C’est la
raison pour laquelle l’État unitaire a évolué, a généré en deux variantes :
- L’État unitaire centralisé,
- L’État unitaire décentralisé.
Concernant l’État unitaire centralisé, que l’on a pu rencontrer dans des modèles
communistes, soviétiques mais également en France. Il s’agit d’un État dans lequel les
décisions publiques proviennent d’un centre d’impulsion de l’autorité politique (le plus
souvent la capitale) et ces décisions s’appliquent par l’intermédiaire d’agents de l’autorité
politique dans les circonscriptions territoriales (échelle territoriale des compétences du
préfet), il s’agit ici du phénomène de déconcentration. Selon ce phénomène/principe de
déconcentration, les agents des circonscriptions territoriales ne font qu’exécuter les
décisions du Centre. Il s’agit donc d’implanter, dans ces circonscriptions, des autorités
administratives représentant l’État. Parmi ces autorités déconcentrées, qui sont
dépourvues de toute autonomie et donc de la personnalité morale, on retrouve : les
préfets de département et de région, les recteurs d’académie et dans une certaine
mesure les maires des communes. Ces autorités sont nommées et révoquées par le
pouvoir central, elles sont en outre soumises au contrôle hiérarchique de l’État qui
dispose, à l’égard de ces autorités, d’un pouvoir disciplinaire qui peut permettre la
sanction, la suspension, ou la révocation (radiation) mais également d’un pouvoir général
d’approbation, d’annulation ou de substitution de leurs actes.
Le maire, on le constate, va jouer sur les deux tableaux, il est une autorité décentralisée
car il est élu et parce qu’il dispose d’une autonomie dans la gestion de sa commune.
Dans le même temps, il est une autorité déconcentrée car il est le représentant de l’État
dans la commune et qu’à ce titre, il doit veiller à l’application des règles nationales (lois et
règlements) dans la commune mais également au maintien de l’ordre public (Ordre
public = Sécurité, Tranquillité, Salubrité, Dignité).

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L’autre variante de l’État unitaire, est l’État unitaire décentralisé qui renvoie
évidemment à la notion de décentralisation. Dans ce cadre, une distinction est faite entre
les a aires qui dépendent de l’ensemble du territoire (déconcentration) et celles qui ne
concernent que l’échelon local. Dans cette seconde hypothèse, des institutions élues par
les habitants de la collectivité territoriale (échelle territoriale des compétences du
Conseil départemental ou régional) gèrent les a aires locales grâce à des compétences
propres et limitées par la loi et la Constitution, leurs décisions étant soumises au contrôle
de légalité. Les compétences de ces collectivités territoriales sont encadrées et limitées :
- Le Conseil départemental s’occupe : des a aires sociales du territoire (personnes en
précarité, femmes battues, le placement des enfants en situation di cile, les
personnes handicapées, etc); de l’entretien/gestion/ nancement des collèges; du
transport (scolaire, de personnes au sein du département).
- Le Conseil régional s’occupe : des a aires sociales de la région, de l’entretien/gestion/
nancement des lycées; le transport à l’échelle régional (TER, RER); le tourisme.
Le décentralisation est constitutionnellement reconnue comme le mode d’organisation
d’une République qui demeure une et indivisible (Articles 3 et 72 de la Constitution). En
France, ce processus de décentralisation a été enclenché à la suite de l’élection de
François Mitterand à la présidence de la République en avril 1981. Il s’agissait de mettre
en place une forme de démocratie locale. C’est dans cette perspective que les lois
DEFFERRE ont été promulgué en mars et en juillet 1982. Pour l’essentiel, ces lois
reconnaissent l’existence de collectivités territoriales élues au su rage universel, dans le
Département et dans la Région, et pourvues de compétences propres encadrées par la
loi et la Constitution (Social, collège/lycée, transports, etc). En parallèle, dans chaque
département et chaque région, le préfet continue d’avoir la charge des intérêts nationaux,
du respect des lois, de l’ordre public, et du contrôle de légalité. Ainsi, décentralisation et
déconcentration co-existent. En 2003, à l’initiative du 1er ministre de l’époque Jean-
Pierre RAFFARIN, une révision de la constitution est intervenue. Si depuis 1982, les
collectivités territoriales béné ciaient du principe de libre administration, cette liberté ne
concernait en réalité que l’organisation administrative des collectivités. En 2003, la
Région a été constitutionnalisé et les collectivités territoriales se voient attribuer des
compétences qui pourront relever du domaine législatif, cela peut apparaître comme
étant une innovation majeure. On reconnaît en e et que, lorsque l’échelon local ou
régional sera pertinent pour la prise de décisions, les collectivités territoriales pourront
s’aventurer dans le domaine du législateur : c’est le principe de subsidiarité. Pour autant,
cette innovation n’en est pas vraiment une car le Parlement qui vote la loi et le Conseil
constitutionnel pourront s’opposer à ce que les collectivités territoriales prennent de telles
mesures législatives (Article 34 de la Constitution) (article 72 aliéna 2 de la Constitution).
De plus, la révision de 2003 a ouvert la possibilité aux collectivités territoriales, lorsque la
loi ou le règlement l’a prévu, de déroger à titre expérimental aux dispositions qui
encadrent l’exercice de leurs compétences.

2) L’État régional
C’est ici une forme intermédiaire, entre la décentralisation et l’État fédéral. Autrement dit,
l’État régional repose sur la conservation d’une structure unitaire et sur l’autonomie
locale, contestant potentiellement l’unité de l’État. Le cadre de l’État régional reste celui
de l’État unitaire. Mais l’autonomie des collectivités n’est plus seulement administrative,
elle est également politique et institutionnelle, ce qui se traduit par la reconnaissance de
compétences propres, constitutionnellement garanties et de nature législative pour
certaines collectivités.

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En Italie, l’État est en principe unitaire mais la reconnaissance d’un pouvoir
législatif aux régions remet en cause cette unité. Depuis quelques décennies, le droit de
l’Union européenne est le plus souvent exécuté à l’échelon régional, ce qui accentue la
di érenciation de son application. Une révision constitutionnelle de 2001 a décomposé la
République italienne en communes, en provinces (ici, c’est l’équivalent du département
en France), en régions et en État. Ainsi, l’État est placé au même niveau que les autres
entités territoriales.
Le cas espagnol est encore plus signi catif. La constitution de 1978 reconnaît une
forte autonomie aux communautés, particulièrement aux communautés historiques que
sont la Catalogne, le Pays basque et la Galice. Pour autant, la constitution espagnole
n’envisage pas le processus fédéral. Certes, elle indique les voies d’accès à l’autonomie,
qui est considérée comme un droit à l’auto-gouvernement à la disposition des
communautés. Dans ce cadre, sont prévus pour chaque communauté : un pouvoir
législatif dans un parlement régional mono-caméral (une seule chambre au Parlement),
un pouvoir exécutif avec à sa tête le président de la communauté et ses conseillers, une
administration publique propre à chaque communauté, en n un tribunal supérieur de
justice qui demeure néanmoins rattaché à l’État central. Si ce cadre juridique paraît
s’orienter vers le fédéralisme, il n’est pas possible de reconnaître la nature pleinement
fédéral de l’État espagnol. Tout d’abord, les communautés ne disposent pas de
constitutions qui leurs seraient propres. Ensuite, on ne trouve pas, dans les institutions
nationales espagnoles, de représentation politique des communautés dans une seconde
chambre à l’échelon national. Logiquement, les relations internationales sont
monopolisées par les institutions centrales.
Un dernier exemple de la régionalisation de l’État pourrait être celui du Royaume-
Uni. En e et, au Royaume-Uni le Scotland Act et le Government Of Wales Act adoptés en
1998 ont créé des parlements régionaux en Écosse et au pays de Galles. Le premier
dispose d’un pouvoir législatif ordinaire mais délimité. Le second dispose quant à lui d’un
pouvoir législatif délégué par le parlement britannique. Toutefois, ces parlements
régionaux coexistent avec le maintien d’un système institutionnel centralisé et soumis à la
souveraineté du parlement britannique.

3) L’Etat fédéral
Le principe du fédéralisme est avant tout conciliateur. Il s’agit de faire coexister des
entités territoriales (Les États fédérés) sans leur retirer leurs caractéristiques propres.
L’organisation de l’État fédéral repose essentiellement sur deux principes : le principe de
participation d’une part, le principe d’autonomie d’autre part.
Concernant le principe d’autonomie, il permet à l’entité territoriale/au futur État fédéré,
d’a rmer son existence et de dé nir le degré de rattachement à l’unité politique. C’est
ainsi qu’il en précisera les limites et qu’il délimitera son autonomie.
Concernant cette fois le principe de participation, il se décline en deux versions : soit la
participation est dite fonctionnelle dans la mesure où les représentants des entités
territoriales se réunissent ponctuellement pour régler les problèmes communs, soit la
participation est institutionnelle, c’est-à-dire qu’il y a une représentation permanente des
entités territoriales dans une structure qu’est l’institution fédérale (Cf Sénat américain).
Cette participation s’applique à tous les domaines : rédaction et révision de la
constitution fédérale, législation (vote des lois), exécution des lois, etc.
Un autre principe peut être retenu pour saisir le fédéralisme, fondé par Georges SCELLE,
il s’agit du principe de juxtaposition qui suppose que le fédéralisme tient à la coexistence
de deux ordres juridiques concurrents : l’ordre fédéral d’un côté, l’ordre fédéré de l’autre.
L’État fédéral peut se former soit par agrégations, soit par ségrégations : dans la première
hypothèse, on est face à une union d’États, auparavant séparés, dans la seconde
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hypothèse, l’État se décentralise jusqu’à la reconnaissance aux entités locales d’une
autonomie constitutionnelle et législative. L’acte de fondation de l’État fédéral est un traité
international ou une constitution. Cet acte juridique doit être approuvé par tous les États
souhaitant intégrer la fédération. D’emblée, le fédéralisme soulève une di culté centrale.
On admet que l’État fédéré/l’entité fédérée dispose d’une forte autonomie mais qu’il n’est
plus pleinement souverain puisque la fédération empêche en principe l’existence d’un
droit de sécession (=volonté d’une entité territoriale de quitter le territoire auquel elle
appartient). De même, on ne sait plus véritablement où se situe la souveraineté lorsqu’on
aborde l’État fédéral. Si on localise la souveraineté à l’échelon fédéral, alors on tend vers
l’État unitaire. En revanche, si cette souveraineté reste aux mains des États fédérés, elle
vide la fédération de sa substance, elle ruine le principe-même de la fédération en
l’approchant d’un autre modèle qui est celui de la confédération. Dans la confédération,
les États souverains organisent une entente sur le fondement d’un traité et expriment
clairement le souhait de conserver leur souveraineté. Dans la confédération, les décisions
sont prises à l’unanimité, chaque État pouvant rejeter les entreprises de la confédération
et donc bloquer le processus décisionnel. Dès lors, la confédération suppose moins
d’engagement de la part des États.

En conclusion, il semble que le terme même « d’État » ne correspond pas, parce qu’il est
chargé de la notion de souveraineté, à la logique fédéraliste. Cette logique suppose
l’articulation entre ordre fédéral et ordre fédéré, elle suppose également la négociation
entre ces ordres, elle n’est donc pas conforme au caractère absolu et illimité de la
souveraineté étatique. Il faut donc retenir le terme de « fédération » plutôt que de celui
« d’État fédéral ». Des auteurs : Olivier BEAUD, Vlad CONSTANTINESCO, Stéphane
RIALS.

Section 2 : Le socle du pouvoir politique moderne : La


Constitution
Introduction : Les conceptions de la constitution politique
La constitution politique, c’est-à-dire le projet d’encadrement et de légitimation du
pouvoir politique, puise ses sources dans l’Antiquité. En e et, la constitution, en tant que
volonté politique de formaliser et donc de sécuriser dans un texte les règles de la vie
collective, est déjà présente dans les textes d’Aristote. Dès le 5ème siècle avant JC,
Aristote, dans La politique, livre une description historique des institutions. Il dégage trois
dimensions pour rendre compte de la constitution politique :
- Cette constitution est d’abord institutionnelle en ce qu’elle détermine l’organisation des
pouvoir;
- Elle est ensuite organique car la constitution reproduit les forces sociales;
- Elle est en n naliste parce qu’elle poursuit l’intérêt qui découle du principe
d’organisation des pouvoirs.

Au-delà de ces ré exions antiques, les premières traces écrites ayant pour objet de
dé nir les relations entre les gouvernants et les gouvernés apparaissent dans l’Angleterre
du début du 13ème siècle. Parmi ces textes, le plus notable est la Magnacarta de 1215,
texte d’autant plus fondamental qu’il est à l’origine du principe de consentement à l’impôt
et par conséquent à l’origine du gouvernement représentatif.
En 1215, le Roi Jean Sans-Terre convoque les barons et les seigneurs locaux pour leur
demander leur appui nancier et humain a n d’entreprendre les croisades. Les barons et
seigneurs vont utiliser cette demande royale pour imposer le consentement à l’impôt et
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structurer une représentation politique. Cela va leur permettre de modérer la toute
puissance royale mais également d’obtenir, de la part du roi, un renforcement des libertés
individuelles. Ce texte de 1215 sera complété, dans l’histoire politique anglaise, par deux
autres textes : Habeas Corpus de 1679 d’une part, BILL OF RIGHTS de 1688. Pour
l’essentiel, ces textes renferment une conception individualiste de la liberté, par mé ance
vis-à-vis du pouvoir royal. Les individus doivent en e et disposer de garanties pour eux-
même (sûreté individuelle), mais également ne pas craindre les abus du pouvoir royal.
C’est dans ce contexte libéral que les pouvoirs vont être distribués et que le pouvoir royal
va se trouver contrôlé par la représentation nationale, c’est-à-dire par la Chambre des
communes.

Deux conceptions de la constitution politique vont éclore au 18ème siècle : une


conception rationnelle d’une part, une conception historique d’autre part.

1) La conception rationnelle de la constitution politique


Cette conception rationnelle se dé nit par le projet de rédiger une constitution
développant une organisation des pouvoirs et consacrant une conception de l’Homme.
C’est à la n du 18ème siècle que les premières constitutions écrites et unitaires
apparaissent (unitaires car elles sont rédigées dans un seul texte avec un préambule et
des articles détaillant l’organisation des pouvoirs). On peut ici retenir la constitution de
Philadelphie de 1787 et les constitutions française et polonaise de 1791. Ces entreprises
rationnelles sont en partie la conséquence de la philosophie des lumières, largement
déterminée par les notions de raison et de volonté (Emmanuel KANT). Le souverain ou le
peuple va se choisir un texte d’organisation des rapports institutionnels et un catalogue
de droits inhérents à la personne humaine. Il va projeter dans un texte sa conception de
la société politique et de sa liberté. C’est donc une entreprise volontariste d’uni cation et
surtout de légitimation du pouvoir politique.

