Birame Faye

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COMMENT CONSTRUIRE LA PROFESSIONNALITE

CHEZ DES MAITRES EN FORMATION


CONTINUE ?

BIRAME FAYE, Inspecteur de l’Enseignement


Elémentaire
Assistant à la FASTEF, UCAD ; Dakar

RESUME
Toute activité humaine en général, la pratique
d’enseignement en particulier, se fait avec une
professionnalité avérée pour atteindre une grande qualité.
La professionnalité de l’enseignant se construit et
s’acquiert en formation initiale et continuée. Elle lui
permet de s’adapter à l’évolution du système éducatif où il
s’active, de s’accommoder au curricula d’éducation et de
formation qui changent, au public scolaire qui se
renouvelle et qui évolue dans son comportement et dans
ses exigences de savoir.
Cet article entre dans la problématique du développement
des compétences professionnelles de base chez des
enseignants en situation de formation.

INTRODUCTION

Parmi toutes les catégories d’enseignants de


beaucoup de pays, y compris le Sénégal, les maîtres
sont ceux qui subissent le plus de formation en cours
de service ou formation continue.

Cependant, au Sénégal, la formation continue n’a


pas encore trouvé un cadre unifié et pérenne, un
pilotage institutionnel officiel, des outils et des
moyens de fonctionnement à la hauteur des
exigences de performance et de professionnalité.
Cela, malgré ce qui a toujours été envisagé au plan
institutionnel à savoir, entre autres :
• mettre les instituteurs titulaires en situation de
recyclage dans les Ecoles Normales Régionales
(ENR) au moment où les élèves-maîtres, en fin de
formation, sont en stage de responsabilité entière ;
• assurer le recyclage des maîtres dans les
Inspections Départementales de l’Education
Nationale (IDEN) pendant les grandes vacances,
suite à l’avènement des Volontaires de l’Education
recrutés et formés de façon accélérée et courte
(trois à quatre semaines) par les inspecteurs dans
ces mêmes IDEN ;
• « faire subir un stage de recyclage à tout maître
ayant obtenu une note inférieure à 9/20 : offre de
formation pendant les grandes vacances » (Voir
cahier des charges des Inspecteurs
départementaux – annexé à la Circulaire N°
000623 / MEN / MD / EBLN /DC/ DEPEE du 30
septembre 1996 – dans la rubrique : ‘’Formation,
Animation, Recherche’’.

En dépit de cette situation lacunaire, ce sont de


nombreuses sessions de formation qui se tiennent
chaque année dans les circonscriptions
départementales des inspections de l’éducation.
Assez souvent, les sessions organisées à l’intention
des maîtres sont initiées à partir des besoins de
formation identifiés par les décideurs et/ou les
formateurs, ou à partir des exigences des nouveaux
curricula.
L’identification des besoins de formation par les
Institutionnels, ou au regard des exigences des
nouveaux curricula, sont-elles les seules portes
d’entrée dans une formation de ce type ? D’autres
portes d’entrée ne peuvent-elles pas être
envisagées ? Par exemples, ne pourrait-on pas
partir des conceptions chez les maîtres qui vont
entrer dans la formation continue à propos des
apprentissages qu’ils vont faire, après un travail
préalable de mise à émergence des conceptions en
question ? Pourquoi ne pas partir de l’identification
des besoins de formation exprimés par les maîtres
eux-mêmes à travers des discours recueillis et
analysés par des méthodes éprouvées et maitrisées ?
Aujourd’hui, le public scolaire et les curricula
changent. L’efficacité de l’action d’enseignement
et/ou de formation devient une exigence.
L’amélioration de la qualité des apprentissages des
élèves est un des objectifs majeurs définis dans des
programmes éducatifs stratégiques comme le PDEF.
En conséquence, l’acquisition par les maîtres de la
professionnalité devient très importante et sa
construction à travers la formation qu’on donne à
ceux-ci devrait se faire à partir d’une porte (ou de
portes) d’entrée bien pensée(s) et bien choisie(s).

