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Item n° 68

Troubles psychiques de la personne âgée

Particularités de la psychiatrie du sujet âgé


 Spécificité de la sémiologie psychiatrique
 Association significative entre troubles psychiatriques et pathologies médi-
cales non psychiatriques " Prise en charge globale (dimensions somatiques,
psychologique, familiale et environnementale) et multidisciplinaire (psychiatres,
neurologues, gériatres)
 Les troubles organiques (troubles confusionnels et démences) peuvent « mimer »
la sémiologie psychiatrique " toujours éliminer une organicité !
 Présentations cliniques :
— Troubles psychiatriques chroniques « vieillis »
— Troubles psychiatriques « de novo »
 Troubles de l’humeur : dépressif (« dépression unipolaire »), bipolaire (alternance
phases maniaques et dépressives) ou anxieux
 Troubles psychotiques : schizophrénique ou non

Trouble dépressif
 Prévalence :
— 1 à 4 % d’épisode dépressif caractérisé chez les personnes de plus de 65 ans.
— 10 % de plaintes dépressives, ou dépression subsyndromique.
 Facteurs de risque : Pathologies médicales gériatriques (insuffisances d’organes,
douleurs, cancers), perte d’autonomie, iatrogénie, événements de vie négatifs
(veuvage, changement de domicile, institutionnalisation)
 Clinique :
Ö 1 outil clinique de dépistage : le mini-GDS (tableau 1)
Ö Épisode dépressif caractérisé : identique à celui décrit chez l’adulte. Mais
certains symptômes inhabituels peuvent s’y rajouter, tandis que les symptômes
cardinaux (tristesse, anhédonie) peuvent être mineurs, voire manquer. On parle
ainsi de masques dépressifs, pour décrire une symptomatologie derrière laquelle
il faut aller rechercher les symptômes dépressifs plus habituels (figure 1)
 Diagnostic différentiel : Troubles ioniques, métaboliques (hypothyroïdie), neuro-
logiques, et cardiaques, maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson.
 Comorbidités : un syndrome dépressif inaugural chez le sujet âgé doit faire
rechercher une démence, d’autant plus s’il s’accompagne de troubles cognitifs.

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Tableau 1. Le mini-GDS Figure 1. Arbre diagnostique du syndrome dépressif

Vous sentez-vous triste et découragé ? • Oui : 1


• Non : 0 Syndrome dépressif :
1. Psycho-affectif (--) : tristesse de l’humeur, anhédonie,
Avez-vous l’impression que votre vie est vide ? • Oui : 1 anesthésie affective…
• Non : 0 2. Psychomoteur (++) : ralentissement psychomoteur,
apragmatisme, isolement…
Êtes-vous heureux le plus souvent ? • Oui : 0
3. Plaintes somatiques diverses (++)
• Non : 1

Vous sentez-vous désespéré ? • Oui : 1


• Non : 0 • Éliminer une organicité : clinique, examens
Forte probabilité de dépression si score ≥ 1 complémentaires (TSHus, imagerie cérébrale
si symptômes neurologiques)
• Évaluer le risque suicidaire : FDR, urgence, dangerosité

Ne pas oublier : démence et confusion


Trouble bipolaire Trouble dépressif
aiguë !!!

Masque somatique : Masque cognitif : Masque délirant : Masque anxieux : Masque hostile :
• Douleurs mises en • Dépression pseudo- • Idées délirantes • Anciennement • Syndrome de « Tatie
avant, multiples, démentielle, avec variables, à thématique « syndrome Danielle » : irritabilité,
diffuses (articulaires, des troubles cognitifs souvent persécutive, anxio-dépressif ». hostilité, insultes, refus
musculaires, essentiellement de culpabilité, • Le piège est de des soins et des aides
osseuses), plaintes mnésiques, mais sans de jalousie, ou ne regarder que au domicile, troubles
diverses. anosognosie, et au hypocondriaque. l’anxiété, et d’en du comportement.
• Souvent négligées car contraire un vécu • Rares hallucinations oublier la dépression • L’ensemble contrastant
passent pour normales très négatif de ces sous-jacente avec une personnalité
chez la personne âgée, symptômes auparavant souple et
ce qu’elles ne sont pas adaptée

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 Facteurs de risque suicidaire +++ :


Ö Maladie associée (plus le nombre de comorbidités augmente, plus le risque
suicidaire augmente), douleurs.
Ö Perte d’autonomie
Ö Pathologie neuro-dégénérative
Ö Événement de vie : veuvage, institutionnalisation.
 Traitements :
— Traitement médicamenteux :
† Recommandé pour toutes les dépressions moyennes et sévères

† Envisageable pour les dépressions légères.

