Droit Bancaire

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UNIVERSITE ALIOUNE DIOP DE BAMBEY

UFR : ECOMIJ
Département : Ingénierie juridique

COURS

DROIT BANCAIRE

Niveau : Licence 3 DAC

Chargé du cours : Dr. Papa Saër GUEYE

Année académique : 2021-2022


© Droit bancaire / Dr. Papa Saër GUEYE / ECOMIJ / IJ / UADB / 2021-2022

INTRODUCTION

Le financement de l’activité économique est une pièce maitresse dans le


processus de développement 1 d’un pays. Un pays qui prétend au développement doit
nécessairement disposer d’un système financier fort pouvant prendre en charge les
besoins de crédit des acteurs du milieu des affaires, mais aussi les risques liés à ces
besoins.

Au Sénégal nous avons un système financier composite qui regroupe aussi


bien des acteurs du secteur informel que formel. Dans le premier, nous avons des
acteurs qui utilisent des méthodes traditionnelles de financement de leurs activités par
exemple les tontines (Natt), les prêts entre vifs assortis d’intérêts (soul bouki-souli
bouki) etc. Dans le second nous avons les sociétés d’assurances 2, les systèmes
financiers décentralisés3, le marché financier régional4, les établissements de crédits5.

Ces deux derniers (marché financier, établissements de crédits) sont pris en


charge, dans une approche pédagogique, par le droit du financement. En d’autres
termes, le droit du financement englobe aussi bien le droit des marchés financiers que
le droit bancaire. Tout compte fait, ce cours ne s’intéressera qu’au droit bancaire
abstention sera faite du droit des marchés financiers.

Pour ce faire, il sera question dans ce chapitre introductif de parler d’abord de


l’évolution historique du secteur bancaire (1), ensuite voir la branche du droit qui
étudie ce secteur (2), en outre, parler de ses sources (3) en plus de son importance (4)
et enfin, proposer une référence bibliographique (5).

1
NDIAYE, (C-A-W), Le transfert électronique de fonds : le transfert d’argent et la monnaie
électronique, éd. L’Harmattan-Sénégal, 2018, p.11.
2
Même si elles font parties du secteur financier, les sociétés d’assurance ou de réassurance ne sont pas
considérées comme établissements de crédit dans la mesure où leurs activités principales se résument à
la mutualisation des risques en garantissant le paiement d’un montant en cas de réalisation d’un risque
3
Les systèmes financiers décentralisés (SDF) sont des institutions de micro finance, ils sont
réglementés au Sénégal par la loi organique n°2008-47 du 3 septembre 2008 (J.O.R.S n° 6452 du 31
janvier 2009), et son décret d’application, le décret 2008-1366 du 28 novembre 2008..
4
La Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM) a pour principales missions l'organisation du
marché boursier, la cotation et la négociation des valeurs mobilières, la promotion et le développement
du marché.
5
Ce sont les banques et les établissements financiers à caractère bancaire, ils sont réglementés par la loi
bancaire n° 2008-26 du 28 juillet 2008.

1
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1- L’évolution historique du secteur bancaire

La pratique de l’activité bancaire existait depuis l’antiquité. On fait remonter


ses origines à Babylone où, dès le 2e millénaire av. J-C, le prêt sur marchandises se
pratiquait déjà dans l’enceinte des temples 6. Avec l’apparition de la monnaie, vers le
7e siècle avant notre ère, les opérations de prêts et de dépôts ont pris un nouvel essor.

À partir du 9e siècle, ce sont principalement les Italiens qui ont créé la


première banque à Venise en 1151. Il s’y ajoute que les templiers et les juifs, qui
étaient des groupes fortement structurés en réseaux ont donné naissance à une activité
de banque mieux ordonnée, assise sur la création de nouveaux instruments financiers
permettant le développement du crédit et facilitant la circulation de la monnaie.

Au 19e siècle on a assisté à une révolution industrielle ce qui fait que l’essor
des banques est favorisé par trois facteurs :

- le développement de la monnaie fiduciaire (c’est-à-dire les billets) ;

- le développement de la monnaie scripturale (en compte) ;

- le développement du financement des entreprises industrielles et commerciales par


le biais d’émission de titres, ancêtres des valeurs mobilières etc.

En Afrique l’évolution historique du secteur bancaire se résume en trois


grandes étapes : la première renvoie à l’avènement des banques d’émission privées, la
deuxième est celle des banques d’émission publiques, et la troisième est celles des
banques dites modernes.

 Première étapes : banques d’émission privées

La 1ère banque d’émission d’Afrique Noire Francophone est la Banque du


Sénégal (BS) créée par le décret du 21 décembre 1853 signé par Louis Napoléon
Bonaparte7. Elle avait son siège à Saint-Louis et couvrait le seul territoire du Sénégal.
Son capital était fixé à l’époque à 230.000F.

6
V. Code d’Hammourabi vers 1750 avant J.-C, V. Scheil, V., La loi de Hammourabi, 2e éd., Ernest
LEROUX, Paris, 1904.
7
V. BCEAO, Chronologie des événements marquants de l’histoire de la BCEAO et de l’UMOA,
Septembre 2017, p. 1.

2
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Avec le développement des comptoirs commerciaux sur les côtes d’Afrique, il


devenait de plus en plus nécessaire d’élargir son champ d’activité. C’est ainsi qu’elle
a été mise en liquidation et remplacée à partir du 01 juillet 1901 par la Banque de
l’Afrique Occidentale (BAO)8 dont le capital social était de 1.500.000 F. Le siège qui
était à Saint-Louis est transféré à Paris pour permettre à la banque d’étendre ses
activités sur l’Afrique Occidentale Française (AOF).
A partir de 1925, elle couvrait également l’Afrique Equatoriale (Cameroun et
Togo)9. La BAO est restée une banque exclusivement privée jusqu’en 1929 avec
l’avènement de la loi du 29 janvier 192910 qui l’a transformé en banque d’économie
mixte avec une participation des pouvoirs publics au capital.
 Deuxième étape : banques d’émission publiques

Après la deuxième guerre mondiale, la BAO avait conservé le privilège de


l’émission monétaire en AOF et au Togo. En 1955 ce privilège lui est retiré au profit
d’un institut d’émission appelé « Institution d’Emission de l’AOF et du Togo »11.
Cette mesure marque un tournant décisif dans l’évolution monétaire des territoires
d’Afrique. Elle apporte, une séparation entre le rôle d’émission monétaire et les
fonctions purement bancaires. A cet effet, l’émission monétaire est assurée par
l’Institut d’Emission, tandis que les opérations bancaires restent du domaine des
banques commerciales.

Avec l’ordonnance du 4 avril 1959 l’Institut d'Emission de l'AOF et du Togo


prend la dénomination de Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(BCEAO)12. Cette évolution sera accentuée à partir des années 60 par l’avènement des
banques africaines modernes.

8
La particularité de la BAO est qu’elle jouait deux rôles différents. C’était d’abord une banque
d’émission, mais également une banque commerciale chargée de collecter des dépôts et d’octroyer du
crédit.
9
Décret du 9 décembre 1925 prorogeant les privilèges de la BAO.
10
Le 29 janvier 1929 date de la promulgation de la loi portant renouvellement du privilège d'émission
de la Banque de l'Afrique Occidentale.
11
Décret n° 55-103 du 20 janvier 1955 portant réforme du régime de l’émission et création de l'Institut
d'Emission de l'AOF et du Togo.
12
V. art. 1 de l’ordonnance n° 59-491 du 4 avril 1959, relative au régime de l'émission monétaire des
Etats de l'Afrique de l'Ouest.

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 Troisièmes étapes : les banques africaines modernes

Au lendemain des indépendances, la France a voulu maintenir la position


économique acquise, dans ses colonies. Ce qui fait que les banques françaises ont, dès
le début des années 1960, transformé leurs agences africaines en filiales de droit local.
Ainsi, les banques implantées sur le territoire des jeunes Etats africains étaient des
banques commerciales étrangères ou plus précisément des pièces de groupes
bancaires situés dans l’ancienne métropole 13. Cela n’empêche que des efforts ont été
effectués par les Etats africains pour prendre en charge la question monétaire et
bancaire. C’est ainsi qu’en 1962 un traité a été élaboré pour instituer l’Union
Monétaire Ouest Africaine (UMOA) 14 chargée d’harmoniser la législation monétaire
et bancaire de certains Etats africains 15.

En 1973 un nouveau traité a été signé 16, il fut complété en 1994 par le traité de
l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine 17 qui en plus de l’aspect monétaire
vise l’harmonisation des législations économiques des Etats membres. Cela dit, il
convient maintenant de voir la branche du droit qui étudie l’organisation et le
fonctionnement des banques qui est le droit bancaire.