2) La conception historique de la constitution politique


Cette conception s’est développée en réaction à la Révolution de 1789. Elle continue
d’une certaine manière la vision d’Aristote selon lequel la constitution de la cité reproduit
la constitution d’un organisme vivant avec ses multiples organes dont il faut assurer le
bien-être et la bonne cohabitation. La constitution nit par se confondre avec la société,
conçue historiquement. Les institutions politiques doivent donc reproduire les forces
sociales, elles doivent être une sorte de photographie de la société. Dès lors, il n’y a pas
lieu de prétendre créer des institutions ou d’inventer une nouvelle conception de
l’Homme. Autrement dit, la légitimité politique, selon cette conception de la constitution,
repose sur le temps écoulé, sur l’autorité de l’histoire et donc sur le déterminisme.
Edmund BURKE écrit un ouvrage où il critique fortement la révolution de France
École historique du droit : avec l’auteur SAVIGNY. C’est un grand opposant à Napoléon.

Deux conséquences peuvent être tirées de cette analyse de la constitution : la première


c’est qu’en considérant la constitution comme une sorte de compilation de l’histoire
nationale qui déterminerait un peuple et l’ordre politique et institutionnel, la révolution
n’est pas envisageable. Il s’agit donc d’une pensée conservatrice. La seconde
conséquence est qu’en représentant la société comme un organisme, on considère que
cette dernière est hiérarchisée, dès lors cette pensée est également aristocratique.

Il reste que la notion de constitution peut être appréhendée théoriquement selon trois
points de vue : en tant que modèle théorique tout d’abord, en tant que norme
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instauratrice et susceptible d’évolution ensuite, en n en tant que source juridique des
libertés individuelles devant être protégées.

1. Les typologies théoriques de la constitution


On peut ici retenir et exposer trois grandes présentations de la constitution comme objet
théorique. Ce sont des tentatives de dé nition selon des critères alternatifs et juridiques
qui ne parviennent jamais à rendre compte de la complexité de la constitution, à la fois en
tant que texte juridique et comme réalité socio-historique. On constatera que ces
distinctions cherchent le plus souvent à isoler « l’anomalie » qu’incarne la constitution
anglaise.

A. La distinction constitution coutumière VS constitution écrite


Si la constitution écrite est unitaire, est détaillée dans un texte avec un préambule
contenant les droits fondamentaux puis une liste d’articles précisant les institutions
politiques et leurs rapports, la constitution coutumière renverrait à un droit constitutionnel
fondé sur des pratiques politiques admises en raison de leur répétition dans le temps et
du sentiment collectif de leur caractère obligatoire.
La coutume : deux éléments de dé nitions

1) répétitions dans le temps = élément matériel

2) Admission du caractère obligatoire = élément psycho/opiniojuris

Cette distinction est peu satisfaisante de nombreuses pratiques politiques, de nombreux


usages détournent coutumièrement le contenu textuel de la constitution jusqu’à en
devenir des règles (voir l’Article 8 de la Constitution actuelle). Quant aux constitutions
coutumières, elles sont quasi inexistantes puisque la plupart du temps, elles se réfèrent à
des textes historiques voire religieux et qu’elles intègrent des éléments écrits par le biais
du droit international, notamment le droit de l’Union européenne.

B. La distinction constitution matérielle VS constitution formelle


Cette distinction se centre sur l’angle par lequel on aborde la règle constitutionnelle. Du
point de vue matériel, les règles ne sont admises comme tel qu’en fonction de leur
contenu, sachant que ce contenu se limite à l’organisation des pouvoirs publics et à la
garantie des droits fondamentaux. Du point de vue formel, les règles constitutionnelles ne
sont telles qu’au regard de leur procédure d’adoption mais surtout au regard de leur seule
appartenance au texte constitutionnel quel que soit leur objet. Cela peut notamment viser
les règles de procédures et de compétences. En réalité, cette distinction/révision brouille
la compréhension de la matière. En e et, si on suit ce raisonnement, une règle
constitutionnelle du point de vue formel ne l’est pas nécessairement du point de vue
matériel, et inversement. La procédure d’adoption de la loi (prévu aux articles 40 et
suivant de la constitution) est formellement constitutionnelle, pour autant elle ne
correspond pas à la dé nition matérielle de la règle constitutionnelle puisqu’ici elle ne
correspond pas l’organisation des pouvoirs publics. La dignité de la personne humaine
n’est pas expressément visée dans le texte constitutionnel, néanmoins le juge
constitutionnel a a rmé qu’elle pouvait se déduire d’une lecture de la DDHC visée par le
préambule de la constitution. En conséquence, ce principe est matériellement
constitutionnel mais il ne l’est pas formellement. Cette distinction n’est là aussi pas très
éclairante et elle se recommande de l’application de la théorie pure du droit de KELSEN,
elle a donc un intérêt fondamentalement théorique.

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C. La distinction constitution souple VS constitution rigide
Cette distinction cherche là encore à isoler le cas anglais, on la doit à un juriste et
historien britannique James BRYCE. Selon cette distinction, une constitution est souple
lorsque la procédure de révision est identique à l’adoption législative, c’est
particulièrement le cas du Royaume-Uni. À l’inverse, une constitution est rigide lorsqu’elle
implique une procédure de révision plus contraignante, ce qui est le cas de la quasi
totalité des constitutions écrites modernes (USA, France, Allemagne par exemples).

Pour conclure, on constate assez aisément que ces distinctions complexi ent l’étude de
la constitution, tout en appauvrissant l’analyse de la notion. On peut simplement y
percevoir un intérêt pédagogique et théorique.

2. Le pouvoir constituant
L’étude du pouvoir constituant se centre sur le processus de création et de
transformation de la constitution. D’un coté, le pouvoir constituant originaire viserait le
pouvoir inconditionné d’une autorité en vue d’édicter une constitution. De l’autre, le
pouvoir constituant dérivé serait le pouvoir dont une autorité est investie a n de modi er
la constitution, ceci en vertu d’une habilitation de cette même constitution.

A. Le pouvoir constituant originaire


C’est le point de départ ici d’une nouvelle constitution coïncidant avec l’apparition d’une
nouvelle légitimité qui n’est plus liée par les expériences antérieures. Ce pouvoir originaire
est absolu, souverain et discrétionnaire car il est légitimé en vue d’un nouvel ordre
constitutionnel. C’est ici le cas évident des conséquences d’une révolution, révolution qui
prétend introduire une nouvelle souveraineté politique. Dans une autre perspective,
notamment celle de la restauration monarchique en 1814-1815, c’est le monarque qui
impose de manière autoritaire une charte constitutionnelle à ses sujets : on parle alors
d’octroi de la charte.

Dans un cadre démocratique, le pouvoir constituant originaire renvoie en principe au


peuple selon des modalités diverses et avec l’éventuelle intervention d’assemblées
représentatives. Trois situations peuvent être distinguées dans ce cadre et à la lumière de
l’histoire constitutionnelle française. La première d’entre elle est ce qu’on peut appeler le
plébiscite constituant, dans cette hypothèse le peuple est appelé à rati er une
constitution faite sans sa participation ni celle de ses représentants, on retrouve ici la
constitution napoléonienne de 1799 (Constitution du 22 Frimaire an VIII), la constitution
de 1958. La seconde hypothèse, plus connue, est celle de l’assemblée constituante, dans
ce cadre une assemblée est élue par le peuple en vue d’élaborer une constitution et de
l’adopter par son propre vote, deux exemples : la Constitution révolutionnaire de 1791 et
s’en suivent aussi les Lois constitutionnelles de 1875 qui forment la 3ème République.
Troisième hypothèse est celle du référendum constitutionnel selon lequel une assemblée
élue élabore une constitution que le peuple sera amené à rati er par référendum, deux
exemples : la première constitution républicaine de 1793 (qui n’entrera jamais en vigueur),
et surtout la constitution de la 4ème République adoptée en 1946.

B. Le pouvoir constituant dérivé


Ce pouvoir réside de manière assez simple dans la procédure de révision de la
Constitution que le pouvoir constituant originaire a instauré. Si la Constitution doit rester a
priori stable, elle peut parfois être modi ée si les circonstances l’exigent. Il faut toutefois
préciser que la compétence de révision est un pouvoir institué par le pouvoir constituant
originaire. Cette compétence est donc limitée puisque ressortant d’une habilitation mais
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également parce que le pouvoir constituant dérivé ne peut en principe totalement réviser
la Constitution. Il existe plus largement des limitations à l’exercice du pouvoir constituant
dérivé. On peut retenir, en se fondant sur l’article 89 de la Constitution, trois types de
limites :
En premier lieu, la révision est soumise à des limites procédurales. L’article 89
prévoit tout d’abord une initiative partagée de la révision, la révision peut être enclenchée
soit par les parlementaires, soit par le Président de la République sur proposition du
Premier ministre. Ensuite, le projet (vient de l’exécutif) ou la proposition (vient du législatif)
de loi constitutionnelle doivent ensuite être votés dans les mêmes termes par les deux
chambres législatives. Cela implique qu’une chambre peut s’opposer au texte et bloquer
la révision constitutionnelle. Si l’initiative de la révision provient du Président, ce dernier
peut décider de soumettre le projet au référendum ou de la faire adopter par le Congrès
(=réunion de l’Assemblée nationale et du Sénat), réuni à Versailles, à la majorité des 3/5
des su rages exprimés. En revanche, s’il s’agit d’une proposition de révision, provenant
donc des parlementaires, la révision ne pourra aboutir qu’au terme d’un référendum.
Au-delà de ces limites procédurales, il existe en deuxième lieu une limite
circonstancielle. Cette limite porte sur l’interdiction de réviser la Constitution : « Lorsqu’il
est portée atteinte à l’intégrité du territoire », de manière assez simple ici est exclue la
révision en cas d’occupation du territoire national ou de con its militaires entre la France
et une autre puissance. De manière connexe, il sera impossible au Président
« intérimaire » de vouloir réviser la Constitution (Président « intérimaire » = dans
l’hypothèse où le Président de la République est empêché, la Constitution, à l’article 7
prévoit que ce soit le président du Sénat qui assure l’intérim présidentielle, durant 90
jours, avant de nouvelles élections). De plus, le Président de la République ne pourra en
principe prendre l’initiative d’une révision dans le cadre de la mise en application de
l’article 16 de la Constitution qui octroie des pouvoirs exceptionnels au Président de la
République en cas de crise. Cette interdiction ressort d’une interprétation du Conseil
constitutionnel dans une décision de 1992 sur le Traité de Maastricht.
En troisième et dernier lieu, le constituant a posé l’interdiction de tout projet ou
toute proposition de loi constitutionnelle qui aurait pour e et de porter atteinte à la forme
républicaine du Gouvernement. À première vue, il s’agit d’exclure une impossible
instauration monarchique. Surtout, la notion de forme républicaine n’est pas sans poser
de di cultés. Est-elle limitative ou peut-on considérer qu’elle s’étend aux valeurs
républicaines telles que la laïcité, la fraternité ou encore le service public ? Le Conseil
constitutionnel ne nous donnera en réalité pas de réponse, il a en e et décidé et con rmé
à plusieurs reprises (jurisprudence constante) qu’il refusait de contrôler la
constitutionnalité des lois référendaires et des lois constitutionnelles (lois de révisions de
la constitution). Le Conseil constitutionnel n’est en e et pas habilité par la Constitution à
opérer un tel contrôle. Le Conseil constitutionnel refuse surtout de contrôler ces lois car
elles expriment la volonté, directe (référendum) ou indirecte (le Parlement) du peuple
souverain. Autrement dit, le Conseil constitutionnel n’a ni la compétence ni la légitimité
pour contrôler l’intention du peuple. En n, cette interdiction matérielle de réviser la forme
républicaine du gouvernement pose la question de la nature de cette disposition
constitutionnelle. On admet en e et que cette disposition ne peut pas être modi ée et
qu’elle est donc intangible. Certains auteurs en ont déduit que puisqu’elle n’est pas
révisable, elle est dessus même de la Constitution, les autres dispositions
constitutionnelles pouvant elles être modi ées. C’est dans ce cadre que ces auteurs
estiment que l’article 89 exprime une forme de supra-constitutionnalité. D’autres auteurs
contestent cette interprétation en retenant l’argument formel, selon eux c’est en vertu de
la Constitution que ces dispositions ne sont pas révisables. Cette hypothèse est prévue
par le texte, c’est donc ici une argument formaliste selon lequel c’est le texte
constitutionnel qui pose ces exceptions.
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3. Le constitutionnalisme
Pour l’essentiel, le constitutionnalisme est une notion politique et juridique dont les
origines proviennent de la tradition libérale anglaise. Contre l’absolutisme monarchique
des Stuart, un courant philosophique est né pour s’opposer à la concentration des
pouvoirs, illustré notamment par la quasi-absence de convocation du parlement au
17ème siècle ainsi que par un recours régulier aux emprisonnements d’o ce. Ce
mouvement libéral, porté par John LOCKE, va se centrer sur l’exigence de distributions
de séparation des pouvoirs, le constitutionnalisme sera renforcé par deux éléments : la
reconnaissance de la primauté formelle de la constitution et la consécration du contrôle
de constitutionnalité.