Cet article portant sur la recherche d’une porte


d’entrée possible dans la construction de la
professionnalité de l’enseignant en formation
s’articule autour des points suivants :
 LA CLARIFICATION DU CONCEPT DE
PROFESSIONNALITE ;
 UNE REVUE SOMMAIRE DE LITTERATURE ;
 UNE PROBLEMATIQUE SUCCINCTE ;
 CONSTRUIRE LA PROFESSINNALITE DE
L’ENSEIGNANT EN FORMANTION : QUELLE(S)
PORTE(S) D’ENTREE ?

1. LA CLARIFICATION DU CONCEPT DE
PROFESSIONNALITE

L’emploi d’un terme un peu technique (la


professionnalité) dans le libellé de notre thème nous
oblige à faire une clarification de concept.
En ingénierie de la formation, on met une nuance
(de manière didactique peut-être) dans l’acception
de deux concepts qui recouvrent la même réalité :
• le métier : « type de travail habituellement manuel
qui exige des connaissances, des habiletés
particulières et des compétences » (Renald
LEGENDRE, 2005) ;
• et la profession : type de travail qui exige des
connaissances et des compétences et dans l’exercice
duquel on « réalise des actes intellectuels non
routiniers dans la poursuite d’objectifs en situation
complexe » (LEMOSSE, 1989 ; BOURDONCLE,
1993).
Du terme profession, dérivent les substantifs :
professionnalisme, professionnalisation et
professionnalité. Selon Renald LEGENDRE (2005) :
- « La profession concerne une catégorie de travail ;
la professionnalité concerne les caractéristiques
objectives et subjectives de cette profession »
_LESSARD, C. (03.91) ;
- La professionnalisation est le « fait de faire accéder
un domaine de savoirs et d’activités au statut d’une
profession ». Exemple : la professionnalisation de
l’éducation.
- Le professionnalisme est un « ensemble de valeurs,
d’attitudes, de conceptions concernant le rôle que le
professionnel est censé épouser et actualiser dans
l’accomplissement de son travail » _LESSARD, C.
(03.91).

A la lumière de ces définitions, on comprend que la


professionnalisation est un processus et le
professionnalisme un référentiel pour celui qui
accomplit une profession.

Quant à la professionnalité, la précision apportée par


PERRENOUD et concernant le professionnel
enseignant est celle que nous retenons :
« La professionnalité d’un enseignant se caractérise
certes par la maîtrise de ‘’savoirs professionnels divers’’
(les savoirs enseignés, les grilles d’analyse des
situations, les savoirs quant aux procédures
d’enseignement, etc.) mais également par des schèmes
de perception, d’analyse, de décision, de planification,
d’évaluation ...qui lui permettent de mobiliser ses
‘’savoirs’’ dans une situation donnée » (PERRENOUD,
1994c). Et Léopold PAQUAY d’ajouter « les attitudes
nécessaires au métier, telles que la conviction de
l’éducabilité, le respect de l’autre, la connaissance de
ses propres représentations, la maîtrise de ses
émotions, l’ouverture à la collaboration, l’engagement
professionnel » (L.PAQUAAY, 1996).

2. REVUE SOMMAIRE DE LITTERATURE


Construire la formation de gens qui vont embrasser
le métier d’enseignant, ou la formation d’enseignants
qui sont en cours de service, est une question
abondamment théorisée dans la littérature. Les
auteurs des théories sont obligés d’être explicites sur
ce qu’ils appellent ‘’construire la formation’’,
parfois même de faire la description détaillée des
composantes essentielles d’un curriculum de
formation et des principales étapes de sa mise en
œuvre.

Une équipe du CEPEC de Lyon, sous la direction de


Pierre GILLET, a décrit (dans un ouvrage intitulé
Construire la formation, 1994, p.44-45) un processus
dans l’entreprise humaine de formation de
personnels enseignants.

Le dit processus part d’un projet éducatif


institutionnel qui peut être compris comme un
ensemble de valeurs auxquelles la Société se
reconnait et dans le déroulement du quel le
formateur et les formés projettent leurs actions à
travers leurs représentations idéales, auxquelles ils
donnent du prix, qu’ils valorisent.
De ce projet éducatif, on tire un projet pédagogique
qui décrit en termes de capacités et de compétences
le profil de sortie sur lequel s’engagent les
partenaires de l’action éducative, pour le terme
d’une formation ou d’un cycle de formation. Dans
une approche systémique, les concepteurs
mentionnent les programmes de formation, les
moyens de mise en œuvre, les échéances, les
modalités d’évaluation certificative (examens et
diplômes).