2- Le droit bancaire

Dans droit bancaire, le terme « banque » apparait. L’étymologie de ce mot


remonte, selon le dictionnaire Robert18, en 1458. Emprunté de l'italien « banca », elle
était considérée au 14e siècle comme un « comptoir de vente » avant de devenir un «
établissement de prêt » au 15e siècle. L’intervention de ce dernier répond, de façon
constante et satisfaisante, à la rencontre entre l'offre et la demande de capitaux.
Autrement dit, entre les agents économiques à capacité de financement et les agents

13
SAKHO, (A), Cours de droit bancaire, FSJP-UCAD, 2012-2013, p. 1.
14
Traité du 12 mai 1962 instituant l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) entrée en vigueur le 1 e
novembre 1962.
15
L’UMOA regroupait 6 Etats : la Cote d’Ivoire, le Dahomey (actuel Bénin), la Haute Volta (actuel
Burkina fasso), le Niger, la Mauritanie et le Sénégal. Le Togo qui est resté à l’état de négociation avait
décidé d’adhérer en novembre 1963.
16
Nouveau traité de l’UMOA signé du 14 novembre 1973 à Paris. Etaient présent au moment de la
signature le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Niger, le Sénégal, le Togo. La Mauritanie
s’était déjà retirée pour créer ses propres institutions monétaires le 30 mai 1973 sa banque centrale
nationale et une monnaie propre appelée Ouguiya. Par la suite, la République du Mali fait son entrée le
17 février 1984 ainsi que de la République de Guinée-Bissau le 19 janvier 1997.
17
Traité de l’UEMOA du 10 janvier 1994.
18
Dictionnaire, Le Robert, Edition corrigée, 1981, p.406. V. aussi Dictionnaire électronique, Le grand
Robert de langue française, version 2.0, SEJER, 2005.

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à besoin de financement. Ce qui fait qu’aujourd’hui la disponibilité de la banque aux


côtés de l’homme d’affaires est constante pour lui permettre de réaliser ses projets
d’appui à l’économie19. A cet effet, la branche du droit qui étudie l’organisation et le
fonctionnement de ces institutions est le droit bancaire. Il peut être défini comme
« l’ensemble des règles régissant les opérations de banque et ceux qui les
accomplissent à titre professionnel ». En tant que discipline juridique, le droit
bancaire présente des sources.

3- Les sources du droit bancaire

Le droit bancaire présente des sources qui sont d’origine diverses. On peut,
entre autres, citer les décisions des organes directeurs de la profession bancaire
(Banque centrale, Commission bancaire etc.) la jurisprudence, les usages bancaires
qui régissent les rapports entre établissements de crédits, et clients, le droit
communautaire (législation communautaire UMOA, UEMOA) etc. Il s’y ajoute un
mélange des règles relevant du droit public et du droit privé raison pour laquelle, il est
dit que le droit bancaire appartient au droit économique 20 et comme tel il présente une
importance particulière.

4-L’importance du droit bancaire

Le droit bancaire présente une importance théorique et pratique. Elle est


théorique dans la mesure où le droit bancaire n’est pas une branche du droit
autonome21. Tout de même c’est un droit professionnel dans la mesure où il permet
d’appréhender les activités liées à la monnaie (émission, change, distribution de crédit
etc.). Il s’y ajoute qu’il est constituée d’un ensemble de règles diverses, mais rendues
solidaires et homogènes par leur application aux établissements de crédit.

L’importance du droit bancaire est, aussi, pratique dans la mesure où il prend


en compte le rapport de confiance, de sécurité et d’assistance entre acteurs du milieu
professionnel bancaire. Rapport matérialisé généralement par l’ouverture d’un compte
bancaire.

19
ZERBO (M) « Les spécificités de la règlementation bancaire au regard du droit OHADA des
sociétés commerciales. », Revue CAMES/SJP, n°001/2016, p. 193.
20
SAKHO, (A), op. cit., p. 1.
21
Idem.

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Cela dit, plusieurs ouvrages et articles ont été produits par la doctrine, ce qui
fait qu’une référence bibliographie nous permet d’en avoir un aperçu.

5- Référence bibliographique
1. AMIN (J), « Droit bancaire islamique : notions, mécanismes et protections
pénales », édition, L’Harmattan 2014.
2. AOUBA, (S), Des imprécisions dans l’approche définitionnelle de la notion
de systèmes de paiement dans l’espace UEMOA : cas du règlement n°
15/2002/CM/UEMOA du 19 septembre 2002, Revue ERSUMA n° 2, mars
2013, pp. 283-294.
3. BONNEAU (Th), Droit bancaire, Montchrestien, paris, 1994.
4. CASSOU (P-H), « Le droit financier, un droit adapté à la vie financière »,
Revue d'économie financière, n°25, 1993, pp. 9-21.
5. DEKRWER-DEFOSSEZ, (F), Mémentos droit bancaire, 6e éd. Dalloz.
6. NDIAYE, (C-A-W), Le transfert électronique de fonds : le transfert d’argent
et la monnaie électronique, éd. L’Harmattan-Sénégal, 2018.
7. RIVES-LANGE, (J-L) et Contamine-Raynaud, Droit bancaire, Dalloz, 5e
éd. 1990.
8. RODIERE, (R) et Rives-Lange (J-L), Droit bancaire, Précis Dalloz, 1973.
9. ROLAND (T-F), « Droit et Pratique bancaire dans l’espace OHADA », éd.
L’Harmattan, 2013.
10. SAKHO, (A), Cours de droit bancaire, FSJP-UCAD, 2012-2013.
11. SUNKAM KAMDEM (A) « Réflexion sur le système de régulation
institutionnelle de l’activité bancaire dans la CEMAC », Revue ERSUMA n°
6, janvier 2016, pp. 327-340.
12. TOE (S), « La responsabilité civile du banquier dispensateur de crédit à une
entreprise en difficulté en droit OHADA à la lumière du droit français »,
Revue ERSUMA, Droit des Affaires et pratique professionnelle n° 1, juin
2012 pp. 22-71.
13. ZERBO (M), « Les spécificités de la règlementation bancaire au regard du
droit OHADA des sociétés commerciales», Revue CAMES/SJP, n°001/2016,
pp. 193-221.

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Cela dit, le droit bancaire regroupe l’ensemble des règles régissant les
opérations de banque et ceux qui les accomplissent à titre professionnel. Il régit d’une
part, l’organisation et le fonctionnement des établissements de crédit, il s’agit là du
droit bancaire organisationnel et d’autre part, les rapports entre établissements de
crédit et clients c’est le droit bancaire relationnel. La combinaison de ces deux
définitions nous permettra d’analyser l’accès à l’activité bancaire (Chapitre 1) puis
l’exercice l’activité bancaire (Chapitre 2) et enfin le contentieux bancaire (Chapitre
3).

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CHAPITRE 1 : L’ACCES A L’ACTIVITE BANCAIRE

Il n’existe pas une réglementation uniforme de l’activité bancaire en Afrique,


et plus particulièrement dans l’espace HOADA. L'industrie bancaire dans cette espace
est prise en charge dans des espaces sous régionaux à l’instar de la CEMAC et de
l’UEMOA. Ainsi, l'absence d'une législation uniforme « ohadienne » sur l'activité
bancaire fait que seules les normes édictées, par les organes de contrôle et de
supervision de la CEMAC et de l’UEMOA, constituent l'essentiel de la
réglementation bancaire22.

Dans l’espace UMOA/UEMOA nous avons la loi cadre pourtant


réglementation bancaire reprise par les Etats membres dont Sénégal. L’activité
bancaire au Sénégal est réglementée par la loi n° 2008-26 du 28 juillet 2008 portant
23
règlement bancaire . A cet effet, l’accès à l’activité bancaire obéit à des conditions
liées d’une part, à ceux qui veulent devenir dirigeants ou faire partie du personnel des
établissements de crédits (conditions subjectives) (Section 1) et d’autre part, aux
établissements de crédits (conditions objectives) (Section 2).

Section 1 : Les conditions liées aux dirigeants et personnels des


établissements de crédit

Si certaines conditions sont destinées à assainir l’activité bancaire (Paragraphe


2) d’autres, par contre, protègent son exercice (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les conditions destinées à protéger l’activité bancaire

Une condition de nationalité est exigée (A) en plus, l’intéressé ne doit pas être
incapable de gérer ses propres affaires (B).

A- La condition de nationalité

Selon l’art. 25 de la loi bancaire de 2008 « nul ne peut diriger, administrer ou


gérer un établissement de crédit, ou une de ses agences, s’il n’a pas la nationalité
sénégalaise ou celle d’un Etat membre de l’UMOA… ».

22
V. ROLAND (T-F), « Droit et Pratique bancaire dans l’espace OHADA », éd. L’Harmattan, 2013.
23
J.O.R.S n° 6435 du 1 novembre 2008, cette loi abroge la loi n° 90-06 du 26 juin 1990, qui
réglementait auparavant l’activité bancaire.

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A travers cette disposition le législateur intervient pour fixer le statut juridique


du personnel des banques. Ces derniers doivent être de nationalité sénégalaise ou
celle d’un Etat membre de l’UMOA.

On serait tenté d’expliquer cette restriction dans la mesure où l’émission


monétaire a toujours été considérée comme un acte de souveraineté nationale. C’est
pourquoi, il est nécessaire d’en éloigner les étrangers afin de se protéger. Tout de
même, il y a des dérogations concernant la condition nationalité pour certains
étrangers.

Il est fréquent dans le milieu des affaires de voir des Etats établir des traités
coordonnant les dispositions des droits nationaux. Il en est ainsi des traités
d’établissement24 et des conventions de réciprocité 25. En effet, les dirigeants et
administrateurs d’un établissement de crédit non ressortissants d’un Etat membre de
l’UMOA qui jouissent d’une convention d’établissement ou d’une assimilation aux
ressortissants du Sénégal peuvent accéder à l’activité bancaire.
Pour ceux ne disposant pas d’assimilation, ils sont tenus de solliciter une
dérogation, à la condition de nationalité, auprès du Ministre chargé des Finances sur
avis conforme de la Commission bancaire. Il s’y ajoute qu’ils doivent disposer, selon
les termes de l’art. 25 de la loi bancaire, d’au moins une maîtrise ou d’un diplôme
équivalent et justifier d’une expérience professionnelle de cinq (5) ans dans le
domaine bancaire, financier ou dans tout autre domaine de compétence jugé
compatible avec les fonctions envisagées.
Une fois la dérogation obtenue dans un établissement de crédit d’un Etat
membre de l’UMOA, le dirigeant ou administrateur n’est pas tenu de solliciter une
nouvelle dérogation lorsqu’il change de fonction d’établissement ou de pays.