A. La séparation des pouvoirs


Ce principe de séparation des pouvoirs provient de la ré exion de J. LOCKE sur la
nécessité de diviser, de distribuer les pouvoirs a n d’éviter la concentration de ces
pouvoirs. C’est de cette idée fondamentale qu’est né ce principe qui sera attribué à
Montesquieu, alors qu’il n’emploie jamais le terme de séparation des pouvoirs. Ce
principe sera ensuite utilisé par la doctrine pour rendre compte du fonctionnement de
certains régimes politiques.
1) Un principe libéral
La séparation des pouvoirs, telle qu’elle est conçue au 18ème siècle, correspond à
l’objectif de non concentration des fonctions du pouvoirs : il faut empêcher qu’un pouvoir
puisse monopoliser et ne pas être entravé dans l’exercice de ses fonctions. La séparation
des pouvoirs implique donc que les fonctions puissent être partagées. Elle suppose
également le contrôle réciproque des pouvoirs. Ces éléments contribuent à la protection
des libertés individuelles car ils empêchent les titulaires des pouvoirs d’abuser de leur
fonction. En des termes modernes, le pouvoir législatif est con é à une ou deux
assemblées délibérantes qui votent les lois et contrôlent l’exécution de ces lois par le
pouvoir exécutif. Le pouvoir exécutif de son côté est attribué à un chef de l’État et à des
ministres, chargés d’exécuter la loi, de prendre des décisions de « commandement » tout
en pouvant s’opposer ponctuellement au vote d’une loi. En n, le pouvoir judiciaire est
censé veiller, à l’occasion de litiges, à l’interprétation et à la bonne exécution de la loi.
Ces considérations théoriques ont été développé et a né par Montesquieu. Montesquieu
a rédigé un chapitre (chapitre 6 du Livre 11 de De l’esprit des lois) dans lequel il expose
magistralement le fonctionnement régulier des pouvoirs. Il s’agit d’une pensée mécaniste,
tant sa ré exion fait penser à une horlogerie. L’idée de base de Montesquieu est que
« Les pouvoirs aillent de concert », c’est-à-dire qu’ils fonctionnent de manière
harmonieuse. Les organes du pouvoir (judiciaire, exécutif, législatif) sont certes séparés,
mais leurs fonctions peuvent être partagées. Montesquieu va particulièrement ré échir
aux mécanismes qui vont permettre la collaboration des pouvoirs et éviter les
a rontements. Pour se faire, il distingue deux facultés : la faculté de statuer d’une part,
qui dit-il « est la faculté d’ordonner par soi-même » en terme moderne de décider
souverainement; il retient d’autre par la faculté d’empêcher c’est-à-dire « de rendre nul
une résolution prise par quelqu’un d’autre ». À ce titre, Montesquieu retient deux grands
exemples : c’est tout d’abord le véto royal opposé aux lois, c’est ensuite le contrôle de
l’application des lois par le pouvoir législatif et le refus potentiel du vote du budget
nécessaire au fonctionnement de l’État. En conséquence, Montesquieu continue la
ré exion de J. LOCKE dans la mesure où il recherche les conditions du partage des
pouvoirs. Surtout, il se démarque par sa recherche d’un équilibre fonctionnel des
pouvoirs, équilibre fondé sur la menace qui doit conduire à la négociation. Montesquieu
déclare : « pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que la disposition des choses,
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que le pouvoir arrête le pouvoir (…) toute personne qui a du pouvoir est portée à en
abuser ».

2) Des interprétations dogmatiques (=doctrinales) : le modèle de la séparation


souple contre le modèle de la séparation stricte des pouvoirs
La séparation des pouvoirs a été interprété diversement par la doctrine. Il ne s’agit plus
d’envisager ici la notion dans sa dimension seulement libérale, mais de l’appliquer
comme théorie des régimes politiques. (Régime politique= principe qui gouverne le
fonctionnement des institution politiques). En l’occurence, la doctrine a opposé deux
modèles : le modèle de la séparation souple qui renvoie au gouvernement parlementaire,
et le modèle de la séparation stricte qui renvoie au régime présidentiel (américain en
l’occurence). Le gouvernement parlementaire mettrait en scène une séparation souple
des pouvoirs dans la mesure où il serait caractérisé par le partage des fonctions du
pouvoir et par l’interdépendance des pouvoirs. D’un côté, le pouvoir exécutif peut
soumettre des projets de loi et exercer une partie du pouvoir législatif, de l’autre côté, le
pouvoir législatif contrôle l’activité du pouvoir exécutif contribuant ainsi à le façonner.
Concernant cette fois l’interdépendance, il s’agit ici de retenir que chaque pouvoir
dispose d’un moyen d’action sur l’autre. Le pouvoir exécutif peut décider de la
dissolution de l’assemblée législative, cette dernière peut entrainer la démission du
gouvernement par la mise en jeu de sa responsabilité politique.
De l’autre côté, certains auteurs ont souhaité isoler le régime politique américain en le
rattachant à l’idée de séparation stricte des pouvoirs. Selon cette interprétation, le régime
américain organiserait le total cloisonnement de ces institutions. Certes, deux éléments
peuvent aller en ce sens. D’une part, aux États-Unis, on observe une non-coïncidence
des mandats, en ce sens que les organes sont élus pour des périodes di érentes. D’autre
part, on observe également une spécialisation des fonctions du pouvoir qui fait que
chaque organe exerce une fonction qui lui est propre. Il n’y a donc pas de partage des
pouvoirs exécutif et législatif. Pour autant, cette présentation est caricaturale et inexacte.
En e et, la constitution américaine prévoit des « Checks and balances » qui sont autant
d’instruments imposant une collaboration des pouvoirs. Du côté de l’exécutif, le
Président peut opposer un véto aux lois votées par le Congrès, ce dernier pouvant
renverser ce véto à une majorité des 2/3. De plus, le Président dispose d’une réserve de
compétences constitutionnelles qui lui permet d’empiéter sur le pouvoir législatif. Du côté
du législatif, le Congrès peut enclencher une procédure d’ « Impeachment » (=procédure,
de nature pénale, par laquelle la chambre des représentants met en cause le Président,
qui sera jugé devant le Sénat) contre le Président mais également contre tout
fonctionnaire de l’Administration fédérale. De même, le Sénat américain doit valider les
nominations du Président des États-unis à la Cour suprême et il doit également valider la
rati cation des traités internationaux.

Il faut donc retenir que la séparation des pouvoirs est fondamentalement un principe de
philosophie politique qui cherche à éviter l’arbitraire et à préserver les libertés
individuelles. Associée à la reconnaissance des droits de l’Homme en 1789, la séparation
des pouvoirs en est venue à dé nir la notion même de constitution, telle est la
signi cation de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen (DDHC).
C’est ici l’expression la plus nette de l’idée de constitutionnalisme qui envisage la
constitution comme instrument de protection de la liberté.

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B. La primauté de la norme constitutionnelle
1) La consécration du courant normativiste : la hiérarchie des normes
Comme cela a été vu, Kelsen a élaboré une théorie qui entendait dégager une science
autonome du droit. Grâce au principe hiérarchique, les normes s’articulent entre elles et
tirent leur validité de leur conformité vis-à-vis des normes supérieures. En somme, le droit
génère sa propre particularité et est ainsi distingué des sciences de la nature et de la
morale (ce peut être la règle religieuse mais aussi les théories du droit naturel).
Dans ce système théorique, Kelsen dissocie deux types de rapports entre les normes : un
rapport statique d’une part, un rapport dynamique d’autre part :
- Selon le rapport statique, la validité d’une norme s’évalue par sa conformité à une
norme supérieure au regard du seul contenu de la norme (critère matériel).
- Concernant le rapport dynamique, il ressort cette fois de l’habilitation par une autorité
autorisant une autre autorité à prendre/édicter un certain type de normes.
Logiquement, la norme édictée par l’autorité habilitatrice est supérieure à la norme
prise par l’autorité habilitée (critère formel).
Cette théorie de Kelsen encourt au moins deux critiques fondamentales :
Tout d’abord, il apparaît que cette volonté de considérer le droit comme une science pure
et autonome se désintéresse précisément du contenu moral, philosophique des normes.
Kelsen l’a rme : seule importe la validité et la hiérarchie des normes. Le contenu moral
n’importe pas et cela a conduit certains auteurs à reprocher à Kelsen de légitimer tout
type d’ordre juridique, que cet ordre juridique soit démocratique, fasciste ou totalitaire.
La seconde critique est davantage systémique. Dans son édi ce normatif, Kelsen estime
que la Constitution est au sommet « de la Pyramide », mais il ajoute que selon lui, il y a,
au dessus de la Constitution, une norme fondamentale, une Grundnorm dont il dit qu’elle
constitue une hypothèse logico-transcendantale. Ce que cette hypothèse renferme, selon
Kelsen, c’est l’expression du pouvoir constituant suprême et Kelsen ajoute que cette
expression peut trouver son origine dans la coutume, dans la culture juridique et politique
propre à l’État, donc à l’Histoire. C’est dire que fonder l’ordre juridique sur une norme
hypothétique qui repose sur la culture historique et politique d’un État peut di cilement
exclure des éléments moraux ou tout au moins culturels. Ainsi, la hiérarchie des normes
de Kelsen repose ultimement sur un élément culturel indéterminé.

2) La Constitution placée au sommet de l’ordonnancement juridique


La constitution, en France est la source directe ou indirecte de toutes les compétences
qui s’exercent dans l’ordre juridique. Ce constat est récent car la tradition légicentriste
(légicentrisme) a longuement prévalu en France, à tel point que l’on adaptait la
Constitution à la loi jusqu’à la n de la 4ème République. La constitution de 1958 introduit
deux innovations majeures sur ce point :
La première a pu être caractérisée de révolution juridique. Le constituant, en 1958, a en
e et délimité le champ d’application de la norme législative dans l’article 34 de la
Constitution. Il a fait de la compétence du législateur une compétence d’attribution :la
Constitution précise les normes, le champ normatif que peut emprunter le législateur.
Autrefois, le domaine de la loi n’était jamais dé ni parce que compris/perçu comme
illimité.
En second lieu, le constituant a créé une institution dont l’o ce est de contrôler la
constitutionnalité de la loi : il s’agit du Conseil constitutionnel. Était donc doublement
consacré le principe de la primauté de la norme constitutionnelle sur la loi. Si cette
supériorité de la Constitution sur la loi était d’emblée évidente, elle ne l’était pas
s’agissant des traités internationaux. La rédaction de l’article 54 de la Constitution a pu
susciter quelques interrogations : « Si le conseil constitutionnel (…) a déclaré qu’un
engagement international (…) qu’après la révision de la Constitution) ». Ce qu’il faut
comprendre de cet article 54, c’est que dans la rare hypothèse où un traité entrerait en
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contrariété avec la Constitution, le pouvoir constituant dérivé restera souverain a n de
décider d’adapter la Constitution au traité pour qu’il puisse être rati é. Du reste, un traité
qui ne serait pas conforme à la Constitution ne pourra pas être rati é et ne pourra pas
produire d’e ets juridiques dans l’ordre interne. Cette primauté de la norme
constitutionnelle sur le traité international sera explicitement a rmée par la jurisprudence
française. C’est en particulier le cas du Conseil d’État dans un arrêt de principe de 1998
SARRAN, LEVACHER et autres : dans cet arrêt, le Conseil d’État considère qu’un décret
matériellement constitutionnel ne peut pas être annulé sur le fondement de son
inconventionnalité, donc la Constitution prime sur le traité régulièrement rati é.
Distinction entre les termes « Disposer » et « Stipuler »

Stipuler
Disposer
Pour un acte juridique qui met en relation des
Pour une norme générale et impersonnelle. C’est le
parties identi ées, alors on parle de « stipuler » :
cas de : Constitution, loi, arrêtés, etc
c’est la volonté subjective.
On retrouve : le contrat, le traité.
La jurisprudence a con rmé cet état du droit en créant la notion d’identité
constitutionnelle de la France, par cette notion le Conseil constitutionnel et le Conseil
d’État répètent le principe de primauté de la norme constitutionnelle et l’oppose en
particulier au droit de l’Union européenne. Il s’agit ici d’insister sur la supériorité
normative de la constitution française mais également de mettre en lumière la supériorité
des valeurs de la constitution française, dont une n’est pas partagée par les États de
l’Union européenne : en l’occurrence la laïcité.
On précisera pour nir sur ce point que la constitution pose la supériorité relative des
traités internationaux sur les lois, en vertu de l’article 55 de la Constitution. Cet article
reconnaît cette supériorité à la condition que le traité soit formellement rati é et
également respecté par les autres États, parties au traité.

C. Le contrôle de constitutionnalité et l’État de droit


1) La garantie formelle de la primauté constitutionnelle : le contrôle de
constitutionnalité
Le contrôle de constitutionnalité, dénommé « Judicial Review » aux États-Unis est
l’instrument juridictionnel de la primauté de la norme constitutionnelle. Dans la logique
constitutionnaliste des États-Unis, il s’entend comme un contre-poids à l’action du
législateur (Congrès) qui demeurait initialement assimilé au parlement souverain de la
colonie britannique. Pour que législateur n’abuse pas de son pouvoir législatif, encore
fallait-il que sa production normative soit soumise au respect de la Constitution. C’est
tout le sens de la création de la Cour suprême, dont les membres sont nommés à vie par
le Président des États-Unis et qui s’est auto-proclamé juge de la constitutionnalité des
lois fédérales et non plus seulement fédérées dans le célèbre arrêt MARBURY VS
MADISON du 24 février 1803. On va donc ici évoquer les deux grands modèles du
contrôle de constitutionnalité :
Le modèle américain du contrôle de constitutionnalité tout d’abord présente quelques
spéci cités qui l’oppose, de manière discutable, au modèle européen apparu dans les
années 1920 à la suite de la création de la Cour constitutionnelle autrichienne sous
l’in uence de Kelsen. Il en ressort que le contrôle américain est :
- Un contrôle di us : en ce sens qu’il peut être opéré par tout juge fédéral, préalablement
à la saisine de la Cour suprême.
- Un contrôle a posteriori : c’est-à-dire que le contrôle ici est e ectué après que la loi
fédérale ait été adopté.

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- Un contrôle par voie d’exception : à savoir que l’inconstitutionnalité de la loi litigieuse
est indirectement soulevée par tout justiciable à l’occasion d’un litige.
- Un contrôle in-concreto : à savoir que seule l’inconstitutionnalité soulevée à l’occasion
d’un litige peut aboutir à l’annulation de la disposition législative litigieuse et non pas à
l’annulation de la loi dans son intégralité.
Ensuite et inversement, le modèle européen caractériserait
- Un contrôle concentré : c’est-à-dire monopolisé par une seule juridiction.
- Un contrôle a priori : c’est-à-dire avant la promulgation de la loi.
- Un contrôle par voie d’action, en ce sens que la loi est directement visée par le recours
en inconstitutionnalité.
- Un contrôle In-abstracto : en ce sens que la déclaration d’inconstitutionnalité frappe la
loi dans son intégralité.
Il s’agit là d’une simpli cation excessive qui ne prend pas en considération les
particularités de chaque juridiction constitutionnelle et le développement de techniques
d’interprétations, notamment celles des réserves d’interprétations : théorie de l’aiguilleur,
de Louis FAVOREU.