Le projet pédagogique, parfois défini dans des


généralités, contenant des capacités et des
compétences spécifiques pour certaines et
transversales pour d’autres (lorsque des profils de
sortie différents sont ciblés), est opérationnalisé par
un plan ou un curriculum de formation. Ce
curriculum est construit autour de capacités et de
compétences spécifiques sélectionnées dans le
projet. Il intègre des contenus scientifiques,
mentionne des moyens et des stratégies pour
atteindre des objectifs définis et ceci à la fin d’une
séance, ou d’une séquence, ou d’un module, et enfin,
en définissant les formes d’évaluation qui vont sous-
tendre les prises de décisions objectives à l’endroit
des formés.
L’examen critique d’un tel curriculum qui se réfère à
des valeurs permet de comprendre que la porte
d’entrée va être les ‘’besoins de formation identifiés
par les Institutionnels (les décideurs et les
formateurs). L’examen critique permet également de
poser l’hypothèse qu’il vise à construire la
professionnalité des bénéficiaires.

Toujours dans la théorisation de la porte d’entrée


dans une formation visant la construction de la
professionnalité des enseignants, Léopold PAQUAY,
Marguerite ALTET, Evelyne CHARLIER et Philippe
PERRENOUD (1996) partent de la question
essentielle suivante : « que doit pouvoir faire un
enseignant professionnel ? »
Après l’analyse de plusieurs modèles, leur réponse a
été « qu’un professionnel devrait être capable :
• d’analyser des situations complexes, […] ;
• de faire de façon à la fois rapide et réfléchie le
choix de stratégies adaptées aux objectifs et aux
exigences éthiques ;
• de puiser, dans un large éventail de savoirs, de
techniques et d’outils, les moyens les plus adéquats, de
les structurer en dispositif ;
• d’analyser de façon critique ses actions et leurs
résultats ;
• enfin, [ … ] d’apprendre tout au long de sa
carrière. »

Ces items laissent apparaître, en filigrane, des


compétences à acquérir par l’enseignant
professionnel et donc à développer chez lui en
situation de formation.
Les auteurs estiment qu’il importe d’être au clair
quant au processus de développement de
compétences professionnelles, ce qui ne va pas sans
clarification préalable de la nature d’une compétence
et sa genèse.
La clarification part d’un triple questionnement :
• « qu’est-ce qu’une compétence professionnelle
mise en œuvre par un enseignant expert ?
• comment ces compétences s’acquièrent-elles ?
• comment organiser l’apprentissage de ces
compétences professionnelles ? »

La théorie qui vient d’être décrite est fondamentale.


En effet, si on choisit d’entrer par les compétences
dans une formation qui vise la construction de la
professionnalité, on apporte en amont des réponses
claires au triple questionnement ci-dessus.

Une compétence professionnelle mise en œuvre par


un enseignant expert est sa capacité de mobiliser,
dans une situation de résolution de problème de
pratique d’enseignement, des savoirs, des savoir-
faire et des savoir-être acquis dans d’autres
situations de la même famille que la situation
d’enseignement. Une situation
d’enseignement/apprentissage est toujours
complexe, jalonnée de problème identifiés à
l’avance et d’autres qui apparaissent de façon
insidieuse.

L’enseignant expert, professionnellement


compétent, est celui capable de faire, de façon
intelligente, la résolution des problèmes au fur et à
mesure qu’ils apparaissent dans la situation cible et
d’avancer. C’est celui qui, de façon intelligente, sait
réinvestir dans une situation problème nouvelle des
aptitudes pédagogiques acquises dans d’autres
situations d’apprentissage ou d’exercice de la
profession.