Cela dit, en plus de la nationalité, il faut une absence d’incapacité dans la


gestion des affaires.

24
Les traités d’établissement permettent à l’Etat de traiter sur son sol national de la même façon les
entreprises étrangères en les assimilant à celles nationales.
25
Les conventions de réciprocité permettent à l’entreprise étrangère d’être traitée de la même façon
dont on traite les entreprises nationale à l’étranger.

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B- L’absence d’incapacité dans la gestion des affaires

Dans le domaine bancaire, la personne frappée d’incapacité dans la gestion de


ses propres affaires se voit interdire l’accès à cette activité. Il en est ainsi des
personnes frappées de faillite. Ces dernières sont juridiquement incapables
d’accomplir des opérations bancaires à fortiori d’occuper des fonctions de direction de
banque26. En plus des conditions destinées à protéger l’activité bancaire nous avons
celles qui assainissent.

Paragraphe 2 : Les conditions destinées à assainir l’activité bancaire

L’activité bancaire exige que l’intéressé soit de bonne moralité (A) et comme
tel, il ne doit faire l’objet d’interdiction (B).

A- La condition de moralité

Parmi les exigences propres à la vie et au développement des affaires, figure


l’exigence de confiance mutuelle. En effet, l’activité bancaire exige la confiance du
public. Dès lors, son accès doit être fermé aux personnes de moralités douteuses. De
ce fait, le critère de moralité douteuse adopté par le législateur est la condamnation
subie au plan pénal sur certaines infractions. Ce qui entraine comme conséquence une
interdiction de l’activité bancaire.

B- L’absence d’interdiction

De manière générale, l’interdiction est une sanction de nature très particulière


parce qu’elle limite l’activité de la personne de façon partielle et qui peut être
variable. Dans le domaine bancaire le législateur prend en compte cet aspect dans la
mesure où la personne frappée d’interdiction ne peut avoir accès à l’activité bancaire.

Cet accès est interdit aux personnes condamnées pour les délits de type
économique27 tels que l’escroquerie 28, l’abus de confiance29, le détournement de

26
Art. 26 al. 3 et 4 « Les mêmes interdictions s’appliquent aux faillis non réhabilités, aux officiers
ministériels destitués et aux dirigeants suspendus ou démis en application de l’article 66. Les
interdictions ci-dessus s’appliquent de plein droit lorsque la condamnation, la faillite, la destitution, la
suspension ou la démission a été prononcée à l’étranger… ».
27
Selon l’art. 26 al. 1 de la loi bancaire de 2008 « Toute condamnation pour crime de droit commun,
pour faux ou usage de faux en écriture publique, pour faux ou usage de faux en écriture privée, de
commerce ou de banque, pour vol, pour escroquerie ou délits punis des peines de l’escroquerie, pour
abus de confiance, pour banqueroute, pour détournement de deniers publics, pour soustraction par

10
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denier public30, le faux et usage de faux31, l’émission de chèques sans provisions 32 etc.
Ainsi, la tentative, la complicité ou la commission d’une infraction de droit commun,
par une personne, emporte de plein droit, selon l’art.26, interdiction :

- de diriger, d’administrer ou gérer un établissement de crédit ou une de ses agences ;

- d’exercer l’une des activités bancaire (opération de banque) ;

- de proposer au public la création d’un établissement de crédit ;

- de prendre des participations dans le capital d’un établissement de crédit.

Il en est de mêmes des faillis non réhabilités, des officiers ministériels


destitués et des dirigeants suspendus ou démis. Il faut, enfin, noter que ces
interdictions s’appliquent de plein droit lorsque la condamnation, la faillite, la
destitution, la suspension ou la démission a été prononcée à l’étranger.

Cela dit en plus des conditions subjectives nous avons celles objectives qui
concernent les établissements de crédit.

Section 2 : Les conditions liées aux établissements de crédit

Selon la loi bancaire de 2008, les établissements de crédit sont agréés en


qualité de banque ou d’établissement financier à caractère bancaire (art.2 al.2). Ils
reçoivent des fonds qu’ils emploient en opérations de crédit ou de placement et ceci, à
titre de profession habituelle. Toute de même, les conditions différent selon qu’on est
en présence d’une banque (Paragraphe 1) ou d’un établissement financier à caractère
bancaire (Paragraphe 2).

dépositaire public, pour extorsion de fonds ou valeurs, pour corruption, pour émission de chèques sans
provision, pour infraction à la réglementation des relations financières extérieures, pour infraction à la
législation contre le blanchiment de capitaux, pour atteindre au crédit de l’Etat ou pour recel de choses
obtenues à l’aide de ces infractions, ou toute condamnation pour infraction assimilée par la loi à l’une
de celles énumérées ci-dessus, emporte de plein droit interdiction :
1) de diriger, administrer ou gérer un établissement de crédit ou une de ses agences ;
2) d’exercer l’une des activités définies à l’article 2 ;
3) de proposer au public la création d’un établissement de crédit ;
4) de prendre des participations dans le capital d’un établissement de crédit.
28
V. Art. 379 du code pénal sénégalais.
29
V. Art. 383 du Code Pénal sénégalais.
30
V. Art. 152 et 385 du Code Pénal sénégalais.
31
V. Art. 379 bis du code pénal sénégalais.
32
V. Art. 152 et 381 du Code Pénal sénégalais.

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Paragraphe 1 : Les conditions liées aux banques

Nous avons des conditions de forme (A), financière (B) et administrative (C).

A- La forme juridique
En règle générale, les entreprises industrielles et commerciales sont libres
d’adopter les formes juridiques de leur choix. Ce qui n’est pas le cas dans le secteur
bancaire. En effet, le législateur exige que les banques soient constituées sous forme
de sociétés à personnes morales.

Aux termes de l’article 2 de loi bancaire de 2008 « sont considérées comme


des établissements de crédit, les personnes morales qui effectuent à titre de profession
habituelle, des opérations de banque ».

Cette disposition exclut les entreprises individuelles du métier de banque.


Cette mesure est liée aux inconvénients que l’entreprise individuelle ne garantit ni une
bonne gestion, ni la continuité de l’établissement. Pour assurer la sécurité des
déposants, on a préféré imposer une forme juridique qui permet un contrôle plus
efficace de la gestion.

Ainsi, la loi bancaire impose la forme de Société Anonyme (SA)33 à capital


fixe aux banques de l’espace UMOA. Cependant, des dérogations peuvent être
accordées par autorisation spéciale du Ministre chargé des Finances donnée après avis
conforme de la Commission bancaire, pour adopter la forme de sociétés
coopératives34 ou mutualistes35 à capital variable (art. 31 de la loi bancaire).

Quid de la condition financière ?

33
Une Société Anonyme est une société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des dettes
sociales qu’à concurrence de leurs apports et dont les droits des actionnaires sont représentés par des
actions (art. 384 AU/SC et GIE).
34
La société coopérative est un groupement autonome de personnes volontairement réunies pour
satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs, au moyen d'une
entreprise dont la propriété et la gestion sont collectives et où le pouvoir est exercé démocratiquement
et selon les principes coopératifs (art. 4 AU/SC).
35
L’institution mutualiste ou coopérative d'épargne et de crédit est un groupement de personnes, doté
de la personnalité morale, sans but lucratif et à capital variable, fondé sur les principes d'union, de
solidarité et d'entraide mutuelle et ayant principalement pour objet de collecter l’épargne de ses
membres et de leur consentir du crédit (Art. 1-10 de la loi n ° 2008‐47 du 03 septembre 2008 portant
réglementation des Systèmes Financiers Décentralisés au Sénégal.

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B- La condition financière
Les banques s’activent principalement dans l’intermédiation bancaire36 et
37
financière . Elles contribuent à la collecte de l’épargne, à l’octroi de crédits aux
sociétés et aux particuliers. A cet effet, leurs interventions dans la sphère financière
sont strictement contrôlées par les autorités.
D’ailleurs, la loi bancaire exige que chaque banque justifie à tout moment d’un
capital minimum fixé par le pouvoir public. Ce capital minimum a pour objet de
constituer une garantie pour les clients de la banque.
Depuis 200738, le capital d’une banque doit être un minimum de 10 milliard et
doit être intégralement libéré au jour de l’agrément de l’établissement de crédit. Donc,
le capital social des banques ayant leur siège social au Sénégal ne peut être inférieur à
ce montant (art. 34 loi bancaire).
En plus, les banques sont tenues de constituer des réserves obligatoires
déposées auprès de la Banque Centrale. Les coefficients à respecter sont fixés
périodiquement par la Banque Centrale 39. Il s’y ajoute une réserve spéciale, incluant
toute réserve légale qui est alimentée par un prélèvement annuel sur les bénéfices nets
réalisés, après imputation d’un éventuel report à nouveau déficitaire. Cette réserve
spéciale peut servir à l’apurement des pertes, à condition que toutes les autres réserves
disponibles soient préalablement utilisées40.
En plus des conditions de forme et financière la banque doit remplir,
également, une condition administrative.
C- La condition administrative : l’agrément bancaire
Il faut, auparavant, faire une précision concernant les formalités
administratives. Ces dernières peuvent avoir plusieurs finalités. Elles peuvent avoir
d’abord un but statistique pour permettre aux autorités de recenser les établissements
autorisés à exercer la profession bancaire au sein de l’UMOA. Elles peuvent avoir
ensuite, une finalité juridique dans la mesure où la demande d’autorisation permet aux

36
Dans ce cas la banque agit pour son propre compte, donc intermédiation bancaire stricto sensu.
37
La banque agit pour le compte d’autrui, donc intermédiation financière voir art 9 loi bancaire.
38
Conseil des Ministres de l'UMOA, en sa session ordinaire du 17 septembre 2007.
39
La constitution des réserves obligatoires est exigée selon une périodicité mensuelle pour les banques
(du 16 du mois courant au 15 du mois suivant) et trimestrielle pour les établissements financiers. Elle
fait l’objet de déclaration sur formulaires-types adressés à la Banque Centrale par les établissements
assujettis
40
Le taux est fixé à 15% selon l’art. 4 dispositif prudentiel applicable aux banques et aux
établissements Financiers de l’union monétaire ouest africaine (UMOA) a compter du 1er janvier 2000.