En France, la véritable justice constitutionnelle est récente car elle s’est longtemps
heurtée à la culture légicentriste. À partir de 1958, le contrôle de constitutionnalité, opéré
par le Conseil constitutionnel, correspondait au modèle européen tel qu’il a été décrit :
concentré, a priori, par voie d’action et in-abstracto. Il ne pouvait être enclenché que par
la saisine d’autorités politiques (Président de la République, Premier ministre, président
de l’Assemblée nationale, président du Sénat). Trois évolutions fondamentales doivent
être prises en considération :
C’est tout d’abord la décision Liberté d’association, rendue en 1971, par laquelle le
Conseil constitutionnel s’auto-proclame protecteur de la Constitution dans sa dimension
substantielle, en intégrant le Préambule dans les normes de référence de son contrôle.
C’est ici qu’apparait la notion de bloc de constitutionnalité, par Claude EMERI (notion
doctrinale), qui rassemble : la Constitution, la DDHC, le Préambule de la Constitution de
1946, les Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFLR) et en n
la Charte de l’environnement depuis 2004.
Seconde évolution, c’est la révision constitutionnelle de 1974 qui élargit la saisine
du Conseil à 60 députés ou 60 sénateurs. Cette révision permet une forme de politisation
du contrôle de constitutionnalité dans la mesure où elle ouvre la possibilité à l’opposition
parlementaire de saisir le Conseil constitutionnel.
Troisième et dernière évolution, c’est la révision constitutionnelle de 2008 au terme
de laquelle le constituant a posé la faculté, pour tout justiciable, de soulever l’exception
d’inconstitutionnalité d’une loi à l’occasion d’un litige : c’est la fameuse question
prioritaire de constitutionnalité (QPC). La compétence d’attribution du Conseil se trouvait
ici notablement complétée bien qu’il appartienne aux juridictions suprêmes de chaque
ordre (administratif et judiciaire) de décider de transmettre ou non la QPC selon des
motifs sujets à interprétation. Il convient toutefois de préciser que cette saisine est
matériellement limitée par l’article 61-1 de la Constitution à une atteinte présumée de la
loi aux droits et libertés que la Constitution garantit.

2) Le renforcement de la primauté du droit sur le politique : le rayonnement du


concept d’État de droit
Provenant de la doctrine allemande, avant d’être systématisée par Kelsen, la notion d’État
de droit a progressivement impliqué que les autorités politiques ne peuvent prendre de
décisions sans être habilitées par des normes, soumises au respect d’un ordre juridique
hiérarchisé et en ultime lieu aux droits fondamentaux que consacrent les constitutions
étatiques des démocraties représentatives modernes. L’État produit des normes,
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gouvernées par des règles de fond et de forme, et ne peut outre-passer le cadre de ses
compétences. Il est donc soumis au droit et plus particulièrement à la volonté du peuple
souverain qui édicte la constitution et la norme législative qui encadre son action. L’État
de droit suppose donc l’égalité des sujets de droit mais également l’indépendance de la
Justice qui précisément sera garante d’une application indistincte du droit. Dès lors, l’État
de droit confère un rôle fondamental au juge. En faisant du droit un instrument de
régulation d’organisation politique et sociale, il subordonne le principe de légitimité au
respect de la légalité. Il justi e ainsi le rôle croissant des juridictions dans les pays qui se
réclament de ce modèle.
Historiquement, l’État de droit a succédé à l’État de police qui a présidé en Europe
jusqu’à la n du 19ème siècle. Cet État de police suppose l’existence d’un État qui édicte
des normes s’imposant aux administrés mais non pas aux autorités étatiques. L’État de
droit est donc historiquement intervenu pour imposer un droit à l’État, un droit aux
autorités étatiques. Il est ainsi à l’origine du droit administratif en France, c’est-à-dire du
droit encadrant l’action des personnes publiques agissant dans l’intérêt général,
appliquant les lois et organisant l’État.

En conclusion, le constitutionnalisme, issu de la tradition libérale anglaise de combat


contre l’arbitraire du pouvoir, se dé nit à l’ère moderne par l’existence d’une constitution
écrite, pourvue d’une déclaration de droits, gouvernée par une distribution des pouvoirs
et protégée des empiètements du pouvoir législatif par l’existence d’un contrôle de
constitutionnalité des lois. On trouve-là les déterminations modernes du droit
constitutionnel occidental. On relèvera pour nir un paradoxe, c’est que ce
constitutionnalisme écrit puise ses origines dans une culture juridique historiquement
non-écrite, celle de l’Angleterre.

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Chapitre 2 : Histoire constitutionnelle française


Il s’agira d’étudier les grandes notions de la matière dans leur contexte d’apparition en
suivant chronologiquement l’évolution du droit constitutionnel français. C’est dans ce
cadre que l’on retrouvera/abordera les notions de représentation politique, de
souveraineté, de légitimité du pouvoir, d’institution politique et celle tout à fait centrale de
régime politique. À propos de la notion de régime politique, il faut ici comprendre que
cette notion vise la question des rapports entre les pouvoirs et qu’elle est donc
déterminée par une autre question qui est celle de la légitimité du pouvoir, légitimé qui
déterminera la distribution des pouvoirs.
Cette étude historique nous conduira également, par la voie comparative, à l’étude du
parlementarisme et du présidentialisme grâce à l’observation rapide des régimes
politiques britannique et américain.

Ce chapitre se proposera d’aborder tout d’abord l’oeuvre constituante de la Révolution,


c’est-à-dire la DDHC et la Constitution de 1791, ensuite, il se centrera sur les chartes
royales de 1814 et 1830, avant d’explorer la Constitution de 1848 qui a été quali é/
caractérisé de « régime présidentielle » ce qui nous permettra de faire un détour par le
régime politique américain. En n, ce chapitre s’intéressera au 3ème et 4ème Républiques
qui ont pu développer ce que Carré de Malberg appelait le « parlementarisme absolu ».

Selon certains auteurs, en particulier un grand auteur français Maurice HAURIOU au


début du 20ème, l’histoire des institutions françaises après la Révolution serait animée
par des cycles constitutionnels qui se répéteraient. Schématiquement selon HAURIOU, le
cycle de l’histoire constitutionnelle française se décomposerait en trois étapes : une
dictature des assemblées parlementaires tout d’abord, une dictature du pouvoir exécutif
ensuite, en n la résolution du con it dans l’instauration du régime parlementaire.
Concrètement explique HAURIOU, le premier cycle est identi é dans la dictature du
corps législatif instituée par la Constitution de 1793, puis par la dictature napoléonienne
au moment de la proclamation de l’Empire en 1804, en n le cycle serait terminé par la
synthèse parlementariste ouverte par la restauration monarchique en 1814 et achevée en
1830.
En somme, selon HAURIOU, le régime parlementaire permettrait de surmonter
l’opposition entre régime d’assemblée et dictature du pouvoir exécutif. Ce cycle, nous
dit-il, se répéterait entre 1848 et 1875. La Seconde république, entamée en 1848,
correspondrait à la dictature de l’Assemblée nationale que le coup d’État de 1851 arrêtera
au pro t d’un nouvel empire qui tombera à son tour en 1870 avant l’établissement du
parlementarisme républicain en 1875 (Les lois constitutionnelles de la 3ème République).

Cette théorie simpli e considérablement l’histoire constitutionnelle française, e ace des


épisodes de l’Histoire et surtout déforme la réalité historique. Le but d’HAURIOU est en
fait de théoriser, par l’interprétation historique, la légitimé du régime parlementaire.
Du reste, l’histoire constitutionnelle française, depuis 1789, est d’une immense richesse.
Elle a vu se succéder de nombreux régimes politiques, au gré des évolutions et
révolutions qui ont introduit de nouvelles légitimités du pouvoir politique :
- la nation souveraine,
- le peuple souverain,
- l’étrange synthèse du directoire,
- le pouvoir impériale,
- la légitimité du droit divin,
- la monarchie contractuelle (1830),
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- la République démocratique,
- l’empire libéral,
- le parlementarisme républicain.

Section 1 : Les travaux de l’assemblée constituante et la DDHC


1. Le contexte constituant de la Révolution
A. Le processus d’élaboration de la Constitution
Le contexte de rédaction de la Déclaration et de la Constitution de 1791 est
particulièrement agité. Outre la violence et l’accumulation des événements historiques,
les débats constituants sont également très heurtés car la période marque l’apparition
des premiers groupements politiques/idéologiques. Concernant ce processus
d’élaboration, on peut distinguer des éléments factuels et des éléments en lien avec le
projet politique des révolutionnaires.
Du point de vue factuel, le bouleversement révolutionnaire se situe dans un cadre de crise
nancière grave, à la suite notamment de la Guerre des 7 ans contre l’Angleterre, à la
suite d’une immense perte de valeur des titres nanciers et en n en raison d’une pénurie
de denrées alimentaires, provoquée par un hiver 1788 historiquement froid.
Du point de vue du projet politique, il faut d’abord préciser que l’évènement majeur n’est
pas la prise de la base de la Bastille, mais l’auto-détermination des députés du Tiers
États le 17 juin 1789 en assemblée nationale qui conduit au fameux serment du Jeux de
paume du 20 juin 1789. Ce serment radicalise l’entreprise de changement politique et
constitutionnelle. C’est à l’occasion de ce serment que Mirabeau prononce cette fameuse
phrase : « Allez dire au roi que nous sommes ici par la volonté du peuple et que nous n’en
sortirons que par la force des baïonnettes ». Peu après, l’assemblée nationale s’auto-
proclamera assemblée nationale constituante le 9 juillet 1789 a n de doter la France
d’une constitution nouvelle exprimant la rationalité des Lumières et signi ant le
changement de l’ordre politique.
En n, la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen sera consécutivement et
rapidement élaborée pour être dé nitivement adoptée le 26 aout 1789. Elle cristallise et
formalise, juridiquement, le bouleversement politique et philosophique provoqué par la
Révolution.

B. Les oppositions idéologiques et constituantes


L’été 1789 voit naître des groupements politiques exprimant des idéologies contrastées
mais qui s’accordent quasiment toutes sur la volonté d’instaurer/édi er une monarchie
constitutionnelle variablement(variable) interprétée. La pensée républicaine est alors
résiduelle (Camille DESMOULINS).
Dans le cadre de l’élaboration de la future constitution, une opposition centrale s’est
nouée, s’est centrée sur la question de la souveraineté. Si les aristocrates restaient
nostalgiques de l’Ancien régime, les monarchiens souhaitaient importer le modèle
britannique de la souveraineté en se revendiquant de l’autorité de Montesquieu. Comme
l’Angleterre de l’époque, ils souhaitaient que soit retenu en France une souveraineté
mélangée, c’est-à-dire une souveraineté qui synthétiserait tous les intérêts qui traversent
la société et qui seraient représentés par le roi et deux chambres législatives : le roi
représenterait la tradition, l’histoire; la Chambre des communes les intérêts du peuples; la
Chambre haute les intérêts de l’aristocratie. Il s’agissait pour les monarchiens, comme
pour les aristocrates d’ailleurs, de faire en sorte que le roi conserve un rôle institutionnel
déterminant, ils recourent donc à une interprétation du modele anglais en ce sens. À
l’inverse, la gauche révolutionnaire rejette violemment le modèle anglais et la balance des
pouvoirs pour favoriser/privilégier la création d’une chambre législative unique
représentant le peuple ou la nation. En tout cas, l’hypothèse d’une seconde chambre est

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rejetée car elle renvoie à la Chambre des lords composée d’une aristocratie, hors la
Révolution a mis un terme à la société d’ordres et a aboli les privilèges de la noblesse lors
de la nuit du 4 aout. En n, les groupements politiques vont s’opposer sur la question du
véto accordé au roi sachant que cette question du véto conduira la Constitution de 1791
à sa perte.
On doit rapidement évoquer ici pour terminer le comportement contradictoire de Louis 16
qui a contribué à la forte instabilité que connaîtra la brève constitution de 1791. Louis 16
n’a pas renié l’héritage d’Ancien régime, pour autant il était acquis à la philosophie des
Lumières. Cette ambivalence explique pourquoi Louis 16 sera indécis et provoquera de
nombreuses tensions. Il accepte le principe de la révolution mais rejette le vote par tête
au pro t du vote par ordre. Aussi, Louis 16 abusera de son droit de véto et nira
tristement son existence en essayant de fuir à Varenne au moment de la Terreur.

2. La Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen


A. Les fondements philosophiques de la Déclaration
La DDHC renverse la logique de la société d’ordres d’Ancien régime pour créer un
Homme-individu, débarrassé de toute forme de détermination. L’Homme dispose d’une
raison, d’une conscience qui le di érencie du monde animal et qui justi e qu’il dispose de
droits à ce titre. On retrouve ici la métaphysique de Kant qui fait de chaque individu une
volonté consciente. On retrouve également le rationalisme de Descartes qui fait de
l’Homme être rationnel « le maître et possesseur de la nature ». Par ailleurs, la Déclaration
est porteuse d’une doctrine individualiste qui apparaît dans l’insistance du texte vis-à-vis
du droit de propriété. Parallèlement, la Déclaration est égalitariste puisque son article 1er
proclame que tous les hommes naissent libres et égaux en droits. On retrouve ici l’idée
d’une nature humaine universelle qui doit empêcher en 1789 toute distinction de classes
sociales. En n, la Déclaration est également une ébauche en ce qui concerne
l’organisation constitutionnelle et la distribution des pouvoirs dans la mesure où elle fait
de la séparation des pouvoirs le principe même de l’existence de la Constitution.

La Déclaration de 1789 a également fait l’objet de vives critiques philosophiques, deux


d’entre elles peuvent ici en être mentionnées : celle de Edmund BURKE; celle Karl Marx.
Concernant BURKE, il critique l’arrogance des révolutionnaires car il estime que ces
derniers ont fait de l’Homme un dieu sur terre qui échapperait à l’Histoire, à la culture, au
milieu social. Or, selon BURKE chaque individu est déterminé par une culture historique
et par un milieu social. En somme pour BURKE, l’Homme des droits de l’Homme n’existe
pas : c’est donc une ction. Concernant Marx, le fond de la critique est proche mais il est
orienté au sein de la philosophie de l’histoire que retient Marx (dans le but fondamental
qu’est la révolution du prolétariat). Selon Marx, la Déclaration de 1789 est également une
illusion qui a vocation à permettre à la bourgeoisie de maintenir sa domination. À ce titre,
Marx condamne particulièrement la primauté accordée à la propriété privée et il met en
lumière l’absence de tout projet social ou collectif dans ce texte de 1789.