Les compétences professionnelles s’acquièrent dans


la formation à la profession, puis s’installent et se
renforcent dans la pratique de cette profession. Dans
tous les cas, elles s’acquièrent en situation et ne
s’observent que dans la réalisation d’activités
professionnelles en situation.
Organiser l’apprentissage de ces compétences
professionnelles c’est, dans un dispositif bien pensé,
créer des situations significatives, placer les formés
dans ces situations et, au moyen de consignes
précises, les amener à mobiliser tous les types de
savoirs antérieurement acquis pour réaliser une
production dans le cadre d’une pratique
d’enseignement, ou d’une évaluation qui peut être
suivie de remédiation.

Au-delà de l’entrée par les compétences, il existe


plusieurs autres portes d’entrée suggérées par
d’autres auteurs et qu’on peut explorer, comme
celle proposée par Evelyne CHARLIER (1996) qui a
développé tout une théorie sur une construction de la
professionnalité chez des enseignants en formation
continuée articulée à la pratique. Cette formation a
été réalisée de 1990 à 1992, dans le cadre de la
mise en œuvre d’un projet de recherche-action-
formation commandité au Département Education et
Technologie des Facultés Universitaires Notre Dame
de la Paix (DET / FUNDP) de Namur, par le Cabinet
du Ministre de l’Education et de la Formation de la
Communauté Française de Belgique. Elle visait à
aider les enseignants à développer leur adaptabilité à
une variété de situations éducatives et la porte
d’entrée a été la recherche-action.

En définitive, toutes les activités déployées pour


réaliser la construction de la professionnalité de
l’enseignant en formation et toutes les théories
développées sur cette professionnalité entrent dans
le cadre de la problématique de l’évolution de la
profession enseignante dans un contexte de
mondialisation, dont les effets les plus observés, en
milieu éducatif, sont les changements des publics
scolaires, des curricula et des Sources du Savoir.
3. PROBLEMATIQUE SUCCINCTE

Selon Léopold PAQUAY, Marguerite ALTET, Evelyne


CHARLIER et Philippe PERRENOUD (1996), « former
des professionnels de l’organisation de situations
d’apprentissages, telle est ou deviendra sans doute
la visée centrale de la plupart des programmes et
des dispositifs de formation initiale et continuée des
enseignants de la maternelle à l’Université ».

Cette visée de professionnalité tire sa source et sa


légitimité de plusieurs études, en particulier
sociologiques, sur les professions. Selon les mêmes
auteurs, ces études « montrent une évolution nette
au cours des dernières années de la plupart des
métiers relatifs à l’humain : infirmiers, assistants
sociaux, journalistes, …enseignants. Ainsi donc, pour
répondre aux défis sans précédents de la
transformation nécessaire des systèmes éducatifs, le
rôle des enseignants devrait évoluer. Dans la plupart
des pays occidentaux, l’enseignant est en voie de
passer d’un statut d’exécutant à celui de
professionnel ».

D’autres études sur cette même évolution sont


également connues. D’après Evelyne CHARLIER
(1996), dans un article récent, Philippe PERRENOUD
(1994 h) identifie deux voies possibles d’évolution du
métier d’enseignant : d’une part, la prolétarisation
et, d’autre part, la professionnalisation :
- « les enseignants se trouvent progressivement
dépossédés de leur métier au profit de la noosphère
des gens qui conçoivent et réalisent les programmes,
les démarches didactiques, les moyens d’enseignement
et d’évaluation, les technologies éducatives et qui
prétendent livrer aux maîtres des modèles efficaces
d’enseignement, c’est une forme de prolétarisation ;
- les enseignants deviennent de véritables
professionnels, orientés vers la résolution de
problèmes, autonomes dans la transposition didactique
et le choix des stratégies, capables de travailler en
synergie dans le cadre d’établissement et d’équipes
pédagogiques, organisés pour gérer leur formation
continue, c’est la professionnalisation ».