13
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autorités de tutelle de vérifier si l’établissement demandeur remplit bien les conditions


posées par la loi pour l’accès à la profession bancaire. Enfin, elles peuvent aussi avoir
une finalité économique en ce sens qu’elles permettent de vérifier si l’établissement
répond bien aux besoins économiques du pays ou de la localité.

Ceci étant précisé, pour accéder à la profession bancaire il faut disposer d’un
agrément. L’obtention de l’agrément bancaire suit une procédure particulière.
Aux termes de l’article 15 de la loi bancaire de 2008 « les demandes
d’agrément sont adressées au Ministre chargé des Finances et déposées auprès de la
Banque Centrale qui les instruit (….) elle s’assure de l’adéquation de la forme
juridique de l’entreprise à l’activité de banque ou d’établissement financier à
caractère bancaire ».
A cet effet, l’agrément est prononcé par arrêté du Ministre chargé des
Finances, après avis conforme de la Commission bancaire de l’UMOA. Il est réputé
avoir été refusé s’il n’est pas prononcé dans un délai de six (6) mois à compter de la
réception de la demande par la Banque Centrale, sauf avis contraire donné au
demandeur.
Enfin, il est constaté par l’inscription sur la liste des banques ou sur celle des
établissements financiers à caractère bancaire. Ces listes sont établies et tenues à jour
par la Commission bancaire qui affecte un numéro d’inscription à chaque banque ou
établissement financier à caractère bancaire. Ce qui fait que la liste des banques et
celle des établissements financiers à caractère bancaire, ainsi que les modifications
dont elles font l’objet, y compris les radiations, sont publiées au Journal officiel de la
République du Sénégal (JORS), à la diligence de la Commission bancaire (Art. 16 loi
bancaire 2008).
Il faut noter également que l’agrément délivré par l’autorité est un agrément
unique41. Donc, une banque déjà agréée est dispensée de toute autre procédure
lorsqu’elle désir s’implanter dans un autre Etat membre de l’UMOA. Toutefois, elle
devra, avant d’ouvrir la nouvelle structure, faire une déclaration à la Commission
Bancaire ; celle-ci est déposée, par la suite, auprès de la Banque Centrale 42.
Tout manquement aux obligations professionnelles ou administratives de

41
L’agrément unique a été adopté par les autorités de l’UMOA en juillet 1997, et entrée en vigueur le 1
janvier 1999.
42
V. art. 18 de loi bancaire de 2008. V. également instruction n° 01/RB du 31 décembre 1998 relative
aux modalités d’établissement des banques et établissements financiers.

14
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l’établissement de crédit peut entrainer un retrait de l’agrément. De même, le retrait


peut se faire à la demande de l’établissement de crédit43. La banque à elle seule ne
constitue pas un établissement de crédit. A côté nous avons les établissements
financiers à caractère bancaire.
Paragraphe 2 : Les conditions liées aux EFCB

Les banques et les établissements financiers à caractère bancaire ont un


dénominateur : c’est faire de l’intermédiation financière. En dehors des opérations
d’intermédiation, ils se distinguent du point de vue leur fonction et forme juridique,
(A), mais aussi de l’origine des fonds et de la création de la monnaie scripturale (B).
A- La forme juridique
La fonction principale des établissements financiers est de faire de
l’intermédiation financière. Contrairement à la banque qui peut faire aussi bien de
l’intermédiation bancaire que financière. C’est pourquoi dans leur forme juridique ils
peuvent se constituer sous forme de sociétés anonymes (S.A) à capital fixe, de
sociétés à responsabilité limitée (SARL) ou de sociétés coopératives ou mutualistes à
capital variable44 alors la banque se constitue généralement en S.A. Il s’y ajoute que
nous avons des conditions liées de l’origine des fonds et à la création de la monnaie
scripturale.
B- La condition financière
Le capital social des établissements financiers à caractère bancaire ayant leur
siège social au Sénégal ne peut être inférieur au montant minimal fixé par le Conseil
des Ministres de l’UMOA qui est de 3 milliard45. Tout de même, ce minimum peut
être différent selon les diverses catégories d’établissements financiers à caractère
bancaire46. Le capital social doit être intégralement libéré au jour de l’agrément de
l’établissement de crédit à concurrence du montant minimal exigé dans la décision
d’agrément.
En plus du capital social, les établissements financiers présentent des
caractéristique liées à l’origine des fonds et à la création de la monnaie scripturale.
Pour ce qui est de l’origine des fonds, l’article 49 de la loi bancaire de 2008
dispose que « les établissements financiers à caractère bancaire ne peuvent recevoir

43
Concernant le retrait de l’agrément voir art. 20-24 de la loi bancaire de 2008.
44
Art. 32 de la loi bancaire de 2008.
45
Conseil des Ministres de l'UMOA, en sa session ordinaire du 17 septembre 2007.
46
V. infra p. 16.

15
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de dépôts de fonds du public dans le cadre de leur activité et s’ils y ont été autorisés
par décret, et dans les conditions fixées par ledit décret, après avis conforme de la
Banque centrale ».
Donc, pour les opérations de crédit ou de placement, les banques peuvent
utiliser outre leurs capitaux propres, les fonds qu’elles reçoivent du public, alors que
les établissements financiers, sauf autorisation, ne peuvent utiliser que leurs capitaux
propres ou des fonds qu’ils ne reçoivent pas du public47.
En ce qui concerne la création de monnaie scripturale, il s’agit d’une monnaie
réalisée par une écriture en compte. C’est une monnaie de banque.
En dehors de ces cas sus-évoqués, on peut considérer que les banques et les
établissements financiers à caractère bancaire font les mêmes opérations. Ce qui fait
qu’ils sont classés, par l’instruction de la Banque centrale 48, en diverses catégories
selon la nature des opérations de banques qu’ils sont habilités à effectuer (art. 4. loi
bancaire 2008).
Ainsi, ils sont classés en cinq catégories :
 Catégorie 1 : établissements financiers de prêts ;
 Catégorie 2 : établissements financiers de crédit-bail ou de location
avec option achat ;
 Catégorie 3 : établissements financiers d’affacturage ;
 Catégorie 4 : établissements financiers de cautionnement ;
 Catégorie 5 : établissements financiers de paiement
Toutefois, il faut noter que les établissements financiers à caractère bancaire,
classés dans une catégorie, ne peuvent exercer les activités d’une autre catégorie sans
une autorisation préalable accordée comme en matière d’agrément. Le retrait de cette
autorisation est prononcé comme en matière de retrait d’agrément (Art. 17 loi
bancaire 2008).
Cela dit, une fois les conditions d’accès à la profession bancaire remplies, on
pourra passer à l’exercice.

47
SAKHO, (A), op. cit., pp. 8-9.
48
Instruction 11-12/2010/RB relative au classement, aux opérations et à la forme juridique des
établissements financiers à caractère bancaire.

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CHAPITRE 2 : L’EXERCICE DE L’ACTIVITE BANCAIRE


Dans l’exercice de leurs activités quotidiennes les établissements de crédit
passent des contrats qui leurs permettent de mettre en œuvre leurs relations avec la
clientèle (Section 1). Pour ce faire, ils ont des droits, mais aussi assujettis à des
obligations professionnelles et contractuelles (Section 2).
Section 1 : Le contrat de mise en relation bancaire : le compte
bancaire
La mise en relation entre l’établissement de crédit et sa clientèle s’effectue par
un contrat, le plus souvent d’adhésion, dont la conclusion donne droit à l’ouverture
d’un compte bancaire49 (Paragraphe 1) qui peut se présenter sous diverses formes ou
types (Paragraphe 2)
Paragraphe 1 : Le droit à l’ouverture d’un compte bancaire
Support privilégié des opérations de clientèles, le compte bancaire peut être
considéré comme un document comptable qui constate les opérations intervenues
entre les parties et qui exprime le solde par des chiffres50. Son ouverture est liée à
certaines exigences (A) même si, dans certaines hypothèses, son refus peut être
envisagé (B).
A- Les exigences liées à l’ouverture d’un compte bancaire
La question qui se pose est de savoir si le citoyen est-il en droit de demander et
d’obtenir l’ouverture d’un compte bancaire ?
La réponse à cette question a un support textuel. Il s’agit de l’article 8 du
Règlement n° 15/2002/CM/UEMOA du 19 septembre 2002 relatif aux systèmes de
paiement dans les États membres de l’UEMOA. Ce texte dispose : « toute personne
physique ou morale établie dans l'un des Etats membres, possédant un revenu
régulier (…), a droit à l'ouverture d'un compte auprès d'une banque… ».
De ce qui précède, le droit à l’ouverture d’un compte bancaire obéit à deux
exigences où critères :

49
La notion de compte est une notion difficile à cerner parce que relevant à la fois de la technique
comptable et constituant une convention. Matériellement, le compte est un tableau des créances et des
dettes réciproques de deux personnes appelées « correspondants ». V. Sakho, A., op. cit., p. 15.
50
Le compte a un triple objectif : d’abord en tant que document comptable, il constate les opérations et
exprime le résultat (créance ou dette) par des chiffres ; donc, il est un instrument de preuve. Ensuite, il
est un instrument de règlement car les créances sont payées par leur inscription en compte. Il est enfin
un instrument de garantie pour les banques, car il permet de garantir les créances qui y sont inscrites
grâce à la compensation qui s’opère entre articles de crédit et articles de débit. Ibid., p. 16.