B. Le contenu dispersé, désordonné, disparate de la Déclaration de 1789


La Déclaration soulève les problématiques conceptuelles essentielles du droit
constitutionnel français. La nation, évoquée particulièrement à l’article 3, est pensée
comme le fondement nouveau de la légitimité remplaçant dans une même portée absolue
la légitimité de droit divin. Cette vision de la nation est redevable de l’oeuvre de l’Abbé de
Sieyès (Qu’est-ce que le Tiers État ? En 1788). Selon Sieyès, la nation est une entité
organique qui englobe tous les individus de la société politique. Paradoxalement, elle
échappe aux volontés particulières mais sera tout de même exprimée par des
représentants au sein d’une assemblée représentative et législative. Sieyès, en tout état
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de cause, fait de la nation une sorte de divinité sans dieu qui représente, qui symbolise
l’unité du corps social mais qui est censée échapper aux revendications individuelles et
collectives de ce corps social. Il en ressort que les représentants de la nation, qui votent
la loi, seront en quelque sorte « des dieux sur terre », c’est en tout cas ici l’acte de
naissance du légicentrisme. Il en ressort également que la souveraineté est transférée du
roi à la nation. La loi, votée par les représentants de la nation, exprimera selon l’article 6
la volonté générale. Dans la cohérence de la pensée de Rousseau, la loi exprimera le
voeu de la nation et sera une norme absolue et incontestable. La Déclaration concilie
donc la souveraineté nationale telle que pensée par Sieyès avec une dimension
aristocratique et la souveraineté du peuple telle qu’elle est revendiquée par Rousseau.
En n, la Déclaration érige la séparation des pouvoirs (article 16) en condition de
l’existence même de la Constitution. La notion de séparation des pouvoirs n’est ici
perçue que dans une perspective négative d’absence de toute forme de concentration
des pouvoirs, elle est ainsi une garantie de la liberté individuelle et formule/traduit le
constitutionnalisme historique.

Pour résumer, le texte de la DDHC présente donc deux grandes caractéristiques. Il


énonce d’une part les règles que les institutions politiques doivent respecter : la
souveraineté nationale (articles 3 et 6), la séparation des pouvoirs (article 16), mais
également pour le citer le principe de consentement à l’impôt (article 14). Ce texte a rme
et dé nit d’autre part les droits que l’Homme tient de sa nature d’être rationnel et qui en
tant que tel échappe à l’emprise du pouvoir politique.

C. La portée libérale et individualiste de la Déclaration


Ce texte, on l’a dit, consacre un individu libre d’exprimer ses opinions, sa conscience et
libre de prospérer matériellement. Tout en e et est prévu pour assurer la coexistence des
hommes avec le maximum d’indépendance pour chacun et pour limiter les prérogatives
de l’État. Rien n’est dit dans ce texte du but du groupe social, seul l’Homme-individu doit
être préservé des atteintes éventuelles du pouvoir politique. En n, ce texte articule deux
pensées contradictoires, celle clairement a chée de Sieyès et sa dimension
aristocratique, celle indirectement visée de Rousseau avec sa dimension démocratique.
Rousseau Sieyès

Souveraineté populaire Souveraineté nationale

Démocratie directe/ représentative Gouvernement représentatif

Su rage universel Su rage censitaire

Théorie : l’électorat est un droit Théorie : l’électorat est une fonction (BARNAVE)

Mandat impératif Mendat représentatif/indicatif

Section 2 : La Constitution du 3 septembre 1791


La Constitution de 1791 est la première constitution écrite et unitaire de l’histoire
constitutionnelle française. Auparavant, en dehors des lois fondamentales inscrites dans
di érents textes, le droit constitutionnel français était essentiellement coutumier, c’est-à-
dire fondé sur usages et l’opinio juris . La question centrale qui détermine la Constitution
de 1791 réside dans l’étude de la conception de la nation, qui est la source de la
légitimité d’un nouvel ordre politique. Cette conception permettra de comprendre

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l’organisation des pouvoirs retenus. Cette organisation, on le verra, est très largement
maitrisée en dépit de certaines réserves par l’Assemblée nationale, selon une conception
limitative de la représentation politique. Logiquement, la Constitution de 1791, dont le
préambule est la DDHC, met en place une séparation accentuée des pouvoirs malgré
quelques éléments théoriques de collaboration des pouvoirs. Les épisodes
constitutionnels ultérieurs marqueront une nette rupture avec cette constitution
révolutionnaire.

1. Une souveraineté nationale monopolisée


A. Le renversement du monopole de la souveraineté : du roi à la nation
Comme l’a écrit Marcel PRÉLOT, la monarchie constitutionnelle de 1791 est
« révolutionnée ». En e et, la fonction monarchique d’Ancien régime est totalement
remise en cause. Le roi dirige la politique extérieure du pays, nomme les ministres et
dispose d’un véto suspensif. Ce véto est suspensif en ce sens que le roi peut s’opposer à
l’adoption d’une loi par une législature (Législature=la durée d’une assemblée. À l’époque
c’était en l’occurrence 2 ans) et ce jusqu’au terme de deux législatures successives.
Ainsi, le véto peut bloquer l’adoption d’une loi pendant au maximum 6 ans puisque la
durée d’une assemblée est de 2 ans. Ce véto fait du roi un co-législateur car il peut
exercer une menace et peut donc négocier l’adoption d’une loi. Et dans la mesure où il
est co-législateur, on peut considérer qu’il est représentant de la nation puisqu’il peut
jouer sur l’adoption de la loi qui exprime le voeux de la nation souveraine.
La fonction monarchique est d’autant plus encadrée que le roi ne peut que suggérer
l’adoption de la loi, ce qui veut dire que l’assemblée nationale n’est pas liée/contrainte
par la proposition royale. Aussi, le roi est tenu de sanctionner la loi, le terme de
« sanction » ici étant l’ancêtre de celui de « promulgation ». Le roi est dans l’obligation de
sanctionner la loi pour que celle-ci entre en vigueur.
Précédée par la DDHC, la Constitution de 1791 sacralise la nation autant que la
monarchie absolue sacralisait le monarque de droit divin. Dans la continuité de la
Déclaration, la nation est dé nie comme une entité totalisante dans la mesure où « elle
est unitaire, imprescriptible, indivisible et inaliénable » (unitaire car a vocation à gouverner
la vie de tous les individus, imprescriptible car éternelle, indivisible car le droit s’applique
par tous, inaliénable car personne ne peut se l’approprier). La nation ne se confond donc
pas avec une simple addition des volontés particulières, elle transcende ces volontés
pour incarner une autorité politique unique. Logiquement, cette conception de la nation
devait aboutir à l’existence d’une chambre législative unique. Il s’agissait aussi d’éviter
toute reformation de l’aristocratie de l’Ancienne France (noblesse) dans une seconde
chambre comme en Angleterre.
De plus, le mandat législatif est bref, il est de deux ans, l’assemblée étant intégralement
renouvelable. Toutes ces dispositions ont vocation à empêcher toute forme de
despotisme en particulier, toute tentative d’appropriation du pouvoir par une partie des
membres de l’assemblée.

B. L’exclusion du peuple de l’exercice de la souveraineté


Cette conception totalisante de la nation exclue le peuple de l’exercice du pouvoir
souverain. La Constitution de 1791 prévoit en e et un su rage censitaire et indirect pour
l’élection des députés de l’Assemblée nationale. Un système de double élection implique
que des électeurs actifs désignent localement des grands électeurs, grands électeurs qui
voteront à eux-seuls pour désigner les députés. Selon la Constitution, seuls les citoyens
actifs, c’est-à-dire capables de payer une contribution équivalente à la valeur locale de
trois journées de travail, peuvent, au sein d’assemblées primaires, voter pour désigner les
grands électeurs. Ces grands électeurs devront justi er d’un patrimoine immobilier
conséquent pour pouvoir être reconnus comme tels, on précisera que les futurs députés
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sont soumis aux conditions statutaires patrimoniales (de propriétés immobilières) les
grands électeurs. Concrètement, sur environ 24 millions d’habitants dans la France de
1791, environ 4 millions d’hommes (à cette époque, les femmes étaient encore
considérées comme des incapables civiles) pouvaient donc voter et 43 000 pouvaient
être des grands électeurs pour désigner les députés. Ce mode de su rage exprimait alors
de la théorie de l’électorat fonction émise par BARNAVE, l’élection était alors comprise
comme une fonction reconnue aux citoyens qui peuvent la remplir au regard d’une
condition nancière et non pas un droit inhérent et propre à l’individu. Dans cette dernière
hypothèse, on parle alors de la théorie de l’électorat droit.
Cette exclusion du peuple est également fondée sur le monopole de l’expression de la
volonté générale par l’assemblée nationale. D’ailleurs, la Constitution n’a pas été rati ée
par le peuple en 1791, mais elle a été votée par les députés de l’assemblée. De plus,
l’enclenchement de la révision constitutionnelle, c’est-à-dire l’attribution du pouvoir
constituant dérivé, est réservée aux seuls députés de l’Assemblée nationale.
En n, la théorie du mandat impératif est explicitement rejetée au pro t de la théorie du
mandat représentatif. Comme l’explique Carré de Malberg, le mot « représentation » ne
désignera plus seulement comme autrefois un certain rapport entre le député et les
électeurs. Il exprime désormais (depuis 1791) l’idée d’un pouvoir consistant chez le
représentant à vouloir et à décider pour la nation. Cela implique que le représentant n’a
pas à prendre en considération les voeux et souhaits particuliers de ses électeurs locaux.
Le député agit pour la seule et inaliénable nation souveraine. Sur ce point, Carré de
Malberg reprend en réalité la théorie de la représentation « virtuelle » formulée par E.
BURKE dans les années 1790. Cette théorie de la représentation sera con rmée au
19ème siècle par un auteur : Pierre Paul ROYER-COLLARD qui avait a rmé : « la
représentation est un pouvoir ». Cette conception du mandat réfute, contredit celle de
Rousseau attaché au mandat impératif, selon lequel le député/représentant doit
strictement respecter les voeux des électeurs. Selon Rousseau : « La souveraineté ne
peut être représentée. Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses
représentants, ils ne sont que ses commissaires(=soumis, mandataires); ils ne peuvent
rien conclure dé nitivement. Toute loi que le peuple en personne n’a pas rati é est nulle;
ce n’est point une loi. ».
Compte-tenu de cette conception de la nation, il ne pouvait en résulter qu’un équilibre
précaire dans la répartition des compétences dont il est agrant et évident qu’elle assure
et favorise la prédominance et la primauté de l’assemblé nationale. Les pouvoirs sont
clairement séparés même s’il est possible d’envisager une forme de collaboration des
pouvoirs avec le véto suspensif.

2. Une séparation accentuée des pouvoirs


A. Un cloisonnement des organes constitutionnels
Ce cloisonnement se manifeste notamment par le rejet de tout cumul des fonctions, il est
ainsi impossible pour un ministre d’être membre de l’assemblée nationale et inversement.
Une telle incompatibilité traduit le principe négatif de la séparation des pouvoirs, tel qu’il a
été exprimé par l’article 16 de la DDHC. Parallèlement, des compétences propres à
chaque organe sont rigoureusement énumérées : le roi et les ministres exécutent la loi et
dirigent en principe l’Administration, tandis que l’Assemblée nationale délibère et vote la
loi qui exprime la volonté générale. Il n’y a pas de concours, de collaboration en théorie
dans l’exercice des fonctions du pouvoir. À ce titre, le roi ne convoque pas, ni n’ajourne
l’Assemblée nationale, il ne peut pas non plus la dissoudre. Toutefois, il est possible
d’envisager une collaboration minimale hypothétique des pouvoirs. Comme on l’a vu, le
véto royal suspensif, parce qu’il peut temporairement imposer au législateur de
reconsidérer la loi qu’il souhaite voir adopter, fait du roi, dans ce cadre limité, un co-
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législateur. Agissant indirectement sur la loi, qui exprime le voeu de la nation souveraine,
le roi peut être considéré en conséquence comme représentant de la nation : c’est la
thèse de Michel TROPER. Dans la courte pratique de la Constitution, le véto a été une
source de blocage et d’opposition, il n’a d’ailleurs jamais pu aller à son terme lorsqu’il a
été appliqué. D’autre part, la suggestion royale en matière législative n’a aucune valeur
contraignante.

B. Un déséquilibre dans la répartition des fonctions du pouvoir


Le pouvoir exécutif, dans la Constitution de 1791, est très largement contraint. Cela se
mesure déjà à la nature suspensive du véto. De manière ponctuelle, la Constitution
permet des empiètements du pouvoir législatif dans certaines compétences régaliennes
classiquement attribuées au pouvoir exécutif. En e et, l’assemblée nationale pouvait
intervenir dans les nominations de certains postes administratifs de premier plan. Surtout,
l’assemblée nationale a pu utiliser, grâce au ou des termes juridiques, la responsabilité
pénale des ministres pour contester la politique du ministère. La Constitution de 1791 fait
des ministres les acteurs responsables des actes du pouvoir exécutif. À ce titre, les
ministres contre-signent les actes du roi (on parle ici de contre-seing : consiste pour un
ministre à co-signer l’acte ce qui atteste sa compétence et qui emporte sa responsabilité
individuelle). Du reste, la Constitution prévoyait que tout ministre qui ferait l’objet d’une
procédure pénale, menée par l’assemblée, pour des faits de trahison (lorsqu’on transmet
des informations sensibles à des puissances étrangères) ou de concussion (corruption
d’un agent public), serait contraint de démissionner si les faits étaient avérés. Les
députés de l’assemblée vont utiliser ces motifs d’incrimination pour déstabiliser
politiquement les ministres. C’est ainsi que le ministre des a aires étrangères
DELESSART devra démissionner au début de l’année 1792, après avoir subi une
accusation de trahison consécutive à son refus de déclarer la guerre aux provinces unies.
Au regard de ces di érents éléments, il y a clairement une primauté institutionnelle qui
favorise l’assemblée nationale. Plus largement, et au-delà de l’utilisation abusive du véto
royal, on peut s’interroger sur cette tentative de conciliation entre d’un côté un roi et ses
ministres vestiges de l’Ancien régime; et de l’autre côté, une assemblée nationale qui
prétend incarner quasi-exclusivement la légitimité de la force révolutionnaire qu’est la
nation. La monarchie constitutionnelle de 1791 ne vivra que 9 mois, en août 1792, la
République est proclamée, ouvrant une période de très forte instabilité politique et
institutionnelle.

3. Les épisodes constitutionnels ultérieurs


Entre 1792 et 1815, trois épisodes constitutionnels se sont succédés avec une fortune
diverse.