Et Evelyne CHARLIER d’ajouter que non seulement


PERRENOUD a attiré l’attention sur le danger de la
prolétarisation, mais il a prôné une formation visant
à aider les enseignants à devenir plus professionnels.
La question de la professionnalité de l’enseignant est
aujourd’hui posée. Dans la tendance actuelle de la
formation des maîtres, plus précisément de la
construction de la professionnalité, si on veut être
pertinent, efficace et utile, le questionnement doit
être lucide, concis, bien ciblé. Dans ce
questionnement, on devrait, entre autres, soulever
les interrogations suivantes :
- que doit pouvoir faire un enseignant professionnel
ou quelles compétences professionnelles devraient-on
développer chez un enseignant dans la construction de
sa professionnalité en formation ?
- par quelle (s) porte (s) d’entée devrait-on passer
avec les bénéficiaires dans cette formation:
• s’agira-t-il de partir des besoins des bénéficiaires
identifiés clairement et avec méthodologie ?
• s’agira-t-il de partir des savoirs professionnels
divers (les savoirs enseignés, les grilles d’analyse des
situations, les savoirs quant aux procédures
d’enseignement, etc.) identifiés par les Institutionnels ?
• s’agira-t-il de partir d’un curriculum complexe,
rigoureusement écrit dans ses composantes
essentielles : un référentiel de compétences
professionnelles, un programme de formation, un
système d’évaluation de la maîtrise des compétences
professionnelles développées chez les formés ?

Les réponses à ces questions, apportées dans le


cadre de réflexions, d’investigations, d’études, de
recherches, de réalisations d’activités de formation,
pourraient mieux préparer les enseignants à jouer
plus efficacement leur rôle, face aux défis sans
précédents de la transformation nécessaires et
inéluctables des systèmes éducatifs.
Pour répondre ici à ces questions nous avons d’abord
fait une exploration de la littérature. Ainsi, avons-
nous parcouru : des œuvres traitant de la formation
continue, du professionnalisme, de la
professionnalité et de la professionnalisation ; des
articles portant sur la formation des enseignants ;
des textes officiels relatifs au système éducatif du
Sénégal et traitant de la formation et de la gestion
des enseignants , de l’appui des formateurs sur le
plan des outils de formation (les objectifs, les
contenus, les compétences professionnelles de base
formulées, des stratégies de formation et des
démarches d’évaluation des compétences
disciplinaires chez les élèves).

Cette exploration, suivie d’une analyse de


contenus, nous a permis d’enrichir notre texte par
des citations.

Enfin, pour la quatrième et dernière partie du texte


intitulé : ‘’Construire la professionnalité de
l’enseignant, quelle (s) porte(s) d’entrée ?’’, nous
avons modélisé le curriculum que nous proposons
comme contribution à la construction de la
professionnalité du maître en situation de formation
continue.

4. CONSTRUIRE LA PROFESSIONNALITE DE
L’ENSEIGNANT EN FORMATION :
QUELLE (S) PORTE (S) D’ENTREE ?

Pour ce dernier chapitre, nous allons prendre pour


exemple le Sénégal dans son système éducatif de
base. Un Curriculum de l’Education de Base (CEB)
s’implante dans ce sous secteur depuis une dizaine
d’années et diverses activités de construction de la
professionnalité des maîtres en formation
continuée accompagnent cette implantation.

Deux portes d’entrées sont prises en compte dans


cette formation :
• Les exigences du nouveau Curriculum de
l’Education de Base (CEB) qui finit de s’implanter ;
• L’entrée par les compétences qui est l’option dans
la formation des maîtres.

Pour le premier point, nous n’allons pas nous


étendre. Nous considérons simplement qu’une
nouvelle réforme est en train de s’implanter, et
logiquement, on ne peut pas introduire une nouvelle
réforme dans un système éducatif sans
l’accompagner par une formation continue des
maîtres.

Toute la théorie que nous allons développer va donc


porter sur la formation continue des maîtres qui
accompagne l’implantation du Curriculum de
l’Education de Base (CEB) au Sénégal, formation
assurée avec comme porte d’entrée l’approche par
les compétences. Comment élaborer une bonne
porte d’entrée pour une construction solide de la
professionnalité du maître dans la formation
continue ?

4.1. Aperçu sur l’option du Sénégal de


l’Approche Par les Compétences (APC) et de la
Pédagogie de l’Intégration (PI).

La référence, pour cet aperçu, est : LE GUIDE


PEDAGOGIQUE DU FORMATEUR (CEB DU
MINISTERE DE L’EDUCATION), EENAS 2005.