† ISRS en 1re intention : À débuter à dose divisée par deux par rapport à l’adulte.

† Pas de benzodiazépine, pas d’antihistaminique

— Traitement psychothérapique (en France, aucune psychothérapie n’est plus


recommandée qu’une autre).
— Structures de soin (Hôpital de jour, accueil de jour, équipe ambulatoire)
— Accompagnement familial
— Prise en charge sociale (à évaluer en fonction de la perte d’autonomie).

Trouble bipolaire
 3 formes :
— Vieillissement d’un trouble bipolaire de l’adulte
— Bipolarisation d’un trouble dépressif récurrent
— Apparition d’un trouble bipolaire chez la personne âgée.
† Ce dernier devant impérativement faire l’objet d’examens complémentaires,

pour éliminer un diagnostic différentiel (métabolique, ionique ou neurolo-


gique notamment).
 Iatrogénie : attention, chez la personne âgée, à l’utilisation du lithium, et au risque
élevé d’insuffisance rénale.

Troubles anxieux (TA)


 Prévalence globale des TA : 3.2-14.2 %
Ö Moins fréquents que l’adulte jeune mais l’anxiété subsyndromique est plus
importante et les TA sont sous-diagnostiqués chez la personne âgée (soma-
tisation importante)
 3 femmes pour 1 homme
 Particularités cliniques chez le sujet âgé (tableau 2)

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Tableau 2. Formes cliniques des troubles anxieux

Trouble anxieux • Symptômes essentiellement physiques


généralisé • L’inquiétude est tournée vers l’état de santé, irritabilité accrue

Phobies spécifiques • Prévalence plus importante des phobies « naturelles » (vertige, orage…) que chez l’adulte jeune.
• Attention la phobie de la chute est une entité discutée et discutable dans le cadre des phobies spécifiques
notamment du fait de l’insight souvent diminué voire absent pour cette peur
Trouble obsessionnel • Moins de 1 % des TOC surviennent après 54 ans.
compulsif • Le vieillissement des TOC : augmentation des obsessions phobiques sur le péché religieux, des
obsessions phobiques impulsives, diminution des obsessions de symétrie ; augmentation syllogomanie,
rituel de lavage, de rangement, de vérification, diminution de l’arythmomanie
Trouble panique • Le TP s’amoindrirait avec le vieillissement
• Attention la survenue tardive d’un TP doit faire évoquer un épisode dépressif majeur et rechercher des
attaques de paniques iatrogènes (salbutamol, théophylline, L-thyroxine…)
État de stress • Augmentation des symptômes somatiques, de l’hypervigilance, diminution des symptômes dissociatifs
post-traumatique • 3 sous-types :
– ESPT de novo : traumatisme et survenue de l’ESPT pendant le 3e âge
– ESPT chronique : traumatisme et survenue de l’ESPT avant le 3e âge et s’y poursuivant
– ESPT retardé : traumatisme pendant l’âge adulte et survenue de l’ESPT pendant le 3e âge

