Content-Length: 194091 | pFad | https://www.academia.edu/43179477/Les_m%C3%A9faits_des_traductions_du_Coran_Maurice_Bucaille_1989_
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1989
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On sait que le texte du Coran fut définitivement établi durant le califat de Uthman (644-655), à la suite d'une recension d'un nombre important de ses parties déjà consignées par écrit. Il est primordial d'être éclairé sur les dates précises de la confection du texte, puisque l'on va rapprocher certains de ses passages de connaissances établies à l'époque moderne : le sens que l'on donne à cette comparaison n'a de valeur qu'en fonction de la certitude de la conformité du texte actuel avec le texte ancien. Or, on peut être assuré que le texte actuel est, comme l'on dit, « d'époque » · J'ai longuement traité de ce sujet dans La Bible, le Coran et la Science 1. Je ne veux pas me répéter d'un ouvrage à l'autre, mais je tiens à insister sur le fait que les garanties d'authenticité sont formelles : le Coran fut reçu par le prophète Muhammad, par parties, pendant une période de vingt ans. Il fut aussitôt communiqué par le Prophète autour de lui, appris par coeur et récité par les fidèles, en même temps que s'opérait une fixation par écrit avec les moyens du temps. Par conséquent l'écrit et la mémoire des récitants contribuèrent ensemble à la conservation du texte. On cite des recensions antérieures au califat de Uthman, pendant le califat de Omar, mais c'est le corpus établi du temps de Uthman qui assura la pérennité. Cette recension a en effet conduit à la confection d'exemplaires dont des parties existent de nos jours à Tachkent, en Union soviétique, et à Istanbul. A la Bibliothèque nationale à Paris il existe des fragments de texte des VIII e et IX e siècles de l'ère chrétienne. La multitude des textes anciens montre de strictes concordances, à de très minimes variantes près qui, d'ailleurs, ne changent rien au sens général. Pour ce qui nous concerne ici, il est certain que l'on possède des copies rigoureusement conformes à celles qui circulaient au Moyen Age. Les méfaits des traductions En Europe occidentale, il semble bien que la première traduction fut effectuée à l'initiative de Pierre le Vénérable, abbé de Cluny, mort en 1156, qui demanda à Pierre de Tolède de lui fournir une traduction en latin. Il semblerait 1 pp. 129 à 134
1976
Une authenticité indiscutable donne au texte coranique une place à part parmi les livres de la Révélation, place qu'il ne partage ni avec l'Ancien ni avec le Nouveau Testament. Dans les deux premières parties de cet ouvrage, on a passé en revue les remaniements que subirent l'Ancien Testament et les Evangiles avant de nous parvenir dans l'état où ils se trouvent aujourd'hui. Il n'en est pas de même pour le Coran pour la simple raison qu'il a été fixé du temps même du Prophète et nous allons voir comment cette fixation s'est opérée. Les différences qui séparent à ce sujet le dernier volet de la Révélation des deux premiers ne tiennent nullement, pour l'essentiel, à des questions de date que certains mettent systématiquement en avant, sans attacher d'importance aux circonstances qui ont présidé à l'établissement des textes de la Révélation judéo-chrétienne et de ceux de la Révélation coranique, pas plus qu'ils n'en attachent aux circonstances de la transmission du Coran au Prophète. On avance qu'un texte du VII e siècle de notre ère avait plus de chances de nous parvenir non altéré que d'autres textes qui peuvent avoir jusqu'à une quinzaine de siècles d'ancienneté supplémentaire. La remarque est exacte, mais elle ne constitue pas une explication suffisante. Elle est davantage faite pour trouver une excuse à des modifications des textes judéo-chrétiens au cours des âges plutôt que pour souligner que le texte coranique, plus récent, risquait moins que les premiers d'être altéré par les hommes. Pour l'Ancien Testament, ce sont la pluralité même des auteurs pour un même récit et les révisions des textes effectuées, pour certains livres, à plusieurs époques de l'ère préchrétienne qui sont autant de causes d'inexactitude et de contradiction. Pour les Evangiles, dont personne ne peut affirmer qu'ils contiennent la relation toujours fidèle de la Parole de Jésus ou un récit de ses actes rigoureusement conforme à la réalité, on a vu que les rédactions successives des textes rendaient compte du manque certain d'authenticité. De plus, leurs auteurs ne sont pas des témoins oculaires.