A. La Constitution du 23 juin 1793


Après la chute de la royauté, un gouvernement révolutionnaire se met en place prenant la
forme d’une convention nationale. Cette convention est exclusivement composée
d’anciens députés montagnards et jacobins (Danton, Robespierre, etc) et elle va mettre
en place deux organes exécutifs : Un comité de sûreté nationale d’une part, un comité de
salut public d’autre part. Il s’agit alors de sanctuariser le projet révolutionnaire qui fait face
à trois menaces fondamentales : une menace extérieure, dans le mesure où les provinces
unies (Espagne, Hongrie, Portugal, nord de l’Italie) souhaitent remettre sur le trône de
France un monarque catholique. À l’intérieur du pays, deux menaces se pro lent pour les
révolutionnaires : la révolte des fédérés d’une part, qui souhaitent venger l’épuration, par
la convention, des girondins; d’autre part, une révolte d’opposition contre le
gouvernement révolutionnaire prend forme de l’ouest de la France, en particulier en
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Vendée, on appellera ce mouvement la « chouannerie ». Une répression sans précédent
s’opère en France et prend le nom de terreur. Les opposants sont systématiquement
pourchassés et les opposants de l’ouest sont quasiment « exterminés ». Cette période
1792-1793 est particulièrement agitée, prend des allures de régime autoritaire si ce n’est
totalitaire lorsque Robespierre notamment crée le culte de l’homme nouveau, mais
l’héritage est ambivalent car la convention a instauré des mesures d’égalité sociale, à
favoriser le développement des instruments démocratiques et surtout à abolit l’esclavage.
Dans ce contexte, les membres de la convention nationale ont préparé un texte
constitutionnel précédé d’une déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen repensée.
La DDHC de 1793 présente en e et une orientation démocratique plus vive et plus
marquée, et elle s’inscrit dans une logique purement révolutionnaire en proclamant en
son article 35 un droit à l’insurrection. Surtout, cette Déclaration reconnaît aux individus
des exigences vis-à-vis de l’État, principalement des prestations de nature sociale. On a
pu considérer que cette Déclaration annonçait l’État providence. En conséquence, la
Constitution de 1793, préparée au même moment que fut rédigée la Déclaration, instaure
de manière inédite le su rage universel direct. Elle se caractérise en outre par une
séparation stricte des pouvoirs, fondée sur le principe de la spécialisation. Le pouvoir
législatif domine outrageusement le pouvoir exécutif consacrant un véritable déséquilibre
des pouvoirs. L’assemblée législative unique que prévoit cette constitution devait être
élue pour un an. L’élaboration de la loi se faisait alors en fonction de l’acceptation
d’assemblées primaires départementales qui pouvaient s’opposer à une loi à condition
d’être un dixième (1/10) à s’opposer. Le pouvoir exécutif est entièrement soumis au
pouvoir législatif puisque c’est le pouvoir législatif qui le désigne et qui peut le révoquer.
Surtout ce pouvoir exécutif était composé de 24 membres, il était donc collégial et cette
collégialité rendait son action bien di cile. Cette Constitution n’entra jamais en vigueur
malgré le fait qu’elle ait été validée par le peuple au terme d’un vote. L’insurrection
vendéenne et les invasions extérieures ont dé nitivement mis un terme à cet état
d’exception qui caractérise la convention nationale en 1792 et 1793.

B. La Constitution du 5 fructidor An 3 (22 août 1795)


Après la chute de Robespierre, une nouvelle constitution entrait en vigueur à l’été 1795.
Se réclamant ouvertement de la Première République, proclamée dès août 1792, cette
Constitution est dite Constitution du directoire. Elle inclue une déclaration des droits bien
plus nuancée que celle de 1793, renoue plus ou moins avec l’esprit de 1789. C’est
d’ailleurs la raison pour laquelle certains historiens a rment que le Directoire correspond
au régime républicain de la bourgeoisie. La Constitution de 1795 rétablit le su rage
censitaire et indirect à deux degrés. L’apport le plus décisif de cette constitution est
l’apparition en France du bicamérisme (deux chambres législatives). Élues dans les
mêmes conditions, les deux chambres se di érencient au niveau de l’éligibilité, c’est-à-
dire les conditions statutaires pour pouvoir être élu au sein de ces chambres. Sans origine
aristocratique, le Conseil des anciens est composé d’hommes, âgés au minimum de 40
ans, mariés ou veufs, ce Conseil des anciens dispose de l’initiative législative. À côté de
ce Conseil des anciens, apparaît un Conseil des Cinq-Cent (500) : 500 hommes âgés de
30 ans au minimum, et ce Conseil adoptait la loi. Quant au pouvoir exécutif, il est incarné
par un directoire, composé de cinq membres parmi lesquels on retrouve un certain
SIEYÈS. Ce directoire retrouve une véritable place institutionnelle, il retrouve l’e ectivité
d’un pouvoir exécutif. Les directeurs sont élus par les anciens, ils disposent d’un véritable
pouvoir réglementaire d’application de la loi. En n, les directeurs ne peuvent être mis en
accusation que devant une Haute cour de justice pour des cas de responsabilité pénale
(trahison, concussion).
Les organes sont donc spécialisés d’où un possible renvoi à une séparation stricte des
pouvoirs. Néanmoins, s’il n’y a aucune interaction institutionnelle entre les pouvoirs, le
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pouvoir exécutif pourra nalement, après une révision de la Constitution, être pénalement
destitué pour manoeuvre visant à renverser la Constitution, notamment s’il refusait
d’appliquer les lois. Cet élément va contribuer à fragiliser le pouvoir exécutif. La
constitution du directoire ne « vivra que quatre ans », l’instabilité politique interne et les
menaces externes mettront un terme à ce bref épisode constitutionnel.

C. La Constitution de 22 Frimaire An 8 (13 décembre 1799)


Le coup d’État du 18 brumaire An 8, préparé avec le soutient d’un certain SIEYÈS, allait
donner naissance au Consulat puis à l’Empire. La Constitution de 1799 se spéci e par le
rétablissement apparent du su rage universel. Il se trouvait que les électeurs (plus
précisément, les hommes âgés de 21 ans) désignaient au niveau communal des
candidats gurant sur des listes. Une fois ces hommes élus, ils deviennent des
fonctionnaires d’arrondissements. Ces derniers vont ensuite désigner des fonctionnaires
départementaux qui, pour nir, vont à leur tour désigner des fonctionnaires nationaux
toujours suivant un scrutin de listes. La particularité est que les listes de ces
fonctionnaires nationaux étaient préalablement composées par le Premier consul : il n’y
avait donc aucune opposition possible. Ces fonctionnaires nationaux vont ensuite
rejoindre les deux chambres législatives prévues par la Constitution du consulat. Cette
constitution d’ailleurs, a été adopté par référendum, référendum qui portait sur la
personne même de Bonaparte. Il s’agit en réalité d’un plébiscite portant sur la personne
même du futur empreur.
Du point de vue institutionnel, la Constitution du consulat prévoit un pouvoir exécutif
partagé entre trois consuls nommés pour dix ans. Parmi ces trois consuls, on trouve :
Bonaparte, Cambacerès, Lebrun. En réalité, le premier consul qu’est Bonaparte
concentre les pouvoirs puisque les deux autres n’ont qu’une voie consultative. La
Constitution prévoit ensuite un gouvernement, nommé par les consuls, et ce
gouvernement a le droit exclusif d’initiatives législatives et la maîtrise du pouvoir
réglementaire (pouvoir d’application de la loi : des décrets, arrêtés, délibérés). Dans le
cadre de son pouvoir législatif, qui est un pouvoir d’initiative, le gouvernement s’en remet
à une institution spéci quement créée par la Constitution de 1799 : il s’agit du Conseil
d’État. Le Conseil d’État va conseiller le gouvernement pour la préparation des lois et des
règlements. Quant au pouvoir législatif, il purement de façade, il est arti ciel. Deux
chambres législatives sont prévues : D’un côté le tribunat, qui ne peut qu’émettre des
voeux, des propositions sur les projets législatifs. De l’autre côté le Corps législatif vote
les projets de loi sans délibérations (il ne peut ni amender, ni modi er les textes
législatifs). Les membres de ces deux organes législatifs sont nommés par le Sénat qui
nomme aussi les consuls. Ce Sénat n’est absolument donc pas une seconde chambre
législative. Il est composé de 60 membres inamovibles, âgés d’au moins 40 ans et de
membres additionnels nommés chaque année pendant 10 ans par le premier consul. Le
Sénat est en principe chargé de conserver la Constitution, dans la pratique : il est
l’instrument de Bonaparte. La conclusion de ces développements est simple : le régime
instauré est une dictature qui organise la concentration des pouvoirs. Des modi cations
auront lieu au tout début du 19ème siècle pour atténuer cette concentration, avant
nalement de l’accentuer au béné cie du premier consul et du Sénat. En 1804, un
Senatus-consulte organique proclame la dictature et o cialise la dynastie impériale.
À la suite de l’abdication de l’empereur en avril 1814, une première instauration
monarchique interviendra avant le retour triomphale de Bonaparte, de son exil depuis l’île
d’Elbe en 1815, cet épisode marque le commencement des Cent jours qui s’arrêteront en
réalité au bout de deux mois et demi avec la défaite de Waterloo en 1815.

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Section 3 : De la monarchie limitée au parlementarisme


dualiste : la restauration monarchique (1814 - 1848)
1. La Charte du 4 juin 1814
A. L’organisation constitutionnelle
Après avoir prononcé la déchéance de Bonaparte, le Sénat appelle au trône le futur Louis
18. Dans la mesure où celui-ci rejette catégoriquement l’idée de renoncer à l’héritage
monarchique d’Ancien régime, il confectionne lui-même la charte et l’octroie à ses sujets.
Ces termes de charte et d’octroie qui renvoient au vocabulaire du Moyen-Âge ramènent à
l’idée que le roi o re en quelque sorte la charte à ses sujets en o cialisant la
souveraineté monarchique. L’octroi exprime ici l’idée d’un pouvoir constituant originaire et
unilatéral en l’occurrence. Autrement dit, le roi rédige la charte et l’impose à ses sujets
(C’est en réalité le compte de Barante qui l’a largement écrite). Toutefois, si Louis 18
renonce fermement à la souveraineté nationale, il concède la reconnaissance des libertés
individuelles. C’est là une volonté de ne pas rompre radicalement avec l’héritage
révolutionnaire. Ainsi, les 12 premiers articles de la Charte consacrent les libertés, l’égalité
des Français, et le droit de propriété pour reprendre l’acquis de 1789. Mais, ces droits
sont reconnus par le roi et ils ne sont donc pas des droits naturels, fondés sur une nature
humaine universelle. Dans le mesure où le roi est le pouvoir constituant originaire et
dérivé, il lui sera possible de revenir sur cette reconnaissance. D’ailleurs, le gouvernement
de la restauration en pro tera pour contourner le respect de ces droits : en rétablissant la
noblesse, en instaurant le catholicisme comme religion d’État et en limitant
considérablement la liberté de la presse, donc la liberté d’opinion.
Concernant cette fois l’organisation constitutionnelle de la Charte, il est clair que le
monarque est l’organe prépondérant. Le roi dispose de toute l’étendue du pouvoir
exécutif mais également du monopole de l’initiative législative, en dehors du cas
particulier des lois d’impôt (vote du budget). Concernant le pouvoir exécutif du
monarque, il comporte : la nomination des ministres, la nomination des paires, la
convocation et prorogation des chambres législatives, sanction de la loi, et en n
dissolution de la chambre législative.
En conséquence, les chambres législatives ont pour seules compétences de discuter et
de voter les lois que le roi leur présente. Hormis le monopole du vote de la loi d’impôt par
la chambre des députés (à la suite d’une loi votée en 1817), les chambres législatives ne
disposent que d’un droit de proposition législative qui reste soumis au contrôle du roi. On
doit surtout noter s’agissant du pouvoir législatif que la charte rétablit le bicamérisme sur
un mode qui rappelle le modèle constitutionnel anglais. Une chambre des paires est en
e ets créée par la charte, elle est composée de paires que le roi nomme à vie ou à titre
héréditaire selon son bon vouloir. L’existence de cette chambre de paires illustre de façon
évidente la nature aristocratique du régime de 1814. On précisera donc que le roi peut
nommer autant de paires qu’il le souhaite (fournée de paires), notamment pour s’assurer
une majorité parlementaire.
On l’a vu, les ministres sont nommés par le roi. Si les ministres peuvent siéger dans l’une
des deux chambres législatives et s’exprimer devant elle, leur responsabilité reste
exclusivement pénale. La Charte de 1814 reprend ici le dispositif de 1791 et importe la
procédure d’Impeachment, née en Angleterre et constitutionnalisée au USA. Il se trouve
en e et qu’un ministre pourra être mis en accusation par la chambre des députés pour
haute trahison ou concussion par la chambre des députés, avant d’être jugé par la
chambre des paires.

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B. Le su rage censitaire ou capacitaire
La Charte de 1814 retient assez logiquement le su rage censitaire selon une logique dite
« capacitaire ». Tout électeur masculin, doit pour pouvoir voter, avoir au moins 30 ans et
payer un cens de 300 francs. Cette vision capacitaire a été développé par une doctrine de
l’époque, que l’on doit à un groupe de pensée : les doctrinaires : 2 gures importantes
ici : François GUIZOT (Il sera le premier à rendre l’école obligatoire et gratuite, mais pas
laïque), ROYER-COLLARD, THIERS. Selon cette théorie doctrinaire qui a conceptualisé la
théorie du su rage capacitaire, il fallait non pas considérer que le su rage était propre à
une certaine vision de l’homme mais à sa capacité individuelle. Le su rage est ici une
fonction qui est attribuée aux meilleurs, à l’élite capable de prononcer un jugement
électoral, d’où la référence à la capacité nancière des votants. Une loi de 1820 va
accentuer cette tendance aristocratique en établissant un double vote au pro t des
électeurs les plus fortunés.

C. Analyse de la pratique de la charte


1) Une monarchie limitée
De nombreux auteurs ont a rmé que la Charte s’inspirait fortement du modèle
institutionnel anglais et que sa pratique prouvait l’instauration/introduction du régime
parlementaire en France. S’il est vrai qu’existait alors une véritable fascination pour les
institutions anglaises, il est exagéré d’a rmer que le régime politique français, entre 1814
et 1830, était un régime parlementaire. La Charte du 1814 établit une monarchie limitée.
Le roi maitrise la quasi totalité des pouvoirs et consent à s’imposer des conditions à
l’exercice de son pouvoir. Cette dimension auto-limitatrice va être illustrée en pratique

2) Le développement des instruments du contrôle parlementaire


Entre 1814 et 1830, la chambre des députés est parvenue à obtenir des concessions du
roi a n de contrôler l’activité du ministère du roi. Trois instruments sont ici à prendre en
considération. Il s’agit d’abord de l’adresse, adresse qui constitue un texte voté par les
députés, texte par lequel les députés expriment ce qu’ils pensent de l’activité ministérielle
en réponse au discours du roi, lors de l’ouverture de la session parlementaire. C’est
d’ailleurs l’adresse des 221 qui, en 1830, allait favoriser la révolution de Juillet dans la
mesure où les députés ont désapprouvé dans ce texte la conduite du ministère du Prince
de Polignac. Ensuite, les députés ont utilisé l’instrument des pétitions, grâce auxquelles
ils relayaient les voeux des sujets du royaume. En n, le troisième instrument fut celui de la
spécialisation budgétaire obtenue par la loi de 1817. Ce monopole a permis à la chambre
des députés de contrôler indirectement l’activité ministérielle et de faire peser ses
exigences par la menace du refus du vote du budget, refus qui pouvait paralyser l’action
du ministère.
Il n’en demeure pas moins que la responsabilité politique des ministres, critère du régime
parlementaire, n’était pas comprise et n’était donc pas appliquée de 1814 à 1830. Pour
autant, la responsabilité pénale des ministres a pu servir de prétexte pour contester le
régime, plus que la politique du ministère.