17
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- d’abord il faut que la personne (physique ou morale) s’établie dans l’espace UMOA
c’est le critère géographique ;
- ensuite, elle doit posséder un revenu régulier c’est le critère économique. Ce dernier
(revenu régulier) est considéré comme toute somme égale ou supérieure à cinquante
mille (50.000) FCFA dont est susceptible de justifier une personne physique salariée
sur une période mensuelle ; une personne physique non salariée ou une personne
morale, sur une période mensuelle, bimensuelle, trimestrielle, semestrielle, voire
annuelle51.
Toutefois, il arrive des cas ou les établissements de crédit refusent l’ouverture
d’un compte bancaire en un client.
B- Le refus d’ouverture d’un compte bancaire
Si l’ouverture d’un compte bancaire est un droit pour le client, il ne constitue
pas une obligation pour l’établissement de crédit. Ce dernier peut bel et bien refuser à
un client l’ouverture d’un compte. Dans un tel cas de figure, la personne qui se voit
refuser l’ouverture d’un compte par plusieurs établissements de crédit, peut saisir la
Banque Centrale afin qu’elle désigne un établissement qui sera tenu de lui en ouvrir
un.
En effet, la Banque Centrale peut désigner d'office une banque qui sera tenue
d'ouvrir un compte bancaire au client lorsque ce refus est opposé par trois
établissements successivement.
Cependant, l’ouverture forcée imposée à l’établissement de crédit va
naturellement produire des effets dans la mesure où, elle donnera au client le droit à
un service bancaire minimum52 . Dans ce cas, le client ne peut prétendre ni à des
facilités de caisse, ni à disposer de formules de chèques ou d’une carte de crédit, à la
limite une carte de retrait peut lui être délivré.
Il faut noter que le refus du banquier doit être motivé. S’il est motivé par
l’intention de nuire, la banque pourrait engager sa responsabilité 53. Cela dit, il existe
plusieurs types de comptes bancaires qui peuvent être classés.

51
Art.3 Instruction BCEAO n° 01/2003/SP du 8 mai 2003 relative à la promotion des moyens de
paiement scripturaux et à la détermination des intérêts exigibles en cas de défaut de paiement.
52
Art.8 al 2 Règlement n°15/2002/CM/UEMOA du 19 septembre 2002 relatif aux systèmes de
paiement dans les Etats membres de l’UEMOA.
53
SAKHO, (A), op. cit. p. 17.

18
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Paragraphe 2 : La classification des comptes bancaires


Il existe plusieurs types de comptes bancaires qui peuvent être classés en
tenant compte du titulaire du compte (A) ou de sa nature juridique (B).
A- La classification selon le titulaire du compte

Cette classification permet de distinguer le compte individuel (1), du compte


joint (2) et du compte indivis (3).
1- Le compte individuel
C’est un compte ouvert par une seule personne (physique ou morale) seule sa
signature est autorisée en absence de procuration. Mais, dans la pratique, il est
fréquent qu’une personne physique ou morale soit titulaire de plusieurs comptes dans
le même ou plusieurs établissement de crédit on parle alors de comptes multiples.
2- Le compte joint
C’est un compte ouvert au nom et pour le compte de deux ou plusieurs
personnes (co-titulaires) liés ou non par un lien de parenté. Les co-titulaires sont liés
non seulement par une solidarité passive, mais aussi et surtout par une solidarité
active qui les fait apparaître, chacun en ce qui le concerne, comme propriétaire de
l’intégralité des actifs en compte. Ce qui sous-entend que les co-titulaires du compte
ont les mêmes pouvoirs sur les avoirs en dépôt.
3- Le compte indivis
Dans le compte indivis, appelé également compte collectif, plusieurs
personnes sont titulaires d’un même compte. Dans ce cas, les opérations sont
soumises à l’approbation de tous les co-titulaires à l’unanimité.
De ce fait, un compte peut être indivis dès son ouverture. C’est le cas par
exemple des comptes ouverts pour enregistrer les opérations d’une société créée de
fait 54 parce qu’un tel compte a pour titulaire les associés de fait. De même, un compte
initialement individuel peut devenir collectif voir indivis. Par exemple le compte
ouvert par une personne avant son décès devient indivis entre les héritiers.

54
Il ya société créée de fait lorsque deux ou plusieurs personnes physiques ou morales se comportent
comme des associés sans avoir constitué entre elles l’une des sociétés reconnues par l’acte uniforme
(Art. 864 AU/SC et GIE).

19
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Cela dit, l’exigence de la signature commune pour faire fonctionner le compte


constitue un facteur de blocage que la pratique a réussi à contourner en désignant
souvent un mandataire commun55.
Quid de la classification selon la nature juridique du compte ?
B- La classification selon la nature juridique du compte

Cette classification nous permet de distinguer le compte courant (1) du compte


de dépôt ou compte chèque (2).
1- Le compte courant

Le compte courant n’est réglementé par aucun texte56, on n’a parlé à ce propos
de crise de la théorie du compte courant57. Le compte courant est souvent ouvert par
le banquier à des clients commerçants pour les besoins de leur profession. Il est
considéré comme pouvant être créditeur indifféremment pour l’une ou l’autre partie
ce qui le distingue du compte de dépôt. Donc, il faut envisager une analyse des
éléments constitutifs du compte courant (a) avant d’en venir au mécanisme de ce
compte (b).
a- Les éléments du compte courant
Deux éléments cumulatifs sont nécessaires pour l’existence d’un compte
courant. Il faut d’abord une intention des parties qui renvoie à l’élément moral ou
intentionnel, et ensuite des remises qui renvoient à l’élément matériel. La variabilité
du solde est un élément écarté par la plupart de la doctrine 58.
 L’élément intentionnel
Cet élément réside dans la commune intention des parties. Il faut que les
parties aient convenu de travailler en compte courant. En effet, la volonté des parties
d’ « être en compte courant » est indispensable à défaut, il n’aurait qu’un compte de
dépôt. Cette volonté résulte très souvent de la signature par le client d’un formulaire
précisant cette qualité de compte courant. Mais, elle peut également être tacite par le
simple fonctionnement du compte.
Ainsi, la commune intention des parties se mesure à la suspension entre elles,
et pendant la durée du compte, de l’exigibilité de leurs créances et dettes de sorte que

55
SAKHO, (A), op. cit. p. 29.
56
DEKRWER-DEFOSSEZ (F), Momentos droit bancaire, 6e éd. Dalloz, p.
57
RODIERE (R) et RIVES-LANGE (J-L), Droit bancaire, Précis Dalloz, 1973, p. 115.
58
V. BONNEAU (Th), Droit bancaire, Montchrestien, paris, 1994, p. 179.

20
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cette exigibilité soit reportée sur le solde qui apparaîtra au bénéfice de l’une d’elles à
la clôture du compte. L’autre aspect renvoie aux remises c’est l’élément matériel.
 Elément matériel
L’élément matériel dans le compte courant renvoie aux remises qui doivent
présenter certaines caractéristiques. En effet, les remises en compte courant sont des
créances de somme d'argent, ou à la rigueur, de choses fongibles comme des titres au
porteur. Il s’y ajoute que les créances doivent être liquides, exigibles et certaines du
remettant contre le récepteur destiné à être réglée en compte. S'il manque un
caractère, la créance figure dans le "différé" ce qui fait qu'elle n'est pas
immédiatement payée du fait qu’elle est ni disponible, ni liquide, ni exigible, mais le
sera dès lors qu'elle sera portée au disponible du compte pour entraîner son
règlement59.
Cela dit, les remises doivent présenter certaines caractéristiques :
- d’abord elles doivent être fait en propriété, cela ne pose pas de problème au
préalable si les remises correspondent à une somme d’agent. Le problème se pose
lorsque les remises correspondent à autre chose qu’une somme d’argent c’est le cas
lorsqu’un client transmet à l’établissement de crédit un effet de commerce. Ce dernier
ne peut entrer en compte que s'il est devenu la propriété de l'établissement de crédit60 ;
- ensuite être générales, cela veut dire que l’entrée en compte va concerner toutes les
créances des parties c’est le principe d'affectation générale des créances. Ainsi,
chaque partie s'engage à faire entrer en compte les créances dont il est titulaire à
l'encontre de l'autre. Ce qui fait que les dettes de l'une des parties sont garanties par
ses propres créances. Toutefois, les parties d'un commun accord peuvent décider que
certaines créances, en dépit du principe, n'entrerait pas en compte. Il en est ainsi par
exemple lorsque la créance est assortie de suretés61 ;
- en outre être réciproques, cela signifie que chaque partie doit être remettant et
récepteur. Cette réciprocité doit se maintenir pendant le fonctionnement du compte. Si
elle cesse, elle équivaut à la clôture du compte courant. Il faut noter que cette
réciprocité est parfois admise par la jurisprudence lorsque le compte est crédité ou

59
Il semble que la jurisprudence n’ait pas une conception extensive de la notion de créance entrée au
différé du compte parce qu’elle exclut toujours les créances ni liquides ni certaines (Com. 20 avril
1984, D. 1948, J. 375 ; Com. 17 novembre 1981, D. 1982, J. 257) pour admettre seulement les créances
non exigibles. V. BONNEAU (Th), op. cit., p. 177.
60
Com. 17 novembre 1981, D. 1982, J. 257.
61
Com. 9 juillet 1985, Banque n°457, janvier. 1986. Com. 12 mai 1987, Banque n°475, septembre
1985.