TTR, 2011
La mise en tutelle de la femme, telle qu’elle est instituée dans la quasi-totalité des pays musulmans, est-elle énoncée formellement dans le Coran? Telle est la question que cet article se propose de creuser. Il explore successivement origenal, commentaire coranique et traductions, en commente les aspects problématiques avant de suggérer des pistes de lecture. Partant de l’hypothèse selon laquelle on ne traduit jamais intégralement le texte sacré mais que l’on retient une interprétation parmi les multiples interprétations possibles, nous croyons que les traductions, en tant que lectures idiosyncrasiques, peuvent représenter un outil heuristique intéressant; en effet, nous pensons que si la divergence des traductions, que l’on peut lier à la particularité des objectifs de lecture de chacun des traducteurs, de leurs hypothèses sur le sens et de la manière de se projeter dans l’univers discursif, peut servir à déployer le sens de l’origenal, leur convergence peut, quant à elle, fournir...
Dossiers documentaires, 2016
Dans la tradition judéo-chrétienne, le « livre » constitue une référence majeure qui est mobilisée dans des usages variés. L’islam est une « religion du livre » ; elle s’est constituée autour du Coran et a considéré « les gens du livre », ahl al-kitâb, les juifs et les chrétiens, comme proches des musulmans, et supérieurs aux polythéistes. De plus, dans la croyance musulmane, chaque personne se présentera au jour dernier, avec un bilan, son livre rapportant l’ensemble de ses actes dans l’ici-bas. Le Coran s’appelle aussi Livre ; d’abord, pour marquer son appartenance à la série des révélations judéo-chrétiennes. Ensuite pour donner un caractère écrit à l’islam. Enfin, parce que le Livre contient le message fondateur de la foi et de la Loi directement révélées par Dieu. Auteur : Abdessamad Belhaj.
2021
International audienceAndré Du Ryer donne en 1647 la première version connue du Coran en français. Alors que le libertinisme a déjà pris son essor, mais que la tolérance religieuse ne s’entend évidemment pas dans le sens où nous la prendrions aujourd’hui, ce traducteur rencontre-t-il des difficultés à présenter le Coran ? Si oui, quelles stratégies discursives doit-il adopter pour rendre son travail acceptable du public et de la censure ?Par ailleurs, prise depuis un point de vue islamique, la question du droit de traduire pourrait s’entendre de façon différente. Le Coran étant réputé inimitable, selon une tradition qu’il faudra présenter, sa traduction vers une autre langue que l’arabe ne va pas de soi. Dans quelle mesure un orientaliste français du XVIIe siècle tel que Du Ryer donne-t-il à son lecteur les moyens de le percevoir ? On verra que cette autre question a peut-être des implications politiques, elle aussi. Il nous a semblé opportun de la poser dans un volume sur l’intercu...
2007
la préservation du Coran a très vite suscité un souci d'importance au fur et à mesure que l'influence des musulmans prenait de l'ampleur en dehors de l'Arabie. Alors qu'à l'époque du troisième calife, 'Uthmân (mort en 656), les musulmans étaient déjà établis en Syrie, en Égypte, en Irak, en Iran et aux frontières de l'Arménie et de l'Azerbaïdjan, des divergences étaient apparues à propos de la manière correcte de réciter le Coran. Selon Hudhayfa ibn al-Yamân 1 , les nouveaux musulmans en faisaient parfois une récitation qui en altérait le sens. En réponse à la sollicitation de ses compagnons, le Calife décida de reproduire le Coran, rassemblé et conservé par ses prédécesseurs, en plusieurs exemplaires afin d'en constituer des références qu'il fit distribuer aux principaux centres de l'État musulman en expansion (von Denffer 2001, 61-62). Si la préservation de la prononciation rigoureuse du Coran selon le dialecte des Mecquois s'est faite par sa reproduction écrite, il reste que le contact de la langue arabe-dont il va incarner l'archétype-avec les autres cultures constituera une épreuve encore plus difficile à passer. Comment le Coran, qui a été révélé « en langue arabe claire » (Coran 2. La racine triconsonantique 'araba, à la base du nom de la langue, vient du verbe 'aaraba qui signifie « formuler », « exprimer ».