2. La Charte du 4 août 1830


Après la révolution de Juillet, un changement de dynastie royale intervient puisque la
dynastie des Bourbons est écartée pour permettre l’accession au trône du descendant de
la famille d’Orléans : un certain Louis Philippe. La Charte de 1830 consacre la monarchie
de Juillet qui repose sur légitimité di érente. Elle a permis le développement en France,
par sa pratique, du parlementarisme dualiste.

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A. Le changement de légitimité
Sur le principe, la Charte du 1830 est très di érente car elle a été votée par les chambres
législatives et acceptée par Louis Philippe de façon comparable à ce qui s’était passé en
Angleterre en 1688 lorsque Guillaume d’Orange accéda au trône du royaume en faisant
serment de respecter le Bill Of Rights (1688-89). Surtout, la Monarchie de Juillet se
distingue de celle restaurée en 1814 en ce qu’elle n’est plus une monarchie de droit divin
mais une monarchie contractuelle. Le roi en 1830 s’engage selon un pacte (pacte
constitutionnel en l’occurence) à respecter le veux de la notion. Il doit se conformer au
voeu des Français, à la souveraineté de la nation. Apparaît ici, dans le cadre du
gouvernement représentatif, une prise en compte de l’opinion publique. Cependant, la
nation en 1830 est toujours accaparée par une certaine aristocratie. Le cens est reconduit
dans une proportion moindre, dans le mesure où le nombre d’électeurs est doublé. La
logique capacitaire persiste en raison de la primauté d’une pensée conservatrice dans la
France d’alors. À ce titre, François GUIZOT, qui sera président du Conseil à plusieurs
reprises entre 1830 et 1848, s’opposera à l’adoption du su rage universel en raison de sa
mé ance vis-à-vis de la souveraineté populaire qui reste perçue comme une source de
révolution.

B. Le développement du parlementarisme dualiste


Il faut ici, au préalable, souligner les di érences entre la Charte constitutionnelle de 1814
et celle de 1830. En 1830, la modi cation la plus substantielle est le partage de la
proposition des lois entre le roi, la chambre des pairs et la chambre des députés. Cette
dernière conserve le monopole des lois d’impôt. D’ailleurs, la question budgétaire permet
à la chambre des députés d’éto er son in uence sur la politique du ministère. En outre,
en 1830, le roi ne peut que nommer des pairs à vie et non plus des pairs à titre
héréditaire. Cette disposition empêche la perpétuation/conservation d’une vieille
aristocratie. En n, le pouvoir réglementaire du roi est encadré (le roi est borné au respect
de la loi) et le roi ne sanctionne plus les lois dans la pratique. Cette diminution des
prérogatives royales participe à la progression du parlementarisme. Concernant la
responsabilité des ministres, elle conserve, dans le texte du 1830, une dimension pénale
(l’article 47 de la Charte de 1830 renvoyant aux termes : « accuser, traduire, juger »).
Toutefois, il n’y a plus de référence aux motifs pénaux entraînant sa mise en jeu. On ne
retrouve plus les termes « trahison et concussion » dès lors le champ d’application de la
responsabilité pénale des ministres semble pouvoir s’élargir. Dans la pratique, la
responsabilité politique des ministres va se développer grâce au contrôle budgétaire,
mais aussi grâce à l’apparition d’une nouvelle technique de contrôle qu’est
l’interpellation. En droit parlementaire, cette technique permet à un député de demander
directement à un ministre d’expliciter, de justi er telle activité du ministère. La réponse du
ministre pouvait conduire à une discussion au sein de la chambre, pour autant
l’interpellation ne pouvait pas aboutir à un vote de la chambre. Le régime parlementaire
s’est instauré en France dans la pratique de la Charte de 1830. Cette pratique a laissé
apparaître à la responsabilité politique des ministres qui est le critère du régime
parlementaire.

1) L’apparition historique et conjoncturelle d’un principe de gouvernement venu


d’Angleterre
Si le régime parlementaire relève d’un processus historique complexe, qu’on peut situer
dans la première moitié du 19ème siècle, il a également connu un acte de naissance
fondateur. Il s’agit de la démission collective du cabinet ministériel de lord NORTH en
1782. Sous l’autorité du roi Georges 3, le cabinet de lord North a subi l’opposition d’une
écrasante majorité à la chambre des communes sur la question de l’indépendance des
colonies américaines. Cette majorité souhaitait l’indépendance, tandis que le roi voulait
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maintenir l’emprise britannique en Amérique. Le roi décida de dissoudre cette chambre
pour maintenir le cabinet de lord North (Pourtant dont les membres étaient favorables à
l’indépendance). Avant le résultat des élections législatives consécutives à la dissolution,
le cabinet de lord North décida de démissionner collégialement. Cette démission
solidaire, face au désaveux de la majoritaire parlementaire, est signi catif de la
responsabilité politique des ministres.
Le régime parlementaire ne s’est véritablement instauré que progressivement en
Angleterre entre les années 1820 et 1840. D’un point de vue historique, le régime
parlementaire, qui implique la con ance d’une majorité parlementaire vis-à-vis du pouvoir
exécutif et des ministres en particulier, correspond à un mouvement de fond favorable à
la démocratie représentative et reléguant la légitimité traditionnelle du monarque. Pour le
dire autrement, les représentants veulent peser d’un point de vue décisionnaire au nom
de la nation, de l’opinion publique qui apparaît alors, pour remettre en cause l’hégémonie
du pouvoir exécutif. C’est dans ce cadre que la représentation politique va se structurer
en partis politiques, notablement (notable) en Angleterre deux grands groupes
apparaissent : Les WHIGS d’un côté, qui défendent les intérêts des villes et de la
bourgeoisie; les TORIES de l’autre, qui représentent les intérêts des bourgs, des villages
et des propriétaires terriens (dont les agriculteurs).

2) Le critère du régime parlementaire : La responsabilité politique des ministres


Classiquement, on dé nit le régime parlementaire par l’apparition de la responsabilité
politique des ministres, dont la contre-partie est le droit de dissolution de la chambre
représentative aux mains d’un organe du pouvoir exécutif. On précisera toutefois que le
droit de dissolution est absent de certains régimes parlementaires contemporains,
notamment celui de la Suède.
La responsabilité politique peut se dé nir comme l’obligation (qui deviendra juridique)
pour les ministres de démissionner dès lors que l’assemblée législative ne leur manifeste
plus de con ance. Si cette responsabilité politique tire ses origines de la responsabilité
pénale des ministres et particulièrement de l’utilisation politique de la responsabilité
pénale (DELESSART en 1792 et VILLELE en 1828), elle repose sur une logique toute
di érente. Cette responsabilité politique n’est en e et pas répressive mais préventive :
elle n’intervient que pour sanctionner un pacte de con ance préalablement établi entre
l’assemblée législative (sa majorité parlementaire) et le gouvernement (le ministère). Ce
pacte de con ance repose essentiellement sur la communauté partisane, c’est-à-dire sur
l’appartenance du gouvernement au parti qui représente la majorité parlementaire à
l’assemblée.
Cette notion de responsabilité politique structure donc ce régime parlementaire car elle
suppose un rapport de con ance stable entre majorité parlementaire et le cabinet (le
ministère). De plus et paradoxalement, cette responsabilité politique est un facteur
d’émancipation du cabinet ministériel, à la fois vis-à-vis du chef du pouvoir exécutif et
vis-à-vis de la chambre législative. En e et, si la responsabilité politique est un procédé
qui implique la transaction, la collaboration entre un gouvernement et la représentation
nationale, elle est également un titre en vue de la décision. Pour le dire simplement, être
responsable donne du pouvoir et ceci va permettre au ministère d’échapper à la tutelle
de l’autorité de nomination. C’est ainsi que les ministres éviteront la tutelle monarchique
et deviendront en tant qu’entité collective : le Gouvernement. Simultanément, les partis
politiques qui se développent enverront les meilleurs de leurs membres au Gouvernement
faisant du gouvernement le groupe qui donne le mouvement/l’impulsion à la majorité
parlementaire. Il s’agit ici d’évolutions historiques et politiques qui échappent à la logique
juridique moderne.

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3) La distinction des modèles parlementaristes : le modèle dualiste et le modèle
moniste
Dans la théorie des régimes politiques, on distingue le régime parlementaire dualiste du
régime parlementaire moniste. S’agissant du régime parlementaire dualiste, il renvoie à la
situation dans laquelle le ministère est responsable à la fois devant la chambre législative
et devant le chef de l’État qui le nomme. S’agissant cette fois du régime parlementaire
moniste, il renvoie à l’hypothèse selon laquelle le ministère n’est responsable que devant
la ou les chambres législatives.
Cette distinction a une vocation pédagogique car pour l’essentiel, le modèle dualiste s’est
rapidement e acé compte-tenu du retrait du monarque des a aires politiques nationales
au pro t du modèle moniste. Il reste que la période 1830-1848 est signi cative du régime
parlementaire dualiste. Pendant cette période, le régime parlementaire s’est introduit
dans la pratique politique, notamment par la survenue de démissions ministérielles et
collectives, consécutives au désaveu du roi ou à l’hostilité de la chambre des députés.
Trois ministères démissionneront en e et entre 1830 et 1848, en raison de l’opposition de
la chambre des députés. Parmi ces trois démissions, deux seront la conséquence
d’interpellations puis de questions, qui ont été suivi d’un vote négatif de la chambre au
projet ministériel. La troisième démission se distingue car elle reprend tout le
cheminement parlementariste. En 1839, la chambre est hostile au ministère du Compte
MOLÉ, ministère nommé et soutenu par Louis Philipe. Face à cette hostilité, le roi décide
de dissoudre la chambre pour obtenir une majorité favorable à son ministère. Or,
l’opposition parlementaire (la même majorité parlementaire ici) est reconduite à la suite
des élections législatives. Le roi n’a donc plus le choix, il doit renvoyer son ministère et
nommer des ministres qui ont la con ance de la majorité parlementaire élue.

Le régime de la monarchie de Juillet va s’e ondrer en raison de scandales liés à des


a aires de corruption (Le ministre, TESTE, des travaux publics, a été le premier mis en
cause). Mais aussi en raison de deux facteurs di érents : Une hostilité vis-à-vis du roi
Louis Philippe et du ministère GUIZOT provoqué par le refus incessant d’instaurer le
su rage universel. De plus, une pensée républicaine, socialiste et révolutionnaire se
développe dans les années 1830/1840 (S’agissant de la pensée révolutionnaire : les
manifestes de BARBÈS, BLANQUI. S’agissant de la pensée socialiste : PROUDHON,
Louis BLANC). Ce qui mettra le feu aux poudres, sera l’interdiction des banquets
républicains par GUIZOT (au motif de trouble à l’ordre public) c’est dans ce contexte
qu’éclate la révolution républicaine de 1848.

Section 4 : La Constitution de 1848


Une étude rapide des institutions de la Constitution de 1848 nous conduira à une
exploration rapide des institutions américaines pour y analyser sommairement le régime
politique.
Il se trouve en e et que certains auteurs, parce que le Président de la République en
1848 est élu au su rage universel, ont perçu, dans la Constitution de 1848, l’importation
du modèle américain. Cette interprétation est très discutable car elle simpli e
outrageusement le montage institutionnel de 1848. Il y a peut-être dans cette tentative
d’interprétation une volonté de trouver une origine à la fascination française pour le
modèle constitutionnel américain.

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1. La Constitution du 4 novembre 1848
A. Le contexte d’adoption
La Constitution de 1848 formalise le changement de la nature du régime : la République
est proclamée. Née à la suite de l’insurrection parisienne de février 1848 contre
l’interdiction des banquets républicains, la République du 1848 a été pensé pour rompre
avec le régime de la monarchie de Juillet à deux égards : Pour mettre un terme à la
corruption parlementaire d’une part, et pour permettre l’application d’un su rage
universel masculin d’autre part.
La Constitution de 1848, dont l’e ectivité ne durera que deux ans et demi, instaure la
Seconde république et proclame le principe démocratique. Au-delà du su rage universel,
la Constitution de 1848 consacre une conception interventionniste de l’État au regard du
Préambule qui reprend certains aspects de la pensée socialiste au sens large.
Néanmoins, cette constitution est synthétique et donc contradictoire puisqu’elle a rme la
reprise des acquis philosophiques de 1789.

B. Le dispositif constitutionnel
Sur le plan institutionnel, la Constitution de 1848 semble mettre en place une
spécialisation des fonctions, la durée des mandats de coïncide pas et chaque pouvoir est
censé accaparer/monopoliser la fonction qui lui est propre. Pour autant, l’initiative
législative est partagée puisque le Président de la République peut adresser des projets
de loi à l’assemblée législative. Par rejet de la monarchie constitutionnelle et de son
bicamérisme, la Constitution de 1848 institutionnalise une assemblée législative unique.
Face à elle, le pouvoir exécutif est composé d’un président de la République élu au
su rage universel et d’un gouvernement nommé par le Président. Plus particulièrement,
le Chef de l’État est responsable des actes de l’exécutif aux côtés des ministres, ce qui
est un fondement de son action. Le Président est donc élu au su rage universel et sa
responsabilité, très vaguement posée par le texte, peut rappeler la conception
plébiscitaire du pouvoir que Napoléon avait développé au début du 19ème siècle. On
nira en notant que le Président dispose de l’initiative partagée des lois, qu’il promulgue
les lois et qu’il a la possibilité de demander à l’assemblée une nouvelle délibération. En n,
le Président nomme et révoque les ministres (responsabilité des ministres devant le chef
de l’État) ce qui renforce son autorité. Néanmoins, les actes du Président du République
doivent être contre-signés par les ministres compétents.