Au Sénégal, depuis l’année 2000, les gestionnaires


du système éducatif à la base, suite à l’analyse des
limites de l’entrée par les contenus d’une part, et de
la Pédagogie Par Objectifs (PPO) d’autre part, ont
adopté l’approche curriculaire, eu égard au caractère
plus complet et englobant d’un curriculum.

Les spécialistes de l’approche curriculaire définissent


un curriculum comme un ensemble planifié de
finalités, d’objectifs, de
contenus/capacités/compétences à acquérir par les
apprenants, de démarches pédagogiques, de
matériel didactique (imprimé ou non imprimé), de
modalités d’évaluation de la maîtrise des
contenus/capacités/compétences et d’un référentiel
de formation des maîtres.
A travers le curriculum construit et en implantation,
les gestionnaires du système éducatif ont introduit
dans l’éducation de base :
 l’APC, consistant à développer chez les apprenants
des compétences de base disciplinaires,
interdisciplinaires et transversales ;
 la PI qui permet à l’élève de mobiliser, de façon
pertinente et coordonnée, ses acquis pour résoudre
(dans une situation) un problème complexe, à l’image
de ce qui se fait dans la vie courante, donnant ainsi du
sens aux apprentissages qu’il fait.

Ces changements introduits dans le sous secteur de


l’éducation de base relèvent d’un souci d’adaptation
du Sénégal aux mutations dans l’environnement
national et international, mais aussi d’un souci de
faire entrer le système éducatif sénégalais et de
manière appropriée dans la modernité. En effet, le
3ème millénaire est marqué par une dynamique
accélérée de mondialisation et la nécessité pour les
ressources humaines d’un pays, quel qu’il soit, d’être
de plus en plus compétentes. Les gestionnaires ont
pris conscience qu’une bonne mise en œuvre du CEB,
dont l’un des objectifs majeurs est d’améliorer de
façon significative la qualité des apprentissages
scolaires, nécessite une formation des maîtres visant
à construire leur professionnalité et à leur faire
acquérir les compétences professionnelles de base
nécessaires et suffisantes à assurer leur aptitude
pédagogique à appliquer l’APC et la PI.

4.2. Un paradigme de curriculum de formation


pour une construction de la professionnalité
des maîtres.

Il s’agit d’un paradigme visant la construction de la


professionnalité et le développement des
Compétences Professionnelles de Base (CPB) chez
des maîtres en situation de formation à l’APC et à la
PI.
Pour une formation des maîtres dans le cadre de
l’implantation progressive du CEB, le choix fait de
l’approche par les compétences professionnelles
comme porte d’entrée dans la construction de la
professionnalité de ces enseignants est une option
logique. C’est dans le cadre de cette option que
nous proposons le paradigme ci-dessous.

Quatre compétences professionnelles de base (CPB)


devraient être développées chez les formés pendant
la session ou la série de sessions de formation. Ces
compétences sont ainsi formulées :
 CPB 1 : maîtriser en situation d’apprentissage les
concepts et les principes directeurs de l’APC et la PI et
être capable de les réinvestir dans une situation de
réalisation d’activités professionnelles ;
 CPB 2 : maîtriser en situation d’apprentissage les
techniques de formulation des compétences de base
disciplinaires, interdisciplinaires et transversales et être
capable de les réinvestir dans une situation de
réalisation d’activités professionnelles ;
 CPB 3 : maîtriser, en situation d’apprentissage,
les techniques de construction et d’exploitation de
Situations Significatives d’Intégration (SSI) et être
capable de les réinvestir dans une situation de mise en
œuvre de la PI;
 CPB 4 : maîtriser, en situation d’apprentissage, la
méthodologie et les techniques d’évaluation de la
maîtrise par les élèves des compétences disciplinaires
de base (méthodologie et techniques adaptées à l’APC)
et être capable de les réinvestir dans une situation
d’identification des performances des élèves et
d’élaboration d’un dispositif de rémédiation des
mauvaises performances ;

Ces compétences professionnelles de Base sont


regroupées dans un ensemble appelé référentiel de
compétences. Ce référentiel de compétences
constitue la Composante 1 du curriculum de
formation que nous proposons. Cette composante
doit être articulée à quatre autres composantes :
 composante 2 : le programme de formation
constitué des objectifs spécifiques et des contenus de
formation ;
 composant 3 : le dispositif d’organisation de la
formation ;
 composante 4 : le système d’évaluation de la
maîtrise des compétences professionnelles de base.
 composante 5: le dispositif de
suivi /renforcement /consolidation sur le terrain des
savoirs acquis en situation de formation et très bien,
moyennement ou insuffisamment maîtrisés dans la
phase apprentissage.
Modèle de mise en cohérence des composantes du curriculum de
formation professionnelle

Référentiel de compétences professionnelles de base à développer chez les


maîtres à former.