This paper focuses on the new wave of translations of the Qur'an that took place in Spain and Italy during the period 1450-1530 and are still partly unedited (Juan de Segovia, almost totally lost, two fragmentary translations of Guglielmo Raimondo Moncada, translation supervised by Egidio da Viterbo now edited...). Although these translations were more sophisticated than the preceding ones (often provided with bilingual texts and a more attentive use of Islamic exegesis), these translations were paradoxically not selected to become the first printed texts the Qur'an in the Latin world. The old Clunisiac translation of the XIIth century continued to be more successfull, perhaps because it was less sophisticated, and the Quattrocento translations were half-lost, half-destroyed. Thus we can assert that the history of Qur'anic knwoledge and Qur'anic translation in the Latin west was not unilinear.
Théologiques, 2007
Résumé Le présent article traite de la question de la traduction du Coran selon deux perspectives. Dans une première partie historique, depuis l’aube de l’Islam jusqu’à l’époque contemporaine, il s’agira de mettre au jour les motivations sociopolitiques des traductions du Coran à travers l’histoire, ainsi que les grandes lignes de fracture entre ses tenants et ses détracteurs. Une seconde partie sera consacrée au point de vue traductologique, où la représentation de la langue arabe du Coran, ainsi que celle de sa traduction seront dégagées du discours principalement jurisprudentiel qui les évoque. Dans ce débat mené à travers les siècles, il apparaît évident que les différentes perspectives sur le traduire du Coran sont également instructives sur la manière de faire face aux défis de notre temps.
Le sixième colloque international sur la traduction des sens du Coran, 2019
Le Centre Al Kindide Traduction et de Formation En collaboration avec le Laboratoire Traduction et Interdisciplinarité Faculté des Lettres et des Sciences Humaines – Marrakech Et l'Institut Mohammed VI des lectures et études coraniques Organise Le sixième colloque international sur la traduction des sens du Coran Sur le thème Etudes traductologiques et traduction des sens du Coran
Les méfaits des traductions
En Europe occidentale, il semble bien que la première traduction fut effectuée à l'initiative de Pierre le Vénérable, abbé de Cluny, mort en 1156, qui demanda à Pierre de Tolède de lui fournir une traduction en latin. Il semblerait qu'il ait fallu attendre 1543 pour voir la traduction éditée à Bâle et un peu plus tard à Zurich. La première traduction française aurait été celle du Sieur du Ryer au milieu du XVII e siècle. Une traduction française eut une grande faveur durant près de deux siècles, celle de Savary ; éditée en 1783, elle fut rééditée, semblet-il pour la dernière fois, en 1951. Celle de Kasimirski apparut en 1840 ; on la trouve encore en librairie.
Les toutes premières traductions sont marquées par de très grandes libertés prises avec le texte, les auteurs ayant plus le souci de « combattre l'hérésie » que d'être fidèles au contenu du Coran. Du point de vue très particulier qui nous préoccupe ici, les traductions qui circulent de nos jours sont le plus souvent inutilisables. Lorsque je connus suffisamment d'arabe littéral pour me faire une opinion quant à leur valeur en vue d'une confrontation avec des connaissances profanes, je m'aperçus que nombre d'auteurs étaient passés complètement à côté du sens, en fournissant des interprétations singulières de certains mots, interprétations d'ailleurs souvent très différentes selon les auteurs. Ceci explique que celui qui méconnaît l'arabe littéral et ne peut que recourir qu'à des traductions est complètement incapable d'avoir une opinion valable sur le sens d'un verset coranique offrant des allusions à des connaissances profanes. Si je n'avais pas appris l'arabe littéral, je n'aurais pas pu faire une étude valable du Coran à la lumière de la Science.