C. La nature du régime politique


Le régime politique de 1848 est di cilement rattachable (rattacher) au régime présidentiel
américain. Certes, le Président est élu au su rage universel, néanmoins, la Constitution
de 1848 retient le monocamérisme (une seule chambre législative). Surtout, elle retient un
principe de responsabilité des titulaires du pouvoir exécutif devant la chambre législative,
sans préciser si cette responsabilité est pénale ou politique. Si la Constitution de 1849 ne
prévoit pas de droit de dissolution de la chambre législative, elle entre-ouvre/suggère une
ambiance parlementariste. La responsabilité du pouvoir exécutif est indéterminée, ce qui
peut entrainer sa politisation. Les ministres peuvent être entendus par la chambre
législative, alors que les techniques de contrôle parlementaire de la monarchie de Juillet
survivent : particulièrement l’interpellation. Ainsi, la Constitution de 1848 entretient une
certaine ambivalence, elle pose en e et un régime dans lequel le Président et la chambre
unique semblent se faire face de manière égalitaire, sans contre-poids, tout en instaurant
une atmosphère parlementariste dès lors que les ministres responsables peuvent être
entendus devant la chambre qui peut les interroger. Le temps aura manqué puisque cette
Constitution sera enterrée après le coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte le 2
décembre 1851. Élu premier président de la République française, Louis Napoléon

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Bonaparte décida en e et de recourir au coup d’État militaire car il n’avait pas obtenu une
majorité su sante pour réviser la Constitution de 1848.

2. L’in uence du modèle américain : étude synthétique des institutions américaines


A. La constitution américaine, origine et évolution
La constitution américaine est la première constitution écrite et unitaire de l’histoire
constitutionnelle moderne. Elle est née à la suite de la Guerre d’indépendance ( n des
années 1770) et repose essentiellement sur un compromis entre les anciennes colonies
britanniques, en vue de constituer une fédération d’États. Cette constitution américaine
marque une innovation fondamentale, sous l’in uence des pères fondateurs : JAY,
MADISON, HAMILTON, en ce qu’elle traduit le constitutionnalisme moderne. La
Constitution américaine se fonde en e et sur quatre grands principes qui sont au
fondement du libéralisme constitutionnel : C’est tout d’abord, l’existence d’une
déclaration de droit protégeant l’individu et la propriété privée. C’est ensuite la
proclamation du principe de séparation des pouvoirs qui est entendu dans un premier
temps sur le mode d’une perception mé ance du pouvoir politique, notamment vis-à-vis
du pouvoir législatif. Troisièmement, c’est la consécration du principe fédéral, non sans
di culté, car de nombreux États du sud préféraient la solution confédérale. Il reste que le
fédéralisme organise une double séparation des pouvoirs : verticale et horizontale, en
additionnant l’autonomie des États et l’institutionnalisation de l’ordre fédéral. En n, la
constitution américaine crée le constitutionnalisme en inventant un organe de contrôle de
la constitutionnalité des lois fédérées, contrôle de constitutionnalité qui sera étendu aux
lois fédérales par la Cour suprême elle-même dans son arrêt de 1803 MARBURY VS
MADISON.

La constitution américaine est un texte assez bref, elle comporte 7 articles qui sont
subdivisés en sections qui traitent des di érents organes fédéraux (Congrès, Pouvoir
judiciaire, Président) et des compétences que la constitution leur attribue ou leur interdit.
La constitution examine également les rapports entre les États fédérés et la fédération,
ainsi que les procédures de révision de la constitution. La brièveté de la constitution
américaine et sa technicité laissent une large place à l’interprétation par les organes
politiques et judiciaires. À cet égard, la constitution américaine est le modèle même de la
constitution rigide, c’est-à-dire qu’elle est di cile à réviser, à modi er. D’un mot ici, on
précisera que l’initiative de la révision peut provenir soit du Congrès fédéral (=Chambre
des représentants + Sénat), soit des parlements des États fédérés. Si le congrès fédéral
est à l’initiative de la révision, celle-ci devra être approuvée par la majorité des deux tiers
de chacune des deux chambres. Si l’initiative provient d’un ou de plusieurs parlements
d’États fédérés, la proposition de révision devra être approuvée par les trois quarts des
États fédérés.

Depuis 1787, 27 amendements ont été adopté pour compléter et modi er la Constitution
de Philadelphie. Les 10 premiers amendements ont été adopté dès 1789 et ils constituent
une sorte de bloc constitutionnel d’origine. Ils renvoient fondamentalement aux droits
individuels, le premier amendement sacralise la liberté de religion, de conscience et
d’association, le second amendement garantit à tout citoyen américain le droit de porter
et détenir une arme à feu. Le cinquième amendement est tout à fait fondamental dans la
culture juridique américaine puisqu’il proclame le DUE PROCESS OF LAW, notion
centrale selon laquelle toute personne soupçonnée d’avoir commis une contravention, un
délit, un crime a le droit à une procédure légale et judiciaire régulière, c’est la forme
historique du droit au procès équitable. Les amendements suivants concernent
davantage la procédure judiciaire et les garanties judiciaires.
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Au 19ème siècle, trois amendements fondamentaux vont intervenir au terme de la Guerre
de Cecéssion. Le treizième (13) amendement abolit l’esclavage en 1865. Le quatorzième
(14) étant le DUE PROCESS OF LAW à tous les citoyens, notamment aux anciens
esclaves en 1868. En n, le quinzième (15) amendement octroie le droit de vote aux
esclaves en 1870.
Des amendements plus récents au 20ème siècle s’intéressent en particulier aux droits
politiques, il s’agit du droit de vote des femmes acquis au terme du dix-neuvième (19)ème
amendement en 1920. En n, l’abaissement de la majorité électorale, le vingt-sixième (26)
amendement en 1971.

B. Les pouvoirs fédéraux


Trois grands pouvoirs caractérisent la constitution américaine : le Congrès, le Président,
et la Cour suprême.

1) Le Congrès
Le Congrès incarne le parlement fédéral : il est bicaméral, la chambre des représentants
représente le peuple d’un côté, le Sénat représente les États fédérés de l’autre.
La Chambre des représentants compte 435 membres, élus pour deux ans, au scrutin
majoritaire à un tour et ré-éligible. Le nombre de représentants est proportionnel à la
population de chaque État membre (Exemple : 53 en Californie). La courte durée du
mandat de la Chambre des représentants rappelle la réticence des pères fondateurs vis-
à-vis du Parlement britannique. Elle montre également la volonté de renouveler
régulièrement les représentants. Pour autant, elle a tendance à favoriser l’électoralisme
des représentants.
Le Sénat, quant à lui, est composé de deux membres par État, il y a donc puisqu’il y a 50
États fédérés : 100 sénateurs qui défendent les intérêts de la fédération. Ils sont élus
selon le même mode de scrutin que les représentants : c’est le principe du WINNER
TAKES IT ALL (La liste qui a 50+1 des su rages prend tous les sièges). Le mandat des
sénateurs est de six ans et la chambre se renouvèle par tiers tous les deux ans.
On précisera que pour être membre de la Chambre des représentants, il faut être citoyen
américain depuis sept ans et avoir au moins 25 ans. Pour être sénateur, il faut être citoyen
américain depuis neuf ans et avoir au moins 30 ans.
Les parlementaires américains disposent d’un régime d’immunité. En revanche, les
parlementaires américains ne peuvent absolument pas être fonctionnaires. En n, le cumul
des mandats est totalement interdit aux États-Unis (Ici, on parle pas du cumul des
mandats dans le temps, mais bien du cumul des mandats e ectifs).

Le fonctionnement du Congrès fédéral repose sur une session annuelle qui ne


s’interrompt qu’au mois d’août. Chaque chambre (Chambre des représentants, Sénat)
peut, durant la session, s’ajourner pour une durée qui ne peut dépasser trois jours. La
Chambre des représentants est sous l’autorité d’un président qu’on nomme le SPEAKER,
ce dernier disposant de pouvoirs d’organisation du travail parlementaire très substantiels.
Quant au Sénat, il a pour président de droit la vice présidente des États-Unis qui est
actuellement Kamala Harris. Toutefois, il s’agit là davantage d’un rôle honori que,
l’autorité principale du Sénat étant le leader de la majorité sénatoriale.

On nira par préciser ici que le Congrès américain, dans son travail législatif, a
particulièrement recours à des commissions permanentes : 25 pour la Chambre des
représentants, 16 pour le Sénat. Mais également il y a des commissions d’enquête,
particulièrement au Sénat, commissions d’enquêtes qui disposent d’un large pouvoir
d’investigation sur l’administration fédérale. Dans l’immensité de son pouvoir législatif, le
Congrès américain a recours à une procédure législative classique : examen du texte en
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commission, inscription du texte à l’ordre du jour, navette parlementaire, et recours
éventuel à une commission mixte pour parvenir à un compromis.

Le Congrès, et en particulier la Chambre des représentants, ont augmenté leur pouvoir


législatif grâce à la pleine maitrise du vote du budget, en particulier après la Guerre du
Vietnam et le WAR POWER ACT en 1973. Depuis cette date en particulier, les chambres
législatives maitrisent le vote du budget de l’administration fédérale qui se trouve de fait
placé sous la dépendance des chambres du point de vue nancier. si les chambres ne
parviennent pas à un accord, ou ne veulent pas parvenir à un accord, sur le budget
fédéral avant le 1er octobre, cela entraîne l’arrêt des activités gouvernementales
fédérales, ce qu’on appelle le SHUTDOWN : les fonctionnaires fédéraux ne sont plus
payés. Plus précisément, le Sénat américain dispose de pouvoirs de nomination et
d’empêchement tout à fait fondamentaux. Il donne notamment son avis et consentement
sur les propositions de nomination du président concernant les membres de l’équipe
présidentielle (secrétaires d’État), les hauts fonctionnaires fédéraux, les ambassadeurs,
les juges fédéraux, dont les juges de la Cour suprême. Les enquêtes du Sénat peuvent
être très poussées et approfondies, le juge Bred KAVANAUGH a été auditionné pendant 3
mois avant de prendre ses fonctions de juges à la Cour suprême. Aussi, le Sénat rati e
les traités internationaux à la majorité des deux tiers. Néanmoins, la pratique
présidentielle du pouvoir à chercher à contourner cette contrainte en recourant aux
accords internationaux en forme simpli ée (EXECUTiVE AGREEMENTS) qui sont signés
par le Président et qui échappent donc au Sénat. Toutefois, le Sénat a obtenu d’être tenu
informé en permanence des engagements internationaux pris par le Président. Le
Congrès maîtrise en n une arme tout à fait décisive qu’est l’IMPUNCHMENT qui repose
sur la responsabilité pénale des titulaires du pouvoir exécutif au sens large (dont les
fonctionnaires) : « Le Président et le vice président des États-Unis et tous les
fonctionnaires fédéraux peuvent être empêchés pour trahison, corruption, crime contre la
chose publique ou délit grave ». La Chambre des représentants décide de l’inculpation, le
Sénat quant à lui se constitue en haute cour, sous la présidence du CHIEF JUSTICE
(président de la Cour suprême) de la Cour suprême. Le verdict du Sénat est rendu à la
majorité des deux tiers. Deux points doivent être mentionnés pour terminer ici : Tout
d’abord, le Congrès a retrouvé « le pouvoir de déclarer la guerre », pour engager les
troupes, le président doit obtenir l’accord préalable du Congrès si le con it envisagé
dépasse les 60 jours d’intervention. Ensuite, le Congrès peut disposer d’un pouvoir
électoral si une majorité ne se dégage pas dans le collège des grands électeurs pour
l’élection du Président.

2) Le Président
Pour être candidat à l’élection présidentielle américaine, il faut être né citoyen des États-
Unis, y avoir résidé 14 ans et être âgé d’au moins 35 ans. Le Président est élu pour quatre
ans, au su rage universel indirect et depuis 1951 et le 22ème amendement, il n’est ré-
éligible qu’une seule fois. Le futur Président se présente en même temps que le candidat
à la vice-présidence qui le remplace en cas de vacance ou d’empêchement. Ensemble,
ils constituent ce qu’on appelle aux USA : un ticket électoral.

La première phase de l’élection présidentielle aux États-Unis est celle de la désignation


du candidat de chacun des deux grands partis : parti démocrate d’un côté, parti
républicain de l’autre. Deux modalités sont classiquement retenues aux États-Unis pour
aboutir à la désignation des candidats, propres à chacun des partis. Soit les partis
recourent à la technique dite de la primaire, qui est organisée dans chaque État fédéré
pour désigner des délégués qui voteront ensuite pour désigner le candidat du parti lors
d’une convention nationale. Le principe des primaires est qu’elles sont ouvertes aux
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sympathisants du parti, il n’y a donc pas d’obligation d’adhérer (payer une cotisation) au
parti. L’autre modalité pour désigner ces délégués qui ensuite désigneront le candidat du
parti lors d’une convention nationale est ce qu’on appelle le CAUCUS, qui est une
primaire fermée en ce sens que seuls les militants du parti pourront voter.
Ensuite, la convention nationale investit le candidat du parti (démocrate ou républicain) et
celui à la vice-présidence.
En n, l’élection présidentielle à proprement parler se déroule le mardi qui suit le premier
lundi du mois de novembre. Le scrutin est le scrutin majoritaire à un tour, chaque État
désigne ses grands électeurs, grands électeurs qui sont uniquement élus pour ensuite
voter pour le candidat qu’ils se sont engagés à soutenir. Ils ne peuvent pas être des
parlementaires et ils sont tenus par un mandat impératif. Leur nombre correspond à
l’addition du nombre de représentants et du nombre de sénateurs. Il y a donc 535 grands
électeurs à l’échelle fédérale, auxquels il faut ajouter 3 grands électeurs pour le district de
Columbia-Washington DC. Dès lors, le candidat vainqueur sera celui qui aura obtenu au
moins 270 grands électeurs. Du point de vue de la sociologie électorale, il est acquis que
certains États votent depuis plusieurs décennies pour le candidat d’un parti, ainsi la
Californie est-elle fondamentalement démocrate, quand le Texas vote principalement
républicain. Le 4 janvier de l’année suivante, les résultats sont o ciellement proclamés
devant le Congrès et le 20 janvier le Président entre o ciellement en fonction.
L’élection présidentielle américaine pose un problème fondamental, en raison de son
mode de scrutin. Il peut en e et se trouver que le vote des grands électeurs ne coïncide
pas avec la volonté du peuple américain. Ce fut notamment le cas en 2000 lors de
l’élection de Georges W. Bush qui avait certes gagné en nombre de voix par rapport aux
grands électeurs, mais qui était devancé par son concurrent Algore de 540 000 voix
individuels. En 2016, Donald Trump a obtenu le soutien de 334 grands électeurs, mais le
nombre de votes populaires favorisaient Hilary Clinton avec 2,9 millions de voix
supplémentaires.

Les pouvoirs du président :


Il maitrise complément le pouvoir exécutif. Il signe les EXCUTIF ORDERS (décrets).
Il aussi fait des déclarations de signatures : par lesquels il interprète et modi e le sens de
la loi.
Il maîtrise complètement la question de la Défense des USA
Il a aussi un droit de grâce.
Il dispose d’un pouvoir législatif contourné :
- Discours sur l’état de l’union : c’est un discours déguisé d’initiative législative
- Le véto aussi est une initiative législative
- Le véto de poche.

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