21
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débité d’intérêts ou de commissions 62. Ainsi, pour la jurisprudence, la réciprocité


n’est pas forcément effective, il suffit que les parties ne l'excluent pas ;
- et enfin être enchevêtrées, cela signifie qu’il faut une alternance des remises. A ce
propos, la Cour de cassation a jugé à plusieurs reprises qu’il n’y a pas de relation de
compte courant en exécution d’un prêt consenti par une banque à un client lorsque
celui-ci effectue seul des versements au compte de prêt pour le remboursement de sa
dette. Donc, on ne peut décider que pendant un certain temps les remises proviendront
de l’une des parties et que pendant un autre temps, elles seront effectuées par l’autre
partie63. Il faut une alternance des remises, au moins dans le principe, et que cet
enchevêtrement soit possible pendant tout le fonctionnement du compte 64. Cela dit,
une fois les éléments du compte identifiés, il faut analyser son mécanisme.
b- Le mécanisme du compte courant65

62
Com. 23 octobre 1973, J.C.P 1974, éd. G, II, 17761, note Stoufflet.
63
Com. 29 févier 1984, Bull. civ. IV n° 84, p. 68 ; Com. 17 décembre 1991, Bull. civ. IV n° 389, p.
269.
64
V. Thierry, BONNEAU, Droit bancaire, Montchrestien, paris, 1994, p. 179.
65
Diverses théories ont été avancées concernant le mécanisme du compte courant :
- d’abord nous avons la théorie classique qui analyse ce mécanisme à partir des idées de novation et
d’indivisibilité. Cette théorie encourt diverses critiques d’une part on a fait valoir que la novation
suppose la disparition de l’obligation ancienne et son remplacement par une obligation nouvelle. Or, on
ne constate pas ce remplacement ce qui fait qu’il n’y a pas naissance d’une obligation nouvelle, mais
une incorporation de la créance disparue dans le solde du compte. D’autre part, on fait valoir également
que l’indivisibilité aboutit à rendre totalement indisponibles les créances entrées en compte jusqu’à la
clôture du compte, ce qui paralyse le fonctionnement du compte en interdisant notamment la saisie du
solde provisoire.
- ensuite, nous avons les théories des compensations successives et de la compensation « in futurum ».
Pour la théorie des compensations successives, les créances se compensent au fur et à mesure de leur
entrée en compte à condition toutefois que le solde soit créditeur. Pour Bonneau, cette théorie
méconnait toutefois l’originalité du compte courant dans la mesure où les créances s’éteignent dès leur
entrée en compte même si elles ne viennent qu’accroître un solde débiteur et ne subit donc de ce fait
aucune compensation. Pour ce qui est de la théorie de la compensation « in futurum » elle reporte la
compensation à la clôture du compte. Jusqu’à celle-ci, il n’y a ni créance ni dette, ce qui maintien le
solde provisoire dans un état d’indisponibilité. Pour Bonneau cette conséquence est cependant
incompatible avec le fonctionnement du compte courant parce qu’elle interdit, en effet, de disposer du
solde provisoire sous forme de chèque et de virement car ce serait soustraire ce solde à la compensation
global auquel il est destiné.
Enfin, nous avons la théorie de l’effet règlement pour qui il est impossible d’analyser la convention de
compte courant à partir des principes du droit des obligations. Les effets de celle-ci sont sui generis et il
vaut mieux éviter le recours à des notions qui déformeraient la volonté des parties de voir les
créances « payées par leur fusion instantanée en un solde immédiatement disponible ». Les créances
sont payées parce que les créanciers s’estiment satisfaits par l’inscription des créances en compte. Ce
paiement résulte de la fusion de celles-ci dans le solde, fusion qui se réalise au fur et à mesure des
entrées des créances en compte. Par cette fusion, les créanciers participent à la formation d’un solde
dont peuvent disposer à tout moment les parties. Cette théorie de l’effet règlement est complétée par
l’effet de garantie qui résulte du fonctionnement du compte dans la mesure où les créances réciproques
se servent mutuellement de garantie. Cependant, il a été reproché à cette théorie de recourir à la notion
de paiement qui apparaît insuffisante pour expliquer ledit mécanisme parce qu’elle permet de
comprendre l’effet extinctif résultant du règlement ou paiement de la créance, mais est inapte à
expliquer la formation du solde.

22
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Le compte courant est un contrat par lequel les parties décident de faire entrer
en compte toutes les créances et dettes réciproques de manière à ce que celles-ci
soient réglées immédiatement par leur fusion dans un solde disponible soumis à un
régime unitaire. De cette définition, il ressort que la créance, dès lors qu'elle est entrée
en compte disparaît d’où la novation, en plus elle participe à un bloc dont les éléments
sont inséparables, car il n'y ni créance ni dettes d’où l'indivisibilité.
 La novation

En droit commun des obligations la novation est une convention par laquelle
les parties décident de remplacer l’obligation ancienne par une obligation nouvelle.
En droit bancaire, la novation peut s’apprécier dès lors que la créance est
entrée en compte. Par son effet, elle fait disparaître la créance qui va devenir un
simple article de compte qui participe à la formation du solde. Il s’y ajoute également
la disparition des actions attachées à la créance, comme les actions en paiement du
créancier, mais aussi les sûretés attachées à la créance 66 de même que les intérêts (les
intérêts seront ceux qui rémunère le compte).
Ainsi, l'article de compte, qui sera devenue la créance sera garantie dans le
cadre du solde du compte par les sûretés qui garantissent le compte. Il faut noter,
également, que l'extinction de la créance vaut paiement 67, même si l'entrée en compte
n'aboutit pas à une compensation. Ainsi, la créance est réputée payée du fait de son
entrée en compte. Cela dit, une fois la créance entre en compte, il n'y a ni créance ni
dettes d’où l'indivisibilité
 L'indivisibilité
Elle renvoie au fait que la créance participe à un bloc dont les éléments sont
inséparables, car il n'y a plus ni créance ni dette. Jusqu'à la clôture du compte, le solde
n'est pas disponible. Ce qui fait qu’en principe, les saisies sont impossibles, et tant
que la clôture n'est pas intervenue, le créancier du solde ne peut réclamer paiement.
De ce fait, à la clôture, on a une compensation globale faisant apparaître un
solde qui a trois caractères: indivisible, non exigible, disponible.
- Indivisible parce qu’il est impossible d'extraire un article du compte pour lui faire
subir un sort différent ; seul le solde peut être saisi, pas la créance. Toutefois, il ya une
exception c’est la contrepassation des effets de commerce impayés qui exprime

66
Com. 19 mars 1980, Bull. civ. IV, n° 135, p. 10.
67
Com. 25 janvier 1955, D. 1957, J. 287.

23
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l’entrée en compte de la créance de recours que l’établissement de crédit escompteur à


sur son client68.
- Non exigible si le compte n’est pas clôturé, l'action en paiement ne peut avoir lieu
tant que le compte fonctionne.
- Disponible, il ne le sera qu'à la clôture, ce qui fait qu’il était impossible de saisir un
solde provisoire. Mais aujourd’hui, la jurisprudence admet que le solde provisoire
d’un compte courant est saisissable 69 et que le titulaire du compte peut disposer de
celui-ci en émettant des chèques ou en utilisant d’autres moyens de paiements.
En conclusion, le mécanisme du compte courant consiste à faire entrer en
compte des créances qui disparaissent pour fusionner dans un solde soumis à un
régime unitaire. Les créances primitives se voient appliquer un régime unique, celui
du compte. A côté du compte courant nous avons le compte de dépôt.
2- Le compte de dépôt
Le compte de dépôt est généralement considéré comme le droit commun des
comptes bancaires. Son existence est subordonnée à un dépôt de fonds qui doit être
effectué par le client auprès de l’établissement de crédit. Il a pour but d’enregistrer les
opérations de caisse qui diminueront ou augmenteront le dépôt initiale 70. Il est le type
de compte bancaire le plus simple, on l’appelle également compte chèque parce qu’il
permet, dès fois, le fonctionnement d’un carnet de chèque.
Toutefois, le compte de dépôt semble être un cadre comptable qui ne produit
pas les effets du compte courant. Ce qui fait que la doctrine contemporaine semble,
dès fois, les assimilés tout en maintenant la distinction71 et ceci si on analyse les
éléments du compte de dépôt et son mécanisme.
a- Les éléments du compte de dépôt
Le compte de dépôt sert à enregistrer des encaissements et des paiements
effectués par le banquier pour le compte de son client. Il est aussi un mécanisme de
règlement puisque les opérations successives se compensent pour dégager un solde
qui résume la situation des deux parties. Pour les auteurs, le compte de dépôt présente
avec le compte courant des différences qui concernent la distinction d’abord du

68
Ce droit a été reconnu par la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution.
La jurisprudence admet la contrepassation aussi bien pendant le fonctionnement du compte qu’après sa
clôture. V. BONNEAU (Th), op.cit., pp. 212-213.
69
Com. 13 novembre 1973, Bull. civ. IV, n° 325, p. 290.
70
RODIERE (R) et RIVES-LANGE (J-L), op. cit., p. 167.
71
Pour certains doctrinaires le compte de dépôt n’est pas un mécanisme de garantie et c’est là qui le
différencie du compte courant. Cf. RODIERE (R) et RIVES-LANGE (J-L), op. cit, pp. 168-169.