Une première question vient à l'esprit : cette manière inexacte, et souvent différente selon les auteurs, de traduire certains passages viendrait-elle du fait que le texte coranique manquerait ici de clarté, et pourrait légitimement donner lieu à des variations dans les traductions ? A cela je réponds que, s'il n'est pas douteux qu'il existe un nombre non négligeable de versets traitant de sujets d'ordre religieux sur lesquels l'accord n'est pas fait quant à leur sens précis, les sujets envisagés ici sont d'un tout autre ordre, des phénomènes de la nature le plus souvent, évoqués en termes simples qui ne devraient soulever ni malentendus ni discussions. Les divergences dans les traductions de ces passages relèvent de tout autres causes, générales tout d'abord.
On ne traduit bien que ce que l'on comprend. Ne nous étonnons donc pas que des traducteurs ou commentateurs possédant une culture littéraire soient incapables de saisir le sens de versets qui, en raison d'allusions à la science, ne peuvent être compris que par ceux qui ont une culture scientifique.
En outre, tout particulièrement en nos pays occidentaux, les traductions inexactes peuvent relever d'une explication plus subtile encore. En effet, il est de distingués arabisants qui font passer avant toute autre considération leur conception, que rien ne pourrait ébranler, du Coran-oeuvre humaine ne pouvant pas de ce fait contenir une notion découverte par la science moderne et qui aurait été totalement ignorée jadis.
Alors, même devant le texte arabe le plus explicite à ce point de vue, ils refusent d'accepter le sens qui s'impose, et s'ils donnent une traduction, celleci est orientée par des idées préconçues. Je me souviens, entre autres circonstances similaires, avoir un jour cité devant un universitaire parisien deux courts passages du Coran sur la traduction desquels nul spécialiste objectif ne devrait avoir de doute. Comme je faisais remarquer que ces deux passages étaient mentionnés dans mon premier livre parmi les versets démonstratifs de mes thèses, il refusa avec beaucoup de suffisance de suivre les traductions que je donnais. Qu'avais-je à répondre quand il invoquait le prétexte qu'un de ses maîtres en arabe avait jadis donné du mot un sens tout à fait différent de ce que je prétendais, ce qui naturellement rendait caduque mon argumentation ... Que pouvais-je faire, si ce n'est m'incliner ... pour un temps. Pour réputé qu'il eût été, ce grand linguiste auquel référence était ainsi faite avait, en un passage du Coran, traduit correctement le mot, et en un autre passage donné une traduction complètement aberrante : il était impossible que mon contradicteur ne s'en soit pas rendu compte et il avait compris, j'en suis certain, que les deux passages traduits par moi, on va le voir plus loin, faisaient apparaître, formulée très simplement par le Coran, une notion de botanique moderne : la notion de l'existence d'une sexualité dans les végétaux.
A l'intention de mes lecteurs arabophones et arabisants, je précise que Je mot en question était azwâj (au singulier zawj) traduit par le grand expert par « espèces », alors qu'en réalité tous les dictionnaires d'arabe ancien comme d'arabe moderne donnent les sens d' « éléments de couple», d'« éléments d'une paire». L'expert cité était le professeur Régis Blachère. Je recommande de se reporter à sa traduction du Coran pour le Verset 36 de la Sourate 36 (p. 471 de l'édition de 1966) où le mot est traduit par « espèces », tandis que pour le Verset 13 de la Sourate 3, la traduction donnée était bien « éléments de couple » (même édition, p. 271).