Tableau 3. Formes cliniques des troubles psychotiques

Schizophrénie • Vieillissante : symptômes délirants moins fréquents, symptômes affectifs notamment dépressifs plus
importants, troubles cognitifs plus marqués
• Tardive
– D’apparition tardive : Late-onset schizophrenia (après 40 ans)
– D’apparition très tardive : Very late-onset schizophrenia (après 60 ans)
– Prédominance féminine
– Délire prédominant (mécanisme hallucinatoire et interprétatif) et moins de symptômes dissociatifs et
désorganisés par rapport à la schizophrénie vieillissante
Troubles psychotiques • Psychose Hallucinatoire Chronique : prédominance féminine, rarement d’apparition très tardive (début
non schizophréniques entre 40 et 50 ans), mécanisme hallucinatoire principalement (psychosensoriel auditif, olfactif voire
gustatif et automatisme mental), fréquente évolution vers un syndrome démentiel
• Délire de relation des sensitifs de Kretschmer : début le plus fréquemment avant le 3e âge, mais le
diagnostic est souvent tardif donc possible après 65 ans (parfois aussi appelé le délire de persécution
des vieilles filles). Complications dépressives à rechercher systématiquement
• Par désafférentation :
– Syndrome de Charles Bonnet : syndrome hallucinatoire psychosensoriel visuel chez les patients
souffrant d’une baisse majeure de l’acuité visuelle. Hallucinations visuelles très élaborées et
détaillées, très souvent critiquées par le patient et avec peu de retentissement. L’abstention
thérapeutique est souvent de mise, d’autant plus que la résolution est souvent spontanée.
– Paranoïa des sourds : syndrome délirant à thématique de persécution, chez le patient souffrant
d’hypoacousie ou de surdité

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 Comorbidités et complications :
Ö Épisode dépressif majeur très fréquent : la co-occurrence TA-EDM est de moins
bon pronostic et le délai de réponse aux antidépresseurs est souvent plus long
Ö Suicide et tentative de suicide
Ö Addiction : alcool, médicaments anxiolytiques (benzodiazépines +++)
 Traitement :
— Traitement médicamenteux :
† ISRS/IRSNA (escitalopram Seroplex ® , sertraline Zoloft® , venlafaxine

Effexor LP®)
• Même profil de tolérance que chez l’adulte jeune (attention cependant
à l’hyponatrémie par SIADH)
• Délai d’efficacité souvent plus long : 4 à 8 semaines
† Benzodiazépines ne sont jamais le traitement de fond mais traitement

d’appoint uniquement et jamais systématique. Choisir une molécule de


demi-vie courte et dont la pharmacocinétique est peu altérée par le vieillis-
sement (oxazepam : Seresta ®)
† Antihistaminiques (hydroxyzine) sont à proscrire du fait des effets

anticholinergiques
— Traitement psychothérapique : thérapies cognitivo-comportementales (cepen-
dant souvent moins efficace que chez l’adulte jeune, nécessité de programme
spécifique avec plus de rappel des principes théoriques et des exercices à
accomplir au domicile)

Troubles psychotiques
 Prévalence moindre de la schizophrénie chez le sujet âgé (0,6 %) car moindre
survenue au 3e âge et décès précoce des patients schizophrènes
 Particularités cliniques chez le sujet âgé (tableau 3)
 Comorbidités et complications :
Ö Épisode dépressif caractérisé
Ö Syndrome démentiel (les troubles cognitifs liés aux pathologies psychotiques
fragilisent la réserve cognitive du patient en cas de survenue d’une pathologie
neuro-dégénérative et/ou neurovasculaire)
 Résumé des troubles psychotiques (figure 2)

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Figure 2. Arbre diagnostique des troubles psychotiques

Idées délirantes

Éliminer une organicité : clinique, examens complémentaires


(TSHus, imagerie cérébrale si symptômes neurologiques)

Clinique et paraclinique normaux Clinique et/ou paraclinique anormaux

Troubles psychotiques non schizophréniques Schizophrénie Diagnostic différentiel :


• Confusion aiguë
• Iatrogénie médicamenteuse (y compris
Traitement : syndrome de sevrage)
• Traitements médicamenteux • Trouble de l’humeur avec symptômes
Antipsychotiques : utiliser une monothérapie, en cas d’agitation préférer un traitement ponctuel délirants
sédatif de demi-vie courte • Troubles neurodégénératifs (hallucinations
− Schizophrénie vieillissante : si le patient est sous antipsychotiques de 1re génération envisager dans maladie à Corps de Lewy ou la
un switch vers un antipsychotique de 2e ou 3e génération du fait des effets anticholinergiques maladie de Parkinson, délires persécutifs
fréquents des AP de 1re génération. dans la maladie d’Alzheimer évoluée)
− Schizophrénie d’apparition très tardive et troubles délirants non schizophréniques :
antipsychotique de 2e ou de 3e génération (rispéridone Risperdal ®, quétiapine Xeroquel ®)
− Psychose Hallucintaoire chronique : antipsychotique de 2e ou de 3e génération
• Structures de soin
Hôpital de jour spécialisé en Psychiatrie de la Personne Âgée Équipe mobile Suivi ambulatoire
en CMP avec coordination avec le médecin traitant Placement en EHPAD souvent plus précoce
du fait de l’atteinte cognitive fréquente liée aux pathologies psychotiques (travail d’intégration en
EHPAD et lien avec le médecin gériatre coordinateur)
• Bilan neuropsychologique : dès que les symptômes psychotiques sont apaisés
• Prise en charge sociale
ALD 30
APA
Mesure de protection : à discuter avec l’entourage mais souvent nécessaire au vu de l’intrication
trouble psychiatrique et évolution fréquente vers un syndrome démentiel