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disponible et du différé, ensuite du principe d’affectation et de la réciprocité des


remises72.
Pour la première distinction, il faut noter qu’il n’y a pas en principe dans un
compte de dépôt de différé, mais le compte reste seulement disponible. Donc, pour
entrer en compte, les créances doivent présenter certaines caractéristiques qui
renvoient à la certitude, à l’exigibilité et à la liquidité. Autrement dit, les créances
doivent être, certaines, liquides exigibles, sinon elle restent en dehors du compte73.
Le principe de l'affectation générale fait que les créances entrent en compte
courant automatiquement sans même l'accord des parties. Mais, pour le compte de
dépôt un accord est en principe indispensable. Celui-ci intervient souvent, lors de la
conclusion de la convention de compte ; ce qui fait que les parties conviennent
d'affecter la généralité de leur créance au compte. Ainsi, pour qu’une créance reste
hors du compte, le client doit l’indiquer par avance à son banquier.
En ce concerne qui la réciprocité des remises, il faut noter qu’il s’agit d’un
caractère du compte courant et non du compte de dépôt. Toutefois, il peut résulter du
fonctionnement du compte.
Au demeurant cette affirmation semble reposer sur le fait qu’il est difficile de
caractériser les remises du banquier 74, d’autant plus que le compte de dépôt ne peut
pas être en principe débiteur 75. Mais on constate aujourd’hui, dans la pratique, que ce
principe tend à s’atténuer. En effet, la réciprocité des remise n’est pas synonyme de
variation du solde, en plus le compte courant ne peut être débiteur que si le banquier a
accordé à son client un découvert. Le compte de dépôt suit le même procédé. A cet
effet, l’existence de ce découvert montre que le banquier effectue lui-même des
remises. Qu’en est-il du mécanisme du compte de dépôt ?
b- Le mécanisme du compte de dépôt
Une analyse du mécanisme du compte de dépôt soulève trois questions
fondamentales :

72
BONNEAU (Th), op. cit., p. 180.
73
Selon Thierry, BONNEAU « on doit toutefois relever d’une part, que la jurisprudence, au moins
celle de la Cour de cassation, a une conception restrictive du différé d’un compte courant et d’autre
part, que la pratique bancaire recourt parfois à la technique du différé pour le compte de dépôt.
V. BONNEAU (Th), op. cit. p. 180.
74
V. Jean-Louis RIVES-LANGE et Contamine-Raynaud, Droit bancaire, Dalloz, 5e éd. 1990, n°257,
p.342 cité par Thierry, BONNEAU,op. cit, p. 180.
75
Idem.

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- d’abord la créance qui entre en compte de dépôt est-elle éteinte ? Autrement dit, est-
ce qu’elle perd son individualité ?
- ensuite, en s'éteignant, une créance en compte de dépôt vaut-elle paiement ?
- enfin, qu’en est-il du solde du compte de dépôt ?
Pour la première interrogation, s’il ya des incertitudes de la part de la doctrine
sur les caractéristiques et le fonctionnement du compte de dépôt, pour la jurisprudence
une créance qui entre en compte de dépôt perd son indivisibilité et comme tel elle
s’éteint. On pourrait, toutefois, douter de l’extinction de la créance, parce qu’à la
différence de ce qui se passe au compte courant, en matière de compte de dépôt, la
jurisprudence tient compte de la créance entrée en compte pour appliquer les règles
relatives à la capitalisation des intérêts76.
A la question de savoir si en s'éteignant, une créance en compte de dépôt vaut-
elle paiement? On répond par l’affirmatif dans la mesure où le paiement a lieu même
si aucune compensation ne se produit. Toutefois, l’effet de fusion ne joue que pour les
dépôts du client, alors que les créances du banquier passées en compte ne s’éteignent
que si elles ont pu se compenser avec l’avoir disponible. Selon la Cour de cassation
lorsque le compte est débiteur, l’entrée de la créance du banquier ne vaut paiement
que lorsque celui-ci fonctionne à découvert conformément distincte, express ou tacite,
entre le préteur et l’emprunteur77.
A la question de savoir si le compte de dépôt est soumis au même régime
juridique que le compte courant ? Il faut retenir que le solde de dépôt suit un régime
juridique presque similaire à celui du compte courant dans la mesure où le solde est
saisissable, il est productif d’intérêt au taux du compte même si ces intérêts ne sont
pas identiques aux intérêts du solde d’un compte courant. En d’autre terme, le solde
est indivisible non exigible tant qu’il n’ya pas de clôture, et disponible. Il est à la
disposition du client qui peut émettre des chèques sur le compte dont le solde est
créditeur.
En résumé, les soldes sont identiques pour les deux types de compte, mais la
différence se trouve au niveau des intérêts débiteurs qui sont de plein droit pour
compte courant, et conventionnel pour le compte de dépôt, il en est de même pour la
capitalisation d'intérêt.

76
BONNEAU (Th,), op. cit, p. 181.
77
Cass. 9 octobre 1992, bull. civ. n°1, p.1.

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Cela dit, une fois la relation entre le client et l’établissement de crédit établie,
il ya des droits et obligations qui pèsent sur les établissements de crédit. L’accent sera
mis sur les obligations des établissements de crédit.
Section 2 : Les obligations des établissements de crédits
Il pèse sur les établissements de crédit, et plus particulier sur les banques, des
obligations contractuelles (Paragraphe 1) et professionnelles (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les obligations contractuelles

Les obligations contractuelles se font ressentir au moment de l'ouverture du


compte (A), mais également au cours de son fonctionnement et de sa clôture (B).
A- Les obligations au moment de l'ouverture du compte
Pèse sur la banque, au moment de l'ouverture du compte, une obligation de
contrôle (1) et d'information (2).
1- L'obligation de contrôle
L’obligation de contrôle permet à la banque de procéder à des vérifications
imposées dans l’intérêt de l’’établissement et des tiers. Ce contrôle permet d’éviter
des opérations illicites et de lutter contre le terrorisme et le blanchiment des
capitaux78.
Si la banque a la faculté de refuser l’ouverture d’un compte à un client, elle a
un devoir, même si on lui impose cette ouverture79, de vérifier préalablement
l’identité du client, son adresse, sa capacité et ses pouvoirs, s’il s’agit par exemple
d’un directeur de société etc., à l’aide d’un document officiel ou écrit probant.

Cette obligation s’étend à tous les organismes financiers conformément à l’art.


7 de la loi uniforme 2003 80 qui dispose « les organismes financiers doivent s’assurer
de l’identité et de l’adresse de leurs clients avant de leur ouvrir un compte, (…) ».

Ainsi, s’il s’agit d’une personne physique, la vérification de l’identité est


opérée par la présentation d’une carte d’identité nationale ou de tout document officiel
original en tenant lieu, en cours de validité, et comportant une photographie, dont il

78
V. Loi uniforme du 28 mars 2008 relative à la lutte contre le financement du terrorisme dans les Etats
membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) ; Loi uniforme du 20 mars 2003 relative à la
lutte contre le blanchiment de capitaux dans les Etats membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine
79
V. supra. pp.15-16.
80
Loi uniforme du 20 mars 2003 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux dans les Etats
membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine.

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est pris une copie. Il s’y ajoute une vérification de son adresse professionnelle et
domiciliaire par la présentation de tout document de nature probant.

S’il s’agit d’une personne physique commerçante, elle est tenue de fournir, en
outre, toute pièce attestant de son immatriculation au Registre du Commerce et du
Crédit Mobilier (RCCM).

Pour ce qui est des personnes morales ou d’une succursale, l’identification est
effectuée par la production d’une part, de l’original, l’expédition ou la copie certifiée
conforme de tout acte ou extrait du RCCM, attestant notamment de sa forme
juridique, de son siège social, et d’autre part, des pouvoirs des personnes agissant en
son nom.

Ce même contrôle est effectué pour les responsables, employés et mandataires


agissant pour le compte d’autrui. Ces derniers doivent, pour leur identification,
produire les pièces attestant d’une part, de la délégation de pouvoir ou du mandat qui
leur a été accordé et d’autre part, de l’identité et de l’adresse de l’ayant droit
économique. A côté de l'obligation de contrôle nous avons l'obligation d'information.