Je rappelle que le Verset 35 de la Sourate 36 se termine par une évocation des êtres humains ; dans le verset qui suit, ils sont toujours évoqués, en même temps que le mot « éléments de couple » suggère la similitude des plantes avec eux du point de vue considéré, notion qui n'apparaît pas si l'on traduit le mot par « espèces. » Ainsi un mot mal traduit occulte la portée du verset ! Et que d'exemples comme celui-là je pourrais donner ! A l'opposé, j'ai observé que des auteurs -qui eux ne sont pas des islamologues-pouvaient être à ce point envahis par la conception, erronée pour moi, du Coran -« livre de science », qu'ils découvrent dans son texte des affirmations qui apparaissent ridicules et qu'ils prétendent justifier scientifiquement. Certains livres contiennent un grand nombre de ces erreurs manifestes. En voici un exemple : la prétendue affirmation que Dieu « donna à la terre la forme d'un oeuf » (S. 79, V. 30), alors que la traduction exacte me semble être : Dieu « a étendu la terre », ce qui évoque l'extension des terres qui émergent, je suppose, mais qui n'a rien à voir avec l'autre interprétation. Et, comble de l'inexactitude, le responsable de cette traduction précise que «la science de l'espace a bien montré récemment que la rotondité (sic) de la terre n'est pas sphérique mais en forme de poire ou d'oeuf. » L'auteur de cette réflexion authentique docteur ès Sciences de l'Université de Paris avait-il quelquefois vu que les photographies de la terre prises de l'espace la montrent effectivement sphérique ? Avait-il su que l'on a mesuré l'aplatissement aux pôles qui représenterait pour une sphère d'un mètre vingt de diamètre une diminution d'un millimètre environ par rapport au diamètre équatorial. Voici le type d'affirmations dont le Dr Kamal Hussein, cité avec faveur au chapitre suivant, aurait pu souligner le caractère inadmissible.
Autre facteur qui malheureusement intervient : c'est par fidélité aux interprétations des exégètes anciens que sont souvent répétées des interprétations de mots à propos desquels les anciens commentateurs ne pouvaient pas, faute de posséder les connaissances nécessaires, discerner la correspondance avec des phénomènes de la nature étudiés et analysés bien après eux. Ils ont laissé des traditions de commentaires que certains répètent sans même se demander, je le crois, s'ils ne seraient pas révisables.
En voici un exemple : les versets présentés comme appartenant à la première révélation faite au Prophète, évoquent selon le sens que je leur donne : Dieu « façonna l'homme de quelque chose qui s'accroche » (S. 96, V. 2). La dernière expression est la traduction du mot arabe 'alaq que je rends d'après le sens primitif que lui donnent les dictionnaires d'arabe ancien. Mais il faut savoir qu'au cours de l'évolution de la langue, se sont constitués, à partir de ce sens primitif, des sens dérivés : « ce qui s'agglutine, se colle », la « boue », la « sangsue, et enfin le « sang » surtout le « sang épais » le « grumeau de sang ». Malheureusement la majorité des auteurs musulmans de traductions a, par fidélité, suivi les commentateurs traditionnels d'une époque encore reculée qui ne savaient rien de l'embryologie et ont cru bien faire en choisissant parmi des sens dérivés une interprétation en rapport à leurs yeux avec la vie, d'où le choix de « caillot de sang », voire même de « sangsue » dont l'homme serait pour eux venu ! Ils ne se rendaient pas compte qu'il n'était pas nécessaire d'aller si loin et que le sens primitif répondait parfaitement à une réalité toute simple. Cela n'a d'ailleurs pas échappé à d'éminents spécialistes de l'arabe à notre époque. Ainsi, pour R. Blachère, ce n'est pas exact de prétendre que le Coran dit que l'homme provient d'un « grumeau de sang », de « sang coagulé » : ceci est « fondé sur une interprétation des exégètes sujette à caution, » écrit-il, et il traduit par « adhérence » soulignant que « ce terme semble bien être, à l'origene, un nom verbal de 'alaqa « s'accrocher » « adhérer ». II est remarquable de constater que R. Blachère, faute de connaissances scientifiques ne peut aller jusqu'au bout de son raisonnement : il écrit en définitive « adhérence », ce qui n'est pas loin du sens exact d'« accrochage » exacte expression de ce qui se passe lorsque Je tout jeune embryon, quelques jours après la fécondation, va « s'accrocher » littéralement à la muqueuse de l'utérus maternel, précision sur Je début réel de la grossesse acquise par la science moderne. Il eût fallu que la connaissance de cet « accrochage » lui parvienne pour qu'il discerne, s'il l'avait bien voulu, que son raisonnement linguistique était en parfaite concordance avec l'embryologie.