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Item n° 106

Confusion aiguë et démence


chez la personne âgée (voir item 129)

Définitions
 La confusion aiguë est définie par l’altération brutale ou rapidement progressive
de la vigilance, modérée, incomplète et réversible.
 La démence est une altération des fonctions cognitives durable (au moins 6 mois)
entraînant une dépendance aux actes de la vie quotidienne, d’origine dégénérative
et/ou secondaire à une affection cérébrale.

Diagnostic de la confusion aiguë


 Le diagnostic est clinique (tableau 1) : apparition brusque ou rapidement progres-
sive de troubles neuropsychiques du fait de l’altération de la vigilance.
 Les symptômes suivants peuvent être observés :
— Troubles de la vigilance : incomplets, ils définissent la confusion.
— Troubles attentionnels et cognitifs : difficultés à se concentrer, à communiquer,
altération de la mémoire à court terme, altération du jugement.
— Troubles psychiatriques : anxiété, agressivité, agitation voire hallucinations,
surtout visuelles.
— Fluctuation des symptômes selon le moment de la journée, inversion du cycle
nycthéméral (somnolence diurne, agitation nocturne).
— Amnésie de l’épisode confusionnel une fois ce dernier résolu.

Diagnostic différentiel de la confusion aiguë


 Démence +++ (Tableau 2)
Ö En cas de doute, toute altération aiguë de la cognition est un syndrome confu-
sionnel jusqu’à preuve du contraire !
 Troubles psychotiques aigus (bouffée délirante aiguë, phase maniaque d’une
psychose maniaco-dépressive…)
 Aphasie de Wernicke
 Ictus amnésique

Reconnaître un hématome cérébral sous-dural chronique


(Tableau 3)

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Tableau 2. Diagnostic différentiel confusion/démence

Confusion aiguë Démence

Début Brutal Insidieux, progressif


Tableau 1. Confusion Assessment Method
(CAM) Vigilance Altérée Conservée
(sauf formes
4 Critères définissant la confusion
évoluées)
aiguë :
Fluctuation des Importante, Absente, voire
1. Début brutal et fluctuation des
symptômes aggravation vespérale négligeable
symptômes
2. Troubles de l’attention Humeur Anxiété Peu altérée
3. Désorganisation/incohérence de la Délire Mal systématisé Peu fréquent
pensée
Hallucinations Fréquentes Rares
4. Altération du niveau de conscience/
(visuelles surtout)
vigilance
Activité Souvent augmentée Normale (au début)
• Confusion aiguë = 4 critères ou 1+2 psychomotrice
+ (3 ou 4) Signes Souvent présents Absents (sauf formes
neurologiques évoluées)
Discours Incohérent Normal (au début)

Tableau 3. Hématome sous-dural chronique

• Définition : collection liquidienne limitée par une membrane (caillots en voie de liquéfaction) située entre la
dure-mère et l’arachnoïde, résultant de l’hémolyse d’un hématome passé inaperçu.
• Étiologies : intoxication éthylique chronique, traitement anticoagulant, coagulopathie.
• Clinique : peu spécifique
– Troubles cognitifs
– Signes focaux : hémiparésie, épilepsie
– Signe d’hypertension intra-crânienne : céphalées, troubles de conscience
• Imagerie : Scanner sans injection fait le diagnostic +++
Collection hypodense au parenchyme en forme de croissant
Effet de masse sur les structures corticales = effacement des sillons sur les structures de la ligne médiane

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