2- L'obligation d'information
C’est la matérialisation de l’obligation de renseignement qui figure dans tout
contrat . Elle est une obligation générale qui pèse sur le banquier 82 et porte, entre
81

autres, sur les conditions générales de la banque, sur l’utilisation du compte, sur le
prix des différents services, sur les engagements réciproques de la banque et du client
etc.
Ainsi, l’obligation pèse sur tout professionnel face à un profane. La banque est
redevable à raison de l’inexpérience d’une large part de sa clientèle, mais également
de la technicité des opérations et des risques pécuniaires qui s’y attachent 83. A défaut
d’information, la banque peut voir sa responsabilité engagée par le client84.
Cependant, si le client est un professionnel averti, il lui sera difficile de reprocher à
celle-ci d’avoir manqué à son obligation que si c’est un profane.
Toutefois, il faut faire une précision « informer » ne signifie pas
« conseiller » le client. En effet, l’information porte sur les conditions du service
sollicité, alors que le conseil concerne l’opportunité de celui-ci. Cependant, la

81
SAKHO (A), op. cit. p.10.
82
BONNEAU (Th), op. cit, p. 231.
83
Idem.
84
V. infra. p. 31 et suiv.

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frontière entre l’information et le conseil est difficile à tracer. Qu’en est-il des
obligations au cours du fonctionnement du compte et à la clôture ?
B- Les obligations au cours du fonctionnement du compte et à la
clôture
Il faut envisager d’abord, les obligations au cours du fonctionnement du
compte (1) avant d’en venir à la clôture (2).
1- Obligation au cours du fonctionnement du compte
Généralement le compte enregistre les informations correspondantes aux
services bancaires convenus avec le client : paiement de chèque, retrait, octroi de
crédit, utilisation de la carte bancaire, domiciliation de paiement, etc. Donc, la banque
a l’obligation de tenir matériellement le compte du client. Chaque opération
enregistrée au compte engage sa responsabilité. Il en est ainsi en cas d’erreur qui
profite au client. Toutefois, il pourra obtenir la restitution des sommes (répétitions de
l’indu).
Il arrive que le compte, matériellement tenu par la banque, ne fait l’objet
d’aucune intervention depuis une longue période. On parle dans ce cas de compte
dormant. En effet, selon l’art.1 de la loi de 2014 sur le traitement des comptes
dormant85 « tout compte détenu dans les livres d’un organisme financier, qui n’a fait
l’objet d’aucune intervention depuis au moins dix (10) ans, de la part de son titulaire
ou de ses ayants droit et dont ledit titulaire et ses ayants droit ne se sont pas
manifestés sur la même période, en dépit des tentatives menées par l’organisme
financier pour entrer en contact avec eux, notamment sur la base de la documentation
fournie par le titulaire » est un compte dormant.
Dans ce cas de figure, il pèse sur l’établissement de crédit une obligation de
recherche des titulaires ou des ayants droit des comptes qui n’ont fait l’objet d’aucune
intervention depuis au moins huit (8) ans. En l’absence de résultat, la recherche est
poursuivie sur une période de deux (2) ans.
Ainsi, au terme de la deuxième année de recherche et à défaut de retrouver les
titulaires ou leurs ayants droit, les comptes concernés sont considérés comme
dormants. Ce qui fait que l’organisme dépositaire est tenu de le clôturer au terme de la
dixième année suivant la dernière intervention.

85
Loi n° 2014-01 du 6 janvier 2014 relative au traitement des Comptes dormants dans les livres des
organismes financiers des Etats membres de l’Union monétaire Ouest africaine (UMOA). J.O. R .S n°
6767 du 7 janvier 2014.

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Il s’en suit que les avoirs détenus dans le compte clôturé sont transférés à la
BCEAO, trente (30) jours au plus tard suivant la date de clôture. La BCEAO procède
à la conservation des avoirs jusqu’à l’expiration d’un délai de vingt (20) ans, à
compter de la date de transfert par l’organisme dépositaire. Durant cette période elle
publie, par tous moyens appropriés, la liste des titulaires des comptes dormants dont le
solde a été transféré dans ses livres 86.
Il faut enfin noter que le délai de prescription des avoirs dormants est de trente
(30) ans, à compter de la date de la dernière intervention du titulaire du compte ou de
ses ayants droit. Au-delà de ce délai, la BCEAO transfère les avoirs dormants non
réclamés au Trésor public de l’Etat d’implantation de l’organisme dépositaire initial,
dans un délai maximum de trois (3) mois. Ce transfert éteint tous les droits sur les
avoirs concernés qui sont définitivement acquis au dit Trésor public.
Quid des obligations à la clôture ?
2- Obligation à la clôture du compte
Du fait que le contrat est généralement à durée indéterminée chaque partie a un
droit de rupture unilatérale à tout moment. Mais, encore faudrait-il qu’elles l’exercent
à bon escient, légitimement. Ainsi, la banque a l’obligation de clôturer le compte en
cas de décès ou d’incapacité du client dument constaté. A côté des obligations
contractuelles nous avons des obligations professionnelles.
Paragraphe 2 : Les obligations professionnelles
Dans l’exercice de ses fonctions, le banquier (agissant au nom et pour le
compte de la banque) est tenu au respect de certaines obligations professionnelles. Il
en est ainsi de l’obligation de discrétion (A) de l’obligation de vigilance et de non-
ingérence (B).
A- L’obligation de discrétion
L’obligation de discrétion renvoie au secret professionnel (obligation de
réserve) auquel le banquier est tenu. Aux termes de l’article 30 de la loi bancaire « les
personnes qui concourent à la direction, à l’administration, à la gérance, au contrôle
ou au fonctionnement des établissements de crédit, sont tenues au secret
professionnel… ».
86
Selon l’art. 13 al. 2 de la loi de 2014 sur traitement des comptes dormants « La BCEAO ne peut
communiquer les données afférentes à la liste des comptes dormants qu’aux personnes qui établissent
leur droit sur ces comptes, aux Autorités judiciaires et de surveillance du système financier, ainsi
qu’aux Cellules Nationales de Traitement des Informations Financières (CENTIF), dans le cadre de la
lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ».

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Il s’y ajoute également qu’« il est interdit aux mêmes personnes d’utiliser les
informations confidentielles dont elles ont connaissance dans le cadre de leur activité,
pour réaliser directement ou indirectement des opérations pour leur propre compte
ou en faire bénéficier d’autres personnes» 87.
De ce qui précède l’obligation de discrétion s’étend sur tous les employés et
toutes les personnes qui appartiennent aux structures directionnelles des
établissements de crédit.
Ainsi, cette obligation concerne seulement les informations confidentielles
(informations chiffrées) 88 et non les informations d’ordre général qui peuvent être
données par un banquier à un tiers qui se renseigne, notamment, sur la solvabilité de
l’un de ses clients. D’ailleurs, c’est cette distinction fondée sur la confidentialité qui
permet de concilier l’obligation légale au secret et l’usage bancaire de fournir des
renseignements sur les clients89.
Toutefois, cette obligation du banquier n’est pas absolue dans la mesure où
elle est assortie d’exception par la loi bancaire. Selon l’article 53 dernier alinéa de la
loi bancaire « le secret professionnel n’est opposable ni à la commission bancaire, ni
à la banque centrale, ni à l’autorité judiciaire agissant dans le cadre d’une procédure
pénale ». Donc, cette exception concerne les autorités dont leur mission exige dès fois
la levée du secret.
D’autres dérogations peuvent aussi être retenues. Ainsi, dans les instances
civiles ou commerciales si le banquier est entendu comme témoin, dans une affaire
concernant son client, il ne peut lever le secret qu’avec l’accord de celui-ci.
Cependant, en matière de divorce pour la liquidation du régime matrimonial
ou en cas de saisie arrêt, le banquier ne peut refuser de donner les renseignements
demandés en s’abritant derrière le secret professionnel s’il est partie au procès. Il lui
est loisible donc, de révéler les informations utiles à la défense de sa cause.
L’obligation au secret professionnel cède, également, devant les agents du fisc
et de la douane qui disposent d’un droit de communication dans le cadre d’enquêtes
déterminées90. Le banquier est tenu aussi d’une obligation de non-ingérence et de
vigilance.

87
Loi n° 2008-26 du 28 juillet 2008 portant règlement bancaire. J.O.R.S n° 6435 du 1 novembre 2008.
88
Les chiffres renvoient généralement au contenu du compte, le montant ou le mouvement de compte,
les montages financiers etc.
89
Paris 6 février 1975 D. 75, 318, note Vézian. SAKHO, op. cit. p. 12.
90
SAKHO (A), op. cit. p.12.

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B- L’obligation de non-ingérence et de vigilance


Le principe de non-ingérence communément appelé devoir de non immixtion,
impose au banquier de ne pas intervenir dans les affaires de leurs clients. Cette
interdiction s’étend au service de caisse autrement dit les dépôts, les retraits ainsi que
les encaissements. Il est, à cet effet, défendu au banquier de rechercher l’origine et la
destination des fonds. La non-ingérence concerne, également, les opérations de crédit
dans la mesure où le banquier n’a pas à apprécier l’opportunité de l’affectation du
crédit.
Toutefois, le principe de non-ingérence trouve une limite dans le devoir de
vigilance, communément appelé obligation générale de prudence, qui incombe au
banquier. En effet, si le banquier ne s’immisce pas dans les affaires de son client par
respect au principe de non-ingérence, il ne lui est pas interdit en tant que bon
professionnel de s’informer sur les opérations que ses clients veulent faire et au besoin
refuser de prêter concours à de telles opérations s’il constate des anomalies. Ces
dernières peuvent, selon la doctrine, être de deux catégories : matérielles et
intellectuelles
Les anomalies matérielles correspondent essentiellement à des falsifications de
titres comme des endos irréguliers. Quant a l’anomalie intellectuelle, elle renvoie à
l’opération qui apparemment licite ne l’est pas en réalité. Il en est ainsi par exemple
des mouvements bancaire anormaux laissant soupçonner des détournements de fonds
sociaux de la part d’un administrateur91. Faute pour le banquier d’avoir constaté ces
anomalies, il engage sa responsabilité envers les tiers92.

91
Civ. 5 mai 1975, Bull. civ. II, n° 130.
92
BONNEAU (Th), op. cit, p. 226.

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