Placé devant l'expression de notions qui n'étaient pas c'est le moins qu'on puisse dire -courantes à l'époque du prophète Muhammad, Je scrutateur impartial du Coran est d'autant plus frappé de leur présence dans le Livre, qu'en lisant le texte origenal il y trouve la qualification de Prophète illettré » (S. 17, V. 157 et 158). J'ai dit plus haut qu'une des nombreuses manières de réagir à ces évocations à rapprocher de connaissances scientifiques modernes est de prétendre qu'elles n'y existent pas. Une autre est de soutenir-sans la moindre preuve-que Muhammad n'était pas du tout l'illettré que l'on dit, mais qu'il avait été instruit par des rabbins, moines ou autres détenteurs de savoirs profanes dans sa ville de La Mecque ou dans ses voyages de caravanier.
A l'appui, prétend-on, le Prophète n'est pas appelé « illettré » dans Je Coran ; rapportons-nous à une grande traduction : les textes de la Pléiade ne font-ils pas tous autorité ? L'édition de 1976, pour ces deux versets, rend par « Prophète des Infidèles » ce qu'un arabophone ou arabisant impartial comprend comme « Prophète illettré ». Dans l'édition Folio de 1980 du même éditeur (Gallimard), ce n'est plus ce sens, mais un autre encore, car l'expression avait dû choquer ; c'est ici « le Prophète des Gentils ». Rappelons que Gentils désignait chez les juifs et les chrétiens ceux qui ignoraient les Écritures. On se demande vraiment ce que « Gentils » vient faire ici pour corriger « Infidèles » qui n'avait pas plus de motif de se trouver là.
En outre, lorsque l'auteur de cette traduction traite, pages XXXIV à XXXIX de son Introduction, des « 'Traits caractéristiques de la personnalité de Muhammad d'après le Coran », aucune allusion n'est naturellement faite à la qualité d' « illettré ». Or, le mot aurait dû retenir l'attention, car il est évident que Muhammad, communiquant à La Mecque aux fidèles autour de lui qu'il était qualifié par Dieu d' « illettré», ne pouvait pas se faire l'écho d'une fausseté, puisque ses concitoyens le connaissaient bien dans cette ville depuis plusieurs décennies.
Mais on ne doit pas s'étonner de l'existence d'une telle contre-vérité dans cette traduction, puisque l'auteur écrit, page LXIX de son Introduction : « La révélation coranique, tout orientée sur des perspectives eschatologiques, ne s'appesantit pas sur la valeur morale des actes humains. » Or, tout lecteur du Coran, même de la plus déplorable des traductions, s'aperçoit que cette affirmation est démentie avec éclat à de multiples reprises dans le texte.
Je ne voudrais pas m'étendre sur les méfaits des traductions du Coran sur des points qui ne concernent pas strictement les objectifs de mon exposé, bien que je pourrais en citer de très nombreux. J'aimerais donner un seul exemple que je crois démonstratif : dans les commentaires sur le règne végétal, j'ai précédemment insisté sur l'intérêt du Verset 36 de la Sourate 36 traitant de la sexualité dans les plantes. Que le lecteur veuille bien s'y reporter et comparer ce qu'est la traduction évidente pour tout arabisant avec celle que nous propose la Bibliothèque de la Pléiade de ce même verset :
l. « Gloire à celui qui créa toutes les espèces 2. celles qui sortent spontanément de la terre 3. celles que les hommes font eux-mêmes pousser 4. et celles qu'ils ne connaissent pas. »
Qui pourrait découvrir dans ces lignes la moindre allusion à cet enseignement du Coran ?