Programme de formation
Objectifs spécifiques ;
Contenus de formation

Dispositif d’organisation de la Système d’évaluation de la


formation : maîtrise des CPB
- Adoption d’une analogie claire et - Construction de situations cibles
précise ; pour le transfert par les formés
- Mobilisation du matériel didactique des savoirs acquis ;
imprimé et non imprimé ; - Construction de barèmes de
- Identification des principaux acteurs correction composés de critères
(Formateurs et maîtres bénéficiaires) (minimaux et de
- Modalités de formation : travaux perfectionnement) et d’indicateurs
d’atelier, plénière, apport d’évaluation objective de la
d’informations, mise à disposition de maîtrise des CPB.
documents ;
- Détermination du nombre de
sessions et de la durée de chacune ;

Suivi sur le terrain :


- Du réinvestissement par les formés des acquis de la formation.
- De l’encadrement rapproché des maîtres par les Inspecteurs pour aider à
consolider les CPB installées chez les formés.
- De l’implication des formés dans la formation d’autres collègues.
Le paradigme ci-dessus est une version mieux élaborée,
plus explicite et plus lisible, et par conséquent une version
améliorée de ce qui se fait sur le terrain (au Sénégal) en
matière de construction de la professionnalité des maîtres
en situation de formation continue, formation
accompagnant l’implantation du CEB.

CONCLUSION

La construction de la professionnalité du maître,


qualification à acquérir en formation initiale prolongée et
renforcée par la formation en cours de service, apparaît
comme une impérieuse nécessité. Cela découle d’un
certain nombre d’évolutions actuelles :
• l’évolution du Monde qui se traduit par la
mondialisation de tout ;
• l’évolution des systèmes éducatifs ;
• l’évolution des métiers en général et du métier
d’enseignant en particulier ;
• l’évolution des curricula ;
• l’évolution des apprenants dans leur culture, dans
leur développement intellectuel et dans leur
comportement.

Elle découle également de la multiplicité actuelle des


sources du Savoir. En effet, en dehors du savoir tiré des
manuels et de tout autre matériel didactique, transmis
par le maître par une démarche ou une autre, l’apprenant
de nos jours tire des connaissances des technologies de
l’information et de la communication à travers l’espace
fécond de savoirs qu’est l’ internet. Il tire aussi des
connaissances des multimédias (radio, télévision,
journaux et autres).
Devant cette évolution multidimensionnelle et cette
diversité des sources de savoirs, la tendance actuelle de
la formation des enseignants est de préparer des maîtres
professionnels de l’organisation de situations
d’apprentissage, des techniciens de la pédagogie et de
l’ingénierie de la formation. Cette tendance actuelle de la
formation professionnelle des maîtres est caractérisée
par :
• la conception et la mise en œuvre de nouveaux curricula,
plans, programmes ou projets de formation initiale et / ou
continue ;
• l’élaboration de référentiels de capacités et de
compétences professionnelles à développer chez les
formés ;
• la réécriture des programmes de formation, qui
intègrent des objectifs spécifiques à atteindre et des savoirs
à faire acquérir ;
• l’amélioration des démarches, des stratégies et des outils
de formation ;
• le perfectionnement des dispositifs de formation ;
• l’articulation et la mise en cohérence du triptyque
recherche-action-formation.

Cet article se veut une contribution à la réflexion et au


débat sur la nécessité de la construction de la
professionnalité du maître, mais également une
contribution à la conception de curricula de formation.

BIBLIOGRAPHIE

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Ressources pédagogiques pour la formation des professeurs de
mathématiques. Ecritures plurielles, revue semestrielle
d’études universitaires, N° 03 / 12-09.

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