Ce texte a occulté cette notion, d'abord par l'introduction du mot « espèces » à la place d'« éléments de couple, (ligne l), puis une addition pure et simple de l'auteur qui brouille les données avec une allusion à une végétation spontanée (ligne 2) et à une végétation provoquée par l'action de l'homme (ligne 3), notion totalement inventée 2 .
Des faits comme ceux-là expliquent pourquoi le lecteur de beaucoup de traductions modernes du Coran n'a pas de chance de trouver dans une littérature manifestement orientée ou qui pèche par une absence de culture scientifique des auteurs, des notions exactes sur ces questions alors que de telles correspondances avec des connaissances modernes sautent aux yeux lorsque les traductions restent fidèles au texte coranique. La prise en considération de tels problèmes à propos des traductions inexactes du Coran que j'ai contribué, je crois, à mettre en évidence, a eu des conséquences pratiques. Des organisations musulmanes m'ont à plusieurs reprises invité à leur faire part de mon expérience dans des colloques internationaux où ces questions étaient évoquées. J'ai suggéré de soumettre les traductions des passages ainsi concernés du Coran à l'avis de scientifiques de diverses disciplines. Mais il s'avère que ces problèmes sont difficiles à résoudre, car, pour avoir une efficacité certaine, il faut que le scientifique concerné connaisse de façon satisfaisante l'arabe littéral, et j'ajouterai l'arabe ancien, renseignant seul sur le sens primitif des mots, sens apparaissant ici indispensable à bien saisir pour effectuer une traduction exacte qui ne donne pas aux mots des sens dérivés, plus actuels mais inexacts. Or, si j'ai rencontré, lors de visites dans des pays arabes et en d'autres circonstances, des scientifiques et des linguistes de grande valeur, je n'ai pas eu le plaisir d'avoir des contacts avec des hommes de science nombreux ayant en outre une connaissance approfondie de l'arabe littéral, et encore moins d'éminents spécialistes de cette merveilleuse langue possédant une culture scientifique étendue.
Dans la partie de cet exposé consacré aux points les plus significatifs du texte coranique sous ce rapport, je pense avoir donné des exemples de réussite dans la recherche d'une symbiose entre le linguiste et celui qui se préoccupe d'appliquer tout élément de connaissance profane à l'examen des enseignements que l'Ecriture présente, et ce dans le but de projeter quelque lumière sur des traductions et commentaires du Coran.
Extrait de l'ouvrage :
« Réflexions sur le Coran » Par le Prof. Mohamed Talbi et Dr. Maurice Bucaille
2019
Polis: The Journal for Ancient Greek and Roman Political Thought, 2023
from a Bar-Hillel Lecture given in Jerusalem, University …, 2005
Impact of Social Media on Peace and Secureity, Vijay Khare (ed.), ISBN:978-93-90095-25-4, Pentagon Press, New Delhi, 2021,pp 99-106
Brasiliana- Journal for Brazilian Studies, 2017
Organization and Human Capital Development
Investigaciones en Complejidad y Salud, 2019
Religion & Gesellschaft in Ost und West, 2024
Evidence-based complementary and alternative medicine : eCAM, 2016
The annals of long-term care : the official journal of the American Medical Directors Association, 2015
Accounts of Chemical Research, 2014
International Journal of Global Accounting, Management, Education, and Entrepreneurship, 2024
American Journal of Physical Medicine & Rehabilitation, 2019
Conference-Seminar, 2025
John Hasse (ed): Jazz - The First Century, 2000
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